Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La fonctionnaire s’estimant lésée a déposé deux griefs portant sur les mesures disciplinaires imposées à son égard par le défendeur, en lien avec un incident qui s’était produit au travail - la fonctionnaire s’estimant lésée ne s’est pas présentée à l’audience et le défendeur a demandé que l’affaire soit rejetée - à l’audience, une imposante preuve a été établie devant l’arbitre de grief relativement à une altercation survenue entre la fonctionnaire s’estimant lésée et un gestionnaire correctionnel - l’arbitre de grief a observé que lors de l’audience tenue à l’interne du ministère visant à déterminer s’il y a avait lieu de prendre des mesures disciplinaires à l’égard de la fonctionnaire s’estimant lésée, cette dernière avait admis la véracité des allégations formulées contre elle et qu’elle avait manqué de respect envers le gestionnaire avec lequel elle avait eu l’altercation en cause - elle a également admis que certaines allégations qu’elle avait formulées n’étaient pas véridiques - de plus, elle n’avait pas manifesté quelque remords ni exprimé des excuses pour son comportement - la fonctionnaire s’estimant lésée s’est vue imposer une amende - l’arbitre de grief a conclu qu’il n’y avait pas lieu d’intervenir relativement à ces conclusions ni relativement à l’amende imposée à la fonctionnaire s’estimant lésée - l’arbitre de grief a de plus conclu que la fonctionnaire s’estimant lésée avait abandonné ses griefs - la fonctionnaire s’estimant lésée ne s’est pas présentée à l’audience - il a été clairement établi en preuve qu’elle était au courant de la tenue de l’audience - la fonctionnaire s’estimant lésée avait également été avisée que l’audience pouvait être tenue malgré son absence - l’arbitre de grief a conclu que les griefs devaient être rejetés - subsidiairement, elle a conclu que la fonctionnaire s’estimant lésée avait abandonné ses griefs. Griefs rejetés.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2013-09-25
  • Dossier:  566-02-6823 et 6824
  • Référence:  2013 CRTFP 119

Devant un arbitre de grief


ENTRE

LEANNE COOPER

fonctionnaire s'estimant lésée

et

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL
(Service correctionnel du Canada)

défendeur

Répertorié
Cooper c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada)

Affaire concernant des griefs individuels renvoyés à l’arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Margaret T.A. Shannon, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s'estimant lésée:
Personne

Pour le défendeur:
Christine Langill, avocate

Affaire entendue à Kingston (Ontario),
le 5 septembre 2013.
(Traduction de la CRTFP)

Griefs individuels renvoyés à l’arbitrage

1 Leanne Cooper, la fonctionnaire s’estimant lésée (la « fonctionnaire »), a déposé deux griefs concernant des mesures disciplinaires prises à son encontre par le Service correctionnel du Canada (le « défendeur ») à la suite d’un incident survenu le 8 septembre 2011. La fonctionnaire a cherché à faire annuler ces mesures et à être remise dans sa position antérieure.

Résumé de la preuve

2 Au début de l’audience, l’avocate du défendeur a cherché à faire rejeter les griefs qui m’ont été présentés au motif que la fonctionnaire les avait abandonnés. La fonctionnaire ne s’était pas présentée, et personne d’autre ne l’a fait en son nom, bien qu’elle ait reçu un avis d’audience (voir les pièces 2 à 7).

3 La fonctionnaire était employée à l’époque des faits comme agente correctionnelle (CX-01) à l’Établissement de Warkworth, un établissement à sécurité moyenne situé à Campbellford en Ontario. L’avocate du défendeur a présenté sa preuve par l’intermédiaire de trois témoins, laquelle preuve a établi que la fonctionnaire avait été impliquée dans une altercation avec le gestionnaire correctionnel Thomas Rittwage alors qu’il était en train d’exécuter un ordre donné par la sous-directrice Christine Cairns de retirer une distributrice de boissons qui avait été installée dans l’établissement sans autorisation préalable du poste de contrôle principal, où travaillait la fonctionnaire. Comme cette dernière était contre le retrait de la machine, elle s’est faite bruyante et injurieuse, proférant des insultes contre M. Rittwage et criant contre lui. À un moment donné, elle a poussé M. Rittwage en essayant de sortir par la porte devant lui.

4 Le gestionnaire correctionnel Doran Grayson, le gestionnaire correctionnel John Farrow, l’agent correctionnel Schmael (également classé CX-01) et cinq autres membres du personnel qui travaillaient pour l’équipe chargée de l’alimentation ont été témoins de l’incident. Des déclarations écrites et des rapports d’observation ont été produits en preuve comme pièce 1, onglets 15 à 19. Tous les documents donnent une description du comportement de la fonctionnaire ce jour-là qui concorde avec le témoignage des trois employés témoins. Des détenus qui étaient ramenés du service de déjeuner vers leur cellule ont également été témoins de la scène. À la suite de l’incident, la fonctionnaire a déposé une plainte contre M. Rittwage, alléguant qu’il l’avait touchée au cours de l’échange (voir la pièce 1, onglet 12). Rien dans les déclarations transmises par les témoins ne corrobore les allégations de la fonctionnaire, puisqu’elles s’accordent toutes sur le fait que la fonctionnaire était la seule à avoir provoqué cette scène et à s’être mal conduite sur le lieu de travail.

5 Une audience disciplinaire a eu lieu le 4 octobre 2011. Les notes de la réunion se trouvent à l’onglet 11 de la pièce 1. Lors de la réunion, la fonctionnaire a admis que les allégations à son encontre étaient vraies, qu’elle avait manqué de respect à M. Rittwage et que les allégations figurant dans sa déclaration n’étaient pas véridiques (pièce 1, onglet 12). Elle n’a exprimé aucun regret, ni ne s’est excusée de sa conduite.

6 Tim Gunter était le gestionnaire de la fonctionnaire. C’est lui qui a pris l’initiative de l’audience disciplinaire à la suite des rapports sur l’inconduite de la fonctionnaire sur le lieu de travail. Il a témoigné qu’à la suite de l’audience disciplinaire, il a examiné toutes les déclarations et tous les rapports d’observation, y compris la déclaration de la fonctionnaire. Il en a conclu qu’elle avait enfreint le Code de discipline, lequel expose clairement qu’un comportement violent ou irrespectueux ainsi que le fait de se battre avec d’autres employés constituent une infraction, et les Règles de conduite professionnelle au Service correctionnel du Canada, lesquelles exigent des employés qu’ils suivent les directives données par leur superviseur ou tout autre membre du personnel chargé du lieu de travail avec professionnalisme et courtoisie.

7 Arrivé à la conclusion que la fonctionnaire avait enfreint le Code de discipline et les Règles de conduite professionnelle au Service correctionnel du Canada, M. Gunter a examiné ses états de service et son dossier disciplinaire, puis, conformément à la partie III de l’Entente globale entre le Syndicat des agents correctionnels du Canada et le Service correctionnel du Canada (UCCO-SACC-CSN) (l’« Entente globale »), il a évalué la sanction pécuniaire à 160,00 $ pour une première infraction disciplinaire. Quoi qu’il en soit, M. Gunter était d’avis qu’une sanction plus sévère était justifiée dans les circonstances, mais comme il n’avait aucune marge de manœuvre, il a imposé la sanction prévue dans l’Entente globale.

8 Comme la fonctionnaire n’a pas comparu à l’audience et qu’elle n’a envoyé personne comparaître en son nom, aucune preuve n’a été présentée pour appuyer ses griefs ni contredire les preuves que le défendeur m’a soumises.

Résumé de l’argumentation

9 À l’appui de la requête du défendeur tendant à ce que les griefs soient jugés abandonnés, l’avocate du défendeur m’a renvoyée à deux décisions : Howitt c. Administrateur général (Agence canadienne d’inspection des aliments), 2013 CRTFP 51, et Tshibangu c. Administrateur général (Agence canadienne d’inspection des aliments), 2011 CRTFP 143. Dans les deux cas, les fonctionnaires s’estimant lésés n’ont pas comparu, bien qu’ils aient participé tout au long de la mise au rôle.

10 Compte tenu de l’abondance de la preuve établissant que la fonctionnaire était au courant de l’audience et qu’elle a été informée que l’instruction de l’audience pourrait se dérouler en son absence, le défaut de comparution de la fonctionnaire conduit à une seule conclusion : elle a abandonné ses griefs.

11 Quant à la question du caractère approprié de la mesure disciplinaire, la fonctionnaire a admis sa culpabilité lors de l’audience disciplinaire et n’a exprimé aucun regret ni remord. Elle ne s’est pas excusée, ni n’a exprimé de regret pour sa conduite. La mesure disciplinaire imposée respectait l’Entente globale pour une première infraction disciplinaire et était raisonnable compte tenu des circonstances. Un arbitre de grief ne devrait pas s’occuper de mesures disciplinaires qui sont raisonnables et qui ont été imposées pour des motifs justes (voir Yarney c. Administrateur général (ministère de la Santé), 2011 CRTFP 112, et Hogarth c. Conseil du Trésor (Approvisionnement et services), dossier de la CRTFP 166-02-15583 (19870331)).

12 Les griefs devraient être rejetés car ils ont été abandonnés. À titre subsidiaire, ils devraient être rejetés au motif que la mesure disciplinaire était raisonnable dans les circonstances.

Motifs

13 Je suis convaincue d’après les éléments de preuve dont je dispose que le défendeur a démontré à première vue sa prétention que la mesure disciplinaire était justifiée dans les circonstances. La mesure disciplinaire imposée respecte l’Entente globale entre les parties, et je ne vois aucune raison d’intervenir. Dans Hogarth, l’arbitre de grief définit comme suit, à la page 6, les cas où un arbitre de grief devrait intervenir lorsqu’il s’agit de mesures disciplinaires :

[…]

J’approuve […] comme quoi un arbitre ne doit mitiger une mesure disciplinaire que lorsque celle-ci est manifestement déraisonnable ou erronée. Selon moi, l’arbitre ne doit pas intervenir même s’il estime qu’une peine légèrement moins sévère aurait été suffisante. Il est évident que la détermination d’une mesure disciplinaire appropriée est un art et non une science. […]

14 Je ne crois pas qu’une sanction moins sévère aurait convenu dans le présent cas. La sanction du défendeur est maintenue.

15 Quant à la question de savoir si les griefs ont été abandonnés, je pense que l’absence de communication de la fonctionnaire avec les Opérations du greffe de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») et le défendeur, comme le montrent les pièces 2 à 7 incluses, en plus du fait qu’elle ne s’est pas présentée à l’audience et qu’elle n’a pas non plus envoyé de représentant à sa place, sont des motifs suffisants pour constituer un abandon des griefs. L’arbitre de grief a statué sur une situation similaire au paragraphe 17 de Tshibangu et a affirmé que « […] malgré les efforts de la Commission pour communiquer avec lui, le fonctionnaire n’a fait aucune tentative pour communiquer avec la Commission. Cela démontre qu’il n’a aucun intérêt dans la résolution de son grief ». Il y va également de l’intérêt public général qu’une administration efficace de la justice favorise le règlement de différends, évite des retards inutiles et soit respectée par les parties. De la même façon que dans Howitt, cet aspect entre en jeu ici. (Voir Howitt au paragr. 16.)

16 J’ai décidé par conséquent que les griefs devaient être rejetés. À titre subsidiaire, la fonctionnaire a abandonné ses griefs.

17 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

18 Les griefs sont rejetés.

Le 25 septembre 2013.

Traduction de la CRTFP

Margaret T.A. Shannon,
arbitre de grief

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