Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Un grief contestant le refus de la direction d’accepter la demande de retrait de la démission du fonctionnaire s’estimant lésé a été renvoyé à l’arbitrage le 30 octobre 2008 - l’employeur a déposé une objection à la compétence d’un arbitre de grief au motif que le grief ne concernait pas une mesure disciplinaire, mais concernait plutôt la démission du fonctionnaire s’estimant lésé - l’employeur a déclaré que sa décision concernant la démission du fonctionnaire s’estimant lésé ne constituait pas une mesure disciplinaire - le fonctionnaire s’estimant lésé a affirmé que la CRTFP avait compétence pour se prononcer sur un grief concernant une démission si celle-ci était obtenue de mauvaise foi, ou qu’elle était de nature disciplinaire ou discriminatoire - l’audience du grief était prévue pour le 12 avril 2010 - le 19 mars 2010, le greffe de la CRTFP a été informé que le fonctionnaire s’estimant lésé ne serait plus représenté par son syndicat - le 7 avril 2010, la demande de report d’audience soumise par le fonctionnaire s’estimant lésé a été accordée - il a présenté une autre demande de report d’audience lorsqu’on a tenté de fixer de nouvelles dates d’audience pour février 2011 et mai 2011 - deux conférences préparatoires à l’audience ont été tenues à la demande de l’arbitre de grief afin de résoudre les problèmes de divulgation - ces problèmes ont continué à être soulevés, et l’arbitre de grief a ordonné que tous les problèmes futurs liés à la divulgation soient résolus à l’audience - la mise au rôle du grief est demeurée difficile, car le fonctionnaire s’estimant lésé a déclaré qu’il n’était disponible qu’aux dates où l’employeur n’était pas disponible; en avril 2012, les parties ont été informées que l’affaire serait mise au rôle et que l’audience aurait lieu avant la fin de 2012 - l’audience a eu lieu à Toronto, Ontario, le 17 décembre 2012 - l’employeur était présent, mais le fonctionnaire s’estimant lésé ne s’est pas présenté - les tentatives du greffe de la CRTFP pour le joindre étaient vaines - entre autres documents, l’employeur a soumis comme élément de preuve une copie de la lettre de démission du fonctionnaire s’estimant lésé et son acceptation de la démission, datée du 6 mars 2008 - l’arbitre de grief a conclu qu’elle n’avait pas compétence pour entendre le grief, tout en soulignant le fait qu’une démission n’est manifestement pas une mesure disciplinaire - l’arbitre a également conclu que, même si le fonctionnaire s’estimant lésé semble avoir regretté sa démission de son poste et qu’il a tenté de revenir sur sa décision presque un mois plus tard, rien dans la preuve ne permet de conclure que le refus de l’employeur d’accepter l’annulation de la démission découlait de considérations disciplinaires. Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2013-05-10
  • Dossier:  566-34-2517
  • Référence:  2013 CRTFP 52

Devant un arbitre de grief


ENTRE

STEPHEN BYFIELD

fonctionnaire s'estimant lésé

et

AGENCE DU REVENU DU CANADA

employeur

Répertorié
Byfield c. Agence du revenu du Canada

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Kate Rogers, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Personne

Pour l'employeur:
Victoria Yankou, avocate

Affaire entendue à Toronto (Ontario),
le 17 décembre 2012.
(Traduction de la CRTFP)

Grief individuel renvoyé à l’arbitrage

1 Stephen Byfield, le fonctionnaire s’estimant lésé (le « fonctionnaire »), occupait un poste d’enquêteur, classifié AU‑03, dans la Division de l’exécution, Bureau des services fiscaux de Toronto-Nord, Agence du revenu du Canada (ARC ou l’« employeur »). Le 6 mai 2008, le fonctionnaire a déposé un grief, qui se lit comme suit :

[Traduction]

Je présente ce grief pour contester le refus de la direction d’accepter ma demande de retrait de ma démission. Ainsi, son refus signifie mon licenciement. J’avais démissionné sous la contrainte. Il s’agissait d’un acte irrationnel résultant d’un problème de santé chronique.

2 À titre de mesure corrective, le fonctionnaire a demandé d’être réintégré avec versement rétroactif de sa pleine rémunération et d’obtenir une réparation complète.

3 Le grief a été entendu aux premier, troisième et dernier paliers de la procédure de règlement des griefs et a été rejeté aux trois paliers. Le 30 octobre 2008, le fonctionnaire a renvoyé le grief à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 209(1)b) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP).

4 Le 25 novembre 2008, l’employeur a déposé une objection à la compétence d’un arbitre de grief au motif que le grief ne contestait pas une mesure disciplinaire, comme l’exige l’alinéa 209(1)b) de la LRTFP, mais concernait en fait la démission du fonctionnaire. L’employeur a soutenu que la démission d’un employé de l’ARC est régie par l’article 8 du [traduction] « programme de dotation » de l’ARC, qu’il a cité comme suit :

[Traduction]

Un employé qui a l’intention de démissionner de l’ARC en donne avis, par écrit, à la personne autorisée. L’employé de l’ARC perd sa qualité d’employé à la date à laquelle la personne autorisée accepte par écrit la démission ou à une autre date précisée par la personne autorisée dans la lettre d’acceptation.

5 L’employeur a déclaré que sa décision concernant la démission du fonctionnaire découlait de l’application de l’article 8 du programme de dotation et ne constituait aucunement une mesure disciplinaire, comme le prescrit l’alinéa 209(1)b) de la LRTFP. Pour ce motif, l’employeur a soutenu que la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) n’avait pas la compétence pour entendre le grief à l’arbitrage.

6 Par l’entremise de son représentant syndical, le fonctionnaire a répondu à l’objection de l’employeur concernant la compétence de l’arbitre de grief le 8 décembre 2008. Il a affirmé que la CRTFP avait la compétence pour se prononcer sur un grief concernant une démission dans le cas où la démission est obtenue de mauvaise foi, ou est de nature disciplinaire ou discriminatoire. Il a déclaré qu’il avait l’intention de présenter des éléments de preuve à l’audience d’arbitrage de son grief afin de démontrer que sa démission était involontaire et qu’elle a été obtenue sous la contrainte et en raison d’un problème de santé chronique. Il a ajouté que la preuve allait démontrer que [traduction] « […] la démission a été obtenue de mauvaise foi ou d’une manière discriminatoire, ou constituait une mesure disciplinaire ».

7 Il était prévu que le grief soit entendu à l’arbitrage du 12 au 16 avril 2010. Le 19 mars 2010, le greffe de la CRTFP a été informé que le fonctionnaire ne serait plus représenté par son syndicat. Le 1er avril 2010, le fonctionnaire a demandé le report de la date de l’audience d’arbitrage qui devait avoir lieu du 12 au 16 avril 2010, en alléguant qu’il avait présenté une demande d’accès à l’information (AIPRP), mais qu’il n’avait pas encore reçu la majorité des documents demandés. Le 7 avril 2010, la demande de report de l’audience soumise par le fonctionnaire a été accordée.

8 On a tenté de fixer de nouvelles dates pour l’audience d’arbitrage, soit du 7 au 11 février 2011, mais le fonctionnaire a de nouveau demandé l’ajournement parce qu’il n’avait pas reçu les documents d’AIPRP qu’il avait demandés. On a tenté, une fois de plus, de reporter l’audience d’arbitrage en date du 10 au 13 mai 2011, mais sans succès, car le fonctionnaire a réaffirmé qu’il n’était pas disponible aux dates proposées.

9 Conformément aux directives du président de la CRTFP, les parties ont été invitées à indiquer leur disponibilité en vue d’une audience qui se tiendrait avant la fin de 2011. Les parties ont précisé qu’elles seraient disponibles pendant la période du 12 au 16 décembre 2011. Toutefois, le fonctionnaire a souligné qu’il n’avait pas encore reçu les documents pour lesquels il avait présenté une demande d’AIPRP. Il a fait valoir qu’il était injuste de s’attendre à ce qu’il participe à une audience, alors que sa demande d’AIPRP demeurait en attente.

10 Dans un courriel daté du 28 janvier 2011, l’employeur a répondu à l’allégation du fonctionnaire selon laquelle l’employeur n’avait pas fourni les documents demandés. L’employeur a affirmé qu’il a bel et bien fourni les documents à la suite de la demande d’AIPRP soumise par le fonctionnaire et a fait remarquer que le fonctionnaire n’a pas donné de contexte ou d’explication concernant la portée des documents qu’il semblait encore vouloir obtenir. L’employeur a suggéré que le fonctionnaire utilisait le processus d’AIPRP pour éviter de participer à l’audience d’arbitrage et a demandé à la CRTFP de lui ordonner de présenter sa demande d’AIPRP qui était en attente et de fournir des arguments écrits sur la pertinence des documents qu’il demandait.

11 Le 2 mars 2011, le fonctionnaire a répondu à l’allégation de l’employeur selon laquelle celui-ci avait fait suite à sa demande d’AIPRP. Il a précisé avoir reçu moins de 4 % des documents demandés et que le retard de production des documents durait depuis un an et demi. Il a affirmé qu’il serait injuste que la CRTFP fixe une date pour une audience, alors que sa demande d’AIPRP demeurait en attente.

12 À ma demande, une conférence préparatoire à l’audience a été tenue avec les parties le 1er juin 2011 afin de résoudre les problèmes de divulgation. À la suite de cette discussion, un processus a été établi pour aider à résoudre les problèmes restants concernant la demande de divulgation que le fonctionnaire avait présentée. Le processus a été confirmé dans une lettre transmise aux parties, datée du 13 juin 2011.

13 Cependant, la divulgation demeurait litigieuse. Le 4 août 2011, une deuxième conférence préparatoire à l’audience a été tenue. Lors de cette téléconférence, les parties ont eu pleinement l’occasion de discuter des détails de la demande de divulgation soumise par le fonctionnaire. À la suite de cette téléconférence, j’ai rendu une ordonnance détaillée concernant la divulgation, qui a été confirmée dans une lettre datée du 10 août 2011.

14 En dépit de mon intervention et de mon ordonnance, le 12 décembre 2011, le fonctionnaire a soutenu qu’il n’avait pas reçu les documents qu’il avait demandés conformément à l’ordonnance rendue le 10 août 2011. Il a aussi continué à affirmer que la divulgation de renseignements supplémentaires était nécessaire. Le 21 décembre 2011, l’employeur a fait valoir que le fonctionnaire a reçu tous les documents mentionnés dans mon ordonnance du 10 août 2011. Le différend opposant les parties concernant la divulgation s’est poursuivi dans la correspondance adressée à la CRTFP jusqu’au 26 janvier 2012, date à laquelle j’ai ordonné que le grief soit mis au rôle le plus tôt possible et que toute question en suspens concernant la divulgation pouvait être soulevée à l’audience.

15 La mise au rôle du grief s’est révélée un défi, car le fonctionnaire, en réponse aux dates proposées par l’employeur, n’était disponible qu’aux dates pour lesquelles l’employeur avait indiqué qu’il n’était pas disponible. Pour trouver un terrain d’entente, le fonctionnaire s’est fait demander de fournir toutes les dates au cours de l’automne 2012 où il était disponible. Le 25 mars 2012, le fonctionnaire a indiqué qu’il n’était pas disponible en novembre ou en décembre 2012 et a demandé qu’on lui propose plutôt des dates en 2013.

16 Le 29 mars 2012, sur mes instructions, le fonctionnaire s’est fait demander de fournir les raisons pour lesquelles il ne pouvait pas participer à une audience avant 2013. Le 5 avril 2012, le fonctionnaire a répondu qu’il estimait que la mise au rôle du grief avant qu’il ne dispose de tous les documents dont il avait besoin portait préjudice à sa capacité d’obtenir une audience équitable. Toutefois, il a également précisé que le long délai pour fixer les dates des audiences lui a causé des difficultés financières.

17 J’ai trouvé que les raisons avancées par le fonctionnaire pour expliquer son indisponibilité pour une audience à l’automne 2012 n’étaient pas suffisantes pour justifier un autre ajournement, puisqu’on l’a informé que toute question en suspens concernant la divulgation pouvait être soulevée à l’audience. À ma demande, les parties ont été informées le 13 avril 2012 que l’affaire serait mise au rôle avant la fin de 2012. On a demandé au fonctionnaire de fournir ses dates de disponibilité pour participer à une audience au cours de la période allant d’octobre à décembre 2012. En réponse à cette demande, le fonctionnaire a précisé qu’il n’était disponible que du 20 au 30 décembre 2012. Étant donné les limites de mise au rôle pendant la période des Fêtes, il a été décidé que le grief serait entendu du 17 au 21 décembre 2012, et le fonctionnaire en a été informé le 4 mai 2012.

18 Le 14 novembre 2012, un avis officiel d’audience a été transmis aux parties pour les informer de la tenue de l’audience et en confirmer la date et le lieu. Les parties ont été informées que, si l’une d’elles n’assistait pas à l’audience, l’affaire pourrait être réglée sur la base de la preuve et des observations présentées à l’audience, sans autre avis.

19 L’audience a eu lieu à Toronto, Ontario, le 17 décembre 2012. L’employeur était présent, mais pas le fonctionnaire. Les tentatives du greffe de la CRTFP pour le joindre étaient sans succès. L’employeur a demandé un rejet immédiat du grief sous prétexte que le fonctionnaire était absent. Toutefois, étant donné que l’avis d’audience énonçait qu’en l’absence d’une des parties l’audience serait tenue sans autre avis, et puisque l’employeur avait le fardeau de la preuve concernant l’objection à la compétence qu’il a déposée, j’ai demandé à l’employeur de présenter ses preuves et ses arguments relativement à son objection à la compétence.

Résumé de la preuve

20 L’employeur a soumis comme élément de preuve une copie de la lettre de démission du fonctionnaire, datée du 4 mars 2008, et son acceptation de la démission, datée du 6 mars 2008. L’employeur a également fourni des copies d’un courriel daté du 2 avril 2008 que le représentant syndical du fonctionnaire lui avait envoyé pour demander l’annulation de la démission, lequel a été suivi par une lettre du fonctionnaire, datée du 7 avril 2008, dans laquelle le fonctionnaire demandait d’annuler la démission. Le 8 avril 2008, l’employeur a rejeté la demande d’annulation de la démission.

Résumé de l’argumentation

21 L’employeur a affirmé que l’affaire dont j’étais saisie concernait une démission. Tous les documents présentés démontraient que le fonctionnaire a démissionné de son emploi le 4 mars 2008, et que la démission a été acceptée le 6 mars 2008. La CRTFP n’a pas la compétence d’entendre un grief portant sur une démission. Le fonctionnaire n’était pas présent à l’audience, et par conséquent, aucune preuve n’a été soumise à la CRTFP pour réfuter la preuve de la démission du fonctionnaire. L’employeur a donc demandé que le grief soit rejeté au motif que la CRTFP n’a pas la compétence pour entendre l’affaire.

Motifs

22 Le grief a été renvoyé à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 209(1)b) de la LRTFP, qui prévoit notamment ce qui suit :

209. (1)Après l’avoir porté jusqu’au dernier palier de la procédure applicable sans avoir obtenu satisfaction, le fonctionnaire peut renvoyer à l’arbitrage tout grief individuel portant sur :

[…]

b) soit une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire […]

23 Une démission n’est manifestement pas une mesure disciplinaire. En l’absence de preuve ou de témoignage de la part du fonctionnaire pour réfuter la preuve de démission que l’employeur a présentée, je dois conclure que le fonctionnaire a démissionné de son poste le 4 mars 2008, et que l’employeur a donné effet à la démission en l’acceptant le 6 mars. Bien que le fonctionnaire semble avoir regretté sa démission de son poste et qu’il ait tenté de revenir sur sa décision presque un mois plus tard, rien dans la preuve dont je suis saisie ne me permet de conclure que le refus de l’employeur d’accepter l’annulation de la démission découlait de motifs disciplinaires. Par conséquent, je n’ai pas compétence pour entendre le présent grief.

24 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

25 J’ordonne la fermeture du dossier.

Le 10 mai 2013.

Traduction de la CRTFP

Kate Rogers,
arbitre de grief

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