Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La plaignante a formulé à l’encontre de l’intimé une allégation d’abus de pouvoir dans l’application du mérite au motif que celui-ci aurait éliminé à tort sa candidature d’un processus de nomination interne annoncé sous prétexte qu’il lui aurait manqué une qualification essentielle liée à l’expérience. Décision Dans l’annonce de possibilité d’emploi, il était conseillé aux candidats de démontrer clairement dans leur dossier de candidature en quoi ils possédaient les qualifications essentielles relatives aux études et à l’expérience, faute de quoi leur candidature pourrait être rejetée. Après examen du dossier de candidature de la plaignante, l’intimé a conclu qu’elle ne répondait pas aux exigences relatives à l’expérience. Les éléments preuve présentés au Tribunal ne portaient pas à croire que certaines parties du dossier de candidature n’avaient pas été prises en considération ni que l’intimé s’était fondé sur des éléments insuffisants ou avait omis de tenir compte de tous les éléments d’information dont il disposait. L’intimé n’avait aucune raison de contacter la plaignante ou chercher à obtenir des renseignements additionnels avant de prendre sa décision. Plainte rejetée.

Contenu de la décision

Coat of Arms - Armoiries
Dossier :
2011-1199
Décision
rendue à :

Ottawa, le 17 octobre 2012

DANIELLE WILSON
Plaignante
ET
LE SOUS-MINISTRE DE SANTÉ CANADA
Intimé
ET
AUTRES PARTIES

Affaire :
Plaintes d’abus de pouvoir en vertu de l'article 77(1)a) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique
Décision :
La plainte est rejetée
Décision rendue par :
Joanne B. Archibald, membre
Langue de la décision :
Anglais
Répertoriée :
Wilson c. le sous‑ministre de Santé Canada
Référence neutre :
2012 TDFP 0027

Motifs de décision


Introduction

1 Danielle Wilson, la plaignante, était candidate dans un processus de nomination interne annoncé visant la dotation du poste de gestionnaire régional, Services de santé environnementale des groupe et niveau EG‑08 (le poste EG‑08) au sein de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits de Santé Canada, à Vancouver (Colombie‑Britannique). Elle avance que le sous‑ministre de Santé Canada, l’intimé, a abusé de son pouvoir dans l’application du mérite et éliminé à tort sa candidature du processus de nomination.

2 L’intimé nie avoir abusé de son pouvoir et soutient que la plaignante ne possédait pas les qualifications essentielles pour le poste, et particulièrement l’expérience de l’élaboration et de la mise en œuvre des stratégies, des plans et des cadres de programmes. Pour cette raison, elle n’a pas été jugée qualifiée et sa candidature a été éliminée du processus de nomination.

3 La Commission de la fonction publique (CFP) a présenté des observations écrites dans lesquelles elle explique les lignes directrices et les politiques pertinentes de la CFP. Elle n’a pas pris position sur le bien-fondé de la plainte.

4 La personne nommée, Linda Pillsworth, a également présenté des observations concernant l’allégation de la plaignante selon laquelle sa nomination était entachée de favoritisme personnel. Toutefois, la plaignante a retiré cette allégation au moment de l’audience. Par conséquent, ni l’allégation initiale de la plaignante ni les observations de Mme Pillsworth n’ont été prises en compte dans les présents motifs de décision.

5 Pour les motifs énoncés ci-après, la plainte est rejetée. Il n’a pas été établi que la candidature de la plaignante avait été éliminée à tort du processus de nomination. Pour en arriver à sa conclusion, le comité d’évaluation s’est fondé sur les renseignements que la plaignante a fournis dans son dossier de candidature, et il n’a pas été démontré qu’il avait agi de façon déraisonnable pour arrêter sa décision.

6 Le Tribunal souligne que la plaignante a soulevé une question liée à l’interprétation ou à l’application de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H-6. Or, la plaignante a expressément choisi de ne pas y donner suite à l’audience. Le Tribunal n’a donc pas examiné cette question.

Question en litige

7 Le Tribunal doit déterminer si l’intimé a abusé de son pouvoir quand il a jugé que la plaignante ne possédait pas les qualifications essentielles pour le poste EG‑08.

Analyse

8 La candidature de la plaignante a été éliminée du processus de nomination visant la dotation du poste EG‑08, car elle ne possédait pas la qualification essentielle relative à l’expérience de l’élaboration et de la mise en œuvre des stratégies, des plans et des cadres de programmes. La plaignante est d’avis qu’elle a démontré de manière satisfaisante dans son dossier de candidature qu’elle possédait cette qualification et qu’elle aurait dû être prise en considération pour la suite du processus.

9 La plaignante a déclaré que selon elle, un cadre est un document permettant d’examiner une situation de façon critique, de cerner les enjeux et de formuler des recommandations. Toujours selon elle, une stratégie sert à mettre en œuvre les recommandations, et un plan porte sur les questions liées aux ressources humaines et financières.

10 La plaignante a décrit la façon dont elle avait démontré qu’elle possédait la qualification liée à l’expérience dans son dossier de candidature. Elle a mentionné les activités qu’elle avait menées durant ses études de maîtrise en Santé publique à l’Université de Waterloo. Premièrement, elle estime avoir établi qu’elle possédait l’expérience de l’élaboration et de la mise en œuvre de cadres de programmes dans son dossier de candidature en indiquant qu’elle avait contribué à la rédaction d’un guide sur la prévention des blessures pendant ses études de maîtrise.

11 Deuxièmement, la plaignante considère avoir démontré dans son dossier de candidature qu’elle satisfaisait à l’exigence relative à l’élaboration et à la mise en œuvre de stratégies et de plans en décrivant un stage qu’elle avait effectué au ministère de la Santé à Kamloops (Colombie‑Britannique). Le stage consistait en une affectation de travail spécialisée qui se voulait un complément à ses études de maîtrise. Dans son dossier de candidature, elle a indiqué qu’elle avait « rédigé une politique en matière d’eau potable à l’appui des efforts déployés par l’administration centrale pour mettre à l’essai des plans de salubrité de l’eau dans des collectivités des Premières Nations en Ontario » [traduction]. La plaignante a reconnu qu’il s’agissait de sa seule référence à l’expérience qu’elle avait acquise dans le cadre de son stage.

12 Pendant son témoignage, la plaignante a fourni plus de détails concernant son stage et a présenté deux documents : l’entente de stage et l’évaluation provisoire. L’entente de stage a été conclue entre la plaignante et Mme Pillsworth, qui représentait le ministère de la Santé. Ce document indique que pour la période du 4 janvier au 1er avril 2011, la plaignante devait élaborer un cadre et une politique directrice pour un comité sur l’eau potable et contribuer à la préparation d’un protocole d’entente, d’un mandat et d’ententes connexes entre les organismes fédéraux concernés. Le 4 mars 2011, Mme Pillsworth a rempli l’évaluation provisoire, laquelle visait à rendre compte à l’Université de Waterloo des objectifs, des activités et des progrès de la plaignante au cours de son stage. Dans ce document, il était indiqué que la plaignante avait effectué une analyse des options en matière de politiques et que ses recherches et sa compréhension des programmes destinés aux Premières Nations avaient permis l’élaboration d’une nouvelle option. Il était également indiqué que les activités de la plaignante allaient être modifiées afin d’y inclure l’élaboration et l’évaluation d’un plan de salubrité de l’eau ainsi que sa mise à l’essai, suivie de la formulation de recommandations en vue de sa mise en œuvre. Cependant la plaignante n’a joint aucun de ces deux documents à son dossier de candidature.

13 Yousuf Ali, directeur régional de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits pour la Colombie‑Britannique, a déclaré qu’il avait dirigé le processus de nomination étant donné que le poste EG‑08 relève de lui. M. Ali a affirmé qu’il avait reçu 14 candidatures pour le poste; il en a effectué la présélection au regard des exigences liées aux études et à l’expérience figurant dans l’énoncé des critères de mérite en se fondant uniquement sur les renseignements fournis dans les dossiers de candidature. Dans l’annonce de possibilité d’emploi pour le poste EG‑08, il était conseillé aux candidats de démontrer clairement dans leur dossier de candidature en quoi ils possédaient les qualifications essentielles relatives aux études et à l’expérience, faute de quoi leur candidature pourrait être rejetée.

14 M. Ali a affirmé que le dossier de candidature de la plaignante ne démontrait pas que celle‑ci possédait l’expérience requise quant à l’élaboration et à la mise en œuvre des stratégies, des plans et des cadres de programmes. Selon lui, la description du travail que la plaignante a effectué pour l’autorité intérieure de la santé (Interior Health Authority) de la Colombie‑Britannique comportait des éléments théoriques, mais ils étaient insuffisants pour répondre au critère relatif à l’expérience. Dans l’ensemble, son dossier de candidature illustrait le travail et le degré d’engagement attendus d’un agent des ressources en santé (EG‑06), mais pas le type d’expérience recherché pour le poste EG‑08. Relativement à la politique sur l’eau potable, M. Ali a reconnu qu’il s’agissait d’une initiative nationale d’envergure. Cependant, il ignorait la nature précise de la participation de la plaignante à cette initiative; sa connaissance se limitait à la mention qu’en avait faite la plaignante dans son dossier de candidature. Il estime que la description figurant dans ce document ne faisait pas état de l’expérience en matière de programmes et du degré de complexité recherchés.

15 M. Ali a reconnu qu’il savait que la plaignante était l’un des 250 employés de sa direction générale, mais il n’avait jamais travaillé directement avec elle. Il ne connaissait pas le contenu de l’entente de stage ni de l’évaluation provisoire, et il ignorait tout des antécédents professionnels de la plaignante, à l’exception de ce qu’elle avait inscrit dans son dossier de candidature.

16 Le Tribunal estime que l’abus de pouvoir n’a pas été établi en l’espèce. En ce qui concerne l’évaluation des candidats dans un processus de nomination, le Tribunal a rendu de nombreuses décisions dans lesquelles il réaffirme que son rôle consiste à déterminer s’il y a eu abus de pouvoir, et non à réévaluer les candidats ou à reprendre le processus de nomination. Voir, par exemple, la décision Broughton c. Sous ministre de Travaux publics et Services gouvernementaux, 2007 TDFP 0020.

17 La preuve présentée au Tribunal ne porte pas à croire que certaines parties du dossier de candidature n’ont pas été prises en considération ou que l’intimé s’est fondé sur des éléments insuffisants ou a omis de tenir compte de tous les renseignements dont il disposait. Voir les décisions Tibbs c. Sous‑ministre de la Défense nationale, 2006 TDFP 0008, para. 70 et Brookfield c. le sous-ministre des Affaires étrangères et du Commerce international, 2011 TDFP 0025, paras. 45 et 46. Dans l’annonce de possibilité d’emploi, il était adéquatement expliqué aux candidats qu’ils devaient démontrer clairement dans leur dossier de candidature en quoi ils répondaient aux critères de sélection. Dans son témoignage – non contesté –, M. Ali a affirmé qu’il avait examiné le dossier de candidature de la plaignante dans son intégralité et qu’il n’y avait pas trouvé de description qui corresponde à l’expérience recherchée. Rien ne laisse supposer que certaines de ses questions étaient restées sans réponse ou qu’il avait des incertitudes à propos de l’expérience décrite dans le dossier de candidature de la plaignante. Les éléments de preuve ne permettent pas de trouver une raison pour laquelle M. Ali aurait dû communiquer avec la plaignante ou chercher à obtenir des renseignements additionnels avant d’en arriver à sa décision. Le dossier de candidature était le moyen d’évaluation choisi pour la qualification essentielle en question. Le Tribunal a déjà établi qu’il incombe aux candidats de veiller à ce que leur dossier de candidature soit complet et contienne tous les renseignements nécessaires pour démontrer qu’ils possèdent les qualifications essentielles. Voir les décisions Charter c. Sous-ministre de la Défense nationale, 2007 TDFP 0048 et Henry c. Administrateur général de Service Canada, 2008 TDFP 0010. Après avoir examiné le dossier de candidature de la plaignante, M. Ali a conclu que celle‑ci ne répondait pas aux exigences relatives à l’expérience, et la plaignante n’a pas démontré que cette conclusion était déraisonnable.

18 Peut-être l’entente de stage ou l’évaluation provisoire auraient-elles étayé la description de l’expérience de la plaignante ou entraîné sa présélection pour la suite du processus, mais aucun des deux documents n’a été inclus dans le dossier de candidature et, comme il a été indiqué précédemment, la preuve ne permet pas de conclure que M. Ali aurait dû tenter d’obtenir de plus amples renseignements.

Décision

19 Pour les motifs susmentionnés, la plainte est rejetée.


Joanne B. Archibald
Membre

Parties au dossier


Dossier du Tribunal :
2011-1199
Intitulé de la cause :
Danielle Wilson et le sous‑ministre de Santé Canada
Audience :
Le 21 août 2012
Kamloops (Colombie‑Britannique)
Date des motifs :
Le 17 octobre 2012

COMPARUTIONS

Pour la plaignante :
Phil Carriere
Pour l'intimé :
Christine Langill
Pour la Commission
de la fonction publique :
Kimberley Lewis
(observations écrites)
Pour l’autre partie :
Linda Pillsworth
(observations écrites)
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