Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a déposé trois plaintes alléguant des représailles contre lui en raison de son intention avouée de présenter sa candidature à un poste d’élu au sein de l’agent négociateur et parce qu’il avait déposé plusieurs plaintes - le plaignant a allégué des pratiques déloyales de travail sous la forme d’un refus de transfert, du non-renouvellement de sa nomination pour une durée déterminée, de références inéquitables, d’une demande de fournir des références plus récentes, de la fermeture des bassins d’employés et du défaut de lui offrir une nouvelle nomination - le défendeur a formulé une objection au motif que les actions reprochées par le plaignant ne pouvaient pas constituer des pratiques déloyales de travail aux termes de l’alinéa 186(2)a) de la Loi - le défendeur a aussi formulé une objection au motif que les plaintes étaient hors délai - la Commission a conclu qu’il existait un cas défendable à l’effet que si les actions alléguées de la part du défendeur constituaient une violation de l’alinéa 186(2)a) de la Loi - la Commission a également conclu que les plaintes avaient été déposées dans les délais prescrits, bien que l’allégation de références inéquitables ne l’était pas - la Commission conclut en outre que le défendeur s’était acquitté de son fardeau de réfuter que les faits allégués dans les plaintes constituaient des pratiques déloyales de travail interdites en vertu de l’alinéa 186(2)a) de la Loi. Objections rejetées. Plaintes rejetées.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2012-01-05
  • Dossier:  561-02-357, 401 et 429
  • Référence:  2012 CRTFP 2

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

CHRIS HUGHES

plaignant

et

MINISTÈRE DES RESSOURCES HUMAINES ET DU DÉVELOPPEMENT DES COMPÉTENCES

défendeur

Répertorié
Hughes c. ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences

Affaire concernant des plaintes visées à l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Margaret E. Hughes, commissaire

Pour le plaignant:
Lui-même

Pour le défendeur :
Chris Bernier, avocat

Affaire entendue à Victoria (Colombie Britannique)
les 13 et 14 octobre 2010, du 2 au 5 mai 2011
et le 17 août 2011.
(Traduction de la CRTFP)

 I. Plaintes devant la Commission

1 Chris Hughes (le « plaignant ») a allégué que le ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences (le « défendeur » ou « RHDCC ») s’était livré à des pratiques déloyales de travail à son égard. M. Hughes a déposé quatre plaintes devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») entre le 6 mai 2008 et le 1er octobre 2009. Je n’ai été saisie que des trois dernières plaintes (dossiers de la CRTFP 561-02-357, 401 et 429). Dans tous les cas, M. Hughes soutient que le défendeur a enfreint l’alinéa 190(1)g) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « LRTFP »), édictée par l’article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22 (la « LMFP »), car il s’est livré à des pratiques déloyales de travail au sens de l’article 185.

2 L’alinéa 190(1)g) de la LRTFP se lit comme suit :

190. (1) La Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle :

[…]

g) l’employeur, l’organisation syndicale ou toute personne s’est livré à une pratique déloyale au sens de l’article 185.

L’article 185 définit une pratique déloyale de travail comme étant « tout ce qui est interdit par les paragraphes 186(1) et (2), les articles 187 et 188 et le paragraphe 189(1) ».

3 Dans les trois plaintes dont j’ai été saisie, le plaignant a allégué que l’article 186 de la LRTFP avait été enfreint. Dans les trois cas, il est question, d’une façon ou d’une autre, du fait qu’il n’a pas été muté ou déployé à un autre lieu de travail tel qu’il l’avait demandé; de plus, l’employeur ne lui a pas offert, à la fin de son affectation d’une durée déterminée, le 27 juin 2008, une nouvelle affectation de durée déterminée ou indéterminée, alors qu’il l’a offert à d’autres candidats moins qualifiés. Le défendeur aurait supposément agi ainsi parce que M. Hughes avait démontré un intérêt à faire partie du comité exécutif de son syndicat, ou parce qu’il voulait réprimander M. Hughes pour avoir déposé, plus tôt durant de son affectation, une plainte de pratique déloyale de travail (dossier de la CRTFP 561-02-320) (la « plainte abandonnée »).

4 Dans la première des trois plaintes de pratique déloyale de travail qui m’ont été présentées (dossier de la CRTFP 561-02-357) (la « plainte du 19 septembre 2008 »), le plaignant a soutenu que l’article 186 de la LRTFP avait été enfreint. Toutefois, il n’a pas spécifié quelle disposition de l’article 186 avait été transgressée, bien qu’il a plus tard mentionné un comportement énoncé au paragraphe 186(2). Dans les pièces jointes à la deuxième plainte qui m’a été présentée (dossier de la CRTFP 561-02-429) (la « plainte du 22 décembre 2008 »), le plaignant a allégué que le défendeur s’était livré à des pratiques déloyales de travail en vertu des sous-alinéas 186(2)a)(i) à (iv). Dans la pièce jointe à la troisième plainte qui m’a été présentée (dossier de la CRTFP 561-02-401) (la « plainte du 1er octobre 2009 »), seuls les sous-alinéas 186(2)a)(ii), (iii) et (iv) sont mentionnés.

5 Le sous-alinéa 186(2)a) de la LRTFP se lit comme suit :

186. (2) Il est interdit à l’employeur, à la personne qui agit pour le compte de celui-ci et au titulaire d’un poste de direction ou de confiance, que ce dernier agisse ou non pour le compte de l’employeur :

a) de refuser d’employer ou de continuer à employer une personne donnée, ou encore de la suspendre, de la mettre en disponibilité, ou de faire à son égard des distinctions illicites en matière d’emploi, de salaire ou d’autres conditions d’emploi, de l’intimider, de la menacer ou de prendre d’autres mesures disciplinaires à son égard pour l’un ou l’autre des motifs suivants :

(i) elle adhère à une organisation syndicale ou en est un dirigeant ou représentant — ou se propose de le faire ou de le devenir, ou incite une autre personne à le faire ou à le devenir —, ou contribue à la formation, la promotion ou l’administration d’une telle organisation,

(ii) elle a participé, à titre de témoin ou autrement, à toute procédure prévue par la présente partie ou la partie 2, ou pourrait le faire,

(iii) elle a soit présenté une demande ou déposé une plainte sous le régime de la présente partie, soit déposé un grief sous le régime de la partie 2,

(iv) elle a exercé tout droit prévu par la présente partie ou la partie 2;

6 Le défendeur a d’abord demandé que la Commission rejette les trois plaintes, car il s’agit essentiellement de plaintes concernant la dotation, ce qui veut dire qu’elles relèvent exclusivement de la compétence du Tribunal de la dotation de la fonction publique (le « TDFP »). Le défendeur a aussi soutenu que, quoi qu’il en soit, les plaintes devraient être rejetées parce qu’elles étaient hors délai. Il a plus tard demandé que la Commission rejette les plaintes parce qu’elles ne démontraient pas, à première vue, qu’il y avait eu violation de l’article 186 de la LRTFP.

7 Le président de la Commission m’a désignée pour instruire et trancher la plainte au nom de la Commission.

II. Contexte et précisions

8 Le plaignant était un employé embauché pour une durée déterminée par le défendeur. Il a été nommé à un poste de commis, classifié au groupe et niveau CR-04, pour le programme de Paiement d’expérience commune (le « programme PEC »), aux bureaux de la rue Pandora (la « rue Pandora »), à Victoria (Colombie-Britannique). Son affectation, qui au départ devait être du 13 septembre 2007 au 7 mars 2008, a été prolongée deux fois : la première fois jusqu’au 28 mars 2008, et la deuxième fois jusqu’au 27 juin 2008. Le plaignant a été informé dans une lettre datée du 20 mai 2008 que son affectation ne serait pas prolongée au-delà du 27 juin 2008.

9 Le 6 mai 2008, le plaignant a déposé auprès de la Commission la plainte abandonnée. Dans cette plainte, il alléguait que le défendeur s’était livré à une pratique déloyale de travail en refusant ses demandes de mutation aux bureaux de la rue Government (la « rue Government »), à Victoria, pour qu’il puisse être admissible à présenter sa candidature pour un poste au sein du comité exécutif de son syndicat. Le plaignant a par la suite retiré sa plainte dans une lettre datée le 13 juin 2008. Environ un an plus tard, soit le 13 juin 2009, il a demandé que sa lettre de retrait soit annulée et que sa plainte soit rétablie. Dans une lettre datée du 15 juin 2009, le greffe de la Commission (le « greffe ») a informé le plaignant que sa demande avait été rejetée parce qu’il n’est pas possible de rétablir une plainte qui  a été retiré et dont, par conséquent, la Commission n’est plus saisie. Dans les trois plaintes devant moi, le plaignant fait souvent référence à la plainte abandonnée comme étant sa « première plainte ». Il a déposé la plainte du 19 septembre 2008 auprès de la Commission en vertu de l’article 190 de la LRTFP. Il a soutenu que le défendeur avait transgressé l’article 186 en ne renouvelant pas son affectation d’une durée déterminée et en continuant de bloquer ses demandes de mutation aux bureaux de la rue Government, ce qui démontrait un sentiment antisyndical. Le plaignant a envoyé sa plainte au greffe par courriel le 19 septembre 2008, mais le greffe n’a reçu la plainte originale que le 6 novembre 2008.

10 La plainte du 19 septembre 2008 se lit comme suit :

[Traduction]

[…]

[…] La présente est une plainte de pratique déloyale de travail déposée en vertu de l’article 186. RHDCC a démontré un sentiment antisyndical envers moi depuis que j’ai commencé à y travailler en septembre 2007. J’ai immédiatement exprimé mon intention d’intégrer le syndicat. La direction locale connaissait mon intérêt et elle a bloqué mes demandes de mutation. Cette situation m’a poussé à déposer une première plainte, que j’ai retirée pour des raisons médicales.

Après avoir déposé la première plainte, RHDCC a mis fin à mon affectation d’une durée déterminée et a continué de rejeter mes demandes de mutation à un autre bureau. Conformément à la Loi canadienne sur les droits de la personne, le Ministère avait l’obligation d’accepter ma demande. Une mutation m’aurait permis de présenter ma candidature à un poste au sein du comité exécutif du syndicat. En raison de mes antécédents de dénonciateur du gouvernement, de défenseur des droits de la personne et de défenseur du personnel, RHDCC a fait tout en son pouvoir pour bloquer mes demandes et mettre fin à mon emploi.

Je faisais partie de deux bassins d’embauche valides (CR-03 et CR-04) et il y avait de nombreuses possibilités d’emploi, mais RHDCC a refusé de prolonger mon contrat. Mon contrat a pris fin le 27 juin 2008. Les représailles et les pratiques déloyales de travail duraient de façon continue depuis février 2008 environ. Ces faits se sont produits à Victoria (Colombie-Britannique).

[…]

À titre d’indemnisation, le plaignant a demandé une indemnisation intégrale. Il a demandé une réintégration dans ses fonctions, le remboursement du salaire et des avantages sociaux perdus, et des excuses.

11 Le 10 novembre 2008, le greffe a demandé au défendeur de lui expliquer sa position quant à la plainte du 19 septembre 2008. Le 25 novembre 2008, le défendeur a répondu que la Commission n’avait pas compétence pour ordonner la mutation du plaignant ou de lui offrir une autre affectation d’une durée déterminée. Dans une lettre datée du 17 décembre 2008, le plaignant a réfuté l’objection du défendeur. Le greffe a alors avisé les parties que la question de la compétence serait portée à l’attention de la Commission, et que cette question serait soulevée d’entrée de jeu à l’audience.

12 Le 22 décembre 2008, le plaignant a déposé une plainte dans laquelle il alléguait que le défendeur continuait de se livrer à des pratiques déloyales de travail en refusant de l’embaucher à la fin de son affectation, et ce, parce qu’il avait essayé de devenir un dirigeant ou un représentant syndical. En raison d’une erreur administrative, le greffe n’a accusé réception de la plainte que le 16 décembre 2009.

13 Voici un passage tiré de la pièce jointe à la plainte du 22 décembre 2008 :

[Traduction]

[…]

J’ai déposé deux plaintes de pratique déloyale de travail contre RHDCC dans le passé, et maintenant il [traduction] « refuse de m’employer » – sous-alinéas 186(2)a)(i), (ii), (iii) et (iv) – même si je fais partie de deux bassins d’embauche valides. Les bassins d’embauche dont je fais partie sont pour un poste classifié CR-04 (agent de prestation des services), qui peut être utilisé pour pourvoir des postes similaires à Victoria, à Nanaimo et à d’autres endroits sur l’île de Vancouver. Je fais aussi partie d’un bassin qui peut être utilisé pour pourvoir des postes classifiés CR-03, à Victoria.

J’ai déposé ma première plainte lorsque RHDCC a bloqué ma demande de mutation dans un autre lieu de travail à Victoria, qui m’aurait permis de présenter ma candidature à un poste de direction au sein du syndicat. J’ai retiré cette plainte pour des raisons médicales. J’ai déposé la deuxième plainte lorsque RHDCC a répondu à ma première plainte en mettant fin à mon affectation ([traduction] « refus de continuer de m’employer ») et en continuant de bloquer les nombreuses autres demandes de mutation que j’ai présentées. Cette plainte est toujours active.

Cette plainte porte sur le fait que RHDCC refuse de m’embaucher depuis. Cette situation, qui a commencé le 27 juin 2008, se poursuit encore aujourd’hui. Des douzaines de postes classifiés CR-03 ou CR-04 se sont libérés à Victoria et à Nanaimo au sein de RHDCC. Le Ministère ne tient pas compte des bassins dont je fais partie parce que j’ai essayé de devenir un dirigeant syndical, que j’ai déposé des plaintes en vertu de la LRTFP et que je [traduction] « pourrais témoigner » en vertu de la LRTFP à une prochaine audience relativement à la plainte précédente.

[…]

Le défendeur a aussi pris des mesures discriminatoires contre le plaignant dans le cadre d’un nouveau concours pour un poste classifié CR-04, de septembre à novembre 2008. Même si RHDCC avait retenu la candidature du plaignant lors d’un concours identique ou très semblable en 2007, il a rejeté une référence de Tim O’Neil en 2008. RHDCC avait accepté la référence de M. O’Neil en 2007, avant que les plaintes soient déposées en vertu de la LRTFP. On a demandé au plaignant de fournir trois références AVANT de passer une entrevue, chose que les autres candidats n’ont pas eu à faire. Don Campbell et Kathleen Allen étaient à la tête de cette pratique déloyale de travail, et les deux savaient que le plaignant avait déposé des plaintes en vertu de la LRTFP et qu’il voulait devenir dirigeant syndical. Jacky Smith a refusé de fournir une référence complète en guise de représailles pour la plainte de pratique déloyale de travail.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

Dans sa plainte initiale, le plaignant demandait que le défendeur soit poursuivi en vertu de l’article 205 de la LRTFP et que la Commission ordonne à ce dernier de lui offrir une affectation d’une durée déterminée de niveau CR-04 à Victoria ou de l’embaucher pour une durée indéterminée à Victoria ou à Nanaimo. Il demandait aussi une indemnité financière, comme il est mentionné ci-dessus. Le plaignant a ensuite retiré sa demande de poursuite.

14 Le 1er octobre 2009, le plaignant a déposé une plainte qui est en grande partie vide et qui comprend des notes renvoyant le lecteur à une pièce jointe. Ce document se lit en partie comme suit :

[Traduction]

[…]

Cette quatrième plainte porte sur le refus continu du défendeur d’embaucher le plaignant en raison des plaintes que ce dernier a déposées en vertu de l’article 186(2)a)(ii), (iii) et (iv) de la LRTFP de décembre 2008 jusqu’à maintenant.

Pendant toute cette période, le défendeur aurait pu et aurait dû réembaucher le plaignant, étant donné le manque de personnel à Victoria et à Nanaimo. Le plaignant se trouvait dans deux bassins d’embauche valides et était tout à fait qualifié pour les postes classifiés CR-03 et CR-04. Ces bassins étaient valides jusqu’au 31 mars 2009 et jusqu’au 30 juin 2009 respectivement. L’employeur n’a pas avisé le plaignant qu’on avait mis fin à ces bassins, et le plaignant a obtenu les dates de fin « présumées » des bassins auprès de son syndicat. L’expiration des bassins est en soi une pratique déloyale de travail, car ces bassins auraient dû être prolongés jusqu’en août ou septembre 2009. Le syndicat a avisé le plaignant le 21 juillet 2009.

L’employeur a mis fin aux bassins pour éviter de devoir embaucher le plaignant. Il n’a pas tenu compte des bassins dans lesquels se trouvait le plaignant et, au cours de la dernière année, il a utilisé des bassins plus récents pour pourvoir des postes.

L’employeur aurait dû réembaucher le plaignant dans le cadre d’un processus de dotation pour des postes occasionnels ou d’un processus de dotation non annoncé au niveau CR-03, CR-04, PM-01 ou PM-02, étant donné la pénurie importante de personnel à RHDCC et les antécédents de travail du plaignant, ses résultats aux examens et sa disponibilité/volonté de travailler à tout moment au cours de l’année précédente (et encore aujourd’hui).

[…]

[Les passages en évidence le sont dans l’original]

15 Le greffe a demandé au défendeur de lui expliquer sa position au sujet de la plainte du 1er octobre 2009, ce que le défendeur a fait le 20 octobre 2009. Il a répondu que la Commission n’avait pas compétence pour rendre une décision concernant cette plainte, car il s’agissait d’une question de dotation. À son tour, le défendeur a demandé à la Commission de demander au plaignant d’expliquer en détail en quoi le fait de ne pas lui avoir offert un poste à partir de la liste de candidats admissibles représente une pratique déloyale de travail. Le défendeur a également mentionné que la plainte était hors délai.

16 Le 29 octobre 2009, le plaignant a soutenu que la Commission pouvait se pencher sur des questions de dotation dans le but de trouver des preuves de sentiment antisyndical à l’appui d’une plainte de pratique déloyale de travail. Il a indiqué qu’il avait l’intention de déposer une requête pour que soient regroupées les trois plaintes dont je suis saisie. Il a aussi demandé une ordonnance pour la production de documents détenus par le défendeur. Le défendeur s’est opposé à la demande et a réitéré que la Commission n’avait pas compétence pour se pencher sur ce qui est essentiellement une question de dotation. Il a demandé à la Commission de rejeter les plaintes, et ce, sans audience.

17 J’ai refusé de rejeter les plaintes devant moi. J’ai déterminé que la Commission a l’autorité, et même le devoir, conformément au paragraphe 190(1) de la LRTFP – à condition que toutes les autres exigences en matière de compétence soient satisfaites – d’entendre une plainte de pratique déloyale de travail portant sur des décisions de dotation. Ces décisions comprennent une décision de ne pas renouveler une affectation d’une durée déterminée s’il est présumé que cette décision est fondée sur une conduite discriminatoire de la part du défendeur, qui est interdite par la LRTFP.

III. Questions préliminaires

A. Production de documents

18 Dans une correspondance avec le greffe qui a eu lieu avant que l’affaire ne me soit attribuée, le plaignant a demandé la divulgation de documents exhaustifs faisant état de toutes les décisions de dotation du défendeur pour les postes de niveau CR-03 et CR-04 à Victoria, à Nanaimo ou dans d’autres villes du sud de l’île de Vancouver de janvier 2008 à octobre 2009. Cette demande touchait potentiellement des centaines de postes, qui ont été dotés dans le cadre de concours organisés par différents gestionnaires recruteurs. Dans une télécopie envoyée le 22 février 2010, le défendeur a déclaré que la demande du plaignant était trop générale. Il a qualifié cette demande de « recherche à l’aveuglette » et a demandé qu’elle soit rejetée.

19 À la demande de la Commission, le greffe a avisé les parties le 31 mars 2010 que la demande de divulgation du plaignant était légitime, mais qu’elle devait être précisée. On a demandé aux parties de tenter de régler la question de la divulgation au plus tard le 30 avril 2010. Si elles n’y parvenaient pas, le plaignant étaient tenu de présenter une demande plus détaillée relativement à la liste des documents devant être divulgués et indiquer la pertinence de ces documents à l’égard des plaintes dont je suis saisie. Les parties ont été avisées que la Commission déterminerait par la suite quels documents devaient être divulgués.

20 Ce cas m’a été assigné en août 2010. Le 8 septembre 2010, une téléconférence préalable à l’audience a eu lieu et à laquelle participaient le plaignant, l’avocat du défendeur, le personnel du greffe et moi-même. À la suite de cette discussion, une « ordonnance de production de documents » a été émise le 9 septembre 2010 pour certains des documents demandés par le plaignant.

21 On a encouragé les parties à continuer d’essayer de déterminer quels étaient les autres documents pertinents aux plaintes dont je suis saisie. Cet exercice avait pour but de limiter le nombre potentiel de décisions de dotation prises par le défendeur durant la période en question qui sont visées par les plaintes de pratiques déloyales de travail du plaignant.

22 Le 7 octobre 2010, une deuxième téléconférence préalable à l’audience a eu lieu à la demande des parties. Pendant cette téléconférence, le défendeur a présenté une demande d’ajournement à laquelle le plaignant s’est fortement opposé. Ce dernier a expliqué qu’il était préparé et impatient d’aller de l’avant avec son cas et qu’il éprouverait des difficultés économiques si l’audience était reportée. La demande d’ajournement du défendeur a été rejetée. On a demandé aux parties de continuer à déployer des efforts pour préciser les questions et limiter les demandes de divulgation de documents pertinents aux plaintes dont je suis saisie.

23 Au début de l’audience, beaucoup de temps a été consacré à examiner les documents et à essayer de clarifier les processus de sélection du défendeur, que le plaignant contestait, de façon à limiter la demande de divulgation de documents relativement aux plaintes dont je suis saisie.

24 À la suite de discussions approfondies et d’un examen exhaustif des documents, le plaignant a convenu que, si le défendeur lui donnait des copies non censurées des feuilles de calcul sommaires d’évaluation originales pour tous les concours de niveau CR-03 et CR-04 auxquels il a participé pendant la période visée, ainsi que les justifications de dotation connexes, il pourrait connaître ses notes et son classement eu égard aux concours, et il pourrait trouver des preuves pour appuyer ses allégations d’attitude antisyndicale et de pratique déloyale de travail. Après avoir examiné les copies non censurées, le plaignant devait dire au défendeur quels processus de sélection il allait contester. Les parties ont convenu que, comme chaque concours a un gestionnaire recruteur distinct, le fait de limiter le nombre de processus de sélection contesté ferait en sorte de limiter le nombre de témoins, et ce, autant pour le défendeur que pour le plaignant; ce serait avantageux pour les deux parties. Le défendeur a déclaré dans sa lettre au greffe datée du 6 janvier 2011 que les documents avaient été fournis au plaignant, chose qu’il avait confirmée dans son courriel du 15 décembre 2010 au greffe.

25 Le plaignant a finalement identifié 11 décisions en matière de dotation prises par le défendeur qui, selon lui, pourraient être vues comme des pratiques déloyales de travail. Il a toutefois précisé, qu’à part quatre ou cinq décisions, elles n’étaient peut-être que de simples décisions de dotation.

26 Le 15 décembre 2010, le plaignant a envoyé deux courriels et pièces jointes au greffe. Dans son deuxième courriel, le plaignant a déclaré qu’il avait besoin de plus de documents pour appuyer ses arguments concernant la réparation; il lui fallait tous les contrats et les documents se rapportant aux candidats faisant parti des bassins de dotation pour les postes classifiés CR-03 et CR-04 dont le poste a été converti à un poste d’une durée indéterminée, conformément à la Politique sur l’emploi pour une période déterminée du Conseil du Trésor. Dans sa réponse du 6 janvier 2011, le défendeur s’est opposé à la vaste demande de documents du plaignant. Il a soutenu qu’il avait déjà fourni les documents demandés et que, selon lui, le plaignant ne cherchait qu’à effectuer une recherche à l’aveuglette parce qu’il n’arrivait pas à prouver le bien-fondé de ses plaintes avec les documents qui lui avaient déjà été remis.

27 Le 28 janvier 2011, j’ai déterminé que la demande de documents additionnels du plaignant, qui visait à appuyer ses arguments sur la réparation, était hâtive, et j’ai expliqué que j’allais entendre les arguments sur le bien-fondé des plaintes de pratique déloyale de travail avant de prendre une décision sur le besoin de divulguer d’autres documents liés à la question de la réparation.

28 Dans son deuxième courriel du 15 décembre 2010, le plaignant a aussi demandé la divulgation des notes de service écrites pendant l’étape de l’évaluation par les candidats à des postes classifiés CR-04 qui ont été nommés à des postes à Victoria. Le plaignant a expliqué qu’il avait reçu une lettre de menace anonyme non datée – incluse dans son courriel – à une date non précisée, et que ces notes de service lui permettraient de comparer l’écriture des candidats avec celle de l’auteur de sa lettre de menace. Selon lui, une fois que l’auteur de la lettre serait identifié, il pourrait le questionner afin de déterminer pourquoi cette lettre lui avait été envoyée. Dans son courriel de réponse envoyé le 6 janvier 2011, le défendeur s’est opposé à la demande de divulgation sur la base que la lettre anonyme n’était pas pertinente dans cette affaire et ne devrait pas être admise. Le défendeur a souligné que le plaignant n’avait pas suggéré que la lettre anonyme avait été envoyée par lui ou qu’il avait joué un rôle quelconque dans son envoi. Il a ajouté que la lettre anonyme n’était pas fiable.

29 Dans sa réplique du 6 janvier 2011, le plaignant a indiqué que l’adresse de l'expéditeur de la lettre anonyme était celle du service de RHDCC de Victoria. Il a ajouté que la lettre avait pour but de l’intimider et qu’il avait [traduction] « […] le droit de savoir si son auteur était un collègue et si ce collègue avait agi seul ou sur les instructions de la direction […] ».

30 Après avoir examiné la demande et constaté que la lettre anonyme jointe au deuxième courriel du 15 décembre 2010 du plaignant n’avait pas d’adresse d’expéditeur, j’ai déterminé que les plaintes devant moi portaient sur des pratiques déloyales de travail prétendument commises par le défendeur. Selon les plaintes alléguées, le défendeur aurait continuellement refusé d’embaucher ou de continuer d’embaucher le plaignant, et ce, en contravention de l’alinéa 186(2)a) de la LRTFP. Les plaintes allèguent également que le plaignant aurait été traité de façon discriminatoire, parce que ce dernier cherchait à devenir un dirigeant ou un représentant syndical, qu’il avait exercé son droit, en vertu de la LRTFP, de déposer une plainte de pratique déloyale de travail et qu’il avait l’intention de témoigner à l’audience. Le plaignant n’a pas suggéré que la lettre anonyme avait été envoyée par le défendeur ou que ce dernier avait joué un rôle quelconque dans son envoi.

31 J’ai également noté que cette affaire était devant la Commission depuis plusieurs années, et devant moi plus précisément depuis août 2010. Ce n’est que dans le courriel du 6 janvier 2011 envoyé par le plaignant qu’il a été question, pour la première fois, de la lettre anonyme envoyée par un collègue qui aurait peut-être agi suivant les instructions du défendeur et reçue à une date inconnue. La demande du plaignant laissait entendre que l’un des autres candidats aurait envoyé la lettre et qu’il voulait demander à l’auteur pourquoi il avait envoyé cette lettre. J’ai déterminé, en fonction des arguments des parties et des documents présentés jusqu’à maintenant, que la lettre anonyme n’était pas pertinente dans cette affaire. J’ai rejeté la demande de divulgation du plaignant.

B. Respect des délais pour les plaintes

1. Contexte

32 Dans sa correspondance du 15 janvier 2010 avec le greffe, le défendeur a déclaré, entre autres, que la plainte du 22 décembre 2008 était hors délai, puisqu’il y était mentionné que les événements qui ont mené à la plainte duraient depuis le 27 juin 2008. Elle a donc été déposée cinq mois après la date susmentionnée, c’est-à-dire bien au-delà du délai obligatoire de 90 jours établi au paragraphe 190(2) de la LRTFP. Le paragraphe 190(2) est libellé comme suit :

190. (2) […] les plaintes prévues au paragraphe (1) doivent être présentées dans les quatre-vingt-dix jours qui suivent la date à laquelle le plaignant a eu — ou, selon la Commission, aurait dû avoir — connaissance des mesures ou des circonstances y ayant donné lieu.

33 Le 30 août 2010, le greffe, à la demande de la Commission, a invité les parties à présenter des arguments écrits relativement à l’objection du défendeur quant au non-respect du délai pour la plainte du 22 décembre 2008. Le défendeur a présenté ses arguments le 27 septembre 2010, et le plaignant, le 28 septembre 2010.

34 Les parties ont de nouveau correspondu par l’intermédiaire du greffe les 4, 5 et 6 octobre 2010 pour tenter de clarifier les erreurs et la confusion au sujet des numéros de dossier de la Commission et les arguments correspondants qui ont été soumis sur la question du non-respect du délai afin de dissiper la confusion des deux côtés.

35 À l’audience, les parties ont parlé des arguments qu’elles avaient soumis. Le défendeur a élargi son objection relativement au non-respect du délai pour l’appliquer aux trois plaintes qui me sont présentées. Les deux parties ont ensuite parlé de l’objection élargie relativement au non-respect du délai.

36 Dans son premier courriel du 15 décembre 2010, le plaignant a soulevé des arguments complètement nouveaux concernant le respect du délai pour ses plaintes du 19 septembre 2008 et du 22 décembre 2008. Ces arguments sont fondés sur le paragraphe 19.4(4) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, L.C. 2005, ch. 46 (la « LPFDAR ») qui se lit comme suit :

19.4 (4) Dans le cas prévu au paragraphe (3) :

a) le paragraphe 19.1(4) cesse de s’appliquer;

b) la période qui commence le jour où la plainte a été déposée et qui se termine le jour où la décision motivée est envoyée au plaignant n’est pas prise en compte dans le calcul du délai dont dispose le plaignant pour intenter tout recours prévu par toute autre loi fédérale ou toute convention collective à l’égard des prétendues représailles.

37 Le plaignant a informé le greffe qu’il avait déposé une plainte de représailles auprès du Commissariat à l’intégrité du secteur public (le « CISP ») le 19 juin 2008, après avoir retiré sa plainte abandonnée. Il a ajouté qu’il avait déposé une plainte modifiée le 29 septembre 2008 et qu’on l’avait informé le 29 octobre 2008 que le CISP ne traiterait pas sa plainte. Il a insisté sur le fait que, conformément au libellé de la LPFDAR, particulièrement l’alinéa 19.4(4)b), la décision du CISP de ne pas traiter sa plainte de représailles faisait en sorte que ses plaintes du 19 septembre et du 22 décembre 2008 n’étaient pas hors délai.

38 Dans une réponse envoyée par  courriel le 6 janvier 2011, le défendeur s’est opposé aux nouveaux arguments du plaignant. Selon lui, la présentation des preuves et des arguments sur la question préliminaire du délai s’était terminée à l’audience d’octobre 2010, et les parties attendaient maintenant une décision de ma part à ce sujet. Le défendeur a expliqué que le plaignant avait eu de nombreuses occasions depuis janvier 2010 de mentionner sa plainte de représailles conformément à la LPFDAR et ses effets sur les plaintes devant moi, mais qu’il ne l’avait pas fait. Par ailleurs, le plaignant n’a rien mentionné à cet égard pendant l’audience de deux jours qui a eu lieu en octobre 2010.

39 Le défendeur a ajouté que, si je choisissais d’examiner la LPFDAR, je devrais le faire sous deux angles seulement. Premièrement, le plaignant a mentionné spécifiquement le paragraphe 19.4(4), et il a ignoré le libellé et les ramifications du paragraphe 19.1(4), qui lui interdisaient d’entamer une autre procédure en vertu d’une autre loi fédérale pour ce qui est des mesures de représailles présumées pendant que sa plainte se trouvait devant le CISP. Le paragraphe 19.1(4) se lit comme suit :

19.1 (4) Sous réserve du paragraphe 19.4(4), s’il dépose une plainte au titre du paragraphe (1), le fonctionnaire ou l’ancien fonctionnaire ne peut intenter de recours au titre de toute autre loi fédérale ou de toute convention collective à l’égard des prétendues représailles.

40 Deuxièmement, le défendeur a soutenu qu’il y avait des contradictions entre la documentation de la plainte de représailles du plaignant et son premier courriel du 15 décembre 2010 au sujet de son état de santé pendant les périodes visées, et que je devrais examiner ces contradictions lors de l’évaluation de la crédibilité du plaignant.

41 Dans sa réponse envoyée par courriel le 6 janvier 2011, le plaignant a expliqué que la LPFDAR a force de loi, que ses dispositions ont des effets directs sur le délai établi par la loi pour le dépôt d’une plainte de pratique déloyale de travail et que la Commission ne peut pas faire abstraction de ces dispositions, qu’elles aient été ou non soulevées ou mentionnées. Il a affirmé que [traduction] « […] ceci est comparable à une affaire non-citée devant un tribunal ou une affaire devant un tribunal qui a été tranchée après une audience, mais avant que l’arbitre de grief rende sa décision […] ». Il a ajouté que, puisque le CISP avait refusé de traiter sa plainte, il pouvait déposer, le 6 novembre 2008, la version originale de sa plainte du 19 septembre 2008, et que [traduction] « conformément aux dispositions de la LPFDAR, la Commission n’a pas besoin de l’« antidater » au 19 septembre 2008 en fonction de [son] courriel. »

42 Comme je n’avais pas encore rendu de décision sur l’objection préliminaire quant au respect du délai en ce qui concerne les plaintes devant moi, j’ai accepté de recevoir des preuves et d’entendre des arguments sur l’application et les effets des dispositions de la LPFDAR sur les plaintes au début de la prochaine audience, le 2 mai 2011.

2. Résumé de l’argumentation

a. Pour le défendeur

43 L’argument initial du défendeur était que, de toute évidence, la plainte du 22 décembre 2008 n’avait pas été déposée en temps opportun. En effet, le plaignant a déclaré que les pratiques déloyales de travail du défendeur duraient depuis le 27 juin 2008, soit cinq mois avant le dépôt de la plainte, le 22 décembre 2008. Par conséquent, il est clair que le plaignant n’a pas respecté le délai prescrit de 90 jours prescrit au paragraphe 190(2) de la LRTFP.

44 Le défendeur a soutenu que la principale question que je devais trancher, conformément au paragraphe 190(2) de la LRTFP, était de savoir quand le plaignant avait eu ou aurait dû avoir connaissance des circonstances qui ont donné lieu à sa plainte. Au vu de la plainte du 22 décembre 2008, il est clair que le plaignant était au courant des circonstances y ayant donné lieu le 27 juin 2008, soit bien au-delà du délai de 90 jours prescrit. Par conséquent, je devrais rejeter la plainte. La Commission n’a pas le pouvoir de prolonger le délai de 90 jours.

45 Le défendeur a cité les décisions suivantes pour m’aider dans mon analyse de la question du délai : Roberts c. Union of Canadian Correctional Officers – Syndicat des agents correctionnels du Canada – CSN (UCCO-SACC-CSN), 2010 CRTFP 96; Forward-Arias c. Syndicat des employé-e-s du Solliciteur général et Alliance de la Fonction publique du Canada, 2010 CRTFP 81; Larocque c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada , 2010 CRTFP 77; Éthier c. Service correctionnel du Canada et Union of Canadian Correctional Officers – Syndicat des agents correctionnels du Canada - CSN, 2010 CRTFP 7; Hérold c. Alliance de la Fonction publique du Canada et Gritti, 2009 CRTFP 132; Exeter c. Association canadienne des employés professionnels, 2009 CRTFP 14.

46 Le défendeur a déclaré que la jurisprudence soutenait les propositions suivantes : la Commission n’a pas le pouvoir de modifier ou de prolonger le délai de 90 jours; même si le plaignant ne connaissait pas ce délai, cela ne justifie pas une prolongation de ce délai; si le plaignant avait connaissance des circonstances qui ont donné lieu à sa plainte, tout trouble médical qui l’aurait empêché de déposer sa plainte dans le délai prescrit ne justifie pas la prolongation du délai; la Commission peut seulement exercer sa discrétion pour ce qui est de déterminer quand le plaignant avait eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance des circonstances ou des actions qui ont donné lieu à sa plainte.

47 Le défendeur a ensuite élargi son objection pour l’appliquer aux trois plaintes devant moi. Il a soutenu que la plainte du 19 septembre 2008 était aussi hors délai, et ce, pour deux raisons. Premièrement, il a été établi que, manifestement, le plaignant connaissait les circonstances qui ont donné lieu à sa plainte de pratique déloyale de travail [traduction] « depuis février 2008 », et qu’il n’avait envoyé son courriel de plainte à la Commission que le 19 septembre 2008, soit définitivement au-delà du délai de 90 jours.

48 Deuxièmement, même si le plaignant ne connaissait pas les circonstances qui ont donné lieu à sa plainte du 19 septembre 2008 avant la fin de son emploi, le 27 juin 2008, la plainte en question n’était pas à juste titre devant la Commission, car le greffe n’a reçu l’original par la poste que le 6 novembre 2008. Le défendeur a soutenu que, même si le courriel de plainte avait été envoyé à l’intérieur du délai de 90 jours, le délai du plaignant relativement à la soumission de la version originale de sa plainte fait en sorte qu’il n’a pas satisfait à l’exigence d’envoyer la plainte « dans les plus brefs délais » énoncée à l’article 3 du Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (le « Règlement »), DORS/2005-79 :

3. (1) Dans le cas où le document introductif est transmis au directeur général par télécopieur, l’original et une copie lui en sont envoyés dans les plus brefs délais.

(2) Le document introductif transmis par télécopieur est réputé être reçu le jour de son envoi par télécopieur si l’original et une copie en sont envoyés conformément au paragraphe (1).

49 Le défendeur a ajouté que, si la plainte du 19 septembre 2008 est valide, j’ai entre les mains une plainte de pratique déloyale de travail active, et le plaignant n’avait pas à déposer d’autres plaintes. Il s’agirait alors de déterminer la mesure de redressement appropriée. Cependant, si la plainte du 19 septembre 2008 n’est pas valide, les plaintes du 22 décembre et du 1er octobre, dans lesquelles il est mentionné que les représailles et les pratiques déloyales de travail duraient depuis le 27 juin 2008, n’ont pas été déposées à l’intérieur du délai prescrit.

b. Pour le plaignant

50 Le plaignant a déclaré que la plainte du 19 septembre 2008, qui est datée du 19 septembre 2008 et qui a été transmise par courriel à cette date, a été déposée dans les délais prescrits. Il a posté la version originale de la plainte au greffe le 6 novembre 2008. Il a soutenu qu’il avait respecté l’exigence énoncée à l’article 3 du Règlement d’envoyer la plainte « dans les plus brefs délais », compte tenu de son état de santé et du fait que le greffe avait commis une erreur en ne répondant pas officiellement à sa demande de mesure d’adaptation.

51 Le plaignant a noté qu’il avait déclaré ce qui suit dans sa plainte du 19 septembre 2008 :

[Traduction]

[…]

Ce récit des faits est incomplet, car je suis en train de me rétablir d’une opération chirurgicale visant à réparer un décollement de rétine. J’envoie ce document pour ne pas manquer le délai de 90 jours. Je peaufinerai ma plainte quand j’aurai le feu vert de mon ophtalmologiste. Pour l’instant, je dois éviter d’utiliser l’ordinateur, c’est pourquoi je soumets une plainte abrégée […].

[…]

52 Le plaignant a également mentionné la note d’accompagnement suivante :

[Traduction]

[…]

En raison de mon état de santé (je me rétablis d’une chirurgie oculaire à la suite d’un détachement rétinien), je vous demande d’accepter les fichiers PDF numérisés de ma plainte de pratique déloyale de travail.

Je préférerais ne pas devoir poster une autre copie de ma plainte en raison de mon état de santé. Veuillez m’aviser si oui ou non vous acceptez cette version PDF.

[…]

53 Le plaignant a déclaré que, au moyen de cette note, il demandait une mesure d’adaptation, soit de ne pas avoir à poster la version originale de sa plainte au greffe. Le greffe n’a pas interprété la note de cette façon, et il n’a pas répondu au plaignant. Ce dernier a envoyé un courriel au greffe le 30 octobre 2008 pour savoir où en était sa plainte, et on lui a répondu qu’il devait poster la version originale, ce qu’il s’est empressé de faire. Le greffe a reçu le document original le 6 novembre 2008.

54 Le plaignant a aussi précisé que, même s’il a indiqué dans sa plainte du 19 septembre 2008 que les pratiques déloyales avaient eu lieu entre février 2008 et le 27 juin 2008 environ, ce n’est que lorsque son affectation d’une durée déterminée a pris fin qu’il a su avec certitude que le défendeur n’allait pas prolonger son affectation ou lui offrir une autre affectation d’une durée déterminée ou indéterminée. Par conséquent, le 27 juin 2008 est la date la plus hâtive à laquelle le délai de 90 jours peut être appliqué.

55 Le plaignant a ajouté que, bien qu’il ait reçu du défendeur une lettre l’informant que son affectation d’une durée déterminée ne serait pas prolongée, il a continué de postuler aux postes offerts par le défendeur. Il a soutenu qu’il ne pouvait pas raisonnablement être demeuré au fait des décisions en matière de dotation après son départ. Ce n’est que lorsque son syndicat a communiqué avec lui par courriel en juillet 2008 et qu’il a reçu des documents en octobre 2009 à la suite de sa demande d’accès à l’information qu’il a su que le défendeur continuait de nommer d’autres candidats faisant parti des bassins de dotation à des postes classifiés CR-03 et CR-04, mais pas lui. Cette pratique de travail était déloyale, car le plaignant était plus qualifié que certaines des personnes à qui on avait offert un emploi. Par conséquent, l’élément déclencheur pour le calcul du délai de 90 jours était en fait le courriel que lui a envoyé le syndicat, ce qui signifie que la plainte du 19 septembre 2008 a manifestement été déposée dans le délai prescrit de 90 jours.

56 Le plaignant a déclaré que la plainte du 22 décembre 2008 devait être lue conjointement avec la plainte du 19 septembre 2008, qui décrit les pratiques déloyales de travail continues du défendeur de mai 2008 au 19 septembre 2008. Bien qu’il y soit indiqué que les pratiques déloyales de travail duraient depuis le 27 juin 2008, la plainte du 22 décembre 2008 couvrait en fait la période du 19 septembre 2008 au 22 décembre 2008, puisque le défendeur avait continué de se livrer à des pratiques déloyales de travail.

57 Le plaignant a soutenu que les preuves sur son état de santé rejoignaient celles concernant le bien-fondé, et il a demandé de ne pas avoir à les présenter deux fois.

58 Après avoir entendu de façon préliminaire les arguments des parties sur la question du délai, j’ai pris l’objection du défendeur en délibéré, et j’ai entendu les preuves sur le bien-fondé des plaintes.

3. Décision

59 Le fardeau de la preuve pour ce qui est de l’objection au sujet du délai incombait au défendeur.

60 Les plaintes devant moi ont été déposées entre le 19 septembre 2008 et le 1er octobre 2009. Elles ont été regroupées pour cette audience à la demande du plaignant.

61 Les parties ont fini par s’entendre sur le fait qu’il est important de déterminer si la plainte du 19 septembre 2008 respecte le délai prescrit. Le défendeur a soutenu que, si la plainte du 19 septembre 2008 est valide, les plaintes du 22 décembre 2008 et du 1er octobre 2009, qui couvrent les périodes du 19 septembre 2008 au 22 décembre 2008 et du 22 décembre 2008 au 1er octobre 2009, respectivement, ne sont pas nécessaires. Si la plainte du 19 septembre 2008 a été déposée à temps et est fondée, je vais devoir déterminer quel est le redressement approprié pour des pratiques déloyales de travail s’étalant sur toute la période visée. Par contre, si la plainte du 19 septembre 2008 est hors délai, les deux autres plaintes, qui portent sur des allégations de pratiques déloyales de travail [traduction] « continues depuis le 27 juin 2008 », sont également hors délai.

62 Le plaignant est d’accord avec l’analyse du défendeur concernant le respect du délai, et il a déclaré qu’il avait déposé les plaintes du 22 décembre 2008 et du 1er octobre 2009 à titre de précaution, pour s’assurer que la Commission prendrait en considération le refus continu du défendeur de l’embaucher ou de le réembaucher entre le 27 juin 2008 et le 1er octobre 2009.

63 Conformément au paragraphe 190(2) de la LRTFP, les plaintes « […] doivent être présentées dans les quatre-vingt-dix jours qui suivent la date à laquelle le plaignant a eu — ou, selon la Commission, aurait dû avoir — connaissance des mesures ou des circonstances y ayant donné lieu ». Les parties conviennent que, selon la jurisprudence de la Commission, le délai de 90 jours est obligatoire et doit être compté en jours civils. La Commission n’a pas compétence pour prolonger ce délai; elle peut seulement exercer sa discrétion pour ce qui est de déterminer quel est l’élément déclencheur qui a établi le début de la période de 90 jours, soit la date à laquelle le plaignant a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance des faits qui ont donné lieu à sa plainte. Il s’agit d’une question de fait.

64 La première question consiste à déterminer la date de dépôt de la plainte du 19 septembre 2008. La plainte a été envoyée par courriel à la Commission le 19 septembre 2008. Le greffe a traité les documents initiaux transmis par courriel comme s’ils avaient été télécopiés en vertu de l’article 3 du Règlement. La version originale de la plainte n’a été postée à la Commission que le 6 novembre 2008.

65 Les arguments du plaignant selon lesquels la plainte du 19 septembre 2008 a été déposée à temps créent de la confusion pour deux raisons. Premièrement, le plaignant a déclaré que plusieurs décisions de dotation prises par les gestionnaires du défendeur pendant la première partie de 2008 constituaient des pratiques déloyales de travail. Bien que certaines de ces décisions aient manifestement été prises au-delà du délai de 90 jours, la Commission doit en tenir compte pour réaliser la tâche importante d’établir le contexte historique dans lequel les plaintes doivent être examinées. Deuxièmement, le plaignant a affirmé, dans ce qui doit être un argument subsidiaire, qu’il n’était pas nécessaire que la Commission « antidate » sa plainte au 19 septembre 2008; en effet, elle peut considérer que la plainte a été déposée le 6 novembre 2008, date à laquelle il a posté le document original au greffe.

66 Après avoir appliqué l’article 3 du Règlement aux faits qui m’ont été présentés, je conclus que le dépôt de la plainte du 19 septembre 2008 a eu lieu quand la plainte a été transmise par courriel au greffe, si on considère que l’expédition par la poste du document original le 6 novembre 2008 répond à l’exigence du Règlement d’envoyer la version originale « dans les plus brefs délais ».

67 Le plaignant a précisé qu’il avait bien envoyé la version originale de sa plainte « dans les plus brefs délais », soit le 6 novembre 2008. La note d’accompagnement de son courriel du 19 septembre 2008 se lit comme suit :

[Traduction]

[…]

En raison de mon état de santé (je me rétablis d’une chirurgie oculaire à la suite d’un décollement de la rétine), je vous demande d’accepter les fichiers PDF numérisés de ma plainte de pratique déloyale de travail.

Je préférerais ne pas devoir envoyer une autre copie de ma plainte par la poste en raison de mon état de santé. Veuillez m’aviser si oui ou non vous acceptez cette version PDF.

[…]

Le plaignant a expliqué que, en raison de restrictions physiques découlant de sa chirurgie à la rétine, il a demandé au greffe de lui accorder une mesure d‘adaptation en faisant abstraction de l’exigence réglementaire de lui envoyer la version originale de sa plainte; le greffe n’a pas répondu à sa demande. Il a déclaré que lorsqu’il a communiqué avec le greffe à la fin du mois d’octobre 2008 pour savoir où en était rendu le traitement de sa plainte du 19 septembre 2008, on l’a avisé que, selon le Règlement, il devait poster la version originale, ce qu’il s’est empressé de faire. Le greffe a reçu le document le 6 novembre 2008.

68 Le défendeur a indiqué que le plaignant n’avait pas présenté de preuve médicale pour confirmer que ses yeux étaient devenus extrêmement sensibles à la lumière à cause de sa chirurgie à la rétine, à un tel point où il ne pouvait pas sortir et effectuer des activités normales, comme poster la plainte du 19 septembre 2008 au greffe la journée même.

69 Je suis d’accord que la preuve médicale est au mieux insuffisante. Toutefois, personne n’a contesté le fait que le plaignant souffrait d’un handicap visuel important pendant cette période; quoi qu’il en soit, cette question n’est pas décisive. Dans cette affaire, le plaignant n’a pas fait valoir que la nature et la gravité de son état de santé lors de cette période déterminante justifiaient la prolongation du délai de 90 jours établi au paragraphe 190(2) de la LRTFP, comme c’était le cas dans Exeter, cité par le défendeur. Le plaignant a plutôt soutenu que, malgré son état de santé, il avait déposé la plainte du 19 septembre 2008 à l’intérieur du délai de 90 jours en l’envoyant par courriel le 19 septembre 2008. Comme il a demandé une mesure d’adaptation concernant l’expédition par la poste du document original au greffe, il a répondu à l’exigence d’envoyer sa plainte « dans les plus brefs délais », puisqu’il a posté le document dès qu’il a été informé que sa demande de mesure d’adaptation avait été [traduction] « rejetée ».

70 Après avoir lu le courriel du 19 septembre 2008 du plaignant, je conclus que, bien que sa demande de ne pas être obligé de poster au greffe la version originale de sa plainte aurait pu être formulée plus clairement, le plaignant croyait qu’il avait bien demandé une mesure d’adaptation. Quand on l’a informé plus tard qu’il n’était pas possible de l’accommoder, il s’est empressé de poster son document original. Par conséquent, je conclus que le plaignant a respecté l’exigence énoncée au paragraphe 3(1) du Règlement, qui prévoit que la plainte doit être envoyée « dans les plus brefs délais », et qu’il faut considérer que la plainte du 19 septembre 2008 a bien été déposée à la date à laquelle le courriel a été transmis.

71 Toutefois, le fait d’établir à quelle date la plainte a été déposée ne permet pas de confirmer que la plainte du 19 septembre 2008 a été déposée dans le délai prescrit aux termes du paragraphe 190(2) de la LRTFP. La plainte respecte le délai prescrit seulement si les mesures ou les circonstances visées par la plainte ont eu lieu moins de 90 jours avant le dépôt de la plainte. Le défendeur a rappelé que la question ici est de déterminer quand le plaignant a eu connaissance ou, selon la Commission, aurait dû avoir connaissance des mesures ou des circonstances qui ont donné lieu à la plainte. Le défendeur est d’avis que c’était avant le début de la période de 90 jours, soit la mi-juin 2008.

72 Le défendeur a affirmé que je devais établir une distinction entre les impacts possibles de la chirurgie oculaire du plaignant sur le dépôt de sa plainte du 19 septembre 2008 et les impacts possibles de cette chirurgie sur sa prise de connaissance présumée des mesures ou des circonstances qui ont donné lieu à la plainte. Premièrement, le défendeur a souligné que, vu la plainte du 19 septembre, 2008, il est évident que le plaignant était au courant des pratiques déloyales de travail alléguées [traduction] « depuis février 2008 environ », ce qui signifie que ce dernier est loin d’avoir respecté le délai de 90 jours, puisqu’il a déposé sa plainte le 19 septembre 2008. Deuxièmement, le défendeur a précisé qu’il avait informé le plaignant dans une lettre datée du 20 mai 2008 que son affectation d’une durée déterminée ne serait pas prolongée. Par conséquent, si sa plainte de pratique déloyale de travail est fondée sur le fait que son affectation d’une durée déterminée n’a pas été prolongée, le délai de 90 jours n’est pas respecté ici non plus.

73 Le paragraphe déterminant de la plainte du 19 septembre 2008 se lit comme suit :

[Traduction]

[…]

Je faisais partie de deux bassins d’embauche valides (CR-03 et CR-04) et il y avait de nombreuses possibilités d’emploi, mais RHDCC a refusé de prolonger mon contrat. Mon contrat a pris fin le 27 juin 2008. Les représailles et les pratiques déloyales de travail duraient de façon continue depuis février 2008 jusqu’au 27 juin environ. […]

[…]

74 Le plaignant a soutenu que, tout au long des mois de mai et de juin 2008, il tentait toujours de se faire muter aux bureaux de la rue Government, de faire renverser la décision de ne pas prolonger son affectation d’une durée déterminée par des cadres plus haut placés et d’obtenir une autre affectation d’une durée déterminée ou indéterminée parmi les nombreux postes de niveau CR-03 ou CR-04 supposément disponibles. Il a précisé que la date déterminante dans sa plainte est le 27 juin 2008, soit la fin de son affectation d’une durée déterminée. Comme il a déposé sa plainte le 19 septembre 2008, il a respecté le délai de 90 jours. Il a ajouté que, bien qu’il savait que des postes de niveau CR-03 et CR-04 étaient disponibles, et qu’il se doutait que le défendeur offrait des nominations à d’autres candidats faisant partie des bassins de candidats préqualifiés pour des postes de niveau CR-03 et CR-04, dont il faisait également partie, il n’en avait pas la certitude avant de recevoir le courriel de son syndicat en juillet 2008. Cependant, je note que les communications avec le syndicat présentées par le plaignant à titre de preuve ne sont pas datées de juillet 2008. Le premier courriel est daté du 27 juin 2008; il s’agit d’une réponse à la demande d’information du plaignant concernant les décisions de dotation prises par le défendeur pour ce qui est des bassins CR-03 et CR-04 et concernant des postes occasionnels (pièce 11). Le deuxième courriel est daté du 21 juillet 2009 et porte sur les dates d’expiration des bassins CR-03 et CR-04 (pièce 39).

75 Le paragraphe contesté de la plainte du 19 septembre 2008 peut être interprété de différentes façons. J’accepte, selon le principe de la prépondérance des probabilités, l’argument du plaignant selon lequel il n’était pas certain, avant le 27 juin 2008, si le défendeur refusait de continuer de l’employer à titre de mesure de représailles. C’est à cette date que son affectation d’une durée déterminée a pris fin. Le cadre supérieur avec qui il avait communiqué pour obtenir de l’aide n’était pas intervenu et il n’a pas été muté aux bureaux de la rue Government ni réembauché d’une manière ou d’une autre. La situation du plaignant était claire à ce moment-là. C’est pourquoi le 27 juin 2008 est la date à partir de laquelle il faut calculer le délai de 90 jours.

76 Les décisions citées par le défendeur sont distinctes des faits de la présente affaire. Dans Éthier, le plaignant a eu connaissance tôt des faits qui ont donné lieu à sa plainte, mais il a attendu d’avoir une quantité de preuves qu’il jugeait suffisante pour appuyer sa cause. Il n’est pas non plus question de permettre au plaignant d’utiliser une demande d’accès à l’information présentée en 2009 pour prolonger le délai de 90 jours. Le plaignant a eu connaissance le 27 juin 2008 de la position non ambigüe du défendeur voulant que ce dernier rejette ses demandes de mutation aux bureaux de la rue Government et refuse de prolonger son affectation d’une durée déterminée ou de lui offrir une nouvelle affectation d’une durée déterminée ou indéterminée. Je conclus que la plainte du 19 septembre 2008 a été déposée dans les délais prescrits.

77 Dans Forward-Arias, la plaignante a fait valoir que son état de santé l’avait empêchée de réagir à une violation de la LRTFP plusieurs années plus tôt. De plus, contrairement à Hérold, le plaignant dans la présente n’a pas demandé que le délai de 90 jours soit prolongé parce qu’il ne savait pas qu’il pouvait déposer une plainte de pratique déloyale de travail.

78 Même si j’ai conclu que la plainte du 19 septembre 2008 avait été déposée à temps, cela ne veut pas dire que les nombreuses allégations de pratiques déloyales de travail que le plaignant a soulevées à l’audience ont toutes été déposées ans les délais prescrits. Cette question sera réglée alors que chaque allégation sera évaluée pour en établir le bien-fondé.

79 Je note également,  sans toutefois  prendre de décision concernant l’argument subsidiaire du plaignant au sujet du respect du délai, que conformément à l’alinéa 19.4(4)b) de la LPFDAR, la plainte du 19 septembre 2008 a été déposée dans les délais prescrits, parce que le délai de 90 jours de la CRTFP est suspendu quand une plainte de représailles est déposée en vertu de la LPFDAR. Le décompte reprend lorsque le CISP rend une décision au sujet de la plainte de représailles.

80 Selon la correspondance du CISP, qui est estampillée du 29 octobre 2008 et qui a été présentée par le plaignant, celui-ci a déposé une plainte initiale de représailles le 19 juin 2008. Cette plainte a été modifiée lorsque le plaignant a soumis de l’information additionnelle le 29 septembre 2008 et le 10 octobre 2008. Le plaignant a été avisé dans la correspondance du 29 octobre 2008 provenant du CISP qu’ils avaient décidé de ne pas enquêter sur sa plainte de représailles. Les raisons de cette décision ont été fournies.

81 Je note aussi que le plaignant a attendu au 15 décembre 2010, alors qu’il a tenté de fournir un argument subsidiaire au sujet du respect du délai, pour mentionner à la Commission qu’il avait déposé une plainte de représailles auprès du CISP. Je n’accepte pas la déclaration du plaignant selon laquelle il n’a pas enfreint les dispositions de la LRTFP parce qu’il n’était pas au courant qu’il ne pouvait pas entamer une procédure de recours sous le régime d’une autre loi fédérale pendant que sa plainte de représailles, qui portait sur les mêmes faits, se trouvait devant le CISP. Cette déclaration ne concorde pas avec son autre déclaration au sujet des raisons qui l’avaient amené à communiquer avec le greffe le 30 octobre 2008 pour se renseigner à propos de sa plainte du 19 septembre 2008. Cette déclaration ne concorde pas plus avec la réponse qu’il a envoyée par courriel au greffe le 6 janvier 2011, dans laquelle il affirme avoir déposé une plainte officielle à la CISP à la mi-juin 2008, après avoir retiré la plainte abandonnée et une plainte de harcèlement qu’il avait déposée auprès du défendeur. Il a déclaré qu’il ne voulait pas qu’un autre mécanisme de recours soit en jeu, car le CISP pourrait alors rejeter sa plainte de représailles. Il faisait référence au paragraphe 19.3(2) de la LPFDAR, qui prévoit que le CISP ne peut statuer sur la plainte si une personne ou un organisme est saisi de l’objet de celle-ci au titre de toute autre loi fédérale.

82 En plus de son état de santé et de sa demande de mesure d’adaptation, le plaignant a également donné une autre raison de ne pas avoir envoyé au greffe la version originale de sa plainte du 19 septembre 2008 avant le 6 novembre 2008 : il [traduction] « était probablement en train d’attendre » la décision du CISP concernant sa plainte de représailles du 19 juin 2008.

83 Le plaignant a affirmé que la lettre du 29 octobre 2008 du CISP l’avait encouragé à envoyer un courriel au greffe le 30 octobre 2008 pour s’informer du traitement de sa plainte du 19 septembre 2008. Il a expliqué de manière plutôt confuse qu’il était de nouveau libre de déposer une plainte de pratique déloyale de travail puisque le CISP avait rejeté sa plainte de représailles le 29 octobre 2008. De plus, il a affirmé que la Commission pouvait considérer le 6 novembre 2008, soit la date d’envoi par la poste de la version originale de sa plainte, comme étant la date de dépôt de sa plainte et qu’elle ne devrait pas [traduction] « antidater » cette plainte au 19 septembre 2008.

84 Le greffe n’ [traduction] « antidate » pas de plainte. Comme il a été mentionné, il est indiqué dans le Règlement que, si un document initial est transmis au greffe par télécopieur et que la version originale est envoyée dès que possible, le document télécopié est considéré comme ayant été reçu le jour de sa transmission. Tout document transmis par courriel est également traité de cette façon.

85 Je suis d’accord avec le défendeur que la plainte du 19 septembre 2008 semble enfreindre le paragraphe 19.1(4) de la LPFDAR, qui spécifie que : « […] s’il dépose une plainte au titre du paragraphe (1), le fonctionnaire ou l’ancien fonctionnaire ne peut intenter de recours au titre de toute autre loi fédérale ou de toute convention collective à l’égard des prétendues représailles. » Toutefois, puisque le CISP a informé le plaignant qu’il avait décidé de ne pas enquêter sur sa plainte de représailles en vertu de la LPFDAR, j’évaluerai le bien-fondé des trois plaintes devant moi, car elles ont été déposées dans le délai prescrit aux termes de la LRTFP.

C. Fardeau de la preuve

86 Le 30 août 2010, la Commission a fixé des dates pour la présentation d’arguments écrits sur l’applicabilité du paragraphe 191(3) de la LRTFP (la « disposition sur le renversement du fardeau de la preuve »). Le paragraphe 191(3) est libellé comme suit :

191. (3) La présentation par écrit, au titre du paragraphe 190(1), de toute plainte faisant état d’une contravention, par l’employeur ou la personne agissant pour son compte, du paragraphe 186(2), constitue une preuve de la contravention; il incombe dès lors à la partie qui nie celle-ci de prouver le contraire.

On a demandé aux parties de déterminer si les trois plaintes devant moi constituaient, à première vue, un cas défendable de violation de la LRTFP. Plus particulièrement, on leur a demandé de déterminer si, supposant que la Commission établisse que toutes les allégations mises de l’avant soient fondées, les plaintes constituaient un cas défendable de violation par le défendeur des dispositions de la LRTFP sur les pratiques déloyales de travail.

87 Le 28 septembre 2010, le greffe a reçu les arguments écrits du défendeur, datés du 27 septembre 2010, et ceux du plaignant, datés du 28 septembre 2010. Les parties ont aussi parlé de leurs arguments écrits au début de l’audience, en octobre 2010.

1. Résumé de l’argumentation

a. Pour le plaignant

88 Le plaignant a déclaré que, comme ses gestionnaires connaissaient ses activités de dénonciateur à l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et à cause du choix du moment de la décision du 20 mai 2008 de ne pas prolonger son affectation d’une durée déterminée, il avait un cas défendable de pratique déloyale de travail. Le défendeur aurait pris connaissance du rôle de dénonciateur du plaignant lors de l’entrevue de ce dernier à l’émission « National News » de la CBC, le 1er octobre 2007, soit environ un mois après son embauche à titre de commis de niveau CR-04, dans le cadre du programme PEC. Le plaignant a soutenu que le moment de la décision du défendeur de ne pas prolonger son affectation était suspect, car cette décision a été prise 14 jours après qu’il ait déposé la plainte abandonnée, ce qui correspond au moment où les ressources humaines (RH) auraient avisé le défendeur de la plainte.

89 Le plaignant a expliqué qu’il avait demandé pour la première fois en janvier 2008, puis en mai 2008, d’être muté des bureaux de la rue Pandora à ceux de la rue Government pour être admissible à un poste de dirigeant de la section locale du syndicat. Il a soutenu que le défendeur avait bloqué sa mutation parce qu’il voulait garder en poste un dirigeant syndical faible et qu’il ne voulait pas d’un président de syndicat talentueux, compétent, militant et tenace à Victoria. Le plaignant a ajouté que de nombreux courriels, obtenus grâce à une demande d’accès à l’information sous le régime de la Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. (1985), ch. P-21, indiquent que les gestionnaires du défendeur étaient au courant de ses aspirations syndicales, de ses demandes de mutation et de ses problèmes de dotation en mai, juin et juillet 2008. Il a affirmé qu’il avait d’autres preuves et qu’il allait les présenter à l’audience.

90 Le plaignant a cité les décisions suivantes pour appuyer ses arguments selon lesquels il avait établi un cas défendable selon lequel le défendeur avait enfreint la LRTFP et que la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve devait être appliquée : Quadrini c. Agence du revenu du Canada et Hillier, 2008 CRTFP 37; Hager et al. c. Opérations des enquêtes statistiques et ministre responsable de Statistique Canada, 2009 CRTFP 80; Lamarche c. Marceau, 2004 CRTFP 29; Plourde c. Compagnie Wal-Mart du Canada Inc., 2009 CSC 54.

91 Selon le plaignant, Quadrini appuie la proposition selon laquelle, si la Commission a quelque doute que ce soit sur ce que les faits révèlent – présumant qu’ils sont véridiques – elle doit pencher du côté de la conclusion selon laquelle il y a un cas défendable pour ce qui est du lien devant être établi entre le fait que le plaignant ait exercé ses droits découlant de la LRTFP et les représailles du défendeur. Par conséquent, la Commission doit conserver la possibilité pour le plaignant de faire entendre sa plainte dans le respect de la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve et rendre une décision en fonction des preuves formelles sur le fond que les parties présenteront.

92 Le plaignant a aussi affirmé que, selon Plourde, le fardeau de la preuve avait été inversé dans le Code canadien du travail, L.R.C. (1985), ch. L-2, pour mettre les employeurs et les employés sur un même pied d’égalité sur le plan de l’information, étant donné le désavantage inévitable pour les employés qui tentent de démontrer que les actes de leur employeur étaient motivés par un sentiment antisyndical. Comme il y a de nombreuses raisons légitimes de renvoyer un employé, ce dernier peut avoir de la difficulté à prouver que son congédiement était dû à ses activités syndicales. Le plaignant a ajouté que, dès que les employés démontrent qu’une mesure a été prise à leur égard et qu’ils exercent leurs droits conformément à la LRTFP, la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve devrait être appliquée. Quand le défendeur a décidé de ne pas prolonger l’affectation d’une durée déterminée du plaignant, ce dernier avait déjà exprimé ses aspirations de devenir un président de syndicat et avait récemment déposé la plainte abandonnée.

b. Pour le défendeur

93 Le défendeur a soutenu qu’il était clair dans la jurisprudence de la Commission que le plaignant devait présenter un cas défendable pour que la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve puisse être appliquée.

94 Le défendeur a affirmé que la simple allégation du plaignant que le refus de l’employeur de prolonger son affectation d’une durée déterminée ou de lui offrir une autre affectation était une mesure de représailles à son endroit pour avoir démontré de l’intérêt à devenir membre du comité exécutif d’un syndicat, n’était pas suffisante pour établir qu’il y avait un cas défendable d’infraction de la LRTFP de sa part.

95 Le défendeur a cité les décisions suivantes pour m’aider dans mon analyse : Quadrini, Laplante c. Conseil du Trésor (Industrie Canada et le Centre de recherches sur les communications), 2007 CRTFP 95; Bouchard c. Conseil du Trésor (Agence de développement économique du Canada), 2009 CRTFP 49.

96 Le défendeur a expliqué que Quadrini appuyait la proposition voulant qu’une plainte de pratique déloyale de travail devait être fondé pour que la Commission puisse rendre une décision à son sujet et qu’il n’était pas suffisant pour le plaignant de lancer des accusations en espérant que le défendeur ne réussisse pas à les réfuter. Le défendeur a soutenu que, selon Quadrini, en présumant que toutes les allégations contenues dans la plainte du 19 septembre 2008 sont véridiques, aucun cas défendable, selon lequel il aurait enfreint l’alinéa 186(2)a) de la LRTFP, ne pourrait être établi. Par conséquent, la plainte devrait être rejetée pour ce motif uniquement.

97 Le défendeur a ajouté que, selon Bouchard, une plainte est admissible seulement si le plaignant peut établir que les gestes du défendeur auraient pu constituer des pratiques déloyales de travail en vertu de la LRTFP. Dans la présente, le plaignant a uniquement soutenu que le défendeur ne lui avait pas offert une affectation pour une durée déterminée, et ce, en guise de représailles parce qu’il avait démontré de l’intérêt à devenir membre du comité exécutif du syndicat. Le plaignant n’a présenté aucune preuve à l’appui de cette allégation ou pour démontrer que le défendeur avait rejeté sa demande de réaffectation aux bureaux de la rue Government en raison de son intérêt à faire partie du comité exécutif du syndicat plutôt que pour des raisons de contraintes opérationnelles. Dans la même veine, le plaignant n’a présenté aucune preuve à l’appui de son allégation voulant que le défendeur avait continué de refuser de lui offrir une affectation en tant que mesure de représailles à son endroit parce qu’il avait déposé une plainte de pratique déloyale de travail.

98 Le défendeur a ajouté que les plaintes devant moi n’arrivaient pas à établir de lien entre les allégations de pratiques déloyales de travail et les faits et que, pour cette raison, elles ne parvenaient pas à établir qu’il y avait eu infraction de l’alinéa 186(2)a) de la LRTFP.

99 Le défendeur a déclaré que ces plaintes étaient en fait des griefs de dotation que l’on essayait de faire passer pour des plaintes de pratique déloyale de travail, et que seul le TDFP a compétence pour traiter des questions de dotation en vertu de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (la « LEFP »), édictée par les articles 12 et 13 de la LMFP. Les faits démontrent que l’affectation d’une durée déterminée du plaignant n’a pas été prolongée une troisième fois et que, lorsque son affectation a pris fin, on ne lui a pas offert une autre affectation d’une durée déterminée ou indéterminée. Le défendeur a soutenu que les faits présentés ne suggèrent aucunement qu’il a pris des décisions de dotation pour des raisons autres que des raisons opérationnelles légitimes. Il a demandé que les plaintes soient rejetées.

100 J’ai pris en délibéré la question de la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve. J’ai décidé que j’allais entendre sur le fond les preuves officielles concernant les plaintes, que la disposition soit appliquée ou non. J’ai aussi décidé que le plaignant allait présenter ses arguments en premier, conformément à la jurisprudence de la Commission, car, étant donné le peu de faits allégués, il est difficile pour le défendeur de connaître suffisamment en détail la nature des allégations pour lesquelles il doit monter sa défense.

c. Argument additionnel du défendeur

101 À la fin de la présentation des preuves par les parties, le défendeur a déclaré que le critère pour l’application de la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve avait été élevé. Selon le défendeur, si la Commission avait appliqué la jurisprudence dès qu’il a été question de l’application de la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve comme question préliminaire, le critère aurait été de déterminer, supposant que la Commission présumait que les faits allégués étaient fondés, si les plaintes démontraient sans aucun doute qu’il y avait un cas défendable selon lequel le défendeur aurait enfreint l’alinéa 186(2)a) de la LRTFP. Dans le cas contraire, la Commission devrait rejeter les plaintes.

102 Selon le défendeur, puisque les parties ont présenté leurs preuves officielles, le critère à appliquer est maintenant de déterminer si le plaignant a établi une preuve prima facie à la lumière de la preuve qui a été présentée. Le défendeur a déclaré que je n’avais plus besoin de supposer que les faits allégués étaient véridiques, mais que je pouvais, et devais, déterminer si la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve devait être appliquée en fonction des faits établis par les preuves présentées. Il a ajouté que, selon les preuves présentées, il n’y avait pas de preuve prima facie de violation de l’alinéa 186(2)a) de la LRTFP. Tout au plus, les preuves du plaignant indiquent de simples spéculations selon lesquelles il y aurait un lien entre les pratiques déloyales de travail présumées et un sentiment antisyndical ou une mesure de représailles de la part des gestionnaires du défendeur qui ont pris les décisions de dotation contestées. Par conséquent, la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve ne doit pas être appliquée, et les plaintes devraient être rejetées.

2. Décision

103 Les deux parties ont cité Quadrini comme référence pour l’application de la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve.

104 Je crois que les plaintes devant moi démontrent un lien raisonnable avec les interdictions énumérées aux sous-alinéas 186(2)a)(i) à (iv) de la LRTFP. En supposant que toutes les allégations contenues dans les plaintes du 19 septembre 2008, du 22 décembre 2008 et du 1er octobre 2009 sont vraies, je crois qu’il y aurait un cas défendable selon lequel le défendeur aurait enfreint l’alinéa 186(2)a).

105 Je suis d’accord avec Quadrini que, en effectuant l’évaluation requise, je dois reconnaître que si j’ai quelque doute que ce soit sur ce que les faits révèlent – présumant que les faits sont véridiques – je dois opter pour une conclusion de cas défendable pour ce qui est du lien devant être établi relativement à la violation présumée du défendeur de l’alinéa 186(2)a) de la LRTFP. Je dois aussi conserver la possibilité pour le plaignant de faire entendre ses plaintes dans le cadre d’une instance qui respecte la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve.

106 Après une première lecture des plaintes, j’ai conclu qu’il est à tout le moins possible que le défendeur ait refusé de muter le plaignant aux bureaux de la rue Government et de prolonger son affectation d’une durée déterminée ou de lui offrir une autre affectation d’une durée déterminée ou indéterminée parce qu’il savait que le plaignant voulait devenir un membre du comité exécutif du syndicat et qu’il avait exercé son droit de déposer une plainte de pratique déloyale de travail.

107 En m’appuyant sur le raisonnement clair de Quadrini, « […] [b]ien qu’il puisse tout à fait exister des explications différentes et plus probables concernant la suite d’événements allégués par le plaignant […] », je ne peux pas conclure qu’il n’y a aucune façon raisonnable de faire valoir qu’il existe un lien entre, d’une part, les décisions du défendeur de ne pas accepter la demande de mutation du plaignant et de ne pas prolonger son affectation d’une durée déterminée une troisième fois ou de ne pas lui offrir une autre affectation d’une durée déterminée ou indéterminée et, d’autre part, la décision du plaignant d’exercer son droit de déposer une plainte de pratique déloyale de travail en vertu de la LRTFP. Sur cette base, je dois conclure que les plaintes du 19 septembre 2008, du 22 décembre 2008 et du 1er octobre 2009 démontrent un cas défendable selon lequel le défendeur aurait enfreint l’alinéa 186(2)a). La décision de déterminer s’il y a effectivement eu infraction de la disposition doit être basée sur les preuves que les parties ont présentées sur le fond.

108 Comme les plaintes devant moi établissent, à première vue, un cas défendable que le défendeur aurait enfreint l’alinéa 186(2)a) de la LRTFP, il incombe au défendeur, suivant la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve, de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’a pas décidé de refuser de muter, de continuer d’employer ou de réembaucher le plaignant parce que ce dernier tentait de devenir un représentant ou un dirigeant syndical, parce qu’il a déposé des plaintes de pratique déloyale de travail contre lui ou parce qu’il risquait de témoigner à une audience. Le défendeur doit prouver selon la prépondérance des probabilités que les décisions de dotation contestées ont été prises dans l’exercice raisonnable de son pouvoir de gestion.

IV. Résumé de la preuve

109 J’ai informé les parties en septembre 2010, pendant la téléconférence préalable à l’audience, que le plaignant allait être le premier à présenter ses preuves sur le fond lors de l’audience d’octobre 2010, que la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve soit appliquée ou non, parce que le peu de faits allégués faisait en sorte qu’il était difficile pour le défendeur de connaître suffisamment en détail la nature des plaintes contre lesquelles il devait se défendre. En présentant ses arguments en premier, le plaignant devait fournir des précisions supplémentaires concernant ses allégations avant que le défendeur ne soumette sa preuve.

110 L’audience d’octobre 2010 a porté principalement sur des questions préliminaires, dont plusieurs sur la production de documents. Dès le début de la présentation des preuves, le plaignant a demandé un ajournement pour lui permettre de mieux se préparer et pour donner aux parties l’occasion de produire ensemble un énoncé des faits. Sa demande a été acceptée et il a été convenu que, lors de la reprise de l’audience, les parties devraient présenter leurs preuves et leurs arguments.

111 L’audience a repris le 2 mai 2011. Le 3 mai, les parties ont présenté un énoncé conjoint des faits relativement au processus de sélection CR-04 2007-CSD-EA-BC-SC-425 (le « processus CR-04 ») et au processus de sélection CR-03 2007-CSD-EA-BC-SC-411 (le « processus CR-03 »). Un addenda à l’énoncé conjoint des faits a été présenté le 4 mai 2011. Comme l’énoncé des faits contient les noms des candidats et leurs résultats aux examens, et puisque ces détails ne sont pas nécessaires, j’ai décidé de ne pas intégrer le document à cette décision. Je m’y référerai au besoin.

112 Les parties ont coopéré pour établir la liste des témoins, étant donné l’étendue des allégations du plaignant concernant les décisions de dotation du défendeur et la difficulté qu’il a eue à cibler les actions de dotation qu’il contestait en raison du peu de données précises qu’il possédait sur les pratiques de dotation du défendeur pour les postes de niveau CR-03 et CR-04 à Victoria et à Nanaimo pendant la période contestée. Le plaignant a soutenu que, jusqu’à ce qu’il examine certains témoignages, il savait seulement qu’il avait fait partie de deux bassins externes de candidats préqualifiés (ouverts au grand public), qu’il avait postulé à de nombreux postes pendant la période contestée et qu’il était un employé productif sans dossier disciplinaire. Il savait aussi que le défendeur avait offert des emplois à d’autres candidats qui, selon lui, avaient eu de moins bons résultats que lui aux examens et étaient moins qualifiés que lui. Il avait donc conclu qu’il devait y avoir eu inconduite de la part du défendeur. Les détails des décisions de dotation du défendeur, qui seraient révélés dans le cadre des témoignages, devaient démontrer la tendance du défendeur de refuser de lui offrir une affectation parce qu’il s’adonnait à des activités protégées par la LRTFP.

113 Le plaignant a lui-même témoigné, ainsi que quatre autres personnes. Le plaignant a présenté 63 pièces, et le défendeur, 14.

A. Témoignage du plaignant

114 J’ai résumé le témoignage du plaignant autant que possible en présentant les faits en ordre chronologique plutôt que dans l’ordre dans lequel ils ont été relatés par le plaignant. J’ai aussi raccourci ou éliminé certaines allégations du plaignant à l’endroit de personnes qui n’étaient pas parmi les témoins et pour lesquelles aucune preuve n’a été présentée par l’une ou l’autre des parties.

115 Malgré mes instructions et mes avertissements répétés, le plaignant a eu de la difficulté à présenter des faits plutôt que des opinions, des croyances ou des arguments sur leur importance.

116 Le plaignant a déclaré que son historique de travail au sein du gouvernement fédéral constituaient un contexte important pour les plaintes qui m’étaient présentées et qu’on devait le mentionner, même si la période visée par l’historique était plus importante que celle visée par les plaintes et même s’il était question de mécanismes de redressement auxquels il avait eu recours autrement qu’en vertu du LRTFP. Il a expliqué que je devais examiner ces antécédents pour comprendre pleinement les plaintes devant moi et les mesures de représailles qui ont été prises contre lui.

117 Le plaignant a été fonctionnaire à Victoria pendant 10 ans, de 1995 à 2005. Il a commencé en tant qu’agent de perception (PM-01) pour l’ancienne Agence des douanes et du revenu du Canada (aujourd’hui l’Agence du revenu du Canada, ou l’« ARC »), puis il a travaillé en tant qu’inspecteur des douanes (PM-02) pour l’ASFC, jusqu’à sa démission en décembre 2005.

118 Le plaignant a déclaré que pendant qu’il était à l’ARC, il avait contribué à contrecarrer une saisie-arrêt illégale émise par l’ARC et à ce que l’employé visé soit remboursé. Il aurait par la suite, selon ses propres mots, été [traduction] « forcé de démissionner ».

119 Le plaignant a travaillé à l’ASFC pendant trois étés, de 2002 à 2004. Il a dénoncé l’utilisation par l’organisation d’étudiants immatures et les pratiques de dotation illégales qu’il a observées. Il a aussi exprimé ses préoccupations à l’égard du comportement raciste présumé de l’organisation à l’endroit d’un Canadien faisant partie d’un groupe minoritaire. À l’été 2004, il a déposé deux plaintes de dotation acceptées par le TDFP, et la question de discrimination est actuellement examinée par la Commission canadienne des droits de la personne (la « CCDP »). Il a ajouté qu’il avait témoigné devant la CCDP en 2005, en 2008 et en 2009.

120 Le plaignant a déclaré qu’il avait déposé une plainte de discrimination fondée sur l’âge contre l’ASFC en janvier 2005, parce qu’il faisait partie d’un bassin de candidats qualifiés et qu’il n’avait pas été nommé, tandis que des candidats plus jeunes avaient reçu des offres.

121 Le plaignant a déposé en preuve deux documents d’une page de la Commission de la fonction publique (CFP) et intitulés Investigation Case Report, datés du 30 et du 31 mai 2006 respectivement. Ces documents portaient sur les plaintes que le plaignant avait déposées en vertu de la LEFP et qui portaient sur deux différents processus de dotation lancés en 2003 dans le but de créer un bassin de candidats préqualifiés provenant de l’intérieur et de l’extérieur de la fonction publique pour doter des postes d’inspecteur des douanes (PM-02) à l’ASFC. La CFP a conclu que les deux plaintes étaient fondées (pièce 7).

122 Le plaignant a déclaré que deux des gestionnaires du défendeur lui ont fait passer une entrevue en août 2006. Il a donné à ces gestionnaires des copies de sa plainte relative aux affaires internes contre l’ARC et de ses plaintes de dotation contre l’ASFC, et il a précisé qu’on lui avait donné raison dans les deux cas. Il a précisé qu’il avait donné cette information aux gestionnaires pour démontrer qu’il était un bon employé, mais qu’après sa dénonciation, on lui avait refusé des promotions et il avait été forcé de démissionner.

123 Le plaignant a déclaré qu’il avait reçu un appel des RH de RHDCC en octobre 2006 et qu’on lui avait demandé des références. Il a expliqué qu’il avait répondu à son interlocuteur que tous ses chefs d’équipe des dix dernières années refusaient de lui fournir des références parce qu’il faisait partie d’une liste noire. Il a demandé une mesure d’adaptation. Il a demandé aux RH de se servir de ses évaluations écrites du rendement et d’une référence de Tim O’Neil, un ancien collègue et chef d’équipe intérimaire. Le plaignant a déclaré que, en raison de ses griefs contre l’ARC et l’ASFC, les RH avaient accepté de lui accorder cette mesure d’adaptation et n’avaient pas exigé les références récentes habituellement requises.

124 Le plaignant a affirmé qu’il avait déposé une plainte de dotation en février 2007. Quand on lui a demandé quelle était la pertinence de cette plainte, il a répondu qu’« ils » savaient qu’il connaissait les différents mécanismes de recours et qu’« ils » ne voulaient pas d’un dirigeant syndical ayant ce type de connaissances, alors « ils » ne l’ont pas nommé. Le plaignant a déclaré qu’il s’était qualifié pour deux bassins de dotation, (CR-03 et CR-04) lors de l’été 2007. Il a donc retiré en juillet 2007 sa plainte de dotation de février 2007.

125 En septembre 2007, le défendeur a nommé le plaignant pour une durée déterminée à un poste de commis (CR-04) pour le programme PEC dans les bureaux de la rue Pandora. Il a été nommé par Jim Quinn, gestionnaire principal du centre de paiement de Victoria et gestionnaire responsable des chefs d’équipe du programme PEC, dont la chef d’équipe du plaignant, Mme Smith.

126 La nomination du plaignant était du 13 septembre 2007 au 7 mars 2008; elle a été prolongée deux fois, d’abord au 28 mars 2008, puis au 27 juin 2008.

127 Au moment de sa nomination, le plaignant a reçu du défendeur une lettre énonçant les conditions liées à son emploi. La lettre d’offre du plaignant contenait des dispositions standards pour les affectations d’une durée déterminée, dont une précisant qu’il n’y avait aucune garantie que l’affectation serait prolongée, et une autre précisant que si l’affectation n’était pas prolongée, un préavis écrit de 30 jours lui serait envoyé.

128 Le plaignant a déclaré que, après avoir été nommé par le défendeur, des responsables de l’émission « National News » diffusée par le réseau CBC l’ont approché pour une entrevue concernant ses préoccupations sur les étudiants immatures à l’ASFC. Cette entrevue a été diffusée le 1er octobre 2007. Il a ajouté que le jour suivant, le ministre responsable de l’ASFC a commandé une enquête quant à des allégations d’inconduite concernant l’affichage de contenu Web inapproprié. Cette enquête est devenue connue sous le nom de [traduction] « scandale Facebook de l’ASFC ».

129 Le plaignant a déclaré que, le 26 octobre 2007, Kim Bergh, une des gestionnaires du défendeur responsable des opérations de Sécurité de la vieillesse/du Régime de pensions du Canada (SVC/RPC), a envoyé un message à tous les employés concernant une nouvelle politique sur les médias sociaux (pièce 19). Dans ce message, on avertissait les employés de faire attention à ce qu’ils disaient dans les médias sociaux et on les avisait que certains commentaires pouvaient mener à un renvoi.

130 Le plaignant a déclaré qu’il était heureux de son expérience au programme PEC, qu’il faisait souvent des heures supplémentaires, qu’il était un employé productif et qu’un gestionnaire avait dit de lui qu’il était la vedette de l’équipe ou l’« homme de la situation ». Il a ajouté qu’il n’y avait aucune mesure disciplinaire à son dossier.

131 Le plaignant a déclaré qu’en janvier 2008 il avait voulu présenter sa candidature à un poste de direction lors d’une élection syndicale locale qui devait avoir lieu le 27 février 2008 aux bureaux de la rue Government.

132 Le plaignant a expliqué qu’à cette époque différentes sections locales représentaient les employés de RHDCC à divers lieux de travail. Bien que les employés du programme PEC de la rue Pandora et ceux de la rue Government avaient le même syndicat, ils n’étaient pas représentés par la même section locale. Les employés qui posaient leur candidature au syndicat devaient travailler à l’endroit même où l’élection avait lieu.

133 Le plaignant a envoyé un courriel à M. Quinn en janvier 2008 pour lui demander une mutation urgente aux bureaux de la rue Government, afin de lui permettre de présenter sa candidature à un poste de dirigeant syndical. Le plaignant a précisé clairement qu’il demandait cette mutation uniquement parce qu’il voulait poser sa candidature lors de l’élection à venir. Le défendeur a rejeté sa demande sans motif raisonnable.

134 Le plaignant a déclaré qu’il avait aussi envoyé à M. Bergh une demande de mutation urgente aux bureaux de la rue Government pour lui permettre de présenter sa candidature lors de l’élection de la section locale, prévue en février 2008.

135 Le plaignant a soumis à titre de preuve une carte montrant que les rues Pandora et Government ne sont qu’à quelques coins de rue l’une de l’autre.

136 Dans la plainte abandonnée, le plaignant a affirmé que le refus du défendeur de lui accorder une mutation aux bureaux de la rue Government pour qu’il puisse poser sa candidature à un poste de dirigeant syndical était une pratique déloyale de travail. Il a soutenu que le défendeur n’avait aucune raison, à part ses aspirations syndicales, de rejeter sa demande, et qu’il n’avait pas le droit de l’empêcher de poser sa candidature à un poste de dirigeant syndical.

137 Le plaignant a retiré la plainte abandonnée pour des raisons de santé et parce que l’élection avait eu lieu et que la mutation n’était plus requise.

138 Le 1er février 2008, le plaignant a eu une altercation avec un collègue, que je nommerai ici « IM ». Le plaignant a affirmé qu’IM l’avait dénigré publiquement étant donné que l’altercation avait eu lieu dans un bureau ouvert devant deux autres collègues. Il a déclaré qu’il était contrarié et qu’il avait envoyé un courriel à Mme Smith pour discuter immédiatement de la question avec elle. Comme Mme Smith ne répondait pas à son courriel, il est allé voir son président de syndicat et lui a demandé des conseils pour obtenir immédiatement une rencontre avec elle. Le plaignant a déclaré que le président avait laissé une note sur le bureau de Mme Smith lui demandant de rencontrer le plaignant sans tarder, ce qu’elle a fait plus tard dans la journée.

139 Le plaignant a ajouté que, quand il a rencontré Mme Smith, il lui a montré un exemplaire de la Politique sur la prévention et le règlement du harcèlement en milieu de travail du Conseil du Trésor (la « Politique sur le harcèlement ») et il lui a expliqué pourquoi il croyait qu’IM avait dépassé les bornes. Il a demandé une séparation physique à titre de mesure d’accommodement. En réponse à sa demande, Mme Smith a changé son poste de travail et ses tâches pour qu’il ne soit plus amené à interagir quotidiennement avec IM. En mars 2008, IM a accepté un poste dans les bureaux de la rue Government.

140 Le plaignant a déclaré qu’il avait appris à la mi-mars qu’il n’avait pas reçu sa mutation aux bureaux de la rue Government. Plus tard, il a supposé que ce refus était dû au fait que Mme Smith avait fourni une référence contenant une description injuste de son altercation avec IM.

141 Bien que la référence de Mme Smith était datée du 11 février 2008, le plaignant a déclaré qu’il n’en a pris connaissance qu’à la mi-avril 2008. Le plaignant a expliqué que le commentaire de Mme Smith selon lequel il avait demandé l’aide de son président de syndicat pour obtenir une rencontre avec elle plutôt que de lui parler d’abord démontrait une attitude antisyndicale et représentait une mesure de représailles de sa part, car elle commentait une chose qu’il était en droit de faire, c’est-à-dire consulter son président de syndicat quand bon lui semble. Le plaignant a déclaré que les commentaires de Mme Smith sur la façon dont il avait réglé son conflit en matière de harcèlement avec IM étaient inappropriés. Il a demandé que les commentaires soient modifiés. Mme Smith a refusé de modifier ses commentaires. Le plaignant a consulté M. Quinn dans la deuxième moitié du mois d’avril 2008.

142 M. Quinn a conseillé au plaignant de discuter avec Mme Smith et d’essayer de régler la question avec elle. Le plaignant a trouvé que la réponse de M. Quinn était inacceptable. Il voulait que M. Quinn parle à Mme Smith de sa référence, car il était d’avis que cette référence lui avait coûté sa mutation aux bureaux de la rue Government, et il voulait que Mme Smith corrige sa référence et la soumette de nouveau. M. Quinn a répondu qu’il avait travaillé avec Mme Smith pendant plus de dix ans quand elle était présidente du syndicat et qu’il avait une bonne relation de travail avec le syndicat. Le plaignant a déclaré que M. Quinn n’avait pas accepté de prendre des mesures correctives pour ce qui est de la référence.

143 Le plaignant a affirmé qu’il avait envoyé un courriel à M. Bergh le 30 avril 2008. Dans ce courriel, qu’il a soumis à titre de preuve (pièce 30), il informait M. Bergh de tous les recours en justice qui étaient en cours et lui proposait de le rencontrer pour régler ces questions le plus rapidement possible. Il a noté avoir précisément indiqué dans ce courriel qu’il avait déposé une plainte en matière de droits de la personne contre RHDCC concernant des questions liées à son emploi pour une période allant du mois d’août 2006 à la date de dépôt de sa plainte. Il a avisé M. Bergh qu’il avait aussi déposé la plainte abandonnée devant la Commission concernant le rejet de ses demandes répétées de mutation aux bureaux de la rue Government pour lui permettre de poser sa candidature au poste de dirigeant syndical et qu’il était d’avis que toutes ses demandes avaient été rejetées sans motif valable. Il a mentionné qu’il avait dû modifier sa plainte en matière de droits de la personne pour y inclure les commentaires inappropriés contenus dans la référence de Mme Smith. Il a ajouté qu’il allait bientôt déposer une plainte de dotation auprès du TDFP. M. Bergh n’a pas répondu.

144 Le plaignant a déclaré qu’on l’a avisé à la mi-mai 2008 que le président de la section locale responsable de la rue Government avait démissionné, et qu’une élection devait avoir lieu dans les 60 jours. Le plaignant a immédiatement renouvelé sa demande de mutation immédiate aux bureaux de la rue Government. Il a déclaré que le défendeur avait bloqué toutes ses demandes sans motif valable, et ce, parce qu’il ne voulait pas qu’une personne compétente qui connaissant le fonctionnement mécanismes de recours soit membre de la direction de la section locale responsable des bureaux de la rue Government.

145 Le plaignant a affirmé qu’il s’était plaint à Mme Smith au sujet de son milieu de travail malsain et qu’il lui avait demandé un congé pour une consultation, ce qu’elle lui a accordé.

146 Le plaignant a déclaré que le défendeur s’était vengé de la plainte abandonnée en lui donnant une lettre de cessation d’emploi deux semaines plus tard. Cette lettre était datée du vendredi 20 mai 2008, et elle a été envoyée par poste prioritaire, mais le plaignant a soutenu qu’il ne l’avait pas reçue avant le lundi 23 mai 2008. Elle était signée par Ann Milne, une cadre supérieure de la région de l’Alberta, et la décision devait entrer en vigueur le 27 juin 2008, soit à la fin de son affectation d’une durée déterminée.

147 Le 22 mai 2008, le plaignant a envoyé un courriel à Andy Netzel, le responsable régional et supérieur de M. Bergh. Le plaignant a déclaré avoir dit à M. Netzel qu’il avait présenté par courriel à M. Bergh une demande de mutation aux bureaux de la rue Government pour dans le but d’être éligible à poser sa candidature à un poste de représentant syndical et que trois semaines plus tard, il n’avait toujours pas eu de réponse de M. Bergh. Le plaignant a aussi dit à M. Netzel qu’il avait déjà déposé la plainte abandonnée à la suite du rejet de sa demande de mutation précédente et qu’il allait déposer une autre plainte de pratique déloyale de travail si sa demande de mutation aux bureaux de la rue Government était rejetée. Le plaignant a soumis à titre de preuve ses échanges de courriels avec M. Bergh et M. Netzel pour appuyer son témoignage (pièces 30, 32, 35 et 36). Il a déclaré qu’il voulait que M. Netzel intervienne et lui accorde sa demande de mutation.

148 Le plaignant a déclaré qu’il avait aussi rencontré M. Quinn le 26 mai 2008. Il était contrarié parce qu’il n’avait toujours pas été muté aux bureaux de la rue Government malgré ses nombreuses demandes et parce qu’il avait reçu une lettre de cessation d’emploi. Il a ajouté que M. Quinn lui avait dit qu’il pouvait prendre un congé payé jusqu’à la rencontre qui était prévue entre lui et Mme Milne, le 2 ou le 3 juin 2008.

149 Le plaignant a écrit à M. Netzel le 26 mai 2008 (pièce 36), pour se plaindre de M. Quinn, de Mme Smith et d’IM et pour informer M. Netzel qu’il allait présenter une plainte de harcèlement officielle contre ces trois personnes pour la façon dont le harcèlement que lui avait infligé IM avait été géré et pour la référence injuste de Mme Smith. Il a expliqué qu’il voulait que M. Netzel, en tant que gestionnaire délégué, intervienne et règle ces questions.

150 Le 29 mai 2008, le plaignant a envoyé à Mme Milne un courriel contenant une liste de sujets dont il voulait parler avec elle lors de leur rencontre (pièce 37). Mme Milne a répondu que la rencontre aurait lieu par téléphone et non en personne et que la discussion porterait uniquement sur la non-prolongation de son affectation d’une durée déterminée et non sur ses nombreuses actions en justice. Le plaignant a déclaré qu’il était fâché parce qu’il avait compris, selon ce que M. Quinn lui avait dit, qu’il pourrait parler avec Mme Milne de toutes les questions en suspens. Il a ajouté que le fait que Mme Milne ne veuille pas lui parler de sa liste de sujets était une démonstration de sentiment antisyndical et prouvait que la raison invoquée pour la cessation de son emploi n’était qu’un prétexte.

151 Le plaignant a affirmé que Mme Milne lui avait dit que, compte tenu son état de santé, il pouvait rester en congé payé jusqu’à la fin de son affectation d’une durée déterminée.

152 Le plaignant a déclaré qu’il avait déposé une plainte de représailles auprès du CISP le 19 juin 2008. Le CISP a le pouvoir d’appliquer les dispositions de la LPFDAR sur la protection contre les représailles. Il a soumis cette plainte à titre de preuve (pièce 12). Le CISP a décidé de ne pas enquêter sur cette plainte. Sa décision n’est pas datée, mais la lettre d’accompagnement était estampillée du 29 octobre 2008.

153 Le plaignant a affirmé qu’il avait envoyé un courriel, à la mi-juin 2008, à Claude Jacques, gestionnaire de la Direction de la sécurité ministérielle du défendeur, pour lui dire que le défendeur avait exercé des représailles contre lui parce qu’il était un dénonciateur et pour lui demander de lancer une enquête criminelle contre M. Netzel, M. Quinn, Don Campbell (un gestionnaire de SVC/RPC), M. Bergh, Mme Smith et Mme Milne pour [traduction] « conspiration criminelle de harcèlement et d’exclusion ». Il a présenté ce courriel à titre de preuve (pièce 40), et on peut constater qu’il a envoyé sa demande le 16 juin 2008. M. Jacques lui a répondu le 30 septembre 2008 que sa demande était rejetée et il a donné des explications.

154 Le plaignant a déclaré qu’il s’était qualifié pour deux bassins de dotation valides et qu’il avait postulé à plus d’une centaine de postes avant et après la fin de son affectation d’une durée déterminée. Le défendeur ne lui a pas offert une autre affectation, ni pour une durée déterminée ou indéterminée. Par conséquent, il a déposé la plainte du 19 septembre 2008 (pièce 3).

155 Le plaignant a affirmé qu’il avait continué, de septembre à décembre 2008, à postuler pour des postes de niveau CR-03 et CR-04 offerts par le défendeur pour lesquels il était qualifié (il faisait partie des deux bassins de dotation). Cependant, malgré le fait qu’il était qualifié et qu’il avait été parmi les employés les plus productifs lors de ses emplois précédents, on ne lui a pas offert d’affectation. Par conséquent, il a déposé la plainte du 22 décembre 2008 (pièce 2).

156 Le plaignant a déclaré que, lorsqu’il a postulé pour le poste au sein du programme PEC à l’été 2007, les RH ont accepté une référence de M. O’Neil qui datait de la même période. C’était avant que M. Quinn embauche le plaignant. Le plaignant a soumis à titre de preuve la lettre de recommandation de M. O’Neil (pièce 15). On peut constater que cette lettre a été envoyée par courriel au gestionnaire qui allait potentiellement l’embaucher le 19 juillet 2007. On peut y lire que M. O’Neil était le superviseur direct du plaignant pendant diverses périodes entre 2001 et 2006. Toutefois, lorsque le plaignant a postulé pour des postes en 2008 et en 2009, les RH ont insisté pour avoir une référence de sa dernière superviseure, Mme Smith.

157 En février 2009, le plaignant a déposé une plainte auprès du ministre responsable de RHDCC (le « ministre »). Le 24 mars 2009, il a reçu une réponse (pièce 10), dans laquelle il était indiqué que les deux bassins de dotation pour lesquels il s’était qualifié étaient toujours actifs. Il a ajouté que, peu de temps après avoir reçu cette information, les bassins sont arrivés à échéance. Il n’en a pas été avisé.

158 Le 13 juillet 2009, le plaignant a demandé que la plainte abandonnée soit réactivée. Le greffe l’a informé dans une lettre datée du 15 juillet 2009 que ce n’était pas possible.

159 Le plaignant a déposé la plainte du 1er octobre 2009, dans laquelle il alléguait que le refus continu du défendeur de l’embaucher depuis le 27 juin 2008 était dû au fait qu’il avait déposé des plaintes de pratique déloyale de travail. Il a affirmé que le défendeur ne l’avait pas avisé lorsque les bassins de dotation pour les postes de niveau CR-03 et CR-04 pour lesquels il s’était qualifié sont arrivés à échéance. Il a déclaré qu’il avait seulement reçu cette information de son syndicat le 21 juillet 2009 (pièce 39) et que le défendeur avait fermé les bassins pour ne pas avoir à lui offrir un emploi.

160 Le plaignant a déclaré qu’un membre du personnel des RH du défendeur, Nancy Lam, coordonnatrice des opérations pour les services de traitement et de paiement, avait adressé une note (pièce 47) à Elaine Li, conseillère en RH et responsable du ressourcement, dans laquelle elle a indiqué qu’il faisait partie des bassins de dotation et qu’il pourrait se plaindre. Il a expliqué que cette note était une preuve que les bassins de dotation avaient été fermés en guise de représailles parce qu’il avait déposé des plaintes de pratique déloyale.

161 Pendant le contre-interrogatoire, le plaignant a convenu que, comme il avait été employé à titre d’employé pour une durée déterminée, le défendeur n’était pas tenu de prolonger son affectation d’une durée déterminée et que ce point était mentionné dans sa lettre d’offre. Il a confirmé qu’il avait reçu une lettre de non-prolongation, et non une lettre de licenciement, et que son affectation avait été prolongée deux fois auparavant. Il a également confirmé qu’il avait reçu la lettre l’informant que son affectation d’une durée déterminée ne serait pas prolongée, et ce, au moins un mois avant la fin de l’affectation. Il a admis qu’il connaissait au moins trois autres employés du programme PEC dont l’affectation n’avait pas été prolongée durant la même période.

162 Quand on lui a demandé pourquoi le défendeur aurait prolongé son affectation deux fois s’il entretenait un sentiment antisyndical à son endroit, le plaignant a répondu qu’il y avait du travail à faire, qu’il était un employé productif et qu’il avait une bonne relation de travail avec M. Quinn. Il a ajouté que M. Quinn avait manifesté un sentiment antisyndical à son endroit seulement après qu’il ait déposé une plainte de harcèlement contre lui, Mme Smith et IM, en mai 2008.

163 Pendant le contre-interrogatoire, le plaignant a déclaré que Mme Smith n’était pas dans son bureau quand il lui a envoyé le courriel au sujet de son altercation avec IM. Il a attendu 30 ou 45 minutes, puis il est allé voir son président syndical pour lui demander conseil sur la façon d’obtenir un entretien urgent avec Mme Smith. Il a ajouté qu’elle l’avait rencontré moins de deux heures après la réception de son courriel.

164 Pendant le contre-interrogatoire, le plaignant a confirmé que Mme Smith était décédée avant l’audience et qu’elle avait été présidente de la section locale du syndicat pendant plus de dix ans avant d’assumer les fonctions de chef d’équipe intérimaire du programme PEC. Il a également ajouté qu’il avait une bonne relation de travail avec Mme Smith avant l’histoire de la référence.

165 Pendant le contre-interrogatoire, le plaignant a confirmé que Mme Smith n’avait pas refusé de lui parler, mais plutôt qu’elle n’avait pas répondu à son courriel aussi rapidement qu’il l’aurait voulu. C’est pour cette raison qu’il s’est adressé au président de la section locale du syndicat.

166 Le plaignant a déclaré que Mme Smith avait manifesté un sentiment antisyndical à son égard lorsqu’elle a commenté de manière négative son rôle dans l’altercation avec IM, ce qui a eu pour effet de bloquer sa mutation aux bureaux de la rue Government.

167 Pendant le contre-interrogatoire, le plaignant a reconnu qu’il est indiqué dans la Politique sur le harcèlement qu’il fallait d’abord discuter avec le collègue visé par l’accusation. Si la question n’est pas réglée, il faut alors communiquer avec le chef d’équipe. Cependant, le plaignant a insisté sur le fait que la Politique sur le harcèlement n’exigeait pas de lui qu’il suive cette démarche.

168 Pendant le contre-interrogatoire, le plaignant a déclaré qu’il avait envoyé un courriel à Mme Smith pour l’aviser que le conflit avec IM était réglé. Toutefois, il a précisé qu’il avait envoyé ce courriel avant de recevoir une copie de la référence. Il n’aurait pas dit que le conflit était réglé s’il avait su comment elle avait décrit ses actions.

169 Le plaignant a déclaré qu’il comprenait que Mme Smith ait transmis à M. Quinn la note dans laquelle il indiquait que son altercation avec IM était réglée et que M. Quinn croyait que la question était réglée.

170 Le plaignant a confirmé lors du contre-interrogatoire que Mme Smith avait été présidente de syndicat pendant bien des années (entre 10 et 13 ans), jusqu’à environ 6 mois avant son altercation avec IM, lorsqu’elle a accepté le poste de gestionnaire intérimaire et chef de son équipe pour aider à mettre en œuvre le programme PEC. Le plaignant a aussi confirmé qu’il s’entendait bien avec Mme Smith jusqu’à ce qu’il prenne connaissance des commentaires au sujet de l’incident de harcèlement qu’elle avait faits dans sa référence. Enfin, il a confirmé que ni l’une ni l’autre des parties ne pouvait demander à Mme Smith de témoigner, car elle est décédée avant l’audience.

171 Pendant le contre-interrogatoire, le plaignant a déclaré qu’il n’avait pas reçu de son syndicat le soutien qu’il aurait dû avoir pour ce qui est de ses demandes de mutation.

172 Le plaignant a reconnu que Mme Milne s’était dite ouverte à la médiation après le règlement de sa plainte en matière de droits de la personne.

173 Quand on lui a demandé lors du contre-interrogatoire pourquoi il croyait que le refus de Mme Milne de discuter de sa liste de demandes était un prétexte et représentait un comportement antisyndical, le plaignant a répondu que M. Quinn lui avait dit qu’il pourrait discuter de tous ses problèmes avec Mme Milne, mais qu’elle ne l’entendait pas ainsi. Il a admis qu’il ne savait pas si M. Quinn avait informé Mme Milne de ce fait.

174 Le plaignant a déclaré lors du contre-interrogatoire qu’on lui avait accordé un congé payé du 26 mai 2008, date du dépôt de sa plainte de harcèlement, au 27 juin 2008, date de la fin de son affectation d’une durée déterminée. Même s’il était content de cette mesure d’adaptation, puisqu’un congé payé était mieux qu’un congé non payé, il n’était pas complètement satisfait, car il aurait préféré être muté aux bureaux de la rue Government, où il aurait pu faire du travail significatif.

175 Le plaignant a convenu lors du contre-interrogatoire que le ministre n’était pas tenu de l’aviser quand les bassins de dotation arrivaient à échéance. Toutefois, il a insisté sur le fait que le ministre aurait dû l’aviser par civilité, étant donné leur passé. Il faisait alors référence à la lettre de réponse du ministre qu’il avait reçue le 24 mars 2009. Toutefois, sept jours après avoir reçu cette lettre, le bassin CR-03 a été fermé. Le plaignant a déclaré que le bassin CR-04 a été fermé plusieurs mois plus tard.

176 Le plaignant a déclaré qu’il a déposé la plainte du 1er octobre 2009 après avoir appris du syndicat, le 21 juillet 2009, que les bassins de dotation étaient arrivés à échéance. Il a soutenu que le bassin CR-04 avait été mis en place pour une durée indéfinie et que c’était peut-être le cas aussi du bassin CR-03. Il a soutenu que, comme le défendeur avait fermé les bassins avant qu’il ait été nommé et tandis que des emplois étaient encore disponibles, ce fait était une preuve de représailles à son endroit. Il a déclaré que, lorsque le défendeur ferme un bassin qui contient toujours des candidats qualifiés et qu’il y a toujours des possibilités d’emploi, et que ce même défendeur est au courant que le plaignant a déposé plusieurs plaintes de pratique déloyale de travail, on peut conclure que le défendeur refusait d’embaucher le plaignant. En effet, une fois qu’un bassin est fermé, un candidat ne peut être nommé à moins qu’il se qualifie dans un autre bassin.

B. Témoignage de Mme Li

177 Le travail de Mme Li consiste à conseiller et à guider les gestionnaires en matière de dotation. Elle occupe ce poste depuis environ quatre ans. Elle détient un baccalauréat en commerce avec une spécialisation en RH, et elle est conseillère en ressources humaines agréée.

178 Mme Li a décrit le processus de dotation de RHDCC à suivre lorsqu’un gestionnaire veut doter un poste vacant ou prévoit doter un poste.

179 Le gestionnaire subdélégataire qui veut doter un poste vacant ou qui prévoit doter un poste discute d’abord de ses options avec le conseiller en RH assigné à sa zone de responsabilité. Il peut soit annoncer le poste à l’externe (au grand public) ou à l’interne (à la fonction publique) ou doter le poste par l’intermédiaire d’une mutation ou d’une nomination intérimaire. Le gestionnaire ou le directeur exécutif consulte ensuite le Comité de gestion des postes vacants (CGPV) qui, bien qu’il ait un mandat officiel, a été conçu pour gérer la dotation dans toute la région, à la demande des directeurs exécutifs. Il met l’accent sur les questions budgétaires.

180 Si le gestionnaire subdélégataire ou le directeur exécutif reçoit l’approbation requise, le gestionnaire qui souhaite embaucher envoie une demande de dotation aux RH et collabore avec un conseiller en RH pour doter le poste. Les professionnels des RH, comme Mme Li, n’assistent pas aux réunions du CGPV.

181 Mme Li a déclaré que le président du comité de sélection est le gestionnaire subdélégataire responsable de tout le processus de sélection. Le gestionnaire qui souhaite embaucher quelqu’un pour pourvoir à un poste vacant ou qui prévoit doter un poste peut décider d’utiliser un bassin de candidats préqualifiés, qu’il soit ou non le gestionnaire qui a lancé le processus pour ce bassin. Une demande de dotation peut viser un bassin en particulier.

182 Mme Li a déclaré que, par exemple, si un processus de dotation externe est approuvé, on produit un énoncé des critères de mérite contenant une liste de qualifications essentielles que tous les candidats doivent satisfaire pour que leur candidature soit considérée ainsi qu’une liste de qualifications constituant un atout, c’est-à-dire des qualifications recherchées pour le poste.

183 Mme Li a nommé, à titre d’exemple, des critères de mérite qui sont souvent utilisés : l’éducation, l’expérience, les capacités et les compétences, les qualités personnelles, les exigences opérationnelles fondées sur les besoins du gestionnaire (par exemple la disposition et la capacité du candidat de faire des heures supplémentaires), les besoins organisationnels (par exemple des besoins relatifs à l’équité en emploi), les détails concernant les conditions d’emploi (par exemple la cote de fiabilité approfondie), la vérification du crédit et la maîtrise des langues officielles, laquelle doit être acquise et maintenue.

184 Mme Li a déclaré que le gestionnaire recruteur a un pouvoir de décision sur les critères de mérite. Elle a expliqué que, si le gestionnaire veut utiliser des critères que les RH lui ont conseillé de ne pas utiliser, par exemple des critères qui pourraient être perçus comme étant discriminatoires, les RH essaient de régler la question avec le gestionnaire. Néanmoins, c’est le gestionnaire qui prend la décision finale; dans de tels cas, les RH inscrivent une note au dossier. Elle a déclaré qu’elle n’avait vu aucune note de la sorte dans les dossiers qu’elle a examinés pour l’audience.

185 En règle générale, les RH suggèrent que le gestionnaire subdélégataire emploie plusieurs outils d’évaluation pour chaque compétence de l’énoncé des critères de mérite, par exemple, une entrevue, un examen écrit et des références. Les références sont habituellement demandées à la fin du processus de sélection.

186 Mme Li a expliqué que les RH conseillent ensuite la direction au sujet de la façon dont le gestionnaire ou le comité de sélection s’y prendront pour évaluer les critères de mérite. Le système des RH rejette automatiquement les demandes de non-Canadiens (selon la LEFP, il faut privilégier les candidats canadiens). Le personnel effectue ensuite la sélection en fonction des critères de qualification annoncés, comme les qualifications essentielles relativement à l’éducation et à l’expérience.

187 Le processus de sélection comprend une évaluation des candidats, laquelle comprend un examen écrit ou une entrevue ainsi que l’exigence de fournir des références. Les RH envoient sans tarder une lettre aux candidats qui ne se sont pas qualifiés pour le bassin de dotation. Quand tous les candidats ont été évalués, les RH envoient une lettre à tous les candidats qui répondent aux critères obligatoires contenus dans l’énoncé des critères de mérite.

188 Le président du comité de sélection, qui est le gestionnaire subdélégataire responsable du processus en général, et l’équipe d’évaluation doivent préparer un rapport sur le déroulement du processus de sélection, de l’annonce à la création du bassin de candidats qualifiés pour les types de poste, ainsi qu’un rapport sommaire d’évaluation contenant une liste de tous les candidats qui se sont qualifiés pour le bassin. La liste des candidats est en ordre alphabétique. Les candidats ne sont pas classés, mais une note correspondant à leurs résultats en fonction des critères de mérite évalués est indiquée pour chacun d’eux.

189 Mme Li a déclaré que la pièce 17 est un exemple de rapport sommaire d’évaluation issu d’un processus de dotation pour des postes de niveau CR-04. On y retrouve l’énumération des candidats et les compétences requises de l’énoncé des critères de mérite dans le haut. Il y a une colonne indiquant la réussite ou l’échec, et à droite, une colonne de nomination permettant aux RH de suivre les nominations des candidats faites à partir du bassin de dotation. On y précise si on a offert une affectation d’une durée déterminée ou indéterminée à la personne qui a été nommée.

190 Mme Li a expliqué comment le gestionnaire subdélégataire effectuait une nomination à partir du bassin de dotation. Si un gestionnaire a un poste vacant à pourvoir, il peut consulter le bassin de candidats qualifiés, avoir recours à une mutation ou nommer une personne bénéficiant d’une priorité. Elle a précisé que, en vertu de la LEFP, les candidats ne sont pas classés selon leur note générale.

191 Mme Li a déclaré que les gestionnaires peuvent inclure différentes compétences dans l’énoncé des critères de mérite pour répondre à leurs besoins particuliers, dans un effort pour trouver le « meilleur candidat possible » pour le poste. Par exemple, un gestionnaire peut décider que des qualités en relations interpersonnelles sont importantes pour obtenir le poste. Si nous assumons que cette compétence était indiquée dans l’énoncé des critères de mérite et que tous les candidats ont été évalués en fonction de ce critère, le gestionnaire vérifiera probablement les résultats des candidats pour cette compétence et choisira celui qui a obtenu la plus haute note. Si deux candidats ou plus ont obtenu la plus haute note pour cette compétence, le gestionnaire vérifiera d’autres compétences, comme la capacité de travailler sous pression, de façon à trouver le meilleur candidat possible pour le poste.

192 Mme Li a déclaré que le gestionnaire subdélégataire, après avoir trouvé le meilleur candidat possible pour le poste, remplit et soumet aux RH un formulaire de demande de dotation dans lequel on retrouve le nom du candidat retenu et les raisons de ce choix, ainsi que le code financier du budget que doivent utiliser les RH pour retirer les fonds. Les RH examinent la demande de dotation pour s’assurer qu’elle contient tous les renseignements essentiels et que les raisons invoquées ont du sens, au cas où une tierce partie s’intéresse au processus ou conteste la décision de dotation ou que la CFP examinerait la décision en fonction des politiques sur les nominations.

193 Mme Li a déclaré que, si le gestionnaire ne parvient pas à justifier complètement ou de manière appropriée les raisons de son choix, les RH essaient d’arranger la situation. Une fois la justification approuvée, on prépare une lettre d’offre que doivent signer le gestionnaire subdélégataire et le candidat. Cette lettre comprend divers renseignements, par exemple : titre, groupe et niveau du poste, lieu de l’emploi, secteur d’activité (c’est-à-dire le service), si c’est une nomination d’une durée déterminée ou indéterminée, s’il s’agit d’une affectation d’une durée déterminée, la lettre énoncera les conditions de l’emploi et précisera que l’affectation ne devrait pas dépasser la durée prévue, détails concernant le syndicat qui représentera l’employé (si l’employé n’est pas syndiqué, la lettre offrira des liens vers le Code de valeurs et d’éthique de la fonction publique et des politiques ainsi que des détails sur la façon dont les employés ont accès à leurs congés) et toute condition liée à l’emploi, comme la cote de sécurité exigée.

194 Une fois que le gestionnaire subdélégataire et le candidat ont signé la lettre d’offre, le candidat prête son serment professionnel, et la lettre d’offre signée est consignée dans les dossiers de dotation des RH. Les RH inscrivent ensuite dans la colonne de nomination du tableau que le candidat a accepté (ou refusé, le cas échéant) l’offre d’emploi et indiquent si l’affectation est d’une durée déterminée ou indéterminée.

195 Mme Li a déclaré que, si un autre gestionnaire veut doter un poste vacant à un autre endroit avec un candidat du même groupe et niveau, plusieurs options s’offrent à lui. Il peut utiliser le bassin de dotation existant, avoir recours à une mutation ou nommer de manière intérimaire un employé occupant un poste de niveau plus bas. Mme Li a ajouté que, si le gestionnaire subdélégataire ayant créé le bassin de dotation a un autre poste à pourvoir, il n’est pas tenu d’utiliser le bassin, même s'il s'agit d'une solution logique. Le gestionnaire peut utiliser des motifs de sélection différents de ceux utilisés pour doter le premier poste, tant que les compétences demandées dans l’énoncé des critères de mérite sont utilisées, y compris les exigences opérationnelles (comme le permis de conduire ou la capacité de voyager) et les besoins organisationnels. On met l’accent sur la transparence. Les critères de mérite doivent avoir été annoncés et évalués chez tous les candidats.

196 Mme Li a déclaré que, pour une affectation d’une durée déterminée, un gestionnaire délégué a plusieurs options. Il peut tenir compte du rendement du candidat dans son emploi actuel, prendre en considération les candidats qui possèdent une compétence particulière ou examiner les références des superviseurs actuels. Le gestionnaire peut tenir compte des notes des candidats dans le bassin de dotation à partir duquel ils ont été nommés initialement. Toutefois, Mme Li recommande que les gestionnaires subdélégataires utilisent le rendement actuel des candidats accompagné d’une référence de leur chef d’équipe actuel, car les candidats ont souvent plus de compétences et d’expérience qu’ils n’en avaient quand ils ont été nommés initialement à partir du bassin de dotation.

197 Mme Li a déclaré qu’elle n’était pas aux bureaux des RH de Vancouver quand le plaignant a posé sa candidature pour un poste d’une durée déterminée au sein du programme PEC et quand il a été nommé par M. Quinn. Toutefois, elle a cru comprendre que le plaignant soutenait que tous ses chefs d’équipe des dix années précédant l’été 2007 avaient refusé de lui fournir une référence, car il avait été placé sur une [traduction] « liste noire » et qu’il fallait, pour cette raison, lui accorder une mesure d’adaptation. Les RH ont accepté sa demande et lui ont accordé une mesure d’adaptation; il lui a donc été permis de soumettre une vieille référence de M. O’Neil, qui renvoyait à son travail entre 2001 et 2006, plutôt qu’une référence de son dernier chef d’équipe.

198 Mme Li a déclaré que, quand le plaignant a présenté une demande de mutation en 2008, ou quand il a demandé un autre emploi plus tard la même année, les circonstances étaient différentes. Le plaignant avait une expérience de travail récente avec la chef d’équipe du programme PEC, Mme Smith. Il n’y avait alors aucune raison d’omettre l’exigence de fournir une référence du dernier chef d’équipe. Mme Li a affirmé que le plaignant avait reçu le même traitement que les autres candidats pour ce qui est des références, la seule différence étant la mesure d’adaptation qui lui a été accordé à l’été 2007, à sa demande. Les RH avaient alors fait abstraction de l’exigence habituelle de fournir une évaluation de travail du chef d’équipe actuel ou du dernier chef d’équipe.

199 Mme Li a confirmé que tous les employés occupant un poste d’une durée déterminée reçoivent une lettre les informant si leur affectation a été prolongée et, si c’est le cas, une nouvelle date d’échéance est fournie.

200 On a questionné Mme Li au sujet des facteurs dont peut tenir compte le gestionnaire pour déterminer si oui ou non une affectation sera prolongée. Elle a répondu que le gestionnaire prolonge habituellement l’affectation lorsqu’il y a encore du travail, sauf si l’employé ne fait pas l’affaire, si le poste n’existe plus ou si l’employé fait partie d’un programme temporaire pour lequel il n’y a plus de financement. Mme Li a ajouté que, conformément à la Politique sur l’emploi pour une période déterminée, les employés occupant un poste pour une durée déterminée reçoivent un préavis écrit d’au moins un mois pour les informer que leur affectation ne sera pas prolongée.

201 Mme Li a indiqué la pièce 33 comme étant la lettre informant le plaignant que son affectation pour une durée déterminée ne serait pas prolongée. Elle a elle-même préparé le document, qui fournit au plaignant le préavis d’un mois exigé par la Politique sur l’emploi pour une période déterminée.

202 Mme Li a précisé que le programme PEC était un programme temporaire.

203 Mme Li a expliqué le processus de transfert d’un employé qui passe d’un poste d’une durée déterminée à un poste pour une durée indéterminée. Un employé qui a été nommé à un poste pour une durée déterminée peut être transféré à un poste pour une durée indéterminée seulement si le bassin de dotation initial a été annoncé comme visant à doter les deux types de postes. Si c’est le cas, un processus est généralement annoncé, et la personne en question doit poser sa candidature au poste pour une durée indéterminée.

204 Mme Li a déclaré que dans le passé, quand les provinces avaient toutes leurs propres bassins de dotations, ces derniers n’avaient souvent pas de date d’échéance, mais aujourd’hui, la Colombie-Britannique, l’Alberta, la Saskatchewan, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest font tous partie de la région de l’Ouest. Les RH ont déterminé qu’il était plus avantageux sur le plan de la gestion d’établir des dates d’échéance pour les bassins de dotation. Quand un bassin arrive à échéance, les RH demandent au gestionnaire subdélégataire responsable du processus annoncé et du bassin de dotation si ce dernier est toujours requis ou si le groupe et le niveau doivent être changés, et le bassin, être fermé. Il se peut qu’il y ait encore des candidats dans un bassin de dotation quand celui-ci est fermé.

205 Pendant le contre-interrogatoire, Mme Li a déclaré qu’elle travaillait à Vancouver, qu’elle faisait partie d’une équipe de ressourcement des RH qui comprenait environ huit conseillers, et qu’aucun employé de son service ne travaillait à Victoria. En 2008-2009, elle faisait partie d’une équipe de ressourcement des RH qui comprenait environ sept conseillers. Elle ne travaillait pas dans le domaine des relations de travail à cette époque.

206  Mme Li a déclaré qu’elle n’avait jamais travaillé avec Mme Milne ou M. Quinn pendant les deux prolongations de l’affectation du plaignant en 2008. Elle a rédigé la lettre avisant le plaignant que son affectation ne serait pas prolongée (pièce 33). Elle travaillait alors dans les bureaux d’Edmonton, comme il est indiqué au bas de la lettre.

207 Pendant le contre-interrogatoire, Mme Li a indiqué que son domaine est la dotation, et non les relations de travail, et qu’elle n’a commencé à traiter des mesures de dotation pour des postes au sein de SVC/RPC à Victoria que plus tard en 2008. Elle a entendu parler de la plainte du plaignant quand la direction des relations de travail a communiqué avec elle pour connaître les raisons derrière les décisions de dotation contestées.

208 Lors du contre-interrogatoire, Mme Li a indiqué qu’elle n’avait pas été informée d’autres plaintes déposées par le plaignant contre RHDCC. Lorsqu’on lui a demandé quand elle avait appris que le plaignant voulait être nommé à un poste à partir des bassins de dotation CR-03 et CR-04 en 2008 et 2009, elle a répondu que c’était lorsque la CFP avait communiqué avec elle après que le plaignant ait demandé de lancer une enquête sur ses qualifications dans le cadre du processus CR-04. Elle a ajouté que les questions de la CFP et ses réponses devaient avoir été consignées dans les dossiers des RH.

209 Mme Li a déclaré qu’elle est une employée exclue, qu’elle n’a jamais eue de problème avec le syndicat et qu’elle ne savait pas que le plaignant souhaitait postuler pour un poste de représentant syndical.

210 Pendant le contre-interrogatoire, Mme Li a déclaré qu’elle n’était pas la conseillère en RH lorsque le processus de dotation pour les processus liés à la pièce 16 (notamment le processus CR-03 et le processus CR-04 dont il est question dans cette affaire) a été lancé. Par conséquent, elle ne connait aucun détail sur ce processus qui ne se trouve pas dans le dossier et qu’elle a lu le dossier à la suite de la demande d’accès à l’information du plaignant. Elle a déclaré que le plaignant voulait connaître les raisons derrière les processus de dotation contestés, et qu’il n’avait pas donné son nom.

211 Pendant le contre-interrogatoire, Mme Li a déclaré qu’elle n’avait pas participé au processus consistant à déterminer si le plaignant se qualifiait pour le « processus 466 », mentionné à la pièce 16. Elle a répété qu’elle n’était pas conseillère en RH quand le processus a été lancé. Elle ne connaissait que ce qui était au dossier. Elle a ajouté qu’elle avait accès aux notes inscrites au dossier du processus CR-04 quand elle a reçu la demande d’accès à l’information sur ce dossier, que la demande concernait les motifs de dotation et que le nom du demandeur n’était pas indiqué.

212 Pendant le contre-interrogatoire, quand on lui a demandé comment le gestionnaire recruteur obtenait les noms des candidats qualifiés, Mme Li a répondu que, si un conseiller en RH est impliqué et que le gestionnaire veut nommer un candidat à partir d’un bassin de dotation en particulier, les RH aident le gestionnaire à déterminer le meilleur choix. Les RH fournissent alors les noms des candidats du bassin.

213 Pendant le contre-interrogatoire, Mme Li a déclaré qu’elle n’avait pas travaillé avec Dianne Ginter sur le bassin de dotation dont il est fait mention dans l’énoncé conjoint des faits et qu’elle ne savait pas si, en 2007-2008, les gestionnaires ont eu accès aux bassins ou aux rapports sommaires d’évaluation en question. Elle a ajouté que les pratiques en RH ont changé. Les noms des candidats ne sont plus inscrits dans les bassins, uniquement leurs notes.

214 Quand on lui a demandé comment elle s’était préparée à l’audience, Mme Li a répondu qu’elle avait parcouru l’énoncé conjoint des faits et le dossier de dotation pour s’assurer que les faits de l’énoncé étaient exacts.

215 Pendant le contre-interrogatoire, Mme Li a confirmé qu’on pouvait mettre fin à une affectation d’une durée déterminée plus tôt que prévu avec un préavis de 30 jours et qu’on pouvait mettre fin à une affectation intérimaire avant la date indiquée dans la lettre d’offre. Par exemple, des budgets peuvent prendre fin, ce qui a pour effet de mettre fin aux affectations intérimaires ou pour une durée déterminée. Mme Li a aussi affirmé que, quand une affectation pour une durée déterminée acceptée par un candidat d’un bassin de dotation arrive à échéance, le gestionnaire peut offrir une autre affectation pour une durée déterminée au même candidat à condition que le bassin existe toujours.

216 Pendant le contre-interrogatoire, Mme Li a déclaré qu’aucune pratique en matière de RH ne permet aux gestionnaires de prendre les résultats des candidats d’un bassin qui n’occupent pas un poste de durée indéterminée et de les transférer dans un nouveau bassin, mais les gestionnaires ont toutefois la possibilité de choisir cette option. C’est ce que le plaignant croit qu’il aurait fallu faire dans son cas. Mme Li a vu cette option être exercée environ trois fois seulement; c’est très difficile à réaliser parce que les critères de mérite évalués doivent être les mêmes pour les deux bassins, et ce n’est habituellement pas le cas.

217 Mme Li a parlé de la pièce 16. Elle a déclaré que les RH ne produisent jamais les tableaux sommaires d’évaluation pour la dotation. Les gestionnaires subdélégataires préparent les rapports sommaires d’évaluation, et les RH mettent à jour la colonne des nominations.

218 Mme Li a déclaré que, en ce qui concerne la pièce 19 (reportage des « National News » diffusé par le réseau CBC) qu’elle ne se souvenait pas d’avoir vu le reportage télévisé, mais qu’elle avait lu l’article. Toutefois, elle ne sait pas quand ou si elle a fait le lien avec le plaignant à ce moment-là, mais elle le fait aujourd’hui.

219 À la question du plaignant, qui suggérait que les bassins de dotation pour des postes classés CR-03 et CR-04 avaient été fermés parce que Mme Delgaty, la gestionnaire subdélégataire du programme PEC et superviseure de M. Quinn, voulait s’en prendre à lui, Mme Li a répondu qu’elle ne connaissait Mme Delgaty que sur le plan professionnel, qu’elle ne l’avait jamais rencontrée à l’extérieur du travail et qu’elle n’avait jamais rencontré son mari. Mme Li a également précisé qu’elle avait initié le changement visant à fixer des dates d’échéance aux bassins de dotation dans le cadre de son projet de [traduction] « nettoyage des bassins », qui avait pour but d’améliorer la gestion des bassins par les RH. Elle a déclaré qu’elle avait écrit à Mme Delgaty, la gestionnaire subdélégataire de certains des bassins, pour lui demander l’autorisation de fixer une date d’échéance pour le bassin CR-04, plutôt que de le garder ouvert pour une durée indéterminée. Mme Delgaty a accepté la recommandation de Mme Li (pièce 53). Mme Li a aussi noté que les quatre bassins mentionnés à la page 2 de la pièce 48 (le processus CR-04, le processus CR-03 et deux autres processus) sont venus à échéance le 31 mars 2009, pas seulement les deux bassins dont faisait partie le plaignant, et que ces quatre bassins ne visaient pas seulement la région de Victoria.

220 Lors du contre-interrogatoire au sujet des pièces 47, 48 et 49, Mme Li a déclaré que les courriels en question avaient été échangés quand Mme Lam travaillait pour SVC/RPC et M. Bergh. Elle a aussi déclaré que la mention du plaignant par Mme Lam concernait le fait que le plaignant avait alors plusieurs plaintes de dotation en cours. Il était clair dans la réponse de Mme Li à Mme Lam que la fermeture des bassins de dotation était une initiative des RH qui visait à améliorer la gestion des bassins et qui n’avait rien à voir avec le plaignant.

221 Il a été question de la phrase suivante du courriel envoyé par Mme Lam à Mme Li le 5 janvier 2009 (pièce 48) : [traduction] « Chris Hughes fait partie du bassin de dotation 425 [le processus CR-04]. Si le bassin est fermé, il pourrait déposer une plainte ». Mme Li a déclaré qu’elle avait compris que Mme Lam faisait référence au fait que le plaignant avait alors au moins trois plaintes de dotation en cours et que Mme Lam demandait si le fait de fermer le bassin CR-04 avant que le plaignant ait reçu une affectation pourrait mener à une autre plainte.

222 Pour ce qui est de la pièce 50, Mme Li a déclaré qu’elle ne savait pas pourquoi le défendeur avait décidé plus tard de reporter la fermeture du bassin CR-04 au 30 juin 2009. Toutefois, la pièce 50 démontre clairement que la direction pouvait reporter la fermeture d’un des bassins dans lequel se trouvait le plaignant (le bassin a été créé en 2007, et il devait être fermé le 31 mars 2009), et c’est ce qu’il a fait.

C. Témoignage de Mme Delgaty

223 De 2005 à 2009, Mme Delgaty était directrice des paiements et du traitement pour RHDCC, d’abord pour la Colombie-Britannique, puis pour l’Alberta, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest. Il s’agissait d’un poste partagé. En juin 2007, Mme Delgaty a assumé la responsabilité supplémentaire d’administratrice en chef du programme PEC, à Victoria.

224 En janvier 2011, Mme Delgaty a occupé le poste de directrice générale régionale de la région des Prairies pour l’ASFC. Elle travaille dans la fonction publique depuis 1980, et elle a passé environ 20 ans à l’ASFC, avant de travailler pendant près de 10 ans pour le défendeur, après quoi elle a accepté le poste qu’elle occupe actuellement. Au cours de ces 10 ans, elle a toujours travaillé à Vancouver, sauf pour une période de 10 mois où elle se trouvait au Manitoba.

225 Mme Delgaty a commencé à travailler dans le domaine de la dotation en 1982. De 2003 à 2007, elle s’occupait principalement de recrutement pour des postes de gestionnaires intermédiaires. Après 2007, on lui a demandé de limiter ses activités au recrutement de gestionnaires, principalement aux groupes et niveaux PM-05 et PM-06. Compte tenu de sa grande expérience de la dotation, on fait souvent appel à elle pour obtenir des conseils dans le domaine.

226 Lorsque Mme Delgaty a pris en charge le programme PEC, il fallait nommer et former près de 125 employés en deux mois. Pour ce faire, il a fallu créer des bassins de candidats qualifiés, nommer des candidats, leur obtenir une cote de sécurité et les former pour qu’ils puissent commencer à recevoir et à traiter des demandes dans le système dès la mi-septembre 2007.

227 Mme Delgaty a déclaré que le programme PEC était un [traduction] « programme de durée déterminée » qui avait pour but d’entrer dans le système les demandes présentées dans le cadre de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens à l’intérieur d’un délai prédéterminé et de traiter les paiements à la suite de l’évaluation et de l’approbation de la demande par le ministère des Affaires indiennes et Développement du Nord canadien. Le personnel du programme PEC n’évaluait pas les demandes. En outre, comme le programme PEC était pour une durée déterminée, les nominations offertes aux employés étaient elles aussi pour une durée déterminée.

228 Mme Delgaty a indiqué qu’elle était la gestionnaire subdélégataire pour le concours CR-04, qui était utilisé pour nommer les candidats à des postes du programme PEC. Ses responsabilités consistaient à coordonner le processus, à veiller à ce que les annonces soient publiées, à veiller à ce que les outils évaluent les qualifications essentielles des candidats et à examiner les rapports du comité de sélection (au sujet des processus de sélection) créés par le gestionnaire subdélégataire ou le président du comité de sélection.

229 Mme Delgaty a indiqué qu’elle avait approuvé la liste de présélection des candidats pour le programme PEC et que les postes CR étaient généralement plutôt génériques, tout comme les outils d’évaluation.

230 Mme Delgaty a précisé qu’elle avait créé une unité chargée du recrutement du personnel pour toutes les unités responsables du traitement et des paiements, et qu’elle était responsable de la conformité générale avec les politiques de dotation.

231 Mme Delgaty a affirmé qu’elle n’avait jamais rencontré le plaignant ni entendu parler de lui avant qu’il ne se joigne au programme PEC, en septembre 2007. Elle se souvenait qu’on lui avait indiqué qui étaient les nouveaux employés lorsqu’elle et sa patronne, Mme Milne, s’étaient rendues à Victoria pour le lancement officiel du programme PEC, en septembre 2007. Il est possible qu’elle se soit présentée à certains d’entre eux, mais elle n’a pas rencontré le plaignant à ce moment-là. M. Quinn n’a donné aucun renseignement sur les nouveaux employés, sauf lorsqu’il les a désignés comme ayant été nouvellement nommés. La première fois qu’elle a eu connaissance du plaignant est lorsqu’elle a vu son nom écrit dans le reportage du « National News » diffusé par le réseau CBC, en octobre 2007.

232 Mme Delgaty a indiqué qu’elle a entendu parler du plaignant une deuxième fois en avril 2008, lorsqu’un de ses gestionnaires l’a appelée au sujet d’un problème ou conflit portant sur une allégation selon laquelle le plaignant faisait une mauvaise utilisation de l’équipement du gouvernement. Elle avait sous sa responsabilité neuf gestionnaires, qu’elle encourageait à communiquer avec elle lorsque survenait un problème de dotation qui pouvait entraîner une mesure disciplinaire. Elle a conseillé au gestionnaire en question de trouver un moyen de recueillir des faits.

233 Plus tard, à la fin du mois d’avril ou au début du mois de mai 2008, Mme Delgaty a reçu un courriel de M. Bergh concernant des mesures de dotation pour le programme PEC. Elle a alors assuré un suivi en téléphonant à sa patronne, Mme Milne, qui a indiqué à Mme Delgaty qu’elle s’occupait des communications avec le plaignant et que Mme Delgaty n’était pas impliquée. Mme Milne était membre du CGPV à cette époque. Mme Delgaty, même si elle s’occupait de la dotation du programme PEC, ne participait pas au CGPV.

234 Mme Delgaty s’est souvenue d’une autre fois où M. Quinn avait communiqué avec elle durant cette période, cette fois au sujet d’un employé qui voulait être muté des bureaux de la rue Pandora à ceux de la rue Government. Elle a formulé plusieurs commentaires, que voici : le programme PEC était un programme à durée déterminée qui prendrait bientôt fin parce que le nombre de demandes avait commencé à diminuer – aucune affectation de durée déterminée ne serait prolongée; en outre, le plaignant avec été nommé à un poste dans les bureaux de la rue Pandora, et il n’y avait aucune justification opérationnelle pour l’envoyer travailler à l’autre bureau. Mme Delgaty a également noté qu’une unité de traitement spécialisée serait mise en place à Calgary en juillet 2008, et qu’à partir du 31 août 2008, toutes les demandes présentées dans le cadre du programme PEC seraient traitées par cette nouvelle unité.

235  Mme Delgaty a indiqué que c’est le plaignant qui avait entamé l’échange de courriels présenté dans la pièce 52. Le courriel du plaignant portait sur le concours CR-04. Il soulevait des questions quant à sa validité, faisait remarquer qu’il n’avait pas été sélectionné et laissait entendre que des mesures de dotation inappropriées étaient commises.

236 Mme Delgaty a déclaré avoir reçu un courriel de Mme Li, qu’elle ne connaissait pas, lui annonçant qu’il était temps de mettre fin aux bassins de dotation. Ce courriel représentait la seule information qu’elle avait sous la main lorsqu’elle a accepté de mettre un terme aux bassins.

237 Mme Delgaty a déclaré qu’elle n’était pas à l’aise avec le fait que le plaignant ait mentionné son mari dans ses plaintes de dotation, celui-ci n’ayant aucun lien avec le défendeur, et avec les allégations du plaignant au sujet des infractions commises par son personnel. Elle n’avait connaissance de rien de tout cela.

238 Mme Delgaty a déclaré qu’en octobre 2007, son mari et elle ont discuté du reportage du « National News » diffusé par le réseau CBC, parce qu’elle avait déjà travaillé à l’ASFC en tant qu’étudiante et qu’elle trouvait dommage que l’ASFC n’ait pas eu l’occasion de donner sa version des faits.

239 La fois suivante où Mme Delgaty a communiqué avec le plaignant était en 2008, au sujet de deux dossiers de dotation visés par des plaintes que le plaignant avait déposées. Mme Delgaty ne travaillait pas à RHDCC à cette époque, puisqu’elle se trouvait à l’extérieur de son bureau de la mi-septembre 2008 à avril 2009. Après cela, elle n’a pas eu de contact avec le plaignant jusqu’à ce qu’il lui envoie une lettre hostile au début du mois d’octobre 2009, dans laquelle il portait des accusations contre elle et son mari. J’ai accueilli une objection du plaignant et jugé que les communications qu’il avait eues avec Mme Delgaty après le 1er octobre 2009, date de sa dernière plainte de pratique déloyale de travail, n’étaient pas pertinentes. Toutefois, le plaignant a décidé de produire sa lettre du 7 octobre 2009, adressée à Mme Delgaty, en tant que preuve (pièce 52).

240 Mme Delgaty a déclaré qu’elle avait supervisé la mise sur pied du concours CR-04 et les nominations qui en ont découlé. Le plaignant aurait allégué qu’elle affichait un sentiment antisyndical à son égard parce que son mari était un gestionnaire à l’ASFC au moment où le reportage du « National News » a été diffusé par le réseau CBC. De plus, le défendeur n’a pas prolongé la nomination d’une durée déterminée du plaignant et n’a pas approuvé la demande de mutation du plaignant aux bureaux de la rue Government.

241 Mme Delgaty a révélé qu’elle avait de l’expérience avec les syndicats, qu’elle avait été membre d’un syndicat pendant deux ans, qu’elle avait travaillé avec différents syndicats au cours dans 29 dernières années et qu’il était crucial que la direction entretienne de bonnes relations avec le syndicat.

242 Lors du contre-interrogatoire, Mme Delgaty a expliqué qu’elle n’avait pas pris de mesures pour régler les nombreuses plaintes formulées par le plaignant dans son courriel du 30 avril 2008 adressé à M. Bergh (pièce 30), car elle avait considéré que la situation était rendue à un point où elle ne pouvait plus être réglée, et qu’elle avait communiqué avec sa patronne, Mme Milne, afin de déterminer les prochaines étapes à suivre. Comme elle l’a affirmé dans son témoignage, Mme Milne lui a dit qu’elle s’occuperait de toutes les futures communications avec le plaignant.

243 Lors du contre-interrogatoire, Mme Delgaty a indiqué qu’elle ne savait pas pourquoi son nom ne se trouvait pas dans la lettre de non-renouvellement de la nomination du plaignant (pièce 33), plutôt que celui de Mme Milne, puisque c’était elle la responsable du programme PEC. Cependant, la lettre qu’il a reçue était une lettre-type de non-renouvellement.

244  Mme Delgaty a précisé qu’elle a habité à Vancouver pendant les dix années où elle a travaillé pour le défendeur, à l’exception d’une période de dix mois où elle a travaillé au Manitoba. Elle a déclaré que, bien qu’elle était une employée du défendeur tout au long de ces dix années, elle n’était pas dans les bureaux de RHDCC pendant la période allant de la mi-septembre 2008 à avril 2009.

245 Lors du contre-interrogatoire, Mme Delgaty a expliqué que le CGPV était présidé par le directeur des RH et que tous les directeurs exécutifs en faisaient partie. Bien qu’elle ne se souvienne pas de tous les directeurs exécutifs qui en faisaient partie à un moment précis, puisque la composition du CGPV changeait au fil du temps, elle se souvient que sa patronne, Mme Milne, en faisait partie.

246 Toujours pendant le contre-interrogatoire, Mme Delgaty a répété qu’elle n’avait pas parlé des nouveaux employés avec M. Quinn lors de la fête d’inauguration du programme PEC, à Victoria, sinon pour se les faire présenter. Elle a déclaré qu’elle n’avait pas entendu le message d’accueil qu’il avait enregistré sur sa boîte vocale, au mois de mai, avisant les appelants de lui laisser un message alors qu’il était en congé. Cependant, M. Quinn lui en a parlé. Le problème en cause était que personne ne répondait aux messages que laissaient des clients dans la boîte vocale du plaignant pendant son absence. Mme Delgaty ne savait pas à ce moment-là si le plaignant était en congé.

247 Pendant le contre-interrogatoire, Mme Delgaty a déclaré que le plaignant travaillait pour le programme PEC, que le travail diminuait et que les demandes restantes allaient être traitées dans les bureaux de Calgary. Elle a cru comprendre que certains des employés avaient trouvé un emploi dans d’autres secteurs d’activité après la fermeture du programme PEC. Elle n’était pas la gestionnaire recruteuse pour ces cas-là, et elle n’avait pas accès aux détails de dotation des autres secteurs d’activité.

248 Quand on lui a demandé pendant le contre-interrogatoire si elle avait des raisons financières de rejeter la demande de mutation du plaignant des bureaux de la rue Pandora aux bureaux de la rue Government, Mme Delgaty a répondu avoir donné un conseil à M. Quinn, et que ce dernier n’était pas tenu de le suivre. Elle lui a dit que le plaignant avait été nommé pour travailler aux bureaux de la rue Pandora, que le programme PEC était sur le point de disparaître, que l’affectation du plaignant arriverait bientôt à échéance, que les demandes restantes allaient être traitées dans les bureaux de Calgary et que, sur le plan opérationnel et étant donné les circonstances, il ne serait pas très logique de muter le plaignant.

249 Mme Delgaty a déclaré pendant le contre-interrogatoire que M. Quinn avait souligné les aspirations syndicales du plaignant, mais uniquement pour lui expliquer pourquoi il voulait être muté. Elle a affirmé qu’elle n’avait pas tenu compte des aspirations syndicales du plaignant dans son conseil à M. Quinn. Elle a déterminé qu’il n’était pas logique sur le plan opérationnel, et étant donné les circonstances, de muter le plaignant. Elle aurait donné le même conseil si une autre personne avait demandé une mutation.

250 Mme Delgaty a déclaré pendant le contre-interrogatoire qu’elle ne se rappelait pas avoir été informée des plaintes déposées par le plaignant contre le défendeur avant le courriel envoyé par le plaignant le 30 avril 2008 à M. Bergh (pièce 30). Elle a affirmé qu’elle n’était pas au courant de la plainte de harcèlement déposée par le plaignant contre M. Quinn et qu’elle n’avait vu la lettre de non-prolongation du plaignant que le jour de son témoignage à l’audience. Elle a précisé qu’il ne faisait pas partie de ses tâches de connaître ce type de détails relativement aux postes de niveau CR. Elle savait que toutes les affectations d’une durée déterminée pour le programme PEC allaient arriver à échéance à la même date.

251 Pendant le contre-interrogatoire, Mme Delgaty a déclaré qu’elle ne savait pas que le plaignant avait déposé des plaintes contre le défendeur avant le courriel envoyé par le plaignant à M. Bergh, le 30 avril 2008 (pièce 30).

252 Mme Delgaty a déclaré qu’elle n’était pas au courant des deux plaintes déposées par le plaignant contre l’ASFC (pièce 7) avant de recevoir une lettre du plaignant, datée du 7 octobre 2009, (pièce 52). Elle a aussi déclaré qu’elle n’a pris connaissance de l’échange de courriels entre Mme Li et Mme Lam (pièce 48) le jour de son témoignage à l’audience seulement.

253 Mme Delgaty a déclaré pendant le contre-interrogatoire qu’elle ne savait pas qui était encore dans le bassin de dotation quand elle a accepté la suggestion de Mme Li de les fermer. Son travail ne consiste pas à se renseigner au sujet de ces détails. Mme Li lui a dit que les gestionnaires n’avaient plus besoin des bassins, qu’ils les avaient utilisés comme ils le souhaitaient et qu’ils en avaient de plus récents. Elle a accepté la recommandation de Mme Li de fermer les bassins. Elle a précisé qu’il était avantageux d’avoir des bassins plus récents qui rendent compte des changements de critères qui sont importants pour les nouveaux postes.

254 Quand on lui a demandé pendant le contre-interrogatoire si elle savait que le plaignant avait déposé une plainte auprès du ministre vers les mois de février 2009, Mme Delgaty a répondu que le cabinet du ministre n’avait pas communiqué avec elle pour avoir des renseignements généraux au sujet du plaignant et qu’elle n’était pas disponible en février 2009. Elle a répété qu’elle ne travaillait pas à RHDCC entre la mi-septembre 2008 et la fin avril 2009. Les seuls contacts qu’elle a eus concernant les plaintes du plaignant sont survenus quand ce dernier a contesté ses décisions de dotation. Elle a dû fournir des documents dans le cadre d’une ordonnance de divulgation. On a communiqué avec elle par la suite pour l’informer qu’elle devait venir témoigner à l’audience.

255 Lors du contre-interrogatoire, Mme Delgaty a répété qu’elle avait eu connaissance du reportage sur l’ASFC du « National News » diffusé par le réseau CBC et qu’elle en avait discuté avec son mari. Bien qu’il n’ait pas questionné directement Mme Delgaty à ce sujet, le plaignant à présumé que, puisque le mari de Mme Delgaty était un cadre supérieur à l’ASFC en 2008-2009, la décision de Mme Delgaty de ne pas lui offrir de poste ainsi que sa décision de fermer les bassins de dotation étaient une forme de représailles pour l’embarras que le reportage de la CBC avait causé à son mari.

256 Mme Delgaty a déclaré qu’en tant que gestionnaire subdélégataire elle avait accès aux tableaux sommaires d’évaluation de la dotation, tout comme la personne responsable de gérer son service de recrutement et le processus de sélection. Elle a expliqué que les dossiers de dotation ne sont habituellement pas communiqués aux gestionnaires, sauf s’ils font partie du comité de sélection. Le service de recrutement compile les critères de sélection et envoie la liste aux RH, puis un bassin initial de candidats préqualifiés est créé. Le dossier est ensuite envoyé aux RH. En tant que gestionnaire, Mme Delgaty n’a pas accès aux dossiers du comité de sélection, à l’exception des dossiers dans lesquels elle est impliquée.

257 Mme Delgaty a déclaré que les gestionnaires ont le droit de savoir qui est dans un bassin de candidats qualifiés (pièce 13, par exemple). Toutefois, quand un gestionnaire fournit aux RH ses justifications de sélection pour que des noms soient tirés du bassin afin de déterminer le meilleur candidat possible pour le poste, les RH tirent les noms.

258 Mme Delgaty a déclaré que, depuis que l’entrée en vigueur de la LEFP en 2005, les gestionnaires et les RH ne classent plus les candidats. Les RH retiennent ou éliminent des noms du bassin de dotation en fonction des critères de sélection fournis par le gestionnaire.

259 Mme Delgaty a précisé que, quand la LEFP est entrée en vigueur, les gestionnaires recruteurs et les RH discutaient rarement des énoncés des critères de mérite et des bassins de dotation. Maintenant qu’ils ont acquis une certaine expérience avec la LEFP, ils se consultent plus souvent. Toutefois, ce qu’il faut retenir de la LEFP, c’est que la sélection est fondée sur les résultats obtenus par un candidat pour les compétences demandées et sur la question de savoir si ce candidat serait le meilleur choix possible pour le poste.

D. Témoignage de M. Bergh

260 M. Bergh a pris sa retraite de RHDCC en décembre 2008, après 35 ans à la fonction publique.

261 À partir de 2003 et jusqu’à sa retraite, M. Bergh était le directeur des activités liées à la pension pour la Colombie-Britannique, l’Alberta, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest. Environ 550 employés travaillaient pour lui, et il s’occupait d’environ 16 milliards de dollars en avantages sociaux à remettre aux prestataires de plusieurs programmes différents, comme le programme de SVC/RPC et les prestations d’invalidité. Depuis ses débuts en tant que directeur, il a toujours travaillé dans les bureaux de la rue Government.

262 La participation de M. Bergh au programme PEC s’est accrue au fil du temps. Il a déclaré qu’au début tous les cadres supérieurs dans la grande région avaient la responsabilité d’appuyer le traitement des demandes postales de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens. Son organisation a pris de l’ampleur en raison de sa grande expérience avec le traitement des demandes postales et l’envoi des paiements. Il a commencé à soutenir directement les processus de dotation du programme PEC en affectant quelques employés clés pour prêter main forte au programme et en fournissant des services d’opérations postales et de traitement des demandes à Victoria.

263 M. Bergh a indiqué qu’il avait pris sa retraite en 2008. Compte tenu du temps écoulé, il ne se souvenait que vaguement des détails concernant le processus de dotation des postes classifiés CR-03 par rapport à ceux classifiés CR-04 pour le programme PEC à Victoria. Selon lui, Mme Delgaty était la superviseure et détenait le pouvoir de signature pour le processus de dotation des postes classifiés CR-04. Cependant, comme elle était située à Vancouver, si une question était soulevée et qu’elle n’était pas disponible pour y répondre, M. Bergh se trouvait sur place à Victoria et pouvait aider au besoin. Il supervisait et détenait le pouvoir de signature pour les postes classifiés CR-03. Son personnel a lancé le processus de recrutement des CR-03.

264 En ce qui concerne la pièce 17, M. Bergh a affirmé qu’en tant que gestionnaire subdélégataire responsable du processus de dotation des CR-03, il aurait eu accès au tableau sommaire d’évaluation. Il ne l’aurait toutefois vu qu’au départ. Le détenteur de la feuille de calcul aurait été l’employé des RH chargé du ressourcement. Ce document aurait été conservé à Vancouver ou à Edmonton. Il a précisé qu’il n’aurait pas eu accès à la feuille de calcul électronique et qu’il aurait été incapable, à titre de gestionnaire, de la modifier. S’il avait eu besoin de la consulter pour un concours interne, il aurait pu le faire, mais il n’aurait pas été obligé de choisir un candidat en faisant partie.

265 M. Bergh ne faisait pas partie du jury de sélection pour le bassin de dotation des postes classifiés CR-04. Son rôle se limitait à nommer un gestionnaire pour qu’il dirige le processus de dotation. Il prenait part aux discussions sur le personnel le mieux qualifié pour élaborer les outils servant à évaluer les critères de mérite de l’énoncé et, vraisemblablement, son personnel discutait de ces outils avec lui et avec les RH.

266 M. Bergh a indiqué qu’il ne se souvenait pas avoir déjà rencontré le plaignant avant l’audience, bien qu’ils aient pu se croiser dans les couloirs sur les lieux de travail. La communication par courriel qu’il a eue avec le plaignant portait sur la demande de mutation du plaignant (pièce 28). M. Bergh a déclaré qu’il ne se souvenait pas de ce courriel en particulier, mais qu’il décrivait un processus de mutation tel qu’il l’imagine.

267 M. Bergh a déclaré que lorsqu’il reçoit une demande de mutation, après avoir déterminé s’il y avait un besoin opérationnel, le gestionnaire ou la personne responsable de la dotation suit les principes de la pratique exemplaire et considère l’expérience, les connaissances, les compétences et les qualités personnelles du demandeur pour déterminer si celui-ci est la bonne personne pour la mutation demandée. Il a ajouté que, bien qu’il ne s’agissait pas d’une pratique exemplaire, selon lui il aurait probablement été acceptable sur le plan légal de simplement réaffecter la personne à un autre endroit au sein de la même unité ou dans une autre unité, dans la mesure où la personne conserve un poste de même niveau, quoiqu’il ne se souvenait pas si cela se rapportait au niveau du poste ou au niveau de salaire.

268 M. Bergh a affirmé qu’il se souvenait de la demande de mutation du plaignant, et que la première impression qu’il en avait eue était qu’elle semblait étrange. Normalement, lorsqu’une personne cherche à profiter d’une occasion professionnelle, il expose les avantages que l’organisation retirerait de sa mutation. D’après ses souvenirs, ce n’est pas ce que le plaignant a fait. En fait, la seule raison que le plaignant avait donnée dans sa demande de mutation aux bureaux de la rue Government est que la mutation lui permettrait de poser sa candidature pour un poste de dirigeant syndical à cet endroit.

269 Selon M. Bergh, la raison donnée par le plaignant dans sa demande de mutation, c’est-à-dire pour lui permettre de présenter sa candidature à un poste de dirigeant syndical dans un autre lieu de travail, ne correspondait pas à l’objectif d’un processus de dotation, c’est-à-dire de répondre à un besoin opérationnel, le cas échéant. De plus, il s’est posé des questions quant au rôle qu’il aurait joué par rapport au leadership du syndicat actuel. Il se souvenait que la demande de mutation (le courriel) lui était parvenue à un moment où deux syndicats se livraient une guerre pour des questions de juridiction. Le Syndicat de la Santé nationale et du Bien-être social représentait les employés de RHDCC situés dans les bureaux de la rue Government, alors que le Syndicat de l’emploi et de l’immigration du Canada représentait ceux de la rue Pandora. En raison d’une décision de la Commission ou du Conseil du Trésor, tous les employés de RHDCC devaient, à l’avenir, être représentés par un seul et même syndicat. La demande de mutation du plaignant a soulevé, dans l’esprit de M. Bergh, la question qu’il pourrait y avoir apparence d’interférence de la direction dans les affaires internes du syndicat. Le choix d’un employé quant à sa représentation syndicale ne concerne ni la direction, ni les opérations. Il considérait qu’il ne devait pas s’en mêler.

270 M. Bergh a confirmé que la pièce 28 était effectivement son courriel accusant réception de la demande de mutation du plaignant et qu’il était pratique courante d’accuser réception d’une demande de mutation en communiquant avec la personne qui l’avait envoyée.

271 M. Bergh a déclaré qu’il n’était pas impliqué dans le refus de la prolongation de l’affectation d’une durée déterminée du plaignant. M. Bergh a révélé qu’en ce qui concerne le courriel que le plaignant lui a envoyé le 30 avril 2008 (pièce 30), il lui a semblé que le plaignant était une source inépuisable de plaintes. Cependant, comme le plaignant n’était pas son employé et que les questions soulevées ne le concernaient pas, il ne savait vraiment pas ce que le plaignant voulait. Il l’aurait probablement renvoyé à la personne dans la hiérarchie responsable du programme PEC. Il n’aurait certainement pas simplement mis le courriel de côté.

272 M. Bergh a déclaré que sa première impression concernant le courriel que le plaignant lui a envoyé le 30 avril 2008 (pièce 30) est que la personne qui l’a envoyé était le type de personne prêt à recourir aux processus de règlement des plaintes à la moindre occasion, ce qui n’avait pas pour conséquence de lui faire apprécier cette personne. Il ne comprenait pas ce que l’auteur du courriel cherchait à réaliser en envoyant ce courriel.

273 M. Bergh a déclaré qu’en tant que cadre de direction, il interagissait avec le syndicat. Il a donné comme exemple une demande du syndicat pour avoir accès à un local où réaliser des élections. Il a déclaré que ce serait une bonne chose si le syndicat pouvait compter sur la participation de personnes intelligentes. Il n’avait cependant aucun rôle à jouer dans la façon dont ses employés choisissaient leur représentant syndical et il lui importait peu qui, exactement, présentait sa candidature pour les postes de direction du syndicat.

274 Lors du contre-interrogatoire, M. Bergh a affirmé qu’il ne se rappelait pas quels employés du programme PEC avaient obtenu une nouvelle affectation à la fin de leur nomination pour une durée déterminée. Il a convenu que les chefs d’équipe et les gestionnaires du programme PEC avaient identifié des employés prometteurs. Lorsque lui ou son unité avait une nomination à proposer, il prenait ces employés prometteurs en considération. M. Bergh a indiqué que, durant la période visée, il était classifié aux groupe et niveau EX-01, ce qui est plus élevé qu’un poste classifié PM-05, et qu’il ne prenait pas personnellement part aux décisions en matière de dotation.

275 En réponse à une question au sujet du courriel qu’il a envoyé à tous les employés à l’automne 2007 après le reportage du « National News » diffusé par le réseau CBC (pièce 19), afin d’expliquer aux employés qu’ils devaient faire attention à ce qu’ils affichent sur Facebook et les autres réseaux sociaux, M. Bergh a indiqué qu’il n’était pas approprié d’utiliser le nom et le logo de RHDCC de cette façon.

276 Lorsqu’on lui a posé des questions sur les options offertes à un employé de la rue Pandora désirant travailler dans les bureaux de la rue Government, M. Bergh a déclaré que la mutation était évidemment une option possible. Cependant, au moment où le plaignant a fait sa demande, il n’y avait probablement pas de poste classifié CR-04 ou CR-03 vacant aux bureaux de la rue Government.

277 M. Bergh a avoué qu’il n’avait jamais fait l’objet d’une plainte de pratique déloyale de travail alléguant qu’il entretenait un sentiment antisyndical ou qu’il interférait avec le syndicat, et il n’avait jamais entendu parler d’une plainte de ce type dans sa direction. Il n’était au courant d’aucune autre plainte d’atteinte aux droits de la personne dans sa direction non plus.

278 M. Bergh a affirmé qu’il était au courant de nombreux griefs déposés au fil des ans. Il avait été appelé à participer à des enquêtes du TDFP lorsqu’il y avait eu des plaintes concernant des processus de dotation auxquels il avait participé. Il n’a rien contre les employés qui se servent des mécanismes de recours qui sont mis à leur disposition. Il a également indiqué que, compte tenu de l’ampleur des activités dont il était responsable, avec 550 employés relevant de lui, il n’était pas au courant des décisions quotidiennes prises par ses gestionnaires en matière de dotation. Il était responsable du processus. S’il y avait une erreur ou une contestation concernant le processus, il tentait de corriger la situation.

279 Dans le contre-interrogatoire au sujet du courriel que le plaignant lui a envoyé le 30 avril 2008 (pièce 30), M. Bergh a indiqué qu’il ne croyait pas avoir refusé de rencontrer le plaignant pour discuter de sa demande de mutation. Cependant, il n’aurait probablement pas eu un grand rôle à jouer dans le processus décisionnel concernant la mutation d’une personne vers sa direction, compte tenu de la taille de son effectif et de son rôle de direction.

280 Lors du contre-interrogatoire, M. Bergh a déclaré que, bien qu’il préférait régler un problème rapidement lorsque l’employé touché venait le voir ou allait consulter son chef d’équipe, une fois qu’un employé entamait un processus, comme le fait de déposer une plainte de pratique déloyale de travail, les cartes sont sur la table et il n’intervient plus. Son travail ne consiste pas à aider une personne à obtenir un poste syndical, mais bien de faire en sorte que le travail est effectué.

281 M. Bergh a expliqué que le CGPV était un groupe de cadres supérieurs travaillant à l’échelon régional et qu’il n’en faisait pas partie. Le CGPV était un produit d’austérité dans l’organisation, et ses décisions étaient fondées sur des justifications budgétaires. En 2008, il pensait que Mme Milne participait aux réunions pour le groupe chargé du traitement des paiements. Il a déclaré que, lorsqu’il avait un poste à pourvoir, une fois la demande de dotation approuvée par le CGPV, il revenait à ses gestionnaires et à ses chefs d’équipe de s’occuper de la paperasse avec les RH.

282 En ce qui concerne la pièce 44, soit le courriel du plaignant à un chef d’équipe du programme PEC concernant le fait qu’il n’avait pas été sélectionné pour un poste au service des opérations de SVC/RPC, dans lequel il avait écrit [traduction] « si je n’ai pas de vos nouvelles d’ici demain, je vais communiquer avec mon député », M. Bergh a expliqué qu’il interprétait ce courriel comme une menace de faire appel à son député ou de déposer une plainte ministérielle. Il a considéré ce courriel comme une menace visant à embarrasser la chef d’équipe du programme PEC ou son unité et à l’inciter à lui répondre rapidement sans suivre le processus normal. Il a déclaré que ce n’est pas ainsi que les choses fonctionnent. Le processus normal est énoncé à la fin de la page 1 de la pièce 44. Quant à la mesure à prendre, M. Bergh ne voulait pas récompenser la profération de menaces.

E. Témoignage de M. Quinn

283 M. Quinn a pris sa retraite en juin 2009, après environ 33 ans à la fonction publique. Avant de prendre sa retraite, il a occupé le poste de gestionnaire des services régionaux partagés, à Vancouver, puis celui de gestionnaire principal responsable du centre de paiement, à Victoria, pour le programme PEC. Pendant la période visée par les plaintes, M. Quinn supervisait des chefs d’équipe, dont la chef d’équipe du plaignant pour le programme PEC, Mme Smith.

284 M. Quinn a déclaré qu’il avait commencé à s’occuper du programme PEC vers la fin de l’automne 2005 et durant l’année 2006, lorsqu’il avait été décidé que l’un des centres de traitement des réclamations du programme PEC serait établi à Victoria. Il était l’un des deux gestionnaires de RHDCC à Victoria à cette époque.

285 M. Quinn a déclaré que le programme PEC ne devait pas être comme tous les autres programmes de traitement des paiements que RHDCC avait déjà offerts aux autres ministères fédéraux. Le rôle de RHDCC dans le programme PEC consistait à recevoir, à compter de la mi-septembre 2007, les demandes envoyées par environ 80 000 demandeurs admissibles d’un bout à l’autre du Canada dans le cadre de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens, et de les compléter en confirmant l’identité des demandeurs et en vérifiant qu’ils répondaient aux autres critères d’admissibilité, notamment le fait d’avoir fréquenté un pensionnat. Les demandes, une fois reçues, devaient être entrées dans un module de section des subventions et des contributions du programme PEC. Une fois les demandes complétées, le bureau de Victoria de RHDCC devait transmettre les demandes au ministère des Affaires indiennes et du Développement du Nord canadien, où le personnel déterminerait si les demandeurs étaient admissibles à un paiement. La décision quant à l’admissibilité était alors renvoyée au bureau de Victoria, qui devait alors s’occuper de traiter les paiements.

286 M. Quinn a affirmé que la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens avait été signée autour du mois de février 2007. Elle prévoyait une option d’abstention dans les 90 jours pour ceux qui désiraient intenter leur propre action en justice. Cependant, si trop de personnes avaient choisi de se retirer, le règlement n’aurait pas pu se faire, c’est pourquoi la mise en œuvre n’a débuté qu’à l’été 2007.

287 M. Quinn a souligné que le programme PEC était un projet d’envergure à courte durée et que, même si une période de réclamation de quatre ou cinq ans était prévue, la direction s’attendait à avoir un volume élevé de travail dans les premiers temps. On avait prévu environ 1,9 milliard de dollars pour les paiements dans le cadre du programme PEC. La direction s’attendait à recevoir environ 70 000 demandes entre le 17 septembre 2007 et la fin de décembre 2007.

288 M. Quinn a expliqué qu’il a fallu embaucher rapidement environ 125 personnes à des postes de groupes et niveaux PM-01, CR-04 et CR-03, et que cet exercice de dotation a été réalisé, de même que la formation, durant les mois de septembre et octobre 2007.

289 M. Quinn a dit qu’il relevait de Mme Delgaty, qui était chargée de la dotation. Il ne pouvait se rappeler exactement à quel moment il a reçu sa formation de délégué ni à quel moment on lui a accordé son pouvoir de signature pour le programme PEC. Il a indiqué que, en tant que gestionnaire, il devait avoir accès à un rapport sommaire d’évaluation (pièce 17), mais que le responsable du rapport aurait été les RH, et qu’il lui aurait donc été impossible d’en modifier le contenu.

290 M. Quinn a parlé de ses interactions avec le plaignant. M. Quinn a rencontré le plaignant pour la première fois en 2005, lorsqu’il a postulé à un poste classifié CR-05 dans le cadre d’un concours pour lequel M. Quinn était le gestionnaire subdélégataire. Le plaignant ne s’est pas qualifié pour le poste et il a demandé une discussion informelle avec M. Quinn pour obtenir de la rétroaction. Bien que M. Quinn n’était pas obligé de satisfaire à sa demande, il l’a rencontré pour lui donner la rétroaction souhaitée.

291 En septembre 2007, M. Quinn a proposé au plaignant une nomination d’une durée déterminée pour un poste classifié CR-04 dans le cadre du programme PEC. La nomination devait initialement s’étendre de septembre 2007 au 7 mars 2008. M. Quinn a indiqué qu’il avait eu un rôle à jouer dans deux prolongations de la durée de la nomination du plaignant, parce qu’il restait du travail à faire.

292 M. Quinn a déclaré qu’en mars 2008, le nombre de nouveaux demandeurs avait diminué et que l’envergure du programme PEC diminuait. On avait alors décidé que les réclamations restantes seraient traitées par le bureau de Calgary, qui était le centre chargé du traitement des paiements spécialisés. En mars 2008, M. Quinn avait réduit le nombre d’équipes de travail dans les bureaux de la rue Government et avait consolidé l’équipe d’employés dont il avait la charge dans les locaux de la rue Pandora, où lui et la plupart de ses employés étaient situés. À la mi-mai et en juin 2008, les opérations du programme étaient encore plus réduites.

293 M. Quinn a également indiqué que, à mesure que le nombre de demandes diminuait, il y avait de moins en moins de travail de bureau à faire dans les locaux de la rue Pandora, la charge de travail étant plutôt dirigée vers des employés de plus haut niveau, comme des experts-conseils en affaires et des CR-05, pour le traitement de différents types de demandes, comme celles associées à des testaments ou à des successions.

294 En janvier 2008, M. Quinn a reçu une demande de mutation de la part du plaignant. Il voulait être muté des bureaux de la rue Pandora à ceux de la rue Government afin de pouvoir exécuter ses tâches de là-bas. M. Quinn a affirmé qu’en janvier 2008, il savait que les employés du programme PEC seraient rapatriés des bureaux de la rue Government à ceux de la rue Pandora, où il était lui-même situé, car les responsables de SVC/RPC voulaient ravoir les locaux qu’ils avaient prêtés temporairement au programme PEC pour leurs propres activités. M. Quinn a communiqué avec sa patronne, Mme Delgaty, pour discuter de la demande de mutation du plaignant. On lui a fait valoir qu’il n’y avait aucune raison opérationnelle de satisfaire à cette demande. M. Quinn a été avisé qu’il était insensé sur le plan opérationnel de satisfaire à cette demande alors qu’ils allaient, de toute façon, regrouper les employés du programme PEC dans les bureaux de la rue Pandora.

295 M. Quinn a indiqué avoir reçu un courriel de M. Campbell au sujet d’un échange entre le plaignant et un formateur du groupe CR-04. Il a indiqué ne pas avoir demandé à ce qu’on lui envoie le courriel. On le lui a envoyé pour l’informer à titre de gestionnaire. Il n’en a pas parlé au plaignant, car il n’était pas important de lui en parler.

296 M. Quinn a dit que M. Bergh l’avait avisé qu’il avait reçu une demande de mutation de la part du plaignant. M. Quinn a expliqué que le gestionnaire qui reçoit la demande de mutation est le seul à décider d’accéder ou non à la demande, mais que la courtoisie veut que celui qui reçoit la demande en informe le gestionnaire du demandeur pour l’aviser du fait qu’un de ses employés va le quitter.

297 M. Quinn s’est souvenu d’avoir eu à s’occuper d’une demande de mesure d’adaptation du plaignant pour réduire les communications par téléphone pour des raisons médicales. Les dossiers du programme PEC portaient sur des cas d’agressions sexuelles dans les pensionnats et des clients traumatisés. Une partie du travail des CR-04 du programme PEC consistait à répondre au téléphone pour aider des clients à remplir leurs demandes. Le plaignant a demandé de ne plus avoir à téléphoner à des clients ni à retourner leurs appels. M. Quinn a déclaré que les bureaux du programme PEC avaient alors beaucoup de travail qui n’impliquait aucun contact avec des clients, comme la résolution de problèmes et le traitement des demandes dans le système. Mme Smith, la chef d’équipe du plaignant, a confirmé la mesure d’adaptation que le plaignant avait demandée (pièce 64).

298 L’interaction suivante de M. Quinn avec le plaignant (pièce 65) était sous la forme d’un courriel daté du 14 février 2008 que le plaignant a envoyé à Mme Smith et transféré à M. Quinn, dans lequel le plaignant a affirmé que le problème de harcèlement qu’il avait eu avec IM était réglé.

299  M. Quinn a interagi de nouveau avec le plaignant vers la fin du mois de mai 2008, lorsque le plaignant a déposé une plainte de harcèlement contre lui, Mme Smith et IM. M. Quinn a déclaré qu’il ne savait pas trop pourquoi il avait été inclus dans cette plainte de harcèlement. Il croyait que le problème entre le plaignant et IM avait été réglé de façon satisfaisante, conformément à ce que le plaignant avait dit dans son courriel du 14 février 2008 (pièce 65) envoyé à sa chef d’équipe, Mme Smith, puis transféré à M. Quinn. M. Quinn a ajouté que d’après ce qu’il avait compris, les tâches du plaignant avaient été modifiées à la suite d’un consentement mutuel et que le conflit avait été réglé.

300 M. Quinn a indiqué avoir été avisé de la plainte de harcèlement (pièce 65) environ une journée après que le plaignant ait reçu sa lettre des RH lui indiquant que son affectation d’une durée déterminée ne serait pas prolongée (pièce 33).

301 M. Quinn a indiqué qu’il avait pris part à la décision de ne pas prolonger l’affectation d’une durée déterminée du plaignant; plusieurs autres affectations n’ont pas été prolongées. M. Quinn a révélé que l’affectation du plaignant n’avait pas été prolongée une troisième fois parce que la charge de travail du programme PEC était plus légère. Il y avait moins de nouvelles demandes, et la demande pour le type de travail de bureau que le plaignant accomplissait pour le programme PEC diminuait. En outre, il avait été décidé que toutes les demandes restantes seraient transférées au centre de traitement spécialisé de Calgary d’ici la fin de septembre.

302 M. Quinn a indiqué qu’on avait accordé un congé payé au plaignant avant la fin de sa nomination d’une durée déterminée. Il croyait que cela avait été fait en lien avec la plainte de harcèlement que le plaignant avait déposée contre lui, Mme Smith et IM. Selon lui, c’est Mme Milne qui avait accordé le congé et qui lui en avait fait part.

303 M. Quinn a déclaré qu’il comprenait qu’un conflit était survenu au sujet de la communication, par le plaignant, du mot de passe de sa boîte vocale à sa chef d’équipe afin que d’autres employés du bureau puissent rappeler les clients ayant laissé des messages sur sa boîte vocale pendant son congé payé. Le plaignant a refusé de communiquer son mot de passe. M. Quinn a indiqué que, bien qu’il ne croit pas que le conflit ait été résolu, les parties étaient parvenues à un compromis. Le plaignant a accepté de donner son mot de passe à son représentant syndical, qui pouvait s’en servir pendant son absence.

304 M. Quinn a indiqué que, pour ce qui est des autres interactions avec le plaignant, il se souvenait que celui-ci était venu le voir à son bureau à plusieurs reprises pour discuter de différentes choses, mais il ne se rappelait pas les raisons précises.

305 M. Quinn a ajouté que, pour ce qui est de la référence préparée par Mme Smith, la chef d’équipe du plaignant, tous les chefs d’équipe avaient eu à préparer des références pour leurs employés à ce moment-là.

306 M. Quinn a dit qu’il connaissait Mme Smith depuis plus de 10 ans, qu’elle avait été la présidente locale du syndicat pendant de nombreuses années et qu’il entretenait une relation de travail plutôt bonne avec elle. Il a également affirmé qu’il entretenait une bonne relation de travail avec Dave Conti, qui avait pris la place de Mme Smith à titre de président local du syndicat. M. Quinn a aussi précisé qu’il avait lui-même été un dirigeant syndical plus tôt dans sa carrière au gouvernement et qu’il comprenait les rôles que le syndicat et la direction jouent dans le milieu de travail.

307 M. Quinn, lors du contre-interrogatoire, a indiqué qu’il avait fallu embaucher environ 125 personnes au début de l’automne 2007. Il a convenu que la direction s’était servie d’un certain nombre de listes d’admissibilité pour nommer des candidats à des postes de différents niveaux. Il ne se souvenait pas pourquoi on avait offert des affectations dont la durée n’était pas toujours la même.

308 M. Quinn a affirmé lors du contre-interrogatoire qu’il se souvenait de l’émission « National News » diffusée par le réseau CBC, ou d’un article ultérieur dans les journaux au sujet de l’ASFC, mais qu’il n’avait jamais discuté de l’article ou de l’émission avec Mme Delgaty ni avec qui que ce soit d’autre au travail. Il ne se souvenait pas non plus avoir parlé du plaignant à Mme Delgaty lors de la fête d’inauguration du programme PEC.

309 M. Quinn a souligné, lors du contre-interrogatoire, que les chefs d’équipe avaient le droit de critiquer leurs employés. Il était d’accord avec le plaignant concernant le fait que, de façon générale, un collègue ne devrait pas en critiquer un autre publiquement.

310 Lors du contre-interrogatoire, on a demandé l’avis de M. Quinn au sujet du commentaire de Mme Smith dans la référence qu’elle avait produite, concernant le fait qu’il aurait été préférable que le plaignant vienne lui parler en premier au sujet de son conflit avec IM, avant d’aller voir son président syndical. M. Quinn a convenu qu’un employé avait le droit de parler à son président syndical et qu’il n’aurait pas formulé ce commentaire de la même façon que Mme Smith l’avait fait. Il a toutefois précisé qu’il ne disait pas nécessairement que Mme Smith avait eu tort.

311 M. Quinn a indiqué que la référence devait être acheminée au gestionnaire recruteur pour le service des opérations de SVC/RPC. Il ne savait toutefois pas qui était le gestionnaire en poste à ce moment-là. Lors du contre-interrogatoire, M. Quinn a aussi convenu du fait qu’un commentaire négatif dans une référence pouvait avoir une incidence négative sur le postulant. M. Quinn a indiqué qu’il ne prenait pas de décisions en matière de mutation et que ces décisions étaient prises par les unités de réception.

312 Lors du contre-interrogatoire, on a posé des questions à M. Quinn au sujet des heures supplémentaires dans le cadre du programme PEC. Il a affirmé ne pas se souvenir si l’offre d’emploi prévoyait qu’il pourrait être nécessaire de travailler des heures supplémentaires. Il a indiqué qu’il faisait le suivi des heures supplémentaires à des fins budgétaires, mais que les unités dont il s’occupait comptaient environ 225 employés. Les chefs d’équipe faisaient le suivi des heures supplémentaires réalisées par chacun des employés. Il ne se souvenait pas si le plaignant avait travaillé des heures supplémentaires.

313 En contre-interrogatoire, M. Quinn a indiqué qu’il avait pris des décisions concernant des employés embauchés pour une durée déterminée, décisions auxquelles participaient leurs chefs d’équipe. Il a précisé qu’il ne pensait pas que Mme Milne ait été impliquée.

314 En ce qui concerne le non-renouvellement de la nomination pour une durée déterminée du plaignant, M. Quinn a expliqué que ses services n’étaient plus requis étant donné que l’on procédait à une réduction du personnel, mais que l’on gardait des PM-01 et d’autres employés de plus haut niveau en raison de la nature de plus en plus complexe du travail. Il ne se souvenait pas quelle proportion des 90 à 100 employés classifiés CR-04 et PM-01 avaient été conservés.

315 Lorsqu’on lui a demandé si lui et Mme Delgaty avaient pris la décision du 6 février 2008 de ne pas accéder à la demande de mutation du plaignant, M. Quinn a répondu qu’ils en avaient discuté et qu’ils avaient déterminé qu’il n’y avait aucun motif opérationnel justifiant la mutation.

316 Lorsqu’on lui a demandé en contre-interrogatoire pourquoi il avait pris six jours pour répondre à la demande de mutation du plaignant, alors qu’il s’agissait d’une demande pressante, M. Quinn a répondu que, d’après les preuves, il semble qu’il ait envoyé ses courriels par l’entremise de son BlackBerry, ce qui signifie qu’il n’était probablement pas à Victoria à ce moment-là, mais plutôt en déplacement.

317 Toujours lors du contre-interrogatoire, M. Quinn a révélé ne pas avoir envoyé de lettre au personnel du programme PEC du bureau de la rue Government, contrairement à ce que le plaignant avait demandé, pour demander si quelqu’un voulait changer de place avec le plaignant et ainsi changer son lieu de travail de la rue Government pour celui de la rue Pandora.

318 M. Quinn, lorsqu’on lui a demandé s’il était satisfait du travail du plaignant, a indiqué que, durant la période en question, rien n’avait été porté à son attention concernant le travail du plaignant, que ce soit [traduction] « positif, négatif ou neutre ».

319 On a demandé à M. Quinn lors du contre-interrogatoire s’il avait manipulé les rangs des candidats. Il a expliqué qu’il n’accédait aux rapports sommaires d’évaluation des candidats que par l’entremise des RH. Il a affirmé qu’il n’avait ni la compétence, ni la volonté de manipuler les données des feuilles de calcul des candidats préqualifiés.

F. Preuves présentées par le plaignant dans le cadre de sa réfutation

320 Le plaignant a demandé qu’on lui accorde le droit d’appeler d’autres témoins, ce qui aurait nécessité un ajournement de l’audience et sa reprise à une date ultérieure. La Commission a souligné le fait que l’audience d’octobre 2010 avait été ajournée à la demande du plaignant pour lui donner plus de temps pour préparer son dossier, et que les parties avaient alors été avisées que lorsque l’audience reprendrait le 2 mai 2011 elles devraient présenter leurs preuves et leurs arguments. Le plaignant a eu plus de six mois pour préparer son cas. J’ai statué que l’étape de présentation des preuves était terminée et j’ai rejeté sa demande. J’ai déterminé que les arguments seraient entendus le matin suivant, tel qu’il avait été convenu.

G. Preuves additionnelles

321 L’argumentation devait débuter le 6 mai 2011, mais le plaignant ne s’est pas présenté pour des raisons médicales. Au début de la présentation des arguments, à la reprise de l’audience le 17 août 2011, le plaignant a demandé à ajouter deux nouveaux documents de politique à sa preuve. On lui a indiqué que les témoins avaient été autorisés à se retirer et que l’étape de la présentation des preuves était terminée. L’audience a pris fin le 17 août 2011.

322 En novembre 2011, le plaignant a présenté deux nouvelles demandes pour produire des preuves additionnelles.

323 Le 21 novembre 2011, le plaignant a envoyé un courriel contenant des pièces jointes, dans lequel il demande que M. Bergh soit rappelé à témoigner afin de lui poser des questions au sujet d’un courriel envoyé le 21 juin 2007 relativement à une plainte déposée par le plaignant auprès de la CFP contestant un processus de sélection externe tenu en 2006. Le document n’est pas directement lié aux plaintes dont je suis saisie, qui portent sur des pratiques déloyales de travail concernant des gestes que le défendeur aurait commis entre mai 2008 et octobre 2009. En outre, le plaignant a lui-même témoigné au sujet des circonstances de la plainte de dotation qu’il a déposée en février 2007 et retirée en juillet 2007. Le plaignant ne m’a pas convaincu du bien-fondé de reprendre l’audience afin d’entendre ce qu’avait à dire M. Bergh au sujet d’un document lié à une plainte de dotation dont il a déjà été question à l’audience.

324 Les deuxième et troisième documents joints à la demande du plaignant datée du 21 novembre 2011 sont des courriels et une télécopie que ce sont envoyés Mme Li et un agent de la CFP, en novembre 2008, en réponse à une demande d’information de la CFP au sujet d’une plainte de dotation déposée par le client auprès de la CFP, en lien avec un concours CR-04 tenu en 2007. Mme Li a fait suivre une copie de la lettre de prolongation de la nomination d’une durée déterminée qui avait été remise au plaignant en février 2008 et a expliqué la signification du passage indiquant que [traduction] « le PEC était un programme temporaire ». Le plaignant demande maintenant que Mme Li soit rappelée à témoigner afin de la questionner au sujet de ces documents. La preuve apportée par ces documents n’est pas nouvelle.

325 Lors de la reprise de l’audience en mai 2011, le plaignant a procédé à un contre-interrogatoire exhaustif de Mme Li. Les témoins à l’audience, y compris Mme Li, ont décrit le programme PEC de différentes façons. On en a parlé comme étant un programme temporaire, un programme d’une durée déterminée, un projet à court terme et un projet de durée limitée. Bien que le choix des mots ait pu varier, tous les témoins, y compris le plaignant, ont convenu du fait que le programme PEC était un projet à durée limitée.

326 Tel qu’il a été mentionné ci-dessus, lors de la reprise de l’audience le 17 août 2011, le plaignant a cherché à produire de nouveaux documents. J’ai alors jugé que l’étape de la présentation des preuves était terminée et que les témoins avaient reçu l’autorisation de se retirer, et j’ai rejeté la demande du plaignant. Dans sa demande du 21 novembre 2011, le plaignant n’a présenté aucun motif justifiant alors l’adoption d’une approche différente. La demande du plaignant est rejetée.

327 Le 28 novembre 2011, le plaignant a présenté une deuxième demande en vue de produire de nouveaux documents en tant que preuves et d’interroger un nouveau témoin en lien avec ces documents. Les premiers documents sont un échange de courriels entre le plaignant et l’avocat du défendeur entre avril 2007 à novembre 2010 au sujet de documents à présenter au moment de reprendre l’audience, en mai 2011, et qui renvoient plus précisément au concours pour un poste classifié CR-04, qui a eu lieu en 2007, à Victoria. Les documents suivants sont un échange de courriels entre des professionnels des RH au sujet des outils utilisés lors du concours CR-04 de 2007, à Victoria, et comprennent la liste des candidats potentiels selon leur rang. Le troisième groupe de documents est un échange de courriels échangés entre novembre et décembre 2010, principalement entre des spécialistes des RH, dont Mme Li, au sujet de la demande du plaignant pour obtenir la liste des candidats au concours CR-04 de 2007 selon leur rang, et sur les justifications pour la nomination de certains des candidats retenus.

328 Des preuves ont été produites à l’audience selon lesquelles, dans quelques cas au moins, des candidats ayant obtenu une note moins élevée que le plaignant pour certaines compétences de l’énoncé des critères de mérite avaient été nommés par le défendeur, alors que le plaignant n’a pas été nommé. La nouvelle preuve que le plaignant a demandé de présenter va dans le même sens que ce qui a déjà été présenté lors de l’audience et ne m’a pas convaincu du bien-fondé de reprendre l’audience afin d’entendre de nouveaux témoins au sujet de documents portant sur un processus de dotation dont nous avons déjà discuté à l’audience. L’étape de la présentation des preuves à l’audience est terminée, et la demande présentée par le plaignant le 28 novembre 2011 est rejetée.

V. Résumé de l’argumentation

A. Pour le plaignant

329 Le plaignant a déclaré que, au cours de son emploi pour le programme PEC, il n’avait reçu que des évaluations positives de son travail, qu’il n’avait jamais fait l’objet de mesures disciplinaires et que, dans bon nombre de ses travaux, il était soit le plus productif, soit parmi les meilleurs.

330 Le plaignant a affirmé que, au cours de la période visée par les plaintes qui m’ont été présentées, soit de mai 2008 à octobre 2009 environ, de nombreux postes classifiés CR-03 et CR-04 ont été à pourvoir dans les bureaux de la rue Government. À plusieurs reprises, le défendeur a offert des postes d’une durée déterminée ou indéterminée à des candidats ayant obtenu des notes inférieures à lui, ou qui étaient moins qualifiés. Le plaignant attribue ce comportement à l’attitude antisyndicale du défendeur.

331 Dans le cadre de son argumentation, le plaignant a mentionné pour la première fois 11 décisions en matière de dotation prises par le défendeur qui, selon lui, constituaient des pratiques déloyales de travail. Il a déclaré que des candidats ayant obtenu une note moins élevée ou étant moins qualifiés que lui, et qui n’étaient pas des activistes syndicaux, avaient été nommés alors que lui ne l’avait pas été. Bien qu’on lui ait dit que ces candidats avaient été choisis parce que leurs habiletés étaient mieux adaptées aux postes à pourvoir, le plaignant a allégué que c’était en raison de l’attitude antisyndicale du défendeur.

332 Le plaignant a affirmé que le refus continuel du défendeur de le muter aux bureaux de la rue Government en mai et juin 2008, comme il l’avait demandé à plusieurs reprises, était motivé par la plainte qu’il avait abandonnée. Il a d’abord demandé un transfert en janvier 2008 uniquement parce qu’il souhaitait présenter sa candidature pour obtenir un poste de direction dans la section locale du syndicat de la rue Government. Il devait travailler dans les bureaux de la rue Government pour avoir le droit de présenter sa candidature. Il a allégué que le défendeur le traitait différemment depuis l’épisode de la plainte abandonnée, lorsqu’il a de nouveau demandé un transfert, une mutation ou une nouvelle nomination à un poste de niveau classifié CR-03 ou CR-04 aux bureaux de la rue Government. Le plaignant a déclaré avoir présenté ces demandes ultérieures de transfert ou de mutation à la fois pour son avancement professionnel et pour avoir l’occasion, à l’avenir, de présenter sa candidature pour un poste à la direction du syndicat.

333 Le plaignant a indiqué que des postes classifiés CR-03 et CR-04 étaient vacants dans les bureaux de la rue Government, et que le défendeur avait le devoir d’accepter sa demande de transfert ou de mutation, sauf s’il pouvait prouver qu’il serait trop dispendieux de le faire.

334 Le plaignant a également déclaré qu’il était connu comme étant un dénonciateur connu et un employé qui savait comment se servir du processus de règlement des griefs et autres procédures de réparation, et qu’il n’avait pas peur d’y avoir recours. Il a fait référence, à titre d’exemples, à des plaintes qu’il avait présentées et qui avaient été accueillies par le TDFP, à des plaintes non réglées sur les droits de la personne, ainsi qu’à des plaintes auprès de son président syndical et de son député. Il a indiqué être perçu comme un fauteur de troubles et un activiste syndical. Selon lui, en raison de ces perceptions, le défendeur a refusé de le transférer ou de le muter aux bureaux de la rue Government et de lui offrir une nouvelle nomination à la fin de son affectation d’une durée déterminée. Il a affirmé que les gestionnaires ne voulaient pas l’avoir dans leur unité ou dans leur immeuble.

335 Le plaignant a affirmé avoir été traité différemment après avoir présenté la plainte qui a été ensuite abandonnée. Il a donné de nombreux exemples de pratiques déloyales de travail et de traitement différentiel de la part du défendeur, dont : la lettre de non-prolongation lui indiquant que son affectation d’une durée déterminée ne serait pas renouvelée; le fait que le défendeur a évité de lui proposer une nomination en 2008 et en 2009, même s’il faisait partie du bassin de candidats préqualifiés et qu’il avait de meilleures notes et était plus qualifié que d’autres candidats sélectionnés pour les postes à pourvoir; le fait que le défendeur a présenté 167 offres d’emploi à des candidats faisant partie d’autres bassins plus récents; le refus du défendeur de le nommer à des postes intérimaires, même s’il était le candidat le plus qualifié; le refus du défendeur de le laisser se servir d’une vieille référence d’un ex-collègue et chef d’équipe à la retraite, même si cela avait été permis lorsqu’on l’avait nommé pour travailler pour le programme PEC; la lettre de recommandation injuste ou incomplète fournie par sa chef d’équipe d’alors, et son refus de réécrire cette lettre comme il le lui avait demandé; l’expiration anticipée de deux bassins de candidats préqualifiés dont il faisait partie, même si les compétences liées à l’emploi n’avaient pas changé.

336 Le plaignant a affirmé que le traitement différentiel dont il faisait l’objet était la démonstration d’un sentiment antisyndical faisant suite à la plainte abandonnée, qu’il remettait en question le refus du défendeur de lui accorder sa demande de transfert aux bureaux de la rue Government afin qu’il soit admissible à présenter sa candidature pour un poste de direction du syndicat. Il a affirmé avoir reçu sa lettre de non-prolongation deux semaines après avoir présenté la plainte abandonnée et que, par le fait même, cette lettre représentait une pratique déloyale de travail.

337 Le plaignant a indiqué que, après la diffusion de l’émission « National News » par le réseau CBC, en octobre 2007, il s’est retrouvé dans le projet à court terme et sans issue du programme PEC, même s’il était l’un des employés les plus productifs. Il a déclaré que Mme Delgaty en avait été la cause, en raison de l’embarras que l’histoire de la CBC avait occasionné à son mari, un cadre supérieur à l’ASFC à l’époque de la diffusion de cette histoire, et il a ajouté qu’elle avait admis, lors d’un contre-interrogatoire, qu’elle avait discuté de cette histoire avec son mari.

338 Le plaignant a affirmé que M. Bergh lui avait refusé sa deuxième demande de mutation parce qu’il craignait que le fait d’approuver sa demande de mutation aux bureaux de la rue Government afin qu’il puisse présenter sa candidature à un poste de direction du syndicat pourrait nuire aux affaires syndicales, comme l’a témoigné M. Bergh. Le plaignant a allégué que M. Bergh avait une relation « amicale » avec le président syndical et qu’il avait nommé l’ex-président syndical à un poste pour lequel le plaignant était plus qualifié.

339 Le plaignant a indiqué qu’il était frustré d’être systématiquement exclu. Ainsi, quand il a dit à M. Bergh qu’il irait voir son député s’il ne le mutait pas aux bureaux de la rue Government, M. Bergh a interprété, à tort, le commentaire du plaignant comme étant une menace et il a refusé de le rencontrer pour régler la question ou pour se pencher sur ses plaintes.

340 Le plaignant a affirmé que le défendeur n’avait donné d’explication adéquate à savoir pourquoi il n’était pas le meilleur candidat pour les nombreux postes pour lesquels il était qualifié et qui étaient à pourvoir au cours de la période en question. Il a soutenu que les gestionnaires avaient manipulé les critères de sélection de façon à ce que son nom ne soit pas retenu par le personnel des RH.

341 Le plaignant m’a renvoyé à un certain nombre de cas pour appuyer ses arguments, mais il en a retiré plusieurs par la suite. Il m’a enfin renvoyé à : Strike c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2010 CRTFP 22; Melnichouk c. Agence canadienne d'inspection des aliments, 2004 CRTFP 181; Alberta Hospital Ponoka v. Alberta Union of Provincial Employees, Local 42, Chapter 1 and 3 (1997), 52 Alta. L.R. (3e) 1 (C.A.); United Brotherhood of Carpenters and Joiners of America, Local 1669 v. Finn Way General Contractors Inc., 2011 CanLII 28357 (Ont. L.R.B.); Carpenters Union, United Brotherhood of Carpenters and Joiners of America v. K.D. Clair Construction Ltd., 2008 CanLII 7517 (Ont. L.R.B.); Atchison v. Springs Canada Inc., 2004 CanLII 15388 (Ont. L.R.B.).

342 Le plaignant a insisté sur Carpenters Union, United Brotherhood of Carpenters and Joiners of America. Il a affirmé que le défendeur, tout comme l’employeur dans cette affaire (qui a mis fin à l’emploi d’un employé afin de décourager les employés de participer aux activités normales d’un syndicat), aurait dû reconnaître qu’il s’agissait d’un cas évident de pratique déloyale de travail et il aurait dû annuler sa lettre de cessation d’emploi, s’excuser et le garder comme employé.

B. Pour le défendeur

343 Le défendeur a fait valoir que les allégations du plaignant étaient essentiellement des contestations de ses décisions en matière de dotation. Les problèmes de dotation soulevés par le plaignant devraient être étudiés dans le cadre de la procédure de règlement des griefs de dotation. En vertu de la LEFP, le TDFP a la compétence exclusive sur les griefs de dotation.

344 Le défendeur a indiqué qu’une plainte pour pratique déloyale de travail devait être fondée sur le non-respect des interdictions énoncées dans les dispositions de l’article 186, et que dans ce cas-ci, aucune des mesures interdites à l’alinéa 186(2)a) n’ont été prises. Les décisions en matière de dotation que le plaignant conteste, soit que le défendeur n’ait pas accepté de le transférer ou de le muter aux bureaux de la rue Government ou de le nommer de nouveau à la fin de sa nomination d’une durée déterminée, renvoient à des décisions en matière de dotation qui ne constituent pas des pratiques déloyales de travail.

345 Le défendeur a déclaré avoir présenté suffisamment de preuves pour que l’on puisse considérer qu’il a assumé le fardeau de la preuve qui lui a été imposé par l’application de la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve. Le critère applicable consiste à établir si les mesures prises l’ont été dans le cadre de l’exercice raisonnable de ses pouvoirs de gestion. Selon les preuves présentées par le défendeur, les décisions en matière de dotation que le plaignant conteste étaient raisonnables dans le cadre de l’exercice des pouvoirs de gestion suivant une évaluation des besoins opérationnels.

346 Le défendeur a soutenu qu’il n’y avait pas de lien entre les mesures de dotation qu’il a prises et les allégations de sentiment antisyndical formulées par le plaignant, et qu’il n’existe pas de preuves ni de lien causal liant les incidents contestés et une attitude antisyndicale. Même si la preuve pouvait soulever des problèmes sur le plan de la dotation, il n’y a aucune preuve révélant que les décisions contestées en matière de dotation ont été motivées par un sentiment antisyndical ou une volonté d’exercer des représailles. Le défendeur a affirmé que ses gestionnaires n’étaient pas motivés par un sentiment antisyndical, et que les décisions contestées par le plaignant ont été prises en fonction des besoins opérationnels et des pratiques de sélection fondées sur la meilleure correspondance possible. Ainsi, la Commission devrait rejeter les plaintes.

347 Le défendeur a soutenu que les arguments du plaignant étaient vagues, manquaient de clarté, portaient à confusion et changeaient constamment. Le défendeur a donc eu beaucoup de difficulté à produire une réponse.

348 Le défendeur a affirmé que le fait qu’un gestionnaire soit au courant des pratiques de dénonciation du plaignant ne signifie pas qu’il est motivé par une attitude antisyndicale. Il a fait valoir qu’à plusieurs reprises, le plaignant avait informé les gestionnaires de ses connaissances et de ses compétences pour contester des décisions en matière de dotation. Ensuite, lorsqu’il a fait l’objet d’une décision en matière de dotation qu’il n’approuvait pas, il a déclaré que le gestionnaire, comme il était au courant de ses habiletés de contestation, affichait un sentiment antisyndical.

349 Le défendeur a déclaré que le plaignant avait demandé une mesure d’adaptation, lorsqu’il a été nommé en septembre 2007, afin qu’il soit exempté de la pratique, courante en RH qui consiste à obtenir une référence auprès du plus récent chef d’équipe. Après sa nomination, il a allégué que le défendeur faisait preuve de discrimination à son égard lorsqu’il a refusé de lui accorder cette exemption en 2008, alors que les circonstances avaient changé et qu’une telle exemption n’était plus justifiée.

350 En résumé, le défendeur a soutenu que les décisions en matière de dotation que le plaignant conteste, c’est-à-dire son refus d’approuver son transfert ou sa mutation selon ses volontés et de prolonger sa nomination d’une durée déterminée, l’expiration du bassin de dotation pour les postes classifiés CR-04, ainsi que son refus de le renommer après la fin de son affectation d’une durée déterminée, sont, en fait, des griefs de dotation déguisés en plaintes de pratiques déloyales de travail.

351 Le défendeur a indiqué qu’un employé n’obtient pas un droit de transfert, de mutation ou de prolongation de son affectation d’une durée déterminée simplement parce qu’il le demande. Le défendeur, à titre d’employeur, a le droit d’assigner les tâches et de prendre des décisions en matière de dotation fondées sur des besoins opérationnels légitimes. Le défendeur a assumé le fardeau qu’il lui incombait de démontrer que les décisions contestées par le plaignant ne constituaient pas des pratiques déloyales de travail, qu’elles étaient fondées sur des besoins opérationnels et qu’elles n’étaient pas motivées par une attitude antisyndicale ou une volonté d’exercer des représailles. Le désir du plaignant de poser sa candidature pour le comité exécutif du syndicat ne constituait pas un besoin opérationnel pour le défendeur.

352 Pour appuyer sa position, le défendeur a cité les décisions de la Commission suivantes : Quadrini; Laplante; Hager et al., 2009 CRTFP 80; Merriman et Union of Canadian Correctional Officers - Syndicat des agents correctionnels du Canada ( UCCO-SACC-CSN) c. MacNeil et Justason, 2011 CRTFP 87; Hager et al. c. Opérations des enquêtes statistiques (Statistique Canada), 2011 CRTFP 79.

C. Réfutation du plaignant

353 Le plaignant a indiqué que les témoins du défendeur avaient été vagues lorsqu’on leur a demandé les raisons de leurs décisions opérationnelles. Ils n’ont jamais expliqué pourquoi certaines personnes ayant des notes moins élevées que lui ont reçu des offres d’emploi, alors que lui n’en a pas reçu.

354 Le plaignant a convenu que, sur les 11 plaintes liées à la dotation qu’il avait identifiées au début de son argumentation, il n’y en avait probablement que quatre ou cinq qui portaient sur des pratiques déloyales de travail, alors que les autres portaient sur des décisions en matière de dotation. Toutefois, il a déclaré que le défendeur n’avait pas expliqué par quelle façon on pouvait juger raisonnable le fait qu’on ne lui a pas accordé de nomination, de transfert ou de mutation tel qu’il l’avait demandé, ce que le défendeur aurait dû faire.

355 Le plaignant a ajouté qu’il n’alléguait pas que les gestionnaires avaient manipulé les rapports sommaires d’évaluation, mais plutôt qu’ils avaient manipulé les énoncés des critères de mérite de façon à ce que sa candidature ne soit pas retenue lors de la sélection des candidats par le personnel des RH.

VI. Motifs

356 Dans ce cas, il faut déterminer si le défendeur a assumé le fardeau qui lui incombait, en vertu de la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve, d’établir selon la prépondérance des probabilités qu’il n’a pas commis les pratiques déloyales de travail alléguées dans les trois plaintes qui m’ont été présentées. Ces plaintes portent sur des allégations d’infractions aux sous-alinéas 186(2)a)(i) à (iv) de la LRTFP.

357 Le plaignant a allégué que le défendeur avait commis des pratiques déloyales de travail lorsqu’il a fait obstacle à ses demandes répétées de mutation vers d’autres unités de travail de la rue Government, mis fin à sa nomination d’une durée déterminée et refusé de lui offrir une nouvelle nomination d’une durée déterminée ou indéterminée.

358 Dans la plainte du 19 septembre 2008, le plaignant a allégué que le refus du défendeur d’approuver sa demande de mutation et le fait qu’il a mis fin à sa nomination d’une durée déterminée étaient motivés par une attitude antisyndicale parce qu’il avait cherché à devenir un dirigeant syndical élu, et en guise de représailles parce qu’il avait précédemment déposé une plainte (qui a été abandonnée) contre le défendeur.

359 Dans ses plaintes du 22 décembre 2008 et du 1er octobre 2009, le plaignant a allégué que le refus continu du défendeur de lui proposer une nouvelle affectation – d’une durée déterminée ou indéterminée – entre le 19 septembre 2008 et décembre 2008, puis de décembre 2008 au 1er octobre 2009, était une forme de représailles pour les deux plaintes de pratiques déloyales de travail qu’il avait déposées antérieurement, soit la plainte abandonnée et celle du 19 septembre 2008. Il a également allégué que le défendeur affichait une attitude antisyndicale en refusant de le nommer, et ce, parce qu’il avait demandé une mutation aux bureaux de la rue Government afin de pouvoir présenter sa candidature à un poste de direction du syndicat de cet endroit.

360 Dans sa plainte du 22 décembre 2008, le plaignant a allégué que le défendeur avait pris des mesures discriminatoires à son égard parce que celui-ci avait exigé des références spécifiques dans le cadre de sa recherche d’emploi, et parce que la référence fournie en février 2008 par sa chef d’équipe du programme PEC était injuste et incomplète. Le plaignant allègue que ces mesures discriminatoires étaient des représailles parce qu’il avait présenté deux plaintes de pratique déloyale de travail.

361 Dans une lettre jointe à la plainte du 1er octobre 2009, le plaignant a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

[…]

L’une des raisons pour laquelle RHDCC refuse ardemment de réembaucher le plaignant et cherche à l’empêcher de devenir dirigeant syndical est le fait qu’il sait que le plaignant est un dénonciateur connu au gouvernement fédéral, qu’il connaît très bien les lois du travail et les droits de la personne et qu’il a la capacité de se servir de cette information recueillie au cours des huit dernières années pour en faire profiter les syndiqués. RHDCC ne veut pas d’une direction syndicale forte, informée et militante à Victoria.

[…]

362 Les trois plaintes dont je suis saisie ont été déposées en vertu de l’alinéa 190(1)g) de la LRTFP. Cet alinéa renvoie à l’article 185, qui définit une pratique déloyale de travail comme étant tout ce qui est interdit dans les paragraphes 186(1) ou (2), les articles 187 ou 188, ou le paragraphe 189(1).

363 La plainte du 19 septembre 2008 alléguait qu’il y avait eu violation de l’alinéa 186(2)a) de la LRTFP. La plainte du 22 décembre 2008 portait sur une allégation de violation des sous-alinéas 186(2)a)(i) à (iv). La plainte du 1er octobre 2009, portait sur une allégation de violation des sous-alinéas 186(2)a)(ii) à (iv). Dans son argumentation, le plaignant n’a toutefois cité que l’alinéa 186(2)a).

364 Lorsqu’il a promulgué le paragraphe 186(2) de la LRTFP, le Parlement voulait protéger les intérêts des employés en énumérant les gestes que les employeurs n’avaient pas le droit de commettre à l’endroit des employés et qui constituaient des pratiques déloyales de travail. L’alinéa 186(2)a) est libellé comme suit :

186. (2) Il est interdit à l’employeur, à la personne qui agit pour le compte de celui-ci et au titulaire d’un poste de direction ou de confiance, que ce dernier agisse ou non pour le compte de l’employeur :

a) de refuser d’employer ou de continuer à employer une personne donnée, ou encore de la suspendre, de la mettre en disponibilité, ou de faire à son égard des distinctions illicites en matière d’emploi, de salaire ou d’autres conditions d’emploi, de l’intimider, de la menacer ou de prendre d’autres mesures disciplinaires à son égard pour l’un ou l’autre des motifs suivants :

(i) elle adhère à une organisation syndicale ou en est un dirigeant ou représentant — ou se propose de le faire ou de le devenir, ou incite une autre personne à le faire ou à le devenir —, ou contribue à la formation, la promotion ou l’administration d’une telle organisation,

(ii) elle a participé, à titre de témoin ou autrement, à toute procédure prévue par la présente partie ou la partie 2, ou pourrait le faire,

(iii) elle a soit présenté une demande ou déposé une plainte sous le régime de la présente partie, soit déposé un grief sous le régime de la partie 2,

(iv) elle a exercé tout droit prévu par la présente partie ou la partie 2;

365 Je crois que la LRTFP, dans son application aux plaintes dont je suis saisie, prévoit deux conditions essentielles pour déterminer qu’une mesure constitue une pratique déloyale de travail en vertu de l’alinéa 186(2)a) :

a) que le défendeur refuse d’embaucher ou de continuer à employer le plaignant ou qu’il fasse preuve de discrimination sur le plan de l’emploi à l’égard du plaignant;

b) qu’il agisse ainsi « parce que » le plaignant a exercé une ou plusieurs des activités énumérées dans la liste des activités protégées, aux sous-alinéas 186(2)a)(i) à (iv).

366 Les interdictions énoncées aux sous-alinéas 186(2)a)(i) à (iv) de la LRTFP sont un élément crucial du régime législatif. Il est important de noter qu’elles ne font pas mention d’un sentiment antisyndical, mais qu’elles se concentrent plutôt sur la question de savoir si les gestes contestés que l’employeur a posés représentaient des mesures de représailles contre le fait que le plaignant a exercé une ou plusieurs des activités protégées par la loi. Il est essentiel, afin d’assurer l’intégrité du système des relations de travail établi par la LRTFP, que les personnes qui exercent leurs droits en vertu de cette loi puissent le faire sans crainte de représailles. Voici ce que la Commission a déclaré dans Hager et al., 2011 CRTFP 79, au paragraphe 114 : « Les affaires de ce type font souvent appel à une preuve indirecte, à une évaluation du contexte et à une recherche des tendances sous-jacentes. Il est toujours difficile de regarder derrière les raisons invoquées dans le cadre d’une décision pour déterminer si d’autres facteurs ou influences sont réellement intervenus ».

367 Selon le plaignant, le défendeur aurait exercé des mesures de représailles contre lui parce qu’il avait exercé ou cherchait à exercer des activités protégées au sens des sous-alinéas 186(2)a)(i) à (iv) de la LRTFP.

368 Le plaignant, dans sa plainte et lors de son témoignage devant la Commission, a parfois décrit une même action comme étant une mesure de représailles prise par le défendeur et comme étant la raison de la mesure de représailles contestée. Il a décidé de simplement renvoyer à l’alinéa 186(2)a) de la LRTFP dans son ensemble. Voici comment je comprends les allégations du plaignant à la lumière des exigences de la LRTFP.

369 Le plaignant, dans les plaintes dont je suis saisie et dans son témoignage, a fait référence à de nombreuses pratiques déloyales de travail commises par le défendeur depuis sa nomination en septembre 2007. Cependant, je crois que les principales formes de représailles alléguées dans les plaintes dont je suis saisie sont le refus du défendeur de lui accorder une mutation vers un autre lieu de travail tel qu’il l’avait demandé, le refus de continuer de l’employer après la fin de son affectation d’une durée déterminée et son refus de lui proposer une nouvelle nomination d’une durée déterminée ou indéterminée.

370 Le plaignant faisait partie de deux bassins externes de candidats préqualifiés, un pour des postes d’agent de prestation des services (CR-04) et l’autre, pour des postes de personnel de bureau (CR-03), de l’été 2007 jusqu’à l’expiration des bassins en 2009. Le plaignant a postulé à de nombreux postes offerts par le défendeur entre le moment où sa nomination a pris fin et l’expiration des bassins, mais sans succès.

371 Le plaignant a affirmé qu’il était qualifié, qu’il était un travailleur productif, qu’il n’avait jamais fait l’objet de mesures disciplinaires et que le défendeur avait eu de nombreux postes à pourvoir. Le fait qu’il n’a pas été nommé montre, selon lui, que le défendeur a commis une faute de conduite. Il a soutenu que le défendeur avait retenu des candidats ayant obtenu des notes inférieures aux siennes, possédant moins d’expérience que lui et qui n’étaient pas des activistes syndicaux. Il ne croit pas aux explications du défendeur voulant que les autres candidats conviennent mieux que lui pour les nombreux postes classifiés CR-03 et CR-04 qu’il y a eu à pourvoir durant la période contestée.

372 Le plaignant a allégué que les décisions en matière de dotation prises par le défendeur faisaient ressortir une tendance à refuser de l’employer en raison de ses antécédents de dénonciateur et des allégations qu’il était un fauteur de troubles, parce qu’il a des connaissances approfondies en droit du travail et en droits de la personne ainsi que la capacité et la volonté de se servir de ces connaissances pour gagner des causes contre ses employeurs.

373 À l’appui de ses arguments, le plaignant a témoigné des nombreuses mesures qu’il avait prises pour réparer les torts dans le lieu de travail du défendeur depuis qu’il y avait été nommé, en septembre 2007. Il a présenté des documents connexes comme preuves. Entre autres mesures, on retrouvait : en mai 2008, le dépôt d’une plainte de harcèlement contre IM, Mme Smith et M. Quinn (pièce 36); en juin 2008, le dépôt d’une plainte de représailles auprès du CISP (pièce 12); le dépôt de la plainte qui a été abandonnée; en juin 2008, demander à M. Jacques de lancer une enquête de [traduction] « conspiration criminelle visant à l’exclure systématiquement et à le harceler » contre les gestionnaires locaux et régionaux de RHDCC et le personnel des RH (pièce 40); le dépôt d’un certain nombre de plaintes de dotation auprès du TDFP; en février 2009, le dépôt d’une plainte auprès du ministre (pièce 10); le dépôt des plaintes dont je suis saisie.

374 Bien que les activités du plaignant appuient ses allégations concernant sa capacité et sa volonté de faire appel aux mécanismes externes de recours, il est important de noter que l’alinéa 186(2)a) de la LRTFP, qui établit mon champ de compétence, ne porte que sur les mesures de représailles prises par l’employeur pour l’une ou plusieurs des raisons évoquées aux sous-alinéas 186(2)a)(i) à (iv), qui énumèrent les activités protégées.

375 La plupart des recours documentés par le plaignant ne font pas partie de la liste des activités protégées par les sous-alinéas 186(2)a)(i) à (iv) de la LRTFP. Les plaintes de pratiques déloyales de travail sont toutefois des activités protégées. Le reste des plaintes, comme l’a affirmé le plaignant, démontre qu’il est un activiste syndical et fournit un contexte historique relativement aux plaintes. À cet égard, je tiens à préciser que la plupart, sinon toutes les activités impliquent le plaignant personnellement en lien avec sa situation d’emploi et ses objectifs de carrière, et qu’il ne s’agit pas d’activités générales liées au syndicat.

376 Le défendeur est une grande organisation. Au début, le plaignant avait de la difficulté à préciser quels concours il visait dans la période contestée en 2008 et 2009, et pour lesquels il alléguait que le défendeur avait pris des mesures de représailles à son endroit en embauchant des candidats moins qualifiés que lui parce qu’il avait exercé des activités protégées.

377 Le dernier jour de l’audience, lorsqu’il a présenté son argumentation finale, le plaignant a identifié 11 décisions en matière de dotation, prises par différents gestionnaires travaillant pour le défendeur, qu’il contestait. Il a toutefois indiqué qu’il n’y avait probablement que quatre ou cinq de ces décisions qui étaient suspectes, et que les autres étaient possiblement de simples décisions en matière de dotation. Il n’a cependant jamais précisé quelles étaient ces quatre ou cinq décisions suspectes.

378 Comme je l’ai mentionné ci-dessus, l’essence de ces plaintes est le refus du défendeur d’approuver la mutation du plaignant aux bureaux de la rue Government, comme il l’a demandé à répétition, et le refus du défendeur de continuer à l’employer ou de le réembaucher.

379 J’examinerai tour à tour chacune des principales allégations du plaignant afin de déterminer si le défendeur a assumé le fardeau qui lui incombait conformément à la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve, de réfuter, selon le principe de la prépondérance des probabilités, les pratiques déloyales de travail alléguées contre lui dans les trois plaintes dont je suis saisie.

A. Refus d’accorder une mutation

380 Le sous-alinéa 186(2)a)(i) de la LRTFP, abrégé en fonction des circonstances des plaintes, se lit comme suit :

Il est interdit à l’employeur, à la personne qui agit pour le compte de celui-ci […] de refuser d’employer ou de continuer à employer une personne donnée, ou […] de prendre d’autres mesures disciplinaires à son égard pour [les…] motifs suivants : […] elle […] est un dirigeant ou représentant [d’une organisation syndicale] — ou se propose de le faire ou de le devenir […]

L’alinéa 186(2)a) prévoit également aux sous-alinéas (ii), (iii) et (iv) que l’employeur ne doit pas refuser d’employer ou de continuer à employer ou de faire preuve de discrimination à l’égard d’une personne donnée en matière d’emploi au motif que la personne : pourrait participer, à titre de témoin ou autrement, à une procédure sous le régime de la LRTFP; a déposé une plainte; a exercé un droit prévu par la LRTFP.

381 Le plaignant m’a renvoyé aux refus répétés du défendeur d’accéder à ses demandes de mutation aux bureaux de la rue Government, en soutenant que le défendeur avait bloqué ses demandes, ce qui constituait, selon lui, une pratique déloyale de travail.

382 Comme il a été mentionné ci-dessus, le plaignant a présenté une demande urgente de mutation, en janvier 2008, au seul motif qu’il souhaitait être éligible à une élection tenue par une section locale du syndicat, le 27 février 2008, aux bureaux de la rue Government. La plainte abandonnée portait sur le rejet de cette demande. Environ un an plus tard, il a demandé que sa lettre de retrait soit annulée et que sa plainte soit rétablie, mais on l’a informé que sa plainte ne pouvait être rétablie. Pendant l’audience, j’ai dû rappeler régulièrement au plaignant que je n’étais pas saisie de l’affaire concernant le rejet de sa demande de mutation en janvier 2008. Quoi qu’il en soit, ce rejet semble être l’élément qui a déclenché le conflit majeur entre lui et le défendeur. Selon le plaignant, il s’agit d’une preuve du refus continuel du défendeur de rejeter sa demande afin que le comité exécutif du syndicat des bureaux de la rue Government demeure faible.

383 En mai 2008, le président de la section locale du syndicat des bureaux de la rue Government a démissionné, ce qui a forcé la tenue d’une nouvelle élection dans les 60 jours. Encore une fois, le plaignant a demandé que M. Quinn lui accorde une mutation d’urgence ou que M. Bergh autorise sa mutation d’urgence aux bureaux de la rue Government afin de pouvoir être éligible à cette élection. Le refus du défendeur d’accéder à ces demandes urgentes fait l’objet de la plainte du 19 septembre 2008, dans laquelle le plaignant affirme que le défendeur avait l’obligation de le muter.

384 L’argumentation du plaignant n’était pas toujours claire, mais il semblait prétendre que le rejet de sa deuxième demande urgente de mutation par le défendeur constituait une pratique déloyale de travail et que le refus continu du défendeur de prolonger sa nomination d’une durée déterminée ou de lui en proposer une autre après le 27 juin 2008 était motivé par un sentiment antisyndical.

385 Dans sa plainte du 19 septembre 2008, le plaignant a affirmé ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Après avoir déposé la plainte [abandonnée],RHDCC a mis fin à ma nomination d’une durée déterminée et a continué de rejeter mes demandes de mutation à titre de représailles. RHDCC avait le devoir, en vertu de la LCDP, d’autoriser ma mutation. Une mutation m’aurait permis de présenter ma candidature à un poste de direction au sein du syndicat. En raison de mes antécédents de dénonciateur du gouvernement, de défenseur des droits de la personne et de défenseur du personnel, RHDCC a fait tout en son pouvoir pour bloquer ma demande et mettre fin à mon emploi.

[…]

[Je souligne]

Plus loin dans sa plainte, le plaignant a fait la déclaration suivante : [traduction] « J’ai envoyé un courriel aux cadres supérieurs leur demandant de m’accorder la mutation et dans lequel je soutiens que le refus d’accéder à ma demande et le fait de mettre fin à mon contrat constituaient des mesures de représailles […] ».

386 L’argumentation du plaignant se fondait uniquement sur la deuxième exigence énoncée à l’alinéa 186(2)a) de la LRTFP. Il prétendait que le défendeur avait l’obligation juridique de le muter, étant donné le motif clairement formulé pour lequel il en avait fait la demande, et que le rejet de ses demandes de mutation était motivé par un sentiment antisyndical et constituait une mesure de représailles. Durant l’audience, le plaignant a précisé cet argument en affirmant que le défendeur avait l’obligation juridique d’accéder à sa demande de mutation à moins de pouvoir prouver qu’il serait trop coûteux de lui permettre d’aller travailler dans les bureaux de la rue Government.

387 On s’entend sur les faits suivants : M. Quinn a embauché le plaignant pour une période déterminée commençant en septembre 2007 afin d’occuper un poste de niveau CR-04 au sein du programme PEC, situé dans les bureaux de la rue Pandora. Il était aussi entendu que le programme PEC était d’une durée limitée.

388 Les deux parties ont produit des éléments de preuve de communications entre le plaignant et plusieurs gestionnaires concernant ces démarches continues en vue d’être muté aux bureaux de la rue Government, à titre de renseignements contextuels relatifs aux communications ultérieures survenues en mai et en juin 2008 entre ces parties et avec d’autres intervenants.

389 Les éléments de preuve démontrent que le plaignant a transmis une demande par courriel à M. Quinn en janvier 2008 afin d’être muté d’urgence aux bureaux de la rue Government afin d’être admissible à une nomination et de pouvoir présenter sa candidature à un poste de direction au sein de la section locale du syndicat lors d’une élection à venir. Au même moment, la direction était en pleine discussion relativement au prochain exercice financier et prévoyait la réduction du personnel du programme PEC et le regroupement de tout le personnel restant dans les bureaux de la rue Pandora. M. Quinn a informé le plaignant qu’il ne connaîtrait pas exactement les besoins en matière de traitement du programme PEC avant un certain temps (pièce 23).

390 M. Quinn a témoigné qu’en mars 2008, les unités de travail du programme PEC avaient été regroupées dans les bureaux de la rue Pandora, où se situait son bureau. Ce regroupement avait été fait, d’une part, parce que les locaux de la rue Government avaient été prêtés de façon temporaire au programme PEC et que SVC/RPC en avait besoin pour ses opérations, et d’autre part, parce que les demandes en vertu du programme PEC diminuaient et que ses activités ralentissaient progressivement. Le ralentissement était encore plus flagrant en mai 2008.

391 Les témoins présentés par le défendeur, M. Quinn et Mme Delgaty, ont affirmé que la demande de mutation du plaignant, des bureaux de la rue Pandora à ceux de la rue Government, n’avait pas été accordée parce qu’aucun besoin opérationnel ne pouvait le justifier à ce moment-là.

392 Mme Delgaty a témoigné que M. Quinn avait communiqué avec elle pour discuter de la demande du plaignant et qu’elle l’avait informé, sans lui ordonner de faire quoi que ce soit, que le plaignant avait été engagé dans le cadre du programme PEC pour occuper un poste de commis de niveau CR-04 aux bureaux de la rue Pandora; que sa période d’emploi prendrait fin sous peu; que le programme PEC était d’une durée limitée; qu’il y avait un ralentissement des activités puisqu’il y avait de moins en moins de nouvelles demandes; que la direction avait pris la décision de confier, d’ici l’automne 2008, les demandes restantes au bureau de traitement des paiements spécialisés de Calgary; qu’il n’y avait tout simplement aucune raison opérationnelle de muter le plaignant aux bureaux de la rue Government comme il le demandait.

393 En contre-interrogatoire, Mme Delgaty a témoigné que M. Quinn lui avait fait part des aspirations syndicales du plaignant, mais uniquement dans le contexte où elles constituaient la raison pour laquelle le plaignant voulait aller travailler dans un autre immeuble. Elle a déclaré ne pas avoir pris les aspirations syndicales du plaignant en compte lorsqu’elle a conseillé M. Quinn. Elle estimait que, dans les circonstances, il n’était pas très avisé d’un point de vue opérationnel de muter le plaignant, et son conseil aurait été le même peu importe la personne qui en avait fait la demande.

394 M. Bergh, qui a reçu la demande de mutation, a déclaré que la mutation n’était pas un droit que les employés pouvaient faire valoir. La première demande de mutation du plaignant datant de janvier 2008 a immédiatement été transmise aux gestionnaires concernés après l’envoi d’un accusé de réception. L’unité de réception avait le droit de déterminer si elle avait un besoin opérationnel justifiant la mutation.

395 M. Quinn, le cadre supérieur du plaignant durant la période pertinente, a témoigné que M. Bergh l’avait informé que le plaignant avait fait une demande de mutation. M. Quinn a assuré que l’avis avait été envoyé par courtoisie suivant les pratiques d’usage, étant donné que le plaignant ne lui avait pas transmis de copie de sa demande et qu’il n’avait pas voix au chapitre quant à déterminer si l’unité d’accueil accéderait à la demande. Dans son témoignage, M. Bergh a confirmé que M. Quinn, à titre de superviseur du plaignant, ne pouvait intervenir dans la décision d’une autre unité d’accorder ou non la demande.

396 En somme, j’estime que les éléments de preuve présentés par les témoins du défendeur concernant les raisons du rejet de la demande de mutation du plaignant aux bureaux de la rue Government sont crédibles et persuasifs. Je considère que le défendeur a prouvé, compte tenu de la prépondérance des probabilités, que sa décision de ne pas accorder au plaignant une mutation dans les bureaux de la rue Government à la suite de sa demande du mois de mai 2008 constituait un exercice raisonnable du pouvoir de gestion qui était fondé sur les besoins opérationnels perçus. Je considère également que cette décision n’était pas motivée, en tout ou en partie, par une volonté de représailles à l’égard du souhait du plaignant de se présenter à une seconde élection d’une section locale du syndicat qui devait être tenue peu de temps après le 14 mai 2008, ni par la plainte abandonnée qu’il avait déposée.

397 Je constate que le plaignant a constamment fait référence au refus du défendeur d’accéder à ses demandes de mutation en soutenant que celui-ci avait bloqué sa mutation. Je suis d’avis que le défendeur n’était en rien tenu d’accéder aux demandes du plaignant uniquement parce qu’il les avait présentées. Les gestionnaires du défendeur ont le droit de considérer les besoins opérationnels de leurs unités lorsqu’ils examinent une demande de mutation. Le souhait du plaignant de se voir accorder une mutation aux bureaux de la rue Government ne constituait pas un motif opérationnel et n’imposait pas au défendeur l’obligation d’accéder à sa demande. En outre, le fait que le plaignant ait sollicité une mutation afin de pouvoir être admissible à un poste au sein de la direction d’une section locale du syndicat ne lui donnait pas droit au changement demandé.

398 Je ne souscris pas à l’argument du plaignant selon lequel il serait pertinent de prendre en compte que les bureaux de la rue Pandora et de la rue Government sont situés seulement à quelques pâtés de maisons de distance. Ce sont deux emplacements de travail différents. J’estime également non fondé l’argument du plaignant voulant que le défendeur avait l’obligation de le muter aux bureaux de la rue Government et de lui permettre de faire son travail dans le cadre du programme PEC à cet endroit à moins de pouvoir prouver qu’il en serait trop dispendieux.

399 En résumé, j’estime crédibles et convaincants les éléments de preuve présentés par les témoins du défendeur concernant les raisons qui les ont amenés à rejeter la demande de mutation du plaignant aux bureaux de la rue Government. Je considère que le défendeur s’est acquitté du fardeau de la preuve en démontrant, compte tenu de la prépondérance des probabilités, que le refus d’accorder la mutation au plaignant constituait un exercice raisonnable du pouvoir de la direction, fondé sur les besoins opérationnels perçus, et qu’il ne s’agissait pas d’une mesure de représailles parce qu’il avait exprimé le désir de devenir membre de la direction du syndicat ou parce qu’il avait déposé des plaintes de pratique déloyale de travail.

400 Le plaignant a aussi prétendu que d’autres gestionnaires supérieurs qu’il avait contactés — notamment M. Bergh, le gestionnaire à qui il a envoyé sa demande de mutation, M. Netzel, le patron de M. Bergh, à qui le plaignant a affirmé avoir écrit pour lui demander d’intervenir et de faire en sorte que sa demande de mutation soit acceptée et que sa lettre de licenciement soit annulée, et Mme Milne, la superviseure de Mme Delgaty —, avaient affiché une attitude antisyndicale et mis en place des mesures de représailles en refusant de le rencontrer afin de discuter de son offre de recourir à la médiation ou de régler d’une autre manière informelle sa demande de mutation et d’autres questions en suspens. Le plaignant a produit en preuve ses communications avec M. Bergh, M. Netzel et Mme Milne (pièces 30, 32, 35, 36 et 37) pour étayer son argument.

401 Le courriel du plaignant adressé à M. Bergh est daté du 30 avril 2008 (pièce 30) et a été envoyé avant le dépôt de la plainte abandonnée. Il permet de mettre en contexte le courriel du 22 mai 2008 que le plaignant a envoyé au patron de M. Bergh, M. Netzel (pièce 32). M. Bergh a témoigné qu’il ne pensait pas avoir déjà refusé de rencontrer le plaignant. Le contenu du courriel du plaignant transmis à M. Bergh, en date du 30 avril 2008, montre que le plaignant n’avait pas spécifiquement sollicité de rencontre avec M. Bergh. Dans son courriel, il avait dressé la liste de tous les recours de réparation qu’il avait entamés contre différents gestionnaires et des recours additionnels qu’il prévoyait entreprendre contre d’autres gestionnaires. M. Bergh a déclaré qu’après avoir lu le courriel, il avait eu le sentiment que le plaignant avait mis cartes sur table et il s’est dit qu’il n’interviendrait pas à ce stade. Il n’avait pas estimé judicieux de rencontrer le plaignant avant que les procédures engagées par celui-ci aient fait l’objet d’une décision.

402 M. Netzel n’a pas été appelé à témoigner. Le plaignant a produit en preuve le courriel qu’il avait envoyé à M. Netzel en date du 22 mai 2008 (pièce 32), dans lequel il avait énuméré ses plaintes et affirmé qu’il était ouvert à la médiation et à un règlement rapide de ses plaintes. Le 23 mai 2008, le plaignant a également présenté sa communication à M. Netzel (pièce 35), dans laquelle il le remerciait d’avoir répondu rapidement à son offre de médiation. Dans ce même courriel, le plaignant avait demandé à ce qu’on l’accommode en le déplaçant immédiatement dans les bureaux de la rue Government. Le plaignant a également soumis en preuve la lettre du 26 mai 2008 qu’il avait envoyée à M. Netzel (pièce 36), dans laquelle il avait présenté une plainte de harcèlement contre Mme Smith, M. Quinn et IM et fait d’autres allégations graves; il a conclu ce courriel en déclarant qu’il était [traduction] « ouvert à un règlement rapide ». Quelque consentement qu’ait pu exprimer M. Netzel à l’égard d’une rencontre, qui lui avait valu le message de remerciement du plaignant daté du 23 mai 2008, il ne l’a pas réitéré après la réception de ses communications subséquentes.

403 Je juge inhabituels le ton et le contenu du courriel que le plaignant a envoyé à M. Bergh le 30 avril 2008 et de ceux qu’il a envoyés à M. Netzel les 22, 23 et 26 mai 2008. Je suis d’avis qu’il ne s’agit pas uniquement d’une question de mauvaise interprétation de la part des destinataires, comme le plaignant l’a laissé entendre. Un gestionnaire raisonnable pouvait considérer ces courriels comme une forme de harcèlement, une tentative d’intimidation et comme n’étant en aucune façon propices à l’organisation d’une rencontre en personne pour tenter de régler de façon informelle les accusations et les questions énumérées.

404 Mme Milne n’a pas été appelée à témoigner non plus, mais le plaignant a déclaré lui avoir envoyé un courriel le 29 mai 2008 (pièce 37). Il lui a exposé les points dont il voulait discuter, notamment : sa plainte de harcèlement contre M. Quinn, Mme Smith et IM; la plainte abandonnée; sa plainte relative aux droits de la personne; sa cessation d’emploi prématurée; sa plainte concernant un problème lié à la formation du personnel. Mme Milne l’a contacté et lui a dit qu’elle s’entretiendrait avec lui par téléphone, non pas en personne comme il le souhaitait, et qu’elle discuterait uniquement du non-renouvellement de sa nomination pour une période déterminée.

405 Le plaignant a témoigné que M. Quinn lui avait dit qu’il pourrait discuter de tous ses litiges en suspens avec Mme Milne. Mais la question n’a pas été abordée lors du témoignage de M. Quinn. En contre-interrogatoire, le plaignant a admis qu’il ne savait pas si M. Quinn avait informé Mme Milne en conséquence. Le plaignant a également reconnu, en contre-interrogatoire, que Mme Milne avait affirmé qu’elle serait ouverte à la médiation après que la plainte non réglée relative aux droits de la personne ait été tranchée. Il a aussi mentionné que Mme Milne lui avait dit qu’en raison de ses problèmes de santé, il pourrait rester à la maison en congé payé jusqu’au terme de sa nomination d’une période déterminée, soit le 27 juin 2008. En somme, j’estime, compte tenu de la prépondérance des probabilités, que les décisions prises par les gestionnaires du défendeur de ne pas rencontrer le plaignant à la fin mai et en juin 2008 afin de tenter de régler de façon informelle ses demandes de mutation ainsi que d’autres litiges en suspens n’étaient pas motivées par un sentiment antisyndical.

B. Refus de renouveler une nomination pour une période déterminée

406 Le plaignant prétend que le non-renouvellement de sa nomination pour une période déterminée constituait une pratique déloyale de travail, étant donné qu’il s’agissait d’une mesure de représailles à son endroit parce qu’il avait cherché à occuper un poste au sein de la direction du syndicat et qu’il avait déposé la plainte abandonnée.

407 La lettre d’offre d’emploi du plaignant n’a pas été soumise en preuve. Néanmoins, les témoignages du plaignant et de M. Quinn concordent quant aux conditions de base de son embauche. M. Quinn a engagé le plaignant pour une période déterminée afin d’occuper un poste de commis de niveau CR-04 au sein du programme PEC, dans les bureaux de la rue Pandora. La durée de sa nomination était spécifiée dans la lettre d’offre, qui contenait une disposition standard de non-renouvellement de la nomination.

408 Le programme PEC a été défini par Mme Li comme un programme temporaire, par Mme Delgaty comme un programme de durée limitée, par M. Quinn comme un projet à court terme et par le plaignant comme un projet d’une durée limitée.

409 Le plaignant a témoigné qu’il savait que le défendeur n’était pas obligé de prolonger sa nomination pour une période déterminée et que cette condition était clairement indiquée dans sa lettre d’offre d’emploi.

410 La nomination du plaignant a été prolongée deux fois.

411 Le plaignant a reçu une lettre en date du 20 mai 2008 (pièce 33), qui l’informait que sa nomination pour une période déterminée ne serait pas prolongée au-delà du 27 juin 2008. Cette lettre constituait l’avis écrit d’un mois l’avisant que sa nomination ne serait pas prolongée. Le plaignant a fait constamment référence à cette lettre comme étant sa [traduction] « lettre de licenciement » et au non-renouvellement de sa nomination pour une période déterminée comme de son [traduction] « licenciement ».

412 Le non-renouvellement d’une nomination pour une période déterminée n’équivaut pas à un licenciement, mais il constitue une pratique déloyale de travail dans le cadre des paramètres de l’alinéa 186(2)a) de la LRTFP si la décision du défendeur de ne pas renouveler la nomination du plaignant est le résultat d’un traitement discriminatoire en matière d’emploi, en violation de la LRTFP.

413 Le plaignant soutient qu’il était reconnu pour être un ardent défenseur de la cause syndicale et que de nombreux gestionnaires connaissaient ses positions en raison du reportage de « National News » diffusé par le réseau CBC et du fait qu’il avait mentionné ses démarches de dénonciation et ses autres activités visant à obtenir réparation à plusieurs d’entre eux, dont à M. Bergh et à M. Netzel, dans ses communications écrites.

414 La question dont je suis saisie consiste à déterminer si le défendeur a réussi à démontrer la fausseté des allégations du plaignant selon lesquelles sa décision de ne pas renouveler une troisième fois la nomination du plaignant était motivée par le fait que celui-ci avait manifesté le désir de devenir membre de la direction du syndicat ou qu’il avait déposé la plainte abandonnée.

415 M. Quinn a expliqué qu’il avait renouvelé la nomination du plaignant deux fois parce qu’il y avait du travail à faire dans le cadre du programme PEC. Il a témoigné qu’à partir de mai 2008, le travail de bureau généré par le programme PEC avait diminué progressivement, que la direction avait décidé de transférer, au plus tard à l’automne 2008, les demandes restantes au centre de traitement des paiements spécialisés, à Calgary, et que le travail qui restait à faire à Victoria pour le programme PEC était plus complexe et exigeait un niveau de compétence plus élevé que ce qui était exigé pour les postes classifiés CR-03 et CR-04; notamment en ce qui concerne les poste classifiée aux niveaux CR-05 et PM-01. À titre d’exemple, il a mentionné que pour les dossiers restants, il fallait des employés ayant de l’expérience en comptabilité pour s’occuper de questions testamentaires et successorales, contrairement aux autres dossiers qui traitaient avec des personnes toujours vivantes.

416 Lorsqu’on a demandé au plaignant, en contre-interrogatoire, pourquoi M. Quinn aurait prolongé sa nomination deux fois s’il avait eu un sentiment antisyndical envers lui, il a répondu qu’il avait une bonne relation de travail avec M. Quinn et qu’il travaillait bien. Le plaignant a prétendu que M. Quinn avait affiché un sentiment antisyndical à son égard seulement après qu’il ait présenté une plainte de harcèlement contre lui et d’autres personnes. Je remarque avec intérêt que le plaignant a déposé sa plainte de harcèlement contre M. Quinn immédiatement après avoir reçu sa lettre de non-renouvellement (et non pas avant) et qu’il a par la suite retiré la plainte.

417 M. Quinn a également indiqué que le plaignant n’était pas le seul employé classifié CR-03 ou CR-04 affecté au programme PEC dont la nomination d’une durée déterminée n’avait pas été renouvelée. En contre-interrogatoire, le plaignant a reconnu qu’il connaissait au moins trois employés du programme PEC qui étaient nommés pour une période déterminée et qui n’avaient pas vu leur nomination renouvelée.

418 Je constate également que deux des gestionnaires dont les actions ont été contestées, au motif qu’elles étaient motivées par un sentiment antisyndical ou en guise de représailles parce que le plaignant avait déposé la plainte abandonnée, soit M. Quinn et Mme Smith, ont déjà été membres de la direction d’un syndicat par le passé. En outre, M. Quinn et Mme Delgaty ont témoigné qu’au cours de leur longue carrière dans la fonction publique, ils avaient été membres d’un syndicat à une certaine époque et qu’ils avaient eu de bonnes relations de travail avec les syndicats au fil des années. Ces éléments de preuve n’ont pas été contestés de quelque façon que ce soit. De plus, je relève que le plaignant a accusé M. Bergh d’être [traduction] « amical » avec le président du syndicat.

419 En résumé, j’estime crédibles et convaincants les éléments de preuve présentés par les témoins du défendeur concernant leurs raisons de ne pas renouveler une troisième fois la nomination du plaignant. Je considère que le défendeur s’est acquitté du fardeau d’établir, compte tenu de la prépondérance des probabilités, que la décision de ne pas renouveler la nomination d’une durée déterminée du plaignant constituait un exercice raisonnable du pouvoir de la direction, fondé sur les besoins opérationnels perçus, et qu’il ne s’agissait pas d’une mesure de représailles en raison de son désir avoué de devenir membre de la direction du syndicat ou de la plainte abandonnée qu’il avait déposée.

C. Références inéquitables ou incomplètes

420 Le plaignant a déclaré que sa chef d’équipe, Mme Smith, avait fourni, le 11 février 2008, des références inéquitables qui avaient eu pour effet de bloquer ses demandes de mutation aux bureaux de la rue Government et qui lui avaient par la suite coûté une nouvelle nomination à un poste classifié CR-03 ou CR-04. Il a eu connaissance de ces références seulement en avril 2008. Il a allégué que les références données constituaient une pratique déloyale de travail, qu’elles étaient l’expression d’un sentiment antisyndical et d’une volonté de représailles et qu’elles représentaient au moins l’une des raisons pour lesquelles le défendeur ne l’avait pas nommé à nouveau au terme de sa nomination d’une durée déterminée.

421 L’allégation de références inéquitables de la part de Mme Smith fait partie de la plainte du 22 décembre 2008, qui a été déposée huit mois après que le plaignant ait eu connaissance des références. Quoi qu’il en soit, même si je devais considérer que cette allégation relève, d’une certaine façon, de la plainte du 19 septembre 2008, elle serait tout de même hors délai.

422 J’ai déjà déterminé que la date à laquelle on devait considérer que la plainte du 19 septembre 2008 avait été déposée correspondait à la date du courriel du 19 septembre 2008 envoyé par le plaignant. Néanmoins, j’ai également conclu que toute allégation contenue dans la plainte du 19 septembre 2008 respectait les délais prescrits au sens du paragraphe 190(2) de la LRTFP, seulement dans la mesure où les actions ou les circonstances y ayant donné lieu se sont produites à l’intérieur du délai prescrit, soit dans les 90 jours précédant la date du dépôt de la plainte.

423 J’ai remis à plus tard le prononcé de ma décision quant à savoir si toutes les allégations de pratique déloyale de travail contenues dans la plainte du 19 septembre 2008 avaient été présentées dans les délais prescrits. En me fondant sur la déclaration du plaignant, qui a lui-même admis avoir eu connaissance des références données par Mme Smith en avril 2008, j’estime que l’allégation de pratique déloyale de travail a été faite après la période de 90 jours précédant le dépôt de la plainte du 19 septembre 2008. Par conséquent, cette allégation est hors délai.

D. Exigence de fournir des références provenant de la chef d’équipe du plaignant au moment des faits

424 Le plaignant a également soutenu que les RH l’avaient traité différemment des autres candidats et avaient exercé des représailles contre lui durant sa recherche d’emploi en n’acceptant pas la lettre de recommandation de son ancien chef d’équipe intérimaire et en insistant pour obtenir, à la place, des références de sa chef d’équipe du programme PEC. Il a affirmé que la conduite des RH était une forme de discrimination et de représailles et qu’elle constituait une pratique déloyale de travail.

425 Le plaignant n’avait pas indiqué clairement la période au cours de laquelle la pratique déloyale de travail alléguée aurait eu lieu. La lettre de recommandation était datée du 11 février 2008, ce qui correspond à l’époque où il avait fait une demande de mutation d’urgence aux bureaux de la rue Government, soit bien avant qu’il ne dépose la plainte abandonnée.

426 Néanmoins, le plaignant a indiqué avoir postulé pour de nombreux autres postes classifiés CR-04 et CR-03 à RHDCC avant et après la fin de sa nomination pour une période déterminée et tout au long de la période qui se termine avec le dépôt de la plainte le 1er octobre 2009. Il a affirmé que les RH s’étaient livrées à une pratique déloyale de travail en exigeant qu’il présente des références de Mme Smith.

427 Le plaignant a témoigné que, lorsqu’il avait posé sa candidature pour un poste au sein du programme PEC à l’été 2007, les RH avaient accepté ses références de M. O’Neil, datées du mois de juillet 2007, avant la nomination du plaignant par M. Quinn. Mais, quand il a postulé pour des postes en 2008 et en 2009, les RH ont insisté pour qu’il fournisse des références de Mme Smith.

428 Le plaignant a présenté en preuve la lettre de recommandation de M. O’Neil (pièce 15). Elle permet de constater que les références de M. O’Neil avaient été envoyées par courriel au gestionnaire chargé de l’embauche, le 19 juillet 2007. On peut y lire que M. O’Neil avait été le superviseur immédiat du plaignant à différents moments entre 2001 et 2006.

429 Lors de son témoignage, Mme Li a expliqué que la pratique courante aux RH était d’exiger une évaluation du rendement du candidat ou des références de son chef d’équipe actuel ou du plus récent. Ils procédaient ainsi pour la raison évidente que l’employeur éventuel devait avoir accès à des renseignements à jour sur un postulant, étant donné que celui-ci pouvait avoir élargi ou approfondi ses compétences et son expérience depuis la dernière fois où il avait été nommé à partir du bassin de dotation. Mme Li a indiqué que les références étaient prises en considération dans la sélection des candidats, de même que d’autres renseignements, comme les résultats de tests et l’expérience de travail.

430 Mme Li a affirmé qu’elle ne travaillait pas au bureau des RH de Vancouver au moment où le plaignant a postulé à un poste d’une durée déterminée au programme PEC et a été embauché par M. Quinn. Toutefois, elle comprenait que la position du plaignant était que tous les chefs d’équipe qu’il avait eus dans les dix années précédant l’été 2007 avaient refusé de lui fournir des références parce qu’il avait été mis sur une liste noire et que, par conséquent, il avait besoin d’une mesure d’adaptation. En se fondant sur cet argument, les RH lui avaient accordé la mesure d’adaptation demandée et lui avaient permis de présenter des références antérieures de M. O’Neil se rapportant à une période de travail entre 2001 et 2006, au lieu de références fournies par son plus récent chef d’équipe.

431 Le témoignage du plaignant concorde avec celui de Mme Li sur ce point. Il a déclaré avoir dit aux RH en 2007 qu’il ne pouvait obtenir de références équitables de ses chefs d’équipe de l’ASFC en raison de sa dénonciation, qui avait finalement donné lieu au reportage présenté en octobre 2007 à l’émission « National News » diffusée par le réseau CBC, et c’est pourquoi il a sollicité une mesure d’adaptation. Le plaignant a indiqué que les RH avaient accédé à sa demande en lui permettant d’utiliser la lettre de recommandation de M. O’Neil datant de 2007 et qu’après, le défendeur l’avait engagé.

432 Mme Li a témoigné que, lorsque le plaignant a présenté une demande de mutation en 2008 ou a postulé pour de nouveaux postes plus tard cette année-là, les circonstances étaient différentes. Le plaignant avait eu une expérience de travail récente avec la chef d’équipe du programme PEC, Mme Smith. Rien ne justifiait d’ignorer les références plus à jour de sa plus récente chef d’équipe. Mme Li a affirmé que le plaignant avait été traité de la même façon que les autres candidats en ce qui a trait aux références demandées. Le plaignant a fait l’objet d’un traitement différent uniquement lorsqu’il s’est vu accorder, à l’été 2007, la mesure d’adaptation qu’il avait demandée. À l’époque, les RH avaient renoncé à l’exigence standard de présenter une évaluation du rendement fournie par le chef d’équipe actuel ou le plus récent.

433 En résumé, j’estime crédibles et convaincants les éléments de preuves présentés par Mme Li quant aux raisons pour lesquelles le défendeur a exigé que le plaignant présente des références provenant de son superviseur le plus récent dans le cadre de sa demande de mutation au printemps 2008 et de sa recherche d’emploi en 2008 et en 2009. Je considère que le défendeur s’est acquitté du fardeau d’établir, compte tenu de la prépondérance des probabilités, que l’exigence de références à jour constituait un exercice raisonnable du pouvoir de la direction, fondé sur les besoins opérationnels perçus, et qu’elle n’avait pas été imposée en guise de représailles contre les plaintes de pratique déloyale de travail que le plaignant avait déposées.

E. Expiration des bassins de candidats préqualifiés

434 Le plaignant faisait partie de deux bassins externes de candidats préqualifiés, un pour des postes d’agents de prestation des services (CR-04) et l’autre, pour des postes de personnel de bureau (CR-03). La validité de ces bassins allait de l’été 2007 jusqu’à leur expiration, en 2009. Selon l’énoncé conjoint des faits, la période de validité du bassin pour les postes classifiés CR-04 était indéterminée au moment où il a été créé. Plus tard, son expiration a été établie au 31 mars 2009, mais prolongée jusqu’au 30 juin 2009. Le bassin pour des postes classifiés CR-03 expirait le 31 mars 2009 (pièce 53).

435 Le plaignant a soutenu que la fin hâtive des deux bassins de candidats préqualifiés pour les postes classifiés CR-03 et CR-04 dont il faisait partie avait été motivée par un sentiment antisyndical exprimé à son égard. Il a accusé Mme Delgaty, gestionnaire subdélégataire du programme PEC, d’avoir mis fin aux bassins avant qu’on lui offre une nouvelle nomination d’une durée déterminée ou indéterminée afin de s’assurer qu’il ne serait pas nommé à un nouveau poste. Il a fait valoir, sans pour autant le demander directement à Mme Delgaty, qu’elle avait agi ainsi en raison de sa dénonciation à l’endroit de l’ASFC qui avait été diffusée lors d’un reportage à l’émission « National News » sur le réseau CBC. Il a indiqué que le reportage diffusé à la CBC avait mis la direction de l’ASFC dans l’embarras et que le mari de Mme Delgaty était l’un des cadres supérieurs de l’ASFC à cette époque.

436 Le plaignant a également indiqué dans son témoignage qu’il y avait quelque chose de louche dans le choix de la date d’expiration des bassins de candidats. Il a indiqué avoir envoyé un courriel au ministre, en février 2009, et avoir reçu une réponse le 24 mars 2009 (pièce 10), reconnaissant qu’il faisait partie des bassins de candidats pour les postes classifiés CR-03 et CR-04. Son syndicat lui a appris, le 21 juillet 2009 (pièce 39), qu’on avait mis fin aux bassins à la fin de mars 2009, soit quelques jours seulement après la réponse du ministre, et que personne ne l’avait informé de l’expiration de ces bassins.

437 Le plaignant a admis, lors du contre-interrogatoire, que le ministre n’avait pas l’obligation légale de l’informer de la date d’expiration des bassins de candidats. Cependant, il a indiqué que dans les circonstances le ministre aurait dû le faire par courtoisie, en raison de sa récente correspondance avec lui.

438 Mme Li a témoigné que dans le cadre de ses responsabilités en RH, elle a procédé à l’expiration des deux bassins de candidats en mars 2009, en même temps que plusieurs autres bassins. Elle a donné un aperçu des raisons ayant motivé ces décisions.

439 Lors du contre-interrogatoire, Mme Li a parlé des pièces 47, 48 et 49, qui sont des courriels échangés principalement entre Mme Li et Mme Lam et d’autres employés des RH, entre décembre 2008 et le début du mois de janvier 2009, au sujet de la proposition de Mme Li de changer la date d’expiration de six bassins de dotation pour qu’ils prennent fin le 31 mars 2009. On a proposé une date commune pour l’expiration des six bassins pour des raisons d’équité.

440 Mme Li a indiqué que les pratiques relatives aux bassins de dotation ont changé après le regroupement des bureaux des RH de la Colombie-Britannique, de l’Alberta, de la Saskatchewan, du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest. Ces régions affichaient différentes politiques pour les processus relatifs aux bassins. Après le regroupement, les RH ont mis en œuvre une politique commune d’établissement des dates d’expiration des bassins de dotation, selon laquelle il était possible de reporter une date d’expiration s’il était déterminé, après discussion avec les gestionnaires, que ces derniers les utilisaient encore.

441 Mme Li a indiqué qu’elle avait ultérieurement écrit à Mme Delgaty, la gestionnaire subdélégataire pour certains des bassins de dotation, pour lui demander son approbation de mettre fin au bassin pour des postes classifiés CR-04 à une date précise, plutôt que de le conserver pour une durée indéterminée. Mme Delgaty a accepté sa recommandation (pièce 53).

442 Le plaignant a assujetti Mme Li à un long et vigoureux contre-interrogatoire. Elle a révélé qu’en 2008, elle ne travaillait pas pour le défendeur, à l’unité des RH de Vancouver, et qu’elle ne connaissait pas le plaignant au moment de ses conflits avec M. Quinn et M. Bergh au sujet de ses demandes de mutation ou pendant les deux prolongations de sa nomination d’une durée déterminée. Elle a affirmé que la première fois où elle a eu affaire au plaignant était lorsqu’on lui a demandé d’examiner le dossier des RH en réponse à sa demande d’accès à l’information visant à divulguer les motifs des décisions en matière de dotation et d’autres renseignements. Cependant, elle ne savait pas à ce moment-là que c’était le plaignant qui avait demandé ces renseignements.

443 Mme Li a indiqué lors du contre-interrogatoire qu’elle ne connaissait Mme Delgaty que sur le plan professionnel, qu’elle ne l’avait jamais rencontrée à l’extérieur du travail et qu’elle n’avait jamais rencontré son mari.

444 Le plaignant a indiqué que la nature du travail n’avait pas changé, et qu’il n’était donc pas nécessaire de mettre un terme aux bassins de dotation et d’entamer un nouveau processus pour évaluer de nouveaux critères. Il a soutenu qu’une phrase d’un courriel du 5 janvier 2009 envoyé par Mme Lam à Mme Li (pièce 48) prouvait que l’expiration des bassins était une forme de représailles. La phrase en question était libellé comme suit : [traduction] « Chris Hughes est dans le bassin 425 [pour les postes classifiés CR-04] et le fait de mettre fin au bassin pourrait l’amener à déposer une plainte ».

445 Mme Lam n’a pas été appelée à témoigner. Mme Li a indiqué que, selon elle, le commentaire de Mme Lam se rapportait au fait que le plaignant, à cette époque, était l’auteur d’au moins trois plaintes de dotation en cours et qu’elle se questionnait à savoir si la fermeture du bassin de dotation pour les postes classifiés CR-04 avant que le plaignant soit nommé à un poste entraînerait une autre plainte.

446 La réponse de Mme Lam à Mme Li, envoyée plus tard le même jour (pièce 48), contient le paragraphe suivant : [traduction] « M. Hughes a déjà demandé la tenue d’une enquête par la CFP pour ce processus. Il n’y a pas lieu de s’inquiéter, puisque l’expiration du bassin n’a rien à voir avec lui. Il ne s’agit que d’un moyen pour nous de gérer nos bassins et de faire un bon nettoyage ».

447 Mme Delgaty a indiqué lors de son témoignage qu’elle était la gestionnaire subdélégataire des bassins de dotation pour les postes classifiés CR-03 et CR-04 en cause. Elle a déclaré qu’elle était la directrice des paiements et du traitement pour la Colombie-Britannique, l’Alberta, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest au moment qui nous préoccupe. Puisqu’elle travaillait à un poste de direction, elle ne s’occupait pas de questions aussi précises que ce qu’a laissé entendre le plaignant. Elle a indiqué, comme l’a affirmé Mme Li, que celle-ci avait communiqué avec elle en 2009 afin de recommander l’expiration des bassins parce qu’ils n’étaient plus utilisés ou parce qu’ils ne comprenaient plus des candidats ayant les compétences recherchées par les gestionnaires. Elle a accepté la recommandation de Mme Li. Mme Delgaty a également indiqué qu’elle ne connaissait pas les noms des candidats qui faisaient toujours partie des bassins au moment où elle a accepté la recommandation des RH d’y mettre un terme. Je considère que le témoignage de Mme Delgaty est clair et crédible.

448 Mme Delgaty a reconnu, lors du contre-interrogatoire, qu’elle et son mari avaient discuté du reportage du « National News » diffusé sur le réseau CBC. Elle a affirmé n’avoir jamais rencontré le plaignant. Bien qu’on lui ait montré le nouveau personnel du programme PEC lors de la fête d’inauguration officielle du programme, à l’automne 2007, à laquelle elle a participé avec sa patronne, Mme Milne, et bien qu’elle puisse avoir discuté avec quelques-uns de ces employés, elle n’a jamais rencontré le plaignant. Le gestionnaire chargé du recrutement, M. Quinn, ne lui a jamais parlé du plaignant lors de la fête. M. Quinn a affirmé la même chose lors de son témoignage. Mme Delgaty a également dit qu’elle n’avait jamais parlé au plaignant à quelque moment que ce soit après la fête inaugurale, et qu’elle n’a eu aucune interaction avec lui jusqu’au moment où elle a reçu de sa part une lettre d’accusation, en octobre 2009.

449 Le plaignant a contesté le témoignage de Mme Delgaty au sujet de sa lettre, affirmant qu’il lui a envoyé cette lettre le 7 octobre 2009, alors que la plainte ne portait que sur une période allant jusqu’au 1er octobre 2009. La lettre a donc été envoyée après la période en cause. J’ai accueilli l’objection du plaignant, mais il a ensuite ramené lui-même la lettre sur la table (pièce 52) lors du contre-interrogatoire en tant que pièce appuyant son argument selon lequel des échanges de courriels démontraient que l’expiration des bassins de dotation le visait particulièrement.

450 En résumé, je crois que les preuves présentées par les témoins du défendeur pour expliquer l’expiration des bassins de candidats préqualifiés sont crédibles et convaincantes. Je suis d’avis que le défendeur a assumé son fardeau de prouver que, selon la prépondérance des probabilités, les changements apportés aux dates d’expiration des deux bassins de dotation dont faisaient partie le plaignant, qui sont passés d’une durée indéterminée à une expiration le 31 mars 2009, ont été apportés de bonne foi par les RH pour des motifs opérationnels, dans le cadre d’une initiative de nettoyage des bassins de candidats existants. Je conviens également qu’il s’agissait d’un exercice raisonnable des pouvoirs du défendeur en matière de dotation. L’expiration des bassins n’était pas une forme de représailles contre le plaignant pour avoir exercé son droit de déposer des plaintes de pratique déloyale de travail.

F. Défaut de renommer le plaignant

451 Le plaignant a allégué que le fait que le défendeur ne lui a pas offert une nouvelle nomination au cours de la période visée était une pratique déloyale de travail.

452 Le plaignant a argué que le défendeur ne souhaitait pas lui offrir quelque nomination que ce soit après la fin de sa nomination d’une durée déterminée, et ce, pour plusieurs raisons. Il s’est décrit comme un dénonciateur réputé, un fauteur de troubles, un défenseur des droits de la personne et une personne bien connue pour ses compétences relativement aux mécanismes de réparation et qui n’a pas peur de s’en servir. Il a également inclus dans les motifs du défendeur pour exercer des représailles à son endroit le fait qu’il souhaitait présenter sa candidature pour un poste de direction du syndicat et le fait qu’il avait déjà déposé plusieurs plaintes de pratique déloyale de travail auparavant en cours d’emploi.

453 Selon la preuve, le défendeur ne souhaitait manifestement pas nommer le plaignant à un nouveau poste après l’expiration de sa nomination d’une durée déterminée. Le défendeur n’est toutefois pas tenu de nommer toutes les personnes faisant partie des bassins de candidats préqualifiés.

454 La preuve du plaignant était qu’il faisait partie des bassins de dotation pour des postes classifiés CR-03 et CR-04, qu’il avait postulé à plus d’une centaine de postes au cours de la période visée par la contestation, qu’il y avait eu de nombreux postes à doter pour lesquels il était qualifié, qu’il était un travailleur productif et qu’il n’avait jamais fait l’objet d’une mesure disciplinaire. Le défendeur a toutefois toujours nommé d’autres candidats pour les postes disponibles, parfois des candidats affichant une note inférieure à la sienne ou possédant moins de qualifications que lui. Selon le plaignant, il s’agit d’un cas de faute de conduite dans la prise de décisions en matière de dotation.

455 La preuve a également révélé que le plaignant avait des attentes excessivement élevées que le défendeur répondrait à ses préoccupations, à ses priorités et à ses demandes de façon positive et immédiate, et qu’il passait rapidement aux accusations sérieuses à l’égard des gestionnaires qui ne le faisaient pas. La preuve, dont une grande part a été présentée par le plaignant, révèle également une tendance, dans les communications écrites avec les gestionnaires, que l’on pourrait qualifier, au mieux, d’inappropriée sur les plans du ton et du contenu, qui tourne parfois à l’intimidation, et qui n’incite certainement pas les destinataires de ces communications à offrir des nominations au plaignant. Les pièces 30, 32, 42 (à la page 2) et 44 (à la page 3) en sont des exemples.

456 J’ai déjà statué que, conformément à la jurisprudence de la Commission, peu importe si la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve s’appliquait, le plaignant devait présenter ses preuves en premier lors de l’audience en raison de ses allégations peu précises concernant les décisions contestées en matière de dotation. En effet, ce manque de précision ont fait en sorte qu’il était difficile pour le défendeur de savoir, de façon suffisamment détaillée, quelle était la nature des plaintes contre lesquelles il devait se défendre. En présentant sa preuve en premier, le plaignant devait présenter les détails de son affaire avant que le défendeur procède à la présentation de sa preuve. Le dernier jour de l’audience, au début de l’argumentation du plaignant, celui-ci a relevé 11 mesures de dotation suspectes, mais il a déclaré qu’il n’y en avait peut-être que quatre ou cinq pour lesquelles il était vraiment plus qualifié que la personne nommée, et que les autres étaient probablement de simples décisions en matière de dotation. Il n’a cependant pas précisé quelles étaient ces quatre ou cinq mesures.

457 Mme Li a fait un témoignage détaillé de la façon dont fonctionne le processus de dotation lorsqu’un gestionnaire souhaite doter un poste vacant. Elle a indiqué que la note obtenue par rapport aux compétences de l’énoncé des critères de mérite n’est pas la seule information utilisée par les gestionnaires au moment de nommer un candidat à un poste. Au moment d’embaucher, les gestionnaires ont le droit de tenir compte d’autres renseignements, comme les références, les renseignements transmis par le plus récent chef d’équipe du candidat quant à son rendement et l’expérience de travail du candidat, afin de choisir celui qui convient le mieux au poste à pourvoir. Par conséquent, le candidat ayant obtenu la meilleure note en ce qui concerne les compétences de l’énoncé des critères de mérite évaluées n’est pas nécessairement celui qui sera sélectionné.

458 Mme Delgaty a affirmé, lors de son témoignage, que les gestionnaires ont le droit de savoir qui se trouve dans les bassins de candidats qualifiés. Cependant, lorsqu’un gestionnaire transmet aux RH ses critères de sélection afin d’obtenir la liste des candidats qui répondent aux critères, les RH sélectionnent les noms en fonction de l’énoncé des critères de mérite associé à la demande de dotation. Mme Li a confirmé le fonctionnement de ce processus.

459 Le plaignant a soutenu que les gestionnaires du défendeur manipulaient les énoncés des critères de mérite de façon à ce que les RH ne retiennent pas son nom dans les bassins de candidats.

460 Je n’ai pas compétence pour déterminer si les protocoles de dotation ont été suivis, ni pour évaluer si des candidats ont été choisis pour des postes alors que le plaignant était plus qualifié ou si sa candidature n’a pas été retenue parce qu’il n’était pas un candidat approprié ou le plus approprié. Ma tâche consiste à évaluer les deux versions différentes des faits quant à ce qui est arrivé au plaignant et à déterminer si le défendeur a prouvé ses affirmations, selon la prépondérance des probabilités, tel qu’il est exigé par la disposition sur le renversement du fardeau de la preuve.

461 La partie grave du conflit a commencé par le fait que le plaignant croyait, à tort, qu’il avait le droit, selon la loi, d’être muté aux bureaux de la rue Government après en avoir fait la demande, en ayant pour seul ou principal motif de pouvoir présenter sa candidature à un poste à la direction du syndicat. Le plaignant a insisté sur le fait que le refus du défendeur de le muter était illégal, constituait une pratique déloyale de travail, une forme d’interférence dans les affaires du syndicat et une attitude antisyndicale de la part du défendeur. J’ai déjà conclu qu’il n’en était rien.

462 J’ai examiné attentivement les nombreuses allégations du plaignant, selon lesquelles les mesures de dotation du défendeur constituaient des pratiques déloyales de travail parce qu’elles étaient motivées par un sentiment antisyndical ou en guise de représailles à son égard parce qu’il avait déposé des plaintes de pratiques déloyales de travail. Je me retrouve toutefois devant des allégations concernant quatre ou cinq mesures de dotation non identifiées et pour lesquelles il n’y a pas suffisamment de détails.

463 En somme, je considère crédibles et convaincantes les preuves présentées par les témoins du défendeur au sujet du fonctionnement général des processus de sélection et de nomination du défendeur et des raisons pour lesquelles d’autres candidats ont pu se faire nommer à des postes pour lesquels ils étaient le choix le plus approprié, même s’ils avaient obtenu des notes moins élevées que le plaignant pour certaines compétences. Le défendeur ne peut être tenu d’apporter davantage de preuves qu’il ne l’a fait dans les circonstances, compte tenu du fait que le plaignant n’a pas précisé quelles décisions en matière de dotation il contestait. Je considère que le défendeur a assumé le fardeau de la preuve qui lui incombait en prouvant que, selon le principe de la prépondérance des probabilités, il a exercé ses pouvoirs de gestion de façon raisonnable dans le cadre des besoins opérationnels en n’offrant pas au plaignant de nouvelle nomination, et qu’il ne s’agissait pas de mesures de représailles contre le fait qu’il avait exprimé le désir de devenir un membre de la direction du syndicat ou parce qu’il avait déposé des plaintes de pratiques déloyales de travail.

464 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

VII. Ordonnance

465 L’objection du défendeur quant à la compétence de la Commission d’entendre une plainte de pratique déloyale de travail concernant une décision en matière de dotation est rejetée.

466 La demande du plaignant de divulgation des notes de service écrites au cours de la phase d’évaluation allant de janvier 2008 à octobre 2009 par tous les candidats aux postes classifiés CR-04 qui ont été ensuite nommés à des postes à Victoria est rejetée.

467 La demande du plaignant de présenter des preuves et des arguments sur l’applicabilité et l’incidence des dispositions de la LPFDAR quant au respect des délais est acceptée.

468 L’objection du défendeur concernant le respect des délais dans la présentation des plaintes est rejetée.

469 L’objection du défendeur selon laquelle les plaintes, de toute évidence, ne portent pas sur des causes défendables de violation de l’alinéa 186(2)a) de la LRTFP est rejetée.

470 Je déclare que le défendeur doit assumer le fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que l’omission alléguée de se conformer au paragraphe 186(2) de la LRTFP ne s’est pas produite.

471 La demande du plaignant de faire venir d’autres témoins lors de la reprise de l’audience du 2 mai 2011 est rejetée.

472 La demande du plaignant de soumettre de nouveaux documents de politiques lors de la reprise de l’audience du 17 août 2011 est rejetée.

473 Les demandes du 21 et du 28 novembre 2011 formulées par le plaignant, qui souhaitait présenter de nouvelles preuves, sont rejetées.

474 Je déclare que l’allégation selon laquelle Mme Smith a fourni une référence inéquitable le 11 février 2008 est hors délai.

475 Les plaintes sont rejetées.

Le 5 janvier 2012

Traduction de la CRTFP

Margaret E. Hughes,
commissaire

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