Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Une analyste de l’agent négociateur avait informé la demanderesse que l’agent négociateur n’appuierait pas le renvoi de son grief à l’arbitrage et ne la représenterait pas à ce stade des procédures - la demanderesse a par la suite renvoyé son grief à l’arbitrage; le renvoi a été effectué plusieurs mois après le délai prescrit par le Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique - à l’appui de sa demande de prorogation de délai, la demanderesse a invoqué le fait qu’elle avait connu divers problèmes de santé pendant la période pertinente - elle a également soutenu avoir agi de manière diligente après avoir consulté un avocat - il a été démontré en preuve qu’elle avait une certaine connaissance de la CRTFP et de ses procédures - le vice-président a rejeté la demande de prorogation de délai - il a également été démontré en preuve que durant la période où elle éprouvait des problèmes de santé, la demanderesse a néanmoins été en mesure d’intenter trois autres recours juridiques, ce qui contredit sa prétention voulant qu’elle n’était pas en mesure de renvoyer son grief à l’arbitrage - la demanderesse avait été exposée au processus d’arbitrage par le passé - le vice-président a conclu qu’aucune preuve ne lui avait été présentée lui permettant de conclure qu’il y avait des raisons claires, logiques et convaincantes pouvant justifier le retard - il a précisé que le délai avait commencé à courir à partir du jour suivant la date à laquelle la demanderesse avait reçu la décision de l’employeur au dernier palier de la procédure de règlement des griefs, et non à partir du moment où elle a rencontré pour la première fois son avocat - même après sa première rencontre avec son avocat, elle n’a pas agi de manière diligente - elle a attendu plusieurs autres semaines avant de renvoyer son grief à l’arbitrage - selon son propre témoignage, elle avait déjà décidé, vers le début du mois d’août 2012, de renvoyer son grief à l’arbitrage, mais elle ne l’a fait qu’en octobre2012 - il s’agit d’un retard considérable. Demande rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2013-09-09
  • Dossier:  568-02-288 XR : 566-02-7701
  • Référence:  2013 CRTFP 102

Devant le président


ENTRE

LYNE BRASSARD

demanderesse

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux)

défendeur

Répertorié
Brassard c. Conseil du Trésor (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux)

Affaire concernant une demande visant la prorogation d’un délai en vertu de l’alinéa 61b) du Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Renaud Paquet, vice-président

Pour la demanderesse:
Yavar Hameed, avocat

Pour le défendeur:
Allison Sephton, avocate

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
le 17 août 2013.
(Traduction de la CRTFP)

I. Demande devant le président

1 Lyne Brassard (la « demanderesse ») occupait un poste d’adjointe exécutive au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (le « défendeur », l’« employeur », ou « TPSGC ») à Gatineau, Québec. Le défendeur a renvoyé la fonctionnaire le 28 juin 2011, avant la fin du stage de douze mois de cette dernière. Le 5 juillet 2011, Mme Brassard a présenté un grief contestant la décision de l’employeur de la renvoyer. Ce grief a été rejeté par l’employeur à chacun des paliers de la procédure de règlement de griefs. Mme Brassard a reçu la réponse de l’employeur au dernier palier le 21 décembre 2011.

2 Mme Brassard aurait dû renvoyer son grief à l’arbitrage dans un délai de quarante (40) jours à compter de la réception de la réponse au dernier palier de la procédure de règlement de griefs, tel qu’il est prévu au paragraphe 90(1) du Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (le « Règlement »). Ainsi, il aurait fallu que son grief soit renvoyé à l’arbitrage le 30 janvier 2012 au plus tard. Or, le grief a été renvoyé à l’arbitrage pour la première fois le 25 septembre 2012 au moyen d’un formulaire erroné où il était allégué qu’il y avait eu violation de la convention collective. Mme Brassard n’est pas représentée par son agent négociateur. La Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission », ou la « CRTFP »), l’a avisée, le 27 septembre 2012, qu’elle n’avait pas le droit de renvoyer à l’arbitrage un grief portant sur l’interprétation de la convention collective sans l’appui de son agent négociateur. Le 11 octobre 2012, Mme Brassard a alors renvoyé son grief à l’arbitrage une autre fois, à titre de grief contestant son licenciement. Par la même occasion, elle a demandé une prorogation de délai.

3 En vertu de l’article 45 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « Loi »), le président m’a autorisé, en ma qualité de vice-président, à exercer tous ses pouvoirs ou à m’acquitter de toutes ses fonctions en application de l’alinéa 61b) du Règlement, pour entendre et trancher toute question de prorogation de délai dans la présente affaire.

II. Résumé de la preuve

4 Mme Brassard a décidé de renvoyer son grief à l’arbitrage après le rejet du grief au dernier palier de la procédure de règlement de griefs. Toutefois, le 16 janvier 2012, une analyste de son agent négociateur, l’Alliance de la Fonction publique du Canada (l’« AFPC »), l’a informé par lettre que l’AFPC n’appuyait pas le renvoi de son grief à l’arbitrage et ne la représenterait pas à ce stade des procédures. L’analyste de l’AFPC a ajouté que Mme Brassard était libre toutefois de renvoyer son grief à l’arbitrage de son propre chef et qu’elle avait jusqu’au 30 janvier 2012 pour le faire. Elle a également fourni l’adresse de correspondance de la Commission, de même que les coordonnées du site Web où trouver le formulaire requis pour envoyer son grief à l’arbitrage. Enfin, elle a déclaré que l’AFPC pourrait communiquer avec l’employeur pour tenter d’obtenir une prorogation du délai prévu pour le renvoi de son grief à l’arbitrage.

5 Mme Brassard a témoigné qu’après avoir reçu cette lettre de l’AFPC, elle était bouleversée et s’était sentie livrée à elle-même dans sa lutte contre son employeur. Elle a affirmé qu’elle ne comprenait pas toujours le jargon juridique employé dans la lettre de l’AFPC, et qu’elle n’avait alors pas les ressources financières pour consulter un avocat. Sa santé a également été très affectée par ce qui s’est passé avec son employeur ainsi que son licenciement. Elle était régulièrement suivie par son médecin. Elle se sentait déprimée, avait des pensées suicidaires, et souffrait en plus d’eczéma et d’impétigo.

6 Mme Brassard a indiqué avoir commencé à se sentir mieux en juin 2012. À cette époque, elle a trouvé un autre emploi et sa situation financière a commencé à s’améliorer.

7 Le 27 janvier 2012, Mme Brassard a déposé une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne (la « CCDP ») contre deux de ses anciens gestionnaires de TPSGC. Le 4 juillet 2012, la CCDP a écrit à Mme Brassard pour lui demander de présenter des observations détaillées relativement à certains éléments de sa plainte, et ce, au plus tard le 6 août 2012. Mme Brassard a alors décidé d’obtenir des conseils juridiques afin de pouvoir répondre adéquatement à la demande de la CCDP. Dans sa réponse transmise le 6 août 2012, elle a précisé notamment qu’elle entendait poursuivre son grief devant la CRTFP. Elle a également demandé à la CCDP de reporter sa décision relativement à sa plainte jusqu’à ce que la CRTFP ait rendu sa décision sur la présente affaire. Mme Brassard a aussi mentionné qu’elle s’est fait aider par M. Yavar Hameed pour rédiger sa lettre du 6 août 2012 destinée à la CCDP.

8 Vers la fin de l’automne 2011, Mme Brassard a intenté une poursuite en diffamation devant la Cour du Québec contre ses anciens gestionnaires de TPSGC. Mme Brassard a comparu devant la Cour le 24 janvier 2012. La Cour a alors décidé de renvoyer l’affaire à la Cour supérieure du Québec, laquelle a entendu la cause le 23 avril 2012 et a rejeté la demande de Mme Brassard en invoquant l’absence de compétence à cet égard.

9 Le 28 mars 2012, Mme Brassard a déposé une plainte de pratique déloyale de travail contre son agent négociateur en raison de son refus de renvoyer son grief à l’arbitrage. Elle a déposé sa plainte auprès de la Commission des relations de travail du Québec, laquelle a statué qu’elle n’avait pas compétence pour entendre une plainte présentée par un fonctionnaire fédéral.

10 Le 24 août 2012, Mme Brassard a présenté une demande à la Commission de la santé et de la sécurité au travail pour obtenir une indemnité pour la période suivant son licenciement par TPSGC. Sa demande a été rejetée.

11 Mme Brassard a décidé, en août 2012, qu’elle continuerait le processus de grief entrepris le 5 juillet 2011 auprès de la CRTFP, en ce sens qu’elle entendait demander que son grief soit renvoyé à l’arbitrage. Elle a témoigné que, jusqu’à ce qu’elle ait parlé du dossier avec son avocat, elle n’avait jamais pensé qu’elle pouvait renvoyer ce grief à l’arbitrage. Elle croyait plutôt, à l’époque, que sa plainte auprès de la CCDP était le meilleur moyen de régler toute cette affaire. Elle a également témoigné que si elle avait pu obtenir des conseils juridiques avant ce moment, elle aurait peut-être procédé autrement.

12 Mme Brassard a reconnu qu’elle avait une certaine connaissance de la CRTFP et de ses procédures. En 2009, elle avait déposé un grief en lien avec un emploi précédant qu’elle occupait dans un autre ministère du gouvernement fédéral. Dans cette dernière affaire, l’employeur avait fait valoir que son grief était tardif. Mme Brassard a présenté une demande de prorogation de délai. L’affaire a été entendue le 21 novembre 2011; sa demande a été rejetée le 26 janvier 2012 (Brassard c. Administrateur général (ministère des Affaires étrangères et du Commerce international), 2012 CRTFP 11).

III. Résumé de l’argumentation

A. Pour Mme Brassard

13 Mme Brassard a soutenu qu’elle avait des raisons claires, logiques et convaincantes justifiant le retard dans la présentation de son grief.

14 Mme Brassard a fait valoir qu’elle avait toujours eu l’intention de poursuivre son grief. Lorsque son agent négociateur l’a avisée qu’il ne poursuivrait pas son grief, elle ne disposait d’aucune ressource financière pour consulter un avocat. Elle était aussi gravement malade et n’avait pas l’énergie nécessaire pour poursuivre son grief par elle-même. Elle était en détresse, et il ne lui restait alors qu’une semaine pour agir et respecter le délai prévu pour renvoyer son grief à l’arbitrage. En plus, entre janvier et juin 2012, elle ne disposait pas des ressources financières suffisantes pour consulter un avocat.

15 Mme Brassard a soutenu que si la prorogation de délai était accordée l’employeur n’en subirait aucun préjudice. L’affaire est toujours en instance devant la CCDP. Tout ce que l’employeur cherche à faire est de l’empêcher d’exercer des recours contre lui en soulevant des arguments de nature technique.

16  Mme Brassard a fait valoir qu’après avoir consulté un avocat vers la fin du mois de juillet 2012, elle a agi de manière diligente. Elle a commencé par s’occuper de la réponse qu’elle devait donner à la CCDP avant le 6 août 2012. Peu après, elle a renvoyé son grief à l’arbitrage et présenté une demande de prorogation de délai. Elle avait besoin de conseils juridiques avant de pouvoir renvoyer son grief à l’arbitrage et présenter une demande de prorogation de délai. Ce qu’elle fit peu après avoir obtenu ces conseils.

17 Mme Brassard m’a renvoyé à Schenkman c. Conseil du Trésor (Travaux publics et Services gouvernementaux Canada), 2004 CRTFP 1.

B. Pour le défendeur

18 L’avocate du défendeur a fait valoir que Mme Brassard n’avait pas de raison claire, logique et convaincante pouvant justifier le retard dans le renvoi de son grief à l’arbitrage. Par conséquent, il y a lieu de rejeter sa demande de prorogation de délai.

19 L’avocate du défendeur a fait valoir que Mme Brassard n’avait pas produit d'attestation médicale établissant qu’elle avait été dans l’incapacité d’agir et de visiter le site Internet de la Commission pour y retrouver les informations qu’il lui fallait pour renvoyer son grief à l’arbitrage. Cela ne lui aurait rien coûté, et elle n’avait pas besoin de conseils juridiques pour le faire.

20 L’avocate du défendeur a aussi soutenu que Mme Brassard était en mesure d’agir entre les mois de janvier et d’octobre 2012. Elle avait notamment poursuivi sa plainte auprès de la CCDP et avait présenté des observations détaillées s’y rapportant en août 2012. Elle a également déposé une plainte de pratique déloyale de travail contre son agent négociateur au mois de mars 2012, et intenté une poursuite en diffamation contre ses anciens supérieurs plus récemment encore en avril 2012. De plus, en août 2012, elle a présenté une demande d’indemnité auprès de la CSST.

21 L’avocate du défendeur a de plus fait valoir que Mme Brassard avait dépassé de plus de huit mois les délais de renvoi de son grief à l’arbitrage. Elle n’a pas agi de manière diligente.

22  L’avocate du défendeur m’a renvoyée à Schenkman; Lagacé c. Conseil du Trésor (Commission de l’immigration et du statut de réfugié), 2011 CRTFP 68; Grouchy c. Administrateur général (ministère des Pêches et Océans), 2009 CRTFP 92; et Rouleau c. Personnel des fonds non publics, Forces canadiennes, 2002 CRTFP 51.

IV. Motifs

23 Les parties s’entendent sur les faits en l’espèce. Mme Brassard aurait dû normalement renvoyer son grief à l’arbitrage au plus tard le 30 janvier 2013. Elle a renvoyé son grief à l’arbitrage plus de huit mois après l’expiration de ce délai. Elle a demandé une prorogation de délai pour que l’on traite son grief comme ayant été renvoyé en bonne et due forme à l’arbitrage.

24 Les demandes de prorogation de délai sont présentées en vertu de l’article 61 du Règlement, lequel est libellé comme suit :

61. Malgré les autres dispositions de la présente partie, tout délai, prévu par celle-ci ou par une procédure de grief énoncée dans une convention collective, pour l’accomplissement d’un acte, la présentation d’un grief à un palier de la procédure applicable aux griefs, le renvoi d’un grief à l’arbitrage ou la remise ou le dépôt d’un avis, d’une réponse ou d’un document peut être prorogé avant ou après son expiration :

a) soit par une entente entre les parties;

b) soit par le président, à la demande d’une partie, par souci d’équité.

25 Les critères à prendre en considération afin de déterminer si une prorogation du délai doit être accordée ont été énoncés dans Schenkman. Ces critères sont les suivants :

  • le retard est justifié par des raisons claires, logiques et convaincantes;
  • la durée du retard;
  • la diligence raisonnable du fonctionnaire s’estimant lésé;
  • l’équilibre entre l’injustice causée àl’employé et le préjudice que subit l’employeur si la prorogation est accordée;
  • les chances de succès du grief.

26 L’importance accordée à chacun de ces critères n’est pas nécessairement la même. En l’absence de motifs clairs, logiques et convaincants justifiant le retard, la durée du retard, le fait que le demandeur ait fait preuve de diligence ou que le rejet de la demande de la prorogation entraîne une injustice à l’égard du demandeur plus importante que le préjudice subi par le défendeur si la prorogation est accordée, ou encore que les chances de succès du grief soient bonnes ou non importe peu dans la plupart des cas. Il faut un motif sérieux pour justifier le retard. La Commission a adopté cette approche de façon constante au cours des deux dernières années (voir, par exemple, Lagacé, ou Callegaro c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2012 CRTFP 110). D’autre part, comme je l’ai observé dans Copp c. Conseil du Trésor (ministère des Affaires étrangères et du Commerce international), 2013 CRTFP 33, par le passé, la Commission a rarement accepté d’accorder une prorogation du délai sans motifs clairs, logiques et convaincants justifiant le retard.

27 Lors de son témoignage, Mme Brassard n’a pas fait valoir quelque élément pouvant me convaincre qu’elle avait une raison claire, logique et convaincante pouvant justifier le retard de plus de huit mois dans le renvoi de son grief à l’arbitrage. Elle a témoigné qu’elle avait été malade vers le début de l’année 2012 et que son état de santé s’était amélioré en juin, et qu’elle était alors retournée travailler. Sur cet aspect, je crois son témoignage, bien qu’elle n’ait pas produit d’attestation médicale à cet égard. Cependant, je ne crois pas que son état de santé l’empêchait de renvoyer son grief à l’arbitrage. En premier lieu, son agent négociateur lui avait fourni des directives claires et faciles à suivre sur la manière de procéder. Elle n’avait simplement qu’à suivre ces directives. En deuxième lieu, elle connaissait le processus d’arbitrage, car elle y avait été exposée par le passé. En troisième lieu, en mars 2012, son état de santé s’était suffisamment amélioré pour qu’elle puisse déposer une plainte de pratique déloyale de travail contre son agent négociateur. Je note également que vers la fin du mois de janvier 2012, elle avait déposé une plainte auprès de la CCDP et aussi comparu devant un tribunal en lien avec sa poursuite en diffamation. Ces activités ont toutes eu lieu à peu près à la même époque, ce qui veut dire qu’elle aurait aussi bien pu renvoyer son grief à l’arbitrage.

28 L’autre raison avancée par Mme Brassard pour justifier son retard dans le renvoi de son grief à l’arbitrage était qu’elle avait besoin de conseils juridiques et qu’elle n’avait pas les moyens de se les offrir. Il ne s’agit pas là d’une raison claire, logique et convaincante pouvant justifier son retard. Tout d’abord, elle n’avait pas nécessairement besoin d’obtenir des conseils juridiques pour savoir comment remplir un formulaire pour renvoyer son grief à l’arbitrage. Ensuite, le délai ne peut pas systématiquement être prorogé au motif que les gens n’ont pas les moyens de se payer un avocat.

29 Mme Brassard a fait valoir qu’elle avait renvoyé son grief à l’arbitrage à peine quelques semaines après avoir obtenu des conseils juridiques. Le délai ne doit pas être calculé de cette façon. Le délai a commencé à courir à partir du jour suivant la date à laquelle Mme Brassard a reçu la décision de l’employeur au dernier palier de la procédure de règlement des griefs, et non à partir du moment où elle a rencontré pour la première fois M. Hameed à la fin de juillet ou au début du mois d’août 2012. Il s’agit d’un retard considérable. Et même après sa première rencontre avec M. Hameed, Mme Brassard n’a pas agi de manière diligente, attendant ensuite plusieurs autres semaines avant de renvoyer son grief à l’arbitrage. Selon son propre témoignage, elle avait déjà décidé vers le début du mois d’août 2012 qu’elle allait renvoyer son grief à l’arbitrage, mais ce n’est qu’en octobre 2012 qu’elle l’a fait effectivement.  

30 Pour terminer, je ne me puis me prononcer sur le grief de Mme Brassard sur le fond, n’ayant pas entendu la preuve à cet égard. Cela importe peu dans les circonstances. En l’absence de raisons claires, logiques et convaincantes justifiant le retard, je ne pourrais accorder une prorogation du délai au motif que le grief pourrait être fondé. Cela aurait pour effet de faire fi du Règlement selon lequel le renvoi d’un grief à l’arbitrage peut se faire au plus tard quarante jours après le jour où la personne qui a présenté le grief a reçu la décision rendue au dernier palier de la procédure applicable au grief. Il en va de même de l’appréciation de l’équilibre entre l’injustice causée à l’employé et le préjudice que subit l’employeur. En l’espèce, même si j’estimais que l’injustice causée à Mme Brassard en cas de rejet de la demande de prorogation l’emportait sur le préjudice subi par l’employeur au cas où la demande serait accueillie, je rejetterais malgré tout la demande car il n’y a pas de raison claire, logique et convaincante justifiant son retard.

31 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

32 La demande de prorogation du délai est rejetée.

33 Le grief dans le dossier de la CRTFP 566-02-7701 est clos.

Le 9 septembre 2013.

Traduction de la CRTFP

Renaud Paquet,
Vice-président

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