Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a déposé une plainte de pratique déloyale de travail, alléguant que son agent négociateur ne s’était pas acquitté de son devoir de représentation équitable - avant l’audience, le plaignant a demandé à la Commission d’enregistrer les procédures - on lui a répondu que la Commission n’avait pas pour pratique d’enregistrer les audiences - il a ensuite indiqué qu’il avait l’intention d’enregistrer l’audience - à la suite d’un projet pilote sur l’enregistrement des procédures, la Commission avait conclu que la pratique de non-enregistrement des audiences devait être maintenue - au début de l’audience, l’arbitre de grief a demandé au plaignant d’éteindre son appareil d’enregistrement - le plaignant a refusé - on lui a permis de présenter des arguments afin d’appuyer sa demande; l’audience a été ajournée afin de permettre à la défenderesse de présenter des arguments écrits - la Commission a fait valoir que le plaignant n’avait présenté aucune preuve à l’appui de ses arguments aux termes de l’article7 de la Charte canadienne des droits et libertés - la Commission n’était pas tenue par la loi d’enregistrer les procédures, et sa pratique a résisté aux contestations judiciaires - il est arrivé que la Commission fasse exception à sa pratique de ne pas enregistrer les audiences, soit lorsque les questions étaient particulièrement complexes ou lorsque les audiences étaient susceptibles de s’étirer sur une longue période - la politique de la Commission accordait une certaine flexibilité aux commissaires - l’affaire en cause ne justifiait pas que l’on fasse exception à la pratique, puisqu’elle portait sur une question relativement simple et que l’audience serait de courte durée - l’allégation de partialité soulevée par le plaignant était sans fondement, puisque la Commission n’avait pas été impliquée dans les demandes précédentes du plaignant - en réponse à une demande de divulgation précédente du plaignant et à de la correspondance de la part de la défenderesse, la Commission a ordonné au plaignant de fournir une liste révisée de documents à la défenderesse, ce qu’il a omis de faire malgré plusieurs rappels - une directive adéquate a été fournie à cet égard - le plaignant doit fournir une liste révisée, et aucune autre audience ne sera prévue tant qu’il ne se sera pas conformé à cette directive. Directives fournies.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2012-08-01
  • Dossier:  561-02-433
  • Référence:  2012 CRTFP 78

Devant une formation de la Commission
des relations de travail dans la
fonction publique


ENTRE

SAMEH BOSHRA

plaignant

et

ASSOCIATION CANADIENNE DES EMPLOYÉS PROFESSIONNELS

défenderesse

Répertorié
Boshra c. Association canadienne des employés professionnels

Affaire concernant une plainte visée à l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Beth Bilson, une formation de la Commission des relations de travail dans la fonction publique

Pour le plaignant:
Lui‑même

Pour la défenderesse:
Fiona Campbell, avocate

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
le 19 mars 2012.
(Arguments écrits déposés les 7, 14 et 16 mars, le 3 avril et les 14 et 16 mai 2012.)
(Traduction de la CRTFP)

I. Plainte devant la Commission

1 Sameh Boshra (le « plaignant ») a déposé une plainte en vertu de l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, dans laquelle il a allégué que son agent négociateur, l’Association canadienne des employés professionnels (ACEP), a manqué à son devoir de représentation équitable. Avant l’audience, qui devait commencer le 19 mars 2012, le plaignant a communiqué avec la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») et a demandé que son audience soit enregistrée. On l’a informé que les audiences de la Commission n’étaient normalement pas enregistrées. Le plaignant a indiqué à la Commission qu’il avait l’intention d’enregistrer son audience. Dès le début de l’audience, il a avisé qu’il avait apporté un appareil d’enregistrement, et que cet appareil était en marche. Je lui ai demandé d’arrêter l’enregistrement, et il a refusé.

2 J’ai indiqué que j’allais permettre au plaignant de présenter des arguments concernant sa demande d’enregistrement de l’audience et que j’allais rendre une décision écrite sur cette question. J’ai dispensé la défenderesse de présenter ses arguments de vive voix, puisque le plaignant était en train d’enregistrer la procédure, mais je l’ai invitée à communiquer ses arguments par écrit si elle le désirait, et j’ai ajourné l’audience.

II. Questions préliminaires

3 Cette décision porte sur deux questions préliminaires : la demande du plaignant d’enregistrer l’audience et sa demande de divulgation de renseignements supplémentaires de la part de la demanderesse.

A. Demande d’enregistrer l’audience

4 Le plaignant a présenté des arguments de vive voix à l’audience du 19 mars 2012. Il a surtout tenté de montrer que le fait que les audiences ne soient pas enregistrées lui avait causé un préjudice dans une affaire précédente où il était question d’une cessation d’emploi (Boshra c. Administrateur général (Statistique Canada), 2011 CRTFP 97). Il a affirmé que la décision de l’arbitre de grief dans cette autre affaire ne tenait pas compte de preuves importantes ou contenait des interprétations erronées de ces preuves. Je ne peux pas me faire une bonne idée des forces ou des faiblesses de la procédure antérieure et de la décision qui a été rendue en me fondant sur un résumé sélectif de la preuve et des questions en litige présentées par le plaignant. Ce dernier a eu recours au contrôle judiciaire pour cette décision. Le contrôle judiciaire est le mécanisme approprié pour soulever des questions concernant le bien‑fondé d’une décision.

5 La défenderesse a fourni des arguments écrits sur la question de l’enregistrement dans une lettre datée du 3 avril 2012. Au départ, la date limite pour la réponse écrite du plaignant était le 10 avril 2012. Le plaignant a demandé que cette date soit repoussée et qu’on lui donne accès à plusieurs dossiers de la Commission. Ces demandes lui ont été accordées, et la date limite ultime pour sa réponse a été fixée au 14 mai 2012. Le plaignant a présenté une réponse écrite avant cette date. De plus, il avait communiqué avec la Commission les 7, 14 et 16 mars 2012 (avant l’audience), et il avait expliqué les raisons pour lesquelles il voulait que l’audience soit enregistrée.

1. Motifs

6 Dans mon rôle d’arbitre de grief qui rend des décisions dans le cadre d’une procédure prévue par la loi, je reconnais que j’ai la responsabilité de veiller au respect de l’obligation d’équité citée par les tribunaux depuis Nicholson c. Haldimand-Norfolk Regional Police Commissioners, [1979] 1 R.C.S. 311. Les principes de base de l’obligation d’équité, comme les principes de justice naturelle, qui étaient déjà établis à l’époque de Nicholson, précisent que les participants ont droit à une audience équitable (orale ou non) et que la décision doit être rendue par un décideur impartial.

7 Il est important de noter que le plaignant a accompagné sa demande d’enregistrement d’un « Avis d’une question constitutionnelle », dans lequel il soutient que le refus de sa demande violerait ses droits découlant de l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés (la « Charte »), qui s’énonce comme suit :

7. Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu’en conformité avec les principes de justice fondamentale.

8 Le plaignant ne semblait pas particulièrement convaincu de la capacité d’un décideur administratif d’étudier et d’appliquer la Charte; il a cité les réserves exprimées par la Cour suprême dans Cooper c. Canada (Commission des droits de la personne), [1996] 3 R.C.S. 854. Toutefois, il a reconnu que des décisions plus récentes, comme Nouvelle‑Écosse (Workers’ Compensation Board) c. Martin; Nouvelle‑Écosse (Worker’s Compensation Board) c. Laseur, 2003 CSC 54, précisent clairement que les tribunaux administratifs interprètent et appliquent la Charte quand il y a un rapport pertinent avec les questions en litige.

9 Dans le présent cas, le plaignant n’a avancé aucun argument pour expliquer le rapport entre les droits énoncés à l’article 7 de la Charte (« à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne ») et l’enregistrement d’une procédure administrative. Il visait plutôt la deuxième partie de l’article 7, qui fait allusion aux principes de justice fondamentale. Les tribunaux ont prudemment évité de conclure que l’obligation d’équité et la justice fondamentale sont des concepts identiques, mais ils ont statué que les principes sous‑jacents de ces concepts sont similaires, comme il a été observé au paragraphe 113 de la décision de la Cour suprême Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 1. Dans le présent cas, comme le plaignant n’a pas tenté de démontrer qu’un des droits énoncés à l’article 7 était en cause, je ne crois pas que le fait de citer l’article 7 appuie son argumentation. Par conséquent, j’examinerai les arguments du plaignant par rapport au concept d’équité, mais comme je l’ai indiqué, ce concept est généralement en harmonie avec le concept de justice fondamentale.

10 Il n’est indiqué nulle part dans la loi qui établit le mandat de la Commission que cette dernière doit enregistrer ses audiences ou préparer des transcriptions. En fait, il est d’usage à la Commission de ne pas enregistrer les audiences. La raison d’être de cette pratique a été énoncée comme suit au paragraphe 29 de Singaravelu c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2009 CRTFP 8 :

[29] […] Il faut savoir que la Commission n’enregistre pas ses procédures sur bande magnétique ou d’autres supports, ni n’autorise les parties à les enregistrer. Cela s’explique par le souci de ne pas judiciariser à outrance les procédures et audiences de la Commission et de préserver, dans la mesure du possible, le caractère informel des procédures qui se déroulent devant les tribunaux du travail en général […]

11 Ce paragraphe récent confirme le principe important de la décision administrative, qui veut que la procédure soit toujours aussi souple et accessible que possible tout en tenant compte de la portée des questions soulevées par les participants dans le cadre de la procédure de règlement.

12 Il convient également de noter qu’il est important que la Commission garde la maîtrise de sa procédure. Bien qu’il soit arrivé dans le passé que les tribunaux permettent à une partie ou aux deux parties de procéder à l’enregistrement de la procédure, il n’en demeure pas moins que l’organisme décisionnel exerce un contrôle ferme sur l’enregistrement des audiences et la détermination du statut.

13 Comme l’arbitre de grief l’a souligné dans Singaravelu, il est arrivé à la Commission de faire exception à cette pratique dans des cas où les questions étaient particulièrement complexes ou lorsque la période d’audience risquait fort d’être extrêmement longue. Par exemple, dans Chopra et al. c. Conseil du Trésor (ministère de la Santé), 2011 CRTFP 99, la période d’audience a duré quatre ans et a donné lieu à une très longue décision.

14 Dans Ayangma c. Conseil du Trésor (ministère de la Santé), 2006 CRTFP 64, le fonctionnaire s’estimant lésé a demandé à enregistrer la deuxième partie de son audience. Voyant que l’employeur ne s’opposait pas à cette demande, l’arbitre de grief a fixé les conditions auxquelles on pouvait enregistrer, lesquelles conditions prévoyaient, comme dans Chopra, que les dépenses liées à l’enregistrement et à toute transcription soient à la charge des parties.  En fin de compte, la procédure n’a pas été enregistrée.

15 Le plaignant a indiqué dans ses arguments qu’il n’est fait aucune mention de la complexité des questions ou de la longueur de la période d’audience dans Ayangma. Toutefois, il convient de noter que, dans la lettre dans laquelle elle se prononce sur la demande d’enregistrement, la Commission mentionne les critères de complexité et de durée de la procédure ayant servi à justifier une autre décision sur cette question.

16 En 2009, la Commission a avisé qu’elle allait réaliser un projet pilote dans le cadre duquel certains commissaires allaient enregistrer mécaniquement les audiences qu’ils présidaient. Dans son avis, la Commission a indiqué clairement que le projet visait à déterminer si l’enregistrement des audiences serait un bon moyen [traduction] « […] d’appuyer la prise de notes des commissaires pendant les audiences ». Bien que l’accent ait été mis principalement sur l’utilité des enregistrements comme outil de travail pour les commissaires, l’avis indiquait que ces enregistrements seraient également disponibles pour les parties après que les commissaires auraient rendu leur décision. On mentionnait que le projet devait durer 12 mois, mais il a été suspendu plus tôt. Il convient de préciser que je n’étais pas parmi les participants à ce projet. 

17 Dans Tung c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1991), 124 N.R. 388, la Cour d’appel fédérale a conclu que l’absence de transcription pour une audience de demande d’asile constituait un déni de justice naturelle. Cependant, la Cour a annulé cette décision dans Kandiah c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1992), 141 N.R. 232. Dans cette décision, la Cour a fait l’observation suivante :

[…]

[…] La question de savoir si un compte rendu intégral des procédures devant la section du statut de réfugié a été fait ou conservé n’a rien à voir avec la qualité de l’audition devant ce tribunal ou de la décision que ce dernier a rendue. Une audition par ailleurs équitable ne devient pas inéquitable parce qu’elle n’a pas été enregistrée; en d’autres termes, un compte rendu intégral des procédures n’est pas une condition préalable d’un bon procès ou d’un bon jugement.

[…]

Je suis prêt à supposer, aux fins de la discussion, que les principes de la justice fondamentale exigent que les décisions de la section du statut de réfugié soient assujetties au contrôle judiciaire. Toutefois, un droit réel de révision peut exister sans que les procédures aient été transcrites ou enregistrées. En l’absence de transcription, l’appelant peut établir par d’autres moyens ce qui s’est produit à l’audition […]

[…]

18 Dans Rhéaume c. Canada, [1992] A.C.F. no 1131 (QL) (C.A.), la Cour d’appel fédérale a évoqué en ces termes la pratique de la Commission dans ce domaine :

[…]

[…] Il résulte de là qu’en l’absence de prescription législative, un tribunal, qu’il soit dit d’archives ou non, mais qu’on a fait maître de sa procédure, a complète discrétion quant à l’enregistrement par moyen mécanique ou autre de ses procédés, ce qui fait que l’adoption par lui d’une politique générale de refus de permettre tel enregistrement, pourvu qu’aucune discrimination ne se glisse dans l’application de cette politique, est juridiquement inattaquable […]

[…]

19 La Cour suprême a pris en considération cette série de cas dans Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 301 c. Montréal (Ville), [1997] 1 R.C.C. 793 et, au paragraphe 80, elle a conclu que Kandiah fournissait « un excellent énoncé des principes de justice naturelle applicable à l’enregistrement des délibérations d’un tribunal administratif ». La Cour suprême a conclu que l’absence d’enregistrement ou de transcription n’est pas un motif suffisant en soi pour alléguer que les principes d’équité ou de justice naturelle ont été bafoués, et elle a déclaré au paragraphe 83 : « […] en l’absence d’un droit à l’enregistrement d’une audition accordé par la loi, les droits d’une quelconque partie à la justice naturelle ne seront violés que si la cour a un dossier insuffisant pour lui permettre de fonder sa décision ».

20 La Cour suprême a aussi fait la distinction avec une série de cas examinés par le Tribunal du travail du Québec en affirmant que le régime législatif en vigueur dans ces cas faisait en sorte que l’on examinait l’appel sur le fond plutôt que sous la forme d’un contrôle judiciaire. Dans un contrôle judiciaire, le tribunal doit déterminer s’il existe un dossier suffisant permettant d’évaluer la décision du décideur administratif. La Cour suprême, dans Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 301, a conclu qu’il n’était pas nécessaire d’avoir un enregistrement ou une transcription tant que le dossier contenait suffisamment d’information pour permettre la tenue d’un contrôle judiciaire.

21 De façon générale, la démarche de la Commission est qu’on n’enregistre pas les audiences tenues devant elle, mais qu’elle offre tout de même aux commissaires une certaine latitude pour faire de rares exceptions. Cette démarche a résisté à des contestations judiciaires qui la visaient précisément. Selon moi, la restriction avancée par la Cour suprême dans Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 301, selon laquelle le dossier doit être suffisamment étayé pour permettre un contrôle judiciaire, est généralement respectée grâce au dossier normalement fourni par la Commission dans le cadre des nombreuses demandes de contrôle judiciaire portant sur ses décisions. Les commissaires ont l’habitude de fournir tous les motifs de leurs décisions, y compris des résumés des preuves et des arguments présentés, ce qui est certainement une pratique que j’ai moi‑même l’habitude de suivre.

22 Dans ses arguments, le plaignant a qualifié la démarche selon laquelle les audiences ne sont pas enregistrées de [traduction] « arbitraire » et [traduction] « non écrite ». Si l’on met de côté la question de la nécessité de consacrer comme une « politique » la pratique de ne pas faire quelque chose que l’on n’est pas tenu de faire, la politique est formulée par écrit dans le document « Plaintes présentées en vertu de l’article 190 de la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique : Guide à l’intention des parties qui se représentent elles‑mêmes, 21 mars 2006 ». Selon le dossier associé à cette plainte, un exemplaire de ce document a été envoyé au plaignant le 17 février 2009 en même temps que d’autres documents et une lettre accusant réception d’une autre plainte déposée précédemment contre la défenderesse (dossier de la CRTFP 561-02-383).

23  En ce qui a trait au caractère arbitraire de la démarche, comme je l’ai mentionné, au cours des quelques dernières années, la Commission a réexaminé cette politique en lançant un projet pilote visant à déterminer si elle devrait la modifier. La Commission a conclu que la démarche devrait demeurer en vigueur. Cette démarche offre aux commissaires la possibilité d’approuver des exceptions dans des cas particuliers. Les critères avancé dans Chopra concernant la complexité et la durée de l’audience semblent être les principaux motifs des exceptions faites jusqu’à maintenant. Ayangma ne donne aucune précision quant au motif justifiant l’exception accordée. Il est important de tenir compte de l’avertissement de la Cour d’appel fédérale dans Rhéaume, où elle a précisé qu’une telle politique ne devrait pas être appliquée de façon discriminatoire. Je comprends que cela signifie qu’il est nécessaire de fournir une justification claire lorsqu’une exception est accordée; sinon, la politique risque d’être appliquée de façon non uniforme, sans prendre en considération les raisons de son existence.

24 Dans le présent cas, je ne vois pas de motifs convaincants pour justifier une exception à la politique habituelle. Ce cas porte sur une question relativement simple où il faut déterminer si l’ACEP a manqué à ses obligations à l’endroit du plaignant en refusant de renvoyer son grief à l’arbitrage. Il n’y a pas lieu de prévoir que l’audience sera anormalement longue, ni que mes notes et que les preuves et arguments qui me seront présentés par les parties seront insuffisants pour servir de fondement à ma décision.

25 Dans ses arguments présentés de vive voix et par écrit, le plaignant a soulevé la question de la partialité de la Commission. Dans ses arguments écrits en date du 14 mai 2012, il a avancé que la Commission avait tenté de manipuler le résultat de la procédure en confiant le cas successivement à deux décideurs qui avaient déjà pris des décisions qui n’étaient pas en sa faveur. J’estime qu’il est raisonnable de remettre en question le raisonnement selon lequel le fait qu’un décideur a déjà rejeté une demande ou un grief par le passé permet de conclure qu’il y a crainte raisonnable de partialité, puisqu’il n’est pas rare que les décideurs rencontrent les mêmes parties dans des cas différents. Néanmoins, dans le présent cas, les deux décideurs ont demandé que le dossier soit transmis à quelqu’un d’autre parce que d’autres décideurs étaient disponibles et, que dans l’un des deux cas, le plaignant avait déjà demandé un contrôle judiciaire de sa décision. J’ai donc été affectée à ce cas, et je n’ai aucunement participé aux demandes précédentes du plaignant. Il serait donc difficile de voir maintenant un quelconque fondement pour une allégation de partialité.

26 Les arguments du plaignant sur la question de la partialité ne sont pas clairement liés à la question de l’enregistrement, sauf pour le fait que l’arbitre de grief précédent a décidé qu’aucun enregistrement ne serait autorisé. J’ai tenu compte de ce fait et des autres arguments du plaignant et j’ai donné les motifs qui me permettent de croire qu’il n’y a pas lieu de s’éloigner de la pratique habituelle de la Commission pour le présent cas. Le fait que je prenne une décision semblable à celle d’un arbitre de grief dans un cas différent ne m’apparaît pas comme une preuve de partialité.

B. Demande de divulgation

27 La deuxième question visée par la présente décision est la demande de divulgation de documents du plaignant. Ce dernier a d’abord demandé à la défenderesse de divulguer certains documents dans une lettre datée du 20 novembre 2009. Après avoir déposé cette plainte en janvier 2012, le plaignant a demandé l’aide de la Commission pour obtenir la divulgation des documents en s’appuyant sur la lettre du 20 novembre 2009. Par la suite, une série d’échanges a eu lieu sur ce sujet entre les parties et la Commission. Ces échanges comprenaient entre autres une lettre assez longue de la défenderesse datée du 12 avril 2010, dans laquelle elle exprimait certaines préoccupations concernant la portée et le contenu de la demande. On a demandé à un commissaire d’étudier les positions des parties et de fournir des instructions. Le 26 avril 2010, le commissaire a indiqué que l’on devrait enjoindre au plaignant de fournir à la défenderesse une liste révisée de documents qui :

  1. avaient un rapport avec l’argument de l’ACEP dans son grief pour licenciement;
  2. provenaient de la période entre son premier contact avec l’ACEP concernant son licenciement et la date de dépôt de la plainte;
  3. n’étaient pas déjà en sa possession;
  4. n’étaient pas protégés par le secret professionnel;
  5. étaient clairement identifiés.

28 La liste devait être fournie dans les deux semaines suivant la date de la lettre.

29 La lettre a été envoyée au plaignant le 29 avril 2010.

30 Le plaignant n’a pas donné à la défenderesse la liste révisée, malgré les rappels qu’il a reçus. En fait, lors d’un échange qui a eu lieu peu de temps avant l’audience, la Commission a rappelé au plaignant les instructions d’avril 2010, et ce dernier a répondu qu’il croyait que sa demande avait été énoncée avec suffisamment de clarté dans sa lettre d’origine datée de novembre 2009.

1. Motifs

31 Je suis d’avis que le plaignant n’a pas le loisir de répondre qu’il préfère qu’on se rapporte simplement à la nature et à la portée de sa demande de novembre 2009.

32 Les parties ont présenté une série d’arguments sur ce sujet. Un commissaire a examiné la question, et il a donné des instructions qui, selon moi, étaient adéquates. Je confirme que ces instructions étaient une condition adéquate à la demande de divulgation de la part du plaignant. Si l’audience s’était poursuivie le 19 mars 2012, j’aurais résumé cette histoire, comme je le fais dans cette décision, et j’aurais pris la même décision.

33 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

III. Ordonnance

34 La Commission n’enregistrera pas l’audience du plaignant, et les parties ne seront pas autorisées à enregistrer elles‑mêmes l’audience.

35 Le plaignant devra fournir à la défenderesse, dans les deux semaines suivant la date de la décision, une liste révisée des documents qui :

  • ont un rapport avec l’argument de l’ACEP dans son grief pour licenciement;
  • proviennent de la période entre son premier contact avec l’ACEP concernant son licenciement et la date de dépôt de la plainte;
  • ne sont pas déjà en sa possession;
  • ne sont pas protégés par le secret professionnel;
  • sont clairement identifiés.

Aucune autre audience n’aura lieu tant que le plaignant ne se sera pas conformé à ces instructions.

Le 1er août 2012.

Traduction de la CRTFP

Beth Bilson,
une formation de la Commission des
relations de travail dans la fonction
publique

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