Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé était vérificateur de l’impôt international - il a déposé deux griefs - dans le premier, il a allégué une violation à la clause 46.01 de la convention collective, et a contesté l’ordre de l’employeur de ne pas établir une entreprise extérieure qui fournirait des services de conseils en gestion, de consultation financière, de soutien en cas de litige, de consultation pour les fusions et les acquisitions et d'évaluation d'entreprises, parce que de telles activités constitueraient un conflit d’intérêts éventuel ou apparent - dans son deuxième, il a allégué une violation à la clause 18.03 de la convention collective et a contesté le refus par l’employeur de sa demande d’assister à une conférence - l’employeur a invoqué les nécessités du service et les contraintes budgétaires pour justifier le refus - l’employeur a soulevé une objection préliminaire à la compétence en ce qui concerne le premier grief, en soutenant qu’un arbitre de grief ne pouvait pas examiner la décision de l’employeur selon laquelle il y avait présence d’un conflit d’intérêts et qu’il était plutôt limité à déterminer si l’employeur avait désigné l’emploi extérieur proposé comme pouvant constituer un conflit d’intérêts - l’arbitre de grief a conclu que la convention collective ne précisait pas comment l’employeur pouvait désigner un emploi extérieur proposé comme constituant un conflit d’intérêts véritable ou potentiel et, par conséquent, le fait que les services proposés par le fonctionnaire s’estimant lésé ne soient pas indiqués expressément dans le Code et lignes directrices sur les conflits d'intérêts n’est pas déterminant pour trancher la question - l’arbitre de grief a conclu qu’elle avait la compétence pour déterminer si la décision de l’employeur avait été prise de bonne foi et qu’elle était raisonnablement liée à la préoccupation que le travail proposé aurait pu constituer un conflit d’intérêts - en l’espèce, la désignation de l’employeur a été faite de bonne foi et était raisonnable parce qu’il existait un risque de conflit et qu’il pouvait y avoir perception de conflit de la part du public - en ce qui concerne le deuxième grief, l’arbitre de grief a statué que même si le droit est occasionnel et non absolu, l’employeur doit accorder l’attention nécessaire à la demande d’un employé et que ce pouvoir discrétionnaire doit être exercé de manière véritable et en tenant compte des circonstances de chaque cas, et non pas simplement en appliquant une politique rigide - l’explication de l’employeur n’a pas démontré l’existence de véritables nécessités du service ou de contraintes budgétaires - les employés ne peuvent s’attendre à assister à toutes les conférences auxquelles ils demandent d’assister - une déclaration était la réparation qu’elle convenait d’accorder dans le cadre de ce grief. Grief dans le dossier de la CRTFP 566-34-2704 rejeté. Grief dans le dossier de la CRTFP 566-34-2705 accueilli.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2013-12-13
  • Dossier:  566-34-2704 et 2705
  • Référence:  2013 CRTFP 161

Devant un arbitre de grief


ENTRE

TONY CAMPIONE

fonctionnaire s'estimant lésé

et

AGENCE DU REVENU DU CANADA

employeur

Répertorié
Campione c. Agence du revenu du Canada

Affaire concernant des griefs individuels renvoyés à l'arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Kate Rogers, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Maeve Sullivan, Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Pour l'employeur:
Magdalena Persoiu, avocate

Affaire entendue à Toronto (Ontario),
les 6 et 7 février 2013.
(Traduction de la CRTFP)

I. Griefs individuels renvoyés à l'arbitrage

1 Le fonctionnaire s'estimant lésé, Tony Campione (le « fonctionnaire ») est vérificateur de l'impôt international, classifié au groupe et niveau AU-03, dans le domaine du revenu étranger accumulé, tiré de biens (le « REATB »), du bureau international des services fiscaux, de la Division de la vérification de l'Agence du revenu du Canada (l'« ARC » ou l'« employeur »). Son lieu de travail était situé au Bureau des services fiscaux de Toronto Centre. Pendant toute la période pertinente, il était visé par la convention collective conclue entre l'employeur et l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (le « syndicat »), pour le groupe Vérification, finances et sciences, ayant pour date d'expiration le 21 décembre 2007 (la « convention collective »).

2 Le 4 octobre 2006, le fonctionnaire a déposé un grief (dossier de la CRTFP 566-34-2704), alléguant une violation de la clause 46.01 de la convention collective. Dans son grief, le fonctionnaire a contesté l'ordre de l'employeur, en date du 15 septembre 2006, de cesser les activités de ses deux entreprises (RCT Consulting et Campione and Associates). Selon le grief, la décision de l'employeur selon laquelle les activités de ces deux entreprises constituaient un conflit d'intérêts était déraisonnable, punitive au plan financier et injuste et privait le fonctionnaire de mettre à profit ses connaissances professionnelles et son savoir-faire.

3 À titre de mesure corrective, le fonctionnaire a demandé que l'ordre de cesser les activités de ses entreprises soit annulé et qu'on lui verse un remboursement au prorata de la perte de revenu qu'il a subie en raison de l'ordre signifié par l'employeur, y compris les intérêts, ainsi que toute autre mesure permettant de l'indemniser intégralement ou convenue par les parties.

4 Ce grief a été entendu et rejeté aux premier, troisième et dernier paliers de la procédure de règlement des griefs et a été renvoyé à l'arbitrage le 16 janvier 2009.

5 Le 18 décembre 2007, le fonctionnaire a déposé un grief (dossier de la CRTFP 566-34-2705), alléguant une violation de la clause 18.03 de la convention collective. Le grief contestait le refus de l'employeur de lui accorder sa demande d'assister à une conférence sur le REATB, les 14 et 15 janvier 2008, à Toronto. Dans l'énoncé de son grief, le fonctionnaire a indiqué que la participation à la conférence faisait partie de son plan d'apprentissage individuel pendant deux ans, que le coût de sa participation aurait été minime et qu'il n'aurait pas été tenu de se déplacer pour y participer. Il a allégué que le refus de sa demande était injuste et déraisonnable.

6 Ce grief a été entendu et rejeté aux premier, troisième et dernier paliers de la procédure de règlement des griefs et a été renvoyé à l'arbitrage le 16 janvier 2009.

7 Le 16 novembre 2012, l'employeur s'est opposé à la compétence d'un arbitre de grief de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « CRTFP »), relativement au dossier de la CRTFP 566-34-2704, au motif qu'un arbitre de grief ne peut examiner la décision d'un employeur selon laquelle il y a présence de conflit d'intérêts aux termes de sa politique sur les conflits d'intérêts. L'employeur a fait valoir qu'un arbitre de grief de la CRTFP était limité par le libellé de la clause 46.01 de la convention collective à déterminer si l'employeur avait précisé, dans le cas de l'emploi à l'extérieur de la Fonction publique proposé, « s'il s'agit d'un domaine désigné » par l'employeur comme pouvant constituer un conflit d'intérêts.

8 Le 21 janvier 2013, le syndicat a répondu par écrit à l'objection soulevée par l'employeur en faisant valoir que l'emploi à l'extérieur proposé par le fonctionnaire n'était pas désigné par l'employeur dans sa politique sur les conflits d'intérêts. Le syndicat a également soutenu qu'un arbitre de grief de la CRTFP avait compétence pour déterminer si la conclusion de l'employeur relativement à l'existence d'un conflit d'intérêts réel ou apparent était raisonnable.

9 Il a été décidé que les questions concernant la compétence ou les limitations de la compétence seraient soulevées à l'audience lors des arguments finals.

II. Résumé de la preuve

10 Le fonctionnaire a témoigné et déposé neuf documents à titre d'éléments de preuve. L'employeur a convoqué Jack Dempsey, Bruce Allen et Jeff Sadrian à témoigner et a déposé neuf documents à titre d'éléments de preuve. Outre les renseignements relatifs au contexte, la preuve ayant trait aux détails des deux griefs dont je suis saisie est résumée séparément, par souci de commodité.

A. Contexte

11 Le fonctionnaire a déclaré qu'il était un comptable agréé et un expert en évaluation d'entreprise. Avant d'entrer au service de l'employeur, en 1992, dans le secteur de l'évitement fiscal, il a travaillé au sein d'un cabinet de comptables agréés. En 1999, il a quitté son emploi auprès de l'employeur pour travailler au sein d'un cabinet externe d'évaluation d'entreprise; il est revenu travailler pour l'employeur en 2002.

12 Lorsque le fonctionnaire a repris son travail pour l'employeur en 2002, il travaillait au sein de la section de l'évaluation des biens mobiliers. Il a expliqué que son travail dans cette section consistait à établir la juste valeur marchande des actions des sociétés, des partenariats, des entreprises et des actifs incorporels. Il a déclaré que les évaluateurs d'entreprise étaient classifiés à titre de vérificateurs, mais qu'ils sont, en réalité, des évaluateurs. Les évaluateurs ne sont pas tous comptables agréés.

13 En avril 2006, le fonctionnaire a été muté au secteur du REATB du groupe de la vérification internationale. M. Allen a expliqué que ce groupe faisait partie de la Direction générale de la vérification, qui regroupe également les groupes chargés de la vérification des dossiers de grande envergure, de la vérification de petites et moyennes entreprises, de l'évitement fiscal, de la vérification spécialisée, de l'évaluation des biens mobiliers et de la vérification du commerce électronique.

B. Dossier de la CRTFP 566-34-2704

14 Le fonctionnaire a affirmé que, lorsqu'il travaillait à la section de l'évaluation des biens mobiliers, il a reçu un appel d'un ancien associé, qui lui a demandé s'il serait disposé à procéder à une évaluation dans le cadre d'un conflit matrimonial. Intéressé par la demande, le fonctionnaire a demandé la permission à son superviseur de fournir des services de conseils en gestion et de soutien en cas de litige à l'extérieur de son emploi. En août 2005, il a reçu une lettre de M. Allen, directeur du Bureau des services fiscaux de Toronto Centre, lui signifiant que sa demande était refusée au motif qu'il travaillait dans une section spécialisée et que l'entreprise proposée pourrait constituer un conflit d'intérêts (pièce G-3).

15 Après avoir reçu la lettre de M. Allen, le fonctionnaire a demandé un transfert au groupe de la vérification internationale parce que le travail dans ce secteur n'avait rien à voir avec les évaluations auprès de clients externes. À la suite de son transfert à la section du REATB, en avril 2006, le fonctionnaire a présenté une deuxième demande de permission d'exécuter du travail à l'extérieur (pièce G-4).

16 Le fonctionnaire a soutenu que le travail à l'extérieur qu'il proposait ne s'apparentait aucunement au travail qu'il exécutait pour la section du REATB. L'entreprise qu'il souhaitait démarrer devait fournir des services apparentés à l'évaluation d'entreprises locales, plus précisément des services de planification des affaires et du marketing et des études de faisabilité; des services de conseils en gestion, notamment pour la préparation de plans d'affaires; des services de consultation financière, ce qui comprend l'évaluation et le financement d'entreprises et la quantification des dommages; du soutien en cas de litige, notamment pour la quantification des dommages, et des services ayant trait aux fusions et aux acquisitions, ce qui comprend l'évaluation d'entreprises.

17 Le fonctionnaire a reçu une lettre de M. Allen, datée du 15 septembre 2006 (pièce G-5), en réponse à sa deuxième demande d'autorisation en vue d'effectuer du travail à l'extérieur. Sa demande a encore une fois été refusée au motif que l'emploi extérieur proposé constituait un conflit d'intérêts potentiel, conformément aux alinéas 3a), c) et (e) de la section B du Code et lignes directrices sur les conflits d'intérêts (le « Code »). M. Allen a également signifié au fonctionnaire qu'il devait mettre un terme aux activités de son entreprise de conseils en gestion ayant reçu l'aval d'un ancien directeur en 1993, au motif que l'approbation n'était plus valide. Il a également fait valoir que le fonctionnaire n'avait pas divulgué l'existence de cette entreprise au moment du dépôt du rapport confidentiel exigé par le Code et qu'il avait indiqué dans son « attestation de l'employé » qu'il ne participait à aucune activité à l'extérieur de son emploi devant être signalé dans un rapport confidentiel.

18 M. Allen a déclaré qu'il avait sollicité les opinions et avis d'autres personnes avant de préparer la lettre du 15 septembre 2006 (pièce G-5). Il a notamment envoyé la demande du fonctionnaire à la section des ressources humaines de l'administration centrale et a consulté M. Sadrian, qui était alors directeur adjoint par intérim de la Division de la vérification. M. Allen a expliqué qu'il s'est adressé à M. Sadrian parce qu'il se demandait s'il n'avait pas une opinion trop arrêtée et qu'il voulait avoir une deuxième opinion, et ce, même si M. Sadrian n'était pas responsable de fournir des conseils sur les conflits d'intérêts et qu'il n'avait aucun lien hiérarchique avec le fonctionnaire.

19 M. Sadrian a expliqué que, lorsqu'on lui demandait d'examiner des demandes de cette nature, il étudiait normalement la description de travail de l'employé, l'emploi à l'extérieur proposé et le Code. Comme certaines activités extérieures peuvent être acceptées, il ne voulait pas refuser arbitrairement les demandes. Dans le cas qui nous intéresse, il a examiné la description de travail du fonctionnaire (pièce E-7) et sa demande (pièce G-4) avant de préparer une note de service à l'intention de M. Allen (pièce G-6).

20 Selon M. Sadrian, l'entreprise proposée par le fonctionnaire constituait un conflit d'intérêts potentiel, voire un conflit d'intérêts réel, et il en a informé M. Allen. À son avis, le nom de l'entreprise proposée, « RCT Consulting », ressemblait à « Revenue Canada Taxation » ([traduction] Revenu Canada, Impôt), ce qui aurait pu créer des malentendus. Il craignait également l'éventualité d'un conflit dans le cadre des services de conseils en gestion proposés par le fonctionnaire. Il a expliqué que toutes les opérations commerciales tiennent compte des conséquences fiscales et, dans certaines situations, l'impartialité et l'objectivité du fonctionnaire auraient pu être remises en question. La clientèle visée par l'entreprise du fonctionnaire était constituée des mêmes personnes qui avaient des différends avec l'ARC, et il était difficile d'imaginer qu'il puisse demeurer impartial. Selon lui, le fonctionnaire n'aurait pu faire autrement que de conseiller ses clients en fonction de ses connaissances acquises dans le cadre de son travail auprès de l'employeur. M. Sadrian a également conclu que le travail de soutien en cas de litige proposé par le fonctionnaire aurait pu le placer en situation de conflit avec l'employeur parce qu'il aurait pu faire partie des deux camps à la fois. À son avis, les fusions et les acquisitions ont toutes pour but de gérer les incidences fiscales. Par ailleurs, les services d'évaluation d'entreprises proposés étaient en conflit direct avec l'ancien poste du fonctionnaire et auraient pu être reliés à son poste actuel.

21 Lors du contre-interrogatoire, M. Sadrian a reconnu qu'il ne connaissait pas le fonctionnaire, qu'il ne lui avait pas parlé de la proposition et qu'il avait forgé son opinion en se basant sur la lettre du fonctionnaire (pièce G-4), la description de travail (pièce E-7) et le Code. Il a aussi confirmé qu'il n'a pas pris la décision de ne pas autoriser le fonctionnaire à exercer sont emploi extérieur. C'est M. Allen qui a pris cette décision.

22 M. Allen a expliqué qu'il avait pris sa décision en se basant sur la note de service de M. Sadrian, sur les conseils reçus de la section des ressources humaines de l'administration centrale et sur son propre examen du Code. Rien n'indiquait que le fonctionnaire était en situation de conflit d'intérêts réel, mais il y avait possibilité ou apparence de conflit. Il a fait valoir que bien que le fonctionnaire n'ait pas l'intention de fournir des conseils fiscaux, certaines personnes auraient pu utiliser ses évaluations à leurs propres fins, et le fonctionnaire n'exerçait aucun contrôle sur la manière dont son travail serait utilisé. À titre d'exemple, il a fait remarquer que dans les cas de rachats d'actions ou d'entreprises, l'évaluation des actions aurait des incidences au plan fiscal si les actions étaient vendues. Selon lui, les clients du fonctionnaire auraient pu croire qu'ils bénéficieraient d'avantages du fait que le fonctionnaire était un employé de l'ARC, même si ça n'avait pas réellement été le cas.

23 Le fonctionnaire a déclaré qu'il avait reçu une copie de la note de service de M. Sadrian (pièce G-6) et qu'il n'était pas d'accord avec celle-ci. À son avis, M. Sadrian ne comprenait pas en quoi consiste le travail d'un évaluateur d'entreprise et le soutien en cas de litige. Il a ajouté qu'il n'avait aucunement l'intention de fournir des conseils en matière de comptabilité financière ou de réorganisation des affaires. Il voulait plutôt fournir des services de planification des affaires et du marketing et des études de faisabilité, ce qui n'aurait eu aucune incidence sur le revenu ou sur l'impôt à payer. Par ailleurs, l'information qu'il aurait utilisée était du domaine public et n'aurait pas été acquise dans le cadre de ses fonctions auprès de l'employeur. Il a fait valoir que les renseignements sur les contribuables dont dispose l'employeur n'étaient pas pertinents à son projet d'entreprise. Il a ajouté que l'utilisation des renseignements portant sur l'impôt sur le revenu serait contraire à l'éthique et non pertinente. Il a expliqué que l'évaluation d'une entreprise est propre à cette entreprise et qu'il est nécessaire d'utiliser des renseignements du domaine public pour procéder à des vérifications.

24 Le fonctionnaire a soutenu que, contrairement à ce que M. Sadrian avait dit à M. Allen (pièce G-6), il n'avait pas l'intention de fournir des services de comptabilité, de réorganisation des affaires ou de restructuration du capital et que la préparation d'un plan d'affaires n'avait aucune incidence sur le revenu ou la fiscalité. Il avait utilisé l'expression [traduction] « services de consultation financière » dans le sens que lui donnent les cabinets de comptables agréés pour désigner l'évaluation et le financement des entreprises et la quantification des dommages. Cette activité diffère de la prestation de conseils financiers et est très pointue. Sa proposition excluait tout ce qui se rapporte à la comptabilité, à la réorganisation des affaires ou à la restructuration du capital.Il a fait valoir que M. Sadrian ne comprenait pas non plus ce que comporte le soutien en cas de litige et qu'il semblait croire, erronément, que le fonctionnaire participerait au litige aux côtés des contribuables. En réalité, il ne s'agit que de fournir des services de quantification des dommages.

25 Le fonctionnaire a soutenu ne jamais avoir eu connaissance de fusions et d'acquisitions réalisées à des fins fiscales exclusivement et qu'il avait proposé de ne traiter que des évaluations n'ayant aucune incidence au plan fiscal et des opérations sans lien de dépendance et de n'utiliser que l'information du domaine public. Il a fait valoir qu'il n'avait jamais proposé de fournir des services reliés à des acquisitions par emprunt et qu'il était peu probable qu'on fasse appel à lui pour des services de cette nature. De plus, sa proposition ne visait pas les achats dans le domaine public. Il a fait valoir qu'il aurait préparé des analyses de prix en vue de la vente, de la fusion ou de l'acquisition d'entreprises privées et aurait aidé les clients à obtenir du financement bancaire et à préparer des plans d'affaires.

26 Le fonctionnaire a reconnu que, à titre d'employé de l'ARC, il lui incombait de signaler toute personne qu'il soupçonnait de prendre part à une fraude fiscale. Il a fait valoir que son emploi extérieur n'aurait pas compromis sa capacité de s'acquitter de cette obligation. Il a aussi affirmé que toute personne faisant appel à ses services aurait su au préalable qu'il travaillait pour l'ARC et qu'il était tenu de signaler toute fraude fiscale.

C. Dossier de la CRTFP 566-34-2705

27 Le fonctionnaire a soutenu avoir indiqué, dans son plan d'apprentissage individuel (pièce E-2), qu'il souhaitait assister à la conférence sur les sociétés étrangères affiliées, soit une conférence externe qui porte sur le REATB. Il a expliqué qu'il avait parlé à son superviseur immédiat, Derek Chibba, en août ou en septembre 2007, au sujet de sa demande pour assister à la conférence. Son superviseur lui avait alors dit de soumettre sa demande, mais qu'il ne pouvait pas garantir qu'elle serait approuvée parce que cela dépendait des nécessités du service.

28 Le fonctionnaire a expliqué qu'il souhaitait assister à ce cours qui lui aurait permis de connaître la perspective d'experts externes en matière de droit. Il devait également suivre 20 heures de formation structurée et vérifiable pour maintenir ses titres professionnels, ainsi que 60 heures de formation non structurées. Il a indiqué qu'il accumulait la plus grande partie des heures de formation requises dans ses temps libres et a reconnu qu'il n'était pas tenu d'être titulaire d'un titre professionnel pour occuper son poste.

29 Le fonctionnaire avait demandé l'autorisation d'assister à des conférences pendant qu'il travaillait à la section de l'évaluation des biens immobiliers, entre 2002 et 2006. Avant 2004, il a assisté à deux ou trois conférences, mais à aucune autre par la suite. En 2005, il a déposé un grief lorsqu'on lui a refusé sa demande de participation à une conférence des évaluateurs d'entreprises canadiens. Le grief a été accueilli en partie au troisième palier, en mai 2007 (pièce G-1). Le fonctionnaire a présenté sa demande pour assister à la conférence sur les sociétés étrangères affiliées à l'été 2007, après avoir reçu la réponse relative à son grief.

30 En contre-interrogatoire, le fonctionnaire a reconnu qu'il travaillait à la section du REATB depuis un peu plus d'un an seulement lorsqu'il a présenté sa demande pour assister à la conférence sur les sociétés étrangères affiliées. De même, il a reconnu ne pas avoir soumis d'autres demandes pour assister à des conférences après avoir présenté la demande visée par le présent grief. Il a admis que l'organigramme de la section (pièce E-1) comptait sept ou huit autres employés, et que ceux-ci étaient tous de niveaux supérieurs à lui. Il a toutefois précisé qu'il était le seul à avoir demandé d'assister à la conférence.

31 Le fonctionnaire a soutenu que M. Chibba lui avait dit que sa demande ne serait pas approuvée en raison des nécessités du service. Après avoir appris de M. Chibba que sa demande était refusée, il a demandé de rencontrer M. Dempsey, qui était le gestionnaire du groupe de la vérification internationale. M. Dempsey a confirmé que la demande du fonctionnaire ne serait pas approuvée.

32 M. Dempsey a déclaré qu'une personne lui avait parlé de la conférence sur le REATB et lui avait mentionné qu'il serait important d'y envoyer un employé. Il ne se rappelait plus qui lui avait parlé de la conférence et mais il se rappelait de la conversation dans son ensemble. Il a expliqué qu'il avait décidé de ne pas approuver la demande du fonctionnaire parce que son budget ne lui permettait d'envoyer qu'une seule personne à la conférence. Il estimait qu'il serait plus indiqué d'envoyer M. Chibba, soit le chef d'équipe et l'employé ayant le plus d'ancienneté et d'expérience, lequel pourrait ensuite partager les documents avec le reste de l'équipe et faire une présentation officielle à l'intention des employés. Dans un courriel daté du 5 novembre 2008 (pièce E-4), il a décrit ce que M. Chibba avait fait après avoir assisté à la conférence.

33 En contre-interrogatoire, M. Dempsey a expliqué que le budget de formation du personnel était établi pour la section et qu'il devait obtenir l'autorisation d'envoyer des personnes en formation lorsque des occasions se présentaient. Il a fait valoir que pratiquement toute la formation se donnait à l'interne, et c'est pourquoi il aurait demandé l'autorisation du directeur adjoint de la Direction générale de la vérification avant d'envoyer une personne à la conférence sur le REATB. Il ne pouvait pas dire avec certitude qui était le directeur adjoint à ce moment, mais il croyait que c'était peut-être Paul Loo. Il ne se souvenait pas non plus exactement s'il en avait réellement parlé au directeur adjoint, ni ce qu'il avait fait, mais il a précisé qu'il n'aurait pas pu envoyer une personne à la conférence sans l'approbation du directeur adjoint.

34 M. Dempsey a expliqué que, comme il était coûteux d'envoyer des employés à des conférences, l'employeur recourait à de la formation interne, comme le cours décrit dans la pièce E-4. Cependant, au moment du contre-interrogatoire, il a confirmé que le cours décrit dans la pièce n'avait pas été donné avant son départ à la retraite en 2010. Il a dit que l'approche générale de l'employeur en ce qui a trait à la participation d'employés aux conférences était énoncée dans les pièces E-4, E-5 et E-6, qui sont des courriels qu'il a échangés avec M. Loo en novembre 2008.

35 Dans ces courriels, M. Dempsey expliquait à M. Loo que M. Chibba avait assisté à la conférence sur le REATB en question et qu'il avait ramené les documents distribués à la conférence pour que les autres employés puissent en prendre connaissance. M. Chibba devait également faire un exposé officiel au personnel pour présenter les documents en question. Cet exposé n'avait pas encore été présenté en novembre 2008 en raison de difficultés techniques reliées à la préparation du CD-ROM contenant les présentations faites à la conférence. M. Dempsey a également expliqué à M. Loo que s'il devait commencer à envoyer du personnel à des conférences, comme celle à laquelle demandait d'assister le fonctionnaire, il commencerait par envoyer les vérificateurs du REATB ayant le plus d'expérience et passerait ensuite aux autres employés en fonction de leurs années d'expérience parce que les employés les plus expérimentés profiteraient davantage de leur participation à la conférence. À son avis, M. Campione ne serait pas admissible à participer à une conférence avant plusieurs années. Il a indiqué que la conférence représentait une excellente occasion de formation, mais qu'elle était coûteuse et que c'était la raison pour laquelle l'employeur était réticent à y envoyer du personnel.

III. Résumé de l'argumentation

A. Pour le fonctionnaire

1. Dossier de la CRTFP 566-34-2704

36 Le fonctionnaire m'a renvoyée à Bouthillette et al. c. Conseil du Trésor (Revenu Canada, Accise, Douanes et Impôt), dossier de la CRTFP 166-2-28527 à 28533 (19990208), qui portait sur une disposition d'une convention collective semblable à celle en cause dans le présent grief. Il a fait valoir que l'arbitre de grief devait déterminer si le travail proposé par un employé a été désigné comme pouvant constituer un conflit d'intérêts. Dans Bouthillette et al., une délimitation claire pouvait être tracée étant donné que le travail proposé était désigné expressément dans la politique relative aux conflits d'intérêts en vigueur à ce moment. En l'espèce, il n'est pas possible de tracer une telle délimitation.

37 Dans Threader c. Canada (Conseil du Trésor), [1987] 1 C.F. 41 (C.A.), la Cour d'appel fédérale a établi le critère s'appliquant pour déterminer s'il existe un conflit d'intérêts. La Cour s'est demandé si une personne bien renseignée qui étudierait la question de façon réaliste conclurait qu'un fonctionnaire serait influencé, dans l'exécution de ses fonctions, par des considérations liées à des intérêts personnels. La décision relative à un conflit d'intérêts doit être prise de manière rationnelle, informée et objective. En l'espèce, l'employeur a admis qu'il n'y avait pas de conflit d'intérêts véritable ou réel. Il a plutôt fondé sa décision sur un conflit d'intérêts potentiel ou apparent.

38 L'évaluation de l'employeur selon laquelle l'entreprise externe proposée par le fonctionnaire constituait un conflit d'intérêts comportait de nombreux problèmes. Par exemple, la note de service de M. Sadrian renvoyait à des activités auxquelles le fonctionnaire, selon son témoignage, n'avait aucunement l'intention de se livrer. L'inquiétude manifestée par l'employeur concernant l'accès du fonctionnaire à certains renseignements dans le cadre de ses fonctions démontre qu'il est enclin à croire que les employés commettront des actes répréhensibles. Cependant, le fonctionnaire a déclaré que, bien qu'il ait accès à une grande quantité de renseignements, ceux-ci ne lui seraient pas utiles à l'extérieur de son travail habituel. Il a également indiqué qu'il s'était donné beaucoup de mal pour éviter de se retrouver en conflit d'intérêts. Il n'y avait pas de recoupement entre la nature du travail exécuté pour l'employeur et son entreprise privée.

39 Le fonctionnaire a fait valoir que l'employeur avait adopté une position très rigide à l'égard des conflits d'intérêts, laquelle avait essentiellement pour effet de refuser à tous les vérificateurs la possibilité d'utiliser leurs compétences à l'extérieur du travail. Outre le fait que le travail proposé par le fonctionnaire n'était pas désigné dans le Code, l'employeur était tenu de faire une évaluation raisonnable. En tenant pour acquis que le fonctionnaire utiliserait des méthodes non appropriées ou en évaluant des services que le fonctionnaire n'avait pas l'intention d'offrir dans son emploi extérieur, l'employeur n'a pas procédé à une évaluation raisonnable.

40 Le fonctionnaire a déclaré que, même si l'on devait présumer que l'employeur pourrait désigner le travail proposé comme pouvant constituer un conflit d'intérêts par un autre moyen que le Code, il est toujours tenu d'agir de manière raisonnable. Le fonctionnaire m'a renvoyé à Dubé et Piton c. Conseil du Trésor (ministère de la Défense nationale), 2007 CRTFP 77. Il a fait valoir qu'une décision qui est fondée sur de l'information erronée ou sur une supposition erronée est arbitraire et déraisonnable.

41 Le fonctionnaire a soutenu qu'il n'avait nullement l'intention de commettre des actes répréhensibles et que les rapports produits par son entreprise privée reposeraient sur des renseignements du domaine public.

42 Le fonctionnaire a demandé que son grief soit accueilli et que des dommages lui soient accordés. Il m'a renvoyé à Chénier c. Conseil du Trésor (solliciteur général du Canada – Service correctionnel), 2003 CRTFP 27.

2. Dossier de la CRTFP 566-34-2705

43 Le fonctionnaire a soutenu que le titre de la clause 18.03 de la convention collective était permissif et qu'il laissait entendre que la participation aux conférences était encouragée. En invoquant Regional Municipality of Hamilton-Wentworth Police Services Board v. Hamilton-Wentworth Police Association (2002), 105 L.A.C. (4e) 139, le fonctionnaire a prétendu que l'utilisation de l'expression « a le droit » dans la clause 18.03b) indiquait qu'il s'agissait d'un droit absolu et que l'employeur était tenu de veiller à ce que les employés aient la possibilité d'assister à des conférences. En ne permettant pas au fonctionnaire d'assister à la conférence sur le REATB comme il le demandait, l'employeur a violé la clause 18.03b).

44 Bien que le droit d'un employé d'assister à une conférence soit soumis aux nécessités du service, aucun élément de preuve n'a été présenté démontrant que l'employeur avait tenu compte des contraintes du service. M. Dempsey a déclaré avoir décidé d'envoyer le chef d'équipe à la conférence au lieu du fonctionnaire en raison de son ancienneté et du fait que le chef d'équipe pourrait partager les renseignements émanant de la conférence avec les autres membres de la section.

45 La question en l'espèce n'est pas de savoir s'il existe des solutions de rechange à la participation d'un employé à une conférence, mais bien de déterminer si on devrait accorder à un employé la possibilité d'assister à une conférence. Aucun élément de preuve n'a été présenté démontrant que M. Dempsey avait pris en considération les demandes d'autres employés qui souhaitaient assister à cette conférence ou qui avaient indiqué la conférence dans leurs plans d'apprentissage. Il n'a jamais été question des nécessités du service, et la question des contraintes budgétaires n'a été soulevée qu'en novembre 2008, une fois la demande du fonctionnaire rejetée. Par ailleurs, la thèse de l'employeur relativement aux contraintes budgétaires ne reconnaissait pas son obligation d'évaluer les demandes des employés pour assister à des conférences. 

46 Le refus de l'employeur d'approuver la demande du fonctionnaire pour assister à la conférence était particulièrement notable du fait que le fonctionnaire avait déposé un grief sur la même question plusieurs années auparavant et que ce grief avait été partiellement accueilli. L'employeur s'était engagé à étudier d'autres possibilités à la suite de ce grief et avait donc une obligation spéciale d'étudier la demande du fonctionnaire. Malgré ce grief antérieur, le fonctionnaire n'a pas assisté à une conférence depuis huit ans, ce qui démontre que l'employeur ne lui a pas fourni la possibilité d'assister à des conférences, contrevenant ainsi à la clause 18.03 de la convention collective.

47 Le fonctionnaire a demandé que le présent grief soit accueilli et que l'employeur soit tenu de l'autoriser à assister à la prochaine conférence sur le REATB.

B. Pour l'employeur

1. Dossier de la CRTFP 566-34-2704

48 L'employeur m'a renvoyée à Spencer c. Administrateur général (ministère de l'Environnement), 2007 CRTFP 123, confirmée par 2008CF 1395, et Canada (procureur général) c. Assh, 2005 CF 734, qui a infirmé Assh c. Conseil du Trésor (Anciens combattants), 2004 CRTFP 111. Il a fait valoir que la compétence d'un arbitre de grief de la CRTFP est limitée par le paragraphe 209(1) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et, plus particulièrement compte tenu des circonstances du présent grief, par l'alinéa 209(1)a), qui prévoit qu'un employé peut renvoyer à l'arbitrage tout grief portant sur l'interprétation ou l'application d'une disposition d'une convention collective. Comme l'article 229 dispose qu'un arbitre de grief de la CRTFP ne peut modifier une convention collective, celui-ci doit s'en tenir au libellé de la convention collective.

49 Le libellé de la clause 46 de la convention collective est clair et non équivoque. Il est formulé de manière générale et n'impose pas de restriction quant à la manière dont l'employeur peut désigner un emploi extérieur comme constituant un conflit d'intérêts. Il ne renvoie pas au Code ou à une politique. Par conséquent, la compétence d'un arbitre de grief se limite à déterminer si l'emploi extérieur correspond à un domaine désigné par l'employeur comme pouvant constituer un conflit d'intérêts, tel qu'il est prévu par la convention collective. Comme le Code n'est pas inclus dans la convention collective, l'arbitre de grief n'a pas compétence pour conclure qu'il a été enfreint. L'employeur m'a renvoyé à la définition de « specify » ([traduction] désigné) du Shorter Oxford English Dictionary (3e éd.), ainsi qu'à Spacek c. Agent du revenu du Canada, 2007 CRTFP 115 et Perras c. Conseil du Trésor (Revenu national - Douanes et Accises), dossier de la CRTFP 166-2-16335 (19890516). L'employeur a fait valoir que Perras, Bouthillette et al. et Fraser et Skinner c. Conseil du Trésor (Revenu Canada - Impôt), dossier de la CRTFP 166-2-25464 et 25465 (19960628), lesquelles se sont penchées sur la compétence d'un arbitre de grief de la CRTFP à examiner des politiques ou des lignes directrices, étaient des instances instruites sous le régime de l'ancienne Loi et ne s'appliquent pas.

50 Selon l'employeur, la preuve a démontré qu'il avait étudié sérieusement la demande du fonctionnaire. M. Allen a affirmé qu'il comprenait les besoins du poste du fonctionnaire et qu'il avait évalué ceux-ci en tenant compte de la proposition du fonctionnaire. Personne n'a contesté le fait que l'employeur a examiné attentivement le Code et qu'il a désigné les domaines qu'il considérait comme constituant un conflit d'intérêts apparent.  

51 L'employeur a fait valoir que l'affaire dont j'étais saisie ne concernait pas une mesure disciplinaire. Le fonctionnaire demandait plutôt un réexamen de la décision de la direction, conformément au Code, et il voulait que l'on procède à une analyse détaillée du Code parce qu'il n'était pas d'accord avec la décision de la direction. Dans Duske c. Agence canadienne d'inspection des aliments, 2007 CRTFP 94, il a été établi qu'il fallait s'adresser à la Cour fédérale pour contester une décision fondée sur une politique telle que le Code. L'employeur m'a également renvoyée à Spencer, Assh et Spacek quant à l'allégation que les politiques d'un employeur ne peuvent pas faire l'objet d'un grief pouvant être renvoyé à l'arbitrage.

52 L'employeur a déclaré qu'il avait examiné le Code et qu'il avait ensuite signifié au fonctionnaire, par voie d'une lettre, que l'activité envisagée serait susceptible de créer un conflit d'intérêts apparent. La lettre s'inscrivait dans la portée de la convention collective puisqu'elle désignait un domaine qui pouvait donner lieu à un conflit d'intérêts. Par conséquent, l'employeur a demandé que le grief soit rejeté.

2. Dossier de la CRTFP 566-34-2705

53 L'employeur a fait valoir que le libellé de la convention collective était clair et non équivoque. Les possibilités d'assister à des conférences dépendent des nécessités du service, ce qui comprend les contraintes budgétaires. La demande du fonctionnaire d'assister à la conférence a été rejetée en raison de contraintes budgétaires et des nécessités du service.

54 Le fonctionnaire a soutenu avoir présenté de nombreuses demandes pour assister à des conférences par le passé. Or, il était en poste dans la section du REATB depuis un an seulement lorsqu'il a présenté sa demande de participation à la conférence sur le REATB. Lorsqu'il occupait un poste dans son ancienne section, il avait assisté à deux ou trois conférences. L'employeur a affirmé qu'en réalité, il avait assisté à deux conférences sur les trois ayant été offertes pendant qu'il occupait son ancien poste. De plus, la demande faisant l'objet du présent grief est la seule demande pour assister à une conférence qu'il a présentée alors qu'il était à la section du REATB.

55 L'employeur a prétendu que la clause 18.03b) de la convention collective prévoit simplement qu'un employé a le droit d'assister « de temps à autre » à des conférences, « sous réserve des nécessités du service ». Il est clair que l'employeur peut tenir compte des contraintes budgétaires et des nécessités du service et que, par conséquent, l'obligation est discrétionnaire.

56 Par ailleurs, l'employeur n'a pas d'obligation spéciale à l'égard du fonctionnaire en raison de son grief antérieur. Ce grief a été déposé lorsqu'il occupait un autre poste au sein d'un autre groupe de travail. Il n'est pas pertinent en l'espèce.

57 Le témoignage de M. Dempsey a permis d'établir que sa décision d'envoyer le chef d'équipe à la conférence au lieu du fonctionnaire était fondée sur le fait que le fonctionnaire était nouveau au sein de la section et qu'il avait donc une moins bonne compréhension des enjeux que le chef d'équipe. Elle a également été motivée par des préoccupations de nature budgétaire. Bien que le courriel de M. Dempsey expliquant les raisons de sa décision ait été envoyé seulement après les faits, il a soutenu que c'était bel et bien pour ces raisons qu'il a refusé la demande du fonctionnaire.

58 L'employeur a déclaré que le fonctionnaire n'avait pas démontré qu'il y avait eu violation de la convention collective et qu'il ne s'était donc pas acquitté du fardeau qui lui incombait. Pour ces motifs, le grief devrait être rejeté.

C. Réfutation du fonctionnaire

59 Le fonctionnaire a fait valoir que la jurisprudence et l'analyse de l'employeur relativement au dossier de la CRTFP 566-34-2704 étaient distinctes. Le fonctionnaire a notamment fait remarquer que les faits du grief initial dans Assh se distinguaient de ceux en l'espèce parce que, dans cette affaire, le fonctionnaire s'estimant lésé a fait valoir que le refus de lui permettre de conserver le don de son client constituait une mesure disciplinaire. Or, dans le présent grief, le fonctionnaire a allégué une violation de la convention collective, ainsi, un critère différent doit être appliqué. Le fonctionnaire a également signalé que la Cour fédérale dans Assh s'est dite préoccupée par le fait que l'employeur détermine unilatéralement s'il y avait violation d'une convention, et ce, sans qu'il y ait d'examen indépendant.

60 Le fonctionnaire a prétendu que Spacek n'était pas exécutoire et qu'elle ne devrait pas être suivie. Les lignes directrices en question dans cette affaire ne faisaient pas partie intégrante de la convention collective, et l'objet du grief ne permettait pas le renvoi à l'arbitrage, contrairement au grief en l'espèce, qui porte expressément sur une violation de la convention collective.

61 Le fonctionnaire a déclaré qu'il n'y avait aucune question dans Duske quant à la compétence de la CRTFP d'examiner l'application d'une politique sur les conflits d'intérêts, puisque le grief concernait une mesure disciplinaire pour insubordination. De même, dans Spencer, une politique ne s'inscrivant pas dans la convention collective se trouvait au cœur du litige. Il n'y avait aucun lien entre la disposition de la convention collective mentionnée dans le grief et la politique qui était en litige dans cette affaire. Une question se posait également pour savoir si le fonctionnaire s'estimant lésé dans cette affaire était même visé par les conditions de la convention collective.

62 Le fonctionnaire a fait valoir que l'objection soulevée par l'employeur relativement à la compétence devrait être rejetée, car autrement l'employeur pourrait adopter des politiques pour ensuite contester la compétence de la CRTFP à instruire des griefs concernant l'application de ces politiques.

IV. Motifs

A. Dossier de la CRTFP 566-34-2704

63 Le fonctionnaire a allégué que l'ordre émis par l'employeur de fermer ses entreprises extérieures était [traduction] « déraisonnable, injuste et punitif au plan financier ». Il a fait valoir que cet ordre portait atteinte à la clause 46.01 de la convention collective, qui est libellée comme suit :

46.01  Sauf s'il s'agit d'un domaine désigné par l'Employeur comme pouvant constituer un conflit d'intérêts, les employés ne se voient pas empêcher d'exercer un autre emploi hors des heures au cours desquelles ils sont tenus de travailler pour l'Employeur.

64 Le fonctionnaire a prétendu que le Code ne désignait pas expressément l'emploi extérieur proposé comme donnant lieu à un conflit d'intérêts. Par conséquent, l'employeur n'avait pas désigné le travail proposé comme un domaine pouvant constituer un conflit d'intérêts, conformément à ce qui est prévu dans la convention collective, pour l'empêcher d'exercer un emploi extérieur.

65 L'employeur a adopté la position selon laquelle il n'était pas tenu, aux termes de la convention collective, de déterminer tous les conflits d'intérêts potentiels dans le Code. De fait, la convention collective ne renvoyait pas au Code. À son avis, la convention collective exigeait simplement que l'employeur indique à un employé que l'emploi à l'extérieur proposé était dans un domaine désigné comme pouvant constituer un conflit d'intérêts. L'employeur a fait valoir que la compétence d'un arbitre de grief de la CRTFP se limitait à déterminer si l'employeur avait indiqué qu'il s'agissait d'un domaine de conflit d'intérêts potentiel.

66 Il me semble que ni l'une ni l'autre des interprétations ne soit entièrement compatible avec le libellé de la convention collective. Le principal objet de la clause 46.01 de la convention collective se retrouve dans la disposition principale, à savoir : […] les employés ne se voient pas empêchés d'exercer un autre emploi hors des heures au cours desquelles ils sont tenus de travailler pour l'employeur. » Le reste de la disposition est une exception au droit d'exercer un emploi à l'extérieur. La clause ne précise pas comment l'employeur peut désigner l'emploi à l'extérieur proposé comme constituant un conflit d'intérêts véritable ou potentiel. Par conséquent, le fait que le travail proposé ne soit pas indiqué expressément dans le Code n'est pas déterminant pour trancher la question.

67 Cependant, je ne crois pas que la simple mention de l'existence d'un conflit d'intérêts ou d'un conflit potentiel retire à l'arbitre de grief la compétence de déterminer s'il y a eu atteint au droit d'exercer un emploi à l'extérieur conféré par la clause 46.01 de la convention collective. À mon avis, il ne suffit pas de désigner simplement, par un moyen quelconque, l'emploi à l'extérieur proposé comme un domaine pouvant constituer un conflit d'intérêts. Il doit véritablement y avoir un conflit d'intérêts, au sens accordé par l'employeur. J'estime qu'un arbitre de grief doit avoir compétence pour déterminer si, au moment de sa décision, l'employeur a désigné par un moyen quelconque les domaines pouvant constituer des conflits d'intérêts, et si la décision a été prise de bonne foi et était raisonnablement lié à la préoccupation que le travail proposé constitue un conflit d'intérêts, parce que les deux éléments sont nécessaires pour établir l'exception au droit conféré par la convention collective.

68 En l'espèce, l'employeur a exprimé, dans la lettre que M. Allen a envoyée au fonctionnaire le 15 septembre 2006 (pièce G-5), sa crainte que l'emploi à l'extérieur proposé par le fonctionnaire puisse donner lieu à un conflit d'intérêts. M. Allen a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Les conseillers principaux de l'organisation ont examiné vos observations et je souscris à leur avis, à savoir que votre activité extérieure est également susceptible de vous imposer des obligations qui pourraient être incompatibles avec vos fonctions ou responsabilités officielles ou de remettre en question votre aptitude à vous acquitter de vos fonctions ou responsabilités officielles de manière objective.

Plus précisément, j'estime qu'il existe une possibilité de conflit d'intérêts, conformément à la section B des lignes directrices sur les conflits d'intérêts, alinéas 3a), c) et (e) […]

69 J'estime que la lettre de M. Allen satisfait à l'obligation de l'employeur d'indiquer qu'il s'agit d'un domaine désigné comme pouvant constituer un conflit d'intérêts. La question qui demeure est de savoir si la décision de l'employeur a été prise de bonne foi et si elle était raisonnable compte tenu des circonstances. Pour les motifs suivants, je crois que cela était le cas.

70 L'employeur définit le conflit d'intérêts comme suit dans le Code (pièce G-7) :

[Traduction]

[…] situations dans lesquelles les biens, affaires ou intérêts personnels d'un employé le mettent en situation de conflit d'intérêts réel, potentiel ou apparent par rapport à ses fonctions ou responsabilités officielles, ou situations dans lesquelles le jugement de l'employé peut être teinté de partialité et l'amener à ne pas agir au mieux des intérêts de l'ARC.

71 L'un des principes consacré dans le Code est l'exigence que les employés organisent leurs « affaires personnelles de façon à préserver et à accroître la confiance du public dans l'intégrité, l'objectivité et l'impartialité du gouvernement et de l'ARC […] ». Lorsqu'il y a affrontement entre les intérêts privés d'un employé et ses fonctions et responsabilités officielles, le Code prévoit que l'intérêt public prime sur les intérêts personnels de l'employé. Bien que les activités extérieures et l'emploi extérieur ne soient pas interdits, le Code indique clairement que ces activités ne peuvent pas placer les employés dans des situations de conflit d'intérêts réel, potentiel ou apparent.

72 Le Code ne précise pas quels sont les types de situations qui peuvent donner lieu à un conflit d'intérêts. Le fonctionnaire a fait valoir que, comme le Code n'interdit pas expressément le type d'emploi extérieur qu'il avait proposé, celui-ci n'était pas interdit. Cependant, comme l'a indiqué la Cour d'appel fédérale dans Canada (procureur général) c. Assh, 2006 CAF 358 :

[84] […] Les codes de déontologie sont forcément des documents non achevés et non exhaustifs, qui mettent l'accent sur les principes généraux (notamment, en l'espèce, l'interdiction de procéder à des transferts de valeurs économiques d'une valeur plus que minime), et qui répondent principalement aux problèmes qui se sont déjà posés. Ils doivent donc être interprétés et appliqués en conséquence.

73 En l'espèce, l'employeur a insisté plus particulièrement sur trois grands principes énoncés dans le Code qui lui semblaient pertinents compte tenu des circonstances, à savoir les alinéas 3a), c) et e) de la Section B :

Avant de vous lancer dans toute activité extérieure…

  1. Même si vous êtes un employé de l'ARC, vous pouvez malgré tout prendre part à une vaste gamme d'emplois ou d'activités à l'extérieur. Avant de vous lancer dans toute activité extérieure, vous devez vous assurer que l'activité :
    1. ne vous place pas dans une situation de conflit d'intérêts réel, potentiel ou apparent entre vos intérêts personnels et vos fonctions officielles;

    […]
    1. n'entraînera pas de situation où quelqu'un pourrait raisonnablement avoir l'impression que l'information privilégiée à laquelle vous avez accès vous a procuré un avantage;

    […]
    1. ne sèmera pas le doute dans l'esprit d'une personne en lui laissant croire que l'exercice de l'activité dont il est question pourrait vous rendre moins objectif dans l'exercice de vos fonctions officielles; […]

74 Comme il l'a décrit dans sa lettre du 19 juin 2006 (pièce G-4), le fonctionnaire proposait d'établir une entreprise extérieure qui fournirait des services de conseils en gestion, de consultation financière, de soutien en cas de litige, de consultation pour les fusions et les acquisitions et d'évaluation d'entreprises. Sa proposition a été examinée par M. Allen, par les conseillers en relations de travail ministériels et par M. Sadrian, qui a fourni une analyse écrite de la proposition (pièce G-6).

75 Dans son analyse de la proposition, M. Sadrian a conclu qu'il existait des conflits d'intérêts potentiels dans plusieurs domaines. Il a notamment signalé que l'entreprise de conseils en gestion du fonctionnaire pourrait comprendre des services de prestation de conseils sur des questions financières et comptables, de réorganisation des affaires, de préparation de plans d'affaires et de marketing et d'évaluation. Selon lui, ces services pourraient donner lieu à des conflits potentiels parce qu'ils pourraient impliquer la détermination des conséquences du revenu et de l'impôt et parce que le fonctionnaire avait accès à une grande quantité de renseignements sur les entreprises et sur les contribuables canadiens et étrangers. Il craignait que les services proposés de soutien en cas de litige puissent donner lieu à un conflit parce que rien ne permettait de garantir qu'aucun client du fonctionnaire ne se retrouverait au cœur d'un litige avec l'ARC.

76 M. Sadrian croyait également que les services relatifs aux fusions et acquisitions que proposait d'offrir le fonctionnaire pourraient le placer en situation de conflit d'intérêts parce que, comme il a expliqué (pièce G-6), [traduction] « il est très difficile d'imaginer que des opérations afférentes à des fusions ou des acquisitions puissent échapper entièrement à des considérations fiscales ». Par ailleurs, comme le fonctionnaire a accès aux bases de données de l'ARC, il y a apparence de conflit. M. Sadrian craignait également que les services d'évaluation d'entreprises aient des incidences fiscales et qu'ils créent une apparence de conflit en raison de l'accès du fonctionnaire à l'information et aux bases de données dans le cadre de son emploi à l'ARC.

77 Selon le fonctionnaire, M. Sadrian ne comprenait pas très bien ce qu'il proposait. Je ne suis pas d'accord. Il est possible que le fonctionnaire n'ait pas eu l'intention de fournir tous les services examinés par M. Sadrian, mais ce dernier a clairement établi qu'il avait évalué le potentiel de conflit d'intérêts en se basant sur ce que pourrait englober le type d'entreprise proposée. Il ressortait clairement des témoignages de M. Sadrian, ainsi que de M. Allen, à qui incombait la décision, qu'ils comprenaient la nature de la proposition du fonctionnaire et ses implications.

78 M. Allen a soutenu qu'il s'était fié à l'opinion de M. Sadrian, ainsi qu'à d'autres avis, avant de décider que les entreprises proposées par le fonctionnaire pourraient donner lieu à un conflit d'intérêts. Dans son témoignage, il a expliqué qu'il craignait que, même si le fonctionnaire n'avait pas l'intention de se placer en situation de conflit d'intérêts, il n'exerçait pas de contrôle sur l'utilisation que ses clients feraient du fruit de son travail extérieur, et qu'il existait donc un potentiel de conflit. Il a ajouté qu'il n'avait aucune raison de croire que le fonctionnaire était en situation de conflit d'intérêts véritable. Sa préoccupation était uniquement attribuable au potentiel de conflit et à la perception du public. À mon avis, il s'agit d'une préoccupation légitime. Le Code fait état non seulement des conflits véritables ou réels, mais également des conflits potentiels ou apparents, ainsi que de la perception du public.

79 Le fonctionnaire a fait valoir que l'approche de l'employeur était trop restrictive et qu'elle tenait pour acquis qu'il ferait une utilisation inappropriée des renseignements et des bases de données auxquels il avait accès dans le cadre de son emploi à l'ARC. Il a prétendu que son travail à l'ARC était différent du type de travail qu'il proposait.

80 Je crois que Duske traite de certaines des questions soulevées par le fonctionnaire. Dans cette affaire, l'arbitre de grief a conclu qu'un employé de l'Agence canadienne d'inspection des aliments (l'« ACIA ») avait violé le code sur les conflits d'intérêts s'appliquant en participant à l'abattage de bœufs musqués pour le compte d'une compagnie assujettie aux règles de l'ACIA. Même s'il n'existait pas de lien entre les tâches du fonctionnaire et le travail effectué pour la compagnie, l'ACIA a conclu qu'il était en conflit d'intérêts parce qu'il travaillait dans un secteur d'activité assujetti aux règles de l'ACIA. L'arbitre de grief a souscrit à cette décision, en ajoutant que, si les médias en venaient à s'intéresser aux activités de la compagnie, il serait difficile d'expliquer la participation de l'employé de l'ACIA aux activités d'une compagnie assujettie aux règles de l'ACIA.

81 L'arbitre de grief a conclu que le code visé dans cette affaire devrait être interprété en fonction de sa raison d'être. Il a déclaré que le « […] maintien de la confiance du public en l'intégrité, l'objectivité et l'impartialité du gouvernement est un principe explicite important du Code ».

82 Selon moi, la présente affaire soulève des questions semblables. Le fonctionnaire est un vérificateur à l'ARC. L'entreprise extérieure qu'il proposait aurait fourni des services d'évaluation d'entreprises et des actifs. Il est concevable que ses évaluations puissent être utilisées par les clients à des fins fiscales, même si elles ne sont pas réalisées dans ce but. On peut également concevoir que ses clients ou d'autres personnes puissent avoir l'impression que les clients bénéficient d'avantages en raison de son lien avec l'ARC.

83 Il est difficile de concilier le rôle du fonctionnaire en tant que vérificateur de la Division de la vérification de l'ARC avec sa proposition de fournir des services à titre de conseiller en gestion et de conseiller financier qui évalue les entreprises et les actifs et produit des plans d'affaires et des propositions financières, entre autres. À mon avis, même si l'emploi à l'extérieur proposé n'était pas relié à des tâches précises de son poste au sein du groupe de vérification internationale, il y avait un conflit d'intérêts apparent, si ce n'est véritable. Compte tenu de cette conclusion, je juge que la décision de l'employeur, à savoir que l'emploi à l'extérieur proposé par le fonctionnaire était un domaine désigné par l'employeur comme pouvant constituer un conflit d'intérêts, n'était pas déraisonnable ni contraire à la convention collective. Par conséquent, je dois rejeter le présent grief.

B. Dossier de la CRTFP 566-34-2705

84 Le 18 décembre 2007, le fonctionnaire a déposé un grief alléguant une violation de la clause 18.03 de la convention collective, etce, après s'être vu refuser sa demande d'assister à la conférence sur le REATB, qui avait lieu à Toronto, les 14 et 15 janvier 2008.

85 Par souci de commodité, le libellé de la clause 18.03 de la convention collective est reproduit ici :

18.03 Assistance aux conférences et aux congrès

a) Les parties à la présente convention reconnaissent que l'assistance ou la participation à des conférences, congrès, symposiums, ateliers et autres rencontres semblables contribue au maintien de normes professionnelles élevées.

b) Afin de bénéficier d'un échange de connaissances et d'expérience, un employé a le droit d'assister de temps à autre à des conférences et des congrès qui se rattachent à son domaine de spécialisation, sous réserve des nécessités du service.

c) L'Employeur peut accorder un congé payé et un montant de dépenses raisonnables, y compris les droits d'inscription, pour assister à ces rencontres, sous réserve des contraintes budgétaires et des nécessités du service.

d) L'employé qui assiste à une conférence ou à un congrès à la demande de l'Employeur pour représenter les intérêts de l'Employeur est réputé être en fonction et, au besoin, en situation de déplacement. L'Employeur défraie les droits d'inscription à la conférence ou au congrès lorsque l'employé est obligé d'y assister.

e) L'employé invité à participer à une conférence ou à un congrès à titre officiel, par exemple pour présenter une communication officielle ou pour donner un cours se rattachant à son domaine d'emploi, peut bénéficier d'un congé payé à cette fin et peut, en plus, recevoir le remboursement des droits d'inscription à une conférence ou à un congrès et de ses dépenses de voyage raisonnables.

f) L'employé n'a pas droit à une rémunération en vertu des articles 9, Heures supplémentaires, et 13, Temps de déplacement, pour les heures passées à la conférence ou au congrès et pour celles passées en voyage à destination ou en provenance d'une conférence ou d'un congrès, conformément aux dispositions du présent paragraphe, sauf dans les circonstances prévues en d) ci-dessus.

86 Le fonctionnaire a fait valoir que l'utilisation des termes « a le droit » dans la clause  18.03b) de la convention collective indiquait qu'il s'agissait d'un droit absolu et que l'employeur avait l'obligation de s'assurer que les employés avaient la possibilité d'assister à des conférences et des congrès. Même s'il a reconnu que ce droit était assujetti aux nécessités du service, le fonctionnaire a prétendu que rien ne démontrait que l'employeur avait tenu compte des nécessités du service au moment de prendre la décision de refuser sa demande.

87 L'employeur a fait valoir que le droit d'assister à des conférences et des congrès était discrétionnaire et assujetti aux nécessités du service et aux contraintes budgétaires. Il a soutenu que le refus de la demande du fonctionnaire était attribuable à ces deux considérations.

88 La clause 18.03 de la convention collective prévoit que les employés ont « le droit » d'assister « de temps à autre » à des conférences et des congrès, sous réserve des nécessités du service et des contraintes budgétaires. Bien que le libellé de la disposition dans son ensemble appuie indéniablement l'argument selon lequel les possibilités d'assister à des conférences et des congrès sont importantes pour la promotion professionnelle et le « maintien de normes professionnelles élevées », je ne crois pas, contrairement à ce que soutient le fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un droit absolu. La disposition doit être lue dans son ensemble. En l'espèce, le fonctionnaire a mis l'accent sur les termes « a le droit », sans tenir compte des conditions rattachées à ce droit. Tel qu'il est précisé dans la convention collective, le droit d'assister à des conférences et des congrès est tout d'abord un droit occasionnel, non un droit accordé toutes les fois qu'il est demandé. Par ailleurs, ce droit est accordé à la condition que la conférence ou le congrès soit rattaché au domaine de spécialisation de l'employé et sous réserve des nécessités du service et des contraintes budgétaires.

89 Néanmoins, l'employeur doit accorder l'attention nécessaire à la demande d'un employé. Il doit exercer son pouvoir discrétionnaire de manière raisonnable et de bonne foi, sans quoi le droit négocié dans la convention collective aurait peu de sens. Comme il a été statué dans Ewen c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2006 CRTFP 113, le pouvoir discrétionnaire doit être exercé de manière véritable et en tenant compte des circonstances de chaque cas, et non pas simplement en appliquant une politique rigide.

90 Seul M. Dempsey a fourni une preuve en ce qui a trait aux raisons du refus de la demande, et son souvenir des événements était loin d'être clair. Il n'était pas même certain du directeur adjoint qui autorisait la participation aux conférences et congrès. Cependant, il a clairement expliqué qu'il n'avait pas le pouvoir de décider combien d'employés, s'il y en avait, pouvaient assister à la conférence.

91 Je ne disposais d'aucun élément de preuve véritable pouvant expliquer pourquoi un seul employé a pu assister à la conférence. D'après la brochure de la conférence (pièce E-3), le coût d'envoyer un employé était de 1 725 $. Le seul élément de preuve qui traitait du coût était un courriel de M. Loo adressé à Tracey O'Brien (pièce E-6). Ni M. Loo ni Mme O'Brien n'ont témoigné, et le courriel était daté de près d'un an suivant le dépôt du grief contestant le refus de la demande du fonctionnaire de participer à la conférence. Je constate même que l'échange de courriels entre M. Dempsey, M. Loo et Mme O'Brien (pièces E-4, E-5 et E-6) a eu lieu en novembre 2008, juste avant que l'employeur réponde au grief au dernier palier. Dans ces circonstances et en l'absence de preuve directe, je ne crois pas que l'échange de courriels soit utile.

92 Il incombe à l'employeur d'établir l'existence des nécessités du service et des contraintes budgétaires. En l'espèce, rien ne démontre qu'il existait des contraintes budgétaires, puisque le seul témoin pour l'employeur sur cette question, M. Dempsey, a bien expliqué qu'il ne contrôlait pas le budget et qu'il ne décidait pas combien d'employés ou si des employés devaient être autorisés à assister à la conférence. Dans son témoignage, M. Dempsey a simplement indiqué que, comme quelqu'un avait décrété qu'il pouvait envoyer une seule personne, il a décidé d'envoyer M. Chibba parce qu'il était le chef d'équipe, qu'il avait une meilleure connaissance des enjeux que le fonctionnaire et qu'il pourrait partager l'information avec les autres employés de la section.

93 Si la preuve avait démontré que plus d'un employé de la section souhaitait assister à la conférence et que, en raison des contraintes budgétaires, une seule personne pouvait y assister, la solution de M. Dempsey aurait très bien pu être satisfaisante. Mais ce n'est pas le cas en l'espèce. D'après la preuve, le fonctionnaire était le seul employé de la section à demander d'assister à la conférence. Je peux comprendre que l'employeur ait voulu tirer le plus grand avantage possible pour tous en envoyant un employé chevronné à la conférence, mais je ne crois pas que cette considération constitue une véritable nécessité du service étant donné qu'un seul employé avait manifesté de l'intérêt à l'égard de cette conférence. À titre d'observation générale, je souligne que l'objet de la disposition de la convention collective est de permettre à un employé « […] de bénéficier d'un échange de connaissances et d'expérience […] » et qu'il irait à l'encontre de cet objet de permettre seulement aux employés ayant le plus d'expérience d'assister à des conférences.

94 L'explication de l'employeur ne me convainc pas de l'existence de véritables nécessités du service ou contraintes budgétaires. Cependant, l'employeur a également fait valoir que la convention collective prévoyait que le droit d'assister à une conférence devait être accordé « de temps à autre ». Comme le fonctionnaire avait seulement demandé d'assister à cette conférence, il n'avait pas démontré une violation de ce droit « occasionnel ».

95 Je suis d'accord pour dire que les termes et les phrases contenus dans les dispositions des conventions collectives ont un sens. En l'espèce, la phrase « de temps à autre » indique clairement que, même si le droit d'assister à des conférences et des congrès peut être accordé aux employés, ceux-ci ne peuvent pas s'attendre à assister à toutes les conférences et à tous les congrès auxquels ils demandent d'assister. La preuve a démontré que le fonctionnaire était affecté à la section du REATB depuis un an seulement lorsqu'il a demandé d'assister à la conférence en cause dans le présent grief et qu'il s'agissait de la seule conférence à laquelle il avait demandé d'assister depuis qu'il faisait partie de la section. Cependant, l'argument de l'employeur mène à la conclusion que, comme le fonctionnaire a demandé d'assister à une seule conférence, il n'avait aucun fondement sur lequel s'appuyer pour contester la décision de l'employeur. On pourrait se demander combien de demandes devraient être présentées et refusées avant que le fonctionnaire puisse établir qu'il y a eu violation de la convention collective.

96 À mon avis, en l'absence de preuve justifiant les nécessités du service et les contraintes budgétaires, la nécessité de trancher la question de la fréquence ne s'imposerait que si la preuve démontrait que l'employé avait eu la possibilité d'assister à d'autres conférences. Ce n'est pas le cas en l'espèce. Comme l'a souligné l'employeur, le fonctionnaire était nouveau dans la section et ce qui s'est passé quand il travaillait dans une autre section n'est pas pertinent en ce qui a trait à sa demande d'assister à une conférence se rattachant à son travail au sein de la section du REATB. Par conséquent, je conclus que la clause 18.03 de la convention collective a été violée lorsque la demande du fonctionnaire pour assister à la conférence sur le REATB a été refusée.

97 À titre de mesure corrective, le fonctionnaire a demandé que sa demande pour assister à la conférence soit accordée. Compte tenu du temps qui s'est écoulé, ce n'est pas possible. Je crois donc que la seule réparation qui convient à ce stade est une déclaration.

98 Pour ces motifs, je rends l'ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

99 Le grief correspondant au dossier de la CRTFP 566-34-2704 est rejeté.

100 Le grief correspondant au dossier de la CRTFP 566-34-2705 est accueilli. Je déclare que l'employeur a violé la clause 18.03 de la convention collective en privant le fonctionnaire de la possibilité d'assister à la conférence sur le REATB en janvier 2008.

Le 13 décembre 2013.

Traduction de la CRTFP

Kate Rogers,
arbitre de grief

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.