Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Dans une décision antérieure, la Commission avait jugé que l’article 107 de la Loi protégeait les conditions d’emploi des employés de l’unité de négociation du groupe Services frontaliers et que le demandeur avait contrevenu à l’article 107 en mettant fin aux arrangements sur les congés pour activités syndicales de certains employés, dont la présidente de la section locale du Syndicat des Douanes et de l’Immigration du siège social de l’Agence des services frontaliers du Canada: Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2013 CRTFP 46 - le demandeur a demandé que la Commission clarifie la décision 2013 CRTFP 46 en ce qui concerne cette employée - la Commission a jugé qu’à la lumière des éléments de preuve présentés à l’audience ayant mené à la décision 2013 CRTFP 46, l’employée n’était pas membre de l’unité de négociation assujettie à l’article 107 et, par conséquent, que toute référence à elle dans 2013 CRTFP 46 était une erreur - la Commission a décidé que cette erreur était suffisamment manifeste pour justifier la clarification de 2013 CRTFP 46. Demande accueillie. Décision modifiée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2013-07-05
  • Dossier:  525-02-50 XR : 561-02-587
  • Référence:  2013 CRTFP 76

Devant une formation de la
Commission des relations de
travail dans la fonction publique


ENTRE

CONSEIL DU TRÉSOR
(Agence des services frontaliers du Canada)

demandeur

et

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

défenderesse

Répertorié
Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada) c. Alliance de la Fonction publique du Canada

Affaire concernant une demande d’exercice par la Commission de l’un ou l’autre des pouvoirs prévus à l’article 43 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
David Olsen, une formation de la Commission des relations de travail dans la fonction publique

Pour le demandeur:
Richard E. Fader, avocat

Pour la défenderesse:
Andrew Raven, avocat

Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés les 23 mai, 6 juin et 11 juin 2013.
(Traduction de la CRTFP)

I. Demande devant la Commission

1 Cette décision porte sur une demande déposée par le Conseil du Trésor (le « demandeur ») en vue d’examiner la décision rendue le 23 avril 2013 dans Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2013 CRTFP 46.

2 Dans la décision 2013 CRTFP 46, une formation de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») a accueilli une plainte de pratique déloyale de travail déposée par l’Alliance de la Fonction publique du Canada (la « défenderesse »). Selon la plainte, le demandeur aurait enfreint l’article 107 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « LRTFP »), édictée par l’article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, au regard de l’unité de négociation du groupe Services frontaliers, lorsqu’il a décidé de cesser de payer les congés pour activités syndicales de certains agents de la défenderesse. L’article 107 est libellé comme suit :

107. Une fois l’avis de négociation collective donné, sauf entente à l’effet contraire entre les parties aux négociations et sous réserve de l’article 132, les parties, y compris les fonctionnaires de l’unité de négociation, sont tenues de respecter chaque condition d’emploi qui peut figurer dans une convention collective et qui est encore en vigueur au moment où l’avis de négocier a été donné, et ce, jusqu’à la conclusion d’une convention collective comportant cette condition ou :

a) dans le cas où le mode de règlement des différends est le renvoi à l’arbitrage, jusqu’à ce que la décision arbitrale soit rendue;

b) dans le cas où le mode de règlement des différends est le renvoi à la conciliation, jusqu’à ce qu’une grève puisse être déclarée ou autorisée, le cas échéant, sans qu’il y ait contravention au paragraphe 194(1).

3 La section « Ordonnance » de la décision 2013 CRTFP 46, est libellée comme suit :

VII. Ordonnance

[205] Je déclare que la défenderesse a enfreint l’article 107 de la LRTFP lorsqu’elle a mis fin aux arrangements sur les congés pour activités syndicales des employés qui étaient en détachement à temps plein, c’est-à-dire les quatre vice-présidents, la représentante de l’accès à l’égalité et les présidents des succursales de Montréal, de Toronto, de Vancouver et du siège social (les « employés détachés »).

[206] J’ordonne à la défenderesse de continuer à respecter les arrangements sur les congés pour activités syndicales pour les employés détachés pendant toute la période de gel aux termes de l’article 107 de la LRTFP.

[207] J’ordonne à la défenderesse de verser à l’agent négociateur des dommages équivalant aux sommes qui auraient été versées entre le 15 août 2012 et la date de la présente décision aux employés détachés si les arrangements n’avaient pas été annulés.

[208] Je demeure saisi de cette affaire pour une période de soixante (60) jours à compter de la date de la présente décision au cas où les parties éprouveraient de la difficulté à la mettre à exécution.

4 Le 2 mai 2013, le demandeur a demandé que la formation de la Commission qui a tranché dans 2013 CRTFP 46 modifie sa décision [traduction] « […] pour clarifier ce qui semble être une erreur administrative dans la décision […] » en ce qui concerne Francine Stuart, présidente de la section locale du Syndicat des Douanes et de l’Immigration de l’administration centrale de l’Agence des services frontaliers du Canada (le Syndicat des Douanes et de l’Immigration est l’une des composantes de la défenderesse). Plus précisément, le demandeur a allégué que les preuves présentées à la formation de la Commission lors de l’audience indiquaient clairement que Mme Stuart, pendant toute la période pertinente, appartenait à une unité de négociation autre que celle du groupe Services frontaliers et que ses conditions d’emploi n’étaient pas protégées par l’article 107 de la LRTFP. Le demandeur a donc demandé [traduction] « […] que la décision soit modifiée de manière à exclure le poste occupé par Francine Stuart ».

5 Le 8 mai 2013, la défenderesse s’est opposée à la demande du demandeur. Selon elle, [traduction] « […] la décision de la Commission, y compris l’ordonnance de la Commission aux paragraphes 205 et 206, est claire, sans appel et exécutoire […] », et « […] la Commission s’étant acquittée de sa charge, il n’y a aucun fondement juridique pour rouvrir ce dossier […] ». La défenderesse a ajouté :

[Traduction]

[…] la condition d’emploi sur laquelle se fonde l’ordonnance de la Commission aux paragraphes 205 et 206 de sa décision fait partie des conditions d’emploi de tous les employés de l’unité de négociation FB – pas seulement les dirigeants syndicaux individuels visés […]

Essentiellement, la défenderesse a fait valoir que puisque l’accès par le demandeur à ses dirigeants syndicaux en congé payé pour activités syndicales aurait pu constituer une condition d’emploi comprise dans la convention collective s’appliquant aux employés de l’unité de négociation du groupe Services frontaliers, un tel accès est protégé par l’article 107 de la LRTFP.

6 À ma demande, le greffe de la Commission a écrit aux parties, le 14 mai 2013, pour les informer que j’examinais la question d’exercer ou non les pouvoirs conférés par l’article 43 de la LRTFP et pour leur demander de soumettre des arguments écrits à cet égard. L’article 43 est libellé comme suit :

43. (1) La Commission peut réexaminer, annuler ou modifier ses décisions ou ordonnances ou réentendre toute demande avant de rendre une ordonnance à son sujet.

(2) Dans un tel cas, les droits acquis par suite d’une de ces décisions ou ordonnances ne peuvent être modifiés ou abolis qu’à compter de la date du réexamen, de l’annulation ou de la modification de la décision ou de l’ordonnance.

II. Résumé des arguments

A. Pour le demandeur

7 Le demandeur a déposé ses arguments écrits le 23 mai 2013.

8 Le demandeur a soutenu que sa demande portait sur l’exécution de la décision 2013 CRTFP 46. Il a noté que la formation de la Commission qui avait tranché l’affaire n’avait pas épuisé sa compétence sur cette affaire, puisqu’elle demeurait saisie de l’affaire en cas de problèmes découlant de l’exécution de sa décision; voir 2013 CRTFP 46, au paragraphe 208. Subsidiairement, le demandeur a avancé que l’article 43 de la LRTFP permettait à la Commission d’examiner de nouveau une décision rendue par l’une de ses formations.

9 Le demandeur s’est appuyé sur les critères de réexamen d’une décision énoncés au paragraphe 29 de Chaudhry c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2009 CRTFP 39 (confirmé par Chaudhry c. Canada (Procureur général), 2009 CAF 376), qui indique :

[29] Il ressort de l'analyse de la jurisprudence que les lignes directrices ou critères ci-après doivent être pris en compte lorsqu'il s'agit de réexaminer une décision de la CRTFP (voir les décisions Quigley, Danyluk, Czmola et Alliance de la Fonction publique du Canada) :

  • le réexamen ne doit pas remettre en litige le fond de l'affaire;
  • il doit être fondé sur un changement important des circonstances;
  • il doit tenir compte uniquement des nouveaux éléments de preuve ou arguments qui ne pouvaient être raisonnablement présentés lors de l'audience initiale;
  • on doit s'assurer que les nouveaux éléments de preuve ou arguments ont des conséquences importantes et déterminantes sur l'issue de la plainte;
  • on doit veiller à ce que le réexamen soit fondé sur un motif impérieux;
  • le pouvoir de réexamen doit être exercé de manière « […] judicieuse, avec beaucoup de soin et peu fréquemment ». (Czmola).

10 Le demandeur a allégué que sa demande n’avait pas pour but de remettre en question le bien-fondé de la décision 2013 CRTFP 46. Au contraire, le demandeur a estimé que la situation de Mme Stuart n’avait pas été prise en considération par la formation de la Commission et que toute référence à celle-ci dans la décision de la formation était une méprise de la part de la formation. Les preuves présentées à l’audience ont clairement établi que Mme Stuart n’était pas une employée de l’unité de négociation du groupe Services frontaliers et que ses conditions d’emploi n’étaient, par conséquent, pas protégées par l’article 107 de la LRTFP. Ces preuves n’ont pas été contredites par la défenderesse.

11 Le demandeur a allégué que la défenderesse faisait fi de la première partie de l’article 107 de la LRTFP, qui ne protège dans ce cas-ci que les conditions d'emploi des membres de l’unité de négociation du groupe Services frontaliers. Le demandeur a maintenu que la convention collective de l’unité de négociation du groupe Services frontaliers ne peut pas porter sur les conditions d’emploi des employés qui n’appartiennent pas à cette unité de négociation. L’article 107 de la LRTFP ne peut donc pas, en l’espèce, protéger les conditions d’emploi des employés qui n’appartiennent pas à l’unité de négociation du groupe Services frontaliers; le congé payé pour activités syndicales de Mme Stuart n’est donc pas couvert par l’article 107 de la LRTFP.

12 Le demandeur a demandé que la formation de la Commission précise que la décision 2013 CRTFP 46 ne s’appliquait pas à Mme Stuart, ou que la Commission réexamine et modifie la décision 2013 CRTFP 46 [traduction] « […] de manière à exclure le poste occupé par Francine Stuart ».

B. Pour la défenderesse

13 La défenderesse a déposé ses arguments écrits le 6 juin 2013.

14 La défenderesse a affirmé que la décision 2013 CRTFP 46 était sans équivoque et ne nécessitait aucune clarification. La formation de la Commission a clairement pris en considération le statut du poste de président de la section locale du Syndicat des Douanes et de l’Immigration de l’administration centrale de l’Agence des services frontaliers du Canada et a décidé que la pratique du demandeur consistant à offrir des congés payés pour activités syndicales pour ce poste était une condition d’emploi protégée par l’article 107 de la LRTFP. L’ordonnance de la formation, aux paragraphes 205-207, concorde avec ces constatations.

15 La défenderesse a soutenu que les critères d’examen d’une décision énoncés dans Chaudhry, 2009 CRTFP 39, paragraphe 29, ne sont pas satisfaits en l’espèce.

16 La défenderesse a allégué qu’en abordant la question sous l’angle des conditions d’emploi personnelles de Mme Stuart, le demandeur tente en fait de remettre en litige la décision de la formation de la Commission selon laquelle la pratique d’accorder un congé payé pour activités syndicales pour le poste de président de la section locale du Syndicat des Douanes et de l’Immigration de l’administration centrale de l’Agence des services frontaliers du Canada est protégé par l’article 107 de la LRTFP. La défenderesse a noté que la formation de la Commission avait rejeté l’argument du demandeur selon lequel la pratique consistant à offrir des congés payés pour activités syndicales n’était qu’une série d’arrangements avec des employés individuels et que ces congés payés n’étaient pas protégés par l’article 107 de la LRTFP.

17 La défenderesse a indiqué qu’il n’y avait eu aucun changement important dans les circonstances depuis que la formation de la Commission a pris la décision 2013 CRTFP 46. Elle a également contesté l’affirmation du demandeur selon laquelle la question visant à déterminer quels postes du Syndicat des Douanes et de l’Immigration étaient visés par la pratique du demandeur d’accorder des congés payés pour activités syndicales, était une question de redressement. Selon la défenderesse, la question de savoir si l’article 107 de la LRTFP protège ou non le poste de président de la section locale du Syndicat des Douanes et de l’Immigration de l’administration centrale de l’Agence des Services frontaliers du Canada était l’une des questions au cœur de la plainte.

18 Selon la défenderesse, le demandeur ne s’est appuyé sur aucun nouvel argument ou preuve qui aurait pu être raisonnablement présenté à l’audience devant la formation de la Commission responsable de la décision 2013 CRTFP 46. La défenderesse a fait valoir que la portée de la plainte était claire pour le demandeur, puisque la plainte faisait clairement référence à une entente où le demandeur a accepté d’accorder des congés payés pour activités syndicales à des agents précis du Syndicat des Douanes et de l’Immigration et puisque la plainte renvoyait expressément au poste de président de la section locale du Syndicat des Douanes et de l’Immigration de l’administration centrale de l’Agence des services frontaliers du Canada. Selon la défenderesse, rien n’empêchait le demandeur d’aborder, lors de l’audience, la question de savoir si les congés payés pour activités syndicales étaient protégés pour ce poste en vertu de l’article 107 de la LRTFP.

19 La défenderesse a souligné qu’il n’y avait aucune raison valable de réexaminer et de modifier la décision 2013 CRTFP 46, car les conclusions de la formation de la Commission sont raisonnables.

20 Enfin, la défenderesse s’est appuyée sur le paragraphe 8 de Chaudhry c. Canada (Procureur général), 2009 CAF 376, pour faire valoir que la demande du demandeur allait à l’encontre du principe juridiquement reconnu du caractère définitif des décisions de la Commission.

C. Réfutation du demandeur

21 Le demandeur a déposé ses arguments écrits le 11 juin 2013.

22 Le demandeur a fait valoir que son besoin de clarifier la décision 2013 CRTFP 46 découlait du fait que la formation de la Commission n’avait pas traité directement la question visant à déterminer si la protection conférée par l’article 107 de la LRTFP aux conditions d’emploi des employés de l’unité de négociation du groupe Services frontaliers s’appliquait aussi aux conditions d’emploi de Mme Stuart. Le demandeur a réitéré que Mme Stuart n’était pas une employée de l’unité de négociation du groupe Services frontaliers; elle appartenait à une autre unité de négociation, laquelle est régie par une autre convention collective qui n’est pas visée par l’article 107. Selon le demandeur, rejeter sa demande aurait l’effet absurde de conférer à Mme Stuart des conditions d’emploi s’appliquant aux employés d’une autre unité de négociation.

23 Le demandeur était en désaccord avec la défenderesse quant à la qualification du statut de Mme Stuart. La défenderesse croit que les congés payés pour activités syndicales découlent du poste de Mme Stuart au sein du Syndicat des Douanes et de l’Immigration, alors que le demandeur affirme qu’ils dépendent des propres conditions d’emploi de Mme Stuart. Le demandeur a maintenu que le droit d’un employé à tout type de congé dépend des conditions d’emploi s’appliquant au poste de l’employé auprès du demandeur, et non de la participation de l’employé aux affaires de son agent négociateur. Le demandeur a noté que Mme Stuart avait été payée au taux de rémunération de son poste d’attache auprès du demandeur pendant son congé pour activités syndicales; elle n’a pas été payée à titre d’employée de l’unité de négociation du groupe Services frontaliers.

III. Motifs

24 Dans Institut professionnel de la fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor, dossier de la CRTFP 172‑02‑76 (19730605), une formation de l’ancienne Commission des relations de travail dans la fonction publique (l’« ancienne Commission ») a étudié s’il fallait exercer ou non les pouvoirs conférés par l’article 25 de l’ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (l'« ancienne LRTFP »), L.R.C., 1970, ch. P‑35. L’article 25, un prédécesseur de l’article 43 de la LRTFP actuelle, est libellé comme suit :

25. La Commission peut examiner de nouveau, annuler ou modifier toute décision ou ordonnance qu’elle a rendue, ou elle peut procéder à une nouvelle audition de toute demande avant de rendre un ordonnance à son sujet, sauf que les droits acquis en raison d’une décision ou d’une ordonnance ainsi examinée de nouveau, annulée ou modifiée ne peuvent faire l’objet d’une modification ou d’une abolition qui prendrait effet avant la date de ce nouvel examen, de cette annulation ou de cette modification.

Aux pages 6 à 8 de sa décision, la formation de l’ancienne Commission s’est exprimée comme suit relativement aux circonstances dans lesquelles elle devrait user de son pouvoir discrétionnaire pour revoir une décision de l’ancienne Commission :

[…]

  1. Le texte de l’article 25 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique établit clairement que le pouvoir que possède la Commission d’examiner de nouveau, annuler ou modifier toutes ses décisions ou ordonnances est un pouvoir discrétionnaire et c’est sans doute à cet aspect du pouvoir de la Commission que le juge en chef faisait allusion lorsqu’il a déclaré qu’il ne voulait pas qu’on lui fît dire que la Commission est tenue de procéder à une « nouvelle audition » de toute demande ou à un « nouvel examen » d’une de ses décisions ou ordonnances si ce n’est dans la mesure où il y a des raisons valables de le faire. À deux endroits, dans l’extrait de la décision du juge en chef citée plus haut, il est précisé qu’une condition que doit remplir une demande de nouvel examen est qu’il doit y avoir une raison valable pour que la Commission procède à un nouvel examen de sa décision.
  2. D’habitude, la Commission n’est pas obligée de rendre une décision de portée générale lorsqu’on lui demande d’examiner de nouveau ou de modifier de quelque manière une de ses décisions ou ordonnances. Toutefois, la décision doit comporter une erreur manifeste touchant son application à la situation dont elle traite ou portant sur certains faits nouveaux dont une ou des parties ont appris l’existence après l’audition primitive.
  3. La première de ces possibilités peut avoir trait à des erreurs techniques ou de copiste dans la décision ou l’ordonnance. Elle comprendrait des choses comme des erreurs d’écriture ou des fautes de frappe. Par exemple, l’indication d’un nom erroné comme partie à l’affaire ou la correction d'erreurs résultant d'une inattention, une erreur de calcul de chiffres ou de montants d’argent ou l’omission pas la Commission de régler un point accessoire. Dans ces cas, on peut dire que l’autorité élucide le texte ou précise ses intentions.
  4. La seconde raison pour laquelle la Commission entreprendrait un nouvel examen de ses décisions ou ordonnances a trait plus au fond de l’affaire qu’à la façon dont la décision est formulée. Dans de tels cas, il faut qu’on fasse voir à la Commission qu’il existe une raison majeure pour que la Commission entreprenne d’examiner de nouveau ses décisions. Nécessairement, il doit y avoir plus que le simple fait qu’une des parties n'est pas satisfaite de la décision rendue par la Commission puisque, de toute manière, chaque fois qu'une décision est rendue, au moins une partie ne sera vraisemblablement pas heureuse du résultat. D’une manière générale, avant que la Commission procède à un nouvel examen de ses décisions ou ordonnances lorsque l’examen demandé porte sur le fond de l’affaire, la partie requérante a donc l’obligation de présenter de solides raisons justifiant cet examen. Il se peut que la partie requérante ait eu connaissance de nouveaux éléments de preuve, mais, dans ce cas, elle doit démontrer à la Commission que les nouveaux éléments de preuve n'étaient pas disponibles aux fins d'examen au moment où a été rendue la première décision ou, s'ils l'étaient, qu'il n'était pas possible de les trouver, en faisant preuve de diligence, lors de la préparation et de la présentation de l'affaire. De toute manière, il faut démontrer que les éléments de preuve que la partie tente de produire devant la Commission sont d'une nature presque décisive et qu'ils ne feraient pas que seulement corroborer le point en litige, c'est-à-dire que le fait ou document qu'on cherche à produire est essentiel à l'affaire et son existence ou son authenticité ne peut être sérieusement mis en doute.
  5. Bien sûr, d'autres motifs peuvent inciter la Commission à entreprendre un nouvel examen d'une de ses décisions ou ordonnances, mais, répétons-le, dans de tels cas il incombe à la partie requérante de démontrer qu'il existe des considérations particulières qui justifient le nouvel examen. Autrement, la Commission serait dans la position insoutenable d’examiner constamment de nouveau ses décisions chaque fois qu’une des parties à l’affaire le lui demanderait.

[…]

25 Dans la décision 2013 CRTFP 46, il n’est pas question des conditions d’emploi de Mme Stuart. Au contraire, on y mentionne les charges de Mme Stuart au sein du Syndicat des Douanes et de l’Immigration en même temps que des charges similaires, mais distinctes – les détenteurs de ces charges similaires mais distinctes sont tous des employés de l’unité de négociation du groupe Services frontaliers, dont il était question dans la plainte. Dans le cadre de la rédaction de la décision 2013 CRTFP 46, j’ai perdu de vue le poste d’attache de Mme Stuart auprès du demandeur. Mes notes sur l’audience indiquent que Camille Thériault-Power a bien témoigné que Mme Stuart était membre d’une unité de négociation autre que celle du groupe Services frontaliers – unité pour laquelle le demandeur et la défenderesse avaient déjà conclu une nouvelle convention collective. Il est évident que, même si Mme Stuart exerçait effectivement les charges de présidente de la section locale du Syndicat des Douanes et de l’Immigration de l’administration centrale de l’Agence des services frontaliers du Canada, elle n’était pas une employée de l’unité de négociation du groupe Services frontaliers et la protection offerte par l’article 107 de la LRTFP ne s’appliquait pas à elle. Mon renvoi à la charge de Mme Stuart au Syndicat des Douanes et de l’Immigration dans l’affaire 2013 CRTFP 46 résultait donc d’une méprise déplorable de ma part.

26 L’erreur administrative de la formation de la Commission est-elle assez grave pour justifier la clarification de la décision 2013 CRTFP 46? Je dois admettre que oui. Les motifs de la décision 2013 CRTFP 46 étaient clairement fondés sur la conclusion que les conditions d’emploi des employés de l’unité de négociation du groupe Services frontaliers étaient protégées par l’article 107 de la LRTFP. Cependant, le demandeur a raison lorsqu’il soutient que Mme Stuart n’était pas membre de cette unité de négociation; la preuve non contredite a clairement démontré que Mme Stuart appartient à une autre unité de négociation. De plus, la protection conférée par l’article 107 de la LRTFP ne s’appliquait pas à l’unité de négociation de Mme Stuart à l’époque pertinente. Ma méprise est considérable. Je n’ai d’autre choix que de conclure que ma méprise constitue une erreur importante de ma part. ainsi, je conclus qu’en l’espèce, ma méprise constitue une raison valable justifiant la clarification de la décision 2013 CRTFP 46.

27 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

IV. Ordonnance

28 La décision 2013 CRTFP 46 est modifiée de manière à supprimer tout renvoi au poste de président de la section locale du Syndicat des Douanes et de l’Immigration de l’administration centrale de l’Agence des services frontaliers du Canada.

Le 5 juillet 2013.

Traduction de la CRTFP

David Olsen,
une formation de la
Commission des relations de
travail dans la fonction
publique

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