Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Les fonctionnaires s’estimant lésés, qui travaillent à Halifax, en Nouvelle-Écosse, et sont membres du groupe Réparation des navires, ont déposé un grief collectif contestant l'attribution du travail par l'employeur - l'agent négociateur accrédité pour le groupe Réparation des navires de la côte ouest a déposé une demande pour obtenir le statut d’intervenant, alléguant qu’il avait un intérêt substantiel dans le règlement du grief - l’employeur a contesté la demande - l’arbitre de grief a conclu qu’il n’était nullement question de compétence, comme cela avait été le cas dans d’autres affaires où les arguments provenaient de tous les agents négociateurs et employeurs intéressés - rien ne laissait présager qu’une décision dans la présente affaire toucherait directement l'intervenant proposé - un intérêt jurisprudentiel dans une décision n'est pas suffisant pour justifier l’accueil d’une demande visant l’obtention du statut d’intervenant et n’équivaut pas à un intérêt substantiel au sens du Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique. Demande rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2012-09-12
  • Dossier:  567-02-39
  • Référence:  2012 CRTFP 93

Devant un arbitre de grief


ENTRE

CONSEIL DES MÉTIERS ET DU TRAVAIL DU CHANTIER MARITIME DU
GOUVERNEMENT FÉDÉRAL (EST)

agent négociateur

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(ministère de la Défense nationale)

employeur

et

CONSEIL DES MÉTIERS ET DU TRAVAIL DU CHANTIER MARITIME DU
GOUVERNEMENT FÉDÉRAL (ESQUIMALT)

demandeur

Répertorié
Conseil des métiers et du travail du chantier maritime du gouvernement fédéral (Est) c. Conseil du Trésor (ministère de la Défense nationale) c. Conseil des métiers et du travail du chantier maritime du gouvernement fédéral (Esquimalt)

Affaire concernant un grief collectif renvoyé à l’arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Kate Rogers, arbitre de grief

Pour l'agent négociateur:
Ronald Pink, avocat

Pour l'employeur:
Anne-Marie Duquette, avocate

Pour l'intervenant:
Des Rogers


Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés le 28 février et les 6 et 15 mars 2012.
(Traduction de la CRTFP)

Grief collectif renvoyé à l’arbitrage

1  Michael Ashley et les autres fonctionnaires s’estimant lésés (les « fonctionnaires ») travaillent à l’Installation de maintenance de la flotte (IMF) Cape Scott du ministère de la Défense nationale (l’« employeur ») à Halifax, en Nouvelle-Écosse. Tous les fonctionnaires sont assujettis à la convention collective conclue entre le Conseil du Trésor et le Conseil des métiers et du travail du chantier maritime du gouvernement fédéral (Est) (« CMTCMGF-E ») pour le groupe professionnel Réparation des navires (Est) qui a comme date d’expiration le 31 décembre 2011.

2 Le 20 avril 2009, les fonctionnaires ont déposé un grief collectif qui se lit comme suit :

[Traduction]

Nous souhaitons contester, par ce grief, la violation par la direction des clauses 6.01 et 32.01 de notre convention collective, en ce qui a trait au groupe professionnel de la Réparation des navires et à l’affectation des fonctions conformément à la Gazette du Canada 1999 et à l’énoncé des fonctions et des responsabilités figurant sur leur description de travail.

3 Le grief collectif a été renvoyé à l’arbitrage le 13 janvier 2010.

Demande devant l’arbitre de grief

4 Le 28 février 2012, le Conseil des métiers et du travail du chantier maritime du gouvernement fédéral (Esquimalt) (« CMTCMGF-O ») a présenté une demande de statut d’intervenant en vertu du paragraphe 99(1) du Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, DORS/2005-79 (le « Règlement »). Le CMTCMGF-O a soutenu qu’il avait un intérêt substantiel dans le grief en l’instance. Il a fait valoir que la définition du groupe professionnel se rapportant à ses membres était très similaire à celle du groupe professionnel auquel appartenait les fonctionnaires, et que toute décision pouvant avoir une incidence sur la définition du groupe professionnel des membres du CMTCMGF-E pouvait avoir une incidence sur l’affectation du travail de ses propres membres dans l’ouest du pays.

5 Bien que dans sa réponse déposée le 6 mars 2012, le CMTCMGF-E ne se soit pas opposé à la demande d’obtention du statut d’intervenant présentée par le CMTCMGF-O, l’employeur, lui, s’y est opposé. Le 15 mars 2012, l’employeur a déposé une réponse à cette demande, dans laquelle il a fait valoir que le CMTCMGF-O n’avait pas un intérêt substantiel dans le grief en l’instance. Il y soutient notamment que le grief collectif ne visait que les employés de l’unité de négociation de la Réparation des navires (Est) et se rapportait à l’application de certaines clauses particulières de la convention collective visant les fonctionnaires. L’employeur fait valoir qu’en l’occurrence, il n’existait aucun intérêt général pouvant justifier l’intervention d’un autre agent négociateur, comme dans Amos c. Administrateur général (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2008 CRTFP 74 (infirmée dans 2009 CF 1181, puis confirmée dans 2011 CAF 38). L’employeur est d’avis qu’une décision rendue par un arbitre de grief de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) portant sur le grief collectif n’aurait aucune incidence sur la définition du groupe professionnel des employés du groupe Réparation des navires (Ouest), ni d’ailleurs sur l’affectation du travail à ces employés. L’employeur a également soutenu que l’obtention du CMTCMGF-O du statut d’intervenant ne ferait qu’ajouter de la confusion et retarderait la procédure d’arbitrage.

6 Les parties n’ont présenté aucune autre argumentation portant sur la demande du statut d’intervenant.

Motifs

7 Le droit d’être ajouté à titre de partie ou d’intervenant dans le cadre d’une audience d’arbitrage est prévu au paragraphe 99(1) du Règlement, qui se lit comme suit :

99. (1) Quiconque a un intérêt substantiel dans un grief dont le président ou un arbitre de grief est saisi peut demander à celui-ci d’y être ajouté à titre de partie ou d’intervenant.

8 Le Règlement ne définit pas ce qui constitue un « intérêt substantiel », et n’énonce pas non plus de critère à satisfaire afin de se voir accorder la qualité d’intervenant. Cependant, cette question a déjà été étudiée. Par exemple, dans Amos, l’arbitre de griefa conclu que la question soulevée dans le cadre du grief dont il était saisi pouvait avoir de vastes conséquences pour tous les fonctionnaires, agents négociateurs et employeurs visés par la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, lesquels ont un intérêt commun dans l’intégrité des ententes de règlement et le bon fonctionnement des services de règlement des différends offerts par la CRTFP. De même, dans Djan c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2001 CRTFP 60, l’arbitre de grief a conclu que la décision aurait des conséquences pour tous les fonctionnaires de la fonction publique. Aussi, tant dans Amos que dans Djan, les arbitres de grief ont, de leur propre chef, demandé que tous les agents négociateurs et employeurs intéressés leur présentent des arguments à cet égard, en raison de leur appréciation respective des vastes conséquences que les questions dont ils étaient saisis pouvaient avoir. Par ailleurs, dans ces deux cas, il s’agissait de trancher la question de la compétence.

9 Aucune question de compétence pour instruire le grief collectif dont je suis saisi n’a été soulevée. La question à trancher en l’espèce se rapporte, du moins à la lecture du libellé-même du grief, à l’affectation des fonctions. En outre, le grief renvoie à des clauses particulières de la convention collective ainsi qu’à la description du groupe professionnel auquel appartiennent les fonctionnaires. Rien dans cette affaire ne porte à croire qu’une décision rendue à cet égard viendrait affecter directement l’intervenant proposé. En fait, il appert que la demande d’être ajouté à titre d’intervenant présentée par le CMTCMGF-O relève davantage d’un intérêt dans l’issue jurisprudentielle de la décision rendue dans le présent cas, que des conséquences directes qu’elle pourrait avoir. Le CMTCMGF-O est une unité de négociation distincte, dotée de sa propre convention collective, et déployant ses activités dans un différent établissement. Bien que des clauses de la convention collective, certaines descriptions de travail ou même certaines affectations de fonctions puissent présenter des similitudes, ma décision au sujet du présent grief collectif aura des conséquences directes et substantielles uniquement en ce qui a trait au CMTCMGF-E.

10 Un intérêt de nature jurisprudentielle dans une décision visant un grief collectif ne suffit pas pour justifier que la demande de statut d’intervenant soit agréée. Dans Syndicat canadien de la fonction publique (Division du transport aérien) c. Lignes aériennes Canadien International ltée, [2000] A.C.F. no 220 (C.A.) (QL), la Cour d’appel fédérale a rejeté une telle demande, se prononçant comme suit à ce sujet, au paragraphe 11 :

11. Il est clair que l’intérêt le plus important de l’AFPC est de nature "jurisprudentielle"; elle s’inquiète du fait que si la décision du Tribunal est confirmée, il pourrait y avoir des répercussions sur les litiges portant sur l’équité salariale à l’avenir. Il est bien établi qu’une demande d’intervention ne peut se fonder uniquement sur un intérêt de cette nature.

11 Je suis d’avis qu’une préoccupation ayant trait aux répercussions jurisprudentielles que pourrait avoir une décision ne constitue pas un intérêt substantiel tel qu’il est exigé par le Règlement. Si cela devait être le cas, alors rien n’empêcherait que des interventions puissent être accordées dans presque tous les cas, en particulier lorsqu’ils portent sur l’interprétation d’une convention collective, puisqu’on retrouve un libellé similaire dans plusieurs conventions collectives des diverses unités de négociation dans l’ensemble de la fonction publique. Je conviens avec l’employeur qu’une intervention dans les circonstances du présent cas entraînerait un délai indu. Par conséquent, je ne puis accorder la demande du CMTCMGF-O d’être ajouté à titre d’intervenant dans le cadre de l’audience du grief collectif visé en l’instance.

12 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

13 La demande d’être ajouté à titre d’intervenant est rejetée.

Le 12 septembre 2012.

Traduction de la CRTFP

Kate Rogers,
arbitre de grief

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.