Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Les fonctionnaires s'estimant lésés ont demandé le versement des indemnités de repas pris pendant les heures supplémentaires travaillées lors d’essais en mer, en vertu de la clause 25.05 de la convention collective - l’employeur a rejeté la demande de remboursement en affirmant qu’à l’occasion d’essais en mer, les fonctionnaires avaient droit à une indemnité en vertu des dispositions de l’article 32 de la convention collective sur l’indemnité d’essais en mer, à l’exclusion des dispositions sur les heures supplémentaires - il a également fait valoir que la clause invoquée par les fonctionnaires s’estimant lésés pour réclamer ces indemnités de repas ne prévoyait que le remboursement des frais de repas et que, puisque les repas leur étaient fournis gratuitement par l’employeur pendant leur séjour à bord du navire, ils n’avaient donc pas droit à un tel remboursement - le syndicat s’est opposé au deuxième motif invoqué par l’employeur, soutenant qu’il s’agissait d’un nouveau motif qui n’avait pas été invoqué durant la procédure de règlement des griefs - l’arbitre de grief a conclu que le nouvel argument ne changeait en rien les motifs invoqués au soutien des griefs - les parties ont le droit de préciser et de peaufiner leurs arguments respectifs, et cela ne constitue pas un changement à la nature d’un grief - l’employeur n’est pas préclus d’invoquer cet argument - l’arbitre de grief a conclu que l’emploi de <<remboursé-e [&hellip;] au titre des frais>> démontrait que le paiement devait être fait en contrepartie d’une dépense - l’arbitre de grief a également conclu que le paiement des repas constituait une <<rémunération>>, une situation régie par l’article 32 de la convention collective. Les griefs sont rejetés.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2013-02-08
  • Dossier:  566-02-2731, 2732, 3366, 3367, et 5949
  • Référence:  2013 CRTFP 12

Devant un arbitre de grief


ENTRE

HILARY GILL ET MARC BOURQUE

fonctionnaire s'estimant lésés

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(ministère de la Défense nationale)

employeur

Répertorié
Gill et Bourque c. Conseil du Trésor
(ministère de la Défense nationale)

Affaire concernant des griefs renvoyés à l'arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
William H. Kydd, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s'estimant lésés:
James L. Shields, avocat

Pour l'employeur:
Joshua Alcock, avocat

Décision rendue sur la base d'arguments écrits
déposés le 22 novembre, le 23 décembre 2011 et le 9 janvier 2012.
(Traduction de la CRTFP)

I. Introduction

1   Les griefs en l'espèce portent sur l'interprétation du paragraphe 25.05 et de l'article 32 de la convention collective conclue entre la Fraternité internationale des ouvriers en électricité, section locale 2228 (le « syndicat ») et le Conseil du Trésor (l'« employeur ») pour le groupe Électronique, qui est expiré depuis le 31 août 2010 (la « convention collective »).

2 Hilary Gill et Marc Bourque, les fonctionnaires s'estimant lésés (les « fonctionnaires »), ont demandé une indemnité de repas pour les heures supplémentaires effectuées à l'occasion d'essais en mer conformément à la disposition sur les heures supplémentaires de la convention collective. L'employeur a refusé la demande de rémunération au motif que, lors des essais en mer, les fonctionnaires sont rémunérés selon les dispositions sur l'indemnité d'essais en mer de la convention collective, à l'exclusion des dispositions sur les heures supplémentaires.

3 À la place de l'audience, les parties ont produit un exposé conjoint des faits accompagné de pièces justificatives, ainsi que des arguments écrits. Les arguments écrits des fonctionnaires ont été suivis par la réfutation de l'employeur. Les fonctionnaires ont ensuite présenté une contre-preuve dans laquelle ils se sont opposés à l'argument de l'employeur voulant que le paragraphe 25.05 de la convention collective ne permettait pas le versement de l'indemnité qu'ils demandaient parce qu'il ne faisait mention que de remboursement. Les fonctionnaires ont allégué qu'il s'agissait d'une tentative d'introduction d'un nouveau motif qui n'avait pas été mentionné aux divers paliers de la procédure de règlement des griefs. Ils ont ajouté que l'employeur avait dès le début concédé que le paragraphe 25.05 prévoyait le versement d'une indemnité. Dans leurs arguments écrits, les fonctionnaires ont mentionné les répliques aux différents paliers de la procédure de règlement des griefs. L'exposé conjoint des faits est reproduit ci-après, avec des extraits des pièces justificatives. J'ai inclus des extraits des réfutations de l'employeur en raison de la question soulevée dans la contre-preuve des fonctionnaires.

II. Résumé de la preuve

 A. Exposé conjoint des faits

4 Les fonctionnaires sont des technologues en électronique, membres du syndicat et employés du ministère de la Défense nationale. Ils travaillent à l'Installation de maintenance de la flotte de Cape Scott. Lors de la présentation des griefs, les fonctionnaires étaient des employés classifiés au groupe et niveau EL-06. Par conséquent, la convention collective s'applique aux griefs. Les fonctionnaires ont demandé une indemnité de repas pour les heures supplémentaires effectuées à l'occasion d'essais en mer, et ont demandé que ces heures supplémentaires soient rémunérées conformément au paragraphe 25.05 (« Heures supplémentaires ») de la convention collective. L'employeur a refusé de verser l'indemnité de repas, soutenant que les fonctionnaires avaient droit à l'indemnité prévue à l'article 32 de la convention collective (« Indemnité d'essais en mer »), et non à celle prévue au paragraphe 25.05. Les dispositions pertinentes de la convention collective se lisent comme suit :

Article 25 (Heures supplémentaires)

25.01 L'employé-e est rémunéré-e au taux de rémunération horaire normal pour tout travail exécuté au cours de son horaire de travail normal et pour tout travail exécuté durant l'horaire de travail normal qui occupe moins de deux (2) heures de la dernière partie d'un jour désigné comme jour férié ou pas plus de deux (2) heures de la dernière partie d'un deuxième jour de repos et pas plus de deux (2) heures du début du jour qui suit.

25.02 Chaque période de six (6) minutes de travail supplémentaire est rémunérée aux taux suivants :

a. tarif et demi (1 1/2) pour chaque heure de travail effectuée autre que les heures indiquées au paragraphe 25.01;

b. nonobstant le paragraphe 25.01, tarif double pour chaque heure de travail effectuée en excédent de douze (12) heures au cours d'une période de travail continue ou en excédent de douze (12) heures de travail dans une journée. La présente section ne s'applique pas à l'article 27 « Déplacement », sauf selon les dispositions précises de l'article 27 ;

c.une pause autorisée d'une durée maximale d'une (1) heure n'est pas considérée comme brisant la continuité des heures de travail effectuées qui appellent l'application de l'alinéa 25.02b).

25.03 « Tarif et demi » désigne une fois et demie (1 1/2) le taux de rémunération horaire normal.

25.04 « Tarif double » désigne deux (2) fois le taux de rémunération horaire normal.

25.05 Sauf dans le cas des employé-e-s du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international qui occupent un poste à l'étranger où les conditions locales courantes de remboursement des repas s'appliquent toujours, les employé-e-s qui effectuent des heures supplémentaires bénéficient de pauses-repas et sont remboursé-e-s au titre des repas de la façon suivante :

a. l'employé-e qui effectue trois (3) heures supplémentaires ou plus juste avant ses heures de travail d'horaire bénéficie d'une pause-repas payée d'une durée maximale d'une demi-heure (1/2) et est remboursé-e de dix dollars cinquante (10,50 $) au titre des frais que lui occasionne un repas;

b. l'employé-e qui effectue trois (3) heures supplémentaires ou plus juste après ses heures de travail d'horaire bénéficie d'une pause-repas payée d'une durée maximale d'une demi-heure (1/2) et est remboursé-e de dix dollars cinquante (10,50 $) au titre des frais que lui occasionne un repas;

c. pour chaque période de quatre (4) heures sans interruption prolongeant la période décrite aux sous-paragraphes a) ou b) ci-dessus, l'employé-e bénéficie d'une pause-repas payée d'une durée maximale d'une demi-heure (1/2) et est remboursé-e au tarif de dix dollars cinquante (10,50 $) pour chaque repas;

d. lorsque, la demande de l'employé-e, une période de repas de plus d'une demi-heure (1/2) peut être accordée et prise avant le commencement du travail supplémentaire, une telle période est du temps non payé et les frais du repas ne sont pas remboursés. L'utilisation de ce choix n'autorise pas à refuser à l'employé-e ce qui lui revient en vertu de l'alinéa c) ci-dessus.

25.06

a. Si avant de quitter son travail, l'employé-e est averti-e qu'il ou elle doit effectuer des heures supplémentaires qui ne sont pas accolées à sa période de travail et que la période d'heures supplémentaires non accolée commence vingt-quatre (24) heures ou moins après la fin de la période de travail où il ou elle est averti-e, l'employé-e est rémunéré-e pour le temps de travail effectif au taux des heures supplémentaires applicable ou il ou elle touche une rémunération minimale de trois (3) heures au taux des heures normales en prenant le plus élevé des deux montants.

b. Si l'employé-e est informé-e, soit en étant mis-e à l'horaire par écrit ou autrement avant de quitter son travail, qu'il ou elle doit effectuer des heures supplémentaires qui ne sont pas accolées à sa période de travail et que la période d'heures supplémentaires non accolée commence plus de vingt-quatre (24) heures après la fin de la période de travail où il ou elle est averti, il ou elle est rémunéré-e pour le temps de travail effectif au taux des heures supplémentaires applicable ou il touche une rémunération minimale d'une (1) heure au taux des heures normales, en prenant le plus élevé des deux montants. Cependant, si l'employé-e est requis de se rapporter au travail plus d'une fois au cours de cette période il ou elle doit être rémunéré-e selon l'alinéa a) ci-dessus.

25.07

a. Lorsque l'employé-e est tenu-e d'effectuer du travail supplémentaire accolé ou non et qu'il ou elle est tenu-e d'utiliser un moyen de transport autre que le transport en commun normal, les frais de transport auxquels il ou elle a droit sont ceux prévus dans la politique concernant les voyages.

b. Sauf lorsque l'Employeur astreint l'employé-e à utiliser un véhicule de l'Employeur pour se rendre à un lieu de travail autre que son lieu de travail normal, le temps que l'employé-e passe pour se présenter au travail ou pour retourner chez lui ou chez elle n'est pas tenu pour du temps passé au travail.

25.08

a. Lorsque les nécessités du service le permettent, les heures supplémentaires d'un-e employé-e affecté-e à un travail qui s'accomplit dans un endroit éloigné de son lieu d'affectation permanent ou à bord d'un vaisseau peuvent s'accumuler en crédits de congé compensatoire calculés au taux approprié des heures supplémentaires au lieu d'une rémunération d'heures supplémentaires. Ces congés sont pris à un moment acceptable par les deux parties.

b. À la demande de l'employé-e et avec l'approbation de l'Employeur, tout congé compensatoire pour les heures supplémentaires acquises en vertu de l'alinéa 25.08a) qui ne peut être pris d'ici la fin de l'année financière est versé en espèces selon le taux de rémunération de l'employé-e, en date du 31 mars.

c. Les heures supplémentaires effectuées dans la région du lieu d'affectation de l'employé-e ou effectuées à l'extérieur de cette région de l'employé-e sans l'obliger à y rester la nuit seront rémunérées en argent; cependant, à la demande de l'employé-e et avec l'approbation de l'Employeur, l'employé-e peut bénéficier d'un congé compensatoire calculé au taux approprié des heures supplémentaires.

d. Lorsque le congé compensatoire acquis conformément à l'alinéa 25.08c) ne peut pas être pris avant la fin de l'année financière, il est rémunéré en argent au taux de rémunération de l'employé-e en vigueur le 31 mars.

25.09 L'Employeur fait tout effort raisonnable pour :

a. répartir les heures supplémentaires de travail sur une base équitable parmi les employé-e-s qualifié-es facilement disponibles;

b. donner aux employé-e-s, qui sont obligé-e-s de travailler des heures supplémentaires, un préavis suffisant de cette obligation;

c. à moins d'une entente contraire entre les représentants de la direction et ceux de la section syndicale locale, la période de répartition des heures supplémentaires sur une base équitable dont il est question à l'alinéa a) ci-dessus est une période de douze (12) mois déterminée par l'Employeur.

25.10 Lorsque l'employé-e affecté à un travail à bord d'un navire effectue des heures supplémentaires qui ne sont pas accolées aux heures de travail prévues normalement à son horaire, il ou elle touche le plus élevé des montants suivants :

a. la rémunération pour les heures effectuées au tarif des heures supplémentaires applicable,

ou

b. une heure de rémunération au tarif des heures normales.

[…]

Article 32

Indemnité d'essais en mer

32.01

a. Lorsque l'employé-e est tenu-e d'être à bord d'un sous-marin pendant des essais dans les conditions suivantes :

i. il ou elle est dans un sous-marin fermé qui est amarré à un quai ou dans un port, en surface ou submergé, c'est-à-dire lorsque la coque pressurisée est fermée hermétiquement et subit des essais tels que les essais à vide, les essais sous haute pression, les essais avec schnorchel, les essais de ventilation de la batterie ou les autres essais déjà reconnus, ou le sous-marin est gréé pour plonger;

ou

ii. il ou elle est à bord d'un sous-marin lorsque celui-ci évolue en surface ou est submergé en dehors des limites d'un port;

ou

b. lorsque l'employé-e est tenu-e de se rendre en mer en dehors des limites d'un port à bord d'un vaisseau de guerre canadien, d'un bâtiment auxiliaire ou d'un bâtiment de port afin d'effectuer des essais, de réparer des défauts ou de déverser des munitions;

ou

c. lorsque l'employé-e est tenu-e d'exécuter, dans un lieu de travail sur terre, des travaux visant à appuyer directement un essai en mer;

il ou elle est rémunéré-e conformément au paragraphe 32.03.

32.02 Le paragraphe 23.13 (Dérogation) s'applique uniquement à partir du moment où prend fin l'essai en mer.

32.03

a. L'employé-e est rémunéré-e au taux des heures normales pour toutes les heures prévues à son horaire de travail et pour toutes les heures non travaillées à bord du navire ou au lieu de travail sur terre.

b. L'employé-e touche une fois et demie (1 1/2) son taux horaire normal pour toutes les heures travaillées en sus de son horaire normal de travail jusqu'à ce qu'il ou elle ait travaillé douze (12) heures.

c. Après cette période de travail, l'employé-e touche le double (2) de son taux horaire normal pour toutes les heures effectuées en sus de douze (12) heures.

d. Après cette période de travail, l'employé-e touche trois (3) fois son taux horaire normal pour toutes les heures effectuées en sus de seize (16) heures.

e. L'employé-e qui a droit au taux triple (3) prévu à l'alinéa d) précédent continue d'être rémunéré-e à ce taux pour toutes les heures travaillées jusqu'à ce qu'il se voit accorder une période de repos d'au moins dix (10) heures consécutives.

f. À son retour de l'essai en mer, l'employé-e ayant droit à la rémunération prévue à l'alinéa 32.03d) n'est pas tenu-e de se présenter au travail pour son poste d'horaire normal tant qu'une période de dix (10) heures ne s'est pas écoulée depuis la fin de la période de travail qui a dépassé quinze (15) heures.

32.04 En outre, l'employé-e touche une indemnité d'essai de sous-marin équivalant à vingt-cinq pour cent (25 %) de son taux horaire de base pour chaque demi-heure (1/2) pendant laquelle il ou elle est tenu-e d'être présent-e dans un sous-marin pendant les essais, selon les conditions stipulées au à l'alinéa 32.01a).

5   Les essais en mer comportent l'essai d'équipement électronique à bord de sous-marins et de navires. Les technologues mettent à l'essai l'équipement électronique des navires pour veiller à ce qu'il fonctionne correctement. La nature du travail exige la collecte continue de données. Afin de maximiser l'efficacité des essais, cette collecte ne doit pas être interrompue.

6 Les parties ont convenu de regrouper les audiences des griefs. La Commission des relations de travail dans la fonction publique a fixé le début de l'audience au 25 octobre 2011. Toutefois, aucune audience n'a eu lieu, étant donné que les parties ont accepté de procéder en présentant un exposé conjoint des faits et des arguments écrits.

1. Griefs présentés par Mme Gill

a. Dossier de la CRTFP 566-02-2731 [Grief du syndicat no 08-0000000261]

7 Pendant toutes les périodes pertinentes, Mme Gill occupait un poste classifié au groupe et niveau EL-06 au ministère de la Défense nationale. Elle a été affectée à un essai en mer du 18 au 20 mars 2008. Durant cet essai, elle a travaillé des heures supplémentaires de 19 h à 21 h, le 18 mars 2008; de 23 h, le 18 mars 2008, à 7 h, le 19 mars 2008; de 23 h, le 19 mars 2008, à 7 h, le 20 mars 2008; et de 15 h 50 à 19 h 30, le 20 mars 2008.

8 Dans l'exercice de ses fonctions sur le NCSM Ville de Québec de 23 h, le 18 mars 2008, à 12 h, le 19 mars 2008, et de 23 h, le 19 mars 2008, à 12 h, le 20 mars 2008, Mme Gill a dû travailler de 23 h à 12 h pour les nécessités du service. La cuisine du poste d'équipage était fermée et ne servait aucun repas lorsque Mme Gill s'y est rendue pour manger. Mme Gill a présenté cinq demandes d'indemnité de repas conformément au paragraphe 25.05 de la convention collective; l'employeur a rejeté ces demandes.

9 Selon l'employeur, lorsque les repas ne peuvent pas être pris durant les heures normales de repas, les employés peuvent prendre d'autres dispositions pour que leurs repas soient mis de côté. Selon l'employeur, Mme Gill n'a pas pris de tels arrangements. Mme Gill allègue qu'elle n'avait pas été mise au courant de cette possibilité.

10   En conséquence, Mme Gill a déposé un grief dans lequel elle a demandé qu'on lui verse des indemnités de repas pour les heures supplémentaires qu'elle a effectuées à l'occasion des essais en mer, conformément au paragraphe 25.05 de la convention collective.

11 La pièce 2 est le grief que Mme Gill a déposé le 29 avril 2008. La pièce 3 est la réponse de l'employeur au premier palier de la procédure de règlement des griefs ainsi que sa réponse modifiée, datées respectivement du 19 juin 2008 et du 15 juillet 2008. La pièce 4 est la réponse de l'employeur au deuxième palier, datée du 17 juillet 2008. La pièce 5 est la réponse de l'employeur au dernier palier, datée du 29 décembre 2008.

12 La section « Énoncé du grief » de la pièce 2 se lit comme suit :

[Traduction]

J'étais de service à bord du NCSM Ville De Québec en mer du 18 au 20 mars 2008. Comme je travaillais de 23 h jusqu'au lendemain à 12 h, lors de deux de ces journées, je n'ai pas été en mesure de prendre mon repas durant les heures normales de repas à cause de mes heures de travail. Après mon réveil et environ 3 ou 4 heures après le début de mon quart de travail, je me suis rendue au poste d'équipage pour manger, mais la cuisine était fermée et ne servait plus de repas. À mon retour de l'essai en mer, j'ai présenté deux demandes d'indemnité de repas pour chacune des deux nuits, conformément aux paragraphes 25.05a) et 25.05b) de la convention collective. Lorsque j'ai reçu mon chèque le 22 avril 2008 pour les heures supplémentaires travaillées, les indemnités de repas n'étaient pas incluses. Après avoir discuté avec le superviseur de ma section, j'ai été informée que la direction avait rejeté mes quatre demandes d'indemnité de repas.

[…]

13 La pièce 3, soit la réponse de l'employeur au premier palier de la procédure de règlement de griefs, dans sa forme modifiée, se lit en partie comme suit :

[Traduction]

Au cours de l'audience au premier palier de la procédure de règlement de griefs, vous avez affirmé que vous aviez choisi de travailler pendant vos pauses repas pour avancer dans votre travail et que vous n'avez pas cherché à savoir où vous pourriez obtenir de la nourriture lorsque vous vous êtes rendue au poste d'équipage, qui était fermé. Vous n'avez demandé aucun renseignement la seconde fois. Bien qu'il incombe au coordonnateur des essais de s'assurer que les employés sont au courant de toutes les dispositions relatives aux essais, y compris les repas, il incombe aussi aux employés de poser des questions au coordonnateur et au personnel du poste d'équipage concernant les dispositions possibles pour les repas qu'ils ne peuvent pas prendre durant les heures d'ouverture du poste d'équipage. Cependant, la direction prendra des mesures pour que l'on rappelle aux coordonnateurs des essais qu'ils sont chargés de communiquer toute l'information nécessaire aux participants aux essais. Nous espérons que cela évitera tout problème concernant la disponibilité des repas lors des essais en mer.

Puisque les repas sont offerts « en tout temps » durant les essais en mer, il n'existe aucun droit distinct d'indemnité de repas conformément à l'article 25 de la convention collective et aux paragraphes 25.05a) et 25.05b) de cette même convention collective du groupe EL. Les employés qui effectuent des essais en mer sont rémunérés entièrement selon le paragraphe 32.03 de la convention collective du groupe EL – Indemnité d'essai en mer.

Par conséquent, nous rejetons votre grief et la mesure corrective que vous avez demandée ne sera pas prise.

[…]

14   La réponse de l'employeur au deuxième palier de la procédure de règlement de griefs (pièce 4) se lit comme suit :

[Traduction]

Au cours de l'audience de deuxième palier de la procédure de règlement de griefs qui s'est déroulée le 2 juillet 2008, Phil Johnson, votre représentant syndical de la FIOE, a demandé que l'énoncé de votre grief soit modifié comme suit :

Dans la partie « B » (du formulaire de votre grief original), remplacer « conformément à 25.05a) et 25.05b) » par « conformément à 25.05a), 25.05b) et 25.05c) » et

Que la partie « B » (du formulaire de votre grief original), soit modifiée comme suit : « le versement de 5 indemnités de repas ».

Ces changements ont été reconnus et convenus par toutes les parties présentes à l'audience du deuxième palier.

[…]

Même si le motif (éviter de faire plus d'heures supplémentaires) qui vous a amené à travailler pendant vos pauses repas à l'occasion des essais en mer était admirable, le fait est que lorsque vous êtes à bord d'un navire dans le cadre d'essais en mer, la nourriture est accessible « en tout temps ». Les dispositions relatives aux repas sont prises avec le coordonnateur des essais et le gérant du poste d'équipage, et communiqués aux employées qui participent aux essais. Comme il a été mentionné, il incombe au coordonnateur des essais de fournir de l'information claire et pertinente concernant les essais, y compris sur la façon dont les repas/la nourriture sont offerts, et de répondre aux demandes de renseignements des participants aux essais. Il semble, dans ce cas, qu'il y ait peut-être eu un manque de communication qui devra être corrigé afin d'éviter que le problème ne se reproduise.

Je vous assure que le bien-être de tous mes employés est très important, et que je prendrai les mesures nécessaires pour que les coordonnateurs des essais sachent qu'ils sont chargés de veiller à ce que les participants aux essais connaissent toutes les dispositions relatives à leur bien-être à bord d'un navire lorsqu'ils effectuent des essais. De plus, je suis ravi du dévouement et du professionnalisme dont vous avez fait preuve pour effectuer les essais en temps opportun.

Toutefois, selon l'information et les conseils qui m'ont été fournis, je conclus qu'étant donné que vous êtes indemnisée en vertu de l'article 32 « Indemnité d'essais en mer » pour la période en question, les paragraphes 25.05a), b) et c) ne s'appliquent pas.

Par conséquent, nous rejetons votre grief et la mesure corrective que vous avez demandée ne sera pas prise.

15   La réponse de l'employeur au dernier palier de la procédure de règlement de griefs (pièce 5) se lit en partie comme suit :

[Traduction]

La présente est la réponse au dernier palier de la procédure de règlement de griefs concernant votre grief au sujet de l'indemnité de repas au cours des essais en mer. J'ai attentivement examiné les circonstances de votre grief, y compris les observations présentées en votre nom par M. Wayne Morrison, de la Fraternité internationale des ouvriers en électricité. Je conclus que la décision de la direction de ne pas accorder les indemnités de repas à l'occasion des essais en mer est conforme aux articles applicables de votre convention collective. Plus précisément, je conclus que c'est bien l'article 32 qui s'applique à cette situation, et non l'article 25.

Par conséquent, nous rejetons votre grief et la mesure corrective que vous avez demandée ne sera pas prise.

(b) Dossier de la CRTFP 566-02-3366 [Grief du syndicat no 08-0000000467]

16   Mme Gill était affectée à un essai en mer du 21 au 23 juillet 2008. Durant cet essai, elle a travaillé des heures supplémentaires de 15 h 30, le 21 juillet 2008, à 0 h 30, le 22 juillet 2008, et de 15 h 30 à 21 h, le 22 juillet 2008.

17 Mme Gill a exercé ses fonctions sans arrêt à bord du NCSM Montréal de 11 h 30, le 21 juillet 2008, à 0 h 30, le 22 juillet 2008; de 11 h 30 à 21 h, le 22 juillet 2008; et de 7 h 30 à 15 h 30, le 23 juillet 2008. Mme Gill a présenté trois demandes d'indemnité de repas conformément au paragraphe 25.05 de la convention collective, demandes que l'employeur a rejetées.

18 En conséquence, Mme Gill a présenté un grief dans lequel elle a demandé qu'on lui verse des indemnités de repas pour les heures supplémentaires qu'elle a effectuées à l'occasion des essais en mer, conformément au paragraphe 25.05 de la convention collective.

19 Lors des essais en mer de la période en question, l'employeur a fourni à ses propres frais tous les repas de Mme Gill.

20 La pièce 6 est le grief de Mme Gill daté du 29 juillet 2008. La pièce 7 est la réponse de l'employeur au premier palier de la procédure de règlement des griefs, datée du 13 novembre 2008. La pièce 8 est la réponse de l'employeur au dernier palier, datée du 2 décembre 2009.

21 L'« Énoncé du grief » de la pièce 6 se lit en partie comme suit :

[Traduction]

J'exerçais mes fonctions à bord du NCSM Montréal en mer du 21 au 23 juillet 2008. Lors de la première journée, j'ai réalisé des essais de 11 h 30 à 0 h 30, et lors de la deuxième journée, de 11 h 30 à 21 h. À mon retour des essais en mer, j'ai présenté deux demandes d'indemnité de repas pour la première journée et une demande d'indemnité de repas pour la deuxième journée conformément aux paragraphes 25.05b) et c). Le superviseur de ma section a rejeté ces demandes d'indemnité de repas.

22   La réponse de l'employeur au premier palier de la procédure de règlement de griefs (pièce 7) se lit en partie comme suit :

[Traduction]

Bien que je sois ravi du professionnalisme dont vous avez fait preuve pour effectuer les essais en temps opportun et que je reconnaisse que le bien-être de mes employés concernant les repas/la nourriture doit être mieux communiqué au personnel du navire, je conclus que puisque vous être indemnisée conformément à l'article 32 (Indemnité d'essais en mer) pour la période en question, les dispositions des paragraphes 25.05 b) et c) ne s'appliquent pas.

Par conséquent, nous rejetons votre grief et la mesure corrective que vous avez demandée ne sera pas prise.

[…]

23 La réponse de l'employeur au dernier palier de la procédure de règlement de griefs datée du 2 décembre 2009 (pièce 8) est intitulée [traduction] « Re : Griefs no 08-0000000467 et 698 » et se lit en partie comme suit :

[Traduction]

Je conclus que la décision de la direction de ne pas accorder d'indemnités de repas à l'occasion des essais en mer est conforme aux articles applicables de votre convention collective. Plus précisément, je conclus que c'est bien l'article 32 qui s'applique à cette situation, et non l'article 25.

(iii) 566-02-5949 [Grief no 08-0000000698]

24 Mme Gill était affectée à un essai en mer du 14 au 16 octobre 2008. Durant cet essai, Mme Gill a travaillé des heures supplémentaires de minuit à 7 h 30, le 15 octobre 2008, et de minuit à 7 h 30, le 16 octobre 2008.

25 Mme Gill a exercé ses fonctions sans arrêt à bord du NCSM Fredericton de 7 h 30 à 15 h 30, le 14 octobre 2008; de minuit à 13 h, le 15 octobre 2008; et de minuit à 7 h 30, le 16 octobre 2008. Elle a présenté quatre demandes d'indemnité de repas conformément au paragraphe 25.05 de la convention collective, demandes que l'employeur a rejetées.

26 En conséquence, Mme Gill a présenté un grief dans lequel elle a demandé qu'on lui verse des indemnités de repas pour les heures supplémentaires qu'elle a effectuées à l'occasion des essais en mer, conformément au paragraphe 25.05 de la convention collective.

27 Lors des essais en mer de la période en question, l'employeur a fourni à ses propres frais tous les repas de Mme Gill.

28 La pièce 9 est le grief de Mme Gill daté du 21 octobre 2008. La pièce 10 est la réponse de l'employeur au premier palier de la procédure de règlement de griefs, datée du 13 novembre 2008. La pièce 11 est la réponse de l'employeur au deuxième palier, datée du 2 février 2009. La pièce 12 est la réponse de l'employeur au dernier palier, datée du 2 décembre 2009.

29 L'« Énoncé du grief » de la pièce 9 se lit comme suit :

[Traduction]

J'ai été lésée parce que la direction n'a pas respecté la convention collective de la FIOE. J'exerçais mes fonctions à bord du NCSM Fredericton en mer du 14 au 16 octobre 2008. Je réalisais des essais de 7 h 30 à 15 h 30, lors de la première journée, de minuit à 13 h, lors de la deuxième journée et de minuit à 7 h 30, lors de la troisième journée. À mon retour des essais en mer, j'ai présenté quatre demandes d'indemnité de repas, pour le 15 octobre à 3 h et à 7 h et pour le 16 octobre à 3 h et à 7 h, conformément aux paragraphes 25.05a) et c) de la convention collective. Selon mon syndicat, ces périodes sont indépendantes du fait qu'un repas est fourni ou non. Ces demandes d'indemnité de repas ont été rejetées dans le SISAM, puisque le superviseur de ma section a déterminé que mes demandes ne concordent pas avec les indemnités.

30   Les justifications de l'employeur dans sa réponse au premier palier de la procédure de règlement de griefs (pièce 10) sont les mêmes que celles contenues dans la pièce 7.

31 La réponse au deuxième palier de la procédure de règlement de griefs de l'employeur (pièce 11) se lit en partie comme suit :

[Traduction]

J'ai aussi pris en considération toute l'information que vous et vos représentants avez présentée lors de l'audience au deuxième palier. De plus, le 29 décembre 2008, nous avons reçu une décision au dernier palier de la part du directeur général des Relations de travail et de la rémunération traitant de la même question du droit aux indemnités de repas à l'occasion d'essais en mer et du versement de l'indemnité d'essais en mer. La décision précise : « Je conclus que la décision de la direction de ne pas accorder d'indemnités de repas à l'occasion d'essais en mer est conforme aux articles applicables de votre convention collective. Plus précisément, je conclus que c'est bien l'article 32 qui s'applique à cette situation, et non l'article 25. Le grief a été rejeté et les mesures correctives demandées ne seront pas prises. »

À la suite de cette récente décision et des conseils qui m'ont été donnés, je conclus que vous n'avez pas droit aux indemnités de repas conformément aux paragraphes 25.05a) et c) de la convention collective, étant donné que vous être indemnisée en vertu de l'article 32 (Indemnité d'essais en mer) pour la période en question.

Par conséquent, nous rejetons votre grief et la mesure corrective que vous avez demandée ne sera pas prise.

32   La pièce 12 annexée à l'exposé conjoint des faits s'intitule (« Re : Grief no 08-0000000698 »). Il s'agit d'une lettre datée du 2 décembre 2009 adressée à Mme Gill. Le début de la lettre indique qu'il s'agit d'une réponse à un grief concernant le paiement d'une indemnité de faux frais. Ainsi, il semble que la lettre ait été incluse comme pièce justificative par erreur. La bonne réponse au dernier palier du grief no 08-0000000698 figure dans la pièce 8.

2. Griefs déposés par M. Bourque

a. Dossier de la CRTFP 566-02-2732 [Grief du syndicat no 08-0000000287]

33 Pendant toutes les périodes pertinentes, M. Bourque occupait un poste classifié au groupe et niveau EL-06 au ministère de la Défense nationale. Il a été affecté à un essai en mer du 18 au 20 mars 2008. Durant cet essai, il a travaillé des heures supplémentaires de 19 h à minuit, le 18 mars 2008; de 15 h 50, le 19 mars 2008, à 0 h 30, le 20 mars 2008; et de 15 h 50 à 19 h 30, le 20 mars 2008.

34   Dans l'exercice de ses fonctions sur le NCSM Ville de Québec de 11 h à 15 h 50, le 18 mars 2008; de 19 h à minuit, le 18 mars 2008; de 11 h, le 19 mars 2008, à 0 h 30, le 20 mars 2008; et de 11 h à 19 h 30, le 20 mars 2008, M. Bourque a dû travailler pendant ses pauses repas du 18 et du 19 mars pour les nécessités du service. De plus, pendant tout le temps d'attente qu'il a fallu pour débarquer du navire, entièrement vêtu d'un dispositif de flottaison, de 16 h à 19 h 30, le 20 mars 2008, M. Bourque n'a pas pu participer au repas. M. Bourque a présenté trois demandes d'indemnité de repas conformément au paragraphe 25.05 de la convention collective, demandes que l'employeur a rejetées.

35   Comme dans le cas de Mme Gill, l'employeur a affirmé que lorsque les repas ne peuvent pas être consommés durant les heures normales de repas, les employés peuvent prendre d'autres dispositions pour que leurs repas soient mis de côté. L'employeur a aussi prétendu que M. Bourque n'avait pas pris de tels arrangements. M. Bourque allègue qu'il n'avait pas été mis au courant de cette possibilité.

36   En conséquence, M. Bourque a déposé un grief dans lequel il a demandé qu'on lui verse des indemnités de repas pour les heures supplémentaires qu'il a effectuées à l'occasion des essais en mer, conformément au paragraphe 25.05 de la convention collective.

37   La pièce 13 est le grief de M. Bourque, daté du 6 mai 2008. La pièce 14 est la réponse de l'employeur au premier palier de la procédure de règlement de griefs, datée du 19 juin 2008. La pièce 15 est la réponse de l'employeur au deuxième palier, datée du 17 juillet 2008. La pièce 16 est la réponse de l'employeur au dernier palier, datée du 29 décembre 2008.

38   L'« Énoncé du grief » de la pièce 13 se lit comme suit :

[Traduction]

J'étais de service à bord du NCSM Ville De Québec en mer du 18 au 20 mars 2008. Alors que je travaillais de 23 h à minuit, la nature de mon travail m'a contraint à continuer à travailler pendant la pause repas de 20 h durant deux de ces journées. Aussi, alors que j'attendais pour débarquer du navire entièrement vêtu d'un dispositif de flottaison, de 16 h à 19 30 le dernier jour, je n'ai pas pu participer au repas. À mon retour des essais en mer j'ai présenté trois demandes d'indemnité de repas, une pour chacune des deux nuits et une pour le souper du troisième jour, conformément aux paragraphes 25.05a) et 25.05b). Lorsque j'ai reçu mon chèque le 22 avril 2008 pour les heures supplémentaires travaillées, les indemnités de repas n'étaient pas incluses. Après avoir discuté avec le superviseur de ma section, j'ai été informé que la direction avait rejeté mes trois demandes d'indemnité de repas.

39   Les réponses de l'employeur au premier, deuxième et dernier palier de la procédure de règlement de griefs (pièces 14 à 16) sont les même que celles des pièces 3 à 5 respectivement.

b. Dossier de la CRTFP 566-02-3367 [Grief du syndicat no 08-0000000697]

40 M. Bourque était affecté à un essai en mer du 14 au 16 octobre 2008. Durant cet essai, il a travaillé des heures supplémentaires de 16 h, le 14 octobre 2008, à 0 h 30, le 15 octobre 2008; et de 16 h, le 15 octobre 2008, à 0 h 30, le 16 octobre 2008.

41 M. Bourque a exercé ses fonctions sans arrêt à bord du NCSM Fredericton de 8 h, le 14 octobre 2008, à 0 h 30, le 15 octobre 2008, et de 12 h, le 15 octobre 2008, à 0 h 30, le 16 octobre 2008. Il a présenté quatre demandes d'indemnité de repas conformément au paragraphe 25.05 de la convention collective, demandes que l'employeur a rejetées.

42 En conséquence, M. Bourque a déposé un grief dans lequel il a demandé qu'on lui verse des indemnités de repas pour les heures supplémentaires qu'il a effectuées à l'occasion des essais en mer, conformément au paragraphe 25.05 de la convention collective.

43 Lors des essais en mer de la période en question, l'employeur a fourni à ses propres frais tous les repas de M Bourque.

44 La pièce 17 est le grief de M. Bourque daté du 21 octobre 2008. La pièce 18 est la réponse de l'employeur au premier palier de la procédure de règlement de griefs, datée du 13 novembre 2008. La pièce 19 est la réponse de l'employeur au deuxième palier, datée du 2 février 2009. La pièce 20 est la réponse de l'employeur au dernier palier, datée du 2 décembre 2009.

45 L'« Énoncé du grief » de la pièce 17 se lit en partie comme suit :

[Traduction]

J'ai été lésé parce que mes demandes d'indemnité de repas ont été rejetées. Voici les détails de la situation. J'exerçais mes fonctions à bord du NCSM Fredericton en mer du 14 au 16 octobre 2008. Alors que je travaillais de 7 h 30 à minuit le 14 octobre et de 12 h à minuit le 15 octobre, mon travail m'a contraint à prendre mes pauses repas d'heures supplémentaires à 19 h et à 23 h 30 les 14 et 15 octobre; chaque pause repas a duré 30 minutes. Ces pauses repas sont rémunérées et, conformément aux paragraphes 25.05b) et 25.05c) de la convention collective, je devrais avoir droit à une indemnité de repas de 10,50 $. Selon mon syndicat, ces périodes sont indépendantes du fait qu'un repas est fourni ou non. À mon retour des essais en mer, j'ai présenté des demandes d'heures supplémentaires et d'indemnité de repas, une pour chaque occurrence (4 au total), conformément aux paragraphes 25.05b) et 25.05c). Ces demandes d'indemnité de repas ont été rejetées dans le SISAM, puisque le superviseur de ma section a déterminé que mes demandes ne concordaient pas avec les indemnités. On m'a indiqué qu'il fallait présenter une nouvelle demande pour mes heures supplémentaires, sans inclure l'indemnité de repas. J'ai pris note de tous les refus et j'ai présenté une nouvelle demande pour mes heures supplémentaires.

46   Les motifs de l'employeur contenus dans ses réponses au premier, au deuxième et au dernier palier de la procédure de règlement de griefs (pièces 18, 19 et 20) sont les mêmes que ceux contenus dans les pièces 10, 11 et 12 respectivement.

III. Résumé de l'argumentation

A. Pour les fonctionnaires s'estimant lésés

47 Le paragraphe 25.05 de la convention collective énonce en termes clairs l'intention réciproque des parties en ce qui a trait au paiement des pauses repas des employés qui font des heures supplémentaires. Le paragraphe 25.05, en raison de son caractère spécifique, l'emporte sur l'article 32, sur lequel s'est appuyé l'employeur.

48 Le paragraphe 25.05 de la convention collective indique que les frais occasionnés par les repas doivent être remboursés au tarif de 10,50 $ quand un employé effectue des heures supplémentaires immédiatement avant ou après ses heures de travail à l'horaire. Les pauses repas pris pendant les heures supplémentaires sont remboursées « [s]auf dans le cas des employé-e-s du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international qui occupent un poste à l'étranger où les conditions locales courantes de remboursement des repas s'appliquent toujours […]. »

49   Les parties ont clairement examiné les conditions et les exceptions précises qui régissent les heures supplémentaires énoncées au paragraphe 25.05 de la convention collective. Les essais en mer ne figurent pas parmi les exceptions.

50 L'article 32 énonce en termes clairs et sans équivoque l'intention réciproque des parties en ce qui a trait à la mise à l'horaire des essais en mer. Toutefois, il ne contient rien sur les pauses repas, payées ou non.

51 Durant l'horaire habituel, on aurait mentionné l'article 23 de la convention collective, plus précisément les paragraphes 23.04 et 23.05, qui prévoient une pause repas non payée d'au moins 30 minutes. En l'espèce, les fonctionnaires ont pris leurs pauses repas prévues non payées durant leurs heures de travail normales à l'occasion d'essais en mer, et l'employeur n'a pas prétendu qu'ils n'avaient pas droit à une pause repas non payée.

52 De même, le paragraphe 25.05 de la convention collective donne droit à une pause repas de 30 minutes durant les heures supplémentaires. Comme il a été noté, l'article 32 ne se prononce pas sur les pauses repas payées ou non payées.

53   Le fait que les dispositions d'une convention collective doivent être interprétées dans leur ensemble et que les dispositions particulières doivent être interprétées selon le contexte est un principe bien accepté. En ce qui a trait à l'interprétation, il existe aussi une présomption contre la redondance; on suppose que les parties n'ont pas accepté d'inclure des libellés superflus ou inutiles.

54 Les parties ont reconnu qu'il existe dans la convention collective des circonstances où le paragraphe 25.05 ne s'applique pas; elles ont indiqué de façon précise ces exceptions, tel qu'il a déjà été mentionné. La convention collective contient des directives claires concernant l'horaire des pauses repas payées et non payées que doit respecter l'employeur, sauf pour l'exception du paragraphe 25.05. Si les parties n'avaient pas voulu que le paragraphe 25.05 s'applique aux essais en mer, elles auraient invoqué une exception similaire à celle qui a été mentionnée précédemment.

55   Les paragraphes 23.05 et 25.05 de la convention collective ainsi que l'article 32 de la convention collective ont été rédigés de manière à se compléter afin de fournir des pauses repas non payées durant les heures de travail normales effectuées à l'occasion d'essais en mer, de même qu'une pause repas payée et une indemnité durant les heures supplémentaires.

56 Les fonctionnaires m'ont renvoyé à : Brown et Beatty, Canadian Labour Arbitration, 4e édition, paragraphes 4:2100, 4:2110 et 4:2120; Selkirk and St. Andrews Regional Library v. Canadian Union of Public Employees Union, Local 336 (2003), 119 L.A.C. (4e) 141, paragraphe 36; Foote c. Conseil du Trésor (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2009 CRTFP 142; Canada Post Corporation v. C.U.P.W. (2002), 70 C.L.A.S. 381, paragraphe 13; UAW, Local 439 v. Massey-Harris Company (1947), 1 L.A.C. 68.

B. Pour l'employeur

57 Le paragraphe 25.05 de la convention collective ne prévoit pas le versement d'une somme aux employés qui ont reçu un repas aux frais de l'employeur. Les paragraphes 25.05a) et b) soulignent qu'un employé qui effectue trois heures supplémentaires ou plus juste avant ou juste après ses heures de travail habituelles « [...] est remboursé-e au tarif de dix dollars cinquante (10,50 $) au titre des frais que lui occasionne un repas. » Les termes « remboursé » et « frais » ont une signification commune, soit celle de repayer une personne qui a dépensé de l'argent ou engagé des frais.

58   En l'espèce, les fonctionnaires ont reçu des repas aux frais de l'employeur. Ainsi, il est clair qu'ils n'ont pas droit au remboursement des frais de repas. Dans ce contexte, tout paiement versé aux fonctionnaires en vertu du paragraphe 25.05 de la convention collective serait une forme de rémunération additionnelle pour les heures supplémentaires effectuées, plutôt qu'un remboursement comme l'entend le libellé clair et simple de la convention collective.

59 Bien que, comme l'indiquent les griefs des dossiers de la CRTFP 566-02-2731 et 2732, les fonctionnaires n'ont malheureusement pas été en mesure de consommer les repas fournis par l'employeur durant leurs quarts d'heures supplémentaires, rien ne justifie que les fonctionnaires reçoivent un paiement en vertu du paragraphe 25.05 de la convention collective. Ils auraient pu prendre des dispositions pour que leurs repas soient mis de côté afin qu'ils les prennent plus tard, mais ils ne l'ont pas fait. De plus, lorsque les fonctionnaires n'ont pas été en mesure de consommer leurs repas au moment où ils étaient servis, ils n'ont engagé aucuns frais qui puissent être remboursés conformément au paragraphe 25.05. Bien que cela puisse sembler dur et injuste, on ne peut faire abstraction du libellé clair de la convention collective.

60   Subsidiairement, si l'on soutient que le paragraphe 25.05 de la convention collective autorise le versement d'un paiement lorsque le repas est offert gracieusement à un employé, l'article 32 prime l'article 25; par conséquent, aucun paiement ne doit être versé.

61 L'article 25 de la convention collective établit le cadre qui régit la rémunération des heures supplémentaires. Par exemple, les paragraphes 25.02 à 25.04 établissent les taux de rémunération des heures supplémentaires. Le paragraphe 25.05 prévoit un « remboursement ». Cela va à l'encontre de la déclaration des fonctionnaires selon laquelle ce paragraphe concerne une indemnité, c'est-à-dire un paiement versé peu importe si un repas est fourni ou non par l'employeur et peu importe si des frais sont engagés ou non.

62 Si une indemnité de repas doit être accordée peu importe si un repas est offert ou non, tel qu'il est allégué par les fonctionnaires, il est clair que le paiement est une forme de rémunération additionnelle, puisqu'il ne compense aucune dépense.

63 L'article 32 de la convention collective s'applique précisément aux employés qui effectuent des essais en mer, comme c'est le cas en l'espèce. L'article indique la façon dont les employés sont rémunérés dans le cadre d'un essai en mer. Plus précisément, il établit que lorsqu'un employé est tenu d'exécuter un essai en mer, « […] il ou elle est rémunéré-e conformément au paragraphe 32.03. »

64 Le paragraphe 32.03 de la convention collective explique la façon dont les employés sont rémunérés durant les périodes de repos, durant les heures prévues à l'horaire normal de travail et pour les heures supplémentaires. Ce paragraphe ne prévoit aucun paiement d'une quelconque indemnité de repas aux employés qui effectuent des heures supplémentaires.

65 Bien que l'article 32 de la convention collective définisse la rémunération qui doit être versée aux employés dans le cadre des essais en mer, il ne relate aucun versement au bénéfice des employés qui font des heures supplémentaires, en paiement de leurs repas. Par conséquent, il est clair que le paiement de ces repas ne fait pas partie de la rémunération globale prévue.

66 Dans ce contexte, il est logique qu'aucune référence ne soit faite aux indemnités de repas au cours des essais en mer. Puisque tous les repas sont offerts aux employés aux frais de l'employeur durant ces essais, il serait inhabituel de laisser entendre que les employés devraient tout de même recevoir une indemnité spéciale pour les repas lorsqu'ils font des heures supplémentaires dans cet environnement.

67 Si les fonctionnaires recevaient de l'argent pour des repas alors que ces repas sont offerts gracieusement, ils recevraient un avantage financier additionnel. Un avantage financier ne peut être accordé que lorsque le libellé est clair à ce sujet, et non de façon implicite.

68 L'employeur m'a renvoyé aux décisions suivantes : Chafe et al. c. Conseil du Trésor (ministère des Pêches et des Océans), 2010 CRTFP 112, paragraphe 51; Appleton et al. c. Conseil du Trésor (ministère de la Défense nationale), 2006 CRTFP 83, paragraphe 20; Lévesque c. Agence des douanes et du revenu du Canada, 2005 CRTFP 154, paragraphe 56; Tembec Industries Inc. v. Pulp, Paper and Woodworkers of Canada, Local 15, [2010] B.C.C.A.A.A. No. 168, paragraphe 31; Canadian Oxford Dictionary (2e édition); Procureur général du Canada c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada, 2010 CF 578, paragraphe 27.

C. Contre-interrogatoire des fonctionnaires

69   Après avoir reçu les demandes d'indemnité de repas des fonctionnaires, l'employeur a rejeté les demandes au motif que, les repas étant servis durant les essais en mer, aucun droit particulier aux indemnités de repas n'existe conformément au paragraphe 25.05 de la convention collective. Plus précisément, l'employeur a soutenu que seul l'article 32 de la convention collective s'appliquait dans les circonstances, à l'exclusion du paragraphe 25.05.

70   La question est de déterminer si les fonctionnaires ont droit à une indemnité en vertu du paragraphe 25.05 de la convention collective durant des essais en mer. Il ne s'agit pas de déterminer, comme le soutient l'employeur, si les employés ont droit au remboursement des frais lorsqu'un repas est offert par l'employeur durant un essai en mer.

71   En ce qui concerne l'argument de l'employeur selon lequel le paragraphe 25.05 de la convention collective utilise le terme « remboursement », chaque grief a demandé, à titre de mesure corrective, que les fonctionnaires reçoivent les indemnités de repas pour lesquels ils avaient précédemment soumis des demandes, que l'employeur a rejetées.

72   À tous les paliers de la procédure de règlement des griefs, et comme convenu par les parties dans l'exposé conjoint des faits, le paragraphe 25.05 de la convention collective a été traité comme une indemnité de repas que doit verser l'employeur durant les heures supplémentaires. Jusqu'à la soumission de ses arguments écrits, l'employeur a allégué que, dans le cadre d'essais en mer, seul l'article 32 pouvait s'appliquer, pas le paragraphe 25.05, comme l'indique le paragraphe 2 de l'Exposé conjoint des faits (voir le paragraphe 4 de la présente décision).

73 Par exemple, dans la réponse de l'employeur au premier palier du grief déposé par Mme Gill (dossier de la CRTFP 566-02-2731) à propos d'un essai en mer au cours duquel l'employeur n'a offert aucun repas, l'employeur, en rejetant la demande d'indemnité de Mme Gill conformément au paragraphe, a répondu ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Puisque les repas sont offerts « en tout temps » durant les essais en mer, il n'existe aucun droit distinct d'indemnité de repas conformément à l'article 25 de la convention collective et aux paragraphes 25.05a) et 25.05b) de cette même convention collective du groupe EL. Les employés qui effectuent des essais en mer sont rémunérés entièrement selon le paragraphe 32.03 de la convention collective du groupe EL – Indemnité d'essai en mer.

[…]

[Je souligne]

74   De la même façon, dans sa réponse à ce même grief au dernier palier de la procédure de règlement de griefs, l'employeur a soutenu ce qui suit :

[Traduction]

[…] Je conclus que la décision de la direction de ne pas accorder les indemnités de repas à l'occasion des essais en mer est conforme aux articles applicables de votre convention collective. Plus précisément, je conclus que c'est bien l'article 32 qui s'applique à cette situation, et non l'article 25.

[…]

[Je souligne]

75 L'employeur a utilisé pratiquement la même formulation dans sa réponse aux griefs des dossiers de la CRTFP 566-02-3366, 5949, 2732 et 3367.

76 Par ses arguments, l'employeur a tenté de faire valoir le fait que les dispositions du paragraphe 25.05 s'appliquent uniquement aux cas de remboursement, lorsque les employés en question engagent des frais de repas. Curieusement, l'employeur ne mentionne pas les pauses repas auxquelles ont aussi droit les employés en vertu de cette disposition.

77   Quoi qu'il en soit, jusqu'à ce qu'il ait présenté ces arguments, l'employeur a constamment rejeté tous les griefs au motif que l'indemnité de repas ne pouvait être versée durant des essais en mer, étant donné que le paragraphe 25.05 de la convention collective ne s'applique pas aux employés qui effectuent des essais en mer. L'employeur a soutenu que seul l'article 32 s'appliquait.

78 L'employeur ne peut modifier la position qu'il a maintenue à tous les paliers de la procédure de règlement des griefs et qu'il a énoncée dans l'exposé conjoint des faits, en ajoutant un nouveau motif qui n'a pas déjà été soulevé. Suivant le principe de préclusion, l'employeur ne peut adopter la position selon laquelle le paragraphe 25.05 se limite au remboursement des frais engagés durant les heures supplémentaires.

79 Permettre un tel changement de motifs relativement à la décision de l'employeur de refuser le paiement de l'indemnité de repas serait contraire aux principes des bonnes relations de travail, mettrait en échec la procédure de règlement des griefs, qui [traduction] « est conçue pour permettre aux parties de résoudre le vrai problème le plus rapidement possible, de façon mutuellement acceptable » (Fuller Austin Insulation Ltd. v. United Brotherhood of Carpenters and Joiners of America, Local 2103 (2002), 107 L.A.C. (4e) 421 à 426 , à la page 436),et reviendrait effectivement à cautionner une pratique qui pourrait avoir induit le syndicat en erreur dans le processus de dépôt du grief à l'arbitrage.

80 L'interprétation de la signification de « remboursement » de l'employeur ne s'applique pas aux circonstances en l'espèce. Plutôt, le paiement dont il est question au paragraphe 25.05 de la convention collective ressemble davantage à une indemnité qui a été définie comme un paiement dont le montant est déterminé de façon arbitraire et pour lequel le bénéficiaire n'a besoin d'offrir aucune justification.

81 Au cours de la procédure de règlement des griefs dont il est question, l'employeur n'a jamais donné d'indication selon lesquelles il s'attendait à avoir des reçus pour les frais engagés, ni indiqué que le paragraphe 25.05 de la convention collective s'appliquait uniquement aux cas de remboursement. Au contraire, la position de l'employeur était que les indemnités de repas n'étaient tout simplement pas accordées pour des heures supplémentaires effectuées au cours d'essais en mer.

82   En outre, l'argument de l'employeur voulant que l'article 32 de la convention collective prime le paragraphe 25.05 n'est pas recevable. Il faut plutôt examiner l'ensemble de la convention collective lorsqu'on tente d'établir la réelle intention des parties. Un tel examen démontre que les paragraphes 23.05 et 25.05 et l'article 32 ont été rédigés de manière à se compléter afin de fournir des pauses repas non payées durant les heures de travail normales effectuées à l'occasion d'essais en mer, de même qu'une pause repas payée et une indemnité durant les heures supplémentaires.

83 Les décisions suivantes ont été citées dans les observations en réfutation : Fuller Austin Insulation Ltd. v. United Brotherhood of Carpenters and Joiners of America, Local 2103; Procureur général du Canada c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada, 2010 CF 578.

IV. Motifs

84 Le syndicat a basé sa demande sur le paragraphe 25.05 de la convention collective en affirmant que celui-ci exclut uniquement et expressément les employés du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international qui occupent un poste à l'étranger. L'employeur s'oppose à ces allégations pour deux motifs.

85 D'abord, il y a l'argument de l'employeur selon lequel, même si les indemnités de repas de 10,50 $ du paragraphe 25.05 ne constituent pas un élément de rémunération exclu par l'article 32, les fonctionnaires n'y ont pas droit, puisqu'elles s'appliquent uniquement aux remboursements. Les fonctionnaires n'ont pas droit au remboursement, puisqu'ils ont reçu des repas gratuits.

86 Le syndicat s'est opposé à cet argument en affirmant qu'il était injuste, étant donné que le fait de prétendre que le paragraphe 25.05 de la convention collective ne s'appliquait dans aucun cas équivalait à ajouter de nouveaux motifs aux réponses de l'employeur à la procédure de grief, et que cet argument n'avait pas été invoqué dans les discussions tenues aux différents paliers de la procédure règlement des griefs.

87 Pour étayer ses allégations, le syndicat m'a renvoyé à Re Fuller Austin Insulation Ltd. Dans cette affaire, l'employeur avait licencié un employé pour manque de travail. Lors de l'audience, l'employeur a affirmé que même si l'on jugeait qu'il ne s'agissait pas d'une vraie mise en disponibilité et qu'il s'agissait plutôt d'un congédiement, le grief ne pourrait tout de même pas être retenu, parce que l'Employeur avait le droit de congédier ses employés pour un motif valable. Le conseil d'arbitrage a conclu que l'employeur ne pouvait pas adopter une telle nouvelle position à l'étape de l'arbitrage. À la page 436, le conseil d'arbitrage a émis le commentaire suivant :

[Traduction]

On peut empêcher les employeurs, selon les circonstances, de modifier ou d'ajouter des motifs de licenciement à l'arbitrage. Bien qu'une certaine latitude soit nécessaire, il se peut que le fait de permettre un changement total de motifs pour un licenciement mine les bonnes relations de travail et mette en échec la procédure de règlement des griefs […]

88 À mon avis, cette affaire concerne une situation totalement différente. Elle concerne le droit d'un employé licencié à connaître les motifs de son licenciement.

89 En l'espèce, le syndicat s'oppose à l'ajout d'un argument dans l'interprétation du libellé de la convention collective. Le critère qui est bien établi par la jurisprudence consiste à déterminer si les nouveaux motifs changent ou non la nature du grief. Il y a une énorme différence entre changer la nature du grief et fournir un argument additionnel relatif à l'interprétation d'une disposition qui était déjà en litige. Un nouvel argument ne change pas les motifs sur lesquels est fondé le grief. Si le syndicat était réellement pris au dépourvu, la mesure corrective à demander serait un ajournement pour examiner le nouvel argument plutôt que de demander que le grief soit entendu sur la base d'un argument qui pourrait entraîner une interprétation erronée du paragraphe en question. Les parties peuvent préciser ou peaufiner leurs arguments au cours de la procédure de règlement des griefs et même à l'étape de l'arbitrage. Cela ne change pas la nature du grief. À mon avis, l'employeur est en droit d'avancer l'argument selon lequel l'utilisation du terme « remboursement » démontre que le paiement n'était pas une indemnité.

90   Rien ne justifie la déclaration du syndicat selon laquelle l'employeur est préclus de présenter cet argument. L'employeur n'a jamais déclaré qu'il ne présenterait pas d'autres arguments pour soutenir sa position relativement à l'interprétation du libellé de la convention collective.

91 Par conséquent, j'ai pris en considération l'argument présenté par l'employeur. Cet argument renvoie au libellé des paragraphes 25.05a) et b) de la convention collective selon lequel un employé qui effectue trois heures supplémentaires ou plus juste avant ou juste après son poste prévu à l'horaire « […] est remboursé-e au tarif de dix dollars cinquante (10,50 $) au titre des frais que lui occasionne un repas. » L'employeur a allégué que le sens des termes « rembourser » et « frais » est bien connu et qu'ils ne sont pas utilisés de manière ambiguë dans la convention collective. Le Canadian Oxford Dictionary définit ces termes comme suit :

[Traduction]

Rembourser verbe transitif 1. Rendre de l'argent à la personne qui l'a dépensé. 2. Repayer (des dépenses d'une personne).

[…]

Frais nom 1. Coût encouru; paiement d'une somme. 2. (ce nom s'emploie toujours au pluriel) a coût occasionné par la réalisation d'une certaine tâche, etc. (payer les frais). b somme versée en guise de remboursement (il m'a offert 40 $ par jour).

[Le passage en évidence l'est dans l'original]

92 L'employeur m'a aussi renvoyé aux commentaires suivants de la Cour fédérale au sujet de la signification du terme « remboursement » dans Institut professionnel de la fonction publique du Canada, au paragraphe 27 :

[27] Le paiement visé par l'article concernant les droits d'inscription est plutôt un remboursement. Un remboursement est différent des catégories de paiement discutées ci-dessus, qui représentent toutes des ajouts au salaire de base d'un employé. Selon le Canadian Oxford Dictionary, il sert à [traduction] « repayer » les dépenses engagées par une personne. Le fait que l'article concernant les droits d'inscription utilise les mots « remboursement » et « rembourser », bien qu'ils ne soient pas déterminants, donne à penser qu'un employé sera tenu de montrer qu'il a effectivement payé des droits d'inscription avant qu'une compensation ne lui soit remise pour un tel paiement, et cette compensation constitue un remboursement du montant versé par l'employé à l'égard de ces droits, quoique ce remboursement ne puisse pas dépassé un montant maximum prévu. Le remboursement est un type de paiement bien connu et distinct, et si le législateur avait voulu qu'il soit visé par l'article concernant les droits d'inscription, il aurait pu facilement le dire. Il ne l'a pas fait.

93   L'employeur a déclaré que si les fonctionnaires ont reçu des repas aux frais de l'employeur, il est clair qu'ils ne peuvent pas être « remboursé[s] au titre des frais [pour] un repas », tel qu'il est indiqué au paragraphe 25.05 de la convention collective.

94 Il est important de considérer le contexte dans lequel est utilisé le terme « remboursé ». Dans Institut professionnel de la fonction publique du Canada, la Cour fédérale devait déterminer si le remboursement des droits d'inscription constituait une rémunération additionnelle, laquelle est interdite par la Loi sur le contrôle des dépenses, L.C. 2009 ch. 2, art. 393. La Cour a conclu que le terme « remboursé » laissait entendre qu'un employé devait démontrer qu'il avait effectivement payé les droits en question, et que la compensation devrait être limitée au remboursement du montant versé, jusqu'à concurrence d'un montant maximum prévu.

95   La question relative à cet argument de l'employeur concerne la signification de « […] remboursé-e au tarif de dix dollars cinquante […] au titre des frais […] ». Considéré hors contexte, le terme remboursement signifie clairement le fait de rendre une somme dépensée. Toutefois, en l'espèce, il semble y avoir deux dispositions conflictuelles. Supposons par exemple que pendant sa pause repas, un employé dépense seulement 1,50 $ pour un café. L'utilisation de l'expression « au tarif de 10,50 $ » plutôt que [traduction] « jusqu'à 10,50 $ » indique que l'employé pourrait avoir droit à 10,50 $. D'un autre côté, l'expression « remboursé-e […] au titre des frais » limite le montant du remboursement à la somme dépensée. Quel serait l'objectif d'utiliser un montant fixe plutôt que de dire [traduction] « jusqu'à 10,50 $ »? L'objectif le plus évident, étant donné le montant relativement petit du remboursement, serait de faire en sorte que les employés et l'employeur n'aient pas à se soucier du montant exact payé par l'employé pour les repas, éliminant ainsi le temps et les dépenses liés au traitement des reçus. Si tel est l'objectif d'utiliser un montant fixe, le montant ne devrait pas être interprété comme une indemnité à payer dans les situations où aucune dépense n'a été engagée. L'utilisation dans la même phrase de « remboursé-e […] au titre des frais » démontre que le paiement est versé en réponse à une dépense. Dans les situations comme celle de la présente affaire, où des repas gratuits sont offerts, aucune dépense n'est engagée. Ainsi, il n'y pas lieu de rembourser la somme de 10,50 $.

96   Le deuxième argument de l'employeur visant à expliquer la raison pour laquelle le paragraphe 25.05 de la convention collective ne permet pas aux fonctionnaires de recevoir une indemnité de repas est la déclaration qui est faite au paragraphe 32.01 selon laquelle l'employé-e qui effectue des essais en mer « […] est rémunéré-e conformément au paragraphe 32.03 ».

97 Le paragraphe 32.01 n'indique pas que le paragraphe 25.05 ne s'applique pas aux essais en mer. Il indique uniquement que la rémunération durant les essais en mer est régie par le paragraphe 32.03. Cela signifie que les dispositions sur les paiements hors rémunération s'appliquent.

98 Cela soulève la question de savoir si la disposition relative aux pauses repas payées et au remboursement de 10,50 $ du paragraphe 25.05 de la convention collective est considérée une rémunération.

99 Le premier paragraphe du paragraphe 25.05 de la convention collective indique que « […] les employé-e-s qui effectuent des heures supplémentaires bénéficient de pauses-repas et sont remboursé-e-s au titre des repas de la façon suivante ». L'utilisation des termes « bénéficient » et « remboursé-e-s » semble indiquer une prestation et un paiement. L'utilisation de deux termes différents indique que le fait de bénéficier d'une pause repas ne constitue pas élément de rémunération, même si l'avantage accordé est une pause repas payée. Autrement dit, un employé qui effectue des essais en mer a le droit de prendre les pauses repas énoncées au paragraphe 25.05. Cela concorde avec le paragraphe 32.03, qui ne contient aucune disposition sur les pauses repas.

100 D'un autre côté, l'utilisation de l'expression « remboursé-e-s au titre des repas » avant la mention du paiement de 10,50 $ indique que ces paiements constituent un élément de rémunération, et sont donc remplacés par les dispositions relatives à la rémunération du paragraphe 32.03 de la convention collective.

101 Par conséquent, les fonctionnaires n'avaient pas droit aux paiements de 10,50 $ appelés « indemnités de repas » à l'occasion des essais en mer.

102 Pour ces motifs, je rends l'ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

103 Les griefs sont rejetés.

Le 8 février 2013.

Traduction de la CRTFP

William H. Kydd,
arbitre de grief

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