Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

À la fin 2010, la fonctionnaire s’estimant lésée a déposé un grief alléguant qu’elle avait été mutée sans son consentement - l’audience du grief devait avoir lieu en juin2013 - l’audience n’a pas eu lieu à cette date car la fonctionnaire s’estimant lésée a déposé une requête en vue d’un ajournement, étayée d’une abondante preuve documentaire - dans cette décision, l’arbitre de grief a fait valoir que l’ajournement n’avait été accordé que parce qu’il n’avait pas été contesté et que la demande avait été appuyée par une preuve documentaire abondante - en juillet2013, le défendeur a rencontré la fonctionnaire s’estimant lésée ainsi que son avocat et les modalités du règlement ont été conclues et signées - en août2013, la fonctionnaire s’estimant lésée a déclaré qu’elle n’était plus représentée par l’avocat qui l’avait accompagné lors de cette rencontre et qu’elle allait retenir les services d’un nouveau représentant - une audience a été fixée pour novembre2013 - la fonctionnaire s’estimant lésée a demandé un ajournement de cette audience; l’ajournement a été refusé par l’arbitre de grief - l’arbitre de grief a douté de la bonne foi de la fonctionnaire s’estimant lésée lorsqu’elle a demandé l’ajournement, car cette dernière savait depuis un certain temps qu’elle devait trouver un nouveau représentant - les motifs que l’arbitre de grief avait donné lorsqu’il a autorisé l’ajournement précédent démontraient clairement que l’audience aurait lieu, mais la fonctionnaire s’estimant lésée n’a rien fait pour s’assurer d’être prête à s’y présenter - l’arbitre de grief a également mentionné les motifs qui l’avaient incité à accorder l’ajournement, faisant valoir que la fonctionnaire s’estimant lésée avait produit de nombreuses pièces justificatives médicales - l’arbitre de grief a déclaré que les deux parties avaient droit à une audience équitable et qu’accorder un autre ajournement aurait été l’équivalent d’autoriser une partie à en bénéficier simplement en ne faisant rien - l’employeur aurait également subi un préjudice - l’employeur a fait valoir que l’arbitre de grief n’avait pas compétence pour se prononcer sur le bien-fondé du grief en raison de l’entente de règlement signée - l’arbitre de grief a fait valoir que selon Amos c. Canada (Procureur général), 2011 CAF38, un arbitre de grief a compétence, aux termes de la Loi, pour décider si une entente de règlement est définitive et exécutoire, entre autres choses - la seule question que l’arbitre de grief devait trancher en l’espèce était de savoir s’il y avait entente définitive et exécutoire - l’arbitre de grief a noté que la fonctionnaire s’estimant lésée avait été représentée par un avocat et qu’elle avait eu amplement l’occasion de discuter de la proposition avec lui avant de signer l’entente - aucune preuve de coercition, d’influence indue ou de conduite oppressive de la part de l’employeur n’a été présentée - le protocole d’entente était un règlement intégral et définitif du grief, qui prévoyait notamment le retrait du présent grief - l’arbitre de grief a donc estimé qu’il n’avait pas compétence pour poursuivre plus avant. Dossier fermé.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2013-12-13
  • Dossier:  566-02-4663
  • Référence:  2013 CRTFP 160

Devant un arbitre de grief


ENTRE

ROHMA CHAUDHARY

fonctionnaire s'estimant lésée

et

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL
(ministère de la Santé)

employeur

Répertorié
Chaudhary c. Administrateur général (ministère de la Santé)

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l'arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Augustus Richardson, arbitre de grief

Pour la fonctionnaire s'estimant lésée:
Personne

Pour l'employeur:
Karen Clifford, avocate

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
le 14 novembre 2013.
(Traduction de la CRTFP)

Introduction

1 À Ottawa, le 14 novembre 2013, je devais statuer sur la requête présentée par l'avocate du ministère de la Santé (l'« employeur ») et rendre une ordonnance de rejet ou de fermeture du dossier en cause au motif que l'affaire avait été réglée. Quelques jours auparavant, Rohma Chaudhary, la fonctionnaire s'estimant lésée (la « fonctionnaire ») avait demandé l'ajournement de la requête pour lui permettre de retenir les services d'un avocat. J'ai refusé la demande de la fonctionnaire et j'ai procédé à l'audition de la requête le 14 novembre. La fonctionnaire n'a pas assisté à l'audition. J'ai entendu le témoignage de Tracy O'Brien, conseillère principale en relations de travail à Santé Canada. J'ai aussi entendu les arguments soumis pour le compte de l'employeur. Ayant étudié l'affaire à fond, j'ai conclu qu'elle avait été réglée le ou vers le 5 juillet 2013 et que, par conséquent, je n'avais pas la compétence pour entendre l'affaire et qu'il y avait lieu de fermer le dossier. J'ai aussi annulé les dates d'audience retenues pour instruire l'affaire sur le fond en décembre 2013.

2 Les faits et les motifs sur lesquels était fondée l'ordonnance sont présentés ci‑après.

Contexte

3 Le 1er novembre 2010, la fonctionnaire a déposé un grief auprès de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission »). Elle a contesté le fait qu'elle avait été mutée sans son consentement vers janvier 2010. Elle a allégué que la Commission avait la compétence pour entendre son grief en vertu du sous-alinéa 209(1)c)(ii) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « Loi »).

4 Dans sa réponse, l'employeur a affirmé que le poste de la fonctionnaire avait simplement évolué pendant le congé de cette dernière et qu'une mutation n'avait pas eu lieu au sens du régime législatif et réglementaire régissant les mutations. L'employeur a aussi avancé que la fonctionnaire avait déposé son grief après l'expiration du délai. Pour ces motifs, l'employeur a soutenu qu'un arbitre de grief n'avait pas la compétence pour entendre le grief.

5 Initialement, la fonctionnaire était représentée par un avocat, puis par un deuxième avocat. Le ou vers le 27 février 2013, elle a retenu les services d'un nouvel avocat, Joseph Griffiths.

6 L'instruction du grief devait avoir lieu du 4 au 6 juin 2013 à Ottawa. À cette date, la fonctionnaire avait déposé en tout quatre plaintes : deux griefs devant la Commission (dont l'un deux est le présent cas) et deux plaintes devant la Commission canadienne des droits de la personne.

7 Comme précisé dans l'ordonnance provisoire en l'espèce, l'audience du 4 juin n'a pas eu lieu. Le soir avant l'audience, la fonctionnaire a informé M. Griffiths qu'elle ne pouvait assister à l'audience pour des raisons médicales; voir Chaudhary c. Administrateur général (ministère de la Santé), 2013 CRTFP 71. J'étais réticent à accéder à cette demande puisque le grief avait été présenté il y avait plus de deux ans, l'audience avait été mise au rôle depuis un certain temps. De plus, la requête était survenue à la toute dernière minute et se fondait sur un trouble de l'anxiété ― qui est une caractéristique commune à la majorité, voire à toutes les audiences de grief. Comme je l'ai mentionné à l'époque, si les ajournements étaient accordés pour ce seul motif, bon nombre d'audiences n'iraient jamais de l'avant. L'ajournement a seulement été accordé en raison de la documentation médicale complète présentée et parce que l'employeur ne s'y était pas opposé.

8 En fin de compte, j'ai rendu l'ordonnance suivante :

  1. L'audience du dossier de la CRTFP 566-02-4663 est ajournée à une nouvelle date devant être fixée par la Commission.
  2. La fonctionnaire ou son représentant doit fournir à l'employeur, au plus tard le 31 août 2013, l'ensemble des documents que la fonctionnaire entend présenter à l'appui de son allégation de mutation sans son consentement.
  3. La nouvelle date d'audience sera considérée comme définitive.

9 Mme O'Brien a témoigné (et j'accepte son témoignage) qu'elle et M. Griffiths ont tenu des discussions après que la fonctionnaire avait retenu les services de ce dernier en février 2013, en vue de régler les griefs et les plaintes de la fonctionnaire. Elle a transmis à M. Griffiths un exemplaire complet de son dossier. Au cours du printemps, Mme O'Brien a travaillé à une proposition de règlement, dont elle a fait parvenir une version préliminaire à M. Griffiths. Il a répondu en soulevant un nombre de suggestions ou de préoccupations, dont certaines (mais non toutes) ont été prises en compte par Mme O'Brien dans les révisions apportées à la proposition préliminaire.

10 Le 5 juillet, Mme O'Brien a rencontré M. Griffiths et Mme Chaudhary au bureau de ce dernier dans le but de discuter de la proposition de règlement, que Mme O'Brien avait transmise à M. Griffiths avant la rencontre. Mme O'Brien est arrivée au bureau de M. Griffiths à 9 h, soit l'heure convenue, mais a attendu près d'une heure pendant que M. Griffiths discutait en privé avec Mme Chaudhary. Les trois se sont ensuite réunis pour discuter de l'offre et ont échangé sur plusieurs points. Mme O'Brien se rappelle que M. Griffiths et la fonctionnaire ont discuté en privé à deux reprises pendant la réunion. En fin de compte, la fonctionnaire a convenu d'accepter la proposition. Ils se sont serré la main. La fonctionnaire a signé l'offre, intitulée « Protocole d'accord » (le « protocole »), qui a ensuite été signée le même jour par le représentant compétent de l'employeur. (La fonctionnaire n'était pas représentée par son agent négociateur, l'Association canadienne des employés professionnels [ACEP] mais, par excès de prudence, Mme O'Brien a obtenu le consentement de l'ACEP au protocole le 31 juillet 2013.)

11 Deux exemplaires du protocole ont été déposés : l'original (pièce E4) et un exemplaire expurgé pour des motifs de confidentialité (pièce E5). Le protocole comptait 4 pages et 19 paragraphes et renfermait aussi plusieurs addendas. La représentante de l'employeur a présenté une requête à l'audience afin de rendre une ordonnance de mise sous scellés de la pièce E4. Elle a renvoyé à la clause 17 du protocole qui prévoyait que les modalités du règlement [traduction] « demeurent confidentielles entre les parties et ne soient pas divulguées à quiconque, sauf aux personnes chargées de la mise en œuvre du présent protocole d'accord dans la mesure où la divulgation est exigée par la loi ».J'estime qu'il est approprié de placer sous scellés la pièce E4. Certains aspects du protocole sont abordés au besoin dans les présents motifs afin de déterminer si un règlement est intervenu ou non. La Loi prévoit plusieurs procédures visant à encourager le règlement volontaire des différends. Les modalités d'une entente de règlement pour en assurer la confidentialité sont propices aux relations de travail harmonieuses et à la résolution des questions d'une manière équitable, crédible et efficace. C'est pourquoi les avantages de maintenir la confidentialité de l'entente, dans toute la mesure possible, l'emportent sur les effets préjudiciables de ne pas le faire. Ainsi, la pièce E-4 est scellée. Un exemplaire de l'ordonnance de mise sous scellés est joint à l'annexe A et reflète mes motifs exposés ci-dessus.

12 J'estime qu'aux termes de l'entente de règlement, comme énoncé dans le protocole, la fonctionnaire a bénéficié de certains avantages et privilèges qu'elle n'aurait pas reçus si elle avait donné suite à son grief et avait été déboutée. J'estime également qu'en contrepartie de ces droits et privilèges, la fonctionnaire a accepté de retirer son grief renvoyé à l'arbitrage en l'espèce et à deux autres griefs alors au troisième palier de la procédure de règlement des griefs de l'employeur (c.-à-d. les dossiers RCN-DGSESC-2011-002 et RCN-DGSESC/HECSB-2012-001), de même qu'à deux plaintes devant la Commission canadienne des droits de la personne (portant les numéros 20091537 et 20100002).

13 Le 25 juillet, Mme O'Brien a avisé la Commission que l'affaire avait été réglée (pièce E7). Le même jour, la Commission a demandé confirmation du règlement auprès de M. Griffiths, qui a fait savoir le lendemain qu'il [traduction] « […] n'était plus autorisé à représenter Mme Chaudhary » (pièce E7). Le 29 juillet, la Commission a communiqué directement avec la fonctionnaire pour lui demander ses observations au sujet de l'avis signifié par l'employeur que l'affaire était classée. Mme O'Brien a témoigné que jusqu'à ce temps, la fonctionnaire n'avait pas précisé si elle contestait les dispositions du protocole, bien qu'elle ait communiqué avec la fonctionnaire à un nombre d'occasions au sujet de plusieurs mesures à prendre afin de donner suite au protocole.

14 Le 1er août 2013, Mme O'Brien a fourni un exemplaire du protocole à la fonctionnaire, après que l'ACEP l'ait signé (pièce E6). À cette date, certaines sommes prévues dans le protocole avaient été versées à la fonctionnaire. (Le solde de ces sommes a été versé à la fonctionnaire à la fin d'août, qui les a acceptées.)

15 Le 7 août 2013, la fonctionnaire a confirmé que M. Griffiths n'était plus son représentant et a précisé qu'elle [traduction] « […] cherchait à engager un autre avocat pour obtenir des conseils ». Elle a ajouté qu'elle n'avait pas accepté de retirer ses plaintes et que la Commission ne pouvait fermer son dossier (pièce E7).

16 Le 26 août 2013, l'audience sur le fond du dossier en cause a été fixée du 16 au 20 décembre 2013. Ces dates avaient été retenues à la demande de la fonctionnaire parce que ses témoins n'étaient pas disponibles aux dates antérieures proposées.

17 Le défendeur était toujours d'avis que l'affaire avait été réglée et que la Commission n'avait donc pas la compétence pour l'entendre. Le 8 août 2013, il a déposé une requête en vue du rejet des griefs et a demandé de mettre au rôle la requête, en conformité au protocole signé par toutes les parties. Le 26 août 2013, les parties ont été informées que la requête serait entendue le 14 novembre 2013 et qu'un avis d'audience leur serait transmis environ un mois avant sa tenue. Peu de temps après, les parties ont été informées que d'autres demandes procédurales présentées par la suite seraient aussi examinées à l'audience du 14 novembre, qui se rapportaient à l'audience sur le fond, dans la mesure où il était décidé de tenir l'audience (par exemple, la demande de la fonctionnaire concernant la divulgation et les objections de l'employeur au sujet de la pertinence, l'utilisation du nom de la fonctionnaire dans la publication ou la décision, et les requêtes s'appuyant sur des documents ne faisant pas partie du processus de divulgation). La fonctionnaire et l'employeur ont aussi reçu avis de l'audience le 16 octobre 2013. Dans un courriel du 7 novembre, la fonctionnaire a informé la Commission de ce qui suit : [traduction] « Mon avocat, M. Joseph Griffiths, s'est officiellement retiré de la présente affaire il y a quelques jours, soit le 5 novembre 2013, par voie de requête devant la cour » (voir le courriel dans le dossier de la Commission). La fonctionnaire a demandé un ajournement de deux mois [traduction] « […] afin de trouver un nouvel avocat pour [sa] prochaine audience » (voir le dossier de la Commission). Elle a jouté : [traduction] « Bien que je compte assister à l'audience, j'y présenterais cette requête si la présente requête écrite était refusée » (voir le dossier de la Commission). Elle s'est excusée de présenter une telle requête, mais a précisé qu'elle [traduction] « […] [était] tout simplement incapable de [se] représenter en raison de [son] incapacité mentale et cherch[ait] diligemment à retenir les services d'un avocat pour l'aider à représenter [ses] intérêts » (voir le dossier de la Commission).

18 L'avocate de l'employeur, dans un courriel le même jour, s'est opposée à la requête en faisant valoir que cette requête n'était pas compliquée. Elle a souligné le fait que la fonctionnaire avait été représentée par trois différents avocats et qu'il serait injuste et préjudiciable pour l'employeur de reporter encore l'affaire (voir le dossier de la Commission). Après avoir tenu compte de ces observations, j'ai rejeté la demande de la fonctionnaire. Les parties ont été informées que l'audition de la requête aurait lieu le 14 novembre.

19 Le 8 novembre, la fonctionnaire a de nouveau demandé un ajournement. Elle a répété qu'elle pouvait assister à l'audience et qu'elle y assisterait, mais a précisé qu'elle ne serait pas en mesure d'exposer les arguments juridiques qu'elle considérait comme essentiels. Sa demande a de nouveau été rejetée (voir le dossier de la Commission).

20 Le 13 novembre, la fonctionnaire a informé la Commission de ce qui suit : [traduction] « Puisqu'il m'est impossible d'obtenir l'ajournement demandé en vue de retenir les services d'un avocat, il me sera impossible de me présenter à l'audience prévue. Donc, je n'assisterai pas à l'audience » (voir le dossier de la Commission). Par la suite, la Commission a prié la fonctionnaire d'assister à l'audience puisqu'elle avait auparavant indiqué son intention de le faire pour présenter sa version des faits, à savoir si le grief avant été réglé ou non. Néanmoins, la fonctionnaire a choisi de ne pas se présenter.

Observations présentées au nom de l'employeur

21 L'avocate de l'employeur a soutenu que la fonctionnaire avait réglé le différend en l'espèce ainsi que d'autres questions le 5 juillet 2013. Une entente de règlement est un contrat exécutoire et ne peut être résiliée sans motifs valables reconnus en droit ou en equity; voir Mohammed c. York Fire and Casualty Insurance Co.(2006), 79 O.R. (3e) 354, au paragr. 34; Federation of Newfoundland Indians v. Canada, 2011 FC 683, paragr. 63 à 67. La fonctionnaire était représentée par un avocat compétent pendant la période en cause. Son avocat avait reçu la proposition de règlement avant qu'elle soit présentée et avait négocié plusieurs changements. La fonctionnaire a eu le temps de prendre connaissance et de discuter de la proposition en privé avec son avocat. Il n'existe aucune preuve que la fonctionnaire ne savait pas ce qu'elle signait, qu'elle n'avait pas reçu d'avis judicieux et indépendant avant de signer la proposition ou que l'employeur ait exercé une influence indue ou tenu une conduite oppressive à son endroit. La fonctionnaire a signé la proposition en toute liberté; voir en général, MacDonald c. Canada [1998] A.C.F. 1562 (T.D.) (QL); Nash c. Canada (Conseil du Trésor), 2008 CF 1389, au paragr. 35. Il n'y a pas de motifs juridiques impérieux pour annuler le protocole d'accord; voir Samuels v. Seneca College of Applied Arts and Technology, 2011 HRTO 1211. De plus, après avoir signé la proposition, la fonctionnaire s'est conformée à ses conditions et a accepté les sommes qui y étaient prévues et qui lui ont été versées.

22 L'avocate a par ailleurs fait valoir que si je reconnaissais que le règlement était exécutoire, je n'avais donc plus la compétence et qu'il y avait lieu de fermer le dossier; voir Bedok c. Conseil du Trésor (ministère du Développement des ressources humaines), 2004 CRTFP 163, au paragr. 52; Castonguay c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2005 CRTFP 73, au paragr. 16.

Analyse et décision

23 J'expose d'abord mes motifs du rejet de la demande de la fonctionnaire de lui accorder un nouvel ajournement. Plusieurs motifs m'ont amené à prendre ma décision.

24 Premièrement, je doutais de la bonne foi de la fonctionnaire lorsqu'elle a présenté sa demande. Dans son courriel du 7 novembre, elle a affirmé que son avocat venait tout juste de se retirer du dossier, laissant entendre qu'elle avait été prise au dépourvu. Dans son deuxième courriel à la même date, elle reconnaissait cependant que son avocat avait décidé de ne pas la représenter quelques mois auparavant. En outre, elle avait informé la Commission deux mois plus tôt, soit le 7 août, que son avocat ne la représentait plus. En effet, à cette date, elle avait fait savoir qu'elle se cherchait un nouvel avocat. Pourtant elle n'a pas expliqué, le 7 novembre, pourquoi elle n'avait pas fait de démarche entre le 7 août et le 7 novembre pour se trouver un autre avocat. Je constate aussi qu'en septembre, la fonctionnaire, bien qu'elle ne soit pas représentée, a néanmoins fait des démarches actives pour que son audience soit mise au rôle en décembre 2013. Elle n'a pas alors soulevé d'objection, à savoir qu'elle ne pouvait y assister sans avocat et n'a apparemment pas consenti d'effort à ce temps pour retenir les services d'un autre avocat.

25 Deuxièmement, mon ordonnance initiale du 4 juin 2013 indiquait clairement que l'audition de cette affaire, une fois mise au rôle, serait définitive. La fonctionnaire savait qu'il était attendu que l'audition se tiendrait. Pourtant, elle n'a rien fait après le 7 août pour se préparer, alors qu'elle croyait sincèrement avoir besoin d'un avocat. Je constate également qu'aucune autre raison présentée par la fonctionnaire dans sa demande d'ajournement n'était appuyée ou corroborée par une preuve quelconque.

26 Troisièmement, il y a deux parties à un grief : la ou le fonctionnaire s'estimant lésé et l'employeur défendeur. Tous deux ont droit à une audience équitable du grief en temps le plus opportun possible, sous réserve des exigences et impondérables associés aux instances, notamment les conflits d'horaires, les intempéries, etc. Nulle partie n'a le droit de faire obstruction aux instances ou de les retarder sans motif valable. La fonctionnaire n'a pas expliqué pourquoi elle avait attendu jusqu'à la dernière minute pour chercher un avocat. Elle n'a pas fourni de preuve indépendante, notamment une correspondance, de ses tentatives pour se trouver un avocat. Le fait d'accorder un ajournement dans ce cas serait équivalent à autoriser une partie à se mettre en situation d'ajournement du simple fait qu'elle n'a rien fait.

27 Quatrièmement, il faut tenir compte du préjudice à l'employeur. L'employeur s'était déjà préparé une fois auparavant à une audience, qui a été ajournée à la dernière minute par la fonctionnaire. L'employeur avait alors ratifié ce qu'il croyait être une entente de règlement avec la fonctionnaire et, aux termes de cette entente, avait procuré des avantages à cette dernière afin d'éviter d'autres litiges. Le fait d'obliger l'employeur de poursuivre une affaire qu'il croyait classée lui imposerait un grave préjudice, qui ne serait certes pas compensé par un nouvel ajournement. D'autre part, la fonctionnaire subirait, à mon avis, un préjudice minime, sinon nul, si elle assistait à l'audience sans avocat. La fonctionnaire aurait facilement pu produire une preuve de ce qu'elle avait pensé ou compris à la signature du protocole. C'est elle qui est le mieux en mesure de dire pourquoi elle l'avait signé. Une preuve en ce sens ne serait pas compliquée, car elle comporte au bas mot la présentation par la fonctionnaire de sa version des faits. Cette conclusion est corroborée par la correspondance par courriel que la fonctionnaire a fait parvenir à la Commission, qui révèle son intelligence ainsi que son raisonnement cohérent et logique. Cette intelligence, cohérence et logique portent à faux ses commentaires dans la correspondance avec la Commission, selon lesquels son état psychologique l'empêcherait d'assister à l'audience sans avocat.

28 Pour tous ces motifs, j'ai refusé sa demande d'ajournement pour qu'elle puisse retenir les services d'un nouvel avocat.

29 J'aborde maintenant la requête de l'employeur.

30 Les arbitres de grief nommés en vertu de la Loi ont le pouvoir de décider si un règlement est final et exécutoire ou non (Castonguay, Nash et Bedok). Bien qu'elle n'ait pas été invoquée, la décision de la Cour d'appel fédérale dans Amos c. Canada (Procureur général), 2011 CAF 38 confirme qu'un arbitre de grief a la compétence sous le régime de la Loi existante pour statuer sur le caractère définitif et exécutoire d'une entente de règlement. Ce cas clarifie également la compétence d'un arbitre de grief pour déterminer si une partie s'est conformée aux conditions de l'entente de règlement et, dans le cas contraire, de rendre une ordonnance réparatrice dans les circonstances. Toutefois, la question dont je suis saisi consiste uniquement à savoir si l'entente est définitive et exécutoire.

31 J'estime, d'après la preuve produite, que le protocole constitue une entente exécutoire. La fonctionnaire a été représentée par un avocat et a eu amplement l'occasion de discuter de la proposition avec lui avant de la signer. Il n'y a aucune preuve de coercition, d'influence indue ou de conduite oppressive de la part de l'employeur. De fait, la fonctionnaire a accepté les avantages procurés par le protocole, malgré son assertion qu'elle n'était pas liée par celui-ci. En outre, en conformité au protocole, la fonctionnaire a accepté de retirer son grief, qui constitue le fond du présent dossier, ainsi qu'un autre grief et deux plaintes (comme précisé ci-haut).

32 Par conséquent, je conclus que le protocole est un règlement intégral et final du grief, qui prévoyait notamment le retrait du présent grief. Je n'ai donc pas la compétence pour poursuivre cette affaire.

33 Pour ces motifs, je rends l'ordonnance qui suit :

Ordonnance

34 Il est ordonné de fermer le dossier de la CRTFP 566-02-4663.

Le 13 décembre 2013.

Augustus Richardson,
arbitre de grief

Traduction de la CRTFP

Annexe A

Annexe A : Ordonnance de mise sous scellés

Annexe A : Motifs

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