Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La fonctionnaire s’estimant lésée a contesté son licenciement à la suite d’événements survenus au moment où elle administrait un examen dans une école secondaire - dans la foulée de ces événements, l’employeur a demandé une évaluation d’aptitude au travail et, face au refus de la fonctionnaire s’estimant lésée de se soumettre à l’évaluation, il a licencié cette dernière - l’employeur a fait valoir qu’il s’agissait d’un licenciement de nature administrative; il s’est opposé à la compétence d’un arbitre de grief à instruire l’affaire - la fonctionnaire s’estimant lésée a fait valoir que son licenciement était de nature disciplinaire - l’arbitre de grief a conclu que, compte tenu de l’information recueillie par l’employeur concernant ce qui s’est passé à l’école, l’employeur aurait pu décider que la fonctionnaire s’estimant lésée avait commis un acte répréhensible qui justifiait la prise d’une mesure disciplinaire - or, il a plutôt conclu que son comportement avait été inhabituel et qu’il était justifié de demander une évaluation d’aptitude au travail - l’affirmation de la fonctionnaire s’estimant lésée selon laquelle elle n’avait en aucun temps perdu son sang-froid et qu’elle était la seule personne à s’être conduite de manière tout à fait professionnelle, était incompatible avec la preuve, notamment sa propre preuve - l’employeur avait un motif raisonnable de demander l’évaluation d’aptitude au travail - la preuve a révélé que l’employeur avait déployé de véritables efforts pour déterminer si la conduite de la fonctionnaire s’estimant lésée pouvait s’expliquer par un problème d’ordre médical - l’arbitre de grief a fait valoir que la preuve avait démontré que la fonctionnaire s’estimant lésée n’avait pas consenti à se soumettre à l’évaluation - l’employeur n’avait pas l’intention de punir la fonctionnaire s’estimant lésée - l’arbitre de grief n’avait pas compétence - même si la fonctionnaire s’estimant lésée avait renvoyé son grief à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 209(1)d) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, l’arbitre de grief aurait statué que les mesures prises par l’employeur étaient raisonnables, réfléchies et dans les limites de son pouvoir et que, de toute façon, l’employeur n’avait pas demandé la désignation en vertu de l’alinéa 209(1)d). Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail  dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2014-03-07
  • Dossier:  566-24-3698
  • Référence:  2014 CRTFP 26

Devant un arbitre de grief


ENTRE

BONNIE GALE BAUN

fonctionnaire s'estimant lésée

et

OPÉRATIONS DES ENQUÊTES STATISTIQUES

employeur

Répertorié
Baun c. Opérations des enquêtes statistiques


Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage


Devant:
Beth Bilson, arbitre de grief
Pour le fonctionnaire s'estimant lésée:
Elle-même et Robert Baun
Pour l'employeur:
John Jaworski et Karen Clifford, avocats
Affaire entendue à Kelowna (Colombie-Britannique), du 26 au 29 mars 2012 et du 10 au 13 juin 2013. (Traduction de la CRTFP)

MOTIFS DE DÉCISION

I. Grief individuel renvoyé à l’arbitrage

1 La présente décision porte sur le licenciement de Bonnie Gale Baun, la fonctionnaire s’estimant lésée (la « fonctionnaire »), qui était employée à titre d’intervieweuse sur place à temps partiel par les Opérations des enquêtes statistiques (« OES » ou l’ « employeur ») de Statistique Canada. Le licenciement de la fonctionnaire était le point culminant d’une série d’événements qui ont commencé par l’administration de son test dans le cadre du « Programme international pour le suivi des acquis des élèves » (PISA) dans une école secondaire de Kelowna, en Colombie-Britannique, en mai 2009. Des événements qui sont survenus pendant l’administration du test ont amené l’employeur à demander une évaluation de l’aptitude au travail (AAT) avant de permettre à la fonctionnaire de continuer à travailler dans le domaine. L’employeur a conclu que la fonctionnaire n’a pas consenti à l’évaluation de l’AAT et a produit une lettre établissant son licenciement (pièce E-36) en date du 26 août 2009.

2 L’employeur a décrit ce licenciement comme un licenciement administratif et a soulevé une objection à ma compétence de trancher la question. L’avocate de l’employeur a fait mention de l’article 209 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 2 (la « Loi »), lequel est libellé comme suit :

209. (1) Après l’avoir porté jusqu’au dernier palier de la procédure applicable sans avoir obtenu satisfaction, le fonctionnaire peut renvoyer à l’arbitrage tout grief individuel portant sur :

[…]

b) soit une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire;

[…]

d) soit la rétrogradation ou le licenciement imposé pour toute raison autre qu’un manquement à la discipline ou une inconduite, s’il est un fonctionnaire d’un organisme distinct désigné au titre du paragraphe(3).

3 L’avocate a souligné que l’employeur est désigné comme organisme distinct de l’Annexe V de la Loi sur la gestion des finances publiques, L.R.C. (1985), ch. F-11.

4 L’avocate a fait valoir que comme le licenciement de la fonctionnaire ne constituait pas une mesure disciplinaire, l’alinéa 209(1)b) de la Loi ne s’applique pas, et que comme la fonctionnaire n’a renvoyé son grief à l’arbitrage qu’en vertu de cette disposition, l’alinéa 209(1)d) ne peut s’appliquer non plus.

5 La fonctionnaire a fait valoir que la décision de l’employeur de la licencier était de nature punitive. Elle a dit qu’à la fin, elle avait consenti avec réticence à l’évaluation de l’AAT, mais que l’employeur avait refusé d’accepter son consentement et l’avait licenciée de façon arbitraire.

6 La question en litige dans le présent arbitrage de grief consiste essentiellement à déterminer si l’employeur était fondé à demander l’évaluation de l’AAT et si le licenciement était une mesure administrative plutôt qu’une sanction disciplinaire déguisée en mesure administrative. Pour trancher cette question, je ne suis pas tenue de décider si la conduite de la fonctionnaire justifiait l’imposition d’une mesure disciplinaire par l’employeur. Dans le cadre de ces motifs, je pourrais juger nécessaire de commenter le comportement de la fonctionnaire à certains égards, mais il convient de souligner que je ne tire pas de conclusions sur la question de savoir si elle a commis une inconduite justifiant une mesure disciplinaire. Les seules questions pertinentes consistent à établir si la décision de l’employeur de demander l’évaluation de l’AAT était fondée et si la décision de licencier la fonctionnaire était strictement une mesure administrative.

7 Il convient de noter que lorsque l’audience a débuté en 2012, l’employeur était représenté par John Jaworski. M. Jaworski a par la suite été nommé commissaire à la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission »), et lors de la deuxième phase de l’audience, en 2013, Mme Clifford a remplacé M. Jaworski à titre d’avocate de l’employeur.

II. Résumé de la preuve

8 L’employeur a cité un certain nombre de témoins, dont certains de ses employés et enseignants et du personnel de l’école secondaire de Kelowna où la fonctionnaire a administré le test PISA. L’avocate a demandé que les employés du district scolaire ne soient pas désignés par leur nom dans la présente décision, car ce sont des tiers dans le cadre de ce différend. Je me suis conformée à cette demande et j’ai désigné chacun de ces témoins par une lettre.

9 J’aimerais également formuler une observation générale au sujet des témoignages et autres éléments de preuve dans le présent cas. Quand des écarts sont apparus entre les comptes rendus des autres témoins et le témoignage de la fonctionnaire, celle-ci a régulièrement accusé ces témoins de mentir ou de créer sciemment un portrait erroné de ce qui s’est produit. La fonctionnaire a tenté à de nombreuses reprises de me convaincre que les témoins mentaient. Elle a également formulé cette même accusation dans de longs documents présentés à l’audience. L’extrait qui suit d’une lettre envoyée à l’avocat général de la Commission en septembre 2010 reflète leur ton général :

[Traduction]

Je fais valoir trois valeurs : le mensonge, la tricherie et le vol, et le droit au respect de la vie privée. Mon syndicat m’a menti et n’a pas fait son travail. Les employés de mon employeur ont fait de même. Je suis blessée et ma perspective de la vie a été modifiée parce que j’avais confiance en eux. Je ressens de la douleur parce que j’ai été accusée à tort et parce que mon employeur m’a accusée d’être malade alors que je ne le suis pas et m’a refusé mon emploi en se fondant sur ces allégations et sur les mensonges de l’école.

En contre-interrogatoire, l’avocate de l’employeur a examiné une liste de toutes les personnes ayant pris part aux événements qui ont mené au grief et à son traitement, dont les membres du personnel de la Commission, et a obtenu que la fonctionnaire affirme que toutes ces personnes mentaient.

10 Il s’agissait d’une allégation grave qui aurait des conséquences importantes si elles étaient fondées. Je suis d’avis que la prudence est de mise avant d’accepter qu’un témoin déforme délibérément les événements.

11 Les différences dans la façon de décrire les événements passés s’expliquent par de nombreux motifs. Il se peut qu’après un certain temps, certains événements se soient réunis dans leur esprit et qu’ils ne soient pas certains de l’occasion au cours de laquelle un événement en particulier s’est produit ou une déclaration a été faite. Il se peut que l’intention sous-jacente aux propos ou aux gestes des participants aux événements soit à l’origine d’un malentendu. Il se peut que leurs points de vue sur les événements aient divergés, et que leurs souvenirs des événements aient été véritablement différents. Quelle que soit l’explication, il y aura forcément des différences dans la façon dont les divers témoins relateront les mêmes événements. En observant les témoins, j’en ai conclu qu’ils ont tous tenté d’exposer avec exactitude leurs expériences des événements en question.

12 En ce qui concerne les témoins de l’employeur, aucun d’entre eux n’avait quelque motif que ce soit de tendre un piège à la fonctionnaire ou de prendre part à une campagne pour qu’elle perde son poste. Pour autant qu’ils sachent, avant les événements en litige, elle était une employée compétente qui était en mesure de s’acquitter de ses responsabilités.

13 Pour ce qui est des employés du district scolaire, ils n’étaient aucunement justifiés de déformer ce qui s’est produit ou de souhaiter du mal à la fonctionnaire, et je conclus que leurs témoignages étaient sincères. Un témoin, M. P, avait tendance à exagérer à l’occasion, et j’en ai tenu compte dans l’appréciation de son témoignage.

A. Pour l’employeur

14 Le premier témoin cité par l’employeur était Lauren Carter, qui était à l’époque des événements en litige une gestionnaire de la collecte des données basée au bureau de Vancouver de Statistique Canada. À ce titre, elle était chargée de superviser la collecte des données effectuée par les intervieweurs sur place. Bien que son travail ait porté surtout sur l’indice des prix à la consommation (IPC), elle était aussi l’une des deux gestionnaires de la collecte des données affectée aux tests PISA pour l’Alberta et la C.-B. et elle a participé à tous les cycles depuis l’an 2000. Mme Carter a affirmé qu’il y a environ 220 écoles secondaires dans ces deux provinces et qu’elle disposait de 4 intervieweurs principaux (qui supervisaient directement les intervieweurs sur place) et de 35 à 40 intervieweurs sur place. Il lui incombait de surveiller les coûts engagés, de s’occuper des séances d’orientation initiales des intervieweurs pour le test PISA, de planifier la collecte des données, d’affecter des intervieweurs sur place à la réalisation de tests, d’établir des liens avec les ministères provinciaux de l’Éducation et de faire rapport au bureau principal d’Ottawa de l’employeur sur l’administration du test.

15 Le test PISA est une évaluation effectuée tous les 3 ans dans 65 pays sous les auspices de l’Organisation de coopération et de développement économiques. Il est conçu pour comparer les niveaux de réalisation des élèves dans ces pays en mathématiques, en sciences et en langues. On présume que les comparaisons jettent les bases de la mesure des systèmes d’éducation dans les divers pays. Il incombe à Statistique Canada d’administrer le test au Canada. Mme Carter a affirmé qu’entre 90 et 120 écoles secondaires sont retenues au hasard dans les provinces de l’Ouest canadien aux fins de l’administration du test à leurs élèves. Le choix est fait en janvier de l’année du test. Les noms de 35 élèves de chaque école sont choisis de manière aléatoire comme sujets de test.

16 Mme Carter a affirmé qu’une fois que les écoles ont été sélectionnées, elle choisissait les intervieweurs, dont chacun devait administrer le test dans quatre à six écoles. Il s’agissait d’une affectation en or, d’une récompense pour les bons intervieweurs. Elle a dit que c’était un travail intéressant qui différait quelque peu de ce que faisaient habituellement les intervieweurs. L’une des gestionnaires de la collecte des données, Mariana Radisavljevic, a été affectée au bureau d’Ottawa de l’employeur pour suivre une formation sur l’administration du test PISA. À son retour, elle a formé les deux intervieweurs principaux qui avaient été affectés au test PISA et qui étaient chargés de former les intervieweurs sur place.

17 Entre la mi-mars et la mi-avril, les intervieweurs doivent prendre contact avec des écoles pour fixer des dates appropriées en vue du test PISA. Un intervieweur pourrait prendre des dispositions pour visiter les lieux ou pour parcourir la liste des élèves choisis afin que les responsables des écoles puissent désigner les élèves qui ne sont plus présents ou qui pourraient avoir besoin de mesures d’adaptation. L’employeur transmet les documents du test aux intervieweurs à Ottawa dans un contenant Rubbermaid verrouillé.

18 Mme Carter a dit que l’on demande à l’école d’envoyer une lettre à la famille de chaque élève pour expliquer la tenue du test. Elle a ajouté que pour divers motifs, certains parents se sont opposés à la participation de leurs enfants, et que la participation varie. Si elle est assez faible, l’intervieweur peut décider qu’il sera nécessaire d’organiser un deuxième test, puis consulte les responsables de l’école. Dans certaines circonstances, le ministère provincial de l’Éducation pourrait prendre part à la consultation sur l’opportunité d’administrer un autre test. D’après Mme Carter, la participation des écoles n’est pas volontaire, mais le ministère de l’Éducation peut leur permettre de se retirer dans certaines circonstances. Elle a ajouté que la plupart des écoles semblaient prêtes à participer et jugeaient utile d’avoir une occasion de comparer les réalisations de leurs élèves avec les résultats des autres provinces et pays. Le choix du moment du test pose parfois problème. S’il est administré plus tard que le 15 mai, il se peut qu’il entre en conflit avec des activités scolaires ou des examens associés à la fin de l’année scolaire.

19 Quand le test est complété, l’intervieweur remplit les documents et renvoie la boîte verrouillée à l’employeur à Ottawa. Un système de suivi est utilisé pour s’assurer que le matériel ne s’égare pas.

20 Mme Carter a dit qu’elle n’avait pas rencontré la fonctionnaire, mais qu’elle savait qu’elle figurait sur la liste des intervieweurs, et elle l’a chargée d’administrer le test PISA dans quatre écoles de Kelowna. Mme Carter a dit qu’une autre gestionnaire de la collecte des données, Mme Radisavljevic, était chargée de recueillir les données des enquêtes auprès des ménages et de superviser les tests PISA en Saskatchewan et au Manitoba. En ce qui concerne les enquêtes auprès des ménages, la fonctionnaire relevait de Mme Radisavljevic, et pour le test PISA, de Mme Carter. Sa superviseure directe dans les deux cas était l’intervieweuse principale Shari Armstrong.

21 Mme Carter a affirmé que le 11 mai 2009, elle a écouté un certain nombre de messages vocaux laissés à l’intention de Mme Armstrong le vendredi 8 mai. Deux messages provenaient de M. P, le directeur adjoint de l’école secondaire où la fonctionnaire était en train d’administrer le test PISA, et un autre provenait de Mme B, la directrice de l’école. Dans le dernier cas, il s’agissait simplement d’une demande que Mme Armstrong rappelle, mais les messages de M. P alléguaient que la fonctionnaire se comportait de façon inacceptable, et un message demandait son retrait de l’école. Il y avait un autre message de la fonctionnaire, qui demandait à Mme Armstrong une occasion de discuter des événements survenus à l’école secondaire où, a-t-elle dit, elle a été intimidée par le personnel.

22 Mme Carter a affirmé qu’elle a téléphoné à la fonctionnaire pour obtenir son compte rendu des événements. Mme Carter a dit que la fonctionnaire était d’abord fâchée et qu’elle pleurait pendant leur conversation, mais qu’elle s’est calmée et a décrit les événements à l’école.

23 Mme Carter a alors parlé à M. P. Elle croyait en outre avoir téléphoné à Mme Armstrong, quoiqu’elle ne se souvenait pas de cette conversation. Elle a pris des  notes détaillées de ses conversations avec la fonctionnaire et M. P. Elle a résumé les messages vocaux et a reproduit ses notes des conversations téléphoniques dans un courriel envoyé ultérieurement ce jour-là (pièce E-5).

24 Comme la fonctionnaire et M. P ont témoigné à l’audience, il n’est pas nécessaire de résumer le témoignage de Mme Carter sur le plan du contenu de ses conversations téléphoniques avec eux, si ce n’est que d’affirmer que son témoignage et ses notes correspondent étroitement aux versions des événements données par les deux témoins.

25 À la fin de la matinée du 11 mai, Mme Carter a participé à une conversation téléphonique à laquelle ont pris part Bonnie Holte, la directrice adjointe au siège régional de Statistique Canada à Edmonton; la directrice Lise Rivais, également basée à Edmonton; Noura Taleb, gestionnaire des ressources humaines basée à Edmonton; Kwong Wong, gestionnaire régional des programmes basé à Vancouver; Mme Radisavljevic.

26 Aussi à la fin de la matinée du 11 mai, Mme Carter a reçu un courriel de Mme Radisavljevic (soit la pièce E-1), mentionnant que cette dernière avait téléphoné à la fonctionnaire pour lui demander de cesser de faire des entrevues; elle a ajouté que la fonctionnaire continuerait d’être rémunérée pour l’instant. Mme Radisavljevic a informé la fonctionnaire qu’il y aurait une réunion d’instruction sous peu, et la fonctionnaire a affirmé qu’elle a communiqué avec la représentante de son agent négociateur.

27 Mme Carter a désigné un courriel (pièce E-8) daté du 15 mai 2009, qu’elle avait fait parvenir à Mme Taleb. Il mentionnait des conflits dans l’information fournie par la fonctionnaire dans sa conversation téléphonique avec Mme Carter le 11 mai et lors d’un appel téléphonique d’enquête ayant eu lieu le 14 mai. Mme Carter a proposé de faire enquête sur les écarts. Elle a également mentionné qu’elle communiquerait avec une autre personne à l’école, à savoir Mme G, une enseignante ayant pris part au test PISA le 8 mai, ainsi que les autres écoles où la fonctionnaire a mené le test PISA. Mme Carter a pris des notes (pièce E-9) d’une conversation avec Mme G le 19 mai et de conversations subséquentes avec des représentants des trois autres écoles. Elle a transmis ses notes à ses supérieurs.

28 Mme Carter a également désigné un courriel qui lui a été acheminé le 24 juillet (pièce E-10). Dans ce courriel, d’abord envoyé par Mme Armstrong à Mme Radisavljevic le 1er juin, Mme Armstrong a décrit une longue conversation qu’elle a eue avec la fonctionnaire le 6 mai 2009. Dans le courriel, Mme Armstrong indiquait qu’elle avait demandé une occasion de rencontrer la fonctionnaire [traduction] « […] en raison des tensions et du manque de communication existants ». La fonctionnaire avait refusé de la rencontrer, affirmant qu’elle n’avait pas le temps de bavarder, quoiqu’elles aient passé beaucoup de temps au téléphone à discuter de questions liées au travail.

29 Une réunion d’instruction a eu lieu par téléphone le 14 mai et Mme Carter a ensuite fait parvenir ses notes à cet égard à M. Wong (pièce E-11). Les notes indiquaient que M. Wong, Mme Holte et Mme Carter étaient présents, de même que la fonctionnaire et la représentante de l’agent négociateur, Linda Woods. Mme Carter a mentionné que la fonctionnaire était émotive lors de la réunion. En contre-interrogatoire, elle a dit qu’elle ne pouvait qu’interpréter ce qu’elle entendait, et la combinaison de longues pauses et de l’étouffement fréquent de la voix de la fonctionnaire l’a amenée à croire que la fonctionnaire pleurait. La fonctionnaire a décrit son expérience à l’école et les notes de Mme Carter résumaient le compte rendu de la fonctionnaire. Vers la fin, ses notes comportaient la déclaration suivante : [traduction] « Son traitement à l’école était avilissant, humiliant, dénigrant. » Cette déclaration semble avoir occasionné un malentendu de la part de la fonctionnaire, qui a compris que son comportement a été avilissant, humiliant ou dénigrant à l’égard d’autrui. Elle a dit qu’il s’agissait d’une fausse déclaration de la part de Mme Carter. Toutefois, le contexte des notes établit clairement que Mme Carter reprenait tout simplement le compte rendu des événements fait par la fonctionnaire et que Mme Carter mentionnait que la fonctionnaire avait subi un comportement avilissant, humiliant et dénigrant de la part d’autrui. Aucun jugement n’a été exprimé dans les notes sur la conduite de la fonctionnaire, et je précise qu’à mon avis, la déclaration selon laquelle Mme Carter a menti au sujet du comportement de la fonctionnaire n’est pas fondée dans les notes.

30 Mme Carter était également présente pour rédiger le compte rendu d’une deuxième réunion d’instruction, avec M. Wong et Laura Johnston, une représentante des ressources humaines. La fonctionnaire était présente avec Sharon Hazelwood,  une représentante de l’agent négociateur. Mme Hazelwood a lu une déclaration préparée à l’avance (pièce E-12) indiquant que l’agent négociateur croyait que la fonctionnaire avait été traitée injustement. Il a également été question des étapes franchies par la fonctionnaire et l’agent négociateur pour communiquer avec les trois autres écoles où elle a administré le test PISA.

31 Mme Carter a témoigné qu’après sa deuxième réunion d’instruction, elle n’a pris part à aucun autre événement ayant entraîné le licenciement de la fonctionnaire.

32 En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a demandé à Mme Carter si elle avait effectivement convenu d’utiliser le terme « répondant » dans la déclaration préparée à l’avance (pièce E-12) pour désigner les écoles et les élèves. Il a été déclaré au cours de la première réunion d’instruction que les contacts entre la fonctionnaire et l’agent négociateur, d’une part, et les écoles, d’autre part, constituaient une violation possible de la vie privée du répondant. Mme Carter a dit que selon son interprétation, les élèves étaient des répondants, mais que le terme pourrait également désigner les responsables de l’école qui prennent part à l’administration du test. Elle n’était pas d’accord pour dire que les responsables d’une école où le test est administré peuvent se ranger parmi les « membres du public » selon les termes des manuels de PISA. Mme Carter a convenu qu’en général, selon les politiques ayant trait au test, les documents ne devraient pas être laissés sans surveillance. Cependant, selon son interprétation des règles, un intervieweur qui administre le test pourrait quitter la pièce si la personne de l’école qui a pris part à l’organisation du test est présente.

33 Mme Carter a affirmé qu’elle a convenu que la fonctionnaire était tenue de se conformer aux règles formulées dans les manuels et les énoncés de politique concernant le test PISA pour veiller à ce que le test soit réalisé dans des conditions constantes. Cependant, elle a également mentionné qu’il importait, selon l’employeur, que les intervieweurs se rappellent qu’ils étaient des invités à l’école et qu’une bonne relation devait être maintenue avec les écoles. Mme Carter a dit que d’après son expérience, seulement 1 école sur environ 1 600 écoles où elle a supervisé le test PISA avait échoué à compléter le test. D’ici la tenue du test, le processus de négociations entre l’école et le ministère de l’Éducation est généralement terminé, et l’on a constaté très peu de cas d’absence de collaboration des écoles à l’administration du test.

34 En contre-interrogatoire, Mme Carter a décrit le processus utilisé pour traiter avec les membres du public qui demandent des renseignements au sujet d’une enquête. On lui a demandé si elle se souvenait d’une discussion à la réunion d’instruction du 14 mai au sujet d’une situation dans laquelle l’enfant d’une personne âgée contacté par la fonctionnaire pour une enquête avait téléphoné à l’employeur pour s’informer de la légitimité de l’enquête. Mme Carter a dit ne pas se souvenir d’une telle discussion le 14 mai, mais elle a ajouté que l’employeur reçoit de tels appels; les enfants de parents âgés sont souvent préoccupés par la possibilité que leurs parents soient soumis à une enquête sans leur consentement ou contactés par des personnes non autorisées. Mme Carter a dit que ces appelants obtiennent souvent de l’information des répondants à l’enquête, et que le fait de discuter avec eux de quelque chose qu’ils connaissent manifestement ne constitue pas une violation de leur vie privée.

35 Le deuxième témoin cité par l’employeur était Mme Armstrong, l’intervieweuse principale qui était la superviseure directe de la fonctionnaire. Mme Armstrong a dit avoir été au service de l’employeur de 1991 jusqu’au moment où elle a accepté un nouveau poste dans le secteur privé en janvier 2012. Mme Armstrong a mentionné que de janvier à août 2009, elle supervisait environ 15 intervieweurs sur place, qui effectuaient différentes enquêtes, surtout chez les répondants. Mme Armstrong a dit qu’elle participait surtout à des enquêtes à caractère social; elle relevait alors de Mme Radisavljevic. Le test PISA était la seule enquête pour laquelle elle relevait de Mme Carter.

36 Mme Armstrong a dit que dans le cadre du test PISA, l’on s’attendait à ce que l’intervieweur l’informe de la date, du lieu et des coordonnées d’une école en particulier, afin qu’elle puisse fournir de l’information exacte à l’employeur à Ottawa. Elle n’a pas pris part au test comme tel. Mme Armstrong a mentionné qu’elle était absente de la maison au cours de la fin de semaine en question et qu’elle n’a pas reçu les messages vocaux de M. P et de Mme B avant le lundi suivant. Elle a admis avoir reçu deux courriels de la fonctionnaire sur son ordinateur portatif de travail (pièce E-15), mais elle n’était pas certaine du moment où elle en a pris connaissance. Quoi qu’il en soit, elle n’a pas appelé la fonctionnaire pour lui parler après avoir reçu les messages et dans les faits, elle n’a pas eu d’autres contacts avec la fonctionnaire après le 8 mai.

37 Mme Armstrong a expliqué le processus de règlement des problèmes de relations avec les répondants. Un numéro sans frais est mis à la disposition des répondants et des membres du public en général afin qu’ils puissent poser des questions ou déposer des plaintes au sujet des enquêtes de Statistique Canada. Si un appel porte sur une question ou sur une plainte concernant un incident qui touche un intervieweur en particulier, l’appel est renvoyé au gestionnaire de la collecte des données chargé de cette région géographique.

38 Mme Radisavljevic avait renvoyé certaines situations impliquant la fonctionnaire à Mme Armstrong. Elle assurait généralement un suivi auprès du répondant pour tenter de régler le problème.

39 Mme Armstrong a mentionné des notes qu’elle avait prises au sujet de deux cas du genre en décembre 2011 (pièce E-14). Dans l’un d’eux, elle se souvenait que l’enfant d’un répondant avait manifesté le désir que la fonctionnaire ne communique plus avec son parent, et ce cas avait été transféré à un autre intervieweur. Mme Armstrong a dit qu’elle se souvenait d’avoir parlé d’une plainte à la fonctionnaire, mais elle a ajouté qu’elle ne se rappelait pas que la plaignante ait proféré des menaces de mort contre la fonctionnaire; bien sûr, il aurait fallu prendre au sérieux de telles menaces, mais elle n’était pas au courant de la formulation de menaces de mort. Elle se souvenait que la femme du répondant était fâchée parce que son mari avait dit à la fonctionnaire de ne pas se présenter. Mme Armstrong a indiqué que l’épouse a été assez raisonnable lorsqu’elles ont discuté au téléphone.

40 En réponse à une question au sujet du courriel qu’elle avait fait parvenir à Mme Radisavljevic le 1er juin (pièce E-10), dans lequel elle décrivait sa discussion avec la fonctionnaire le 6 mai, Mme Armstrong a affirmé qu’elle s’inquiétait maintenant du fait que la fonctionnaire et elle-même ne communiquaient pas efficacement. Mme Armstrong travaillait à l’extérieur de chez elle à Salmon Arm, en C.-B., et elle estimait qu’une rencontre en personne pourrait favoriser l’établissement de relations de travail plus efficaces; elle a donc proposé de se rendre à Kelowna pour rencontrer la fonctionnaire. Celle-ci a dit qu’elle n’avait pas le temps de bavarder, ce qui fait qu’elles ont discuté des questions demeurées en suspens par téléphone.

41 En contre-interrogatoire, Mme Armstrong s’est montrée hésitante à parler de la question de savoir si l’école secondaire où la fonctionnaire a réalisé le test PISA le 8 mai ou d’autres écoles secondaires avaient satisfait aux conditions énoncées dans le manuel PISA, parce qu’elle était absente à tous les tests. Elle a reconnu que les trois autres écoles n’ont pas formulé de plainte au sujet de la fonctionnaire. Mme Armstrong a affirmé que l’on s’attend à ce qu’une école fasse son possible pour se conformer aux exigences énoncées dans le manuel, quoi qu’il ne soit pas toujours possible de réaliser l’idéal. Elle a dit qu’elle croyait comprendre que l’école était considérée comme un répondant dans le cas du test PISA et que les intervieweurs devraient respecter les responsables de l’école; elle ne croyait pas qu’ils se rangeaient dans la catégorie des membres du public. Elle a reconnu que la sécurité du matériel de test revêt de l’importance et que la personne qui administre le test ne devrait pas habituellement quitter la pièce, mais elle a ajouté que dans certaines circonstances, la personne-ressource appropriée de l’école pourrait demeurer responsable.

42 Le prochain témoin de l’employeur était Mme B, la directrice de l’école secondaire où la fonctionnaire a mené le test PISA le 8 mai. Mme B enseignait depuis 1976 et a travaillé à l’école secondaire pendant huit ans avant de prendre sa retraite. L’école comptait de 1 700 à 1 750 élèves des niveaux 10 à 12.

43 Mme B a dit que son premier contact avec la fonctionnaire est survenu peu avant le début de la période de test. M. P lui avait demandé de parler à la fonctionnaire de certaines préoccupations qu’il avait, et elle s’est rendue à la pièce où le test devait avoir lieu. Elle a demandé à la fonctionnaire d’entrer dans le bureau adjacent à la pièce, dont la porte comportait une fenêtre. Elle a indiqué que la fonctionnaire pourrait encore voir ses élèves, mais la fonctionnaire a refusé. La fonctionnaire a mis sa main devant le visage de Mme B et a dit : [traduction] « Arrêtez. Je n’ai pas besoin de vous parler. » Mme B a affirmé que la fonctionnaire et elle se trouvaient à une distance de 8 à 10 pieds l’une de l’autre lorsque cela s’est produit.

44 Mme B a affirmé qu’elle a alors parlé à M. P. Elle lui a dit qu’ils devraient discuter de la question dans le corridor. M. P a mentionné qu’il avait parlé à Mme G, l’enseignante qui aidait la fonctionnaire à s’occuper du test PISA, et qu’il avait tenté de parler à la fonctionnaire. D’autres professeurs dont la salle de classe était utilisée pour le test ont déclaré que la fonctionnaire a été impolie avec eux lorsqu’ils ont tenté de sortir du matériel de la salle de classe. Ils ont décidé que M. P devrait appeler l’employeur. Mme B n’est pas retournée dans la salle ni n’a eu d’autres conversations avec la fonctionnaire. Mme B a dit que la fonctionnaire était agitée pendant leur interaction. Elle a ajouté que la fonctionnaire avait un guide de critères et qu’elle semblait croire que ses critères étaient mis en péril d’une certaine façon.

45 En contre-interrogatoire, Mme B a dit que bien qu’elle a vu le manuel PISA, elle ne l’a pas lu, car la responsabilité de coordonner le test PISA incombait à M. P. Il s’était présenté à son bureau pour discuter de ses préoccupations, et elle avait accepté de se rendre à la salle de classe pour voir si son intervention aurait un effet apaisant. Elle a dit qu’elle avait demandé à la fonctionnaire de sortir de la salle afin qu’ils puissent discuter en privé. Elle ne voulait pas placer la fonctionnaire dans une position délicate. Elle comprenait que la fonctionnaire ne puisse laisser la salle de test sans surveillance, mais ils auraient pu voir dans la salle de classe à partir du bureau adjacent. Quoi qu’il en soit, la fonctionnaire a refusé de lui parler.

46 Mme B a dit qu’elle ne se rappelait pas d’une discussion au cours de laquelle la fonctionnaire l’a menacée et a menacé M. P. Elle ne se souvenait pas non plus que la fonctionnaire ait soulevé la question de son espace personnel pour justifier d’avoir placé sa main devant Mme B; elle ne se sentait pas très proche de la fonctionnaire. Mme B a dit avoir interprété le geste de la main de la fonctionnaire comme si elle ne voulait pas lui parler. Elle pouvait constater que la fonctionnaire était frustrée. Mme B a nié qu’elle tentait de jouer les parents avec la fonctionnaire. Elle s’inquiétait du comportement de la fonctionnaire et a affirmé que [traduction] « globalement, il ne s’agissait pas d’une bonne expérience ».

47 Mme B ne se souvenait ni d’avoir laissé un message vocal pour Mme Armstrong ni qu’un représentant de l’employeur l’ait appelé ultérieurement. Il convient de noter que les transcriptions et un enregistrement sur DVD d’un message vocal de Mme B ont été présentés en preuve (pièces E-4 et E-5). Dans ce message, elle a laissé son nom et son numéro de téléphone et a demandé à Mme Armstrong de la rappeler.

48 L’employeur a également cité comme témoin M. P, le directeur adjoint de l’école secondaire. M. P a témoigné que ses fonctions principales consistaient à superviser les progrès d’une cohorte d’élèves du niveau 10 au niveau 12, ce qui comprenait s’occuper de la planification des cours, coordonner des événements et s’occuper des questions disciplinaires. Il était également chargé de superviser les questions de santé et de sécurité à l’école.

49 M. P a dit qu’il s’est occupé du test PISA dans deux autres écoles secondaires et qu’il était désigné comme personne-ressource de l’école pour le test PISA dans le cas qui nous occupe. Il a dit qu’il a étudié les documents PISA en 2009, mais qu’il n’a pas pris d’autres mesures pour remplir les documents. M. P a dit que sa première interaction avec la fonctionnaire est survenue dans le cadre de plusieurs messages vocaux dans lesquels elle disait qu’elle devait lui parler de toute urgence. Il a tenté de la rappeler, mais comme elle n’avait pas de boîte vocale, il n’a pu laisser de message. Il estimait la situation frustrante parce qu’il ne connaissait ni la fonctionnaire ni la nature de ce qu’elle avait à lui dire. Lorsqu’ils ont fini par entrer en contact par téléphone, il a laissé entendre qu’elle avait exagéré lorsqu’elle a qualifié ses messages d’urgents. Elle lui a dit qu’elle ne pouvait avoir de message vocal parce qu’elle utilisait un téléphone familial et ne voulait pas mettre en péril la confidentialité de son travail. Dans les notes de Mme Carter au sujet de sa conversation avec M. P sur cet appel téléphonique (pièce E-5), il a dit que la fonctionnaire pleurait et faisait de l’hyperventilation, et l’a décrite comme une [traduction] « grand-mère de 59 ans » qui ne connaissait rien aux écoles secondaires.

50 La fonctionnaire et M. P ont eu une réunion en personne par la suite. Ils ont discuté de dates possibles en vue du test PISA et du processus de sélection des élèves devant passer ce test. La fonctionnaire a également laissé plusieurs documents PISA à M. P. Il a décidé de déléguer son rôle de personne-ressource à l’école à Mme G, une enseignante de l’école. M. P se souvenait que bien que la fonctionnaire et lui s’étaient entendus sur une série de dates possibles en vue du test, il a laissé à Mme G le soin de s’occuper des autres détails, comme le choix du lieu. M. P a décrit la réunion comme raisonnablement agréable.

51 En contre-interrogatoire, M. P a affirmé qu’il ne pouvait dire exactement comment la date du 8 mai avait finalement été arrêtée. Il se souvenait que la fonctionnaire et lui avaient discuté de plusieurs dates possibles, et il avait l’impression que la fonctionnaire serait en mesure de choisir la date à retenir.

52 Le 11 mai 2009, M. P a noté les événements qui sont survenus avant la journée du test PISA et le jour même (pièce E-16A) et a communiqué ses souvenirs de ces événements. Ses notes faisaient état de l’horrible message vocal laissé par la fonctionnaire à l’intention de Mme G un ou deux jours avant la tenue prévue du test le 8 mai. Mme G était alors absente. Elle bénéficiait d’une journée de perfectionnement professionnel lorsque la fonctionnaire a tenté de la contacter. D’après M. P, dans le message, la fonctionnaire s’adressait à Mme G en criant, apparemment sous prétexte que le lieu du test avait été modifié et que la fonctionnaire avait une connaissance insuffisante du nombre d’élèves qui passeraient le test. Plus tard, elle a laissé un autre message dans lequel elle s’excusait du ton du premier message et reconnaissait que le numéro de la salle n’avait pas été modifié.

53 M. P a témoigné que Mme G a été bouleversée par le premier message et qu’elle pensait avoir fait quelque chose de mal. Elle a quitté le cours auquel elle assistait et est retournée à l’école afin de pouvoir téléphoner aux familles des élèves dont le nom figurait sur la liste du test PISA pour leur rappeler le test.

54 Le jour du test, Mme G a demandé à M. P de venir dans la salle de classe dans laquelle se tenait le test parce que la fonctionnaire éprouvait certaines craintes au sujet des arrangements qui avaient été pris et au sujet de la salle choisie en vue du test. M. P a dit qu’il est difficile pour une grande école secondaire de trouver un endroit convenable, car l’espace dans l’école est toujours réservé à d’autres fins. La fonctionnaire craignait également qu’il manque de pupitres pour les 35 élèves figurant sur la liste. M. P a affirmé qu’à son avis, il y avait suffisamment de pupitres, car on ne pouvait pas s’attendre à ce que l’ensemble des élèves se trouvant sur la liste se présentent au test. Selon lui, les parents ont tendance à considérer que les examens assortis de crédits sont plus importants. Seulement neuf élèves se sont présentés au test, et à son avis, il était peu vraisemblable que de nombreux autres se présentent. Néanmoins, il a pris des dispositions pour obtenir d’autres pupitres et pour que des cloisonnettes mobiles soient placées dans la salle. Il a dit que la fonctionnaire avait demandé qu’une annonce soit faite pour rappeler aux élèves restants de se présenter, mais il a ajouté qu’il était impossible de le faire en raison d’un examen qui avait lieu ailleurs dans l’école. Finalement, les neuf élèves présents ont passé le test PISA.

55 En contre-interrogatoire, M. P a affirmé que la salle de classe retenue en vue du test était une salle type et que les élèves sont habitués à passer un examen dans un local du genre. Il a admis que la formule de suivi des élèves (pièce G-6) n’indiquait pas clairement combien d’élèves passeraient le test, mais a ajouté que d’après son expérience, il était convaincu que la totalité des 35 élèves ne seraient pas présents pour le passer. Il a mentionné qu’il n’avait pas rempli la  formule de suivi; il avait remis les documents à Mme G et lui avait demandé de l’aider dans l’administration du test.

56 La fonctionnaire lui ayant demandé de revoir les lignes directrices sur l’administration du test, M. P a convenu qu’elles mentionnaient que les documents relatifs au test ne devraient pas être laissés sans surveillance. Il a dit qu’il ne croyait pas que la demande de Mme B faite à la fonctionnaire d’entrer dans le bureau adjacent aurait enfreint ces lignes directrices, car une fenêtre dans la porte du bureau aurait permis à la fonctionnaire de voir la salle de classe.

57 M. P a témoigné en contre-interrogatoire que Mme G lui avait parlé au moins une fois pendant que le test PISA était administré. Elle a dit que la fonctionnaire s’était moquée d’elle devant les élèves et que la fonctionnaire s’est fâchée quand Mme G a ouvert son ordinateur, parce qu’elle avait oublié de désactiver le son du carillon qui se faisait entendre lorsqu’elle l’ouvrait.

58 L’attribution de la salle en vue du test PISA avait déplacé quatre enseignants qui donnaient généralement des cours dans cette salle et avait imposé des restrictions au travail de l’analyste en formation comportementale (AFC) qui occupait le bureau adjacent. M. P a dit que trois de ces enseignants ont signalé que la fonctionnaire leur a parlé durement lorsqu’ils ont tenté de récupérer du matériel dans la salle. De plus, l’AFC s’est présentée à son bureau en larmes, et a affirmé que la fonctionnaire s’est adressée à elle en criant.

59 M. P a parlé des problèmes soulevés avec Mme B, qui s’était présentée à la salle de classe pour tenter de régler un problème. La fonctionnaire refusait de lui parler; M. P se souvenait que la fonctionnaire a dit à Mme B : [traduction] : « Vous ne m’êtes d’aucune utilité. » Ultérieurement au cours du test, la fonctionnaire a demandé que la climatisation dans la pièce soit fermée, sous prétexte qu’elle était trop bruyante, et s’est dit inquiète du fait que la pièce avait des fenêtres donnant sur l’extérieur.

60 M. P a témoigné qu’il a tenté de joindre quelqu’un chez Statistique Canada dès 9 h 18. Il a laissé des messages à Mme Armstrong à 11 h 07 et à 11 h 37. Les enregistrements et les transcriptions de ces messages ont été présentés en preuve (pièces E-2, E-3, E-4 et E-5). Dans le premier message, M. P disait notamment ce qui suit :

[Traduction]

[][N]ous en sommes maintenant au point où nous pensons que quelqu’un doit venir et la retirer de l’examen. Elle n’a aucune maîtrise d’elle-même lorsqu’elle traite avec notre personnel. Elle critique vigoureusement les gens. Selon nous, elle est tout à fait instable et se comporte certes de manière non professionnelle.

61 Ce premier message se poursuit dans la même veine, mais ce passage reflète le ton du message.

62 Le deuxième message était plus long. M. P a notamment dit ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Pour vous donner une idée, elle nous menace d’appeler le monde entier, de se plaindre et de déposer des rapports et d’avoir été peu compréhensifs. Nous avons été extrêmement compréhensifs à son égard. Nous avons fait tout ce qu’elle a demandé. Nous étions même ici à 8 h 15 lorsqu’elle a demandé à son enseignant qui faisait office de personne-ressource d’être ici et elle s’est présentée seulement de 15 à 20 minutes après l’heure convenue. Elle a dit à l’enseignant qui l’aide qu’elle n’acceptera plus nos conneries, qu’elle ne veut pas de cet emploi, qu’il lui a été imposé. Elle pleure devant les élèves, réprimande nos professeurs devant les élèves pendant le déroulement de l’examen. Il s’agit d’une salle comportant un corridor en forme de poignée de poêle, au bout duquel se trouve le bureau adjacent. Un enseignant doit travailler dans ce bureau. C’est tout à fait calme. Une petite porte s’ouvre à l’occasion. Elle s’est rendue dans cette pièce et a crié à cette personne qu’elle ne devrait pas s’y trouver. Elle nous accuse de détruire la crédibilité du test, de faire des efforts particuliers pour nous montrer peu coopératifs à son égard. J’ignore où ça va s’arrêter. C’est tout à fait insoutenable ce que nous vivons, et nous devons certes avoir un suivi de votre part, et je suis convaincu qu’elle vous téléphonera et nous dira que nous avons été peu coopératifs, mais nous ne pouvons pas fermer la climatisation. Nous ne pouvons pas ne pas être une école. C’est une école secondaire où se trouvent 1 500 enfants. Nous n’avons pas de locaux en trop. Nous avons dû déplacer de cette salle les enfants de 3 salles de classe pour lui trouver une place où il y aurait le moins de perturbations possible. Cependant, il y a des carillons et des choses ont lieu dans l’école. Malheureusement, lorsqu’elle voulait que nous procédions à une annonce plus tôt, nous tenions des examens oraux en français, ce qui fait partie de leur double [flou]. Nous ne pouvons pas faire des annonces lorsque des élèves font des examens enregistrés en ligne. Maintenant que ces examens sont terminés, le directeur a décidé de procéder à une annonce. Quoi qu’il en soit, elle a exigé que nous refassions le calendrier. Nous ne referons le calendrier d’examen sous aucune considération avec cette femme.

63 M. P a dit qu’il était absent quand la fonctionnaire interagissait avec les autres enseignants, mais qu’elle a élevé la voix lorsqu’elle lui a parlé et qu’elle s’est adressée à Mme B. Après avoir étudié le compte rendu qu’il avait remis à Mme Carter (pièce E-5), M. P a confirmé qu’il avait vu la fonctionnaire pleurer pendant l’administration du test PISA. Il a également convenu qu’il avait tenté de se tenir à l’écart, parce que selon lui, leur relation n’était pas constructive.

64 Quand le test a pris fin, M. P a dit qu’il a rencontré la fonctionnaire à deux autres reprises. La première fois, qui s’est produite dans le bureau avant de l’école, elle a affirmé qu’elle ne reviendrait pas à l’école, ce qu’il a accepté. Elle a quitté, puis a tenté de reprendre la conversation après être revenue. Il lui a dit que son comportement était affreux. En contre-interrogatoire, il a admis lui avoir dit qu’il ferait rapport sur la fonctionnaire, parce qu’il jugeait nécessaire de porter ces événements à l’attention de l’employeur. Il ne se souvenait pas d’avoir accusé la fonctionnaire d’abus et de harcèlement à l’égard de Mme G, mais il n’a pas nié avoir dit qu’elle avait un comportement affreux ou que Mme G se sentait critiquée. La fonctionnaire l’a informé qu’elle avait enregistré leur conversation, mais il n’a jamais obtenu de copie de l’enregistrement. Il a affirmé qu’il n’a pas eu d’autres contacts avec la fonctionnaire par la suite.

65 En contre-interrogatoire, M. P a affirmé qu’il ne pensait pas avoir déjà dit que la fonctionnaire a subi une dépression nerveuse, quoiqu’il a mentionné qu’elle s’est comportée de manière non professionnelle et qu’elle était très fâchée. Il a reconnu qu’il ne s’était probablement pas dit préoccupé au sujet de l’état de la fonctionnaire, car il cherchait avant tout à la sortir de l’école. Il n’était pas certain si Mme B était à proximité pendant l’une ou l’autre des dernières conversations.

66 Mme G, l’enseignante qui aidait à l’administration du test PISA, était le prochain témoin pour l’employeur. Elle a témoigné qu’elle était un professeur non enseignant, ce qui signifiait que plutôt que d’avoir la responsabilité d’enseigner un sujet à un groupe d’élèves en particulier, elle avait davantage des responsabilités plus générales, comme la coordination de l’apprentissage réparti. En mai 2009, elle était la coordonnatrice de la vie active, et fournissait aux élèves des renseignements sur les carrières et sur les possibilités d’observation au poste de travail. Elle était enseignante depuis sept ans, dont quatre à l’école secondaire dont il est question.

67 M. P lui avait demandé d’être la personne-ressource à l’école pour le test PISA et lui avait fourni la trousse de documents de Statistique Canada. Elle s’est conformée au résumé exposé dans les documents en postant l’information aux élèves échantillonnés et à leurs parents et en faisant des appels téléphoniques. Elle a également compris qu’elle devait être présente le jour du test pour aider l’administrateur de test de Statistique Canada. Elle a affirmé qu’elle a pris part à des discussions sur le lieu éventuel du test, quoique cette décision n’ait pas été la sienne au bout du compte. Elle croyait que la salle choisie serait plus calme que d’autres parce qu’elle se trouvait au bout d’un corridor. Elle a mentionné qu’elle n’a jamais utilisé le bureau adjacent à la salle de classe et qu’elle n’était pas certaine qu’une personne assise dans le bureau puisse voir dans la salle de classe. Elle croyait toutefois qu’une personne debout serait en mesure de voir la salle de classe par la fenêtre de la porte.

68 Mme G a dit que son premier contact avec la fonctionnaire a pris la forme d’un message vocal reçu quelques jours avant le 8 mai. Elle a rappelé la fonctionnaire et elles ont alors eu une brève conversation. La fonctionnaire s’est dite déçue du nombre d’élèves qui avaient confirmé qu’ils passeraient le test. Elles ont discuté de la configuration de la salle choisie, et elle a dit à la fonctionnaire que la bibliothèque n’était pas disponible. Après cet appel téléphonique, Mme G a dit qu’elle se sentait mal parce qu’elle n’avait pas les renseignements détaillés en sa possession et parce qu’elle ne pouvait pas répondre à toutes les questions de la fonctionnaire. Elle estimait qu’il était nécessaire de retourner à l’école et de rappeler le test aux élèves. Elle a vérifié ses messages vocaux et a constaté que certains provenaient de la fonctionnaire. Mme G a dit [traduction] « Elle était fâchée contre moi. » Le lendemain matin, elle avait un message vocal de la fonctionnaire qui s’excusait du ton des messages vocaux précédents.

69 Mme G a dit que la fonctionnaire avait mentionné qu’elles devraient se rencontrer à l’école à 8 h 15, mais la fonctionnaire et elles se sont d’abord rencontrées vers 8 h 30, après quoi elles se sont rendues à la salle de classe désignée. La fonctionnaire n’était pas contente du nombre de pupitres. Mme G a donc aidé à prendre des dispositions pour faire apporter davantage de pupitres dans la classe. Mme G a ajouté que la fonctionnaire était fâchée en raison des fenêtres dans la salle. Mme G a témoigné que les fenêtres donnaient sur un espace de verdure comportant quelques tables, qui n’était pas très utilisé. Une haie divisait la pelouse et le stationnement. Mme G a dit qu’elle ne se souvenait pas si des élèves cognaient à la fenêtre pendant le test.

70 Quand le test a commencé, Mme G a ouvert son ordinateur portatif. Quand le carillon s’est fait entendre, la fonctionnaire a semblé en colère, et Mme G s’est excusée. L’un des professeurs qui utilisaient habituellement la salle est entré parce qu’il avait oublié quelque chose, et la fonctionnaire était fâchée de s’être fait interrompre. Elle a demandé qu’un tableau d’affichage sur roulettes soit placé de manière à bloquer la porte, ce qu’a fait Mme G pour elle. Elle ne se souvenait pas que des élèves qui fréquentaient une classe affectée régulièrement à cette salle de classe aient tenté d’entrer dans la pièce.

71 Mme G a dit qu’elle a dû quitter la salle une ou deux fois pour s’acquitter de ses responsabilités à titre de secouriste pour l’école. Une fois, alors qu’elle revenait, elle a croisé un professeur qui était entré dans la salle. Il a dit que la fonctionnaire l’avait réprimandé en criant devant les élèves.

72 Elle a témoigné que lorsqu’elle est retournée à la salle de classe, elle se préoccupait de la santé de la fonctionnaire. Elle savait qu’à ce moment-là, la fonctionnaire ne voulait pas traiter avec elle, mais elle s’inquiétait pour sa santé, étant donné que la fonctionnaire semblait fâchée et angoissée. Elle a affirmé que la fonctionnaire ne pleurait pas vraiment, quoique ses yeux aient semblé larmoyants, mais elle semblait très fâchée. Mme G croyait qu’elle faisait peut-être une crise d’angoisse, voire une crise cardiaque. Elle a demandé à la fonctionnaire si tout allait bien, et la fonctionnaire lui a répondu que cette affectation lui avait été imposée et qu’elle n’accepterait plus de [traduction] « merde ». Elle a ajouté [traduction] « Vous en avez assez fait. » Mme G a envoyé un courriel à M. P et à Mme B parce que la fonctionnaire la préoccupait. À ce moment-là, le test était presque terminé. Elle n’a pas observé les échanges entre M. P et la fonctionnaire dans le bureau ni n’a eu de contacts avec la fonctionnaire après la fin du test. Elle ne se souvenait pas si la fonctionnaire avait dit quoi que ce soit au sujet de la nécessité d’un nouveau test.

73 En contre-interrogatoire, Mme G a reconnu qu’elle ne possédait pas de formation en médecine et qu’elle ne pouvait pas établir de diagnostic médical. Toutefois, elle a mentionné qu’elle avait suivi une formation en secourisme pour être en mesure de repérer des signes laissant croire qu’une intervention médicale était justifiée. C’est sur cette base qu’elle s’est adressée à la fonctionnaire pour lui faire part de ses préoccupations.

74 Mme G a dit qu’elle n’a pas fourni de renseignements sur chaque élève sur la formule de suivi des élèves avant le test. Elle avait des souvenirs limités des documents qui étaient inclus dans la trousse de documents que M. P lui avait remis. Elle a mentionné qu’elle croyait que le nombre d’élèves qui passeraient le test ne serait connu qu’au début du test.

75 Mme G a dit qu’elle a étudié les documents PISA qui lui avaient été remis par M. P. Elle a tenté de suivre les instructions, mais elle ne pouvait dire si elle avait tout à fait suivi l’horaire. Elle a avisé les professeurs, les parents et les élèves du test. Elle a reconnu qu’elle n’avait pas inscrit le code sur la formule de suivi des élèves (pièces G-5 et G-6) lorsqu’elle a entendu dire que des parents avaient refusé que leurs enfants passent le test. Elle a tenté d’ajouter des renseignements au moment du test, alors que les élèves étaient sur place. Elle a dit qu’elle a tenté de s’acquitter de son rôle de personne-ressource de l’école et a nié avoir volontairement tenté de miner la réussite du test.

76 En ce qui concerne la rencontre entre la fonctionnaire et Mme B, Mme G a dit qu’elle croyait que la fonctionnaire et Mme B étaient assez proches l’une de l’autre et que la main de la fonctionnaire était peut-être à un pied du visage de Mme B. Selon elle, Mme B ne montrait pas de signes d’avoir été agressée pendant la rencontre. Elle n’a pas entendu la fonctionnaire dire que Mme B se trouvait dans son espace personnel.

77 En contre-interrogatoire, Mme G a convenu que les documents PISA mentionnaient que le test devait être inscrit à l’horaire de manière à ce que d’autres événements n’entrent pas en conflit avec lui. Elle a dit qu’elle ne croyait pas que l’école avait enfreint cette règle parce que le test PISA était prévu en même temps que l’examen de français, parce qu’il n’y avait pas de chevauchement dans les groupes d’élèves touchés.

78 Le prochain témoin de l’employeur était M. Wong, qui était au moment de ces événements un gestionnaire régional des programmes à Statistique Canada basé à Vancouver. Il avait essentiellement pour fonction de gérer les activités de collecte de données du personnel sur place en Colombie-Britannique et au Yukon. Un certain nombre de gestionnaires de la collecte des données relevaient de lui, et ces derniers supervisaient quant à eux les intervieweurs principaux et les intervieweurs sur place.

79 M. Wong a dit qu’il n’avait jamais rencontré la fonctionnaire avant l’audience. Elle était cependant l’une des quelque 400 employés relevant de lui. Il avait pris part à des conférences téléphoniques auxquelles la fonctionnaire avait participé.

80 Les événements du 8 mai ont été portés à l’attention de M. Wong pour la première fois au cours d’une conversation téléphonique avec Mme Carter pendant la matinée du 11 mai. Conformément à la procédure régulière, Mme Carter s’est fait demander de recueillir de l’information. M. Wong a reçu une copie du courriel de Mme Radisavljevic (pièce E-1) qui mentionnait que la fonctionnaire avait reçu instruction de ne plus faire d’entrevues, bien qu’il n’ait pas pris cette décision; elle aurait été prise par une personne possédant un rang hiérarchique plus élevé que lui. Mme Carter (pièce E-5) a fait parvenir un courriel à plusieurs personnes, dont M. Wong. Celui-ci a reçu le courriel au milieu de l’après-midi du 11 mai. Mme Carter y résumait ses conversations avec la fonctionnaire et M. P.

81 Dans le cadre de la chaîne de courriels, M. Wong a également reçu copie des courriels dans lesquels (pièce E-6) des renseignements ont été transmis relativement à plusieurs problèmes de relations avec les répondants impliquant la fonctionnaire. Il a reçu une copie de la pièce E-9, qui renferme un résumé des conversations de Mme Carter avec M. P, Mme G et des responsables des trois autres écoles où la fonctionnaire a fait passer le test PISA.

82 M. Wong a fait parvenir à la fonctionnaire une lettre en date du 12 mai 2009 (pièce E-17) l’informant qu’une réunion d’instruction aurait lieu sous forme de conférence téléphonique le 14 mai et qu’elle pourrait se faire représenter par un agent négociateur à cette réunion. À la suite de la discussion tenue lors de la réunion du 14 mai, M. Wong a envoyé une autre lettre à la fonctionnaire en date du 8 juin 2009 (pièce E-19). Dans cette lettre, il mentionnait que l’employeur se préoccupait de sa santé et qu’il demandait une évaluation médicale de son aptitude au travail. M. Wong a dit que les autres représentants de l’employeur et lui-même avaient conclu, en se fondant sur les renseignements disponibles — les messages vocaux, la discussion lors de la première réunion d’instruction, et les notes des entrevues avec la fonctionnaire et les employés à l’école — qu’il existait des motifs de se préoccuper de l’état de santé de la fonctionnaire.

83 La lettre du 8 juin était accompagnée d’une demande devant être présentée au médecin choisi par la fonctionnaire. La demande exposait pourquoi l’employeur demandait une évaluation et comprenait une formule médicale que le médecin devait remplir.

84 M. Wong a dit que la fonctionnaire avait été mise en congé rémunéré en date du 11 mai. Le 17 juin, il a envoyé une autre lettre (pièce E-21) réitérant l’exigence de l’employeur de réaliser une évaluation de l’AAT et indiquant qu’elle serait mise en congé non rémunéré si elle n’acceptait pas l’évaluation et ne fournissait pas la date d’un rendez-vous chez le médecin d’ici le 19 juin. La lettre répond à une lettre qui lui a été envoyée par la fonctionnaire le 15 juin (pièce E-22), qui renfermait le passage suivant :

[Traduction]

Comme suite à votre lettre du 8 juin 2009 et à votre demande de renseignements personnels : je définis le droit à la vie privée comme le « droit d’une personne ou d’une famille de déterminer quand, comment et dans quelle mesure des renseignements confidentiels sont communiqués à autrui ».

Je suis apte à retourner au travail. Je vous remercie pour le congé rémunéré.

Je ne dis pas que je ne fournirai pas les renseignements médicaux que vous avez demandés, mais je ne le ferai pas (si je le fais) tant que vous n’aurez pas fourni les renseignements suivants par télécopieur à Linda Woods, notre présidente de syndicat, à mon attention :

1. les circonstances dans lesquelles vous demandez ce type de renseignement;

2. la politique de Statistique Canada établissant que vous pouvez demander cette information;

3. une copie de notre convention collective et l’article qui vous permet de recueillir cette information, de même que la façon dont cet article s’applique à moi.

85 M. Wong ne pouvait se souvenir avec exactitude quand il a reçu une formule du médecin consulté par la fonctionnaire (pièce E-20). Le médecin était en service à la clinique médicale de Kelowna. En réponse à la question inscrite sur la formule, [traduction] « L’employé ou l’employée est-il (est-elle) apte au travail dans l’environnement décrit précédemment? », le médecin a écrit [traduction] « Je ne peux répondre à cette question parce que je ne connais pas suffisamment le dossier de cette personne. »

86 M. Wong a interprété ce qu’a écrit le médecin comme si ça signifiait que le médecin ne pouvait pas effectuer l’évaluation de l’AAT exigée et qu’une autre stratégie devrait être adoptée. Le 29 juin 2009, il a envoyé une lettre (pièce E-24) expliquant que comme le médecin personnel choisi par la fonctionnaire avait mentionné qu’il ne pouvait pas procéder à l’évaluation, l’employeur demandait que l’évaluation de l’AAT soit réalisée par Santé Canada. La lettre renfermait une formule de consentement (pièce E-35) et il était demandé à la fonctionnaire de donner son autorisation de vive voix d’ici le 3 juillet et par écrit d’ici le 6 juillet.

87 Au cours de la matinée du 6 juillet, M. Wong a reçu une télécopie de la fonctionnaire (pièce E-25) qui mentionnait notamment ce qui suit :

[Traduction]

JE SUIS apte au travail [bonhomme sourire][…] a) Je me soumettrai à l’évaluation de l’aptitude au travail de Santé Canada non pas parce qu’elle est nécessaire, mais plutôt parce que mon emploi est menacé. b) J’estime qu’il s’agit de harcèlement. J’ai été franche, j’ai fait des déclarations honnêtes, je suis fière de mon employeur, de mon travail et de moi-même. Vous ne m’avez pas fourni un environnement exempt de harcèlement.  

88 M. Wong a également reçu une lettre de la fonctionnaire datée du 7 juillet (pièce E-26) dans laquelle elle demande une copie de la plainte écrite de l’école secondaire. M. Wong a répondu à la fonctionnaire et à l’agent négociateur le 24 juillet (pièce G-19). La fonctionnaire avait reçu des notes des entrevues avec les responsables des quatre écoles où elle a administré le test PISA en pièce jointe à une lettre datée du 26 juin (pièce G-18).

89 À titre de dernière occasion de recueillir de l’information sur les événements survenus à l’école, M. Wong a fait parvenir une lettre à la fonctionnaire en date du 17 juillet (pièce E-28), dans laquelle il indique qu’il y aura une autre réunion d’instruction. La lettre informait la fonctionnaire qu’elle avait le droit de se faire représenter par un agent négociateur à la réunion et que si elle décidait de renoncer à la réunion, les décisions devraient se fonder sur l’information déjà disponible. La lettre l’a également informée qu’elle avait accès à un programme d’aide aux employés.

90 M. Wong a affirmé que deux dates avaient été proposées pour la deuxième réunion d’instruction, et il ne pouvait se souvenir si la date retenue était le 23 ou le 24 juillet. Il se souvenait d’avoir reçu certains renseignements au sujet des problèmes de relations avec les répondants (pièce E-7), mais n’arrivait pas à se rappeler si ces incidents ont été abordés avec la fonctionnaire. En contre-interrogatoire, il a dit que les problèmes de relations avec les répondants n’ont pas eu d’incidence directe sur la décision de licencier la fonctionnaire; l’information a été recueillie pour clarifier la question de savoir si sa conduite à l’école le 8 mai était caractéristique chez elle. Il a dit que l’information selon laquelle un employé se comporte de manière non caractéristique pourrait donner lieu à des questions relatives à la santé pour un gestionnaire ou un superviseur.

91 Dans une lettre datée du 18 août (pièce E-30), Mme Rivais, directrice, Région de l’Ouest et Territoires du Nord-Ouest pour Statistique Canada, a fourni d’autre matériel à la fonctionnaire et a réitéré la directive donnée à la fonctionnaire selon laquelle elle devait consentir à l’évaluation de l’AAT de Santé Canada. M. Wong a dit qu’il était au courant de cette lettre et qu’il a pris part à la discussion avant qu’elle soit envoyée, mais que Mme Rivais avait la responsabilité de l’envoi. Il était également au courant de la décision finale de licencier la fonctionnaire, mais ce n’était pas sa décision.

92 En contre-interrogatoire, M. Wong a dit qu’il n’a jamais pris part à un test PISA et qu’il ne connaissait pas vraiment un tel test. Il a été questionné au sujet de certains aspects des lignes directrices PISA et de la façon dont il les interpréterait. En ce qui concerne les lignes directrices PISA indiquant que le matériel ne devrait pas être laissé sans surveillance, il a dit qu’il ne les interpréterait pas comme si elles signifiaient que le matériel serait laissé sans surveillance si un représentant de l’école était présent. Il s’est dit d’avis que les lignes directrices ne pouvaient pas prévoir toutes les situations possibles. Il a ajouté qu’aucune personne impliquée dans le processus ayant mené à la décision de licencier la fonctionnaire n’avait déjà vu le local de l’école où le test a été administré le 8 mai 2009.

93 En contre-interrogatoire, M. Wong a dit qu’il ne se souvenait pas d’avoir vu d’examen de rendement rempli pour la fonctionnaire en mars 2009 (pièce G-8). Il a convenu qu’à l’exception d’une mention de certains besoins en formation, la formule d’examen de rendement indiquait que le rendement de la fonctionnaire était satisfaisant.

94 M. Wong a dit qu’il ne savait pas quels conseils la fonctionnaire avait pu recevoir de ses représentantes de l’agent négociateur. Il n’avait pas de rapports directs avec les volets des ressources humaines ou des relations de travail des relations de l’employeur avec les employés. Il estimait étrange que la fonctionnaire semblait parfois dire qu’elle consentait à une évaluation de l’AAT et que parfois elle n’y consentait pas, mais il s’en est remis aux conseils des agents des ressources humaines lorsqu’il répondait à ses communications.

95 M. Wong a dit qu’il se souvenait d’une discussion concernant une demande de la fonctionnaire au sujet d’un rapport d’incident relatif aux événements du 8 mai, mais il ne pouvait se rappeler à quel moment elle avait eu lieu. Ce qu’il avait compris du processus général, c’est qu’une demande de rapport d’incident est généralement traitée par l’intervieweur principal qui supervise l’intervieweur sur place. Toutefois, il a dit que toute personne qui fait partie de la chaîne de responsabilité pouvait répondre à une telle demande. M. Wong a reconnu que dans des circonstances régulières, un intervieweur principal devrait répondre à une demande de rapport d’incident sans juger les circonstances. Dans le cas qui nous occupe, ce dont il se souvient de la discussion sur la demande d’un rapport d’incident, c’est que les conseillers en ressources humaines ont mentionné que la demande avait cédé le pas à la séquence d’enquête et d’efforts déployés pour obtenir des renseignements médicaux entreprise le 11 mai.

96 M. Wong a dit que Statistique Canada donne de la formation aux intervieweurs sur place sur la façon de traiter les menaces à leur sécurité personnelle. On leur conseille de ne pas prendre part à une confrontation et de se retirer de la situation si de telles menaces surviennent. Compte tenu de la nature du travail effectué par le personnel sur place, on peut difficilement prévoir quels scénarios pourraient se produire, et l’on s’attend à ce que les employés fassent preuve de jugement. L’employeur dispose également d’une politique sur le harcèlement, qui permet aux employés de soumettre des plaintes de harcèlement à un coordonnateur de la prévention du harcèlement. Il a dit qu’il ne se souvenait pas si la fonctionnaire avait déposé une telle plainte.

97 M. Wong a dit que si un répondant ou un membre du public profère des menaces de violence, il est possible de faire face à la situation de différentes façons. Un rapport d’incident pourrait constituer une façon de faire efficace, mais dans certains cas, l’intervieweur principal auquel le problème est soumis pourrait découvrir que l’intervieweur sur place a déjà réglé la situation avec satisfaction. Il faut évaluer la gravité de la menace et la réponse adéquate.

98 M. Wong ne se souvenait pas d’une discussion sur la question de savoir s’il convenait de soulever les problèmes de relations avec les répondants lors de la deuxième réunion d’instruction. Toutefois, il a dit que comme il ne s’agissait pas d’une réunion de nature disciplinaire, il convenait de recueillir le plus de renseignements possible pour déterminer quelle approche devrait être adoptée.

99 Le dernier témoin cité par l’employeur était Mme Rivais. De 2008 à trois semaines avant l’audience, elle occupait le poste de directrice, région de l’Ouest et Territoires du Nord-Ouest. Elle est ensuite devenue directrice, Division de la collecte et de la planification, à l’échelle nationale. Les fonctions de Mme Rivais à titre de directrice régionale consistaient à superviser les activités régulières de collecte de données (comme l’Enquête sur la population active), des projets de recouvrement des coûts et le recensement, qui est réalisé tous les cinq ans. Même si, dans son rôle de directrice, elle ne supervisait plus directement les intervieweurs sur place, elle a déjà été gestionnaire de programme et connaissait par conséquent les difficultés auxquelles faisaient face le personnel des opérations sur le terrain. Elle a témoigné que les intervieweurs sur place sont recrutés en fonction des exigences géographiques et qu’ils font l’objet de très peu de supervision au quotidien. Ils sont chargés de fixer leurs propres rendez-vous et d’établir quelles voies emprunter pour contacter les participants à l’enquête. Elle a dit que les intervieweurs sur place peuvent parfois être observés, mais qu’il n’y a pas de programmes de surveillance pour l’ensemble des enquêtes.

100 Mme Rivais a témoigné que l’employeur estime que les intervieweurs sur place représentent le visage de Statistique Canada. Elle s’attend à ce que les intervieweurs sur place traitent avec respect les personnes avec lesquelles ils font affaire, qu’ils feront preuve de professionnalisme et qu’ils protégeront l’information qu’ils recueillent. Selon elle, ces attentes s’appliquent non seulement lorsque les intervieweurs traitent avec certains répondants sur le pas d’une porte, mais également lorsqu’ils travaillent avec d’autres parties, comme les gestionnaires immobiliers ou les autorités scolaires. Comme la participation aux enquêtes est volontaire, l’employeur accorde une priorité élevée au maintien de l’estime du public. Mme Rivais a mentionné que l’employeur reconnaît que les intervieweurs ne peuvent contrôler tout à fait l’environnement dans lequel ils travaillent, et des politiques sont en place pour traiter avec les répondants qui hésitent à participer. Par exemple, l’on pourrait envisager de charger un intervieweur différent de tenter de faire participer un répondant hésitant.

101 Mme Rivais a affirmé que dans le cas du test PISA, l’employeur entretient une  relation avec les districts scolaires, et non une relation directe avec les écoles. Si une école en particulier refuse de participer, cette information serait renvoyée à l’administration centrale de Statistique Canada à Ottawa et d’autres discussions seraient entreprises avec le district scolaire. En contre-interrogatoire, Mme Rivais a reconnu que certains arrangements pris à l’école le 8 mai n’étaient peut-être pas idéaux, mais elle a ajouté qu’ils tentent de collaborer avec les écoles pour mettre en place un environnement adéquat en vue du test sans imposer de fardeau excessif à l’école. Elle a dit que l’employeur charge les écoles de proposer des arrangements qui seront compatibles avec l’ensemble de ses autres activités. Elle a ajouté que l’une des responsabilités d’un intervieweur sur place consiste à aider les employés de l’école à remplir les formules nécessaires; il se peut qu’ils ne comprennent pas tout à fait l’importance de la documentation. Elle a en outre indiqué que l’employeur s’attend à ce qu’un intervieweur collabore avec l’école pour établir une date de test à la satisfaction de tous.

102 Mme Rivais a dit qu’elle n’a pas interprété le terme « répondant » dans le manuel de l’intervieweur et dans les autres documents sur le test PISA comme s’ils désignaient seulement la personne figurant officiellement sur la liste en tant que personne-ressource de l’école. Elle a mentionné qu’il importe de collaborer avec tous les membres du personnel d’une école. Elle a ajouté que l’on ne peut donner d’instructions précises aux intervieweurs sur toutes les situations qui pourraient survenir, et l’employeur doit s’en remettre à leur jugement. Par exemple, si un intervieweur conclut que l’administration d’un test pose tellement de problèmes que ses résultats ne seront pas significatifs, l’intervieweur peut décider d’annuler le test et de faire état des motifs.

103 D’après Mme Rivais, les plaintes au sujet des intervieweurs sur place sont très rares. Elle a dit qu’il y a environ 800 intervieweurs sur place et à peu près une douzaine de plaintes par année. Il est très rare qu’un intervieweur en particulier fasse l’objet de plus d’une plainte, ce qui mènerait habituellement à un suivi de la part du gestionnaire.

104 Mme Rivais a témoigné que les événements du 8 mai impliquant la fonctionnaire ont été portés à son attention le 11 mai. À ce moment-là, elle a appris que la fonctionnaire était une employée nommée pour une période déterminée, qui devait prendre fin le 7 octobre 2009, et que sa semaine de travail était évaluée à 13 heures. Elle a également appris que la fonctionnaire avait été informée de ne pas prendre d’autres mesures relativement à des travaux d’enquête et que les incidents survenus à l’école avaient, dans une certaine mesure, fait l’objet d’une enquête. Mme Rivais n’avait pas pris part aux réunions d’instruction, mais les autres gestionnaires l’ont informée des discussions qui ont eu lieu lors de ces réunions.

105 En contre-interrogatoire, Mme Rivais a dit qu’elle avait revu les comptes rendus des événements effectués par le personnel de l’école et par la fonctionnaire. C’est ainsi qu’elle a pris connaissance de la demande formelle de renseignements médicaux que M. Wong a envoyée à la fonctionnaire le 8 juin 2009 (pièce E-19). Elle a dit que selon son interprétation, à la suite de l’information recueillie au cours de l’enquête et des réunions d’instruction ainsi qu’à la suite de leurs interactions avec la fonctionnaire, les gestionnaires concernés se préoccupaient du bien-être de la fonctionnaire. Elle a également pris connaissance de la lettre devant être remise au médecin de la fonctionnaire (pièce E-20) et a convenu de sa description des circonstances de base ayant mené à la demande d’une évaluation et de la description des facteurs liés au lieu de travail auxquels l’évaluation devait se rapporter.

106 Mme Rivais a témoigné en contre-interrogatoire qu’elle avait pris en compte le compte rendu des événements fait par la fonctionnaire. Elle a dit que bien qu’une lettre d’excuses a été envoyée à l’école dans un but de réconciliation, cela ne signifiait pas que la fonctionnaire a été présumée fautive. Mme Rivais s’est fait demander si elle savait que Mme Armstrong, la superviseure directe de la fonctionnaire, avait donné instruction à cette dernière de se rapporter exclusivement à Mme Armstrong et de ne pas soumettre des problèmes aux autres superviseurs. Mme Rivais a dit qu’elle ignorait l’existence d’une telle instruction. D’après la politique générale de l’employeur, si un superviseur n’est pas disponible, un employé devrait faire part de sa préoccupation à un autre superviseur.

107 En contre-interrogatoire, Mme Rivais a mentionné qu’elle ignorait si les superviseurs de la fonctionnaire avaient déclaré les irrégularités concernant l’administration du test PISA que la fonctionnaire avait relevé. Elle a dit que lorsque des irrégularités sont déclarées par la personne qui administre le test, les problèmes sont généralement signalés à l’employeur à Ottawa, mais elle ne savait pas si cela avait été fait dans ce cas.

108 En contre-interrogatoire, Mme Rivais s’est fait poser un certain nombre de questions sur la justification des préoccupations de la fonctionnaire concernant la sécurité du test et d’autres renseignements. Mme Rivais a confirmé que la sécurité constitue une préoccupation importante pour l’employeur et que les intervieweurs ont instruction de prendre des mesures pour veiller à ce que les tests et les documents d’enquête soient en sécurité et hors d’accès par autrui. Elle a admis que si M. P demandait d’avoir accès aux documents de test, cette demande ne serait pas conforme à la politique. Elle a toutefois précisé que les motifs auraient pu lui être expliqués. Mme Rivais a également reconnu que l’on ne s’attend pas à ce que les employés autorisent des membres de leur famille et d’autres membres du public à avoir accès à des messages téléphoniques dans lesquels de l’information sensible peut être transmise. Elle a dit que les employés ont accès à un numéro 1-800 pour ce motif, et elle ne saisissait pas tout à fait pourquoi la fonctionnaire n’aurait pas pu utiliser ce numéro. Quoi qu’il en soit, elle ne croyait pas qu’un message laissé sur la boîte vocale privée de la fonctionnaire pour lui demander simplement de rappeler violerait la politique de sécurité.

109 Mme Rivais a dit qu’elle a également pris connaissance de la lettre datée du 29 juin 2009 (pièce E-24), dans laquelle M. Wong indiquait que comme le médecin de la fonctionnaire avait déclaré qu’il n’était pas en mesure de fournir une évaluation, la fonctionnaire était tenue de faire faire une évaluation de l’AAT par un médecin de Santé Canada, et qu’elle devrait donner son consentement à cet effet de vive voix d’ici le 3 juillet et par écrit d’ici le 6 juillet 2009.

110 Mme Rivais a témoigné qu’elle connaissait le processus d’obtention d’une  évaluation de l’AAT de Santé Canada. Des formules décrivant le processus sont remises à l’employé touché, et l’employé donne son consentement écrit à l’évaluation. Mme Rivais avait compris que Santé Canada doit obtenir ce consentement avant de prévoir un rendez-vous avec un médecin pour l’employé.

111 Mme Rivais a dit que la fonctionnaire n’a pas donné le consentement requis. Mme Rivais devait alors décider quelles mesures elle devait prendre par la suite, car elle était la seule personne ayant l’autorité de licencier la fonctionnaire. Mme Rivais a indiqué qu’elle a pris part à une conférence téléphonique, tenue selon ses dires le 24 juillet. Laura Johnston, gestionnaire des ressources humaines par intérim, M. Wong, la fonctionnaire, ainsi que deux représentantes de l’agent négociateur, soit Mme Woods et Mme Hazelwood, y ont participé. Elle se souvient que la conférence a duré de deux à trois heures. Mme Rivais a dit que l’objectif de la conférence téléphonique était d’expliquer les conséquences d’un refus de consentir à une évaluation de l’AAT. Comme Mme Rivais ne possédait pas de formation médicale, elle devait obtenir une évaluation d’un professionnel de la médecine pour se convaincre que la fonctionnaire était médicalement apte à poursuivre son emploi. En contre-interrogatoire, Mme Rivais a dit qu’elle ne formulait pas d’hypothèses sur la question de savoir si une évaluation médicale établirait que la fonctionnaire éprouvait des problèmes de santé psychologique ou physique pour lesquels un traitement pourrait être nécessaire; elle a dit que l’évaluation avait pour objet de miser sur des compétences médicales qu’elle ne possédait pas.

112 Dans le cadre de la conversation du 24 juillet, la fonctionnaire a soulevé un certain nombre de questions précises concernant la vie privée, qui se rapportaient essentiellement à l’identité des personnes qui auraient accès à ses renseignements personnels. Mme Rivais a dit que les représentants de l’employeur ont cherché à obtenir des réponses de Santé Canada à ces questions précises. Mme Rivais a dit qu’une page de la pièce E-30, qui constituait selon elle le document qui a été envoyé le 18 août pour présenter une demande finale en vue d’obtenir le consentement de la fonctionnaire à l’évaluation de l’AAT, renfermait les réponses envoyées par Santé Canada à ces questions précises.

113 Mme Rivais a dit que pendant la conversation du 24 juillet, elle a fait de son mieux pour expliquer les motifs de l’évaluation de l’AAT et pour certifier à la fonctionnaire que l’employeur n’aurait pas accès à des renseignements personnels à caractère médical. L’employeur pourrait seulement savoir si la fonctionnaire était apte à travailler et de quelles mesures d’adaptation elle pourrait avoir besoin. Elle a mentionné que l’information sur les interactions de la fonctionnaire avec d’autres personnes avant le jour du test PISA administré à l’école ainsi que le jour même, telles qu’elles lui ont été décrites, avaient soulevé des inquiétudes concernant l’aptitude physique et mentale de la fonctionnaire. Mme Rivais a indiqué que son expérience avec la fonctionnaire pendant la conversation téléphonique du 24 juillet lui a confirmé qu’il était nécessaire de vérifier si la fonctionnaire était apte au travail. Mme Rivais a dit qu’elle a traité avec de nombreux employés tout au long de sa carrière et qu’elle n’a jamais vu un employé réagir comme l’a fait la fonctionnaire, ce qui l’a inquiétée au sujet du bien-être de la fonctionnaire.

114 Mme Rivais a affirmé qu’elle ne se souvenait pas d’avoir entendu M. Wong dire pendant la conférence téléphonique qu’une évaluation de l’AAT ne serait pas nécessaire. La fonctionnaire a demandé l’autorisation de produire en preuve un enregistrement qu’elle avait fait de la conférence téléphonique du 24 juillet. L’avocate de l’employeur s’y est opposée. Elle a fait valoir que l’on ne peut s’appuyer sur un enregistrement fait subrepticement, comme dans la présente affaire, parce qu’un tel enregistrement réalisé dans de telles circonstances aurait pu être modifié. En outre, elle a fait valoir qu’il existe de solides motifs de principe de ne pas admettre un enregistrement fait sans avoir avisé les autres participants à la conversation. Elle a mentionné qu’il convient de favoriser un climat de franchise dans les discussions des relations syndicales-patronales, et que cet objectif aurait peu de chances d’être atteint si les parties à une conversation craignaient un enregistrement possible. Elle a fait valoir que l’enregistrement que la fonctionnaire se proposait de produire en preuve s’inscrivait dans une catégorie différente de celle des messages vocaux enregistrés qui ont été produits par l’employeur (pièces E-2, E-3 et E-4) parce que la personne qui laisse un message vocal s’attend à ce qu’il soit enregistré.

115 La fonctionnaire a fait valoir que l’enregistrement d’une conversation ne ferait pas augmenter le degré de méfiance entre les parties. Elle a dit que dans les faits, elle n’avait pas confiance que les autres participants se souviennent de la conversation avec exactitude, et c’est pourquoi elle a ressenti la nécessité de l’enregistrer.

116 J’ai accepté l’argument invoqué par l’avocate de l’employeur selon lequel outre les préoccupations concernant la fiabilité d’un enregistrement sur bande au sens technique, il existe de solides raisons de principe de ne pas accepter un enregistrement ayant été fait subrepticement par une partie à une conversation. Les réunions du genre de celle qui s’est tenue le 24 juillet revêtent une importance cruciale, tout comme les efforts visant à régler les questions syndicales-patronales et à échanger de l’information et des opinions en toute franchise. J’ai refusé d’admettre l’enregistrement.

117 Il convient également de noter que la fonctionnaire a révélé qu’elle enregistrait couramment toutes les conversations sur ces questions, dont les conversations avec le personnel de la Commission à Ottawa.

118 À un certain moment de l’audience, il s’est avéré que la fonctionnaire avait enregistré subrepticement le témoignage de Mme Rivais, et je lui ai donné instruction de se désister. La pratique d’enregistrer des conversations sans donner de préavis aux autres participants s’inscrit certes dans la vision de la fonctionnaire selon laquelle tous les acteurs de cette séquence d’événements n’ont pas été francs. Comme je l’ai mentionné précédemment, il est inutile de généraliser ainsi les déclarations des autres dans le contexte de ce processus. Le processus de grief et d’arbitrage comporte ses propres protocoles permettant de déterminer quelle preuve devrait être acceptée, et je suis d’avis qu’en l’espèce, ces protocoles protègent adéquatement les intérêts de la fonctionnaire.

119 Mme Rivais a dit qu’elle savait que la fonctionnaire s’était plainte à certains de ses autres superviseurs au sujet d’une lettre datée du 18 août décrivant cette lettre comme du harcèlement de la part de Mme Rivais. Dans la plainte (pièce E-34), la fonctionnaire a décrit la lettre comme la menaçant [traduction] « […] de renvoi et d’insubordination pour ne pas avoir rempli une évaluation de retour au travail et pour ne pas avoir consenti que [ses] renseignements personnels figurent dans toutes les banques de données du Canada ». Mme Rivais a mentionné que la lettre du 18 août faisait état d’un licenciement possible si la fonctionnaire ne consentait pas à l’évaluation de l’AAT, mais elle a ajouté qu’à son avis, il ne s’agissait pas de harcèlement. Elle a également réitéré qu’elle avait expliqué à la fonctionnaire que l’information recueillie au cours de l’évaluation de l’AAT serait conservée par Santé Canada sur une base confidentielle et ne serait divulguée ni à l’employeur ni à qui que ce soit d’autre.

120 Mme Rivais a dit que la trousse envoyée à la fonctionnaire le 18 août renfermait des copies des formules de consentement qu’elle était censée retourner signées à l’employeur, et elle a désigné la pièce E-35 comme version de la formule signée qu’elle avait vu. Outre sa signature et la date du 25 août 2009, la formule comportait un certain nombre de notes qui, selon Mme Rivais, avaient été ajoutées par la fonctionnaire.

121 Il était écrit dans la partie supérieure de la formule [traduction] « Je pose ce geste contre mon gré. ». Le premier paragraphe imprimé comprenait la déclaration suivante : [traduction] « Les raisons pour lesquelles on m’a aiguillé vers le PSTSP pour subir l’évaluation m’ont été pleinement expliquées et données par écrit par _________. » Dans cet énoncé, les mots « ne » et « pas » ont été insérés avant et après « m’ont », respectivement, et avant « pleinement expliquées », et les mots « Statistique Canada, RHDCC ou Opérations des ES »  ont rempli l’espace en blanc. Les mots suivants ont été ajoutés à côté de ce paragraphe : [traduction] « Non expliqué ».

122 Le sixième paragraphe imprimé de la formule comportait l’énoncé : [traduction] « J’ai lu l’information qui précède ou elle m’a été expliquée et je comprends la nature d’une Évaluation de l’aptitude au travail et les usages auxquels les renseignements personnels recueillis par le PSTSP peuvent être consacrés. » Il était inscrit à côté de ce paragraphe [traduction] « Ne m’a pas été expliqué. » Dans le paragraphe suivant, il y avait un espace prévu pour permettre à la personne qui signe la formule d’indiquer une date de fin du consentement. Il n’y avait pas de date dans cet espace, mais la mention suivante était inscrite dans l’espace : [traduction] « la date que je fournis ». Il était écrit à côté « consentement non donné ». Il convient de mentionner que la fonctionnaire a contesté l’annotation « consentement non donné » sur la formule vue par Mme Rivais.

123 Sur la deuxième page, qui portait le titre [traduction] « Consentement à divulguer les données médicales », la fonctionnaire a fourni le nom de son médecin personnel dans l’espace prévu. Le deuxième paragraphe exposait les restrictions à la divulgation de données médicales. La mention suivante figurait à côté de ce paragraphe : [traduction] « Vous n’avez pas mon autorisation. » L’espace prévu pour indiquer la fin du consentement comportait la mention [traduction] « il m’appartient de divulguer ce renseignement ». La mention suivante figurait sous les lignes de signature : [traduction] « Fait contre mon gré. »

124 Mme Rivais a dit avoir conclu que Santé Canada n’accepterait pas que cette  formule constitue un consentement à l’évaluation de l’AAT. Selon elle, les motifs de l’évaluation avaient été longuement expliqués à la fonctionnaire. Mme Rivais croyait que la description du comportement de la fonctionnaire dans le document envoyé à son médecin qui demande une évaluation (pièce E-20) était juste. En outre, comme la conduite de la fonctionnaire semblait contraire à sa personnalité, Mme Rivais croyait que ce fait justifiait l’inquiétude au sujet de l’aptitude au travail de la fonctionnaire. Mme Rivais a témoigné qu’elle a demandé au gestionnaire des ressources humaines, pour plus de certitude, de confirmer auprès de Santé Canada s’il était correct de présumer que Santé Canada ne tiendrait pas compte de la formule soumise par la fonctionnaire à titre de consentement. Sur réception de la vérification selon laquelle Santé Canada n’accepterait pas la formule de consentement, Mme Rivais a rédigé et envoyé une lettre de licenciement (pièce E-36) datée du 26 août 2009. La lettre mentionnait le refus de la fonctionnaire de consentir à l’évaluation de l’AAT comme motif de licenciement.

125 En contre-interrogatoire, Mme Rivais s’est fait demander si l’employeur s’était préoccupé adéquatement de la santé et de la sécurité de la fonctionnaire. Mme Rivais a reconnu qu’un employé a le droit de refuser un travail non sécuritaire en vertu du Code canadien du travail, mais elle a ajouté que l’employé devrait expliquer en quoi le travail n’était pas sécuritaire.

126 Mme Rivais s’est fait demander de décrire l’importance d’un rapport d’incident. Elle a expliqué qu’en général, c’est le superviseur qui rédige un rapport d’incident à la demande d’un employé. Un tel rapport décrit un événement négatif et révèle quelles mesures ont été prises en réaction à l’événement. Les rapports d’incident sont acheminés au bureau d’Ottawa de l’employeur pour ses dossiers. On a demandé à Mme Rivais de se reporter à un rapport d’incident (pièce G-14) portant sur la chute de la fonctionnaire sur de la glace en janvier 2009. Le rapport avait été rempli par Mme Armstrong et il mentionnait qu’elle avait conseillé à la fonctionnaire de consulter un médecin. Une section devait également être remplie par le gestionnaire de la collecte des données (dans le présent cas, Mme Radisavljevic), qui avait ajouté [traduction] « aucune autre mesure requise ». Mme Rivais a dit que selon son interprétation, aucun traitement médical n’avait été demandé à cette occasion.

127 Mme Rivais a dit qu’elle n’était pas au courant d’un échange de courriels (pièce E-15) entre Mme Armstrong, Mme Carter, Mme Radisavljevic et Mme Johnston, quoique elle a appris à un moment donné que la fonctionnaire faisait valoir qu’elle avait demandé qu’un rapport d’incident soit rédigé pour décrire les événements survenus à l’école le 8 mai. Mme Rivais a dit qu’en général, un employé peut demander le dépôt d’un rapport d’incident. Dans le présent cas, elle a dit croire que les personnes concernées avaient été induites en erreur parce que les événements en question faisaient l’objet d’une enquête.

128 Mme Rivais a dit que l’absence d’un rapport d’incident ne signifiait pas qu’elle ignorait la version de la fonctionnaire; c’est l’un des éléments dont elle a tenu compte pour décider des mesures à prendre. Mme Rivais a reconnu que la fonctionnaire avait un solide dossier à titre d’intervieweuse avant l’enquête. En ce qui concerne les mentions faites au cours de l’enquête des rapports antérieurs sur les relations avec les répondants qui touchent la fonctionnaire, Mme Rivais a reconnu que l’agent négociateur avait protesté contre l’inclusion de ces événements antérieurs dans la discussion sur l’administration du test PISA. Toutefois, Mme Rivais a dit qu’elle croyait qu’il était approprié d’en faire mention, car ils s’inscrivaient dans les efforts de l’employeur visant à vérifier si la fonctionnaire s’était comportée de manière non conforme à sa conduite habituelle.

129 En contre-interrogatoire, Mme Rivais a également été interrogée au sujet d’une déclaration d’un membre du public contenue dans l’un des rapports sur les relations avec les répondants. Selon cette déclaration, si la fonctionnaire retournait chez elle, cette personne la tuerait. La fonctionnaire a demandé si l’employeur aurait dû lui faire part de cette menace et prendre des mesures pour assurer sa sécurité. Mme Rivais a dit qu’elle n’était pas impliquée directement dans cette question, mais elle a ajouté que lorsque des membres du public ou des répondants déposent une plainte, le superviseur qui traite la plainte doit évaluer la gravité de celle-ci et décider quelles mesures il convient de prendre. Dans certains cas, la réponse appropriée consiste à dire à l’employé qui fait l’objet de la plainte de ne plus traiter avec le plaignant. Mme Rivais a reconnu que la fonctionnaire aurait normalement été informée d’une menace de cette nature. Elle a dit que la plainte a été jugée pertinente parce qu’elle jetait un éclairage sur la teneur des relations de la fonctionnaire avec autrui; toutefois, personne n’affirmait qu’une telle menace était justifiée.

130 Mme Rivais a témoigné en contre-interrogatoire qu’elle avait envoyé une réponse à un grief au deuxième palier à la fonctionnaire en date du 28 août 2009 (pièce G-36). La lettre indiquait que l’agent négociateur avait refusé de faire des représentations à ce stade. Elle avait interprété cette réponse comme si elle signifiait que le grief devait être porté à un palier supérieur sans délai. Elle a également interprété que les représentantes de l’agent négociateur ont décrit les événements survenus différemment de l’employeur. Elle a affirmé qu’il arrive couramment que l’employeur et l’agent négociateur soient en désaccord de cette façon. Mme Rivais a dit que l’on devait s’attendre à ce que l’agent négociateur continue à présenter une version des événements que l’employeur n’acceptait pas, ce qui était cohérent avec son rôle de représentante de la fonctionnaire.

B. Pour la fonctionnaire s’estimant lésée

131 La fonctionnaire a également comparu comme témoin. Elle a témoigné qu’elle a commencé à travailler chez l’employeur en mars 2006 et qu’elle a eu une série de contrats pour une durée déterminée jusqu’en août 2009. À titre d’intervieweuse sur place, elle a pris part à diverses enquêtes de Statistique Canada, dont l’enquête « Vieillissement en santé » et l’« Enquête sur les dépenses des ménages ». Bien qu’il y a eu très peu de plaintes des répondants ou des membres du public, elle se souvenait d’un cas survenu en 2008 où un fils s’était plaint de certaines questions sur le revenu dans une enquête remplie par sa mère âgée. Elle avait expliqué que les questions étaient des questions posées régulièrement dans le cadre d’une enquête et qu’il aurait pu avoir accès à l’enquête s’il l’avait voulu. La fonctionnaire a dit que les deux examens de rendement effectués en 2008 et en 2009 avaient indiqué qu’elle faisait un travail satisfaisant.

132 La fonctionnaire a dit que Mme Armstrong lui attribuait des dossiers et que certains d’entre eux comportaient des enquêtes par téléphone dans d’autres parties de la C.-B. Mme Armstrong lui attribuait parfois du travail supplémentaire ou du travail de suivi pour aider les autres intervieweurs.

133 La fonctionnaire a dit qu’elle a suivi une formation sur le test PISA, mais qu’il ne s’agissait pas selon elle d’une formation très utile. Elle a dit que le test PISA était le plus difficile auquel elle a pris part. Elle devait se préparer considérablement, et elle a parlé à d’autres intervieweurs à ce sujet. Elle a dit qu’elle ne croyait pas que Mme Armstrong avait suivi la formation en vue du test PISA. Ce qu’elle a interprété du manuel sur le test PISA (pièce G-1), c’est que les règles du test étaient très rigoureuses et qu’elle devait faire très attention de veiller au respect de ces règles. Par exemple, il importait manifestement que les documents du test ne soient pas laissés sans surveillance, qu’aucune copie ne soit faite du test et que l’on enregistre un taux de réponse de 80 % ou plus de l’échantillon.

134 La fonctionnaire a été chargée de faire passer le test PISA dans quatre écoles. Elle a laissé un message vocal à l’intention de M. P à la mi-mars et a fini par le rencontrer le 6 avril.

135 La fonctionnaire a également eu de la difficulté à établir un contact avec le responsable d’une autre école. Il a été difficile de prendre des dispositions à cette école, mais l’administration du test s’est bien déroulée. À cette école, le test a eu lieu dans la bibliothèque, et aucun carillon ne pouvait être entendu pendant le test. Deux autres écoles ont appliqué la même pratique. Les responsables de ces écoles ont reçu des plaintes concernant les règles du test PISA; par exemple, certains ont critiqué l’exigence selon laquelle les élèves devaient demeurer assis après avoir terminé le test et ne pouvaient jouer à des jeux ou trouver d’autres façons d’écouler le temps.

136 La fonctionnaire a dit qu’à leur première réunion tenue le 6 avril, M. P était agressif et s’est montré fâché que son école ait été ciblée en vue du test PISA. Il l’a fait attendre pendant 25 minutes et était contrarié lorsqu’il a été informé qu’elle était encore là. Il a demandé des copies du test, et elle lui a répondu qu’elle ne pouvait en fournir. Elle lui a laissé une copie de la formule de suivi; il a dit qu’il n’aurait pas le temps de la remplir, et qu’il la remettrait à Mme G. En contre-interrogatoire, la fonctionnaire s’est fait demander pourquoi, si elle se sentait tellement intimidée par M. P à la réunion, elle ne l’avait pas signalé à son superviseur. Elle a répondu qu’elle voulait lui accorder le bénéfice du doute. La fonctionnaire a ajouté qu’elle n’avait pas demandé conseil à Mme Armstrong au sujet des frustrations qu’elle subissait parce qu’elle avait organisé le test PISA à cette école.

137 La fonctionnaire a dit qu’elle a laissé un message à Mme G le 6 mai et que celle-ci l’a rappelée le 7 mai. Il y a eu une certaine confusion au sujet du numéro du local de test. La fonctionnaire a expliqué qu’il importait de fournir des renseignements exacts advenant que les représentants chargés du contrôle de la qualité de l’employeur décident d’effectuer des vérifications relativement au test. La fonctionnaire a demandé si la bibliothèque était la pièce prévue pour le test et a été informée que ce n’était pas le cas. Elle a dit à Mme G qu’il ne devait pas y avoir d’autres professeurs présents pendant le test. Elle a demandé si le comportement de certains élèves pourrait se révéler problématique et a demandé qu’un nombre suffisant de pupitres soit mis à sa disposition. La fonctionnaire a demandé à Mme G si elle savait si des élèves figurant sur la liste ne passeraient pas le test, et Mme G a répondu qu’elle était au courant du cas d’un élève (qui avait indiqué sur la formule de suivi qu’il [traduction] « ne serait pas en mesure de passer le test »).

138 En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a nié quelque manque de professionnalisme que ce soit dans sa conversation avec Mme G ou dans les messages vocaux qu’elle a laissés à Mme G. Bien qu’elle a laissé un message pour s’excuser de la confusion survenue quant au numéro de pièce approprié, elle a dit qu’elle l’a fait parce qu’elle a commis une erreur dans le numéro, et non parce que sa conduite devait faire l’objet d’excuses. La fonctionnaire a nié qu’elle était préoccupée par l’absence de communication adéquate avec Mme G avant le test. Elle a dit qu’elle estimait que le test irait de l’avant ou non, mais que ce n’était pas sa responsabilité.

139 La fonctionnaire a dit que le manuel fourni à l’école établissait clairement que la personne-ressource de l’école — dans le présent cas, Mme G — était chargée de remplir la formule de suivi et d’entrer les codes indiquant le statut de chaque élève sur la liste. Il incombait également à la personne-ressource de l’école d’envoyer des lettres informant les élèves et leurs parents que les élèves avaient été choisis dans le cadre de l’échantillonnage du test PISA et d’informer les professeurs du moment et de l’endroit où le test se tiendrait. La fonctionnaire a affirmé que Mme G n’a pas indiqué qu’elle ne serait pas prête le jour du test.

140 La journée du test, la fonctionnaire a dit qu’elle est arrivée à l’école à 8 h 15, soit l’heure du rendez-vous fixé à Mme G. Elle a apporté le bac bleu renfermant les documents du test. De fait, Mme G ne s’est présentée que vers 8 h 23, et a tout simplement dit « Je suis [Mme G], suivez-moi », puis l’a emmenée dans la pièce. La pièce réservée en vue du test était pleine et renfermait seulement 16 pupitres plutôt que les 35 nécessaires pour accueillir toutes les personnes inscrites sur la liste. Il y avait des fenêtres qui faisaient face à un stationnement d’un côté de la pièce. La pièce était adjacente à un autre bureau dont la porte comportait une fenêtre en verre. La fonctionnaire a dit qu’elle avait demandé davantage de pupitres, et Mme G lui a indiqué qu’elle n’était pas certaine que l’école pouvait en fournir d’autres. Mme G a demandé à M. P de se présenter à cette pièce. Il a proposé à la fonctionnaire d’attendre l’arrivée des élèves et de voir alors s’il y avait assez de pupitres. La fonctionnaire a répondu qu’elle avait été informée qu’un élève serait absent. Par conséquent, elle avait besoin de 34 pupitres. M. P a répété qu’il croyait qu’il y aurait moins de 10 élèves. Mme B s’est également présentée dans la pièce et abordé la fonctionnaire [traduction] « de manière agressive », selon la fonctionnaire. La fonctionnaire a dit qu’elle a reculé et qu’elle a demandé à Mme B son identité. La fonctionnaire a dit à Mme B que si elle n’avait pas lu le manuel, elle ignorait probablement quelles étaient les règles, qui exigeaient que les tests soient placés dans l’ordre dans lequel figurent les élèves sur la formule de suivi. M. P a alors pris des dispositions pour faire transporter des pupitres supplémentaires dans la pièce.

141 Les règles du test PISA permettaient à la fonctionnaire de retarder le début du test d’un maximum de 10 minutes pour laisser le temps aux retardataires d’arriver. Elle a attendu 10 minutes complètes puis a débuté le test avec les 9 élèves présents.

142 Au cours du test, des élèves qui étaient à l’extérieur ont cogné à la fenêtre. Un élevé s’est plaint du bruit fait par le ventilateur. Mme G est allée vérifier et a mentionné que rien ne pouvait être fait à cet égard. Quand Mme G a ouvert son ordinateur portatif, il a fait entendre un bruit de carillon qui a attiré l’attention des élèves. Trois professeurs se sont présentés dans la pièce à divers moments et étaient pas mal agressifs. L’un d’entre eux a dit à la fonctionnaire de la fermer lorsqu’elle lui a dit qu’il n’aurait pas dû entrer dans la pièce pendant le test. Mme G n’a pris aucune mesure pour informer les professeurs qu’ils ne devraient pas être dans la pièce. À un autre moment, des élèves ont cogné à la porte et ont dit qu’ils devaient avoir un cours dans cette pièce. L’un des professeurs est revenu une deuxième fois pour prendre des documents et a informé la fonctionnaire que c’était sa pièce.

143 La fonctionnaire a dit qu’elle a demandé à Mme G d’afficher une note sur la porte, mais elle a refusé. L’AFC a placé un tableau affichant un avis concernant le test devant la porte.

144 À un moment donné, Mme B est arrivée et a demandé à la fonctionnaire de venir dans le corridor. La fonctionnaire a dit que Mme B a marché derrière elle et qu’elle a été surprise. La fonctionnaire a affirmé qu’elle a dit à Mme B de cesser; elle a également mentionné qu’elle a levé sa main. Elle a accompagné Mme B dans le bureau, non sans avoir d’abord ramassé les tests inutilisés par des élèves. La fonctionnaire a dit à Mme B qu’elle ne voulait pas se faire parler sur ce ton et qu’elle ne pouvait pas laisser les tests sans surveillance. Elle a témoigné qu’elle ne pouvait voir toute la pièce à partir du bureau. Elle était inquiète parce que l’AFC avait dit que M. P se trouvait également à l’arrière de la pièce, et compte tenu de sa demande de photocopie du test, elle se préoccupait de la sécurité. La fonctionnaire a dit qu’elle a alors marché vers M. P et qu’elle lui a dit, sur le ton d’une conversation normale, que si des professeurs continuaient à entrer dans la pièce, elle devrait mettre fin au test, ce qui occasionnerait un échec pour l’école. M. P et Mme B ont alors quitté. Le test a pris fin à 11 h 10.

145 À la fin du test, la fonctionnaire a recueilli les tests terminés et a remis tous les documents dans le bac bleu. Elle a demandé à Mme G si elle avait besoin d’aide pour remplir la formule de suivi (pièce G-6), mais celle-ci a répondu qu’elle n’avait pas d’autre information à ajouter. Elle a inscrit des commentaires sur la formule. Au moment où la fonctionnaire quittait l’école, elle a rencontré M. P, qui pensait qu’elle l’avait perdue pendant le test. Elle a placé les documents dans sa voiture, puis est retournée dans l’école pour rapporter son permis de stationnement. Elle a apporté son magnétophone et a demandé de voir M. P. Mme B et lui sont sortis, et la fonctionnaire leur a dit qu’elle avait été mal traitée par le personnel de l’école et qu’elle ne retournerait pas à l’école. M. P a dit qu’il était d’accord qu’elle ne revienne pas à l’école. Il a mentionné qu’il a entendu les messages vocaux qu’elle a laissés pour Mme G et croyait qu’ils étaient révoltants. Lorsque la fonctionnaire a quitté l’école, le magnétophone fonctionnait toujours.

146 La fonctionnaire a dit qu’elle était encore ébranlée. Elle a arrêté sa voiture pendant quelques minutes, puis s’est rendue chez elle. Elle a téléphoné à Mme Armstrong et elle lui a laissé un message. Elle lui a envoyé un courriel le même soir indiquant qu’elle avait été mal traitée et demandait le dépôt d’un rapport d’incident.

147 Le lundi 11 mai, Mme Carter a dit à la fonctionnaire qu’elle ne devait plus faire de travail pour l’instant et que tous ses dossiers seraient attribués à d’autres intervieweurs. Mme Carter a également exposé la version des événements que l’employeur avait reçue du personnel de l’école.

148 Plus tard le 11 mai, Mme Woods, une représentante de l’agent négociateur, est arrivée au domicile de la fonctionnaire. Elle a dit qu’elle n’avait pas établi de contact avec Mme Woods, qui a affirmé que Mme Radisavljevic lui avait dit qu’elle devrait appeler la fonctionnaire. Celle-ci a indiqué avoir eu un choc de voir une représentante de l’agent négociateur parce qu’elle ne pensait avoir rien fait de mal. Elle n’était pas d’accord avec le fait qu’elle aurait perdu la maîtrise d’elle-même ou qu’elle se serait adressée à qui que ce soit en criant. Elle estimait avoir été traitée de façon dégradante et humiliante et soutenait que le personnel de l’école avait refusé d’écouter ses suggestions. Elle a dit à M. P qu’elle devrait mettre fin au test si d’autres difficultés survenaient et qu’elle estimait qu’elle devrait signaler la situation à ses superviseurs. Elle a affirmé qu’elle avait dit qu’elle ne voulait pas de cet emploi. Elle a cependant nié avoir dit se l’être fait imposer. Elle n’a pas pleuré devant les enseignants, ni ne s’est adressée à eux en criant.

149 La fonctionnaire a dit que selon elle, l’école n’avait pas satisfait aux exigences du test PISA. Elle avait choisi une date alors qu’il se passait déjà d’autres choses à l’école — en particulier, les examens de français oral avaient lieu au même moment — ce qui signifiait que la bibliothèque n’était pas libre. Cette situation signifiait par ailleurs que les élèves qui passaient le test étaient exposés au son des cloches et à d’autres perturbations, comme les fenêtres donnant sur l’extérieur et les interruptions des professeurs et des élèves qui entraient dans la pièce.

150 Au cours de la réunion d’instruction du 14 mai, la fonctionnaire a dit avoir expliqué que l’école ne s’est pas conformée au manuel de PISA et que les gestes qu’elle a posés le 8 mai l’avaient été en réaction à cette situation. À la réunion, la fonctionnaire et les représentantes de l’agent négociateur ont demandé s’il y avait de l’information sur la façon dont le test PISA avait été administré dans les trois autres écoles dont la fonctionnaire était responsable. L’agent négociateur et elle ont communiqué avec les trois écoles pour s’informer de leurs rapports avec elle. Selon la fonctionnaire, l’employeur était en colère qu’ils aient établi ces contacts. La fonctionnaire était d’avis que l’employeur ignorait l’information qui avait été recueillie concernant les autres écoles et les représentations de l’agent négociateur sur la façon dont la situation de la fonctionnaire avait été gérée.

151 En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a dit que même s’il était dérangeant pour elle de revivre les événements du 8 mai et qu’elle se sentait harcelée sur le plan psychologique, elle n’était pas désemparée pendant l’appel du 14 mai.

152 La fonctionnaire a dit qu’on ne lui a jamais expliqué clairement pour quel motif elle n’était pas autorisée à travailler ou pourquoi une évaluation médicale avait été demandée. Elle a dit avoir établi sa volonté de fournir des données médicales acceptables en se rendant chez son médecin de famille et en déclarant à l’employeur qu’elle était apte à travailler (pièce E-22). Elle a dit que son interprétation du terme « apte » était qu’elle était une employée convenable, et elle était convaincue qu’elle possédait les compétences nécessaires pour accomplir le travail. Elle avait indiqué à M. Wong (pièce E-25) qu’elle subirait l’évaluation de Santé Canada parce qu’elle était menacée de perdre son emploi, mais elle voulait quand même obtenir une explication des motifs de cette situation (pièce E-27).

153 En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a dit avoir lu la lettre de M. Wong lui donnant instruction de subir une évaluation de l’AAT (pièce E-19) et le document fourni à son médecin (pièce E-20). Elle ne comprenait pas pourquoi une évaluation de l’AAT était nécessaire ou ce qu’une telle évaluation comportait. Elle a en outre indiqué à M. Wong le 6 juillet (pièce E-22) qu’elle était apte à travailler, et elle n’a pas renvoyé la formule de consentement signée parce qu’à son avis il importait de consulter l’agent négociateur. Elle a admis qu’elle n’a pas fourni cette explication à M. Wong.

154 Au cours de la conférence téléphonique du 24 juillet, la fonctionnaire a dit qu’il a encore une fois été question des mêmes événements. Elle se souvenait que M. Wong avait dit qu’une évaluation de l’AAT ne serait pas nécessaire et que Mme Rivais avait dit qu’elle n’était pas certaine de ce qui était requis. La fonctionnaire a dit qu’elle était très préoccupée par le fait que l’employeur puisse avoir accès à ses données médicales et qu’il puisse la contraindre à donner son consentement. Elle s’inquiétait vraiment de la protection de sa vie privée.

155 La fonctionnaire a dit qu’elle n’a pas reçu de Mme Woods les pages jointes à la trousse envoyée le 18 août (pièce E-30), qui renfermait les réponses de Santé Canada à des questions précises sur la divulgation soulevées par la fonctionnaire le 24 juillet. Elle n’a vu cette information que plus tard, lorsqu’elle a présenté une demande d’accès à l’information liée à son grief.

156 De concert avec Mme Woods et Mme Hazelwood, la fonctionnaire a décidé de retourner voir son médecin pour lui demander ce qu’elle devrait faire pour satisfaire aux exigences imposées par l’employeur. Il a dit qu’une évaluation psychologique pourrait satisfaire aux exigences de l’employeur; selon ses propres termes, [traduction] « [t]entons de les battre à leur propre jeu ». La fonctionnaire a vu un psychologue du service de santé de Kelowna le vendredi 28 août.

157 La fonctionnaire a présenté une copie de la formule de consentement  (pièce G-70), qui était selon elle la version qu’elle avait envoyée à l’employeur le 25 août. À l’opposé de la version présentée par l’employeur (pièce E-35), celle de la fonctionnaire ne renfermait pas la mention [traduction] « consentement non donné », quoiqu’elle comportait toutes les autres mentions décrites précédemment dans la présente décision. Elle a dit qu’elle acceptait le conseil du médecin de se soumettre à l’évaluation psychologique et elle croyait qu’elle répondait ainsi aux exigences de l’employeur, même si elle le faisait sous la contrainte. Suivant le conseil de l’agent négociateur, elle a également déposé une plainte de harcèlement (pièce E-34) en date du 23 août.

158 La fonctionnaire a indiqué qu’elle a reçu la lettre de licenciement (pièce E-36) le 31 août. Elle n’était pas d’accord avec le fait qu’elle n’aurait pas donné un consentement approprié. Elle avait envoyé la formule de son médecin et avait indiqué à M. Wong, en juillet, qu’elle acceptait de se soumettre à l’évaluation. Elle avait également envoyé laformule de consentement signée.

159 En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a dit que malgré les communications de l’employeur du 8 mai au 31 août et malgré les conférences téléphoniques organisées pour discuter des questions pertinentes, elle avait conclu que l’employeur l’avait sciemment trompée pour pouvoir la licencier. Elle a reconnu qu’en définitive, elle avait déposé une plainte relative aux droits de la personne contre l’employeur (pièce E-34) en mentionnant comme motif la discrimination fondée sur une incapacité.

160 En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a indiqué qu’elle avait reçu une formation périodique pour son poste d’intervieweuse. Elle avait reçu une copie du guide de l’employé (pièce G-11) pour son usage personnel. Elle a reconnu qu’il mentionnait qu’un employé devrait [traduction] « […] signaler les problèmes liés au lieu de travail à l’intervieweur principal, au gestionnaire de la collecte des données ou au gestionnaire de programme », mais elle a réitéré que Mme Armstrong lui avait dit qu’elle ne devrait faire rapport à personne d’autre qu’elle.

161 L’avocate de l’employeur a renvoyé la fonctionnaire à un courriel (pièce E-7) dans lequel Mme Armstrong reproduisait ses notes sur deux incidents de relations avec des répondants à l’intention de Mme Radisavljevic. À la première occasion, qui est survenue en décembre 2008, un homme avait téléphoné pour se plaindre que sa mère âgée a eu une conversation avec la fonctionnaire sur la question de savoir si elle devrait suivre le conseil de son fils d’entrer dans une résidence pour soins. Bien que la fonctionnaire ne se souvienne pas de la séquence exacte des événements, elle se rappelait que Mme Armstrong avait porté cet incident à son attention. Elle a dit que lorsque toutes deux suivaient une formation, elle s’est adressée à Mme Armstrong pour lui parler de la question, mais Mme Armstrong a dit qu’elle ne voulait pas en parler à cet endroit, et elle ne lui a jamais donné d’autres directives au sujet de l’incident.

162 La deuxième plainte enregistrée dans les notes de Mme Armstrong a également été faite en décembre 2008. La fille d’une répondante a téléphoné et a dit que sa mère craignait que quelqu’un tente de la tromper pour obtenir sa pension. La fille a affirmé qu’elle a dit à sa mère d’appeler la police si cette personne (la fonctionnaire) se présentait de nouveau et que son mari et elle seraient avec sa mère advenant une autre visite. Les notes de Mme Armstrong indiquaient qu’elle avait cédé le dossier à un autre intervieweur parce qu’elle ne voulait pas que la fonctionnaire se retrouve dans une situation pouvant être risquée. La fonctionnaire a dit que même si elle se souvenait de l’incident, elle ne se rappelait ni du transfert du dossier ni des propos de Mme Armstrong sur les motifs d’un transfert.

163 La fonctionnaire a dit qu’elle se souvenait des interactions ayant donné lieu aux plaintes. En outre, elle pensait que les versions décrites dans les notes de Mme Armstrong étaient inexactes. Elle ne croyait pas avoir agi de manière non professionnelle dans l’un ou l’autre cas. La fonctionnaire a également mentionné qu’elle croyait que la présentation des notes originales ayant donné lieu au courriel (pièce E-14) a indiqué que Mme Armstrong surveillait la fonctionnaire différemment des autres intervieweurs parce que les notes liées à son nom étaient en retrait. Toutefois, elle a dit en contre-interrogatoire qu’elle ignorait ce que cela signifiait.

164 L’avocate de l’employeur a fait mention du courriel (pièce E-15) que la fonctionnaire avait fait parvenir à Mme Armstrong le soir du 8 mai, dans lequel elle demandait de l’aide [traduction] « pour ce qu’[elle] appel[ait] une agression et des mauvais traitements » et a mentionné plusieurs altercations qui seraient survenues à l’école. La fonctionnaire a dit que la série d’événements qui se sont produits à l’école a été très troublante et qu’elle considérait le traitement dont elle a été victime comme une forme d’abus. En novembre 2010, elle a étudié la possibilité de présenter une demande d’indemnisation des accidentés du travail (pièce G-66). Elle n’a pas demandé d’avis médical en mai 2009.

165 Bien qu’elle ait trouvé les événements troublants, la fonctionnaire a fait valoir que sa conduite est demeurée professionnelle en tout temps. Elle a nié avoir eu les larmes aux yeux pendant le test, avoir été en hyperventilation ou avoir élevé la voix. Elle a dit qu’elle n’avait rien fait qui a pu préoccuper quiconque relativement à sa santé. Par ailleurs, elle a affirmé que M. P, Mme B, Mme G et trois autres membres du personnel se sont montrés impolis avec elle.

166 Dans un document daté du 5 mai 2010 (pièce E-37), la fonctionnaire avait exposé ses préoccupations à l’un des gestionnaires principaux de Statistique Canada à Ottawa. L’avocate de l’employeur a renvoyé la fonctionnaire à une déclaration dans laquelle M. P l’accusait faussement d’exiger que l’école mette un autre test à l’horaire. La fonctionnaire a dit qu’elle a précisé à M. P qu’elle ne retournerait pas à l’école. Elle a ajouté qu’elle ignorait s’il serait possible qu’un autre administrateur de test soit chargé de mener un autre test PISA à l’école.

167 La fonctionnaire a dit qu’elle prenait très au sérieux ses obligations de nature éthique en tant qu’employée. Elle comprenait qu’elle avait la responsabilité de garder les données en sécurité et qu’elle recueillait des données pour le compte de l’employeur. Elle a reconnu qu’au cours de sa formation on lui avait dit que les employés ne devaient pas conserver l’information recueillie au cours de l’exécution de leurs fonctions, mais elle a affirmé que les représentantes de l’agent négociateur lui avaient conseillé de conserver des copies du manuel PISA (pièce G-1) et des formules de suivi (pièces G-5 et G-6). Elle a nié l’avoir fait parce qu’elle pensait que sa conduite du 8 mai serait remise en question. Elle a affirmé qu’après le test du 8 mai elle a conservé les documents pendant une courte période parce qu’elle croyait qu’on lui conseillerait de retourner à l’école pour faire passer un autre test. Elle n’a pas reçu de directives de Mme Armstrong, ce qui fait qu’elle a soulevé la question lors de la conférence téléphonique du 14 mai. Elle a alors renvoyé les documents à l’employeur à Ottawa.

III. Résumé de l’argumentation

A. Question préliminaire

168 En guise de question préliminaire, l’avocate de l’employeur a demandé de faire sceller les formules de suivi et des parties des manuels PISA à la suite de la décision dans la présente affaire. La fonctionnaire n’a pas fait valoir d’arguments pour s’opposer à la demande. En ce qui concerne les formules de suivi, l’avocate a fait valoir qu’ils renferment des renseignements personnels au sujet des élèves de l’école où la fonctionnaire a administré le test PISA le 8 mai. Il importe de respecter la vie privée de ces personnes, qui sont des tierces parties dans le différend entre la fonctionnaire et son employeur. Il importe également pour le travail de l’employeur qu’il soit en mesure de certifier aux répondants et à d’autres personnes dont l’information se retrouve entre les mains de l’employeur que les renseignements personnels seront traités avec la plus grande confidentialité.

169 Avant de rendre une décision au sujet d’une demande de mise sous scellés de pièces, il importe de tenir compte de la tension entre le refus d’un accès futur à la preuve présentée à l’audience et les principes de la transparence judiciaire qui font ressortir l’intérêt public à l’égard d’un processus décisionnel transparent. Le cadre qui établit la façon d’aborder cette question est énoncé dans le « critère Dagenais/Mentuck », qui s’inspire des arrêts de la Cour suprême du Canada Dagenais c. Société Radio-Canada, [1994] 3 R.C.S. 835, et R. c. Mentuck, 2001 CSC 76. Dans ce dernier arrêt, le critère, énoncé comme suit au paragraphe 32, prévoyait qu’une ordonnance de non-publication ne doit être rendue que si :

a) elle est nécessaire pour écarter un risque sérieux pour la bonne administration de la justice, vu l’absence d’autres mesures raisonnables pouvant écarter ce risque;

b) ses effets bénéfiques sont plus importants que ses effets préjudiciables sur les droits et les intérêts des parties et du public, notamment ses effets sur le droit à la libre expression, sur le droit de l’accusé à un procès public et équitable, et sur l’efficacité de l’administration de la justice.

Ces questions viennent orienter l’équilibre des intérêts adéquat relativement à une ordonnance de mise sous scellés.

170 J’ai conclu que les formules de suivi (pièces G-5 et G-6) devraient être scellées. Elles renferment des renseignements personnels sur des personnes qui ne sont pas parties au différend entre la fonctionnaire et l’employeur, et les renseignements ont été fournis sous réserve de garanties que leur utilisation serait limitée à des fins relatives au test PISA. La fonctionnaire a fait des copies des formules et les a présentées à l’audience sans avoir consulté l’employeur qui avait donné les garanties ou les personnes elles-mêmes, et je vois maintenant difficilement d’autres façons de protéger leur vie privée que la mise sous scellés des formules.

171 En outre, quoique les parties accordent une importance différente à ces documents, elles s’entendaient quant à la nature des documents ou sur le fait que la formule de suivi telle que remplie par le personnel de l’école s’écartait de certaines façons des directives exposées dans les instructions données par Statistique Canada. À cet égard, je ne suis pas en mesure de constater quelque préjudice que ce soit à l’intérêt public ou à l’intérêt de la fonctionnaire qui découlerait d’une ordonnance de mise sous scellés. Toute mention des documents qu’il faudrait faire dans l’avenir serait limitée à une description de ceux-ci plutôt qu’à l’exposé des renseignements qui y sont contenus. À mon avis, cette restriction protège la vie privée des élèves nommés dans les documents sans constituer de risque inacceptable pour les autres intérêts.

172 En ce qui concerne les manuels PISA (pièces G-1 et G-2), l’avocate de l’employeur a fait valoir que ce sont des documents exclusifs qui ne sont pas censés être du domaine public. J’ai conclu que même s’il est vrai que l’employeur n’avait pas l’intention de rendre ces manuels accessibles au public, il en va de même de bon nombre des pièces déposées à l’audience qui ont trait à des questions de ressources humaines et de relations de travail délicates. Comme le matériel contenu dans les manuels indique quelles instructions ont été données aux intervieweurs et aux écoles concernant l’administration du test PISA, ils s’appliquent de manière tout à fait pertinente aux questions soulevées dans le grief. Il me semble que l’intérêt déclaré par l’employeur à les protéger à titre de documents exclusifs ne prévaut pas sur l’intérêt à l’égard des audiences ouvertes. Par conséquent, je rejette la demande d’ordonnance de mise sous scellés des manuels.

B. Pour l’employeur

173 L’avocate de l’employeur a réitéré l’objection à la compétence qu’elle avait fait valoir dans son exposé introductif. Elle a soutenu que la décision de licencier la fonctionnaire ne constituait pas une mesure disciplinaire et qu’elle ne pouvait donc pas faire l’objet d’un arbitrage de grief en vertu de l’alinéa 209(1)b) de la Loi. Bien que la lettre de licenciement ait mentionné qu’il s’agit d’un licenciement motivé, elle ne mentionnait pas de mesure disciplinaire pour inconduite, mais plutôt le défaut de la fonctionnaire de satisfaire aux exigences de la procédure administrative associée à l’obtention d’une évaluation de l’AAT. L’avocate a reconnu que le recours par l’employeur aux évaluations de l’AAT comme outil d’examen de la conduite d’un employé comporte des limites, tel qu’il est indiqué dans Grover c. Conseil national de recherches du Canada, 2005 CRTFP 150 (maintenu dans Canada (Procureur général) c. Grover, 2007 CF 28 et 2008 CAF 97). La Cour fédérale a mentionné dans cette décision que les employés possèdent un solide droit à la vie privée et qu’ils ne peuvent faire l’objet d’interventions médicales contre leur gré. Cependant, la Cour a accepté que les employeurs sont tenus d’assurer la santé et la sécurité des employés et ils ont donc le droit de demander des renseignements médicaux sur un employé s’il existe « […] des motifs raisonnables et probables de croire que l’employé constitue un risque pour la santé ou la sécurité en milieu de travail ».

174 Dans Hood c. Agence canadienne d’inspection des aliments, 2013 CRTFP 49, l’employeur avait exigé une évaluation de l’AAT pour une employée ayant montré des signes de stress. L’arbitre de grief a formulé le commentaire suivant au paragraphe 118 :

[…]

[…] Je ne crois pas qu’un employeur responsable aurait pu ignorer les signes de stress et d’instabilité montrés par la fonctionnaire pendant les mois précédant sa suspension, le 8 janvier 2010. Je conclus donc que l’employeur a eu raison d’exiger que la fonctionnaire passe un examen médical indépendant pour déterminer son aptitude au travail.

[…]

175 Si je juge que l’objection à la compétence ne devrait pas être accueillie, l’avocate de l’employeur a fait valoir que je devrais conclure que l’employeur a agi raisonnablement dans les circonstances, et que je devrais maintenir la décision de licenciement.

176 D’après l’avocate de l’employeur, il était clair que la fonctionnaire était une employée travaillante qui possédait de bonnes valeurs personnelles. L’avocate a fait valoir que la bonne image que la fonctionnaire avait d’elle-même l’a parfois empêchée d’écouter les explications et a fait en sorte qu’il lui était difficile d’avoir une vue d’ensemble.

177 L’avocate de l’employeur a fait valoir que compte tenu des renseignements accessibles après le 8 mai, l’employeur était fondé à s’inquiéter de l’aptitude au travail de la fonctionnaire. Dans son premier courriel à Mme Armstrong, elle avait décrit ce qui s’était passé comme une agression et s’était dite très bouleversée par les événements. Les rapports du personnel de l’école laissaient entendre à l’employeur que le comportement de la fonctionnaire à l’école devait être étudié davantage. Pour comprendre si la conduite de la fonctionnaire était habituelle, les auteurs des rapports ont examiné des renseignements sur des plaintes antérieures concernant des relations avec des répondants. L’interaction avec la fonctionnaire pendant la conférence téléphonique du 14 mai a confirmé aux représentants de l’employeur qu’ils avaient raison de s’inquiéter de l’aptitude au travail de la fonctionnaire.

178 L’avocate de l’employeur a fait valoir que l’employeur avait droit à des garanties que la fonctionnaire serait en mesure de continuer à fonctionner avec succès dans un environnement à supervision limitée et dans lequel elle devait interagir régulièrement avec des membres du public pour le compte de l’employeur. L’employeur devait mettre en balance le droit de la fonctionnaire à la vie privée et son intérêt à s’assurer qu’elle soit apte à accomplir son travail, et il était raisonnable de retenir l’option d’obtenir une évaluation de l’AAT.

179 L’avocate de l’employeur a affirmé que la preuve révélait que l’employeur avait expliqué clairement à la fonctionnaire pourquoi l’évaluation de l’AAT était nécessaire et ce qu’elle comporterait. Elle a répondu à ses questions et lui a donné un certain nombre d’occasions de consentir à l’évaluation. Ce n’est que lorsqu’elle ne s’est pas conformée à une dernière demande de donner son consentement par écrit qu’il a été décidé de la licencier. En ce qui concerne la formule de consentement fournie par la fonctionnaire le 25 août, l’avocate a fait observer que même sans la mention [traduction] « consentement non donné » (qui, au dire de la fonctionnaire, n’était pas présente dans la version qu’elle a envoyée), Mme Rivais a témoigné que Santé Canada n’aurait pu accepter la formule en guise de consentement.

180 L’avocate de l’employeur a fait valoir que la preuve n’étayait pas la proposition de la fonctionnaire selon laquelle l’employeur l’avait piégée d’une façon ou d’une autre et selon laquelle le licenciement a été une conclusion tenue pour acquise. L’avocate a souligné que l’employeur avait continué à payer la fonctionnaire pendant les 3,5 mois ayant précédé son licenciement, qu’il a continué à communiquer avec elle et avec l’agent négociateur, et qu’il lui a même donné plus de temps pour consentir à l’évaluation de l’AAT.

181 L’avocate de l’employeur a fait valoir que si l’on doit tirer des conclusions en matière de crédibilité, le témoignage des témoins de l’employeur devrait être privilégié. Le témoignage de la fonctionnaire selon lequel elle n’a jamais perdu son calme au cours de la journée du 8 mai n’est pas crédible; son témoignage selon lequel aucun élément de son comportement n’aurait pu provoquer de l’impolitesse de la part de six membres différents de l’école ne l’est pas non plus.

C. Pour la fonctionnaire s’estimant lésée

182 La fonctionnaire a fait valoir qu’avant les événements du 8 mai, son dossier affichait un rendement satisfaisant, notamment l’administration réussie du test PISA dans trois autres écoles. Les règles liées au test PISA étaient complexes et assez rigides, et la fonctionnaire a jugé que les conditions dans lesquelles on s’attendait à ce qu’elle administre le test le 8 mai s’éloignaient de ces règles et lui rendaient la tâche difficile. La fonctionnaire a fait valoir que le personnel de l’école ne s’est pas montré collaborateur et a donné une fausse image de sa conduite au moment du test.

183 En ce qui concerne la demande d’une évaluation de l’AAT, la fonctionnaire a dit que les motifs de celle-ci ne lui ont jamais été expliqués clairement, mais que lorsque le licenciement a eu lieu, elle avait fait son possible pour remplir la demande en envoyant la formule de consentement remplie et en prenant des dispositions en vue de la tenue d’une évaluation psychologique. Elle avait pris ces mesures de concert avec l’agent négociateur et a été étonnée de se faire licencier malgré les efforts qu’elle avait déployés.

IV. Motifs

184 Avant l’audience et de nouveau au début de celle-ci, l’employeur a soulevé une objection selon laquelle je ne possède pas la compétence pour trancher ce grief. L’avocate de l’employeur a fait valoir que la décision de licencier la fonctionnaire constituait une mesure administrative ayant été prise parce qu’elle ne satisfaisait pas à l’exigence de consentement à une évaluation de l’AAT, malgré des directives répétées de l’employeur; l’avocate a en outre soutenu qu’il ne s’agissait pas d’une mesure disciplinaire prise pour punir l’inconduite de la fonctionnaire.

185 Comme l’a reconnu l’avocate de l’employeur, la preuve qui aborde le fond de la réclamation contenue dans le grief peut se révéler pertinente si je décide que j’ai la compétence pour instruire l’affaire. Dans ce cas, il s’agirait de déterminer si l’employeur a agi raisonnablement et s’il pourrait s’acquitter du fardeau de prouver que le licenciement était motivé.

186 Je dirais qu’une telle preuve pourrait également être pertinente dans un contexte différent. Elle pourrait contribuer à régler la question de savoir si la mesure prise par l’employeur était de nature administrative ou disciplinaire. Comme l’a indiqué l’arbitre de grief dans Grover, citée précédemment dans la présente décision, il ne suffit pas qu’un employeur affirme qu’une décision est de nature administrative pour qu’il en soit ainsi. Pour décider si la mesure prise par l’employeur était effectivement de nature administrative, la preuve liée au fond des prétentions de la fonctionnaire peut se révéler utile afin d’établir si l’employeur a imposé une mesure disciplinaire sous le couvert d’une décision administrative.

187 Les témoins de l’employeur ont déclaré que lorsqu’ils ont reçu des renseignements au sujet de ce qui est ressorti de la rencontre du 8 mai — et il convient de se souvenir qu’ils ont obtenu des renseignements à la fois de la fonctionnaire et du personnel de l’école — ils ont jugé nécessaire d’obtenir d’autres renseignements pour décider des répercussions de ce qui est ressorti. Ils ont lancé une procédure d’enquête au cours de laquelle ils ont obtenu divers genres de renseignements, dont des descriptions d’événements de certains participants, notamment la fonctionnaire, des rapports sur les relations avec les répondants, la rétroaction d’autres écoles, et les dossiers de rendement de la fonctionnaire.

188 Sur la base de ces renseignements, l’employeur aurait pu décider que la fonctionnaire était coupable d’inconduite qui justifiait une mesure disciplinaire. Cependant, les témoins de l’employeur ont indiqué qu’ils n’ont pas retenu cette option. Ils ont plutôt conclu que la conduite de la fonctionnaire le 8 mai était inhabituelle et qu’il existait des motifs d’exiger la tenue d’une évaluation de l’AAT. On présume que si l’évaluation de l’AAT avait établi qu’il n’existait pas de motifs médicaux ayant pu expliquer la conduite de la fonctionnaire, l’employeur aurait cherché à déterminer si des sanctions disciplinaires devraient être imposées.

189 La fonctionnaire a dit qu’après avoir reçu son avis de licenciement le 31 août 2009, elle a conclu que l’employeur l’avait trompée et qu’il s’était servi du processus d’obtention d’une évaluation de l’AAT pour fabriquer des motifs de licenciement. Elle a fait valoir que dès le début, l’employeur a ignoré sa version des événements, n’a pas pris au sérieux ses préoccupations en matière de santé et de sécurité, et a indûment ajouté foi au récit du personnel de l’école.

190 Il va sans dire que la question de savoir s’il était raisonnable, pour l’employeur, de conclure que la conduite de la fonctionnaire en date du 8 mai a jeté les bases d’une évaluation de l’AAT est au cœur de toute décision visant à établir si le licenciement constituait une mesure administrative légitime ou s’il devrait être considéré comme une mesure punitive fautive contre la fonctionnaire.

191 La fonctionnaire a certifié qu’aucun élément de sa conduite à l’école n’aurait dû mener l’employeur à remettre en question son aptitude à travailler et qu’au contraire, elle avait été victime de harcèlement et d’abus de la part du personnel de l’école.

192 En ce qui concerne la conduite du personnel de l’école, il est clair que l’interaction entre la fonctionnaire et les enseignants et administrateurs de l’école s’est avérée pour le moins difficile. Il y avait des lacunes apparentes dans la préparation de l’école au test PISA. Il ne semble pas qu’un avis adéquat a été donné aux professeurs et aux élèves qui utilisaient habituellement la pièce où se tenait le test, ce qui semble s’être traduit par des commentaires peu courtois d’un ou de plusieurs de ces professeurs. M. P, Mme B et Mme G ne semblent pas être aussi au courant des règles d’administration du test PISA qu’il aurait été souhaitable qu’ils le soient, et il est clair que la fonctionnaire, qui prenait ces règles très au sérieux, jugeait celles-ci très frustrantes.

193 La fonctionnaire a témoigné que compte tenu des frustrations et des obstacles auxquels elle s’est butée dans l’administration du test, elle s’est toujours conduite de manière professionnelle et sereine. Elle a nié qu’un élément quelconque de sa conduite ait pu soulever des craintes qu’elle ne soit pas bien de la part des personnes qui l’observent.

194 Bien sûr, ce témoignage est incompatible avec celui de trois témoins qui ont observé la fonctionnaire à l’école le 8 mai : M. P, Mme B et Mme G. Parlons d’abord de M. P. Son témoignage et celui de la fonctionnaire laissent croire que leur relation a plutôt mal commencé et que les choses ne se sont jamais vraiment replacées. La fonctionnaire l’a dépeint comme agressif et impatient et a dit qu’il a été impoli à son égard et n’a jamais vraiment tenté de collaborer. M. P a affirmé que les exigences de la fonctionnaire étaient déraisonnables et qu’elle n’était pas prête à tenir compte des réalités de la vie à l’école. Il lui a dit que selon lui, elle avait réservé un traitement horrible et dégoûtant à Mme G et a affirmé que la fonctionnaire ne reviendrait pas à l’école.

195 La nature de cette relation n’a pas jeté de bases solides d’un échange collégial, ce qui ne signifie pas qu’il faut faire fi de toutes les observations de M. P sur la conduite de la fonctionnaire à l’école. Même en tenant compte des termes quelque peu exagérés qui ont été utilisés par M. P, sa description des propos et des gestes de la fonctionnaire soulève certaines questions sur la nature tout à fait calme et professionnelle de son comportement.

196 Il régnait une certaine confusion dans les témoignages sur la question de savoir si la fonctionnaire a rencontré Mme B une ou deux fois. Cependant, l’on s’entend sur ce qui s’est produit lorsqu’elles se sont rencontrées. Que la fonctionnaire ait dit ou non quelque chose comme [traduction] « Je ne suis pas tenue de vous écouter » ou [traduction] « Je n’ai pas besoin de vous », il ne fait aucun doute qu’elle a soulevé sa main en position d’arrêt et qu’elle a résisté à l’invitation de Mme B de discuter en privé dans le bureau. Mme B a témoigné que la fonctionnaire lui a parlé brusquement.

197 Mme B était la directrice de l’école, et il convient de se souvenir qu’il s’agissait de sa première rencontre avec la fonctionnaire. Il n’existe aucune raison de croire qu’elle s’était fait une impression particulière de la fonctionnaire ou qu’elle avait quelque motif que ce soit de représenter faussement la nature de leur interaction. D’après son interprétation, il y a eu certains problèmes relativement aux arrangements qui ont été pris pour faire passer le test, et selon les suggestions qu’elle a formulées, il est clair qu’elle s’est présentée dans la pièce pour régler des problèmes et pour trouver une solution qui se serait révélée satisfaisante du point de vue de l’école et de Statistique Canada. Bien que la fonctionnaire ait témoigné qu’elle a posé son geste d’« arrêt » devant Mme B parce qu’elle sentait que celle-ci envahissait son espace personnel, son message à Mme B n’était pas aussi clair. Il n’y a rien d’étonnant à ce que Mme B ait été surprise par la conduite de la fonctionnaire, et j’estime qu’il était raisonnable pour elle de conclure que les réactions de la fonctionnaire dans les circonstances étaient exagérées et révélatrices d’un problème sous-jacent.

198 Mme G a dit qu’elle avait trouvé ses premiers contacts avec la fonctionnaire plutôt stressants, car la fonctionnaire critiquait ce qu’elle faisait pour la préparation au test. Le 8 mai, à l’école, Mme G a peut-être eu le contact le plus long avec la fonctionnaire et la plus longue occasion de l’observer. Malgré la tension qui avait pris naissance entre elle et la fonctionnaire, elle a décrit le comportement et la conduite de la fonctionnaire en termes mesurés. Elle a dit que la fonctionnaire ne pleurait pas, quoiqu’elle ait observé que ses yeux semblaient larmoyants. Cependant, elle semblait très tendue et affichait des signes que Mme G croyait apparentés à une crise cardiaque imminente ou à un autre événement critique. Elle s’est adressée à la fonctionnaire pour lui demander si elle avait besoin d’un médecin et elle a essuyé une rebuffade de la fonctionnaire, qui lui a dit qu’elle se sentait bien. Dans les comptes rendus qu’elle a donnés des incidents et dans son témoignage à l’audience, elle a affirmé de manière cohérente qu’elle croyait que la fonctionnaire était peut-être en train de subir une crise de nature médicale.

199 Dans son témoignage, la fonctionnaire a dit avoir été offusquée par la suggestion de Mme G selon laquelle il y avait quelque chose de mal avec elle. Elle a dit que Mme G n’était pas médecin et qu’elle n’était pas en position de diagnostiquer un problème médical. Il convient de noter que Mme G n’a pas prétendu être une professionnelle de la médecine. Elle était toutefois secouriste à l’école et a été formée pour discerner les signes de détresse médicale.

200 Bien que Mme G ait admis qu’elle trouvait la fonctionnaire quelque peu intimidante, elle a témoigné de manière assurée et s’est exprimée de façon équilibrée. Rien n’indiquait qu’elle ait quoi que ce soit contre la fonctionnaire, et son compte rendu du comportement de la fonctionnaire qui l’a amenée à exprimer ses préoccupations était crédible.

201 À l’opposé, l’affirmation de la fonctionnaire selon laquelle elle n’a jamais perdu son calme et selon laquelle c’est elle qui est toujours demeurée professionnelle est incohérente avec d’autres témoignages, dont le sien. Elle a déclaré que lorsqu’elle a quitté l’école, elle était tellement fâchée qu’elle a jugé nécessaire d’arrêter sa voiture pendant un certain temps avant de se rendre chez elle. Elle a en outre décrit la situation comme une situation de mauvais traitements et d’abus lorsqu’elle a écrit à Mme Armstrong le même jour, et on peut difficilement imaginer qu’elle aurait réagi de manière tout à fait impassible aux événements qu’elle a décrits de cette façon. Bien qu’elle ait rationalisé le geste d’« arrêt » qu’elle a fait devant Mme B, la fragilité de ses interactions avec Mme G et sa réponse énergique à M. P, son témoignage a confirmé l’essence de ces échanges, qui laissent tous croire qu’elle ne s’est pas comportée avec sérénité comme elle l’a prétendu.

202 Mme Carter et Mme Rivais ont témoigné que la fonctionnaire semblait émotivement tendue lorsqu’elles ont pris part à des conversations téléphoniques avec elle. Elles ont dit qu’à certains moments des conversations, elle semblait pleurer et apparaissait tendue, mais qu’à d’autres moments, elle semblait davantage en contrôle. Cette expérience a contribué à confirmer leur point de vue selon lequel une évaluation de l’AAT devrait être effectuée, car la détresse manifeste de la fonctionnaire a suscité certaines inquiétudes au sujet de son bien-être. La fonctionnaire a nié avoir pleuré ou avoir été tendue à ces occasions.

203 Lors de conversations ayant précédé l’audience qui avaient pour but de régler certaines questions techniques, ainsi qu’à l’audience comme telle, il est arrivé que la fonctionnaire soit en larmes ou s’exprime de manière très émotive. Il faut certes interpréter avec beaucoup de prudence le comportement d’un témoin dans de telles circonstances. Au moment de l’audience, la fonctionnaire avait introduit certaines instances de divers types, qui en étaient à différents stades, et il était prévisible que la situation lui paraisse stressante. Je n’ai pas accordé beaucoup de poids à mes propres observations sur ses réactions, mais elles semblent, d’une part, miner son affirmation selon laquelle elle a pu faire face de façon impassible à toutes les situations auxquelles elle a été confrontée, et d’autre part étayer le témoignage de ces témoins qui ont affirmé qu’elle réagissait comme si elle était tendue.

204 J’ai conclu que compte tenu des renseignements dont l’employeur disposait au moment pertinent, il était raisonnablement fondé à décider qu’une évaluation de l’AAT était nécessaire pour établir si la fonctionnaire pouvait continuer à exercer les fonctions qui lui avaient été attribuées. La preuve n’établit pas que l’employeur a fabriqué ses raisons d’exiger l’évaluation de l’AAT. Il a continué de payer la fonctionnaire jusqu’à son licenciement, il a accueilli une série de demandes de prorogation de délai en vue d’obtenir son consentement et il a transmis certaines questions à Santé Canada pour elle, ce qui laisse croire qu’il a véritablement tenté de savoir si la conduite de la fonctionnaire s’expliquait par une raison médicale. Il convient en outre de garder à l’esprit qu’au moment de son licenciement, il restait environ six semaines à la durée de son emploi, et l’employeur n’aurait été nullement tenu d’en renouveler ou d’en prolonger la durée. Si l’employeur avait effectivement tenté de se débarrasser de la fonctionnaire, il aurait pu tout simplement attendre jusqu’à la fin du mandat de la fonctionnaire, puis la licencier dans une situation dans laquelle elle n’aurait eu absolument aucun recours.

205 La preuve et les témoignages ont soulevé une deuxième question, à savoir si la fonctionnaire a effectivement consenti à une évaluation de l’AAT, contrairement aux motifs cités pour son licenciement. Cette question est notamment fonction d’une interprétation des diverses versions de la formule de consentement qui ont été soumises à l’audience. L’employeur a présenté une version de la formule de consentement  signée par la fonctionnaire comportant la mention [traduction] « consentement non donné ». La fonctionnaire a fourni une version de la formule sans cette mention et a affirmé qu’elle ne figurait pas sur la version de la formule qu’elle avait télécopiée à l’employeur.

206 Plusieurs versions de cette formule ont été déposées comme pièces ou comme pièces jointes des pièces. Il s’agissait dans chaque cas de photocopies; en conséquence, on peut difficilement s’en remettre à certaines des méthodes habituelles d’examen des documents, comme la comparaison de l’encre de divers stylos. La mention [traduction] « consentement non donné », qui est manuscrite, ressemble certes à l’écriture reconnue par la fonctionnaire comme sienne, ce qui ne prouve toutefois aucunement à quel moment la mention est apparue sur la formule.

207 Quoi qu’il en soit, j’ai conclu que la présence ou l’absence de cette mention en particulier sur la version de la formule envoyée à l’employeur ne constitue pas un facteur déterminant. Mme Rivais a affirmé que la mention figurait sur la version qu’elle a vue. Toutefois, même sans cette mention, elle a soutenu que ce ne serait pas un consentement admissible du point de vue de Santé Canada. La formule comportait d’autres mentions indiquant que la fonctionnaire la fournissait contre son gré, que certaines choses ne lui avaient pas été expliquées, que Santé Canada ne disposait pas de son autorisation d’avoir accès à certains documents et qu’elle établirait quelle serait la date d’expiration du consentement dans l’avenir. Dans les circonstances, je conviens qu’il ne s’agit pas d’un consentement à l’évaluation de l’AAT, et il était clair que sans consentement, Santé Canada ne procéderait pas à l’évaluation.

208 La fonctionnaire a également mentionné qu’elle avait fait un effort de dernière minute pour satisfaire aux exigences de l’employeur en subissant une évaluation psychologique organisée par son médecin personnel. Mme Rivais a dit qu’elle ignorait que cette évaluation avait été effectuée. Rien ne prouve que l’agent négociateur (qui représentait encore la fonctionnaire à l’époque) ou la fonctionnaire ait déjà mentionné à l’employeur avant le 26 août (échéance de la formule de consentement) ou le 28 août (date de la lettre de licenciement) que l’évaluation était effectuée.

209 Le grief a été renvoyé à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 209 (1)b), qui permet le renvoi d’« une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire ». Afin que je puisse décider si j’ai la compétence pour juger si le licenciement de la fonctionnaire était injustifié, je dois décider si la décision de l’employeur de licencier la fonctionnaire revêtait le caractère d’une décision administrative ou s’il s’agissait d’une mesure disciplinaire déguisée en mesure administrative.

210 Dans Rosemary Hood c. Agence canadienne d’inspection des aliments, 2013 CRTFP 49, au paragraphe 120, l’arbitre de grief a décrit l’objet de la mesure disciplinaire prise un employeur comme « de punir et de corriger ». Dans Joy Theaker c. Administrateur général (ministère de la Justice), 2013 CRTFP 163, l’arbitre de grief a formulé le commentaire suivant au paragraphe 32 :

[…] Rien n’indique que l’employeur avait l’intention de la punir pour une conduite inacceptable et coupable. Tout comme dans Hood, l’employeur avait de bonnes raisons de demander d’autres renseignements médicaux de sorte que la réintégration dans le milieu de la fonctionnaire se déroule bien et avec succès.

211 Dans Theaker, il s’agissait de déterminer si la description d’une employée comme étant en congé non rémunéré parce qu’elle ne s’est pas conformée à une demande d’évaluation de l’AAT représentait une mesure disciplinaire. Dans Hood, le défaut de satisfaire à une telle demande a entraîné le licenciement de l’employée. Dans les deux cas, les arbitres de grief ont tenu compte de l’intention des employeurs respectifs et ont jugé que rien n’indiquait que les employeurs entendaient « punir » ou « corriger » les employées sur la base d’une inconduite. Ils ont plutôt pris des mesures administratives fondées sur une préoccupation légitime concernant l’aptitude des employées à exercer leurs fonctions.

212 J’ai tiré une conclusion similaire en l’espèce. Malgré le fait que dans la preuve documentaire et dans les témoignages qui m’ont été présentés à l’audience, il était fait mention des gestes posés par la fonctionnaire, je suis d’avis que ces mentions ne révélaient pas l’intention de l’employeur de punir la fonctionnaire. Les représentants de l’employeur ont déployé beaucoup d’efforts pour recueillir des données factuelles et pour comprendre les points de vue des principaux intervenants dans les événements du 8 mai. Ils ont conclu que la conduite adoptée par la fonctionnaire le 8 mai a soulevé certaines questions sur son bien-être, et qu’ils avaient besoin de renseignements complémentaires pour décider s’il existait une explication médicale justifiant ce qui semblait être un comportement singulier. Ils ont reconnu qu’ils ne possédaient pas de compétences médicales, et comme le médecin choisi par la fonctionnaire a indiqué qu’il n’était pas en mesure de procéder à l’évaluation, ils ont demandé à la fonctionnaire d’accepter une évaluation par un médecin de Santé Canada dans le but d’utiliser les renseignements médicaux pour décider si la fonctionnaire était apte du point de vue médical à exercer ses fonctions et si elle pourrait avoir besoin de quelques mesures d’adaptation que ce soit.

213 Si l’évaluation de l’AAT avait indiqué que la fonctionnaire était médicalement apte à exercer ses fonctions, l’employeur aurait certes pu étudier la question de savoir si sa conduite du 8 mai justifiait une mesure disciplinaire, mais de telles préoccupations spéculatives ne s’appliquent pas de façon pertinente aux gestes posés par l’employeur. Je conclus que la décision de l’employeur de licencier la fonctionnaire était une mesure administrative raisonnable et légitime au vu des renseignements dont il disposait à l’époque en réponse au défaut de la fonctionnaire de consentir à l’évaluation de l’AAT.

214 J’ai constaté que le grief a été renvoyé à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 209(1)b) de la Loi, et ne mentionnait pas l’alinéa 209(1)d). L’alinéa 209(1)d) prévoit le renvoi à l’arbitrage par un fonctionnaire d’un organisme distinct dans le cas suivant : « la rétrogradation ou le licenciement imposé pour toute raison autre qu’un manquement à la discipline ou une inconduite ». Bien que cette disposition ne constitue pas le fondement du renvoi du grief à l’arbitrage dans le présent cas, je suis d’avis que la disposition me confère la compétence de statuer sur la légitimité des gestes posés par l’employeur en contexte autre que disciplinaire. Je devrais alors, comme l’avocate de l’employeur l’a fait valoir, établir si les gestes de l’employeur étaient raisonnables dans les circonstances. Si tel avait été le fondement du renvoi à l’arbitrage, j’aurais conclu que la réponse de l’employeur était mesurée et raisonnable, et qu’ils ont pris des mesures légitimes qui s’inscrivaient dans leur pouvoir. Quoi qu’il en soit, le seul organisme distinct actuellement désigné aux fins de l’alinéa 209(1)d) est l’Agence canadienne d’inspection des aliments et non les Opérations des enquêtes statistiques.

215 En ce qui concerne le renvoi en vertu de l’alinéa 209(1)b), j’ai conclu qu’il existe un fondement probatoire justifiant l’affirmation de l’employeur selon laquelle le licenciement constituait une mesure administrative et que le fondement est raisonnable. Je juge par conséquent que je n’ai pas la compétence pour trancher le présent grief, et j’ordonne la fermeture du dossier.

216 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

217 Le grief est rejeté.

218 J’ordonne la fermeture du dossier.

Le 7 mars 2014.

Traduction de la CRTFP

Beth Bilson,
arbitre de grief

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