Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé a déposé un grief dans lequel il allègue qu’il y a eu violation à la convention collective applicable - son agent négociateur a signé la formule, ce qui indiquait qu’il approuvait la présentation du grief et confirmait qu’une entente avait été conclue afin qu’il représente le fonctionnaire s’estimant lésé - l’agent négociateur a renvoyé le grief à l’arbitrage après avoir obtenu des réponses insatisfaisantes au cours de la procédure de règlement des griefs - avant le début de l’arbitrage, l’agent négociateur a informé la Commission qu’il ne représentait plus le fonctionnaire s’estimant lésé, mais qu’il l’autorisait à se représenter lui-même dans le cadre de l’arbitrage - l’arbitre de grief a demandé au fonctionnaire s’estimant lésé, à l’employeur et à l’agent négociateur de lui présenter des arguments écrits sur la question de savoir si un fonctionnaire peut se représenter lui-même au cours d’un arbitrage - l’arbitre de grief a statué que non seulement l’agent négociateur doit approuver la présentation du grief, mais il doit également assurer la représentation concernant ce grief et il ne peut pas accorder à un fonctionnaire s’estimant lésé en particulier le pouvoir de se représenter lui-même - les fonctionnaires eux-mêmes ne sont pas partie à la convention collective - en raison des droits exclusifs qui sont accordés à l’agent négociateur, il doit nécessairement prendre part à tout grief ayant trait à l’interprétation ou à l’application de dispositions d’une convention collective et doit s’assurer de représenter les intérêts de l’unité de négociation dans son ensemble - à titre de représentant exclusif de l’ensemble des employés formant une unité de négociation et en tant que partie à une convention collective, l’agent négociateur doit pouvoir déterminer librement quelles questions ayant trait à l’interprétation et à l’application de la convention collective il souhaite clarifier, le seul critère étant son devoir de représentation équitable, et il doit pouvoir choisir les questions de ce genre qui doivent être soumises à la procédure de règlement des griefs et à l’arbitrage - le grief ne pourrait être entendu sans la représentation de l’agent négociateur à l’arbitrage. Dossier clos par ordonnance.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail  dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2014-02-21
  • Dossier:  566-34-3542
  • Référence:  2014 CRTFP 21

Devant un arbitre de grief


ENTRE

SEAN CAVANAGH

fonctionnaire s'estimant lésé

et

AGENCE DU REVENU DU CANADA

employeur

Répertorié
Cavanagh c. Agence du revenu du Canada


Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l'arbitrage


Devant:
Kate Rogers, arbitre de grief
Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Lui-même
Pour l'agent négociateur:
Talitha A. Nabbali, avocate
Pour l'agent négociateur:
Linelle S. Mogado, avocate
Décision rendue sur la base d’arguments écrits, déposés les 19 et 20 décembre 2013. (Traduction de la CRTFP)

MOTIFS DE DÉCISION

I. Grief individuel renvoyé à l'arbitrage

1 Le fonctionnaire s’estimant lésé, Sean Cavanagh (le « fonctionnaire ») est un expert en évaluation des entreprises, dont le poste est classifié au groupe et niveau AU-03. Il est au service de la section d’évaluation des entreprises du Bureau des services fiscaux de Toronto Centre de l’Agence du revenu du Canada (l’« employeur »). Pendant toute la période pertinente, il était visé par la convention collective conclue entre l’employeur et l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (l’« agent négociateur »), pour le groupe Vérification, finances et sciences, ayant pour date d’expiration le 21 décembre 2007 (la « convention collective »).

2 Le 30 octobre 2006, le fonctionnaire a déposé un grief, alléguant une violation du paragraphe 46.01 de la convention collective. Un représentant de l’agent négociateur a signé la formule de grief, laissant entendre que la présentation du grief était approuvée et qu’une entente avait été conclue afin de représenter le fonctionnaire. Ce grief a été entendu et rejeté aux deuxième, troisième et dernier paliers de la procédure de règlement des griefs et a été renvoyé à l’arbitrage le 11 mars 2010. Lorsque le grief a été renvoyé à l’arbitrage, l’agent négociateur a confirmé qu’il représenterait le fonctionnaire au moment de l’arbitrage.

3 Le grief devait être entendu en même temps que trois autres griefs dans le cadre d’une audience d’arbitrage tenue entre le 11 et le 15 avril 2011. Le 6 avril 2011, l’agent négociateur a informé la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») qu’il ne représentait plus le fonctionnaire relativement aux questions devant être entendues entre le 11 et le 15 avril 2011. L’agent négociateur a demandé l’ajournement de l’audience afin que le fonctionnaire dispose de suffisamment de temps pour préparer son cas. Parmi les griefs devant être entendus entre le 11 et le 15 avril 2011, seul le grief en l’espèce portait sur l’interprétation et l’application d’une disposition de la convention collective. À ce sujet, l’agent négociateur a fait la déclaration suivante :

[…] le syndicat note qu’il s’agit d’un grief ayant trait à l’interprétation et à l’application de la convention collective, plus particulièrement l’article 46.01 de la convention collective. Le syndicat a approuvé la présentation de ce grief, a représenté M. Cavanagh tout au long de la procédure de règlement du grief et a renvoyé le grief à l’arbitrage. Le syndicat approuve la décision de M. Cavanagh de se représenter lui-même dans le cadre de l’arbitrage de ce grief.

4 En ma qualité d’arbitre de grief nommée par le président de la Commission pour entendre ce grief ainsi que les autres griefs devant être entendus entre le 11 et le 15 avril 2011, la demande d’ajournement m’a été soumise et je l’ai approuvée le 7 avril 2011. Cependant, à mon insu ou sans que j’aie donné des instructions, ce dossier de grief a été fermé à cause d’une erreur administrative. Je n’ai appris la fermeture du dossier qu’en octobre 2013, auquel moment j’ai ordonné sa réouverture. Les parties ont été informées de ma décision le 16 octobre 2013.

5 Même si le dossier a été rouvert, le fait que l’agent négociateur ait retiré son appui au grief constituait une question à résoudre avant que l’arbitrage du grief ne soit mis au rôle, et ce, conformément au paragraphe 209(2) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « LRTFP »), qui précise ceci :

209. (2) Pour que le fonctionnaire puisse renvoyer à l'arbitrage un grief individuel du type visé à l'alinéa (1)a), il faut que son agent négociateur accepte de le représenter dans la procédure d'arbitrage.

6 Le 6 novembre 2013, j’ai demandé à l’employeur, à l’agent négociateur et au fonctionnaire de me présenter des arguments écrits sur la question de savoir si ce dernier pouvait se représenter lui-même à l’arbitrage. Plus précisément, la question que j’ai posée aux parties était [traduction] « […] si un employé peut se représenter lui-même à l’arbitrage dans le cas d’un grief renvoyé à l’arbitrage aux termes de l’alinéa 209(1)a) avec l’approbation de l’agent négociateur. »

II. Résumé de l’argumentation

A. Pour l'employeur

7 Citant King c. Canada (Procureur général), 2012 CF 488, aux paragraphes 65 et 66; Boivin c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada),2009 CRTFP 98, au paragraphe 25; Bahniuk c. Agence du revenu du Canada, 2011 CRTFP 75, aux paragraphes 19 et 20; Yarney c. Administrateur général (ministère de la Santé), 2011 CRTFP 112, aux paragraphes 103 et 104, l’employeur a fait valoir que le paragraphe 209(2) de la LRTFP fait en sorte qu’un fonctionnaire ne peut se représenter lui-même dans le cadre de l’arbitrage d’un grief qui a trait à l’interprétation ou à l’application d’une convention collective.

8 L’employeur a affirmé que seul un agent négociateur pouvait déterminer quels griefs ayant trait à l’interprétation ou à l’application d’une convention collective pouvaient être renvoyés à l’arbitrage. L’employeur a soulevé que dans Vaughn c. Canada, 2005 CSC 11, la Cour suprême du Canada a déclaré que parce que le syndicat est l’une des parties à la convention collective examinée, lui seul est autorisé à décider si un grief peut être présenté.

9 L’employeur a fait valoir que parce que ce grief concerne l’interprétation ou l’application de la convention collective, le fonctionnaire pouvait donner suite au grief seulement s’il était représenté par son agent négociateur. Le fait d’autoriser un employé à se représenter lui-même dans le cadre de l’arbitrage d’un grief ayant trait à l’interprétation ou à l’application d’une convention collective serait contraire à l’intention de la LRTFP.

B. Pour l'agent négociateur

10 Même si, à l’origine, l’agent négociateur avait autorisé le fonctionnaire à se représenter lui-même dans le cadre du grief en question, il a affirmé, dans ses observations, qu’il avait commis une erreur. Après avoir examiné de nouveau la question, il a déclaré que l’interprétation la plus raisonnable du paragraphe 209(2) de la LRTFP est qu’il agit comme obstacle pour un employé qui se représente lui-même dans le cadre d’un grief portant sur l’interprétation ou l’application d’une convention collective. Un agent négociateur ne peut autoriser un employé à se représenter lui-même.

11 L’agent négociateur a fait valoir qu’il y a de subtiles différences entre les versions française et anglaise du paragraphe 209(2) de la LRTFP et que, selon lui, la version anglaise est plus ambiguë que la version française. En particulier, l’agent négociateur a noté qu’il est précisé dans la version française que l’agent négociateur doit accepter de représenter un fonctionnaire dans la procédure d’arbitrage, tandis que dans la version anglaise, il est uniquement exigé qu’il approuve le fait de représenter l’employé.

12 L’agent négociateur a également soulevé que le paragraphe 208(4) de la LRTFP précisait davantage l’interprétation à donner au paragraphe 209(2) puisqu’il précise qu’un fonctionnaire ne peut présenter de grief portant sur l’interprétation ou l’application d’une convention collective à moins d’avoir obtenu l’approbation de l’agent négociateur et d’être représenté par lui. Si un employé doit obtenir l’approbation de l’agent négociateur et être représenté par lui pour pouvoir déposer un grief concernant l’interprétation ou l’application d’une convention collective, il semble logique que ces deux exigences soient remplies afin de renvoyer un grief à l’arbitrage.

13 Citant Brown c. Syndicat des employés du Solliciteur général et Edmunds, 2013 CRTFP 48, et Yarney, l’agent négociateur a souligné qu’un employé doit avoir à la fois l’approbation de son agent négociateur pour pouvoir soumettre le grief à l’arbitrage et son accord qu’il le représentera à l’arbitrage, afin de pouvoir renvoyer le grief à l’arbitrage. Dans Yarney, l’arbitre de grief a statué que lorsqu’un agent négociateur retire son appui à un grief ayant trait à l’interprétation ou à l’application d’une convention collective, le grief n’est plus arbitrable. De même, dans Boivin, l’arbitre de grief a conclu qu’un grief portant sur l’interprétation ou l’application de la convention collective applicable n’était pas arbitrable une fois que l’agent négociateur du fonctionnaire refuse de le représenter.

C. Pour le fonctionnaire s'estimant lésé

14 Le fonctionnaire a fait valoir que le paragraphe 209(2) de la LRTFP n’empêche pas un employé de se représenter lui-même. Il a déclaré que le sens clair à donner au paragraphe est simplement qu’un employé doit obtenir l’approbation de son agent négociateur afin que ce dernier le représente à l’arbitrage au moment du renvoi; toutefois, rien dans le paragraphe n’empêche un agent négociateur de se retirer de cette représentation. Si un agent négociateur avait le pouvoir d’empêcher qu’un grief soit renvoyé à l’arbitrage simplement en refusant d’assurer la représentation, le processus pourrait devenir politisé ou faussé. Le fonctionnaire a déclaré qu’un tel détournement du processus serait contraire à l’objectif de relations de travail équitables.

15 Le fonctionnaire a également souligné que le paragraphe 209(2) de la LRTFP est une disposition [traduction] « distincte » qui n’a aucun lien avec les autres dispositions de la LRTFP hormis l’alinéa 209(1)a). Il a déclaré qu’il ressort clairement d’une simple lecture de l’alinéa 209(1)a) et du paragraphe 209(2) qu’un employé peut renvoyer un grief à l’arbitrage et qu’il serait erroné d’affirmer que l’agent négociateur d’un employé pourrait empêcher l’employé d’exercer son droit de renvoyer un grief à l’arbitrage. Il a affirmé qu’étant donné que l’autoreprésentation est une pratique autorisée jusqu’à la Cour suprême, il faut supposer qu’elle est également autorisée dans le cadre des relations de travail.

16 Le fonctionnaire a reconnu que le paragraphe 208(4) de la LRTFP semble créer une double exigence en ce sens que les employés doivent à la fois obtenir l’approbation de l’agent négociateur et leur représentation. Toutefois, il a déclaré qu’étant donné qu’on ne demandait pas aux parties d’examiner des questions découlant du paragraphe 208(4), toute discussion au sujet de ce paragraphe dépassait les limites de la discussion dont il est question. Il a également déclaré que tout examen de la nature de son grief lui causait un préjudice. Il a soulevé que pour des motifs de justice et d’équité, il fallait que tout conflit interne dans la législation soit résolu sans lui causer du tort.

17 Le fonctionnaire a également précisé qu’étant donné que l’agent négociateur lui avait dit qu’il pouvait se représenter lui-même, ce serait injuste de le priver de ce droit. Il a déclaré que la décision de l’agent négociateur d’adopter une position opposée constituait une pratique déloyale de travail, qu’elle soit intentionnelle ou pas.

III. Motifs

18 Le 30 octobre 2006, le fonctionnaire a déposé un grief dans lequel il a allégué qu’il y avait eu violation d’une disposition de sa convention collective. Quand le grief a été déposé, l’agent négociateur l’a approuvé et a représenté le fonctionnaire, conformément au paragraphe 208(4) de la LRTFP. Le grief a été renvoyé à l’arbitrage le 11 mars 2010. À ce moment, l’agent négociateur a approuvé son renvoi à l’arbitrage et a confirmé qu’il représenterait le fonctionnaire. Or, le 6 avril 2011, l’agent négociateur a informé la Commission qu’il ne représentait plus le fonctionnaire et a déclaré qu’il avait [traduction] « approuvé » la requête de ce dernier de se représenter lui-même à l’arbitrage.

19 La décision à rendre en l’espèce consiste à déterminer [traduction] « […] si un employé peut se représenter lui-même à l’arbitrage dans le cas d’un grief renvoyé à l’arbitrage aux termes de l’alinéa  209(1)a) avec l’approbation de l’agent négociateur. » Même si, tel qu’il a été mentionné par l’employeur et l’agent négociateur, dans un certain nombre de décisions antérieures de la Commission il est mentionné que les griefs portant sur l’interprétation ou l’application d’une convention collective ne peuvent être renvoyés à l’arbitrage sans l’approbation d’un agent négociateur, il semble que la question de savoir si un agent négociateur peut accorder sa permission à un fonctionnaire qui souhaite se représenter lui-même à l’égard d’un tel grief soit une question nouvelle. Pour les motifs qui suivent, j’estime qu’un agent négociateur doit non seulement approuver un grief portant sur l’interprétation ou l’application d’une convention collective, mais également assurer la représentation d’un tel grief. Par conséquent, je ne pense pas qu’un agent négociateur puisse accorder à un fonctionnaire individuel le pouvoir de se représenter lui-même.

20 Les articles 208 et 209 de la LRTFP établissent le droit des employés individuels de déposer des griefs et de les renvoyer à l’arbitrage. À titre de référence, ces articles sont formulés comme suit :

208. (1) Sous réserve des paragraphes (2) à (7), le fonctionnaire a le droit de présenter un grief individuel lorsqu'il s'estime lésé

(a) par l'interprétation ou l'application à son égard :

(i) soit de toute disposition d'une loi ou d'un règlement, ou de toute directive ou de tout autre document de l'employeur concernant les conditions d'emploi,

(ii) soit de toute disposition d'une convention collective ou d'une décision arbitrale;

(b) par suite de tout fait portant atteinte à ses conditions d'emploi.

(2) Le fonctionnaire ne peut présenter de grief individuel si un recours administratif de réparation lui est ouvert sous le régime d'une autre loi fédérale, à l'exception de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

(3) Par dérogation au paragraphe (2), le fonctionnaire ne peut présenter de grief individuel relativement au droit à la parité salariale pour l'exécution de fonctions équivalentes.

(4) Le fonctionnaire ne peut présenter de grief individuel portant sur l'interprétation ou l'application à son égard de toute disposition d'une convention collective ou d'une décision arbitrale qu'à condition d'avoir obtenu l'approbation de l'agent négociateur de l'unité de négociation à laquelle s'applique la convention collective ou la décision arbitrale et d'être représenté par cet agent.

(5) Le fonctionnaire qui choisit, pour une question donnée, de se prévaloir de la procédure de plainte instituée par une ligne directrice de l'employeur ne peut présenter de grief individuel à l'égard de cette question sous le régime de la présente loi si la ligne directrice prévoit expressément cette impossibilité.

(6) Le fonctionnaire ne peut présenter de grief individuel portant sur une mesure prise en vertu d'une instruction, d'une directive ou d'un règlement établis par le gouvernement du Canada, ou au nom de celui-ci, dans l'intérêt de la sécurité du pays ou de tout État allié ou associé au Canada.

(7) Pour l'application du paragraphe (6), tout décret du gouverneur en conseil constitue une preuve concluante de ce qui y est énoncé au sujet des instructions, directives ou règlements établis par le gouvernement du Canada, ou au nom de celui-ci, dans l'intérêt de la sécurité du pays ou de tout État allié ou associé au Canada.

209. (1) Après l'avoir porté jusqu'au dernier palier de la procédure applicable sans avoir obtenu satisfaction, le fonctionnaire peut renvoyer à l'arbitrage tout grief individuel portant sur :

(a) soit l'interprétation ou l'application, à son égard, de toute disposition d'une convention collective ou d'une décision arbitrale;

(b) soit une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire;

(c) soit, s'il est un fonctionnaire de l'administration publique centrale :

(i) la rétrogradation ou le licenciement imposé sous le régime soit de l'alinéa 12(1)d) de la Loi sur la gestion des finances publiques pour rendement insuffisant, soit de l'alinéa 12(1)e) de cette loi pour toute raison autre que l'insuffisance du rendement, un manquement à la discipline ou une inconduite,

(ii) la mutation sous le régime de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique sans son consentement alors que celui-ci était nécessaire;

(d) soit la rétrogradation ou le licenciement imposé pour toute raison autre qu'un manquement à la discipline ou une inconduite, s'il est un fonctionnaire d'un organisme distinct désigné au titre du paragraphe (3).

(2) Pour que le fonctionnaire puisse renvoyer à l'arbitrage un grief individuel du type visé à l'alinéa (1)a), il faut que son agent négociateur accepte de le représenter dans la procédure d'arbitrage.

(3) Le gouverneur en conseil peut par décret désigner, pour l'application de l'alinéa (1)d), tout organisme distinct.

21 Il apparaît clairement de la lecture de l’article 208 de la LRTFP que les employés individuels peuvent présenter des griefs portant sur un éventail de questions découlant de l’interprétation ou de l’application des dispositions de lois, de politiques de l’employeur, de conventions collectives ou de décisions arbitrales, ou de faits portant atteinte à leurs conditions d’emploi. Bien que le droit des employés individuels de présenter des griefs concernant des questions liées à l’emploi soit assujetti à certaines restrictions, seuls les griefs découlant de l’interprétation ou de l’application d’une convention collective ou d’une décision arbitrale requièrent l’approbation de l’agent négociateur et son consentement de représenter ses employés, tel qu’il est précisé au paragraphe 208(4).

22 Aux termes de l’article 209 de la LRTFP, les questions pouvant faire l’objet d’un grief pouvant être renvoyé à l’arbitrage aux termes de l’article 209 de la LRTFP sont plus limitées que celles pouvant faire l’objet d’un grief en vertu de l’article 208 de la LRTFP. De plus, bien que les griefs portant sur l’interprétation ou l’application d’une convention collective figurent parmi ceux pouvant être renvoyés à l’arbitrage, le paragraphe 209(2) prescrit que pour que le fonctionnaire puisse renvoyer à l’arbitrage un tel grief, « […] il faut que son agent négociateur accepte de le représenter dans la procédure d’arbitrage ».

23 La LRTFP ne précise pas les raisons pour lesquelles l’approbation et la représentation de l’agent négociateur sont nécessaires dans les cas de griefs portant sur une convention collective. Toutefois, ces raisons ne sont pas difficiles à déterminer. Selon la définition donnée au paragraphe 2(1), une convention collective est une « Convention écrite conclue en application de la partie 1 entre l’employeur et un agent négociateur donné et renfermant des dispositions relatives aux conditions d’emploi et à des questions connexes ». Les employés individuels ne sont pas des parties à une convention collective; elle est négociée par leur agent négociateur au nom de l’ensemble des employés membres de l’unité de négociation. Dans le cadre du processus de négociation collective énoncé dans la Partie 1 de la LRTFP, seul l’agent négociateur accrédité pour l’unité de négociation peut négocier des changements à la convention collective au nom des membres de l’unité. De plus, selon l’article 229, un arbitre de grief ne peut rendre une décision qui aurait « […] pour effet d’exiger la modification d’une convention collective ou d’une décision arbitrale ».

24 Étant donné qu’un agent négociateur représente tous les employés membres d’une unité de négociation lorsqu’il négocie une convention collective, par nécessité, il doit participer à la présentation de tout grief ayant trait à l’interprétation ou à l’application de la convention collective, puisqu’il doit s’assurer de représenter les intérêts de l’unité de négociation dans son entièreté. Dans Kwong c. Conseil du Trésor (Commission de l’immigration et du statut de réfugié), 2006 CRTFP 116, l’arbitre de grief a expliqué l’exigence selon laquelle l’agent négociateur doit approuver les griefs ayant trait aux conventions collectives en notant qu’elle « […] vise à protéger les intérêts de l’agent négociateur en tant que représentant de tous les fonctionnaires de l’unité de négociation ».

25 En tant que représentant exclusif de l’ensemble des employés dans une unité de négociation et en tant que partie à une convention collective, l’agent négociateur doit pouvoir déterminer librement quelles questions ayant trait à l’interprétation et à l’application de la convention collective il souhaite clarifier, le seul critère étant son devoir de représentation équitable. Il doit également avoir le contrôle de la présentation de ces questions par le biais de la procédure de règlement des griefs et à l’arbitrage. Pour ces raisons, j’estime que non seulement l’agent négociateur doit approuver la présentation des griefs ayant trait à l’interprétation et à l’application de la convention collective et assurer la représentation tout au long de la procédure de règlement des griefs, il doit également approuver le renvoi de tels griefs à l’arbitrage et assurer la représentation aux audiences d’arbitrage.

26 La LRTFP accorde des droits de représentation exclusifs aux agents négociateurs pour toutes les affaires ayant trait aux conventions collectives dont ils sont parties. J’estime qu’il serait contraire aux dispositions pertinentes de permettre à un employé individuel de se représenter lui-même dans le cadre d’un grief ayant trait à une telle convention collective. Le paragraphe 209(2) ne peut être interprété comme exigeant l’approbation de l’agent négociateur et son consentement à représenter le fonctionnaire uniquement au moment du renvoi à l’arbitrage. L’approbation de l’agent négociateur et son consentement de représenter le fonctionnaire doivent s’appliquer à l’ensemble du processus pour que le grief soit arbitrable. Il s’agit de la seule façon de protéger les intérêts de tous les employés de l’unité de négociation pour qui la convention collective a été négociée.

27 Par conséquent, je conclus que ce grief ne peut être entendu en l’absence de représentation de la part de l’agent négociateur et que le dossier doit être fermé.

28 Pour ces motifs, je rends l'ordonnance qui suit :

IV. Ordonnance

29 J’ordonne la fermeture du dossier.

21 février 2014.

Traduction de la CRTFP

Kate Rogers,
arbitre de grief

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