Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Les deux plaignants ont participé à un processus de nomination interne annoncé et ont été placés dans un bassin de candidats qualifiés à partir duquel ils ont obtenu une nomination intérimaire à un poste. Par la suite, c’est à dire au terme de leur nomination initiale, ils ont été nommés de nouveau à titre intérimaire aux mêmes postes. Pendant cette période, l’intimé a examiné le processus de nomination, a déterminé que des erreurs avaient été commises et a décidé, comme mesure corrective, de réévaluer tous les candidats. À l’issue de la réévaluation, les deux plaignants ont été jugés non qualifiés. L’intimé a alors informé les deux plaignants de son intention de mettre fin à leur nomination intérimaire plus tôt que prévu. Les plaignants ont déposé des plaintes en vertu de l’article 74 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (LEFP) en affirmant que la révocation de leur nomination était déraisonnable. L’intimé a déposé une requête visant à faire rejeter les plaintes. Dans sa requête, il explique avoir décidé de ne pas mettre fin à la nomination des plaignants plus tôt que prévu, malgré ce qu’il leur avait dit au départ. Les plaignants pouvaient occuper leur poste à titre intérimaire jusqu’au terme de la période de nomination. L’intimé a fait remarquer que les nominations actuelles des plaignants n’avaient pas été effectuées dans le cadre du processus annoncé initial, mais plutôt de deux autres processus de nomination non annoncés. Décision Comme les nominations intérimaires des plaignants n’ont pas été révoquées, le Tribunal n’a pas compétence pour instruire les plaintes déposées en vertu de l’article 74 de la LEFP. Les plaintes sont rejetées.

Contenu de la décision

Coat of Arms - Armoiries
Dossiers :
2013-0234 et 0259
Rendue à :
Ottawa, le 29 novembre 2013

JAMES FIELDHOUSE ET DANIELLE IAFRATE
Plaignants
ET
LE PRÉSIDENT DE L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA
Intimé
ET
AUTRES PARTIES

Affaire :
Requête demandant le rejet de la plainte
Décision :
Les plaintes sont rejetées
Décision rendue par :
Guy Giguère, président
Langue de la décision :
Anglais
Répertoriée :
Fieldhouse c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada
Référence neutre :
2013 TDFP 33

Motifs de décision


Introduction

1 Le 26 juin et le 5 juillet 2013, respectivement, les plaignants, James Fieldhouse et Danielle Iafrate, ont présenté des plaintes auprès du Tribunal de la dotation de la fonction publique (le Tribunal) au motif que la révocation de leurs nominations intérimaires par l’intimé, le président de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), n’était pas raisonnable.

2 Le 1er novembre 2013, l’intimé a présenté une requête demandant le rejet de ces plaintes parce que les nominations des plaignants n’avaient pas été révoquées et que le Tribunal n’avait donc pas compétence pour instruire les plaintes.

Résumé des faits pertinents

3 Les deux plaignants ont participé au processus de nomination 11‑BSF‑IA‑GTA‑INTELL­‑FB‑008 (processus no 1) pour obtenir un poste d’agent du renseignement aux groupe et niveau FB‑04. En octobre 2011, ils ont été jugés qualifiés et ont été inscrits dans un bassin de candidats qualifiés. Le 5 décembre 2011, ils ont été nommés à titre intérimaire à des postes d’agent du renseignement à partir de ce bassin. Ils ont ensuite été nommés de nouveau à titre d’agents du renseignement; leurs nominations intérimaires actuelles doivent prendre fin le 5 décembre 2013.

4 Lors d’activités courantes de surveillance des processus de dotation, des irrégularités ont été détectées dans le dossier de dotation du processus no 1, et l’intimé a par la suite approuvé la tenue, à compter du 1er novembre 2012, d’une enquête interne sur les méthodes utilisées dans ce processus pour l’évaluation des qualifications essentielles.

5 Alors que l’enquête était encore en cours, les nominations intérimaires des plaignants devaient prendre fin le 5 décembre 2012. Le 19 décembre 2012, les plaignants se sont fait chacun offrir, dans une lettre de leur directeur régional, une « prolongation de l’intérim à temps plein […] du 5 décembre 2012 au 5 décembre 2013 » [traduction]. Les lettres précisaient toutefois que ces nominations intérimaires étaient effectuées dans le cadre de processus non annoncés (12‑BSF‑ACIN‑GTA‑EIOD‑FB‑032 et 12‑BSF‑ACIN‑GTA‑EIOD‑FB‑033 [processus nos 2 et 3]).

6 En février 2013, l’enquête interne portant sur le processus no 1 a pris fin, et l’intimé a déterminé que des mesures correctives devaient être prises à propos d’erreurs repérées dans le processus d’évaluation. Il a fallu notamment réviser les examens écrits de tous les candidats qualifiés de manière à dresser une nouvelle liste de candidats qualifiés.

7 Le 21 juin 2013, les plaignants ont été avisés par lettre que leur candidature était retirée du bassin de candidats qualifiés, car, après révision des examens écrits, ils n’avaient pas obtenu la note de passage requise. Les plaignants ont également été informés verbalement que leurs nominations intérimaires se termineraient plus tôt que prévu. Ils ont donc présenté les plaintes en l’espèce en vertu de l’article 74 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13 (la LEFP), au motif que leurs nominations avaient été révoquées et que cette révocation n’était pas raisonnable.

Argumentation de l’intimé

8 Dans sa requête demandant le rejet des plaintes, l’intimé déclare que, lorsque les plaintes ont été déposées, il n’avait pas encore décidé si les nominations allaient être révoquées. Toutefois, après réflexion, l’intimé a pris la décision de ne pas révoquer les nominations des  plaignants. Elles dureront donc jusqu’au 5 décembre 2013, comme prévu. L’intimé précise que sa décision est fondée entre autres sur le fait que les nominations ont été effectuées dans le cadre des processus nos 2 et 3.

9 L’intimé affirme par conséquent que, les nominations des plaignants n’ayant pas été révoquées, le Tribunal n’a pas compétence pour instruire les plaintes en vertu de l’article 74 de la LEFP.

Argumentation des plaignants

10 Les plaignants soutiennent qu’on leur avait dit que leurs nominations seraient révoquées et considèrent que l’intimé se montre « injuste » [traduction] en leur permettant de terminer leur intérim parce que leurs plaintes deviennent ainsi sans objet. Ils affirment que l’intimé a décidé de ne pas révoquer leurs nominations afin d’empêcher leurs plaintes de suivre leur cours. Ils soutiennent également que l’intimé a abusé de son pouvoir lorsqu’il a conclu qu’ils n’étaient pas qualifiés dans le processus no 1. L’un des plaignants a aussi invoqué l’article 83 de la LEFP en expliquant que cet article lui permettait d’ « exprimer ses préoccupations » [traduction].

Argumentation de la Commission de la fonction publique

11 La Commission de la fonction publique déclare qu’elle ne dispose pas de suffisamment de renseignements pour prendre position relativement à la requête demandant le rejet des plaintes, mais ajoute que, en l’absence de document indiquant la révocation des nominations, les plaignants n’ont aucun droit de recours auprès du Tribunal selon l’article 74 de la LEFP.

Analyse

12 L’article 74 de la LEFP prévoit qu’une personne dont la nomination est révoquée par l’administrateur général en vertu de l’article 15(3) peut présenter au Tribunal une plainte selon laquelle la révocation n’était pas raisonnable. En vertu de l’article 15(3), l’administrateur général a le pouvoir de révoquer une nomination ou de prendre des mesures correctives dans les cas où, après avoir mené une enquête, il est convaincu qu’une erreur, une omission ou une conduite irrégulière a influé sur le choix de la personne nommée.

13 Ainsi, pour que la situation décrite à l’article 15(3) se présente, l’administrateur général doit avoir révoqué une nomination dans le cas où une erreur, une omission ou une conduite irrégulière a influé sur la nomination. Voir Goldsmith c. le sous‑ministre de Ressources humaines et Développement des compétences Canada, 2010 TDFP 0020; McMillan c. le sous‑ministre d’Affaires indiennes et du Nord Canada, 2011 TDFP 0020.

14 En l’espèce, l’intimé a mené une enquête uniquement à propos du processus no 1. Il est cependant clair que les nominations actuelles des plaignants ont été faites par suite des processus nos 2 et 3, comme en témoignent les lettres de nomination qu’ils ont reçues. Rien n’indique que l’intimé a mené une enquête concernant les nominations faites dans les processus nos 2 et 3, ni qu’il y a eu une erreur, une omission ou une conduite irrégulière relative à ces processus.

15 En outre, quelle qu’ait été l’intention originale de l’intimé après l’enquête menée au sujet du processus no 1, celui‑ci a clairement établi que les nominations intérimaires visant actuellement les plaignants n’étaient pas révoquées. Les plaignants n’ont pas nié qu’ils occupaient encore les postes en question, et n’ont pas fourni de renseignements indiquant que leurs nominations étaient révoquées avant qu’elles prennent fin le 5 décembre 2013. Les plaignants peuvent ne pas être d’accord avec les raisons pour lesquelles l’intimé a décidé de ne pas révoquer leurs nominations, mais il reste que ces nominations n’ont pas été révoquées.

16 Les plaignants affirment également que l’intimé a abusé de son pouvoir en décidant de retirer leurs candidatures du bassin établi dans le processus no 1. L’article 77(1) de la LEFP prévoit que, lorsqu’une nomination est faite ou proposée, une personne peut présenter au Tribunal une plainte selon laquelle elle n’a pas été nommée ou n’a pas fait l’objet d’une proposition de nomination en raison d’un abus de pouvoir. Pour qu’un employé ait le droit de présenter une plainte en vertu de l’article 77(1), une nomination doit d’abord avoir été faite ou proposée. Voir Czarnecki c. l’administrateur général de Service Canada, 2007 TDFP 0001. La plainte doit être déposée dans les quinze jours suivant la date où a été reçu l’avis de nomination ou de proposition de nomination en faisant l’objet (article 10(1)b) du Règlement du Tribunal de la dotation de la fonction publique, DORS/2006-6, modifié par DORS/2011-116).

17 Les plaignants n’ont pas formulé de plainte en vertu de l’article 77(1) et n’ont pas présenté de renseignements montrant que des nominations ont été faites ou proposées par suite du processus no 1 dans les quinze jours précédant le dépôt de leurs plaintes. L’intimé a confirmé dans son argumentation concernant la présente requête qu’il n’avait procédé à aucune nomination dans cette période, qui aurait donné aux plaignants le droit de présenter une plainte.

18 Le Tribunal constate également que l’un des plaignants s’appuie sur l’article 83 de la LEFP. Cet article ne s’applique pas aux faits de l’espèce. Des plaintes peuvent être présentées en vertu de l’article 83 de la LEFP relativement à des mesures correctives ordonnées par le Tribunal dans une décision antérieure. Toutefois, les mesures correctives prises par l’intimé en ce qui concerne le processus no 1 n’ont pas été mises en œuvre en conséquence de l’application d’une ordonnance antérieure du Tribunal.

19 Pour tous ces motifs, le Tribunal conclut que les nominations des plaignants n’ont pas été révoquées et qu’aucune nomination n’a été faite ni proposée dans le cadre du processus no 1 dans le délai prescrit avant la présentation des plaintes en l’espèce. Le Tribunal n’a donc pas compétence pour instruire ces plaintes aux termes de l’article 74 ou 77(1) de la LEFP.

Décision

20 Le Tribunal accueille la requête demandant le rejet des plaintes présentées par l’intimé. Par conséquent, les plaintes sont rejetées.


Guy Giguère
Président

Parties au dossier


Dossiers du Tribunal :
2013-0234 et 0259
Intitulé :
James Fieldhouse et Danielle Iafrate et le président de l’Agence des services frontaliers du Canada
Audience :
Demande écrite; décision rendue sans la
comparution des parties
Date des motifs :
Le 29 novembre 2013
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