Décisions de la CRTESPF

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Résumé :

Les fonctionnaires s’estimant lésés ont contesté le taux de rémunération établi par l’employeur - en 2002, à la suite de la reclassification de leurs postes du groupe et niveau PM-06 au groupe et niveau CO-02, les fonctionnaires s’estimant lésés ont changé d’agent négociateur, passant de l’Alliance de la Fonction publique du Canada (l’<<AFPC>>) à l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada; ils bénéficiaient d’une protection salariale puisque leur nouveau taux de rémunération maximal était inférieur à celui de leur groupe et niveau précédent - on les a avisés qu’ils avaient droit à cette protection jusqu’à ce que la rémunération maximale de leur nouveau poste dépasse celle du groupe et niveau précédent - en 2007, l’employeur a entrepris une réforme globale de la classification des postes; il a alors renoncé à utiliser la classification au groupe et niveau PM-06 et a reclassifié la plupart des fonctionnaires au groupe et niveau SP-10 - les fonctionnaires s’estimant lésés ont continué d’être classifié au groupe et niveau CO-02 - à la suite de la conversion, l’AFPC et l’employeur ont négocié la conversion des taux de rémunération pour les fonctionnaires du groupe SP avec un taux de rémunération maximal supérieur à celui de la classification antérieure au groupe et niveau PM-06 - les fonctionnaires s’estimant lésés ont revendiqué le droit à une rémunération au taux maximal pour le groupe et niveau SP-10 - en 1982, les deux agents négociateurs avaient conclu avec le Conseil du Trésor un protocole d’entente portant sur la question de la rémunération lors d’une reclassification - le protocole d’entente renvoyait au Règlement sur la rémunération lors de la reclassification ou de la transposition (le <<RRRT>>) et précisait notamment que le protocole d’entente avait préséance sur le RRRT en cas de divergence - toutefois, le protocole d’entente ne traitait pas de la situation en l’espèce, alors que le RRRT prévoyait des modalités à cet égard et l’employeur avait appliqué ces modalités lors du calcul du taux de rémunération des fonctionnaires s’estimant lésés. Griefs rejetés.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2013-05-13
  • Dossier:  566-34-5682 et 5683
  • Référence:  2013 CRTFP 50

Devant un arbitre de grief


ENTRE

AHMAD MOTAMEDI et YASHVANT PARMAR

fonctionnaire s'estimant lésés

et

AGENCE DU REVENU DU CANADA

employeur

Répertorié
Motamedi et Parmar c. Agence du revenu du Canada

Affaire concernant des griefs individuels renvoyés à l’arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Michael Bendel, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s'estimant lésés:
Maeve Sullivan, Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Pour l'employeur:
Martin Desmeules, avocat, ministère de la Justice

Affaire entendue à Toronto (Ontario),
les 12 et 13 février 2013.
(Traduction de la CRTFP)

Les faits

1 Le 3 mars 2009, Ahmad Motamedi et Yashvant Parmar, les fonctionnaires s’estimant lésés (les « fonctionnaires »), des employés de l’Agence du revenu du Canada (l’« employeur ») occupant le poste de conseillers scientifiques régionaux (classifié au groupe et niveau CO-02), ont présenté des griefs visant à contester la décision de l’employeur quant au taux de rémunération dont ils bénéficiaient depuis 2007. Depuis 2002, les deux fonctionnaires bénéficiaient d’une protection salariale accordée à la suite de la reclassification de leurs postes.

2 Les faits, qui ne sont pas en litige, sont identiques pour chaque fonctionnaire. Ils peuvent être résumés ainsi :

a) Jusqu’en 2002, les fonctionnaires étaient classifiés au groupe et niveau PM­06 (ils étaient alors dans une unité de négociation représentée par l’Alliance de la Fonction publique du Canada [l’« AFPC »]).

b) Dans des lettres datées du 22 novembre 2002, l’employeur les a informés que leurs postes devaient être reclassifiés au groupe et niveau CO-02 et qu’ils feraient partie d’une unité de négociation représentée par l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (l’« IPFPC »). Aucun changement n’a été apporté à leurs fonctions à ce moment-là, pas plus qu’à la date où ces griefs ont été déposés.

c) Puisque le taux de rémunération maximal du groupe et niveau CO-02 était inférieur au taux de rémunération maximal du groupe et niveau PM-06, les lettres de l’employeur les ont informés qu’ils auraient droit à une « protection salariale » jusqu’à ce que le salaire maximal du niveau CO-02 dépasse le salaire maximal du niveau PM-06. Plus précisément, on leur a affirmé qu’ils [traduction] « […] continueraient à recevoir le traitement correspondant au groupe et niveau PM-06 ».

d) Jusqu’en novembre 2007, ils ont reçu le même salaire que les employés classifiés au taux de rémunération maximal du groupe et niveau PM-06.

e) En 2007, l’employeur s’est engagé dans un programme de réforme globale de la classification, dans le but de remplacer le système de classification du Conseil du Trésor par un système spécialement adapté à l’employeur. Par conséquent, à partir du 1er novembre 2007, la classification PM-06 a été abolie, et l’employeur a classifié la majorité des employés qui appartenaient au groupe et niveau PM-06 (ainsi que la majorité des employés qui appartenaient auparavant aux groupes AS-07, IS-06 et PG-05) au groupe et niveau SP-10. Les postes des fonctionnaires étaient toutefois toujours classifiés au groupe et niveau CO-02.

f) Dans la première convention collective conclue entre l’AFPC et l’employeur à la suite de l’adoption du nouveau système de classification (qui expirait le 31 octobre 2010), les parties se sont entendues sur la conversion des taux de rémunération pour le groupe SP (c.-à-d. les taux qui précédaient l’augmentation économique en vigueur le 1er novembre 2007, qu’ils ont négocié). Lors de la conversion au nouveau système de classification, le taux maximal de rémunération pour le groupe et niveau SP-10 était fixé à 93 669 $. Le taux de rémunération maximal d’un PM-06 s’élevait à 90 901 $.

g) Depuis la conversion au groupe SP, l’employeur a rémunéré les fonctionnaires à un taux inférieur au taux maximal d’un SP-10. Plus précisément, le salaire annuel qu’ils ont reçu et le taux maximal du niveau SP-10 depuis le 1er novembre 2007, sont les suivants :

Date d’entrée en vigueur Salaire des fonctionnaires Taux maximal SP-10
1er novembre 2007 93 174 96 011
1er novembre 2008 95 503 98 411
1er novembre 2009 96 936 99 887
1er novembre 2010 98 391 101 386
1er novembre 2011 99 867 102 907
1er novembre 2012 99 867 102 907

3 Les fonctionnaires ont fait valoir qu’ils avaient droit au taux maximal du groupe et niveau SP-10 du fait qu’ils jouissaient d’une protection salariale au groupe et niveau PM-06. Leur plainte est essentiellement fondée sur le fait que le taux d’un PM­06 n’existant plus et ayant été en fait remplacé par le taux d’un SP-10, l’employeur était tenu de les payer depuis novembre 2007 au taux d’un SP-10, soit le seul taux qui correspond à l’ancien taux du groupe et niveau PM-06.

4 L’employeur a répondu que le salaire reçu par les fonctionnaires depuis le 1er novembre 2007, était fondé sur les anciens taux PM-06 et a été révisé pour tenir compte du pourcentage des augmentations des taux SP-10 qui a été obtenu par la négociation depuis lors. Il ne s’agit pas d’un taux négocié (même si le pourcentage des augmentations pour les taux SP-10 a été négocié), mais plutôt d’un taux que l’employeur a fixé. C’est l’étendue de leurs droits.

Les dispositions pertinentes

5 Le 21 juillet 1982, l’IPFPC et le Conseil du Trésor ont signé un protocole d’accord (« PA ») concernant la rémunération lors d’une reclassification. Les dispositions suivantes sont énoncées dans le PA :

GÉNÉRALITÉS

[…]

3. Le présent protocole d’accord prévaut sur le Règlement sur la rémunération lors de la reclassification ou de la transposition lorsque celui-ci entre en contradiction avec le protocole d’accord.

[…]

5. À compter du 13 décembre 1981, cet accord fera partie intégrante de toutes les conventions collectives auxquelles l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada et le Conseil du Trésor seront parties.

PARTIE I

La partie I du présent protocole d’accord s’applique aux titulaires de postes qui, après l’entrée en vigueur de ce protocole, seront reclassifiés dans un groupe et(ou) un niveau comportant un taux de rémunération maximal accessible inférieur.

[…]

2. Nonobstant la reclassification régressive, un poste occupé est réputé avoir conservé, à toutes fins utiles, son ancien groupe et niveau. En ce qui concerne la rémunération du titulaire, on peut citer cette disposition comme régime de protection salariale et, sous réserve du paragraphe 3b) ci-dessous, elle s’applique jusqu’à ce que le poste devienne vacant ou jusqu’à ce que le taux maximal accessible de l’ancien niveau de classification, révisé de temps à autre, dépasse celui applicable du nouveau niveau, également révisé de temps à autre. Le calcul du taux maximal de rémunération qu’il peut obtenir sera effectué conformément aux Règlements sur la rémunération avec effet rétroactif.

[…]

Il convient de noter qu’un protocole d’accord identique à celui susmentionné en ce qui concerne les modalités importantes a été conclu entre l’AFPC et le Conseil du Trésor le 9 février 1982.

6 L’article 45 de la convention collective pertinente entre l’employeur et l’IPFPC expirant le 21 décembre 2007 (la « convention collective »), est intitulé « Administration de la paie ». La clause 45.06 se lit comme suit :

45.06 Le présent article est assujetti au protocole d’accord signé par le Secrétariat du Conseil du Trésor et l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada le 21 juillet 1982, à l’égard des employés dont le poste est bloqué.

7 Le Règlement sur la rémunération lors de la reclassification ou de la transposition (le « RRRT »), dont il est fait référence au paragraphe 3 (« Généralités ») du PA, énonce une disposition, à la partie 4, qui est essentiellement identique à la partie I, paragraphe 2, du PA susmentionné dans la présente décision. Il énonce également la disposition suivante :

7. Si le groupe ou le niveau par rapport auquel le revenu d’un employé est protégé est aboli, les droits salariaux seront rajustés de façon à refléter les révisions occasionnelles approuvées à l’égard du dernier niveau répertorié.

Arguments des parties

8 La représentante des fonctionnaires a soutenu que l’employeur leur avait promis, dans sa lettre du 22 novembre 2002, qu’ils continueraient à recevoir les taux d’un PM-06 jusqu’à ce que le salaire maximal d’un CO-02 dépasse le salaire maximal d’un PM-06. En 2007, l’introduction du nouveau système de classification n’a entraîné aucune modification dans les fonctions des fonctionnaires, seulement un simple changement de nom de l’ancien groupe et niveau PM-06 : il s’appelait désormais SP-10. Les promesses de l’employeur aux fonctionnaires devraient donc être interprétées comme étant une garantie de leur protection salariale au groupe et niveau SP-10. Rien ne justifiait le fait de priver les fonctionnaires de ce taux. Depuis que l’IPFPC et l’AFPC ont conclu des PA essentiellement identiques, les fonctionnaires avaient indubitablement le droit de bénéficier de la protection salariale malgré le changement d’agent négociateur. Le RRRT n’allait pas dans le sens du PA et, par conséquent, conformément au paragraphe 3 (Généralités) du PA, il ne s’appliquait pas aux fonctionnaires. L’arbitre de grief devrait par conséquent déclarer qu’ils ont droit au taux d’un SP-10 depuis le 1er novembre 2007, et ordonner à l’employeur de les dédommager en conséquence. Dans ses arguments, la représentante des fonctionnaires m’a renvoyé à Fok et Stromotich c. Conseil du Trésor (Pêches et Océans), dossiers de la CRTFP 166-02-25912 et 25913 (19950830), Janveau c. Conseil du Trésor (Ressources naturelles Canada) & Alliance de la Fonction publique du Canada, 2002 CRTFP 2, Janveau c. Canada (Procureur général), 2003 CF 1337, et Johnson c. Canada (Agences des Douanes et du Revenu), 2004 CF 646.

9 L’avocat de l’employeur a reconnu que les fonctionnaires continuaient d’avoir droit à la protection salariale. Toutefois, selon l’avocat, leur droit était de bénéficier de la protection au groupe et niveau PM-06. L’article 7 du RRRT traite de la circonstance particulière qui est apparue dans le cas des fonctionnaires, à savoir, la suppression du groupe et niveau PM-06. L’article 7 stipule que, dans une telle situation, l’employé dont le salaire est protégé devrait recevoir un salaire qui a) est fondé sur l’ancien groupe et niveau (PM-06, dans le cas des fonctionnaires), mais qui b) est rajusté périodiquement pour refléter les augmentations salariales à l’égard « du dernier niveau répertorié » (SP-10, dans le cas des fonctionnaires). L’employeur s’est conformé à l’article 7 en appliquant à l’ancien taux d’un PM-06 les mêmes pourcentages d’augmentation qui avaient été négociés pour le groupe et niveau SP-10 et en payant les fonctionnaires en conséquence. Les fonctionnaires tentaient d’obtenir une protection salariale au groupe et niveau SP-10, mais ils ne bénéficiaient pas d’un tel droit.

Motifs

10 Après un examen attentif de la convention collective, du PA, du RRRT et des lettres du 22 novembre 2002, je constate que l’allégation des fonctionnaires selon laquelle ils ont le droit à une protection salariale au groupe et niveau SP-10 n’est pas fondée. La situation dans laquelle ils se trouvent, notamment celle où le groupe et niveau auquel leur salaire était protégé (PM-06) a été aboli, n’est abordée explicitement dans aucun de ces textes, à l’exception du RRRT. En ce qui concerne le RRRT, l’article 7 stipule que dans une telle situation « […] les droits salariaux seront rajustés de façon à refléter les révisions occasionnelles approuvées à l’égard du dernier niveau répertorié ». Il n’est pas contesté que l’employeur a respecté fidèlement l’article 7 du RRRT en rajustant l’ancien taux maximal d’un PM-06 à l’aide des mêmes pourcentages qui ont été négociés pour les taux d’un SP-10. Les fonctionnaires ont toutefois pris comme position que l’article 7 du RRRT ne s’appliquait aucunement à leur cas.

11 Je me suis demandé si la première phrase du paragraphe 2 de la partie I du PA, qui énonce : « Nonobstant la reclassification régressive, un poste occupé est réputé avoir conservé, à toutes fins utiles, son ancien groupe et niveau », pourrait être interprétée comme faisant allusion à la situation dans laquelle se trouvent les fonctionnaires. Toutefois, cette disposition n’appui en aucun cas les allégations des fonctionnaires selon lesquelles ils ont droit au taux SP-10 et ne peut leur donner droit, tout au plus, qu’à continuer de recevoir le taux de rémunération PM-06 de 2007, sans rajustement ultérieur. Toutefois, je ne suis même pas convaincu que cela leur donne ce droit, aussi peu satisfaisant que cela puisse leur paraître, étant donné que le paragraphe 2 de la partie I suppose que le taux de rémunération des employés dont le revenu est protégé sera « révisé de temps à autre », ce qui ne s’est pas produit et qui ne se produira pas dans le cas du taux PM-06.

12 Je prends note que l’article 7 du RRRT n’est pas inclus tel quel dans la convention collective. Dans la mesure où il y a inclusion, cette dernière se fait conformément au paragraphe 3 (Généralités) du PA, qui est formulé ainsi :

3. Le présent protocole d’accord prévaut sur le Règlement sur la rémunération lors de la reclassification ou de la transposition lorsque celui-ci entre en contradiction avec le protocole d’accord.

Au mieux, il s’agit d’une inclusion indirecte compte tenu du fait que le paragraphe 3 (Généralités) n’énonce pas de manière aussi précise que, à l’exception des cas où le RRRT est en contradiction avec le PA, il continuera de s’appliquer. Plutôt, cela limite l’application du RRRT et suggère simplement que, dans les limites ainsi posées, le RRRT continuera de s’appliquer. Puisque le RRRT n’est intégré, tout au plus, que de manière indirecte à la convention collective, je ne suis pas sûr d’avoir compétence pour traiter d’un différend relatif à son application. Je note également que, même si l’article 7 du RRRT n’était pas applicable aux griefs, rien ne pourrait permettre de conclure que les fonctionnaires ont droit à la protection salariale du groupe et niveau SP-10. Néanmoins, je pense qu’il est approprié pour moi d’examiner si l’article 7 traite du cas des fonctionnaires.

13 Il n’est pas contesté que la situation décrite à l’article 7 du RRRT illustre exactement ce qui est arrivé aux fonctionnaires : le groupe et le niveau « […] auquel le revenu d’un employé est protégé est aboli […] ». Les fonctionnaires avaient droit à une protection salariale au groupe et niveau PM-06, mais le groupe et niveau PM-06 a été aboli. Aucun employé de cet employeur n’a été classifié dans ce groupe et niveau depuis 2007; depuis, aucune négociation n’a rajusté les taux de rémunération d’un PM-06. Selon l’article 7, dans une telle situation, l’employé a le droit de bénéficier d’un salaire qui est « […] rajustés de façon à refléter les révisions occasionnelles approuvées à l’égard du dernier niveau répertorié ». Les salaires qu’ils ont en réalité perçus depuis novembre 2007, qui sont basés sur le dernier taux négocié d’un PM-06 mais qui ont été « rajustés de façon à refléter les révisions […] approuvées » pour le taux SP-10, sont conformes à l’article 7.

14 Toutefois, les fonctionnaires soutiennent que l’article 7 du RRRT ne s’applique pas à ce cas, compte tenu du paragraphe 3 (Généralités) du PA. Pour déterminer si l’article 7 est applicable, je dois traiter de deux questions concernant l’interprétation du paragraphe 3 (Généralités) du PA.

15 La première question découle du silence du PA au sujet de la situation précise soulevée par ces griefs. Le PA ne prévoit pas la possibilité qu’un groupe et niveau où le revenu d’un employé est protégé puisse être aboli, et n’y fait même pas référence. Il s’agit d’un vide, d’une lacune, dans le PA. Si, comme en l’espèce, le RRRT prévoit une situation que les parties ont négligée ou ignorée dans le PA, devrait-on conclure que le RRRT est, dans cette mesure, « en contradiction » avec le PA, et que, par conséquent, le PA « prévaut » sur le règlement, aux termes du paragraphe 3 (Généralités)?

16 Afin de répondre à cette question, je dois examiner la perception des parties en ce qui concerne la relation entre le PA et le RRRT lorsqu’ils ont négocié le paragraphe 3 (Généralités) du PA. Tout d’abord, il semble évident que la volonté des parties était que ce soit le PA qui s’applique, et non le RRRT, en cas de divergence entre les deux textes portant sur une même question. Toutefois, si les parties avaient conçu le paragraphe 3, (Généralités) du PA, à cette seule fin, il n’y aurait eu aucune raison valable, à mon avis, pour qu’elles rédigent cette partie de la manière dont elle a été rédigée; elles auraient tout simplement pu déclarer que le PA l’emportait sur le RRRT, et il aurait été inutile de faire la moindre allusion à la notion de contradiction. Je ne peux tout simplement pas faire abstraction des termes « […] lorsque celui-ci entre en contradiction avec le protocole d’accord » et considérer que le PA remplace complètement le RRRT. Je dois toutefois essayer de comprendre ce que les parties voulaient laisser entendre par l’utilisation de ce libellé. Je m’appuie, à cet égard, sur la présomption bien connue dans l’interprétation des contrats selon laquelle chaque terme utilisé par les parties a une certaine signification et vise un certain effet (voir Palmer et Snyder, Collective Agreement Arbitration in Canada, 4e édition (2009), aux pages 29 et 30). Il apparaît que les parties devaient avoir à l’esprit des situations où le RRRT continuerait de s’appliquer, en dépit de la signature du PA. Plus précisément, il me semble que, en introduisant la notion de contradiction au paragraphe 3 (Généralités), les parties ont dû envisager la circonstance même qui est apparue dans ces griefs, à savoir que le PA ne prenait pas en compte le scénario traité dans le RRRT, et dans un tel cas, ils ont dû penser que le RRRT s’appliquerait. Je ne peux m’expliquer autrement pourquoi le paragraphe 3 (Généralités) aurait été rédigé ainsi.

17 La deuxième question peut être formulée ainsi : le PA n’étant pas identique au RRRT, s’ensuit-il que le RRRT est « en contradiction » avec le PA et que ce dernier le remplace donc à tous les égards?

18 Aux termes du PA, il l’emporte sur le RRRT seulement « lorsque » ce dernier entre en contradiction avec le PA. J’en déduis qu’à travers l’utilisation du terme « lorsque » plutôt que du terme « si », l’objectif des parties signataires n’était pas que le RRRT dans son ensemble cesse de s’appliquer dès que la moindre contradiction entre le PA et le RRRT était mise en évidence. En outre, conformément à ce que j’ai déjà affirmé, si les parties avaient voulu remplacer le RRRT par le PA à tous les égards, ils n’auraient guère introduit la notion de contradiction au paragraphe 3 (Généralités) du PA. Je suis par conséquent convaincu qu’ils voulaient que le RRRT cesse de s’appliquer seulement dans la mesure où des contradictions apparaîtraient entre les deux documents.

19 À la lumière de toutes ces considérations, j’ai conclu que l’article 7 du RRRT s’applique dans le cas des fonctionnaires. L’employeur s’est conformé à l’article 7. Le salaire qu’ils reçoivent depuis le mois de novembre 2007 est autorisé par le RRRT. Rien dans la convention collective, les lettres du 22 novembre 2002 ou tout autre texte pertinent ne peut être interprété comme leur donnant droit à davantage.

20 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

21 Les griefs sont rejetés.

Le 13 mai 2013.

Traduction de la CRTFP

Michael Bendel,
arbitre de grief

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