Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

L’Alliance de la Fonction publique du Canada a déposé un grief collectif au nom de plusieurs fonctionnaires s’estimant lésés, alléguant que l’employeur ne leur avait pas fourni un énoncé complet et courant des fonctions de leurs postes - les fonctionnaires s’estimant lésés ont soutenu que quatre fonctions qu’ils exerçaient n’étaient pas convenablement énoncées dans la description courante de leur travail : leur rôle dans l’octroi des remises à une date ultérieure, la connaissance des troubles médicaux et des incapacités, la participation au système de compagnons, et la connaissance des accords réciproques internationaux - l’arbitre de grief a conclu que le traitement des demandes de remise à une date ultérieure constituait une activité principale qui devrait être énoncée dans leur description de travail et que la réalité du travail des fonctionnaires s’estimant lésés sur le plan de la mise au rôle d’audience allait au-delà de la description succincte de cette fonction telle qu’énoncée dans leur description de travail - sur la question de la connaissance des troubles médicaux, l’arbitre de grief a conclu que leur description de travail était trop vague - elle a conclu également que la connaissance des accords réciproques était déjà énoncée dans leur description de travail - l’employeur a admis que la description de travail était imprécise en ce qu’elle ne faisait pas état de l’exigence d’effectuer de l’encadrement professionnel, de manière ponctuelle, auprès des nouveaux employés - l’arbitre de grief a conclu que cette activité devrait être énoncée dans leur description de travail, mais que le recours par l’employeur au système de compagnons pour pallier l’absence ponctuelle des fonctionnaires s’inscrivait dans les bonnes pratiques administratives et n’avait pas à être énoncé dans leur description de travail. Griefs accueillis en partie. Instructions données.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2012-08-14
  • Dossier:  567-02-60 et 61
  • Référence:  2012 CRTFP 86

Devant un arbitre de grief


ENTRE

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

agent négociateur

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences)

employeur

Répertorié
Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences)

Affaire concernant un grief collectif renvoyé à l’arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Margaret Shannon, arbitre de grief

Pour l’agent négociateur:
Jean-Rodrigue Yoboua, Alliancede la Fonction publique du Canada

Pour l'employeur:
Caroline Engmann, avocate

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
les 21 et 22 juin 2012.
(Traduction de la CRTFP)

I. Grief collectif renvoyé à l’arbitrage

1 L’Alliance de la Fonction publique du Canada (l’« AFPC ») a présenté un grief (le « grief ») au nom d’un groupe de fonctionnaires s’estimant lésé, soit Margaret Chan, Viola Hebert, Serge Aubry, David Pritchard, David Burnside, Siobhan Neilson, Shara Martell, Don Busbe, Donna Carter, Sylvie Larocque Thibault, Cathy Wilson, Lindsay Ross, Mona Lavallée, et Cécile Gravelle (les « fonctionnaires »). À l’époque, les fonctionnaires travaillaient à Ottawa au Bureau du Commissaire des tribunaux de révision, Régime de pensions du Canada (RPC) et Sécurité de la vieillesse (SV) (le « BCTR », ou l’« employeur »), à titre d’agents du service à la clientèle (ASC). Le grief allègue ce qui suit : [traduction] « […] l’employeur a manqué à son obligation de me fournir un exposé complet et courant de mes fonctions et obligations, contrevenant ainsi à l’article 54 de ma convention collective ». À titre de mesure corrective, chacun des fonctionnaires [traduction] « […] demande que l’employeur [lui] fournisse un exposé complet et courant de [s]es fonctions, conformément aux dispositions de la convention collective ».

2 Parallèlement, les fonctionnaires ont présenté un autre grief contre l’employeur, alléguant que [traduction] « […] l’employeur ne me verse pas une rémunération convenable en contrepartie des services que je lui rends. Je dois assumer essentiellement les fonctions d’un poste classifié à un échelon supérieur. Il s’ensuit que l’employeur ne se conforme pas aux dispositions prévues à l’article 64.07 de ma convention collective. » À titre de mesure corrective, les fonctionnaires demandent : [traduction] « Que je sois rémunéré conformément aux dispositions de ma convention collective pour l’exécution des fonctions précitées, et ce avec effet au _________ ». Chacun des fonctionnaires a inscrit dans sa demande la date à laquelle il ou elle a commencé à occuper le poste en question. L’employeur a présenté une objection préliminaire à ma compétence d’instruire ce grief au motif qu’il s’agissait en fait d’une affaire de classification de poste. Ce grief a été retiré à l’audience.

3 À l’époque visée par les griefs, tous les fonctionnaires en cause étaient assujettis à la convention collective conclue entre le Conseil du Trésor et l’Alliance de la Fonction publique du Canada pour le groupe Services des programmes et de l’administration, laquelle expirait le 20 juin 2007 (la « convention collective »). Le grief a été renvoyé à l’arbitrage le 11 mai 2011. La disposition de la convention collective en cause dans cette affaire est la clause 54.01, laquelle s’énonce comme suit :

Article 54
Exposé des fonctions

[…]

54.01 Sur demande écrite, l'employé-e reçoit un exposé complet et courant de ses fonctions et responsabilités, y compris le niveau de classification du poste et, le cas échéant, la cote numérique attribuée par facteur à son poste, ainsi qu'un organigramme décrivant le classement de son poste dans l'organisation.

II. Résumé de la preuve

A. Pour les fonctionnaires

4 M. David Burnside, un des fonctionnaires, a témoigné au nom de tous les fonctionnaires. À l’époque visée par les griefs, il occupait le poste d’agent du service à la clientèle (ASC), classifié PM-02, au sein du BCTR, l’organisme responsable des mécanismes administratifs intervenant dans le cadre des appels en matière de RPC et de Sécurité de la vieillesse. Le BCTR est un tribunal administratif indépendant du ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences.

5 Dans ses fonctions d’ASC, M. Burnside est chargé d’administrer la procédure d’appel, notamment d’assurer la mise au rôle des audiences et de donner des conseils aux appelants ou à leurs représentants au sujet de la procédure d’appel et des lois y afférentes. Les ASC interagissent quotidiennement avec les appelants ou leurs représentants que ce soit pour la mise au rôle des audiences, pour aider les appelants et les membres du tribunal à planifier leurs déplacements et les mesures d’adaptation, ou pour assister avec toute disposition ou arrangement spécial pouvant être nécessaire à l’appelant dans le cadre de sa participation à l’audience. Il peut notamment s’agir d’aides à la mobilité, d’aides à la communication, de services de traduction, etc. Les ASC sont en outre le point de contact pour les demandes de report d’audience, lesquelles peuvent être déposées jusqu’à vingt-quatre heures avant la tenue prévue de l’audience.

6 Le fonctionnaire a décrit comment il prépare l’appelant à l’audience. Il a également décrit comment il s’assure que tous les renseignements dont les membres du tribunal auront besoin dans le cadre de la procédure d’appel, de nature médicale et autres, sont effectivement versés au dossier. À l’aide de son expérience acquise dans la mise au rôle d’audience d’appels présentant des situations médicales variées, il conseille l’appelant ou son représentant au sujet des types de rapports, de preuve ou d’autres éléments requis par le tribunal afin qu’il puisse se pencher sur sa demande.

7 En général, le fonctionnaire passe en revue le dossier médical et étudie la demande d’appel et le questionnaire afin de déterminer le handicap de l’appelant et le trouble médical dont il est atteint. Il communique ensuite avec l’appelant pour discuter du dossier, de la procédure d’appel, de sa disponibilité, et des dispositions particulières à prévoir afin de s’assurer de sa pleine participation à l’appel.

8 Le fonctionnaire a témoigné qu’il avait reçu, ainsi que les autres fonctionnaires, une formation portant sur les divers troubles médicaux, la fibromyalgie par exemple, afin de mieux se préparer à interagir avec les appelants. En connaissant les symptômes des divers troubles, le fonctionnaire est davantage en mesure de savoir à quoi s’attendre lorsqu’il communique par téléphone avec les appelants. Cela l’aide également à savoir à quel moment de la journée il est préférable de communiquer avec l’appelant, car l’état de celui-ci peut effectivement influer sur son aptitude à communiquer selon le moment de la journée. Grâce à la formation reçue, le fonctionnaire est en mesure de connaître le type d’information médicale requise pour étayer un appel. Cette formation lui a permis d’accroître ses connaissances et de renforcer son aptitude à composer avec les divers troubles médicaux et invalidités des appelants.

9 Le fonctionnaire a témoigné que, lors de la préparation d’un dossier, il doit s’assurer en outre que l’appelant satisfait à la période d’admissibilité prescrite. Le calcul de la période d’admissibilité peut renvoyer aux accords de réciprocité conclus entre le gouvernement du Canada et d’autres gouvernements, puisque des contributions peuvent avoir été versées à des programmes similaires dans un autre pays. En contre-interrogatoire, M. Burnside a convenu qu’un ASC était uniquement tenu d’être au courant de l’existence d’accords de réciprocité, et non de leur teneur. Afin de confirmer l’existence d’un accord, il consulte le site Internet de Service Canada.

10 Le fonctionnaire a témoigné qu’au moment de son entrée en fonction au poste d’ASC, il a suivi une session de formation de cinq à six jours ouvrables, après quoi il a été jumelé à un autre ASC, plus expérimenté, auquel il pouvait s’adresser directement s’il avait des questions, qu’il s’agisse de trouver les informations pertinentes dans les divers lecteurs d’ordinateurs ou de savoir quelles informations doivent être consignées dans un fichier donné. Cette personne s’occupait aussi de former le fonctionnaire quant à la marche à suivre pour effectuer la mise au rôle d’une audience, comment calculer une période d’admissibilité, quelle législation s’appliquait à une situation donnée, etc. Son [traduction] « compagnon » était sa personne-ressource, c’est-à-dire la personne qui lui montrait comment accomplir le travail à effectuer.

11 Ce [traduction] « système de jumelage » était mis à profit plusieurs fois par jour dans le cadre de sa formation, et fournissait des remplaçants si un ASC s’absentait de son travail. Ce compagnon était une ressource et un mentor pour les nouveaux fonctionnaires et servait de premier point de contact pour toute question. Il aide les nouveaux fonctionnaires à démêler les divers rouages de l’administration des audiences et du processus de mise au rôle des affaires. Le compagnon passe en revue les divers dossiers avec l’ASC avec qui il est jumelé et explique la méthode de calcul de la période d’admissibilité minimale, ainsi que l’application des accords internationaux. Le compagnon est ainsi un conseiller précieux sur les tenants et aboutissants du travail à accomplir et sur la façon de s’y prendre pour effectuer ce travail.

12 L’ASC affecté à titre de compagnon est le principal contact pour toutes les questions concernant les détails du processus de mise au rôle d’une audience. Afin de démontrer ce point, le fonctionnaire a déposé en preuve une note de service émanant de l’employeur demandant aux ASC de consulter tout d’abord leur compagnon avant de consulter la direction. Le fonctionnaire m’a également renvoyé à cette [traduction] « Marche à suivre pour obtenir des conseils », datée du 24 octobre 2008 :

[Traduction]

Marche à suivre :

1. Marche à suivre pour obtenir des conseils à partir des ressources existantes du BCTR
Lorsqu’une question ou un problème particulier se pose, le membre du personnel doit tout d’abord se renseigner auprès de ses collègues et effectuer des recherches dans le matériel de formation, les politiques, les procédures à suivre, les Communiqués des membres des tribunaux antérieurs, et les autres ressources pouvant être consultées dans le RTN et les lecteurs communs.

[Les passages en évidence le sont dans l’original]

13 Le fonctionnaire a témoigné qu’il fallait entre quatre et six mois pour qu’un nouvel ASC puisse maîtriser les rudiments de l’emploi. Cela prend de deux à trois ans pour apprendre la législation et la jurisprudence pertinente. Selon le fonctionnaire, et au vu de son expérience, un nouvel ASC peut progresser au statut de compagnon après neuf mois en fonction, selon le taux de roulement des ASC. Afin d’étayer l’existence de ce rôle, une [traduction] « liste de compagnons » a été présenté en preuve, faisant état des jumelages établis entre des nouveaux ASC et des ASC d’expérience, leurs coordonnées et d’autres informations pertinentes à cet égard.

14 Les ASC traitent des demandes de report d’audience toutes les semaines. Habituellement, ils doivent analyser le bien-fondé de la demande, examiner le dossier afin de vérifier si d’autres demandes semblables ont été présentées ou accordées ainsi que le délai entre le moment de la demande et la date de l’audience. Ils se servent de leur jugement afin d’apprécier les motifs présentés au soutien de ces demandes. Selon M. Burnside, il revient à l’ASC d’accorder ou non une demande de report d’audience. Un ASC débutant doit tout d’abord consulter son compagnon avant d’accorder un report d’audience. Le fait d’accorder un report d’audience a un impact sur le BCTR, tant au niveau des ressources que des coûts, et touche l’employeur quant à son droit à ce que l’affaire soit instruite. Lorsqu’un report d’audience est accordé, l’ASC doit consigner la justification dans le système de gestion des comptes de l’employeur. Les questions litigieuses doivent être discutées avec les collègues, puis avec la direction.

15 Les ASC reçoivent une formation sur les reports d’audienceet sur le moment où de telles demandes risquent d’être présentées. Toutefois, la formation ne rend pas compte des facteurs à considérer ni du processus mental à suivre dans l’évaluation d’une demande de report d’audience. Depuis la présentation du grief en l’espèce, le pouvoir d’accorder ou non une remise a été transféré, à divers égards, au personnel de gestion.

16 La connaissance des divers troubles médicaux et des invalidités, des dispositions des accords internationaux relativement aux périodes d’admissibilités minimales, de l’obligation d’agir à titre de compagnon et du pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne le report d’audience ne fait pas partie de la description de travail qui a été remise aux fonctionnaires en 2012. Les réponses fournies à tous les paliers de la procédure de règlement de griefs se fondaient sur une version préliminaire de la description de travail du poste d’ASC (intitulée [traduction] « Agent du service à la clientèle 2.0 »), qui est considérablement différente de la description de travail courante de ce poste, laquelle est utilisée depuis 1997 et connue sous le titre [traduction] « Agent du service à la clientèle (générique) ».

17 Par ailleurs, aucune des fonctions décrites ne figure de façon précise dans la description de travail intitulée « Agent du service à la clientèle (générique) » ou dans celle intitulée « Agent du service à la clientèle 2.0 ». Selon les fonctionnaires, il conviendrait d’ajouter les quatre paragraphes suivants :

[Traduction]

  • Fournir de l’aide, des conseils et de la formation en cours d’emploi aux nouveaux employés de la section des Services à la clientèle, et assurer un appui lors de l’absence de ses collègues. Fournir des conseils, de l’encadrement et de l’aide aux étudiants et au personnel de l’organisme; expliquer les responsabilités de la Direction des opérations et son lien avec les autres directions au sein du Commissariat, la procédure d’audience, ainsi que les méthodes et les procédures administratives.
  • Examiner et analyser les demandes de report d’audience présentées par des appelants, leurs représentants ou RHDCC, et rendre des décisions à cet égard en se fondant sur les politiques et les procédures internes, et évaluer de manière indépendante la nécessité pour le BCTR d’accorder un report d’audience en se fondant sur les politiques et les procédures internes du BCTR.
  • Connaissances des procédures en ce qui concerne la santé et les maladies, des méthodes de traitement et des effets indésirables liés à des troubles médicaux particuliers (fibromyalgie, maux de dos chroniques, maladie mentale, etc.), et de la terminologie médicale.
  • Connaissance des accords réciproques en matière de services conclus avec d’autres pays.

18 Mme Carter a aussi témoigné en faveur des fonctionnaires. Elle a souligné qu’elle avait demandé à quelques reprises qu’on lui remette une description de travail courante de son poste d’ASC. Elle a fait cette demande une dernière fois en juin 2008. L’employeur était au courant de ses demandes à cet effet. En juin 2008, l’employeur lui a remis une copie de la description de travail Agent du service à la clientèle 2.0 en réponse à sa dernière demande. C’est cela qui a déclenché le dépôt de ce grief. Ce document a été utilisé à tous les paliers de la procédure de règlement des griefs; les réponses au grief renvoient à ce document, et les fonctionnaires estiment qu’il traduit les intentions de l’employeur relativement à leur description de travail. La version préliminaire de cette description de travail a été révisée la dernière fois en 2001.

B. Pour l’employeur

19 Mme Nancy LePitre a témoigné en faveur de l’employeur. Elle est la directrice des Opérations des tribunaux et communications auprès du BCTR depuis juillet 2007. Les fonctionnaires relèvent d’un superviseur qui, à son tour, relève directement de Mme LePitre. Elle est également le premier palier de la procédure de règlement des griefs pour les employés du service des Opérations; elle a répondu à ce grief. Pour prendre sa décision, elle s’est fondée sur la version préliminaire de la description de travail Agent du service à la clientèle 2.0 et non sur la description de travail en vigueur pour tous les fonctionnaires, soit la version Agent du service à la clientèle générique. Toutes les réponses données à l’égard de leurs griefs renvoient à la version de la description de travail Agent du service à la clientèle 2.0. Elle croyait, à tort, que la description de travail Agent du service à la clientèle 2.0 était celle qui était en vigueur lorsqu’elle en a reçu une copie dans le cadre de l’audience au premier palier de la procédure de règlement des griefs. Ce n’est qu’en 2011, lorsque l’un des fonctionnaires a déposé un autre grief (sans lien avec le grief en l’instance), qu’on s’est rendu compte que la description de travail Agent du service à la clientèle 2.0 n’était qu’une version préliminaire et qu’elle n’avait jamais été classifiée. En dépit du fait que les réponses données à l’égard du grief étaient fondées sur un faux postulat, les décisions prises à tous les paliers de la procédure de règlement des griefs étaient justes selon Mme LePitre. La description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle comprenait toutes les fonctions qui, selon les fonctionnaires, ne sont pas reconnues par l’employeur. Elle serait courante et complète, bien qu’elle ait été rédigée en 1997. Les fonctionnaires ont reçu une copie de la bonne description de travail en février 2012.

20 Selon Mme LePitre, le rôle d’un ASC consiste à donner un visage humain à la procédure d’appel. L’ASC est le point de contact téléphonique le plus important de l’appelant avant une audience. L’ASC renseigne l’appelant au sujet du processus d’appel, de la législation pertinente, des étapes à suivre afin de préparer le meilleur dossier possible, de la mise au rôle de l’audience, des conditions de déplacement, des mesures d’adaptation requises, et de toute autre question de l’appelant. Afin de les aider, les ASC reçoivent un document intitulé [traduction] « Liste de vérification détaillée des conseils à fournir » qui leur sert d’aide-mémoire lors de leurs interactions avec les appelants.

21 Mme LePitre croyait que la principale préoccupation des fonctionnaires à l’égard de leur description de travail avait trait à leur charge de travail, à la prestation de conseils à un stade précoce de leur évolution, et à la responsabilité accrue de devoir saisir des données dans le SGC.

22 Le travail est distribué aux ASC selon leur lieu de travail et la préférence de chacun quant à son horaire de travail. La charge de travail accrue était attribuable à la documentation supplémentaire relative aux exposés et à l’argumentation du ministre au tribunal. Au soutien de cette allégation, l’employeur a déposé en preuve des courriels de Mme Gravelle (une des fonctionnaires) à l’attention de Mme LePitre au sujet d’une permission d’effectuer des heures supplémentaires et d’une augmentation du simple au triple de sa charge de travail en raison de changements et des mises en œuvre importants, notamment en raison de ce qui suit :

[Traduction]

  1. CS et addendas
  2. Programme d’orientation améliorée
  3. Mises à niveau majeures apportées au système de gestion de comptes et l’ajout de nouvelles fonctionnalités (par exemple, les événements)
  4. Applications multiples et la gestion des cas
  5. Projet d’examen de la correspondance
  6. Nouveau dossier d’audience.

23 Mme LePitre a témoigné que le système de jumelage était en place depuis longtemps et qu’il avait pour but d’assurer que les activités du BCTR étaient menées au quotidien, en particulier lorsque des ASC étaient absents. Il s’agit d’un système similaire à celui en place ailleurs dans la fonction publique. Le compagnon assure les tâches de l’ASC absent, et veille à ce que les opérations et la correspondance qui doivent être effectuées au quotidien le soient malgré son absence. Il importe surtout de s’assurer que le volet administratif suive son cours et de veiller à la gestion des divers éléments dans les délais impartis. L’ASC est censé s’adresser à son compagnon afin d’obtenir les informations voulues dans le cadre de son processus d’auto-apprentissage. Le compagnon peut aussi percevoir ce rôle comme étant celui d’un mentor, en particulier lorsqu’il est chargé d’accompagner un nouveau ASC ayant suivi une formation exhaustive. La section du Perfectionnement personnel et de la formation est responsable de la formation pour un emploi particulier et du programme d’orientation des nouveaux employés. Ce ne sont pas tous les ASC qui sont appelés à agir à titre de compagnon, bien que tout employé du BCTR soit tenu d’aider ses collègues lorsqu’ils lui posent une question. Un compagnon est jumelé à un ASC au besoin et pour une période donnée. Agir à titre de compagnon fait partie des exigences du poste d’ASC. Mme LePitre a cependant témoigné que les activités de jumelage ne figuraient pas comme tel dans la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle.

24 En juillet 2007, lorsque Mme LePitre s’est jointe au BCTR, une « politique sur les reports d’audience » était déjà en place depuis 1999. Selon son libellé, cette politique devait [traduction] « […] être appliquée avec souplesse, permettant aux agents d’exercer leur jugement de manière judicieuse, au cas par cas, en tenant compte des facteurs suivants, à savoir […] ». Parmi ces facteurs, on retrouve l’énoncé de mission du BCTR, la législation sur le RPC et la Sécurité de la vieillesse, les règles de justice naturelle, et le bon sens. On y retrouve également des exemples de situations où un report d’audience doit être pris en considération et d’autres où il vaudrait mieux consulter son gestionnaire. Constatant que les ASC avaient besoin de consignes plus détaillées au sujet des reports d’audience, un guide présentant divers scénarios a été élaboré en collaboration avec les ASC.

25 Lors de l’examen d’une demande de report d’audience, les ASC doivent se reporter à la politique sur les reports d’audience, exercer leur pouvoir discrétionnaire et prendre une décision qui tient compte de la politique sur les reports d’audience. Si une situation n’est pas prévue dans la politique, l’ASC doit consulter son gestionnaire ou le directeur pour obtenir conseil. Selon Mme LePitre, M. Burnside a surestimé l’autonomie dont jouit un ASC dans l’exercice de son pouvoir d’accorder des reports d’audience. L’ASC n’a pas le pouvoir d’aller au-delà des paramètres établis dans la politique sur les reports d’audience, à moins d’avoir préalablement consulté son gestionnaire. L’ASC a le pouvoir de refuser une demande de report en se fondant sur l’historique du dossier et sur le nombre de demandes de report déjà effectuées. Sa décision doit toutefois être fondée sur les politiques et les procédures en place. Cette fonction, ainsi que le pouvoir discrétionnaire qui s’y rattache, est mentionnée à deux reprises dans la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle, soit : [traduction] « […] consulter régulièrement les membres du Tribunal de révision afin de fournir des conseils et des interprétations au sujet des politiques, des méthodes, et des règles de procédure régissant les audiences, afin de discuter de circonstances ou de situations particulières, notamment des reports d’audience, […] », et [traduction] « […] consigner au dossier toutes les communications avec les parties portant sur des exigences logistiques particulières en lien avec l’audience, aux reports […] ».

26 Selon Mme LePitre, la connaissance des procédures en ce qui concerne la santé et les maladies et des méthodes de traitement n’est pas une exigence pour occuper un poste d’ASC. Les ASC ont assisté à des séances de sensibilisation au sujet de la fibromyalgie et de la douleur chronique, mais n’ont pas reçu de formation à cet égard. Des enregistrements de séance d’information à l’intention des membres du tribunal ayant besoin de ces connaissances pour exercer leurs fonctions ont été présentés aux ASC dans le but de les sensibiliser aux besoins particuliers des appelants. Cela est conforme aux exigences en matière de compétence et de connaissance dont il est fait mention dans la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle, qui se lit en partie comme suit :

[Traduction]

[…]

Élément 11 : Contexte

Le travail nécessite la connaissance de :

  • la mission, le mandat, les objectifs,

    […]
  • le processus d’appel prévu dans la législation pertinente en ce qui a trait aux appels concernant le RPC et la Sécurité de la vieillesse;

    […]
  • les politiques et les priorités de la Commission relativement au processus d’appel en général;

    […]
  • les besoins particuliers d’une clientèle diversifiée afin d’assurer un traitement sensible, juste et équitable […]

    […]

    [Je souligne]

27 Les ASC doivent être au courant de l’existence d’accords réciproques ayant trait au programme du RPC et de la Sécurité de la vieillesse. Les connaissances nécessaires à cet égard doivent permettre de s’assurer que, si un tel accord existe, il en est tenu compte dans le cadre de la procédure de réexamen du dossier. L’ASC doit vérifier si l’accord a été appliqué afin de calculer la période d’admissibilité minimale et, le cas contraire, communiquer avec le ministère en question pour savoir pourquoi. Si l’appel porte sur l’application de l’accord réciproque, l’ASC doit consulter les services juridiques de l’employeur au sujet de l’interprétation et de l’application de l’accord. Dans les où l’applicabilité d’un accord réciproque est en cause, une audience doit automatiquement être fixée. Ce degré de connaissances requis est une extension de l’exigence d’avoir une connaissance de la législation pertinente, énoncée à l’Élément 12 de la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle.

28 De 2007 au mois de juin 2008, moment de la présentation du grief, aucune nouvelle fonction n’a été ajoutée au poste d’ASC; la description de travail rédigée en 1997 est exacte. Elle énonce les activités essentielles au regard des activités du BCTR.

III. Résumé de l’argumentation

A. Pour les fonctionnaires

29 Les fonctionnaires ont invoqué la clause 54.01 de la convention collective à l’appui de leur argumentation selon laquelle les quatre additions énoncées au paragraphe 17 devraient être ajoutées à la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle. Ils font valoir en outre que la version préliminaire de la description de travail intitulée Agent du service à la clientèle 2.0 est une indication de l’intention de l’employeur de mettre à jour la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle, surtout que l’employeur s’est fondé sur cette description de travail tout au long de la procédure de règlement des griefs. Cela démontre que la description de travail générique n’était ni à jour, ni complète.

30 Les fonctionnaires ont aussi soutenu que le système de jumelage, qu’ils souhaitent voir reconnu dans leur description de travail, était un outil bénéfique auquel l’employeur avait systématiquement recours. Plusieurs communiqués traitant des occasions où il était conseillé de consulter son compagnon ont été publiés. Le compagnon agit à titre de mentor auprès des ASC moins expérimentés et sont la clé du succès des ASC nouvellement embauchés. Des jumelages entre les nouveaux ASC et les ASC d’expérience continuent d’avoir lieu fréquemment, comme en fait foi la liste des compagnons soumise en preuve, laquelle montre que cinq des sept ASC les plus expérimentés avaient été jumelés à des ASC nouvellement embauchés.

31 Selon les fonctionnaires s’estimant lésés, l’employeur a souscrit à la logique du système de jumelage; il s’agit d’un important moyen d’assurer la rétention et le transfert des connaissances au sein des ASC. M. Burnside a témoigné que le système de jumelage répondait à deux impératifs : la formation et le remplacement. Or, aucune mention n’est faite du système de jumelage dans la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle, alors qu’il en est fait mention à deux reprises dans la version préliminaire 2.0 du poste d’Agent du service à la clientèle. Les fonctionnaires ont fait valoir que cela témoigne de l’état d’esprit de l’employeur et de son intention de l’inclure dans la description de travail. Mme LePitre a reconnu qu’il n’en était pas fait mention dans la description de travail de 1997 et que le fait d’agir comme mentor ou compagnon était l’une des fonctions exercées occasionnellement par certains ASC.

32 Les accords de réciprocité dont M. Burnside a parlé sont également mentionnés dans la description de travail du poste d’Agent du service à la clientèle 2.0, en plus des autres dispositions législatives dont il est fait mention dans la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle. Il s’agit d’une nouvelle exigence sur le plan des connaissances requises.

33 Les fonctionnaires ont également fait valoir que des connaissances en matière de santé et au sujet de diverses maladies étaient primordiales pour les ASC. L’ASC doit posséder des connaissances au sujet de diverses maladies. C’est pourquoi on leur donne de la formation sur des maladies comme la fibromyalgie et les maux de dos. Ces connaissances ont une incidence sur les interactions de l’ASC avec les divers appelants; elle les aide à conseiller les appelants dans le calcul de la période d’admissibilité. Il s’ensuit que la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle ne décrit pas convenablement le degré de connaissances requis pour occuper un tel poste.

34 Il a été établi en preuve que, lors de l’examen d’une demande de report d’audience, l’ASC doit tenir compte d’une multitude de facteurs et traiter chaque cas comme un cas d’espèce pour décider s’il y a lieu d’accorder le report; l’employeur n’a pas nié ce fait. La [traduction] « politique sur les reports », les [traduction] « lignes directrices et les procédures relativement aux demandes de report », ainsi que le document intitulé [traduction] « marche à suivre pour obtenir des conseils » traitent tous des exigences liées au processus décisionnel des ASC. Les ASC prennent des décisions toutes les semaines et utilisent le modèle pertinent pour communiquer leurs décisions. Ils doivent cependant choisir le modèle qui convient, ce qui implique qu’ils doivent prendre une décision à cet égard avant de communiquer avec les appelants.

35 Le BCTR met au rôle entre 300 à 350 audiences mensuellement. Les décisions au sujet des reports d’audience ont une incidence importante sur le budget de l’organisme et les activités courantes des tribunaux administratifs. Ces décisions revêtent une importance capitale pour assurer le fonctionnement efficace ainsi que le bon déroulement des tribunaux administratifs, afin que les principes de justice naturelle soient respectés et que les intérêts divergents soient pris en cause. Il s’agit là d’un élément fondamental du rôle d’un ASC, et il devrait en être tenu compte dans le libellé de leur description de travail. Au soutien de cet argument, les fonctionnaires m’ont renvoyée au paragraphe 56 de Jennings et Myers c. Conseil du Trésor (ministère des Pêches et des Océans), 2011 CRTFP 20, lequel est libellé comme suit :

[56] […] une activité peut revêtir un caractère central pour un poste donné, qu’elle occupe 60 % du temps d’un employé (comme l’ont affirmé les fonctionnaires) ou 5 % (comme l’a laissé entendre M. Millar). Un attelage de wagons ne constitue qu’une infime proportion de la masse d’un train en mouvement, et pourtant, sa perte compromettrait entièrement le fonctionnement de ce train […]

36 Les fonctionnaires ont notamment fait valoir que la description de travail d’un fonctionnaire [traduction] « […] doit refléter la réalité de la situation d’emploi de l’employé puisque de nombreux aspects des droits et obligations de l’employé en milieu de travail sont liés à sa description de travail ». Ils m’ont également renvoyée au paragraphe 51 de la décision précitée, dans lequel on cite un extrait du paragraphe 26 de la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans Currie c. Canada (Agence des douanes et du revenu du Canada), 2006 CAF 194. Ils m’ont aussi renvoyée au paragraphe 52 de Jennings et Myers, dont voici un extrait :

Qu’est-ce qu’un exposé complet et courant des fonctions et responsabilités d’un employé? Les parties et les décisions arbitrales sur lesquelles elles s’appuient conviennent qu’une description de travail doit renfermer suffisamment de renseignements pour rendre compte précisément de ce que fait un employé. Elle ne doit pas « omettre de mentionner une fonction ou responsabilité particulière que le fonctionnaire doit remplir »; voir Taylor c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Douanes et Accises), dossier de la CRTFP 166-02-20396 (19901221) […]

37 Les fonctionnaires ont soutenu qu’il convenait de noter que dans Jennings et Myers, l’employeur avait songé à modifier le libellé de la description de travail. Il en va de même pour la présente affaire. L’existence même de la version préliminaire de la description de travail du poste d’ASC intitulée « Agent du service à la clientèle 2.0 » en est la preuve. Si le système de jumelage était suffisamment important pour figurer dans ladescription de travail du poste d’Agent du service à la clientèle 2.0, il devrait également en être fait mention dans ladescription de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle, ce qui n’est pourtant pas le cas. L’inclusion de cette mention dans ladescription de travail du poste d’Agent du service à la clientèle 2.0 témoigne de l’intention de l’employeur de l’ajouter à ladescription de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle.

38 L’employeur a reconnu que les ASC agissent à titre de compagnon ou de mentor, et que ce rôle ne figure pas dans leur description de travail. Il ne suffit pas à l’employeur de dire que cela ne représente qu’une petite partie de leurs fonctions. Ainsi, d’après le paragraphe 21 de Carter c. Conseil du Trésor (ministère des Pêches et des Océans) 2011 CRTFP 89 :

[…]

[…] l’employeur ne peut pas se défaire de ses obligations en utilisant des libellés imprécis ou généraux qui ne décrivent pas de façon complète le travail d’un employé. L’employeur ne peut pas non plus omettre d’inscrire des informations dans un exposé des fonctions sur la base que les informations en question ne s’appliquent qu’une partie du temps où l’employé exerce ses fonctions.

[Je souligne]

39 Enfin, les fonctionnaires m’ont renvoyé à Dervin c. Conseil du Trésor (ministère de la Défense nationale), 2009 CRTFP 50. Cette décision traite du recours par l’employeur à des descriptions de travail génériques. Bien que le recours à une description de travail générique pourrait constituer un moyen acceptable pour l’employeur de s’acquitter de ses obligations en vertu de la convention collective, la description de travail devait néanmoins constituer un énoncé complet et courant du travail devant être accompli par le fonctionnaire en question.

B. Pour l’employeur

40 L’employeur a soutenu que le grief devait être rejeté. À son avis, le grief des fonctionnaires s’estimant lésés ne repose pas sur le fait que leurs fonctions ne sont pas complètement décrites ou prises en compte dans leur description de travail existante, mais plutôt qu’il y a eu une évolution dans le volume du travail à effectuer et que les outils utilisés pour accomplir ces fonctions ne sont pas décrits dans leur description de travail. Ces questions ne suffisent pas pour que l’on procède à la révision d’une description de travail qui est par ailleurs complète et courante. L’employeur m’a renvoyé à Fedun et autres c. Conseil du Trésor (Revenu Canada - Impôt), [1998] dossiers de la CRTFP 166‑02‑28278 à 28288 (19980611), comme décision faisant autorité quant à la proposition qu’une augmentation de la charge de travail ne correspond pas à un changement de fonctions.

41 Il incombe à l’AFPC de convaincre l’arbitre de grief qu’il y a eu violation de la convention collective. Selon l’employeur, aucun élément de preuve ne permet de s’acquitter de ce fardeau. La preuve n’a pas été faite que les éléments que les fonctionnaires cherchent à faire ajouter à leur description de travail ne sont pas déjà pris en compte dans ladescription de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle rédigée en 1997. La question à laquelle il convient de répondre en l’instance pour trancher cette question est celle posée dans Jennings et Myers, au paragraphe 52 :

52. Qu’est-ce qu’un exposé complet et courant des fonctions et responsabilités d’un employé? Les parties et les décisions arbitrales sur lesquelles elles s’appuient conviennent qu’une description de travail doit renfermer suffisamment de renseignements pour rendre compte précisément de ce que fait un employé. Elle ne doit pas « omettre de mentionner une fonction ou responsabilité particulière que le fonctionnaire doit remplir »; voir Taylor c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Douanes et Accises), dossier de la CRTFP 166-02-20396 (19901221). Une description de travail contenant des descriptions générales et génériques est acceptable dans la mesure où elle satisfait à cette exigence fondamentale. Dans Hughes c. Conseil du Trésor du Canada (Ressources naturelles Canada), 2000 CRTFP 69, au paragraphe 26, l’arbitre de grief a écrit ce qui suit : « Il n’est pas indispensable qu’une description de travail contienne une liste détaillée de toutes les activités exercées dans le cadre d’une tâche particulière. Il n’est pas nécessaire non plus qu’elle décrive par le menu la façon dont ces activités sont exercées. » Voir aussi Currie et al. c. Agence du revenu du Canada, 2008 CRTFP 69, au paragraphe 164; Jaremy et al. c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Accise, Douanes et Impôt), 2000 CRTFP 59, au paragraphe 24; Barnes et al. c. Agence des douanes et du revenu du Canada, 2003 CRTFP 13. L’employeur n’est pas tenu d’utiliser une formulation particulière pour décrire les fonctions et responsabilités d’un employé et « […] ce n’est pas le rôle de l’arbitre de grief de corriger la phraséologie ou les expressions employées ». pour autant qu’elles décrivent globalement les responsabilités et les fonctions exécutées (voir Jarvis et al. c. Conseil du Trésor (Industrie Canada), 2001 CRTFP 84, au paragraphe 95, et Barnes, au paragraphe 24.

[Je souligne]

42 Il faut donc déterminer si la description de travail générique contient suffisamment d’information pour qu’un ASC sache en quoi consiste son travail. À cet égard, il convient de distinguer entre une activité et une fonction. L’article 54 de la convention collective ne précise pas comment une description de travail doit être rédigée, il précise seulement que cet exposé doit être courant. L’employeur fait valoir qu’il convient donc de s’en remettre à la définition habituelle donnée aux termes « courant » et « complet ». Puisque la convention collective ne précise pas les limites de temps qui font en sorte qu’un exposé est courant, le fait que la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle ait été rédigée en 1997 ne devrait pas avoir d’incidence en l’espèce. Selon le témoignage de Mme LePitre, le seul témoin appelé à témoigner par l’employeur, les fonctions du poste d’ASC n’ont pas changé depuis qu’elle est entrée en fonction en 2007. La manière d’accomplir ces fonctions a pu changer depuis, non les tâches énumérées dans le courriel de Mme Gravelle déposé en preuve. La principale préoccupation des fonctionnaires avait trait à la charge de travail.

43 L’employeur a convenu que le travail des ASC consistait à administrer le processus d’appel du BCTR. Leur travail consiste à s’assurer que les appels sont instruits par les tribunaux administratifs aux termes des politiques et des lignes directrices de l’employeur. L’employeur ne souscrit cependant pas à l’allégation voulant que les éléments relevés par les fonctionnaires soient très différents de ce qui est déjà évoqué dans la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle. Les conseils prodigués par les ASC sont donnés à partir de la liste de contrôle remise aux ASC au moment de leur entrée en fonction.

44 Les reports d’audience font partie intégrante de la procédure de mise au rôle. Il ne s’agit pas toutefois d’une activité-clé; la mise au rôle des audiences et la tenue des audiences sont les activités-clés. Le pouvoir d’accorder des reports d’audience est assujetti au respect des paramètres énoncés dans la politique sur les reports. Les scénarios fournis aux ASC restreignent l’exercice de leur pouvoir discrétionnaire et ôtent toute indépendance au processus décisionnel. La description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle évoque la question des reports d’audience à la rubrique traitant de l’étape finale de la mise au rôle d’audience d’une affaire. L’ASC doit s’assurer que toutes les parties sont disponibles à la date, à l’heure et à l’endroit fixés pour la tenue de l’audience. Une demande de report d’audience n’est qu’un des événements qui peut survenir dans le déroulement du processus de mise au rôle des affaires, et non une activité-clé. Toute interaction avec les parties au sujet d’une demande de report fait partie de l’ensemble du processus de mise au rôle des affaires.

45 L’avocate de l’employeur m’a renvoyée à Hughes c. Conseil du Trésor (Ressources naturelles Canada), 2000 CRTFP 69, au paragraphe 26, qui est libellé comme suit :

[26] […] Il n'est pas indispensable qu'une description de travail contienne une liste détaillée de toutes les activités exercées dans le cadre d'une tâche particulière. Il n'est pas nécessaire non plus qu'elle décrive par le menu la façon dont ces activités sont exercées.

46 L’examen des demandes de report est implicitement compris dans l’activité de mise au rôle de l’audience. De plus, l’action d’approuver ou non une demande de report nécessite peu d’action indépendante de la part de l’ASC. La Politique sur les reports et les scénarios sont à leur disposition et ils s’en servent. L’employeur a fait valoir par ailleurs que la latitude d’un ASC dans la décision d’accorder ou non un report d’audience ne correspond pas à la définition du terme « indépendant » donnée dans la septième édition du Black’s Law Dictionary :

[Traduction]

Indépendant, adj. 1. Non assujetti au contrôle ou à l’influence d’un tiers <enquête indépendante>. 2. Pas associé à une autre entité (souvent de taille plus importante) <une filiale indépendante>. 3. Pas dépendant ou tributaire de quelque chose ou de quelqu’un <une personne indépendante>.

47 Les fonctionnaires ont fait valoir que la connaissance des accords réciproques devrait être incluse dans la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle en raison de son inclusion dans la version préliminaire de la description de travail du poste d’Agent du service à la clientèle 2.0. Or, aucun élément de preuve ne permet d’appuyer son inclusion dans la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle, outre le fait que cet élément existe dans la version préliminaire de la description de travail du poste d’Agent du service à la clientèle 2.0.

48 La connaissance des troubles médicaux que les fonctionnaires souhaitent ajouter à leur description de travail se limite à la fibromyalgie, la douleur chronique et la maladie mentale. Or, ce ne sont là que trois des nombreux troubles médicaux dont peuvent être atteints les appelants. Les ASC n’ont pas à posséder de connaissances sur ces troubles, ni sur les multiples autres maladies ou troubles médicaux consignés au DSM4, un manuel utilisé dans le diagnostic de diverses maladies. Leurs connaissances les aident à déterminer quels documents sont requis pour appuyer un appel fondé sur l’une ou l’autre de ces diverses maladies, et à conseiller les appelants en conséquence. Les ASC ne rendent aucune décision fondée sur leurs connaissances médicales quant au bien-fondé d’un appel.

49 Le système de jumelage n’est pas une activité principale pour les ASC; il s’agit d’une technique employée par plusieurs organismes gouvernementaux. Il ne s’agit pas d’un encadrement professionnel comme tel. Le jumelage d’un ASC nouvellement embauché avec un compagnon est effectué non seulement en fonction de l’expérience de l’ASC jumelé mais aussi en fonction de ses compétences linguistiques et de son horaire de travail. L’encadrement professionnel d’un ASC nouvellement embauché pour une courte période ne fait pas partie de la fonction d’un compagnon. Selon l’employeur, s’il y avait une lacune dans la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle, ce serait plutôt du fait qu’aucune mention n’y est faite de l’encadrement professionnel effectué de manière ponctuelle à titre d’activité-clé.

50 L’employeur a voulu distinguer les faits dans Jennings et Myers de ceux en l’espèce. Il a fait valoir que, contrairement à Jennings et Myers, dans laquelle il était évident que les relations avec les médias étaient une activité primordiale du poste en cause, la participation à titre de compagnon, le traitement des demandes de reportet la connaissance de certains troubles médicaux ne peuvent être considérés comme étant des activités-clés du poste d’ASC lorsqu’on prend en compte le contexte global et la nature du milieu de travail en question. L’employeur a aussi établi une distinction entre les faits dans la présente affaire et ceux dans Carter, à laquelle m’ont renvoyée les fonctionnaires. Le port d’une arme était en effet propre au travail du fonctionnaire s’estimant lésé, lequel consistait à recueillir des échantillons. En l’espèce, rien n’atteint le niveau d’importance qu’atteint le port d’une arme dans Carter. Dervin se distingue également puisque la preuve présentée n’était pas contestée, contrairement à ce qui est le cas ici.

51 Enfin, l’employeur a traité de la question du recours à une description de travail erronée dans le cadre de la procédure de règlement des griefs. Selon le témoignage de Mme LePitre, qui a répondu au premier palier de la procédure de règlement de griefs, ce sont les fonctionnaires qui lui ont donné la description de travail du poste d’Agent du service à la clientèle 2.0 lors de leur rencontre au premier palier de la procédure. Elle n’avait aucune raison de croire qu’on lui avait remis la mauvaise description de travail. Par ailleurs, il n’y aucune preuve que les fonctionnaires ont demandé qu’on leur remette la bonne description de travail avant qu’ils ne présentent leur grief. Ils avaient en leur possession la version préliminaire de la description de travail du poste d’Agent du service à la clientèle 2.0. Ce document a été dressé dans un format différent de l’autre; il n’y a aucune preuve pouvant attester de sa raison d’être ni de son auteur. La preuve n’est pas suffisante pour que l’on puisse conclure que la version préliminaire de la description de travail traduit l’état d’esprit dans lequel se trouvait l’employeur en ce qui a trait au contenu de la description de travail du poste d’ASC. Le recours à ce document par l’employeur était une erreur.

IV. Motifs

52 Ce qui importe dans la présente décision est de déterminer si la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle, laquelle s’applique aux ASC participant au processus de mise au rôle au sein du BCTR, est un énoncé courant et complet de leurs fonctions. Je ne pense pas qu’il le soit. Alors que les descriptions de travail génériques sont communément employées dans la fonction publique, en particulier lorsqu’un même travail est accompli à l’échelle nationale, et qu’on y a recours avec quelques variantes d’un bureau à un autre, une telle description de travail générique doit malgré tout, selon les termes de la Cour d’appel fédérale, « […] refléter la réalité de la situation d’emploi en raison des nombreux aspects des droits et obligations de l’employé qui sont liés à sa description de travail » (voir Currie, au paragraphe 26).

53 La réalité du travail de mise au rôle par les fonctionnaires va au-delà des brèves descriptions contenues dans la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle. La responsabilité principale des fonctionnaires est de s’assurer que les audiences procèdent de manière efficace et de façon diligente. Or, pour que cela devienne réalité, un certain nombre d’activités-clés doivent être accomplies, chacune ayant une incidence directe sur l’atteinte de la responsabilité principale. Le processus comporte davantage que la seule fourniture de services de mise au rôle et d’établissement de l’horaire dans le cadre du processus d’appel des tribunaux de révision. La fourniture de conseils aux appelants, la connaissance de la législation, des politiques et des procédures pertinentes, et le fait d’être en mesure d’évaluer les demandes de report d’audience sont des activités clés destinées à assurer l’atteinte de l’objectif ultime, soit la conduite efficace et diligente des audiences des causes portées en appel.

54 Les fonctionnaires ont fait valoir que ces éléments étaient clairement identifiés dans la description de travail du poste d’Agent du service à la clientèle 2.0, que Mme Carter avait reçue en réponse à sa demande qu’on lui transmette une description de travail courante, toutes les parties ayant tenu pour acquis tout au long de la procédure de règlement des griefs qu’il s’agissait de la bonne description de travail. Ce n’est qu’en 2012 que l’on a découvert que ce n’était pas le cas. Selon les fonctionnaires, la version préliminaire de la description de travail du poste d’Agent du service à la clientèle 2.0 révèle l’état d’esprit de l’employeur quant aux fonctions du poste d’ASC. Toujours selon ces derniers, les différences entre la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle et la version préliminaire de la description de travail du poste d’Agent du service à la clientèle 2.0 confirment que la description de travail générique ne constitue pas un énoncé courant et complet de leurs fonctions.

55 Mme LePitre a expliqué que le recours à la description de travail du poste d’Agent du service à la clientèle 2.0 dans le cadre de sa réponse lors du premier palier de la procédure de règlement de griefs était une erreur de bonne foi. Les fonctionnaires lui avaient remis ce document lors d’une réunion pour discuter du grief au premier palier de la procédure, et donc elle s’en est servie pour préparer sa réponse à ce palier de la procédure. Elle n’en connaissait pas la source, mais a remarqué qu’elle était rédigée dans un format différent de celui de la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle. En passant en revue cette description de travail générique lors de son témoignage, elle a expliqué pourquoi l’employeur estimait qu’il s’agissait d’un énoncé courant et complet malgré le fait qu’elle avait été rédigée en 1997 et que quelqu’un avait pris la peine de rédiger une version préliminaire de la description de travail du poste d’Agent du service à la clientèle 2.0.

56 Chaque élément que les fonctionnaires souhaitaient ajouter aux fonctions principales du poste d’ASC figurait déjà dans la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle, sauf peut-être la mention de l’élément d’encadrement professionnel dans le cadre du système d’accompagnement, selon l’employeur.

57 Les reports d’audience faisaient partie de la description de travail générique, selon le libellé qui suit :

[Traduction]

[…]

Consulter régulièrement les membres du tribunal de révision afin de fournir des conseils et des interprétations au sujet des politiques, des méthodes, et des Règles de procédure régissant les audiences, afin de discuter de circonstances ou de situations particulières, notamment des reports d’audience, les besoins en matière de sécurité ou des services d’interprétation à l’audience, des perturbations du rôle d’audience, et de la confirmation du rôle d’audience;

et

Consigner au dossier toutes les communications avec les parties portant sur des exigences logistiques particulières en lien avec l’audience, les reports d’audience;

[Je souligne]

58 Par ailleurs, selon l’employeur, le pouvoir d’accorder des reports d’audience est rigoureusement restreint en vertu des politiques et des procédures en place et ne correspond pas à une fonction pouvant être qualifiée d’activité principale.

59 L’avocate de l’employeur m’a renvoyée au Black’s Law Dictionary et à la définition du terme « indépendant » que l’on y donne, soit [traduction] « […] Non assujetti au contrôle ou à l’influence d’un tiers ». Après avoir examiné les politiques et les procédures et entendu le témoignage des témoins, tant ceux des fonctionnaires que de l’employeur, je conclus que le pouvoir conféré aux ASC en ce qui a trait aux reports d’audience pourrait être décrit comme étant un pouvoir discrétionnaire restreint d’accorder des reports d’audience, ce qui correspond essentiellement à la définition de l’expression « administrative discretion » (discrétion administrative) que donne le Black’s Law Dictionary, soit [traduction] « Le pouvoir conféré à un fonctionnaire ou un organisme public d’exercer son jugement en s’acquittant de ses fonctions ».

60 Ce pouvoir d’accorder des reports d’audience, aussi restreint soit-il, a une incidence directe sur la mise au rôle et les ressources, et constitue une des pierres d’assise du processus de mise au rôle.

61 L’employeur soutient que la connaissance des troubles médicaux, que les fonctionnaires souhaitent voir inclure dans leur description de travail, est implicitement comprise à la rubrique « Élément 4 : Compétences et connaissances » de la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle, qui se lit comme suit :

[Traduction]

[…]

Le travail nécessite la connaissance de :

[…]

  • les besoins particuliers d’une clientèle diversifiée afin d’assurer un traitement sensible, juste et équitable […]
  • la connaissance des besoins des personnes handicapées et d’être sensibilisé à leurs besoins.

[…]

62 Les fonctionnaires ont également fait valoir qu’ils avaient reçu une formation sur certains troubles médicaux et que cela devrait être inclus dans leur description de travail au titre de la connaissance des troubles médicaux. Je ne souscris pas à cet argument. Cette formation ne visait pas à les aider à prendre des décisions sur l’évaluation de l’état de santé des appelants. Elle visait plutôt à les sensibiliser aux troubles médicaux que sont notamment la fibromyalgie, les douleurs chroniques et la santé mentale. Cela facilite leurs communications avec les appelants et la vérification des dossiers afin de s’assurer qu’ils sont complets. Par ailleurs, je ne souscris pas non plus à la prétention de l’employeur voulant que l’Élément 4 soit suffisamment complet pour englober la notion de sensibilisation. En effet, j’estime que la mention [traduction] « la connaissance des besoins des personnes handicapées et d’être sensibilisé à leurs besoins » figurant dans la description de travail générique est trop vague et ne décrit pas le degré de connaissance requis ni quels sont les besoins particuliers dont il s’agit. En outre, cette mention ne précise pas les fins pour lesquelles cette connaissance est effectivement requise.

63 Cependant, je souscris à l’argument de l’employeur selon lequel la connaissance des accords réciproques, que les fonctionnaires souhaitent voir inclure, est implicitement comprise à la rubrique [traduction] « Élément 12 : Lois et règlements » de la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle, qui se lit comme suit :

[Traduction]

[…]

Le travail nécessite la connaissance de :

  • Le Régime de pensions du Canada et la réglementation prise dans le cadre de ce régime, la Loi sur la sécurité de la vieillesse et la règlementation prise en vertu de cette loi, le Régime des rentes du Québec, les principes de justice naturelle, et les autres dispositions législatives ayant une incidence sur le processus d’appel.

[…]

64 Un autre élément que les fonctionnaires souhaitaient voir inclus dans leur description de travail était celui de leur participation au système de jumelage, lequel a fait l’objet d’une description exhaustive de part et d’autre. L’employeur a admis que la description de travail générique était imprécise en ce qu’elle ne faisait pas état de l’exigence d’effectuer de l’encadrement professionnel, de manière ponctuelle, auprès des nouveaux ASC. Je suis d’avis que l’ajout d’un tel élément permettrait de reconnaître suffisamment le rôle d’encadrement professionnel dont il s’agit. L’exigence de faire du remplacement lors de l’absence d’un ASC afin de s’assurer du traitement dans les délais impartis de certains documents s’inscrit dans les bonnes pratiques administratives en plus d’assurer le bon fonctionnement de l’organisme, alors que le rôle d’encadrement professionnel va au-delà de ce qui est reconnu dans leur description de travail courante et devrait donc être inclus dans celle-ci.

65 Afin qu’elle soit considérée comme complète, la description de travail ne doit pas omettre de mentionner une fonction ou responsabilité particulière que le fonctionnaire doit remplir. Il n’est pas nécessaire qu’elle décrive dans le menu détail toutes les activités à accomplir pour s’acquitter d’une fonction donnée. Ce n’est pas mon rôle de corriger la phraséologie ou les expressions employées, pour autant qu’elles décrivent globalement les responsabilités et les fonctions exécutées (voir Jennings et Myers, au paragraphe 52). Mon rôle consiste à déterminer si la description de travail constitue un énoncé complet et courant à la lumière de la preuve qui m’est présentée.

66 Je conclus que la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle ne satisfait pas les exigences en ce qui a trait à l’élément d’encadrement professionnel dans le cadre du système de jumelage, à la connaissance des affections médicales, et à l’exercice du pouvoir discrétionnaire (restreint ou non) d’accorder des reports d’audience. Le libellé de la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle n’est pas suffisamment précis pour englober complètement les responsabilités se rapportant à ces trois activités-clés.

67 En vertu de la clause 54.01 de la convention collective, l’employé doit présenter une demande écrite afin d’obtenir une copie de la description de travail de son poste. L’employeur a soutenu qu’il n’avait pas été établi en preuve que les fonctionnaires avaient demandé qu’on leur remette la bonne description de travail avant qu’ils ne procèdent à la présentation de leur grief. Pourtant, j’ai entendu le témoignage non contredit de Mme Carter selon lequel elle avait reçu la description de travail du poste d’Agent du service à la clientèle 2.0 en réponse à sa demande qu’on lui remette la description de travail complète et courante de son poste, et que sa demande a entraîné la présentation du grief dont je suis saisie. J’accepte son témoignage à titre de preuve à cet égard.

68 Je conclus, pour les raisons précitées, que l’employeur a omis de fournir aux fonctionnaires une description de travail complète et courante de leur poste. Je ne disposerai pas des objections préliminaires se rapportant au grief visant le versement rétroactif de leur rémunération, ce grief ayant été retiré par les fonctionnaires au cours de l’audience du présent grief.

69 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

70 J’ordonne la fermeture du dossier 567-02-61.

71 Le grief présenté dans le dossier 567-02-60 est accueilli en partie.

72 Il est ordonné à l’employeur de fournir aux fonctionnaires une description de travail complète et courante traitant les lacunes relevées dans la présente décision, et ce, dans les quatre-vingt-dix (90) jours de la date de la présente décision, en modifiant la description de travail générique du poste d’Agent du service à la clientèle en y ajoutant ce qui suit :

1. À la rubrique « Élément 4 – Connaissances » :

  • Connaissance des restrictions et des besoins des personnes atteintes de divers types de troubles médicaux.

2. À la rubrique « Activités principales » :

  • Fournir de l’aide, des conseils et une formation en cours d’emploi aux nouveaux employés de la section des Services à la clientèle, au besoin.
  • Lorsque les circonstances le commandent, approuver les demandes de report d’audience en se fondant sur les politiques, les procédures et les lignes directrices courantes du BCTR.

73 Je demeure saisie de cette affaire pour une période de quatre-vingt-dix (90) jours afin de disposer de toute question pouvant survenir dans le cadre de l’application de la présente ordonnance.

Le 14 août 2012.

Traduction de la CRTFP

Margaret Shannon,
arbitre de grief

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