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Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a formulé à l’encontre de l’intimé des allégations d’abus de pouvoir au motif que celui-ci n’aurait pas évalué adéquatement ses qualifications; qu’il aurait fait preuve de discrimination à son égard en raison de sa race et de son origine ethnique; qu’il aurait enfreint les politiques ministérielles et fourni des renseignements trompeurs dans le guide d’évaluation. Il a ajouté que l’un des membres qui l’ont reçu en entrevue ne parlait pas couramment l’anglais et que la personne nommée a bénéficié d’un favoritisme personnel. L’intimé a nié tout abus de pouvoir dans le processus de nomination. Il a soutenu que le plaignant avait été évalué correctement et sans discrimination. D’après l’intimé, la candidature du plaignant a été éliminée parce qu’il ne possédait pas trois qualifications essentielles liées aux capacités. L’intimé a nié avoir enfreint les politiques ministérielles ou fourni des renseignements trompeurs dans le guide d’évaluation. Il a ajouté que tous les membres du comité d’évaluation possédaient les compétences linguistiques requises pour évaluer le plaignant. Enfin, il a fait valoir que la personne nommée au poste l’a été parce qu’elle était la bonne personne pour le poste et non du fait de sa qualité de francophone. Décision Le Tribunal a estimé que le plaignant n’avait pas réussi à établir la preuve d’un abus de pouvoir de la part de l’intimé dans la façon dont celui-ci avait évalué les qualifications du plaignant. Le Tribunal a jugé d’autre part que les actions et les événements évoqués par le plaignant dans son témoignage, même avérés, n’établissaient pas une preuve prima facie de discrimination. Son allégation de discrimination se fondait entièrement sur sa conviction par rapport à ce qui se passait dans l’esprit des membres du comité d’évaluation, sans l’apport de preuve concordante. L’intimé avait fourni une explication raisonnable et non discriminatoire pour justifier sa décision de ne pas choisir le plaignant : celui-ci ne possédait pas trois qualifications essentielles liées aux capacités. L’intimé n’a pas enfreint les politiques ministérielles ni fourni des renseignements trompeurs dans le guide d’évaluation. Le plaignant n’a pas su prouver que l’un des membres du comité d’évaluation ne maîtrisait pas suffisamment l’anglais pour l’évaluer convenablement. Enfin, le Tribunal a conclu que le plaignant n’avait pas établi la preuve d’un favoritisme de l’intimé à l’égard de la personne nommée du fait que celle-ci est francophone ou pour toute autre raison. Plainte rejetée.

Contenu de la décision

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Dossier :
2009-0458
Décision
rendue à :

Ottawa, le 6 décembre 2011

ISAAC JALAL
Plaignant
ET
LE SOUS-MINISTRE DE RESSOURCES HUMAINES ET DÉVELOPPEMENT DES COMPÉTENCES CANADA
Intimé
ET
AUTRES PARTIES

Affaire :
Plainte d’abus de pouvoir en vertu de l’article 77(1)a) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique
Décision :
La plainte est rejetée
Décision rendue par :
John Mooney, vice-président
Langue de la décision :
Anglais
Répertoriée :
Jalal c. le sous-ministre de Ressources humaines et Développement des compétences Canada
Référence neutre :
2011 TDFP 0038

Motifs de décision


Introduction


1 Le plaignant, Isaac Jalal, a participé à un processus de nomination interne annoncé visant à doter des postes de conseiller aux groupes et aux niveaux PM-05 et AS-05 à Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC). Il a déposé une plainte d'abus de pouvoir à l'encontre de l'intimé, le sous-ministre de RHDCC, au motif qu'au cours du processus de nomination celui-ci n'aurait pas évalué adéquatement ses qualifications; qu'il aurait fait preuve de discrimination à son égard en raison de sa race et de son origine ethnique; qu'il aurait enfreint les politiques ministérielles et fourni des renseignements trompeurs dans le guide d'évaluation. Il ajoute que Linda Ducharme, une des personnes ayant participé à son entrevue, ne parlait pas couramment l'anglais, et que le comité de sélection a fait preuve de favoritisme personnel à l'égard de Sandra Langlois, la personne nommée, parce qu'elle est francophone.

2 L'intimé nie avoir abusé de son pouvoir dans le processus de nomination. Il soutient que le plaignant a été évalué correctement et sans discrimination. Sa candidature a été éliminée du processus de nomination parce qu'il lui manquait trois qualifications essentielles. L'intimé nie également avoir enfreint les politiques ministérielles ou fourni des renseignements trompeurs dans le guide d'évaluation, et affirme que les membres du comité de sélection possédaient les compétences linguistiques requises pour évaluer le plaignant. Il fait également valoir que Mme Langlois a été nommée parce qu'elle était la bonne personne pour le poste et non parce qu'elle est francophone.

3 La Commission de la fonction publique (CFP) n'était pas représentée à l'audience, mais a présenté des observations écrites dans lesquelles elle explique les lignes directrices et les guides pertinents qui s'appliquent aux processus de nomination. Par exemple, ses Lignes directrices en matière d'évaluation précisent que les méthodes et les outils d'évaluation doivent permettre d'évaluer correctement les qualifications des candidats. La CFP n'a pas pris position quant au bien-fondé de la plainte.

Contexte


4 Le plaignant est fonctionnaire depuis 25 ans. Il travaille actuellement à RHDCC comme agent d'interprétation de la législation et des politiques au groupe et au niveau PM-04.

5 En mai 2008, l'intimé a publié une annonce de possibilité d'emploi sur Publiservice dans le but de doter pour une période indéterminée neuf postes de conseiller aux groupes et niveaux PM-05 et AS-05 qui devaient devenir vacants, et ce, par l'entremise d'un processus de nomination interne annoncé (processus 2008-CSD-IA-NHQ-51089). L'annonce indiquait que le processus pourrait servir à doter à l'avenir d'autres postes identiques ou semblables.

6 Les méthodes d'évaluation utilisées pour le processus comprenaient l'examen des curriculum vitae, un examen écrit, une entrevue et la vérification des références. La candidature du plaignant a été éliminée parce qu'il lui manquait trois qualifications essentielles évaluées à l'entrevue.

7 Le 8 juillet 2009, l'intimé a publié une notification de nomination ou de proposition de nomination (l'avis de nomination) sur Publiservice concernant la nomination de Mme Langlois au poste de conseillère de niveau PM-05.

8 Le 10 juillet 2009, le plaignant a présenté une plainte d'abus de pouvoir au Tribunal de la dotation de la fonction publique (le Tribunal) en vertu de l'article 77(1)a) de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13 (la LEFP).

9 Six autres personnes ont été nommées par l'entremise du même processus de nomination à différents moments. Aucune plainte n'a été présentée concernant ces six nominations. Le bassin de candidats qualifiés est arrivé à expiration le 31 mars 2011.

10 Le plaignant a avisé la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP) qu'il entendait soulever une question liée à l'interprétation ou à l'application de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H-6 (la LCDP). La CCDP a fait savoir au Tribunal qu'elle n'avait pas l'intention de présenter d'observations relativement à cette plainte.

Questions préliminaires


Les éléments de preuve reçus après l'audience

11 Après la clôture de la preuve à l'audience, les parties ont accepté de présenter leur argumentation par écrit.

i) Les réponses que le plaignant se souvient d'avoir fournies à l'entrevue

12 Le plaignant a présenté son argumentation écrite le 28 janvier 2011. Il y affirme que le comité d'évaluation n'a pas noté l'intégralité des réponses qu'il a fournies aux trois questions d'entrevue. Afin de corriger cette omission, le plaignant a décrit les réponses qu'il se rappelle avoir données pour ces trois questions. Sa description écrite contient plusieurs nouveaux éléments qui ne figurent pas dans les notes prises par les membres du comité d'évaluation au moment de l'entrevue et qui n'ont pas été mentionnés par le plaignant dans le témoignage oral qu'il a présenté à l'audience. L'intimé avance que ces nouveaux éléments de preuve ne sont pas admissibles, vu que la preuve a été close à la fin de l'audience.

13 La jurisprudence concernant la présentation de nouveaux éléments de preuve après la clôture de l'audience indique que cette question est laissée à la discrétion du membre du Tribunal saisi de l'affaire et que celui-ci doit exercer ce pouvoir discrétionnaire avec prudence et circonspection. De fait, le caractère définitif de l'audience est essentiel dans le contexte du système judiciaire, et une audience ne devrait être rouverte pour accepter de nouveaux éléments de preuve que dans les cas où l'intérêt de la justice l'exige. Voir la décision 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada inc., 2001 CSC 59 (CanLII).

14 Pour déterminer s'il faut accepter les nouveaux éléments de preuve présentés par le plaignant concernant les réponses qu'il a fournies aux questions d'entrevue, le Tribunal a appliqué le critère énoncé dans la décision Whyte, Kasha c. Canadian National Railway, 2010 TCDP 6 (CanLII). Selon ce critère, les trois conditions suivantes doivent être réunies pour que de nouveaux éléments de preuve puissent être acceptés lorsqu'un tribunal n'a pas encore formulé sa conclusion finale :

  1. il doit être établi que même en faisant preuve de diligence raisonnable il n'aurait pas été possible d'obtenir les éléments de preuve pour présentation au procès;
  2. les éléments de preuve doivent être susceptibles d'influer substantiellement sur l'issue de l'affaire, quoiqu'ils n'aient pas à être déterminants;
  3. les éléments de preuve doivent être vraisemblables ou, autrement dit, ils doivent paraître crédibles même s'il n'est pas nécessaire qu'ils soient irrécusables.

15 Le Tribunal conclut qu'il ne peut accepter ces nouveaux éléments de preuve à l'étape de l'argumentation écrite, car ils ne remplissent pas la première condition du critère de la décision Whyte. Au cours de son témoignage, le plaignant a eu amplement l'occasion de décrire ce qu'il estime avoir répondu au comité d'évaluation. Qui plus est, ce serait très inéquitable à l'endroit de l'intimé que d'accepter les nouveaux éléments de preuve, puisque celui-ci n'a pas eu la possibilité de contre-interroger le plaignant quant à leur fiabilité, particulièrement compte tenu du fait que la description des réponses fournies par le plaignant semble se fonder sur son souvenir d'une entrevue qui remonte à un an et demi.

ii) Les documents fournis avec la réponse du plaignant

16 Le 4 mars 2011, le plaignant a fait parvenir au Tribunal sa réponse à l'argumentation écrite de l'intimé. Il y a joint quatre documents qu'il a numérotés C-1-à-C-4, ainsi qu'une annexe. L'intimé a demandé au Tribunal de ne pas tenir compte de ces documents car ils ont été présentés après la clôture de la preuve.

17 Le document C-1 comprend six courriels échangés par le plaignant et l'intimé, dont quatre avaient déjà été présentés au Tribunal. Ceux-ci ont donc déjà été versés au dossier.

18 Les deux courriels du document C-1 qui n'avaient pas été présentés à l'audience datent du 17 juin et du 21 juillet 2009.

19 Dans son courriel du 17 juin 2009, le plaignant, après avoir appris que sa candidature n'avait pas été retenue, demande à rencontrer l'intimé. Le Tribunal n'accepte pas ce nouvel élément, car il ne satisfait pas aux deux premières conditions du critère de la décision Whyte. Le plaignant aurait pu produire cet élément de preuve à l'audience, étant donné qu'il l'avait déjà en sa possession. Par ailleurs, celui-ci n'a aucune incidence sur l'issue de la plainte : le fait que le plaignant a demandé à rencontrer l'intimé pour une discussion informelle ne porte aucunement à conséquence.

20 Dans son courriel du 21 juillet 2009, le plaignant demande à l'intimé une copie de la notification de candidature retenue. Le Tribunal n'accepte pas non plus cet élément de preuve, car il ne satisfait pas aux deux premières conditions du critère de la décision Whyte. Le plaignant avait ce courriel en main avant l'audience et aurait pu l'y présenter. De plus, le fait que le plaignant ait demandé à l'intimé une copie de la notification de candidature retenue n'a aucune incidence sur l'issue de la plainte. Comme il est expliqué plus loin dans ces motifs, c'est au plaignant qu'il incombait d'obtenir les avis de nomination publiés sur Publiservice.

21 Le document C-2 contient trois courriels échangés par le plaignant et le Tribunal concernant l'obtention d'une copie de l'avis de nomination. Ces courriels ne constituent pas de nouveaux éléments de preuve; ils ne satisfont pas aux deux premières conditions du critère de la décision Whyte.

22 Le document C-3 est une liste des personnes nommées. Le Tribunal n'accepte pas cet élément de preuve, car il ne satisfait pas à la deuxième condition du critère de la décision Whyte. Le Tribunal ne croit pas que cette liste aurait eu quelque incidence que ce soit sur l'issue de la plainte. Comme il est indiqué plus loin dans ces motifs, étant donné que la plainte concerne la nomination de Mme Langlois, il n'est pas pertinent en l'espèce d'obtenir le nom des autres personnes nommées.

23 Le document C-4 est une lettre du médecin du plaignant au sujet de l'effet du processus de nomination sur la santé de celui-ci. Le Tribunal n'accepte pas cet élément de preuve, car il n'aurait pas eu d'incidence sur l'issue de la plainte. Pour les raisons exposées ci-après, le Tribunal a déterminé que le plaignant n'a pas établi de preuve prima facie de discrimination dans le processus de nomination et que, par conséquent, le Tribunal n'est pas tenu d'évaluer les préjudices qui, selon le plaignant, auraient été causés par la discrimination. Cet élément de preuve aurait pu être pertinent si la plainte avait été accueillie, mais le Tribunal a rejeté celle-ci.

24 Enfin, l'annexe reproduit simplement, à des fins de référence, des parties des principaux points soulevés par le plaignant. L'annexe ne constitue donc pas un nouvel élément de preuve.

Les allégations liées à la Charte

25 Dans les allégations écrites qu'il a présentées au Tribunal le 19 avril 2010, le plaignant affirme que l'intimé a fait preuve de discrimination à son endroit en raison de sa race et de son origine ethnique, ce qui va à l'encontre des articles 15(1) et 16(1) de la Charte canadienne des droits et libertés, soit la partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, qui constitue elle-même l'annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, ch. 11 (la Charte).

26 Au début du premier jour de l'audience, le 5 janvier 2011, la représentante du plaignant a avisé le Tribunal qu'elle retirait toutes les allégations liées à la Charte.

Les allégations du plaignant concernant les autres personnes nommées

27 Le plaignant conteste les six autres nominations effectuées au moyen du même processus d'évaluation ayant servi à nommer Mme Langlois. Plus particulièrement, il affirme que le mérite n'a pas été appliqué de manière appropriée à l'égard des candidats visés par ces nominations. Il a minutieusement examiné leurs évaluations afin de démontrer qu'ils ne méritaient pas les points qui leur ont été accordés. Selon le plaignant, l'intimé a fait preuve de favoritisme à l'égard de ces six candidats. Il demande donc que leur nomination soit révoquée.

28 L'intimé et la CFP s'opposent vigoureusement à cette allégation. Ils soutiennent que le Tribunal n'a pas compétence pour examiner ces autres nominations, car le plaignant n'a pas présenté de plainte à leur sujet; sa plainte porte uniquement sur la nomination de Mme Langlois.

29 Selon l'article 77 de la LEFP, la compétence du Tribunal se limite à une nomination précise :

77. (1) Lorsque la Commission a fait une proposition de nomination ou une nomination dans le cadre d'un processus de nomination interne, la personne qui est dans la zone de recours visée au paragraphe (2) peut, selon les modalités et dans le délai fixés par règlement du Tribunal, présenter à celui-ci une plainte selon laquelle elle n'a pas été nommée ou fait l'objet d'une proposition de nomination

[…]

[caractères gras ajoutés]

30 Une plainte présentée en vertu de l'article 77(1) de la LEFP se rapporte à une nomination. Dans certains cas, un processus d'évaluation peut donner lieu à plusieurs nominations, et chacune d'entre elles peut faire l'objet d'un recours. C'est pourquoi le Tribunal demande aux plaignants d'indiquer la nomination ou la proposition de nomination contestée en lui faisant parvenir l'avis de nomination. Celui-ci peut contenir le nom de la personne qui a fait l'objet de la nomination ou de la proposition de nomination, ou le nom de plusieurs personnes. L'article 79(1) de la LEFP stipule que chaque personne faisant l'objet d'une nomination ou d'une proposition de nomination constitue une partie à la plainte et a le droit d'être entendue. Chacune de ces personnes est tenue informée tout au long du processus et a le droit de participer à l'audience en tant que partie à part entière.

31 Dans ce cas-ci, sept nominations ont été effectuées au moyen du même processus d'évaluation, à des dates différentes. Des avis distincts pour chacune d'entre elles ont été publiés sur Publiservice. Quand le plaignant a présenté sa plainte, le 10 juillet 2009, il n'y a joint aucun avis de nomination. Les 10 et 28 juillet 2009, le Tribunal lui a demandé de lui transmettre l'avis de nomination afin d'identifier la personne faisant l'objet d'une nomination ou d'une proposition de nomination.

32 Le 7 août 2009, le plaignant a envoyé au Tribunal l'avis concernant la nomination de Cathy Cayan. Il a indiqué que malgré le fait que neuf postes devaient être dotés par l'entremise du processus de nomination, il n'avait pu trouver que cet avis.

33 Dans une décision-lettre datée du 6 novembre 2009, le Tribunal a fait remarquer que la période prescrite pour la présentation d'une plainte concernant la nomination de Mme Cayan s'étalait du 16 au 31 juillet 2009, soit après que le plaignant ait présenté sa plainte. Il a également fait observer que la période prescrite pour la présentation d'une plainte concernant la nomination de Mme Langlois allait du 8 au 23 juillet 2009. Comme il est indiqué plus haut, le plaignant a présenté sa plainte le 10 juillet 2009, pendant la période prescrite pour le dépôt d'une plainte concernant la nomination de Mme Langlois, mais trop tôt pour une plainte concernant celle de Mme Cayan. Le Tribunal a donc déterminé que la plainte se rapportait à la nomination de Mme Langlois plutôt qu'à celle de Mme Cayan. Le 12 novembre 2009, le Tribunal a informé Mme Langlois que sa nomination faisait l'objet d'une plainte et qu'elle avait le droit d'être entendue. Elle a choisi de ne pas exercer ce droit.

34 Le Tribunal conclut donc qu'il a compétence pour examiner uniquement la nomination de Mme Langlois, car le plaignant n'a pas déposé de plainte concernant les six autres nominations. S'il souhaitait les contester, il lui incombait de consulter Publiservice à différents moments afin de vérifier si d'autres nominations avaient été effectuées par l'entremise du processus visé et d'envoyer au Tribunal les avis de nomination les concernant dans la période prescrite pour présenter une plainte. Le fait de permettre au plaignant de contester les six autres nominations constituerait une grave infraction au Règlement du Tribunal de la dotation de la fonction publique, DORS/2006-6, modifié par DORS/2011-116, et aux règles de la justice naturelle, étant donné que les six autres personnes nommées n'ont jamais été informées que leur nomination faisait l'objet d'une plainte et n'ont pas eu la possibilité d'exercer leur droit de se faire entendre.

35 Dans certains cas, le Tribunal peut examiner l'évaluation d'autres personnes nommées si cela lui permet de faire la lumière sur les questions à trancher. Toutefois, étant donné que les six autres nominations n'ont pas été contestées de manière adéquate devant le Tribunal pour les raisons énoncées plus haut, le Tribunal ne peut se prononcer sur la question de déterminer si ces nominations étaient fondées sur le mérite. En l'espèce, le Tribunal a limité son examen de l'évaluation des autres personnes nommées aux questions dont il est saisi, comme il est expliqué plus loin dans les présents motifs.

Questions en litige


36 Le Tribunal doit trancher les questions suivantes :

  1. L'intimé a-t-il abusé de son pouvoir dans son évaluation des qualifications du plaignant?
  2. L'intimé a-t-il fait preuve de discrimination à l'endroit du plaignant en raison de sa race ou de son origine ethnique?
  3. L'intimé a-t-il enfreint les politiques ministérielles et fourni des renseignements trompeurs dans le guide d'évaluation?
  4. Mme Ducharme maîtrisait-elle suffisamment l'anglais pour évaluer les qualifications du plaignant?
  5. L'intimé a-t-il fait preuve de favoritisme personnel envers Mme Langlois parce qu'elle est francophone?

Analyse


37 L'article 77(1)a) de la LEFP stipule qu'une personne qui est dans la zone de recours peut présenter une plainte selon laquelle elle n'a pas été nommée ou n'a pas fait l'objet d'une proposition de nomination au motif que la CFP ou l'administrateur général a abusé de son pouvoir dans le processus de nomination. La LEFP ne définit pas ce qu'est un abus de pouvoir, mais l'article 2(4) indique qu'« [i]l est entendu que, pour l'application de la présente loi, on entend notamment par "abus de pouvoir" la mauvaise foi et le favoritisme personnel ».

38 Comme l'a établi la jurisprudence du Tribunal, cette formulation inclusive indique que l'abus de pouvoir comprend, sans toutefois s'y limiter, la mauvaise foi et le favoritisme personnel. Au paragraphe 64 de la décision Kane c. le procureur général du Canada et la Commission de la fonction publique, 2011 C.A.F. 19, la Cour d'appel fédérale a établi que l'abus de pouvoir peut également être causé par une erreur. Il ressort clairement du préambule et de l'ensemble de la LEFP qu'il faut plus que de simples erreurs ou omissions pour constituer un abus de pouvoir. Le fait qu'une erreur constitue ou non un abus de pouvoir dépend donc de la nature et de la gravité de l'erreur. En outre, l'abus de pouvoir comprend aussi les omissions et la conduite irrégulière. La mesure dans laquelle la conduite est irrégulière et l'ampleur de l'omission peuvent déterminer si elles constituent un abus de pouvoir ou non. Voir, par exemple, la décision Tibbs c. Sous-ministre de la Défense nationale, 2006 TDFP 0008.

Question I :  L'intimé a-t-il abusé de son pouvoir dans son évaluation des qualifications du plaignant?

39 Le plaignant affirme qu'il n'a pas été évalué de façon appropriée. Il a examiné minutieusement son évaluation et soutient qu'il aurait dû obtenir davantage de points. En fait, le plaignant demande au Tribunal de reprendre son évaluation. Or, le Tribunal a conclu dans nombre de décisions que son rôle consiste à déterminer s'il y a eu abus de pouvoir, et non pas à réévaluer les candidats ou à reprendre le processus de nomination (voir, par exemple, la décision Broughton c. Sous-ministre de Travaux publics et Services gouvernementaux, 2007 TDFP 0020). Ainsi, le Tribunal examinera l'évaluation des qualifications du plaignant afin de déterminer s'il y a eu abus de pouvoir dans celle-ci, mais ne reprendra pas l'évaluation qui a déjà été effectuée par le comité d'évaluation.

40 Le comité d'évaluation était constitué de neuf membres. Le plaignant a été reçu en entrevue par Mme Ducharme, conseillère en ressources humaines et présidente du comité d'évaluation, et par Thierry Rousseau, conseiller principal, Relations fédérales-provinciales-territoriales. Mme Ducharme est conseillère en ressources humaines depuis quatre ans et demi; elle a fait partie de plusieurs comités d'évaluation au cours de sa carrière de plus de 21 ans dans la fonction publique fédérale. M. Rousseau s'est joint à RHDCC en 1999.

41 Mme Ducharme et M. Rousseau ont expliqué comment les questions d'entrevue avaient été évaluées. Ils ont consigné les réponses des candidats dans un document d'évaluation sur lequel figurait une liste de critères et de réponses attendues. Quand un candidat fournissait une réponse attendue ou affichait un comportement souhaité, un membre du comité d'évaluation cochait cette réponse ou ce critère. Le comité acceptait également les bonnes réponses qui n'étaient pas prévues. Ensuite, les deux membres du comité de sélection qui avaient mené l'entrevue se rencontraient afin d'examiner les réponses du candidat et les points accordés. Ces réponses et la note accordée étaient par la suite présentées aux autres membres du comité aux fins de discussion. La note finale découlait du consensus entre les neuf membres du comité d'évaluation.

42 Le plaignant avance que ni le témoignage de Mme Ducharme ni celui de M. Rousseau ne sont crédibles, car ceux-ci étaient présents quand il a témoigné devant le Tribunal. Par ailleurs, M. Rousseau était présent pendant le témoignage de Mme Ducharme. Selon le plaignant, cette pratique est contraire aux procédures habituelles des tribunaux. Le Tribunal fait remarquer que l'exclusion de témoins est couramment accordée quand une partie en fait la demande; cependant, ni le plaignant ni sa représentante n'ont présenté une telle demande.

43 Après avoir examiné l'évaluation du plaignant, le Tribunal conclut qu'il n'y a pas eu d'abus de pouvoir dans la façon dont l'intimé a noté ses réponses. Par exemple, à la question CA-1 de l'entrevue, qui servait à évaluer la capacité de diriger une équipe, les candidats devaient décrire une situation où ils avaient dirigé une équipe ainsi que les mesures qu'ils avaient prises afin d'assurer la réussite du projet. Le plaignant a obtenu cinq points sur dix pour cette réponse; la note de passage était de six. Selon les notes prises par Mme Ducharme et M. Rousseau au moment de l'entrevue, le plaignant a décrit un projet bénévole auquel il avait travaillé pour Centraide, projet qui consistait à remettre des formulaires d'engagement à une date précise. Un employé qui participait au projet a quitté le ministère sans en aviser le plaignant. Celui-ci a alors demandé à des volontaires de l'aider, et il a pu ainsi remettre les formulaires d'engagement à temps.

44 Dans son témoignage, Mme Ducharme a déclaré que la réponse du plaignant était médiocre dans la mesure où la question visait à évaluer la capacité de diriger une équipe, et la réponse ne comportait pas assez d'éléments relatifs au leadership ou au travail d'équipe. En dépit de ces lacunes, le comité d'évaluation lui a tout de même accordé cinq points pour sa réponse. Le Tribunal conclut que l'intimé a fourni une explication raisonnable concernant les points qu'il a accordés au plaignant pour sa réponse à cette question.

45 La question CA-3 de l'entrevue portait sur la capacité d'analyser des sujets divers et de formuler des recommandations, des conseils et des principes directeurs. Pour y répondre, les candidats devaient décrire un projet dont ils avaient été responsables et qui démontrait le mieux leur capacité d'analyser des renseignements et d'en fournir à la haute direction. La note de passage était de 9 sur 15. Selon les notes prises par Mme Ducharme et M. Rousseau au moment de l'entrevue, le plaignant a répondu qu'à une occasion, on lui avait demandé de fusionner cinq ou six formulaires d'immigration en un seul. Pour ce faire, il avait analysé les formulaires, participé à des réunions d'information hebdomadaires et préparé des rapports d'étape bimensuels. Il est parvenu à intégrer tous les formulaires pour ne former qu'un seul formulaire exhaustif. Mme Ducharme et M. Rousseau lui ont accordé cinq points et demi pour sa réponse. Par la suite, ils ont discuté de la réponse du plaignant avec les autres membres du comité d'évaluation, et ils ont tous convenu ensemble de faire passer sa note à six.

46 Mme Ducharme a déclaré que le plaignant n'avait pas obtenu la note de passage pour cette question parce que sa réponse ne portait que sur la première partie de la question, soit celle concernant l'analyse. Il n'a pas fourni d'éléments se rapportant à la présentation de conseils à la haute direction. À l'audience, M. Rousseau a déclaré que le plaignant avait démontré qu'il était en mesure d'analyser des formulaires, mais pas qu'il avait fourni des recommandations ou des principes directeurs. Après avoir examiné l'évaluation du plaignant, le Tribunal conclut que Mme Ducharme et M. Rousseau ont fourni une explication raisonnable relativement aux points qu'ils ont accordés au plaignant pour sa réponse à cette question d'entrevue.

47 La question CA-4 servait à évaluer la capacité de travailler efficacement malgré la pression qu'occasionnent les délais et un volume de travail élevé. Pour y répondre, les candidats devaient décrire une situation où ils avaient subi une pression importante tout en devant gérer de nombreuses tâches et des priorités difficiles à concilier, et où ils étaient parvenus à s'acquitter de leur charge de travail avec succès. Ils devaient également expliquer comment ils ont surmonté ces difficultés. La note de passage était de six sur dix. Selon les notes prises par Mme Ducharme et M. Rousseau au moment de l'entrevue, le plaignant a décrit une journée où il devait assister à deux réunions dans la matinée, et où son superviseur lui avait demandé de faire des photocopies pour une réunion pendant l'absence de son adjoint administratif. Le plaignant a fait les photocopies et les a remises à temps pour la réunion. Pour y parvenir, il a remis sa première réunion à plus tard dans la matinée en question et remis la deuxième à l'après-midi.

48 Mme Ducharme a déclaré que le plaignant n'avait reçu que quatre points sur dix pour sa réponse, car bien qu'il ait donné quatre des réponses attendues qui figuraient dans le document d'évaluation, dans l'ensemble, sa réponse était trop « administrative » [traduction]. Par exemple, le plaignant n'a pas cherché à déléguer des tâches. Mme Ducharme a ajouté qu'elle avait écrit « discussion info – trop administratif » sur le document d'évaluation afin de se souvenir d'aborder cet aspect de la réponse du plaignant au cours de la discussion informelle, qui constitue une étape du processus venant après l'évaluation des candidats et permettant à ceux-ci d'obtenir des conseils en vue de processus de nomination futurs.

49 M. Rousseau a affirmé que la réponse du plaignant ne comportait pas suffisamment d'exemples de priorités difficiles à concilier et du fait de travailler sous pression. Il s'attendait à ce que le plaignant établisse l'ordre de priorité de ses activités. Par exemple, le plaignant aurait pu décider que sa réunion de 10 h 30 était sa priorité pour la journée et déplacer d'autres tâches plutôt que de remettre la réunion. Le Tribunal conclut que Mme Ducharme et M. Rousseau ont fourni une explication raisonnable quant aux points qu'ils ont accordés au plaignant pour sa réponse à cette question d'entrevue.

50 La capacité de communiquer clairement de vive voix (CA-6) a été évaluée au moyen des réponses fournies par le plaignant tout au long de l'entrevue. L'intimé avait établi une définition de cette qualification ainsi que des critères pour l'évaluer, notamment la clarté, la concision, la logique et l'usage. Le plaignant affirme qu'il ne comprend pas pourquoi il n'a reçu que six points sur dix pour cette qualification, étant donné qu'il a effectué ses études universitaires en anglais, dont une maîtrise en administration publique et en politique publique. L'anglais est sa langue maternelle.

51 Le fait que le plaignant a effectué ses études universitaires en anglais n'a pas suffisamment de fondement probatoire pour que le Tribunal conclue que le plaignant aurait dû recevoir plus de points pour cette qualification. Le plaignant n'a pas présenté d'autres éléments de preuve à l'appui de son affirmation selon laquelle il aurait dû recevoir plus de points pour sa réponse. En outre, le Tribunal signale que le plaignant a obtenu la note de passage pour cette qualification; une note plus élevée n'aurait pas changé l'issue du processus, étant donné qu'il a été déterminé que le plaignant a échoué à trois qualifications essentielles.

52 Le plaignant avance que l'intimé a été beaucoup plus indulgent envers les personnes nommées qu'envers lui au moment de noter l'examen écrit et l'entrevue. Il fait valoir, par exemple, que le comité d'évaluation a augmenté les notes qu'il avait accordées à plusieurs candidats « après coup » [traduction].

53 Le Tribunal fait remarquer que les notes accordées à l'examen écrit ne sont pas pertinentes en l'espèce, étant donné que le plaignant a réussi à celui-ci. Quant aux questions d'entrevue, le Tribunal a examiné l'évaluation des réponses des personnes nommées et il conclut qu'aucun élément de preuve ne montre que l'intimé a fait preuve de plus d'indulgence à leur égard. Relativement à l'exemple donné plus haut, M. Rousseau a expliqué que les notes que les deux membres chargés de l'entrevue ont accordées à chaque candidat ont ensuite été présentées aux neuf membres du comité d'évaluation aux fins de discussion. Ceux-ci ont bel et bien augmenté les notes quand ils le jugeaient approprié. En fait, ils ont aussi augmenté les notes du plaignant. Mme Ducharme et M. Rousseau avaient attribué cinq points et demi au plaignant pour sa réponse à la question CA-3, et le comité d'évaluation a fait passer cette note à six.

54 En outre, le plaignant estime qu'il était inapproprié de la part du comité d'évaluation de communiquer avec ses répondants étant donné que, selon lui, sa candidature avait déjà été éliminée après l'entrevue. Il affirme que cette démarche a compromis son emploi actuel; en effet, sa gestionnaire lui a retiré certaines de ses responsabilités, car elle a présumé que le plaignant allait quitter son unité.

55 Le Tribunal juge que l'intimé a fourni une explication raisonnable du fait qu'il a effectué la vérification des références. M. Rousseau a déclaré que le comité d'évaluation a vérifié les références du plaignant, car à ce moment-là, il n'avait pas encore terminé son évaluation. Les résultats n'ont été considérés comme définitifs qu'une fois qu'ils ont été passés en revue par chacun des neuf membres du comité d'évaluation, ce qui ne s'est produit qu'après la vérification des références. Par-conséquent, quand la vérification des références a été effectuée, la candidature du plaignant n'avait pas encore été éliminée du processus de nomination.

Question II :  L'intimé a-t-il fait preuve de discrimination à l'endroit du plaignant en raison de sa race ou de son origine ethnique?

56 Le plaignant soutient que l'intimé l'a délibérément fait échouer à l'entrevue, car il avait planifié l'élimination de sa candidature en raison de sa race et de son origine ethnique.

57 Aux termes de l'article 80 de la LEFP, pour déterminer si la plainte est fondée en vertu de l'article 77, le Tribunal peut interpréter et appliquer la LCDP.

58 L'article 7 de la LCDP stipule que le fait de refuser d'employer ou de continuer d'employer un individu ou de le défavoriser en cours d'emploi par des moyens directs ou indirects constitue un acte discriminatoire, s'il est fondé sur un motif de distinction illicite. L'article 3 de la LCDP énumère les motifs de distinction illicite, lesquels comprennent la race, la couleur et l'origine ethnique.

Le plaignant a-t-il réussi à établir une preuve prima facie de discrimination?

59 Comme l'a établi la jurisprudence du Tribunal, il incombe au plaignant de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu'il y a eu abus de pouvoir dans un processus de nomination (voir, par exemple, la décision Tibbs, para. 49).

60 Dans un contexte de droits de la personne, il incombe au plaignant d'établir une preuve prima facie de discrimination. Dans la décision Ontario (Commission ontarienne des droits de la personne) c. Simpsons-Sears Ltd., [1985] 2 R.C.S. 536 (également connue sous le nom de décision O'Malley), la Cour suprême du Canada a énoncé le critère permettant d'établir une preuve prima facie de discrimination :

28 […] Dans les instances devant un tribunal des droits de la personne, le plaignant doit faire une preuve suffisante jusqu'à preuve contraire qu'il y a discrimination. Dans ce contexte, la preuve suffisante jusqu'à preuve contraire est celle qui porte sur les allégations qui ont été faites et qui, si on leur ajoute foi, est complète et suffisante pour justifier un verdict en faveur de la plaignante, en l'absence de réplique de l'employeur intimé. […]

61 Pour établir une preuve prima facie, le plaignant a donc uniquement à prouver que la discrimination présumée faisait partie des facteurs – même si ce n'était pas le principal ni même l'unique facteur – qui ont poussé l'intimé à éliminer sa candidature du processus de nomination (voir la décision Holden c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (1991), 14 C.H.R.R. D/12 (C.A.F.), para. 7).

62 Le Tribunal doit déterminer si la preuve du plaignant étaye son allégation et si cette dernière, même avérée, justifie une conclusion en faveur du plaignant, en l'absence de réponse de l'intimé. Ainsi, à ce stade de l'analyse, le Tribunal ne peut prendre en considération la réponse de l'intimé avant d'avoir déterminé si une preuve prima facie de discrimination a été établie (voir la décision Lincoln c. Bay Ferries Ltd., [2004] C.A.F. 204, A.C.F. no 941 (QL), para. 22 (C.A.F.)).

63 Le plaignant doit aussi démontrer qu'il existe un lien entre le motif de distinction illicite (sa race ou son origine ethnique) et la conduite qu'il reproche à l'intimé (l'élimination de sa candidature). Dans la décision Filgueira c. Garfield Container Transport inc., 2005 TCDP 32, le Tribunal canadien des droits de la personne (TCDP) a conclu ce qui suit :

[41] La question qui demeure est la suivante : Le fait qu'un employé croit qu'une personne d'un groupe ethnique différent fait le même travail et reçoit un salaire plus élevé est-il suffisant pour établir une preuve prima facie de discrimination? Je pense qu'il doit y avoir quelque chose de plus. Il doit y avoir quelque chose dans la preuve, indépendamment de ce que le plaignant croit, qui confirme ses soupçons. Je ne dis pas que ce que croit un plaignant n'a aucune force probante. Cela dépend des circonstances. Toutefois, le fait de croire abstraitement qu'une personne fait l'objet de discrimination, sans qu'il existe un certain fait qui le confirme, n'est pas suffisant.

64 Quand elle a rejeté la demande de révision judiciaire de la décision Filgueira, la Cour fédérale a conclu que la conclusion du TCDP selon laquelle la preuve était si minimale qu'elle n'avait aucun effet juridique était appropriée au regard du critère de la preuve prima facie (Filgueria c. Garfield Container Transport Inc., 2006 C.F. 785).

65 De même, en l'espèce, il ne suffit pas que le plaignant affirme avoir été évalué de manière injuste en raison de sa race ou de son origine ethnique; il doit démontrer qu'il existe un lien entre ce facteur et l'élimination de sa candidature.

66 Si le plaignant réussit à établir une preuve prima facie de discrimination, le fardeau de la preuve revient alors à l'intimé, qui doit fournir une explication raisonnable et non discriminatoire de sa décision de ne pas avoir nommé le plaignant au poste de conseiller à l'issue du processus de nomination visé.

Preuve présentée par le plaignant

67 Le plaignant affirme que l'intimé avait « planifié l'élimination de sa candidature » [traduction] en raison de sa race ou de son origine ethnique. L'allégation du plaignant se fonde sur deux éléments de preuve : les notes prises par un des membres du comité d'évaluation et un commentaire offensant qu'aurait formulé M. Rousseau au cours de la discussion informelle.

68 Selon le plaignant, le fait que Mme Ducharme a écrit « discussion info – trop administratif » dans son évaluation de la réponse qu'il a fournie à la question CA-4 de l'entrevue montre qu'elle avait décidé d'éliminer sa candidature du processus de nomination avant même que l'entrevue ne soit terminée, et ce, en raison de sa race ou de son origine ethnique.

69 Le Tribunal ne voit aucune raison de conclure, à partir du commentaire formulé par Mme Ducharme, que celle-ci voulait éliminer la candidature du plaignant du processus de nomination en raison de sa race ou de son origine ethnique. À première vue, ce commentaire indique seulement que selon Mme Ducharme, la réponse du plaignant était trop « administrative » et qu'il y avait lieu de l'en informer durant la discussion informelle.

70 Le plaignant affirme également que le commentaire offensant qu'aurait formulé M. Rousseau prouve que la race et l'origine ethnique étaient des facteurs déterminants dans l'élimination de sa candidature. Le Tribunal observe qu'il est impossible de savoir avec certitude à quels commentaires le plaignant fait référence dans ses observations écrites. Le plaignant semble faire allusion à un échange qu'il a eu avec M. Rousseau au cours de la discussion informelle. À cette rencontre, M. Rousseau aurait affirmé que le poste à doter était un poste de gestion qui exigeait que le titulaire prenne des décisions, et que le plaignant n'était pas « le bon candidat » [traduction]. Le plaignant n'a pas mentionné cet échange dans son témoignage. En supposant, sans trancher la question, que cet élément de preuve ait été présenté en bonne et due forme au Tribunal, il est impossible de déduire à partir de la déclaration de M. Rousseau que celui-ci voulait éliminer la candidature du plaignant en raison de sa race ou de son origine ethnique. À première vue, ce commentaire signifie simplement que, selon M. Rousseau, le plaignant n'a pas démontré qu'il était le bon candidat pour le poste de gestion à doter. Le Tribunal fait remarquer qu'il est bien connu que selon le nouveau système de dotation, la sélection de la personne à nommer se fonde sur le principe de la « bonne personne » et c'est peut-être ce à quoi M. Rousseau a fait référence au cours de la discussion informelle.

71 En conclusion, le Tribunal juge que les actions et les événements évoqués par le plaignant dans son témoignage, même avérés, n'établissent pas une preuve prima facie de discrimination. L'allégation du plaignant, même si l'on y ajoute foi, n'est ni complète ni suffisante pour justifier une conclusion en sa faveur. Sa position se fonde entièrement sur sa conviction par rapport à ce qui se passait dans l'esprit des membres du comité d'évaluation, sans l'apport de preuve concordante. Même s'il avait démontré que les commentaires cités plus haut étaient discriminatoires, le plaignant aurait quand même été tenu d'établir le lien requis entre ceux-ci et l'élimination de sa candidature du processus de nomination. Le Tribunal conclut que le plaignant n'a pas réussi à établir le lien nécessaire (voir la décision Chopra, para. 211 (QL)).

Explication raisonnable et non discriminatoire

72 Bien que la conclusion ci-dessus soit suffisante pour statuer sur l'allégation de discrimination, le Tribunal estime que l'intimé a également fourni une explication raisonnable et non discriminatoire quant à sa décision de ne pas nommer le plaignant à l'issue du processus de nomination visé. En effet, il a été déterminé qu'il manquait au plaignant trois qualifications essentielles et, de ce fait, il ne pouvait pas être nommé au poste. Le plaignant n'est pas parvenu à prouver que cette explication n'était qu'un prétexte. Sous la rubrique « Question I » des présents motifs (section Analyse), le Tribunal a fourni une analyse détaillée de l'évaluation du plaignant.

Question III :  L'intimé a-t-il enfreint les politiques ministérielles et fourni des renseignements trompeurs dans le guide d'évaluation?

73 Le plaignant avance que l'intimé a enfreint les politiques ministérielles et fourni des renseignements trompeurs dans le guide servant à l'évaluation de la qualification « Connaissance des principes de la gestion de projets ». Cette qualification était évaluée au moyen de la question 2 de l'examen écrit et de la question CO-2 de l'entrevue.

74 Le plaignant s'est reporté aux documents que l'intimé a publiés sur son site Web concernant le cycle de vie des projets, notamment les documents intitulés « Liens de la Direction générale de l'innovation, de l'information et de la technologie – le cycle de vie des projets à la DGIIT » [traduction] et « Cycle de vie des projets » [traduction]. Or le plaignant n'a pas démontré qu'il s'agissait de politiques, c'est-à-dire de documents auxquels les employés de RHDCC étaient tenus de se conformer pour gérer des projets. Il semble s'agir de documents d'information sur un cycle de vie de projets. Il est donc impossible d'affirmer qu'ils constituent des politiques de l'intimé ou que celles ci ont été enfreintes.

75 La question suivante consiste à se demander si le plaignant est parvenu à prouver que certaines réponses fournies dans le guide d'évaluation étaient erronées.

76 Les réponses attendues pour ces questions sont les différentes phases d'un cycle de vie de projets et une description de celles-ci. Un exemple d'erreur qui aurait été commise concerne l'une de ces phases. La réponse attendue précise que « la surveillance et le contrôle » constituent l'une des phases d'un projet. Or selon le plaignant, cette réponse est erronée car la surveillance et le contrôle ne constituent pas une phase d'un projet, mais plutôt « un système de principes de la gestion de projets, l'un des processus d'un cycle de vie de gestion » [traduction]. Le plaignant fait remarquer que les documents du ministère au sujet du cycle de vie des projets indiqués plus haut ne mentionnent pas la surveillance et le contrôle à titre de phase d'un projet.

77 M. Rousseau a déclaré que les documents auxquels le plaignant faisait référence concernaient les projets de technologie de l'information à RHDCC. Étant donné que le processus de nomination était ouvert aux employés de différents ministères, la réponse attendue ne pouvait se limiter au contenu des documents de RHDCC. M. Rousseau a effectué des recherches sur le sujet et a constaté que certaines sources mentionnaient quatre phases, d'autres cinq ou six. Le comité d'évaluation s'était entendu sur cinq phases. Toutefois, il voulait faire preuve de souplesse et a donc accepté d'autres réponses possibles qui semblaient logiques. Il a appliqué cette même approche aux éléments de chacune des phases.

78 Le Tribunal conclut qu'il relevait du pouvoir discrétionnaire du comité d'évaluation de choisir les réponses attendues. L'article 36 de la LEFP accorde aux gestionnaires délégataires un pouvoir discrétionnaire considérable dans le choix des méthodes d'évaluation. Le plaignant n'a pas démontré qu'il était déraisonnable de la part du comité d'évaluation de décider que la surveillance et le contrôle constituaient une phase du cycle de vie d'un projet. La gestion de projets n'est pas une science exacte; il peut y avoir des variations dans les différentes phases des projets et leur description, comme M. Rousseau l'a constaté dans ses recherches. Par ailleurs, l'intimé a accepté toutes les réponses logiques. Cette approche était raisonnable compte tenu du sujet de la question.

79 En conclusion de cette partie de l'analyse, le Tribunal fait observer que la candidature du plaignant n'a pas été éliminée du processus de nomination parce qu'il ne possédait pas cette connaissance, mais parce qu'il n'a pas obtenu la note de passage pour trois qualifications essentielles liées aux capacités.

Question IV :  Mme Ducharme maîtrisait-elle suffisamment l'anglais pour évaluer les qualifications du plaignant?

80 Dans son argumentation écrite, le plaignant affirme que Mme Ducharme ne parle pas couramment l'anglais. Le Tribunal fait remarquer dès le départ que le plaignant n'a pas présenté de plainte en vertu de l'article 77(1)c) de la LEFP selon laquelle l'intimé a omis de l'évaluer dans la langue officielle de son choix. Il n'affirme donc pas que l'intimé a omis de mener son entrevue dans la langue de son choix, mais plutôt que Mme Ducharme ne maîtrisait pas suffisamment l'anglais pour être en mesure d'évaluer équitablement les réponses qu'il a fournies à l'entrevue. Le plaignant n'a produit aucun élément de preuve pour étayer son affirmation; il signale simplement qu'à l'audience, Mme Ducharme a témoigné en français (un interprète traduisait ses réponses du français à l'anglais pour que le plaignant puisse les comprendre).

81 L'intimé avance que Mme Ducharme avait le droit de témoigner dans la langue officielle de son choix, et que le Tribunal ne peut inférer quoi que ce soit de ce choix. Par ailleurs, Mme Ducharme n'a pas eu recours aux services d'un interprète quand elle a été contre-interrogée en anglais.

82 Mme Ducharme a déclaré qu'elle avait obtenu le niveau C en compréhension de l'oral à la suite de l'examen administré par la Commission de la fonction publique.

83 La CFP fait valoir que ses Lignes directrices en matière de langues officielles dans le processus de nomination exigent que « chaque personne responsable de l'évaluation des personnes participant à un processus de nomination possède les compétences linguistiques voulues dans l'une ou l'autre ou les deux langues officielles afin de permettre une communication efficace avec les personnes à évaluer dans la langue officielle de leur choix et de permettre l'évaluation juste de leurs qualifications ». La rubrique iii de la section VII du Guide de mise en œuvre des Lignes directrices en matière de langues officielles dans le processus de nomination précise que « [c]ela ne veut pas dire que les personnes responsables de l'évaluation doivent toujours détenir un niveau supérieur de compétence dans les deux langues officielles. Le niveau de compétence dans les langues officielles, exigé de chaque personne responsable de l'évaluation, est en fonction de la nature des qualifications évaluées, de la complexité des interactions et des communications avec les personnes participant au processus ».

84 Dans la décision Ouellet c. le président de l'Agence canadienne de Développement international, 2009 TDFP 0026, para. 37, le Tribunal a conclu que déterminer si un évaluateur avait les habiletés linguistiques nécessaires pour évaluer quelqu'un dans l'autre langue officielle « [était] une question de fait ».

85 Le Tribunal ne peut tirer aucune conclusion du fait que Mme Ducharme a décidé de témoigner dans la langue officielle de son choix. L'article 15(1) de la Loi sur les langues officielles, L.R.C., 1985, ch. 31 (4e suppl.) stipule que chaque personne appelée à témoigner devant un tribunal fédéral a le droit d'être entendue dans la langue officielle de son choix. Le fait de tirer une conclusion négative de ce choix irait à l'encontre de cette disposition. Le fait que Mme Ducharme a choisi de témoigner en français indique seulement qu'elle est plus à l'aise dans cette langue, pas qu'elle ne parle pas couramment l'anglais.

86 Le Tribunal conclut que le plaignant n'a pas établi que Mme Ducharme ne maîtrisait pas suffisamment l'anglais pour l'évaluer. Il n'a pas démontré que les questions étaient trop complexes pour Mme Ducharme, qui a obtenu le niveau C en compréhension de l'oral (le niveau qui suit immédiatement le meilleur niveau sur une échelle de quatre), a pris part à plusieurs processus de nomination et travaillé pendant quatre ans et demi à titre de conseillère en ressources humaines dans un poste bilingue.

Question V :  L'intimé a-t-il fait preuve de favoritisme personnel envers Mme Langlois parce qu'elle est francophone?

87 Le plaignant soutient que l'intimé a fait preuve de favoritisme personnel à l'égard de Mme Langlois parce qu'elle est francophone. Son affirmation se fonde sur le fait qu'elle a été nommée même si elle ne possédait pas deux qualifications constituant un atout. Par ailleurs, selon le plaignant, elle a obtenu trop de points pour les réponses qu'elle a fournies à l'examen écrit et à l'entrevue.

88 Le Tribunal a déjà abordé la question du favoritisme dans d'autres décisions. Dans la décision Glasgow c. Sous-ministre de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, 2008 TDFP 0007, para. 39, le Tribunal soulignait ce qui suit :

Il convient de noter que le mot « favoritisme » est qualifié par l'adjectif « personnel », ce qui met en évidence l'intention du législateur de faire en sorte que les deux mots soient lus ensemble, et que c'est le favoritisme personnel, non pas tout autre type de favoritisme, qui constitue un abus de pouvoir.

[en caractères gras dans l'original]

89 Au paragraphe 41 de la même décision, le Tribunal a fourni l'explication suivante :

Lorsqu'il faut choisir parmi plusieurs candidats qualifiés, l'alinéa 30(2)b) de la LEFP prévoit que la sélection peut reposer sur les qualifications constituant un atout, les exigences opérationnelles et les besoins organisationnels. La sélection ne doit jamais être teintée de favoritisme personnel. Des intérêts personnels indus, comme une relation personnelle entre la personne chargée de la sélection et la personne nommée, ne devraient jamais constituer le motif d'une nomination. De la même façon, la sélection d'une personne à titre de faveur personnelle ou pour obtenir la faveur de quelqu'un serait un autre exemple de favoritisme personnel.

90 En l'espèce, le plaignant n'a pas établi qu'il existait une relation personnelle entre Mme Langlois et un membre du comité d'évaluation, ou qu'un intérêt personnel indu a influé sur la décision de la nommer au poste.

91 Mme Ducharme a déclaré qu'elle avait travaillé au sein de la même direction générale de RHDCC que Mme Langlois pendant un an et demi, mais qu'elle ne la connaissait pas « sur le plan personnel » [traduction]. La direction générale pour laquelle les deux femmes travaillaient compte plus de 600 employés. Le plaignant n'a pas présenté d'élément de preuve contredisant cette affirmation. De plus, Mme Ducharme n'a pas interviewé Mme Langlois; ce sont deux autres membres du comité d'évaluation, M. Rousseau et Lucie Gauthier, qui l'ont fait.

92 Le plaignant n'a pas non plus établi que les membres du comité d'évaluation avaient quoi que ce soit à gagner sur le plan personnel du fait d'embaucher une francophone. Le Tribunal signale qu'il n'a pas été démontré en preuve que d'autres membres du comité d'évaluation étaient francophones. Les notes ont été attribuées aux candidats par consensus des neuf membres du comité d'évaluation, pas seulement par ceux qui avaient évalué chacun des candidats.

93 Mme Ducharme a reconnu que Mme Langlois avait mal répondu aux questions quatre et cinq de l'examen écrit, lesquelles évaluaient respectivement la connaissance du Parlement et des comités parlementaires et la connaissance du processus législatif du Parlement. Toutefois, elle a déclaré que ces questions portaient sur des qualifications constituant un atout et que les candidats n'étaient pas tenus de posséder celles-ci pour être nommés. Les qualifications constituant un atout étaient « souhaitables » [traduction], mais les candidats pouvaient être nommés sans les posséder. L'importance des qualifications constituant un atout était examinée individuellement par le gestionnaire de chaque poste à doter. Dans le cas de la nomination de Mme Langlois, le gestionnaire a décidé qu'il n'était pas essentiel que la personne à nommer possède ces qualifications constituant un atout.

94 La LEFP stipule expressément que la CFP, ou le gestionnaire délégataire lorsque ce pouvoir est délégué comme c'est le cas en l'espèce, n'est pas tenu d'avoir recours aux qualifications constituant un atout pour nommer une personne :

Principes

30. (1) Les nominations — internes ou externes — à la fonction publique faites par la Commission sont fondées sur le mérite et sont indépendantes de toute influence politique.

Définition du mérite

(2) Une nomination est fondée sur le mérite lorsque les conditions suivantes sont réunies :

aselon la Commission, la personne à nommer possède les qualifications essentielles — notamment la compétence dans les langues officielles — établies par l'administrateur général pour le travail à accomplir;

b) la Commission prend en compte :

(i) toute qualification supplémentaire que l'administrateur général considère comme un atout pour le travail à accomplir ou pour l'administration, pour le présent ou l'avenir;

(ii) toute exigence opérationnelle actuelle ou future de l'administration précisée par l'administrateur général;

(iii) tout besoin actuel ou futur de l'administration précisé par l'administrateur général.

[…]

[caractères gras ajoutés]

95 Il ressort clairement du libellé de l'article 30(2) que pour être nommée, une personne doit posséder les qualifications essentielles, mais pas nécessairement les qualifications constituant un atout. Le gestionnaire délégataire peut tenir compte du fait que le candidat possède ou non les qualifications constituant un atout pour prendre la décision de nomination, mais il peut nommer une personne qui ne les possède pas. Voir, par exemple, la décision Steeves et Sveinson c. le sous‑ministre de la Défense nationale, 2011 TDFP 0009, para. 57.

96 Le plaignant affirme en outre que Mme Langlois a obtenu trop de points pour ses réponses à l'examen écrit et à l'entrevue. Selon lui, cela prouve que l'intimé lui a accordé un traitement de faveur parce qu'elle est francophone.

97 Le Tribunal a passé en revue les exemples donnés par le plaignant et estime que celui-ci n'a pas établi que l'intimé a montré une préférence pour Mme Langlois parce qu'elle est francophone. À l'audience, M. Rousseau a fourni une explication raisonnable concernant les notes attribuées à Mme Langlois. Par exemple, il a expliqué pourquoi le comité d'évaluation avait accordé à Mme Langlois la note de dix sur dix pour sa réponse à la question d'entrevue qui portait sur la capacité de travailler efficacement malgré la pression qu'occasionnent les délais et un volume de travail élevé (CA-4). Dans sa réponse, Mme Langlois a décrit un projet dans le cadre duquel elle a dû examiner les tâches de son équipe et en établir l'ordre de priorité. Elle a indiqué qu'elle avait rencontré les membres de son équipe chaque jour afin de discuter du projet et élaboré un tableau montrant l'état d'avancement de chaque tâche. Elle a également consulté ses supérieurs et a maintenu une communication constante avec le contrôleur financier. Selon M. Rousseau, il s'agissait précisément des réponses que le comité d'évaluation souhaitait obtenir pour cette question.

98 Le Tribunal conclut que le plaignant n'a pas prouvé que l'intimé a montré une préférence pour Mme Langlois parce qu'elle est francophone, ni pour toute autre raison.

Décision


99 Pour tous les motifs susmentionnés, la plainte est rejetée.


John Mooney
Vice-président

Parties au dossier


Dossier du Tribunal :
2009-0458
Intitulé de la cause :
Isaac Jalal et le sous-ministre de Ressources humaines et Développement des compétences Canada
Audience :
Les 5 et 6 janvier 2011
Ottawa (Ontario)
Dernières observations reçues le 8 mars 2011
Date des motifs :
Le 6 décembre 2011

COMPARUTIONS

Pour le plaignant :
Joanne Daniel
Pour l'intimé :
Anne-Marie Duquette
Pour la Commission
de la fonction publique :
Kimberly Lewis (observations écrites)
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