Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

L’Association des employés du Conseil de recherches (l’<<AECR>>) a allégué que l’employeur avait contrevenu à l’alinéa 190(1)c) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la <<Loi>>) en ne se conformant pas à l’article 107 de la Loi, lequel prévoit que les parties doivent respecter les conditions d’emploi durant la période de gel prévue par la loi, une fois signifié l’avis de négociation collective - le Conseil national de recherches du Canada (le <<CNRC>>), un organisme distinct, et l’AECR ainsi que d’autres agents négociateurs avaient auparavant intégré la Politique sur le réaménagement des effectifs (la <<PRE>>) à leurs conventions collectives - le CNRC, l’AECR et l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC) ont convenu de réviser la PRE, qui devait être révisée - dès le départ, le CNRC a imposé une condition exigeant d’obtenir l’approbation du Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) avant de mettre en œuvre toute modification à la PRE - le CNRC, l’AECR et l’IPFPC sont parvenus à un accord de principe sur les modifications à apporter à la PRE, mais le CNRC a ensuite consulté le SCT et a déclaré ne pas pouvoir procéder à deux modifications - l’AECR a soutenu que le refus du CNRC de mettre en œuvre ces modifications au motif qu’il n’avait pas réussi à obtenir du SCT le mandat de négocier des modifications à la PRE constituait une pratique déloyale de travail étant donné qu’il n’existait aucune autorisation législative exigeant l’approbation du SCT - la Commission a rejeté la plainte - lorsque des parties à une convention collective conviennent d’inclure une politique dans la convention collective, cette politique fait alors partie intégrante de la convention, et doit par conséquent être traitée de la même manière que n’importe quelle autre clause - la seule question à trancher était celle de savoir si une entente était intervenue pour modifier les dispositions de la convention collective durant la période de gel prévue par la loi - le CNRC avait imposé une condition sur la conclusion de toute entente avec la plaignante relativement aux modifications de la PRE, et aucune entente ne pouvait être cristallisée sans l’approbation du SCT - il n’y avait aucun élément de preuve établissant que l’AECR se serait opposée à cette approche ou qu’elle aurait été induite en erreur, ou aurait pu l’être, quant à la portée de cette condition - le problème s’est posé lorsque les parties ont inclus la PRE dans la convention collective sans avoir supprimé tout libellé pouvant contredire le libellé de la convention collective. Plainte rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2013-03-20
  • Dossier:  561-09-576
  • Référence:  2013 CRTFP 26

Devant une formation de la
Commission des relations de travail
dans la fonction publique


ENTRE

ASSOCIATION DES EMPLOYÉS DU CONSEIL DE RECHERCHES

plaignante

et

CONSEIL NATIONAL DE RECHERCHES DU CANADA

défendeur

Répertorié
Association des employés du Conseil de recherches c. Conseil national de recherches du Canada

Affaire concernant une plainte visée à l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Margaret Shannon, une formation de la Commission des relations de travail dans la fonction publique

Pour la plaignante:
Christopher Rootham, avocat

Pour le défendeur:
Michel Girard, avocat

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
le 15 janvier 2013.
(Traduction de la CRTFP)

I. Plainte devant la Commission

1 L’Association des employés du Conseil de recherches (la « plaignante » ou l’« AECR ») allègue que le Conseil national de recherches du Canada (le « défendeur » ou le « CNRC ») a contrevenu à l’alinéa 190(1)c) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « Loi ») en refusant de mettre en œuvre les modifications apportées à la politique sur le réaménagement des effectifs négociées conformément à la politique, modifications dont les parties ont convenu le 6 décembre 2011. La plaignante allègue que ces modifications font partie intégrante des conditions d’emploi et sont protégées en vertu du gel prévu par la loi stipulé à l’article 107 de la Loi.

II. Questions préliminaires

2 Puisque la politique sur le réaménagement des effectifs en question s’applique également aux fonctionnaires du CNRC représentés par l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC), j’ai demandé si on les avait avisés de la tenue de cette audience. L’avocat de l’AECR m’a informée qu’il en avait verbalement avisé l’IPFPC. Par ailleurs, le CNRC n’en avait pas avisé l’IPFPC. Aucun représentant de l’IPFPC ne s’est présenté à l’audience. Je suis convaincue que l’IPFPC a été suffisamment avisée de la tenue de la présente audience.

III. Résumé de la preuve

3 Les parties ont produit un exposé conjoint des faits, dont les principaux points s’énoncent comme suit :

[Traduction]

[…]

1) Les documents joints à cet exposé conjoint des faits sont authentiques et admissibles en preuve.

2) Les conventions collectives de toutes les six unités de négociation représentées par l’AECR sont échues, et les avis de négocier ont été signifiés, le tout selon le calendrier suivant :

Unité de négociation Date d’échéance de la convention collective Avis de négocier
Groupe soutien administratif (« A ») 30 avril 2011 3 février 2011
Groupe des services administratifs (« AS ») 30 avril 2011 3 février 2011
Groupe gestion des systèmes d’ordinateurs (« CS ») 21 décembre 2011 11 octobre 2011
Catégorie d’exploitation 30 juillet 2011 31 mai 2011
Groupe d’achat et d’approvisionnement (« PG ») 30 avril 2011 3 février 2011
Catégorie technique (« TO ») 31 mars 2011 1er décembre 2010

3) La politique sur le réaménagement des effectifs (PRE) du CNRC est intégrée aux conventions collectives de toutes les cinq unités de négociation représentées par l’AECR.

4) Le CNRC, l’AECR et l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada se sont rencontrés à plusieurs occasions en 2011 et en 2012 pour négocier des modifications à la PRE.

5) Le CNRC a informé les agents négociateurs qu’il devait obtenir un mandat dûment approuvé auprès du Conseil du Trésor.

6) Les trois parties sont parvenues à un accord de principe le 6 décembre 2011 au sujet de la version finale des modifications à apporter à la PRE. Les diverses modifications auxquelles les parties ont consenti à différents moments en 2011 ont été paraphées au moment de l’entente. […]

7) Les parties ont étudié le libellé précis de ces modifications, et en sont arrivées à une entente relativement à ces modifications le 18 janvier 2012. Les travaux de traduction en français des modifications convenues se sont poursuivis sur une courte période après le 18 janvier 2012. Le libellé convenu des modifications (dans les deux langues officielles) figure à l’annexe B du présent exposé conjoint des faits.

8) Le CNRC n’a pas mis en œuvre deux des modifications au libellé convenu de la PRE :

a) La modification apportée aux articles 3.6.4.7 et 3.6.13.5 (établissant une période de quatre semaines durant laquelle les employés mis en disponibilité ont le droit de présenter leur candidature à des postes à l’interne au CNRC);

b) L’augmentation du montant du remboursement accordé au titre des frais de planification financière, de 400 $ à 600 $.

4 La durée des conventions collectives pertinentes, qui intégraient la politique sur le réaménagement des effectifs, était de 18 mois. Par ailleurs, la politique sur le réaménagement des effectifs devait faire l’objet d’une négociation tripartite tous les trois ans.

5 Joan Van Den Bergh, négociatrice et agente principale des relations de travail auprès de l’AECR, a témoigné pour le compte de la plaignante. Elle a témoigné que la PRE avait été intégrée à toutes les conventions collectives de l’AECR lors de la dernière ronde de négociation et devait être renégociée selon le même cycle de négociation que celui stipulé dans la politique au moment de son intégration; il s’agissait d’un cycle de trois ans. La renégociation de la PRE a commencé vers la fin de novembre ou le début de décembre de l’année 2010. L’AECR et l’IPFPC ont renégocié la PRE simultanément avec le CNRC.

6 Dès le début de cette ronde de négociation, le CNRC a informé les deux syndicats qu’il n’avait pas encore obtenu le mandat de la part du Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) qui lui confèrerait le pouvoir de conclure une nouvelle entente relativement à la PRE. Le CNRC était toutefois disposé à amorcer le processus mais ne pouvait pas aborder les éléments financiers se rapportant aux propositions.

7 Les négociations ont été entreprises au sujet des éléments non financiers portant sur les questions de délai (périodes d’avis, périodes de marketing, périodes d’excédentaire), la protection salariale et l’adéquation des postes, et les questions administratives (tout ce qui n’était pas abordé dans l’un ou l’autre des éléments non financiers). Les éléments financiers comprenaient tous les éléments auxquels, comme reconnu par les parties, un facteur coût pour l’employeur était rattaché. Il y avait trois éléments de ce type qui devaient être abordés au cours de cette ronde de négociation sur la PRE : l’admissibilité aux versements prévus, l’admissibilité aux indemnités de mise en disponibilité, et l’admissibilité à l’indemnité pour les frais de planification financière. Il y avait aussi à régler la question de savoir si les indemnités provisoires devaient être incluses.

8 Les parties n’ont pas abordé les éléments financiers avant le 6 décembre 2011. La raison pour laquelle les parties ont alors abordé les questions financières malgré les réticences manifestées précédemment par le CNRC à discuter des sujets pour lesquels ils n’avaient pas obtenu un mandat, c’est que les représentants du CNRC étaient d’avis qu’ils avaient maintenant eu des indications de la direction dans laquelle le SCT voulait qu’ils aillent. En plus, les représentants du CNRC à la table de négociation avaient reçu l’approbation du Comité de la haute direction du CNRC. Le CNRC a alors présenté une proposition globale qui comprenait toutes les questions financières ainsi que les autres questions en suspens.

9 Une entente de principe portant sur toutes les questions ayant trait à la PRE a été conclue entre les parties lors de la séance de négociation du 6 décembre 2011. Il restait à peaufiner le libellé de certaines modifications à apporter à la PRE, et donc les parties ont convenu de se rencontrer le 12 janvier 2012. Entre-temps, les parties devaient s’échanger les libellés proposés. La dernière réunion à cet effet devait être le 18 janvier 2012.

10 Le 18 janvier 2012, les parties se sont rencontrées pour discuter de l’ébauche de la version finale de la nouvelle PRE afin de s’assurer qu’elle correspondait à ce que toutes les parties avaient convenu. Du 18 janvier 2012 au 27 février 2012, les parties ont cherché à établir la date à laquelle serait signée la nouvelle PRE. Le 27 février, le CNRC a demandé à l’AECR et à l’IPFPC de participer avec lui à une conférence téléphonique; le CNRC leur a alors fait savoir que le SCT venait de leur [traduction] « mettre des bâtons dans les roues ».

11 Selon le CNRC, le SCT venait d’aviser le CNRC qu’il ne pouvait pas signer la nouvelle PRE avant que toutes les nouvelles conventions collectives aient été conclues À ce moment-là, toutes les conventions collectives de l’AECR étaient échues, et un avis de négocier avait été signifié au CNRC pour toutes les six unités de négociation de l’AECR. Les négociations avaient d’ailleurs été déjà amorcées pour la Catégorie technique. Aucune convention collective n’a encore à ce jour été signée pour l’un ou l’autre de ces groupes, et ils n’ont fait l’objet d’aucune décision arbitrale à ce jour à cet égard. La PRE qui avait été renégociée n’a toujours pas été signée par les parties.

12 Mme Van Den Bergh a témoigné que cela avait [traduction] « indigné » autant l’AECR que l’IPFPC, car aucun lien n’avait jusqu’alors été établi entre la négociation de la nouvelle PRE et les négociations collectives pour chacun des groupes. L’AECR estimait qu’il s’agissait d’un stratagème employé par le SCT pour amener les syndicats à accepter les propositions portant sur les indemnités de départ. L’AECR et l’IPFPC avaient négocié de bonne foi avec le CNRC. Au mois de mars 2012, l’AECR a rencontré le CNRC pour discuter des moyens d’aller de l’avant face à l’imminence des annonces sur le réaménagement des effectifs. Le CNRC a indiqué à l’AECR qu’il pouvait mettre en œuvre tout ce sur quoi ils s’étaient entendus, sauf les modifications concernant une augmentation des indemnités pour la planification financière et le droit de présenter sa candidature à l’interne aux concours du CNRC durant une période de quatre semaines après la mise en disponibilité, car il s’agissait là d’un nouveau libellé. Les deux modifications convenues pouvaient être mises en œuvre en se fondant sur le libellé actuel de la PRE et ne nécessitaient pas un nouveau libellé.

13 Isabelle Gingras, vice-présidente aux Ressources humaines du CNRC, a témoigné pour le compte du défendeur. Elle a témoigné que la PRE était le document régissant tous les licenciements qui ont lieu au CNRC en raison d’un manque de travail ou de la suppression d’une fonction. Elle a participé aux rondes de négociation précédentes aussi bien qu’aux rondes les plus récentes portant sur la PRE.

14 La révision périodique triennale de la PRE n’a pas eu lieu durant la période visée par la Loi sur le contrôle des dépenses. Des discussions entre les parties sur la modification de la PRE ont eu lieu de la fin de l’année 2010 jusqu’au début de l’année 2012. La question du mandat du SCT a été soulevée à chaque rencontre et Mme Gingras a fait le point avec les syndicats à ce sujet à chaque fois. Dans un courriel daté du 26 août 2011 (pièce 3), Mme Gingras a avisé les parties que le SCT préférait aborder ensemble tous les mandats de négociation du CNRC plutôt que de traiter le mandat sur la PRE de manière distincte. Par conséquent, le CNRC n’était pas en mesure de conclure les négociations sur la PRE, mais souhaitait toujours poursuivre les discussions sur des questions autres que celle du mandat.

15 Le but recherché par la poursuite des discussions était de trouver un terrain d’entente et de régler des questions connexes, dans l’espoir qu’un mandat serait obtenu du SCT prochainement. Le CNRC n’était pas habilité à mettre en œuvre quelque élément convenu entre les parties sans en avoir reçu le mandat. Aucun mandat n’a été reçu avant la conclusion des pourparlers.

16 L’approbation du mandat du CNRC par le SCT était nécessaire, car la PRE avait été intégrée aux conventions collectives en 2004. Le CNRC exige que le SCT approuve tous les mandats relatifs à la négociation des conventions collectives. Une modification de la PRE nécessite donc dorénavant une modification de la convention collective. Le mandat a été reçu le 2 février 2012, mais il était différent de celui espéré.

17 L’AECR et l’IPFPC ont été avisés le 27 février 2012 que le mandat reçu ne permettrait pas de procéder à la mise en œuvre des modifications négociées relativement à la PRE jusqu’à ce que les différentes rondes de négociation collective aient été conclues, et que le CNRC n’était pas habilité à signer une entente relativement à la PRE séparée d’une entente globale sur les conventions collectives respectives. La mise en œuvre de quelque modification apportée à la PRE existante constituerait une violation du gel prévu par la loi des conditions d’emploi des membres de l’unité de négociation pertinente, ce gel prenant effet dès la signification de l’avis de négocier.

18 C’était décevant pour le CNRC, mais il était lié par la directive du SCT. La haute direction du CNRC a tenté de convaincre le SCT de permettre au CNRC de procéder à la mise en œuvre complète de la PRE sinon de permettre la tenue de négociations sur la PRE séparées des négociations portant sur les conventions collectives. Ces tentatives ont toutefois été vaines.

19 Mme Gingras a rencontré les agents négociateurs pour discuter des éléments pouvant être mis en œuvre sans l’approbation du SCT. Ils ont convenu de procéder à la mise en œuvre des éléments de l’entente de principe sur la PRE qui pouvaient l’être en conservant le libellé actuel de la PRE à cet égard. Deux éléments demeuraient alors en suspens : l’augmentation de l’indemnité des frais de planification financière et l’admissibilité aux concours internes après la mise en disponibilité.

IV. Résumé de l’argumentation

A. Pour la plaignante

20 L’AECR demande une déclaration disant que la PRE, telle que modifiée par l’entente de principe, doit être mise en œuvre relativement à toutes les unités de négociation de l’AECR ou, subsidiairement, que les fonctionnaires dont les postes figurent aux pièces 4 à 6 inclusivement bénéficient des élargissements des droits convenus dans l’entente de principe et qui ont partiellement été mis en œuvre par le défendeur.

21 Les six conventions collectives de l’AECR ont un libellé identique en ce qui a trait à l’exigence de la renégociation de la PRE :

La politique sur le réaménagement des effectifs du CNRC fait partie de la présente convention collective et devra être révisée et négociée par les signataires à la politique conformément aux modalités décrites dans la politique.

La question à trancher par la Commission est de savoir si le CNRC a le pouvoir ou non de modifier les dispositions de la PRE sans le consentement du SCT. Ni la politique, laquelle fait partie intégrante des conventions collectives, ni les conventions collectives elles-mêmes ne stipulent qu’il faut obtenir l’approbation des modifications par le SCT avant la conclusion d’une entente à ce sujet.

22 Les parties sont effectivement parvenues à une entente, comme le prouvent les articles dûment signés par les parties déposés à titre de pièce 1, à l’onglet C. La question de savoir si le CNRC peut ou non modifier les dispositions de la PRE sans le consentement du SCT est une question de compétence législative. Le CNRC est chargé de négocier les conventions collectives conclues avec ses fonctionnaires. Il est également chargé de mettre en œuvre l’entente intervenue, ce qui comprenait en l’espèce l’obligation de négocier la PRE du CNRC. La PRE du CNRC ne mentionne nulle part quelque participation du SCT dans ce processus, alors quelle pourrait bien être la source de son autorité à cet égard? L’article 112 de la Loi confère à tout organisme distinct le pouvoir de conclure une convention collective :

112. Avec l’agrément du gouverneur en conseil, tout organisme distinct peut conclure une convention collective avec l’agent négociateur d’une unité de négociation composée de fonctionnaires travaillant pour lui.

23 Or, pour que l’article 112 de la Loi trouve son application, la Commission doit tout d’abord conclure qu’une convention collective est en voie d’être conclue. Est-ce que la modification d’un document accessoire faisant partie d’une convention collective peut être assimilée à la signature d’une convention collective? Il a été statué dans Re St. Marys Cement and United Steelworkers, Local 9235, (2010) 194 L.A.C. (4e) 72 (appliquée dans Royal Ontario Museum v. Service Employees International, Local 2 Brewery, General & Professional Workers’ Union, décision de la Commission des relations de travail de l’Ontario portant le numéro MPA/Z100524, [2011] O.L.A.A. no 292 (QL)), qu’il n’y a pas violation d’une convention collective lorsqu’on modifie les dispositions d’un document accessoire intégré à la convention collective conformément à la formule d’amendement prévue dans ce document accessoire. Dans St. Mary’s, l’employeur avait unilatéralement modifié le régime de retraite, faisant passer celui-ci d’un régime de pension à prestations déterminées à un régime à cotisations déterminées. Le document-cadre du régime contient une disposition explicite autorisant l’employeur à modifier le régime. Le fait que ce document ait été intégré à la convention collective n’a pas empêché l’employeur d’exercer ce droit.

24 Il s’ensuit de St. Mary’s et Royal Ontario Museum que la convention collective n’a pas à prévoir l’inclusion d’un libellé supplémentaire portant sur la modification d’un document accessoire lorsqu’un tel libellé se retrouve dans le document accessoire lui‑même. Dans ce cas, le pouvoir de modifier les dispositions du document est prévu au paragraphe 3.6.22 de la PRE :

3.6.22.1 La politique sur le réaménagement des effectifs devra être négociée à tous les cycles de trois (3) années à compter de la date d’entrée en vigueur de celle-ci.

25 La demande de l’AECR de rendre exécutoire l’entente de principe est conforme aux dispositions de la convention collective et à l’approche adoptée à cet égard par la Cour fédérale du Canada dans AFPC c. Canada, (1983) 49 N.R. 349, de même que par la Commission dans Institut professionnel de la fonction publique du Canada c. Agence du revenu du Canada, 2006 CRTFP 29. Selon ces décisions, les conditions d’emploi des fonctionnaires peuvent être modifiées durant la période de gel prévue par la loi moyennant l’entente mutuelle des parties à cet effet, conformément à l’article 107 de la Loi. Lorsqu’une politique prévoit le pouvoir d’effectuer des modifications à cette politique, l’exercice de ce pouvoir ne constitue pas une modification des conditions d’emploi des fonctionnaires au cours de la période de gel prévue par la loi.

26 Le défendeur avait le pouvoir, en vertu de la PRE et de la convention collective, de négocier la PRE. Une entente de principe a été conclue et le défendeur a mis en œuvre une partie de ses dispositions. L’article 107 de la Loi ne saurait empêcher toute mise en œuvre des modifications durant la période de gel prévue par la loi, puisqu’on y prévoit notamment que les parties peuvent convenir de ne pas respecter une condition d’emploi en vigueur au moment de la signification de l’avis de négocier. L’entente à cet effet ne nécessite pas l’approbation du gouverneur en conseil stipulé à l’article 112 de la Loi, car les dispositions de l’article 107 ont un caractère plus spécifique que celles de l’article 112. Ce n’est qu’une fois qu’une entente est conclue au sujet d’une convention collective qu’un organisme distinct doit obtenir l’approbation du gouverneur en conseil pour conclure la convention collective.

27 Par ailleurs, la Loi ne prévoit nulle part que le défendeur doive obtenir un mandat auprès du SCT afin de pouvoir modifier la PRE, alors que la politique elle‑même lui confère déjà ce pouvoir. Les parties ne procédaient pas non plus à la conclusion d’une convention collective, et donc l’article 112 de la Loi ne s’applique pas en l’espèce. L’article 107 de la Loi n’est pas un obstacle, non plus. Par ailleurs, le paragraphe 11.1 de la Loi sur la gestion des finances publiques énonce les pouvoirs du Conseil du Trésor en matière de gestion des ressources humaines, dont l’exercice est limité par le paragraphe 11.1(2) :

11.1(2) Le Conseil du Trésor ne peut

a) exercer ses pouvoirs à l’égard des questions visées au paragraphe (1) si celles-ci sont expressément régies par une autre loi et non par simple attribution de pouvoirs à une autorité ou à une personne déterminée;

28 Les pouvoirs conférés en matière de gestion des ressources humaines, tels qu’ils sont prévus à l’article 7 de la Loi sur la gestion des finances publiques, ont été délégués à des employeurs distincts (aujourd’hui devenus des organismes distincts) par le Cabinet en novembre 1967. La preuve à cet égard est établie à la pièce 1, à l’onglet H. Un employeur distinct, notamment le CNRC, doit consulter le personnel du Conseil du Trésor relativement à toute nouvelle politique ou modification de politique qu’il se propose de mettre en œuvre [je souligne].

29 L’approbation du SCT n’est pas requise. Rien dans la Loi sur la gestion des finances publiques n’empêche de mettre en œuvre l’entente de principe.

30 Par ailleurs, l’article 5 de la Loi sur le Conseil national de recherches du Canada confère au CNRC le pouvoir de nommer les membres du personnel, de définir leurs fonctions et la durée de celles-ci et, avec l’approbation du gouverneur en conseil, fixer leur rémunération. Le rajustement des effectifs est une matière relevant de la nomination et de la définition de la durée des fonctions, et non de rémunération; par conséquent, là encore, l’approbation du gouverneur en conseil n’est pas requise.

31 De toute évidence, le SCT n’a aucun pouvoir dans la négociation de la PRE, s’agissant là de matières déléguées aux employeurs distincts. Qui plus est, la législation instituant le CNRC n’impose aucune obligation à celui-ci d’obtenir l’approbation du gouverneur en conseil relativement aux initiatives en matière de rajustement des effectifs. Partant, la négociation des modifications de la PRE constituait un exercice légitime du pouvoir conféré au CNRC tant par une loi que par une décision du Cabinet.

32 Le fait qu’il n’existe aucune entente signée n’empêche pas la mise en œuvre de l’entente de principe. La pièce 1, à l’onglet C, énonce les modifications convenues à la PRE. Aucun processus de ratification n’était requis; le Comité de la haute direction du CNRC a approuvé les modifications tout au long de la durée des discussions. Cela suffit pour conclure qu’une entente avait été conclue avec le défendeur et qu’il y était lié, même si l’entente n’avait pas été ratifiée par la haute direction. À l’appui de cette conclusion, l’avocat de la plaignante a invoqué la jurisprudence suivante : Association du contrôle aérien du Canada c. Conseil du Trésor, dossier de la CRTFP 169‑2-525; Hill c. Transports Canada, dossier de la CRTFP 166­2­22582; Hudgin et al. c. Transports Canada, dossiers de la CRTFP 166-2-22583 et 22584. Dans ces cas, une entente locale intervenue relativement à la modification de l’horaire des postes de travail liait l’employeur malgré le fait qu’elle n’avait pas été ratifiée par la haute direction.

33 Dans Hudgin, le représentant local de l’employeur avait reçu des directives exigeant qu’il soumette quelque entente intervenant à l’échelle locale au sujet des horaires des postes de travail à un niveau hiérarchique supérieur afin qu’elle soit approuvée à ce dernier niveau avant de la mettre en œuvre. La date de mise en œuvre de l’horaire révisé n’avait pas été négociée. Selon le représentant de l’employeur délégué aux discussions portant sur ces horaires, l’entente était conditionnelle à l’approbation du niveau hiérarchique supérieur en cause. L’arbitre de grief Wexler a toutefois conclu que le caractère conditionnel de l’entente n’était pas pertinent, car la convention collective ne prévoyait pas l’exigence de l’approbation de l’entente par un niveau hiérarchique supérieur, alors que la convention collective prévoyait la tenue de discussions à l’échelle locale.

34 Dans Hill, le niveau hiérarchique supérieur avait bloqué la mise en œuvre de l’entente intervenue. L’arbitre de grief Burke a conclu qu’en raison du libellé de la convention collective, la direction locale avait le pouvoir de négocier les horaires des postes de travail à l’échelle locale. Étant donné que la convention collective ne prévoyait pas l’exigence de la ratification de l’entente par un niveau hiérarchique supérieur, l’absence d’une telle approbation ne constituait donc pas un obstacle à la mise en œuvre de l’horaire local.

35 En l’espèce, aucune mention n’apparaît dans le libellé de la convention collective ni du document accessoire qu’il fallait obtenir l’approbation du SCT ou un mandat auprès du SCT afin de renégocier la PRE tel que convenu par les parties au moment de la signature de la convention collective. Le CNRC est investi des pleins pouvoirs pour entreprendre des négociations portant sur la PRE. Les parties sont parvenues à une entente, tel qu’il appert de la pièce 1, à l’onglet C. Le CNRC avait mis en œuvre une partie de cette entente. Il devrait lui être ordonné de parachever la mise en œuvre des modifications convenues.

36 La mise en œuvre de modifications convenues ne constitue pas une violation de l’article 107 de la Loi; le défaut de ce faire l’est, cependant.

B. Pour le défendeur

37 Le CNRC n’a pas contrevenu à l’article 107 de la Loi. Il a reconnu et continue à reconnaître les conditions d’emploi des groupes représentés par l’AECR tels qu’ils existaient au moment de la signification de l’avis de négocier à chacun de ces groupes. Le CNRC ne pouvait pas mettre en œuvre les modifications à la PRE car aucune des conventions collectives n’avait encore était conclue entre les parties. Les négociations des diverses conventions collectives n’étaient pas achevées.

38 Dès le départ, les représentants du CNRC ont clairement fait savoir que quelque entente à laquelle celui-ci et l’AECR parviendraient relativement à la modification de la PRE était conditionnelle à l’obtention par le défendeur d’un mandat à cet égard auprès du SCT. En l’absence d’un tel mandat, le CNRC estimait qu’il ne pouvait pas conclure une entente en ce qui a trait à la PRE.

39 Le défendeur n’a pas réussi à obtenir un mandat qui lui aurait permis d’assurer la mise en œuvre des modifications à la PRE avant la signature des conventions collectives. La mise en œuvre de ces modifications était liée à la signature des nouvelles conventions collectives. En intégrant la PRE aux conventions collectives lors de la dernière ronde de négociations collectives, les parties ont ainsi fait de la PRE une partie intégrante de la convention collective, tout changement devant être soumis à ce processus, quelles que soient les dispositions de la PRE à cet égard. Ici, Le problème vient de l’inclusion de la PRE à la convention collective sans suppression préalable de tout libellé pouvant entrer en conflit avec le libellé de la convention collective. En particulier, l’obligation de revoir la PRE tous les trois ans est en contradiction avec les dispositions portant sur la révision de la convention collective dans son ensemble, comme énoncé dans le corps du texte de la convention collective.

40 À titre d’organisme distinct, le défendeur s’est vu conférer la responsabilité de la gestion de son personnel. Ceci inclut en outre le droit de gérer son personnel, de classifier les postes, d’établir les conditions d’emploi, de fixer la rémunération et d’adopter des politiques en matière de ressources humaines. Le CNRC est assujetti à cet égard aux dispositions de l’article 112 de la Loi et doit obtenir l’approbation du gouverneur en conseil pour conclure une convention collective. Il ressort clairement de l’article 112 que cela inclut la modification d’une convention collective. Lorsqu’une politique est intégrée à une convention collective, comme l’est la PRE en l’espèce, il faut modifier la convention collective afin de pouvoir modifier cette politique. Voilà pourquoi le défendeur a dû demander un mandat auprès du SCT pour être habilité à modifier la PRE.

41 Le CNRC a avisé à plusieurs reprises l’AECR qu’il avait besoin d’un mandat de la part du SCT afin de pouvoir parachever une entente portant sur les modifications visant la PRE. À chacune des séances, la plaignante a été informée des progrès dans la démarche visant à obtenir le mandat requis. Or, le mandat obtenu ne permettait pas la négociation de modifications de la PRE en dehors des négociations d’ensemble sur les conventions collectives. Voilà pourquoi le CNRC se conforme aux conditions d’emploi, y compris la PRE, qui étaient en vigueur à la date de la signification de l’avis de négocier à chacune des unités de négociation en cause. Le défendeur n’a jamais eu l’intention de mettre en œuvre quelque modification sans avoir obtenu le mandat requis à cette fin. Confronté à une situation fâcheuse, le CNRC a convenu de mettre en œuvre les mesures qu’il pouvait, en élargissant l’interprétation du libellé actuel de la politique de manière à y inclure certaines des mesures convenues. En ce qui a trait aux modifications ne pouvant être interprétées comme étant visées par le libellé actuel de la politique, il fallait qu’une convention collective soit conclue avant de pouvoir procéder à la mise en œuvre des modifications relativement à celle-ci.

42 Pour ces motifs, la plainte devrait être rejetée.

V. Motifs

43 Dans le présent cas, l’AECR allègue que l’employeur a enfreint l’article 107 de la Loi, lequel prévoit que les conditions d’emploi des fonctionnaires doivent être respectées par les parties durant la période de gel prévue par la loi, une fois signifié l’avis de négocier, à moins que les parties n’en conviennent autrement. L’AECR allègue qu’il y a eu entente avec l’employeur pour procéder à certaines modifications de la PRE, une politique qui avait été intégrée aux conventions collectives visées par les avis de négocier. La plaignante soutient que le refus du défendeur de mettre en œuvre les modifications restantes au motif qu’il n’avait pas réussi à obtenir du SCT le mandat de négocier des modifications à la PRE, constitue une pratique déloyale de travail contrevenant à l’alinéa 190(1)c) de la Loi. La plaignante est d’avis qu’il n’existe aucune autorisation législative exigeant l’obligation d’obtenir l’approbation du SCT relativement aux modifications convenues.

44 Le défendeur soutient qu’il n’a pas contrevenu à l’article 107 de la Loi. Il a affirmé avoir formulé, dès le départ, une condition avant de parachever quelque entente avec la plaignante relativement à la modification de la PRE. En l’occurrence, il fallait obtenir l’approbation par le SCT de son mandat de renégocier la PRE. Aucune entente ne pouvait être cristallisée sans un tel mandat.

45 Je ne souscris pas à l’opinion de l’avocat de la plaignante qu’il s’agit ici uniquement d’une question d’autorisation législative. La question qu’il convient tout d’abord de trancher consiste à savoir si une entente est intervenue entre les parties pour modifier les conditions d’emploi des membres de leur unité de négociation durant la période de gel prévue par la loi évoquée à l’article 107 de la Loi. La preuve non contredite présentée devant moi est que l’employeur avait clairement fait savoir à l’agent négociateur qu’il ne pouvait conclure quelque entente avant d’avoir obtenu l’approbation du SCT aux fins de conclure une entente visant à modifier la PRE. Il n’y a aucun élément de preuve établissant que l’AECR se serait opposée à cette approche. Il n’y a pas non plus quelque élément de preuve établissant que l’agent négociateur aurait été induit en erreur, ou aurait pu l’être, quant au sens à donner à l’imposition d’une telle condition.

46 Je me dois également de me pencher sur les conséquences de l’intégration d’une politique dans une convention collective. Lorsque les parties à une convention collective conviennent d’inclure une politique dans la convention collective, cette politique fait alors partie intégrante de la convention, et doit par conséquent être traitée de la même manière que n’importe quelle autre clause. En l’espèce, le cycle de la renégociation de la PRE entre en conflit avec le cycle de la renégociation du reste de la convention collective.

47 La question devant moi en l’espèce concerne uniquement l’article 107, à savoir si une entente est intervenue entre les parties pour modifier les dispositions de la convention collective durant la période de gel des conditions d’emploi prévue par la loi. La seule question à trancher consiste à savoir si une entente était conclue entre les parties afin de modifier les conditions d’emploi des fonctionnaires des unités de négociation visées, comme envisagé à l’article 107 de la Loi. La question du mandat ne devient alors pertinente que si je suis en mesure de conclure, à partir de la preuve présentée, qu’une entente était intervenue entre les parties et qu’elles avaient mutuellement convenu de mettre en œuvre les modifications, comme prévu à l’article 107 de la Loi qui se lit comme suit :

107. Une fois l’avis de négociation collective donné, sauf entente à l’effet contraire entre les parties aux négociations et sous réserve de l’article 132, les parties, y compris les fonctionnaires de l’unité de négociation, sont tenues de respecter chaque condition d’emploi qui peut figurer dans une convention collective et qui est encore en vigueur au moment où l’avis de négocier a été donné, et ce, jusqu’à la conclusion d’une convention collective comportant cette condition ou :

a) dans le cas où le mode de règlement des différends est le renvoi à l’arbitrage, jusqu’à ce que la décision arbitrale soit rendue;

b) dans le cas où le mode de règlement des différends est le renvoi à la conciliation, jusqu’à ce qu’une grève puisse être déclarée ou autorisée, le cas échéant, sans qu’il y ait contravention au paragraphe 194(1)

[Je souligne]

48 Si je conclus qu’une entente est conclue entre les parties conformément à l’exception prévue à cet effet à l’article 107 de la Loi, je dois ensuite établir si le défendeur avait le pouvoir de conclure une telle entente. Si je devais conclure qu’il en avait le pouvoir, je devrai alors établir si la Commission a le pouvoir de rendre cette entente mutuelle exécutoire.

49 J’ai entendu la preuve des deux parties au sujet des discussions ayant eu lieu entre l’AECR, l’IPFPC et le CNRC. Il ressort de la preuve présentée de part et d’autre qu’une entente était intervenue au cours des discussions relativement à certaines modifications. Par ailleurs, la preuve du défendeur établit clairement que quelque entente de sa part était conditionnelle à l’obtention de l’approbation du SCT pour conclure une entente. Le défendeur n’a jamais eu l’intention de conclure une entente avec l’ACER ni avec l’IPFPC sans avoir obtenu cette approbation.

50 Il ressort clairement de l’examen des pièces produites par les parties qu’il n’existe aucune entente signée, ni de date convenue pour la mise en œuvre des modifications envisagées. La pièce 1, à l’onglet C, renferme 17 propositions de libellé que se sont échangées les parties et l’IPFPC. Treize d’entre elles ont été signées ou paraphées, selon le cas, ce qui semblerait faire foi de l’accord des parties quant à ces libellés selon la preuve testimoniale présentée de part et d’autre. Au moins un des articles ainsi entérinés comporte une annotation disant que d’autres discussions étaient requises et auraient lieu à une date ultérieure. La date de prise d’effet de la protection salariale a été biffée, sans qu’une autre indication n’apparaisse à la place pour dire quand cette disposition prendrait effet ou si elle prendrait effet effectivement. Un des autres articles porte la mention [traduction] « si». Compte tenu de l’interprétation variable pouvant être donnée à ce terme, et de l’effet de son emploi sur le libellé de l’ensemble de la convention collective qui en résulterait, ce type d’annotation donne à penser qu‘une interrogation demeure et qu’aucune entente n’est intervenue relativement à cet article.

51 Une ébauche de la version révisée de la PRE figure à la pièce 1, à l’onglet D. À la toute première ligne de cette politique révisée figure, en caractères gras, la mention [traduction] « Prend effet le XXX 2012 ». Les parties n’avaient pas convenu de la date de mise en œuvre du document; la version préliminaire du texte de la politique en était encore à l’étape de l’étude du libellé proposé au mois de janvier 2012, selon le témoignage rendu par les témoins. Il demeurait encore des questions à régler, en outre la signature officielle du document. En février 2012, le CNRC a avisé l’AECR et l’IPFPC qu’aucun mandat n’était en vue qui leur permettrait de signer une entente à l’extérieur du mécanisme de négociation des conventions collectives, et qu’une entente ne pouvait être signée.

52 La preuve devant moi est-elle suffisante pour me permettre de conclure qu’une entente existait entre les parties en l’absence d’un document signé en bonne et due forme portant sur la modification de la convention collective? Brown et Beatty, dans l’ouvrage Canadian Labour Arbitration, 4e édition, section 4:1400, au paragraphe 4-11, citent à titre de jurisprudence en la matière Nurses Association, Ottawa Civic Hospital and Trustees of the Ottawa Civic Hospital (1971), 22 LAC 325, dans laquelle il est notamment conseillé d’agir avec précaution avant de décider qu’une entente s’est effectivement cristallisée. Dans ce cas, les parties avaient eu des discussions au sujet de la modification des taux de rémunération des formateurs et des adjoints de formation à temps plein de l’École de soins infirmiers attenante à l’hôpital. La convention collective ne justifiait pas la modification proposée bien que l’hôpital ait été d’avis que le syndicat avait consenti à ses propositions. Aucun document en bonne et due forme modifiant la convention collective n’avait été signé.

[Traduction]

Si les parties avaient signé un document en bonne et due forme modifiant la convention collective, elles auraient été liées par ce document même si les modifications ne devaient être mises en œuvre que plus tard. En l’absence d’un tel document, il nous apparaît qu’un conseil d’arbitrage devrait procéder avec précaution dans l’appréciation des éléments de preuve visant à modifier les dispositions de la convention collective. En l’absence d’un énoncé positif faisant foi du consentement des deux parties, il est difficile d’affirmer que, dans le cours des négociations, un véritable consentement mutuel s’est cristallisé, même si les négociateurs eux-mêmes peuvent être du même avis au sujet de la question étudiée (Voir les pages 327-328).

[Je souligne]

53 Je conclus qu’avant d’entreprendre les discussions au sujet de la PRE, une condition avait été imposée par l’employeur relativement à la tenue de ces négociations, et que cette condition devait être satisfaite afin de pouvoir conclure une entente visant à modifier les modalités de la convention collective qui soit suffisante pour satisfaire à l’exception énoncée à l’article 107 de la Loi. Dans le cadre des discussions sur la PRE, la plaignante ne s’est pas opposée à cette condition, ni n’a proposé autre chose à la place de cette condition. Cette condition ne faisait pas intrinsèquement partie de l’obligation, mais constituait plutôt [traduction] « un fait externe dont dépend l’existence-même de l’obligation » (Voir Furmstrom, Law of Contract de Cheshire et Fifoot, 16e édition, à la page 196).

54 Selon le témoignage du témoin du défendeur, il est clair que le CNRC n’avait aucune intention de conclure une entente sans l’approbation du SCT, que cette approbation soit ou non effectivement requise. Les représentants du CNRC ont amorcé les discussions sur des enjeux limités pendant que le CNRC tentait d’obtenir l’approbation voulue. Ce n’est que lorsque les représentants du défendeur croyaient avoir obtenu le mandat recherché qu’ils ont alors abordé les discussions sur les éléments financiers. Aux yeux du CNRC, quelque entente à laquelle seraient parvenues les parties dans l’intérim serait conditionnelle. L’existence de cette condition a été communiquée à plusieurs reprises aux autres parties, tant dès le départ à la table de négociation que par courriel tel qu’il appert de la pièce 3. La condition n’était pas impossible à satisfaire, et le CNRC croyait qu’elle pouvait se réaliser avant la conclusion des discussions sur la PRE. En dépit de ces espoirs, elle ne s’est pas concrétisée. Contrairement aux faits décrits dans les décisions ACAC, Hudgin, et Hill, aucune entente n’est intervenue prévoyant la nécessité d’obtenir l’approbation d’un niveau hiérarchique supérieur avant de pouvoir procéder à sa mise en œuvre.

55 Il existe un seuil établi dans la Loi que les parties devaient satisfaire pour que je sois convaincue qu’une entente était intervenue voulant de modifier les conditions d’emploi durant la période de gel prévue par la loi tel que stipulé à l’article 107 de la Loi. À mon avis, les parties n’avaient pas en l’espèce une entente, voire même une entente de principe, mais plutôt une entente conditionnelle. Tel qu’établi entre autres dans les décisions AFPC c. Canada et IPFPC c. Agence du revenu du Canada, auxquelles m’a renvoyée la plaignante, le défendeur a mis en œuvre les modifications qui pouvaient être mises en œuvre conformément aux dispositions habilitantes de la politique telle qu’elle existait au moment de la signification de l’avis de négocier. Je suis d’avis que ce n’est pas là une exécution partielle des dispositions de la prétendue entente suffisante au point d’opérer une renonciation à la condition et de prétendre à l’existence d’une entente mutuelle. Il s’agissait plutôt de l’exercice par le CNRC d’un pouvoir discrétionnaire existant.

56 Je souscris à l’argument avancé par l’avocat du défendeur lors de sa plaidoirie que la problématique est survenue en l’espèce en raison de l’inclusion de la PRE à la convention collective sans avoir supprimé tout libellé pouvant entrer en conflit avec le libellé de la convention collective. En outre, la clause prévoyant la révision de la PRE « à tous les cycles de trois (3) années » énoncée dans la politique est en contradiction avec la clause de la convention collective portant sur la durée de celle-ci. Le libellé qu’on y retrouve n’est pas aussi spécifique que le libellé des clauses dont il est question dans les cas cités par la plaignante portant sur la question du gel des négociations et des modifications apportées aux conventions collectives.

57 Il m’apparaît clairement, à partir des témoignages entendus et des documents qui attesteraient prétendument de l’existence d’une entente de principe, que les parties n’étaient pas parvenues à une rencontre des esprits et que leur consentement mutuel ne s’était pas cristallisé au point d’être suffisant pour invoquer l’exception prévue à l’article 107 de la Loi. Il en va ainsi en particulier lorsque l’on considère que l’entente serait intervenue après la signification des avis de négocier par chacune des unités de négociation et que le gel des conditions d’emploi prévu par la loi était déjà en vigueur depuis aussi loin que le 1er décembre 2010 et aussi tard que le 11 octobre 2011 (selon l’unité de négociation considérée). Les parties ne discutaient pas de modifications à la PRE en ayant l’article 107 à l’esprit. Leur intention était plutôt d’obtenir une entente qui modifierait une partie de la convention collective.

58 Ayant conclu qu’une entente n’avait pas été finalisée en ce qui a trait à la modification de la PRE, je n’ai pas à traiter de la question à savoir si le CNRC avait besoin d’un mandat du SCT afin de négocier les modifications à la PRE.

59 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

VI. Ordonnance

60 La plainte est rejetée.

Le 20 mars 2013.

Traduction de la CRTFP

Margaret Shannon,
une formation de la
Commission des relations de travail
dans la fonction publique

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