Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Les fonctionnaires s’estimant lésés étaient classifiés CR-03 et effectuaient la réception, l’ouverture et le tri du courrier - ils ont fait valoir que l’énoncé [traduction] <<former, entraîner et encadrer des collègues>> devrait être ajouté à leur description de travail - selon la description de travail, il n’y a pas de responsabilité permanente en matière de ressources humaines, mais chaque [traduction] <<[...] membre de l’équipe est responsable de faire une démonstration du travail et d’orienter les employés, nouveaux et actuels, en ce qui concerne les pratiques et les procédures de travail [...]>> - le défendeur a déclaré que le système de jumelage était déjà implicitement compris dans le libellé de la description de travail et que l’on ne devrait pas modifier la description - le témoin des fonctionnaires a déclaré qu’un formulaire était utilisé aux fins de l’approbation de la formation des nouveaux commis de soutien - il a été démontré en preuve que le titulaire d’un poste classifié CR-04, connu comme étant une [traduction] << personne-ressource>>, répondait sur place aux questions; le titre du poste a été changé pour celui de formateur/mentor - il y avait également un chef d’équipe sur place qui répondait aux questions - l’arbitre de grief a conclu que le formulaire n’avait été créé qu’après le dépôt du grief et qu’il avait été utilisé alors que le témoin des fonctionnaires travaillait à un niveau supérieur à titre de chef d’équipe - une description de travail: a)doit renfermer suffisamment d’information pour décrire avec précision ce que fait l’employé; b)ne doit pas omettre de mentionner une tâche ou responsabilité particulière que l’employé est par ailleurs tenu d’assumer; c)peut contenir des descriptions larges et génériques à condition que les exigences fondamentales soient satisfaites; d)n’a pas besoin de dresser une liste détaillée de toutes les activités exécutées dans le cadre d’une tâche donnée ou de la façon dont les activités sont effectuées - il incombait aux fonctionnaires de démontrer qu’il fallait modifier la description de travail - son libellé représente une description complète et exacte - les fonctions sont préétablies et détaillées, et un employé peut avoir besoin de poser des questions -le fait d’aider des employés de l’équipe ne fait pas en sorte que le travail soit l’équivalent de celui d’un entraîneur, d’un formateur ou d’un mentor - les points communs essentiels ne changent pas avec le temps, à savoir que les membres d’une équipe sont les membres d’une équipe. Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2014-03-26
  • Dossier:  567-02-74
  • Référence:  2014 CRTFP 38

Devant un arbitre de grief


ENTRE

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

fonctionnaire s'estimant lésé

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(ministère de l’Emploi et du Développement social)

employeur

Répertorié
Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor (ministère de l’Emploi et du Développement social)


Affaire concernant un grief collectif renvoyé à l’arbitrage


Devant:
Paul Love, arbitre de grief
Pour l’agent négociateur :
Amarkai Laryea, Alliance de la Fonction publique du Canada
Pour le défendeur :
Karen Clifford, avocate
Affaire entendue à Victoria (Colombie Britannique), les 11 et 12 décembre 2013. (Traduction de la CRTFP)

MOTIFS DE DÉCISION

I. Grief collectif renvoyé à l’arbitrage

1 Le 30 octobre 2008, l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) a déposé le présent grief au nom de Rachel Anderson et des autres personnes énumérées à l’annexe de la présente décision, qui occupaient toutes le poste de commis de soutien comportant la classification CR-03 (les « fonctionnaires s’estimant lésés », ci-après les « fonctionnaires »). Le grief déposé portait sur l’omission du Conseil du Trésor (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences, maintenant appelé le ministère de l’Emploi et du Développement social) (le « défendeur ») de leur fournir un exposé complet et courant des fonctions et des responsabilités en contravention avec l’article 54 de la convention collective conclue entre le Conseil du Trésor et l’AFPC pour le groupe Services des programmes et de l’administration qui est venue à échéance le 20 juin 2007 (la « convention collective »; pièce G-2). Il convient de noter que le formulaire Présentation d’un grief collectif (art. 215 de la LRTFP) renvoie à Mandi Schubert. Toutefois, l’agent négociateur renvoie, dans sa correspondance, au grief en indiquant que Rachel Anderson est la responsable ou la représentante des fonctionnaires.

2 Tous les fonctionnaires travaillent dans la salle du courrier au bureau de Service Canada situé à Victoria, en Colombie-Britannique – Services de base et liés au RPC des Services de Traitement et de Paiement de la région de l’Ouest du défendeur, appelés les « services de base ». Les fonctionnaires offrent des services de soutien des programmes relativement au Régime de pensions du Canada (RPC) et à la pension de la Sécurité de la vieillesse (PSV) à Victoria. Selon les niveaux de dotation, le bureau à Victoria compte de 65 à 85 employés.

3 Leur travail consiste à recevoir, à ouvrir et à trier le courrier. Divers tris sont utilisés pour s’assurer que les documents sont acheminés au bon endroit aux fins de traitement. Selon la rubrique « Résultats axés sur le service à la clientèle » dans la description de travail (pièce G-1, onglet 1, page 1), un CR-03 [traduction] « [o]ffre des services de soutien à l’exécution des programmes du Ministère et à la prestation des services à la clientèle ». Les activités principales sont décrites ci-dessous :

[Traduction]

Recevoir, sélectionner, classifier, trier et/ou inscrire le courrier initial ou les renseignements sur les clients pour le compte de divers programmes et services ministériels selon les procédures et les exigences prescrites.

Vérifier et authentifier les renseignements sur les clients et les documents à l’appui aux fins de la lisibilité, de l’exactitude et de l’intégralité par rapport aux procédures et aux exigences prescrites; demander les renseignements manquants ou les renseignements à l’appui auprès des clients ou des fonctionnaires d’un ministère ou les expédier de nouveau à l’autorité appropriée.

Sélectionner les observations tirées des données informatiques ou des programmes de rapprochement afin de déterminer si le dossier peut être classé ou acheminé au niveau approprié aux fins d’examen approfondi.

Tenir à jour et mettre à jour les bases de données et les systèmes de suivi : les fichiers de travail, les documents statistiques, les rapports et la correspondance.

Obtenir, saisir, tenir à jour et extraire les données et les documents liés aux demandes.

Faire fonctionner divers types d’équipement de bureau, p. ex. les affranchisseuses, les imprimantes rapides.

4 Le grief porte sur une description de travail du poste de commis de soutien CR-03, comportant le code de Classification nationale des professions (la « CNP ») 1411, qui est entrée en vigueur le 14 septembre 2006 (pièce G-1, onglet 1). La description actuelle suivante figure sous la rubrique « Gestion des ressources humaines » :

[Traduction]

Le travail consiste en ce qui suit :

Aucune responsabilité continue quant aux ressources humaines. Le travail est effectué en milieu d’équipe, dont chaque membre de l’équipe contribue à la réalisation des objectifs de l’unité de travail. Chaque membre de l’équipe est responsable de faire une démonstration du travail et d’orienter les employés, nouveaux et actuels, en ce qui concerne les pratiques et les procédures de travail, p. ex. le traitement des demandes ou des documents, la manipulation des documents classifiés, l’utilisation des systèmes de suivi informatiques ou de l’équipement de production de bureau et la contribution à l’amélioration de l’équipe au moyen d’une rétroaction constructive. Il s’agit d’une responsabilité partagée entre tous les membres de l’équipe.

[Je souligne]

5 Lors de l’audience, la seule question à trancher était celle de savoir si [traduction] « la formation et le mentorat de ses collègues » devraient être ajoutés à cette description de travail en tant qu’activité principale. Dans leur grief, les fonctionnaires ont demandé qu’un exposé des fonctions à jour et complet leur soit fourni. Le grief initial portait sur une demande visant à ajouter cinq (5) activités principales et 13 fonctions.

II. Audience

6 Patricia Martin, commis de la prestation de services, a témoigné pour le compte des fonctionnaires. Molly Sullivan, chef d’équipe, et Kate Compton, gestionnaire des services par intérim, ont témoigné pour le compte du défendeur.

7 Un livre des documents conjoint (pièce G-1) a été déposé, lequel comporte de nombreuses procédures que les commis de soutien doivent suivre dans l’exercice de leurs fonctions. Je remarque que les documents reçus doivent être organisés et transmis d’une façon uniforme; autrement, le défendeur ne peut pas offrir ses programmes et services aux Canadiens et aux Canadiennes.

III. Résumé de la preuve

8 Le poste de commis de soutien est le poste de commis de débutant auprès du défendeur. Avec le temps, d’autres employés sont embauchés. Par conséquent, certains commis de soutien sont plus chevronnés que d’autres. Ce grief porte principalement sur l’interaction entre les commis de soutien existants à l’effectif et les nouveaux commis de soutien (les « nouveaux employés »). Les nouveaux employés doivent être informés de tout ce qui est nécessaire pour devenir entièrement compétents dans l’exercice de leurs fonctions. Il ne fait aucun doute que le fait d’aider les nouveaux employés impose un fardeau aux commis de soutien plus chevronnés.

9 Les tâches attribuées aux commis de soutien exigent qu’ils agissent de façon uniforme, conformément aux procédures communes. Des exemples des procédures, y compris le Manuel des centres de traitement du RPC et de la SV (pièce G-1, onglet 8, page 12), des extraits de la procédure de recherche de fichier (pièce G-1, onglet 9), une description d’où envoyer les documents reçus (pièce G-1, onglet 10), un document intitulé Comment trier les combinaisons de demandes (pièce G-1, onglet 11), un manuel portant sur le Système de transmission de l’inventaire de lots de travaux (TILT) (pièce G-1, onglet 12) et diverses instructions pour créer des fichiers et exercer les fonctions liées au classement (pièce G-1, onglets 13 à 15), entre autres, m’ont été fournis. Il n’existe que peu de possibilités de faire preuve de créativité dans l’exécution de ces tâches, mais elles exigent une attention minutieuse pour les détails. Il ne fait aucun doute qu’il faut du temps pour que les nouveaux employés deviennent entièrement compétents et à l’aise dans l’exercice de toutes ces tâches administratives.

10 Tous les commis de soutien relèvent des chefs d’équipe, classifiés au niveau PM-03, qui sont situés près de leur lieu de travail et qui relèvent du gestionnaire des services.

11 Le défendeur a fourni la description de travail du chef d’équipe, code de la CNP 1228, en vigueur depuis le 14 septembre 2006 (pièce E-2). Le poste de chef d’équipe est un poste de supervision. La description de travail prévoit, en partie, ce qui suit : [traduction] « […] Les chefs d’équipe pourraient devoir offrir une formation sur les outils ou les systèmes qui ne font pas partie de la formation officielle (p. ex. former les nouveaux employés sur la façon d’utiliser le système de courrier électronique, le système de suivi des clients, Internet, l’intranet, etc.). »

12 Mme Martin a témoigné pour le compte des fonctionnaires. Elle a commencé sa carrière en août 2007 auprès d’un secteur différent du gouvernement fédéral. Elle travaille actuellement à la section de Service Canada du défendeur situé dans le Centre de traitement du régime de pensions du Canada et de la sécurité de la vieillesse à Victoria, à titre de commis de soutien à la prestation de services CR-04. Elle est employée aux services de base à titre de commis de soutien depuis mars 2008. Elle a occupé ce poste jusqu’à ce qu’elle devienne une chef d’équipe classifiée CR-04 en janvier 2009. Elle est la présidente de la section locale de l’AFPC.

13 Mme Martin a expliqué avec certains détails les fonctions d’un commis de soutien relativement à la salle du courrier et de la TILT. Elle a indiqué que, jusqu’en 2012, l’année où un bureau de travail était attribué aux commis de soutien, ces derniers travaillaient dans un espace ouvert dans la salle du courrier. Le courrier était trié par les commis de soutien et il faisait ensuite l’objet d’un tri minutieux par les commis de soutien de l’unité de la TILT. À l’origine, il s’agissait de différentes fonctions, mais elles ont été fusionnées au cours de 2011. Mme Martin a travaillé en tant que CR-03 et, plus tard, en tant que CR-04. Le poste de CR-04 était appelé un « chef d’équipe » avant qu’il ne soit renommé. Je remarque que Mme Martin a utilisé l’expression « CR-03 principal » ou « commis de soutien principal » dans son témoignage. Il ne s’agit pas d’une classification distincte d’employés, mais simplement d’un renvoi à un commis de soutien plus chevronné. Plutôt que d’utiliser l’expression « un commis de soutien plus chevronné », j’ai renvoyé aux commis de soutien plus chevronnés à l’aide de l’expression utilisée par Mme Martin.

14 À titre de CR-03 et de CR-04, Mme Martin participait à la mise à jour de certaines des procédures de manipulation des traitements des documents – par exemple, le Manuel des centres de traitement du RPC et de la SV (pièce G-1, onglet 8). Elle a indiqué qu’un chef d’équipe lui affectait de nouveaux employés lorsqu’elle était un CR-03 et que, en général, elle travaillait avec eux pendant deux ou trois mois, jusqu’à ce qu’ils soient entièrement formés relativement aux divers correspondances et documents reçus. Elle a affirmé qu’à un moment donné alors qu’elle était une chef d’équipe, elle a créé, à la demande de son chef d’équipe, un document qui a été utilisé pour suivre la formation et pour vérifier lorsqu’elle était achevée. Mme Martin a fait valoir qu’elle revérifiait le travail des nouveaux employés en ce qui concerne l’ouverture du courrier, elle vérifiait s’il avait été trié correctement et si les articles étaient acheminés aux bons secteurs dans le cadre de la TILT. Elle expliquait aux nouveaux employés les conséquences de la perte d’un fichier. Lorsqu’elle croyait qu’un nouvel employé pouvait effectuer le travail, elle signait une feuille. Elle a indiqué que trois ou quatre commis de soutien principaux étaient responsables de former les nouveaux employés. Elle n’a jamais suivi une formation spéciale sur la façon de former les employés et elle n’a fait l’objet d’aucune évaluation et n’a reçu aucune rétroaction sur la formation qu’elle a offerte aux autres. Elle a affirmé que, lorsqu’elle était une chef d’équipe, elle offrait la formation si aucun formateur n’était disponible. Dans le cadre de son témoignage lors de son contre-interrogatoire, Mme Martin a indiqué que des procédures devaient être suivies pour ouvrir le courrier, pour le codage à barre aux fins de suivi ainsi que pour trier et traiter le courrier. On s’attendait à ce que les commis de soutien connaissent le contenu des divers manuels. Selon son témoignage, lorsqu’elle occupait le poste de chef d’équipe (CR-04), elle tenait des réunions le matin avec les commis de soutien, elle établissait les priorités indiquées par le chef d’équipe ou le gestionnaire, elle mutait les gens aux postes au besoin, elle répondait aux questions et elle rédigeait des rapports. Elle a reconnu que le titre du poste CR-04 a été modifié et est devenu un « Coach et mentor de la TILT ». Mme Martin a indiqué qu’elle avait suivi une formation sur la TILT qui n’était pas donnée par un commis de soutien. De plus, selon son témoignage, elle n’avait pas participé aux évaluations du rendement officielles d’autres commis de soutien; elle n’avait pas non plus ajouté de commentaires au dossier personnel d’un employé ni à sa feuille d’activité d’apprentissage (pièce E-1). Mme Martin a affirmé qu’elle savait que, à l’heure actuelle, les commis de soutien suivent une formation plus officielle offerte par l’unité d’expertise opérationnelle du défendeur.

15 Dans le cadre du réinterrogatoire, Mme Martin a indiqué que la TILT a été mise en œuvre et qu’elle a suivi une formation sur cette dernière en 2010. Elle a affirmé qu’à ce moment-là, les sections du courrier et de la TILT étaient des sections distinctes.

16 Mme Sullivan, la gestionnaire des services par intérim au moment de l’audience, s’est jointe au défendeur à titre de commis de soutien en mars 2006 au bureau de Victoria. Après environ 2,5 mois, elle est devenue une agente de prestation de services, classifiée CR-04, aux fins de l’attribution des prestations du RPC. Elle a ensuite travaillé en tant qu’agente des prestations et traitait des questions liées à la SV. Elle est devenue une chef d’équipe, classifiée PM-03, en juin 2008 et elle a commencé à agir à titre de gestionnaire des services en juillet 2010. Elle connaît les fonctions de commis de soutien et elle a participé à la rédaction de certaines procédures. Elle a affirmé que la structure de prestation est la même que celle en vigueur en 2008, mais que le nom d’un grand nombre des personnes qui y participaient a changé.

17  Mme Sullivan a témoigné qu’aucun commis de soutien n’agissait à titre de chef d’équipe au bureau de Victoria. Lorsqu’elle travaillait à titre d’agente de prestation de services, elle était située à 10 secondes de marche de la salle du courrier. Un chef d’équipe se trouve à environ 30 secondes de marche de la salle du courrier. Elle interagit avec les chefs d’équipe à maintes reprises chaque jour. Dans le cadre de son poste actuel de gestionnaire des services, elle communique souvent avec les commis de soutien, mais le chef d’équipe fournit l’orientation quotidienne.

18 Mme Sullivan a expliqué que, lorsqu’un commis de soutien est porté à l’effectif, un chef d’équipe élabore un horaire et l’accompagnera aux diverses aires de travail et lui montrera ce qu’il doit faire et comment le faire. Tous les commis de soutien ont un accès électronique aux divers manuels et aux diverses procédures et des copies papier sont conservées dans la salle du courrier, ainsi que dans le bureau du chef d’équipe et du coach de la TILT. Un nouvel employé n’est jamais seul; les autres employés sont toujours à proximité. Le chef d’équipe donne des directives écrites au nouvel employé et il est disponible pour répondre à toute question. Il vérifiera souvent son progrès. Le nouvel employé peut également poser des questions aux employés chevronnés. Des séances de formation spéciales sont tenues par l’unité d’expertise opérationnelle dans le cadre de séances de groupe en salle de classe.

19 Mme Sullivan a formulé des commentaires au sujet du témoignage de Mme Martin portant sur la formation. Mme Sullivan a indiqué que le processus a changé. Mme Sullivan a affirmé que, lorsqu’elle a suivi sa formation, un manuel et une liste de ses fonctions en matière de tri lui étaient donnés et elle a été informée de la personne à qui elle pouvait poser des questions ce jour-là. Elle ouvrait et triait le courrier. Chaque fois qu’elle posait une question, on lui disait de consulter le manuel. Elle a fait différents types de tri chaque semaine.

20 Mme Sullivan a indiqué que le travail d’un commis de soutien est facilement vérifié, puisque chaque employé a un timbre personnalisé qui comporte une date et un numéro unique qui est apposé aux documents. Elle a affirmé que, si elle commettait une erreur, cette erreur était portée à l’attention du chef d’équipe qui en discutait avec elle.

21  Mme Sullivan a témoigné qu’entre 2010 et 2012, un collègue était affecté à chaque nouvel employé à titre de compagnon en vue de répondre à ses questions.

22 En 2012, le défendeur a établi un poste de coach ou mentor de la TILT. Il s’agit d’un poste au niveau CR-04. La personne occupant ce poste donne des directives à un nombre important d’employés et elle répond aux questions détaillées liées aux procédures. À l’heure actuelle, la formation consiste en une formation de deux jours sur le courrier et de deux jours sur la TILT en salle de classe. Le coach ou mentor de la TILT mène également des enquêtes spéciales et des enquêtes quant au contrôle de la qualité.

23 Mme Sullivan a indiqué que le chef d’équipe a un rôle très interactif à l’égard des commis de soutien et qu’il offre constamment des conseils quotidiens et répond aux questions liées aux procédures.

24 Mme Sullivan n’a pas souscrit à la qualification des commis de soutien à titre de formatrice. Le défendeur ne les a jamais appelés des formateurs. Ils ne sont pas responsables de s’assurer que les autres commis de soutien connaissent leurs fonctions; cette responsabilité relève des chefs d’équipe.

25 Mme Sullivan a comparé les fonctions d’un commis de soutien à celles d’un chef d’équipe (pièce E-2). Voici les fonctions d’un chef d’équipe et non d’un commis de soutien :

  • il dirige et coache les équipes selon l’un des résultats axés sur le service à la clientèle figurant à sa description de travail;
  • ses activités principales comprennent la supervision d’une équipe de travail, l’attribution et la surveillance du travail et la mise en œuvre de mesures correctives, la promotion de l’apprentissage et du perfectionnement de l’équipe, l’appui et la surveillance du rendement des employés et la mise en œuvre d’améliorations.

26 Dans le cadre de son contre-interrogatoire, Mme Sullivan a expliqué que le système de jumelage permet de s’assurer qu’il y a une personne à proximité d’un nouvel employé afin de répondre à ses questions. Lorsqu’elle travaillait à titre de commis de soutien, un employé à proximité lui indiquait souvent de consulter simplement le manuel. Elle a indiqué que son expérience en formation ne correspondait aucunement à la description donnée par Mme Martin. Elle a reconnu qu’à titre d’agent des prestations, elle avait un certain contact avec les personnes dans la salle du courrier, mais qu’elle n’avait aucune connaissance de la formation à l’intention des commis de soutien, sauf si elle avait un ami dans la salle du courrier. Elle a indiqué qu’à titre d’agent des prestations, elle avait un poste de travail précis, qu’elle traitait des questions liées à un numéro d’assurance sociale et qu’elle n’avait pas beaucoup de contact avec d’autres employés, autres que dans la salle du courrier où elle devait aller porter du courrier et des documents chaque jour aux fins de classement. Elle ne pouvait rien dire au sujet des pratiques de formation en place après qu’elle a cessé son rôle de commis de soutien et avant qu’elle ne revienne à titre de chef d’équipe.

27  Mme Compton a témoigné qu’elle était la gestionnaire des services au bureau de Victoria de septembre 2008 jusqu’en décembre 2010. Elle a indiqué que, lorsqu’elle est arrivée, un formulaire devait être utilisé. Elle s’attendait à ce que le chef d’équipe mobilise et forme les nouveaux employés. Lorsqu’elle est arrivée au bureau de Victoria, il existait un poste de chef d’équipe, classifié CR-04. Elle estimait que le poste CR-04 devait être modifié afin de devenir le poste de coach ou mentor. Elle était d’avis qu’un coach ou mentor fournissait des connaissances supplémentaires au nouveau commis de soutien afin que ce dernier ne soit pas obligé de se fier à ses collègues plus chevronnés.

28 Mme Compton a indiqué que, même si le poste de commis de soutien est complexe, il s’agit d’une habileté et son élément concernant les connaissances était acquis en examinant les ressources documentaires qui sont claires et complètes. Elle n’a jamais vu un document qui exige qu’un commis de soutien principal approuve le travail d’un nouvel employé. Elle a vu un formulaire qui comportait une liste de toutes les tâches qu’un commis entièrement formé devait exécuter.

29 Dans le cadre de son contre-interrogatoire, Mme Compton a indiqué que le système de jumelage était en place lorsqu’elle est arrivée et qu’il s’agissait d’une pratique commune au niveau de commis où il n’existait aucun programme de formation officielle. Le nouvel employé pouvait poser des questions aux employés principaux qui travaillaient dans les environs. Selon son témoignage, une personne plus chevronnée n’était pas un formateur.

IV. Résumé de l’argumentation

A. Pour les fonctionnaires s’estimant lésés   

30 Les fonctionnaires ont fait valoir qu’il leur incombait de prouver que l’exposé des fonctions n’était ni complet ni courant. Ils ont invoqué la clause 54.01 de la convention collective, laquelle est ainsi rédigée :

54.01 Sur demande écrite, l’employé-e reçoit un exposé complet et courant de ses fonctions et responsabilités, y compris le niveau de classification du poste et, le cas échéant, la cote numérique attribuée par facteur à son poste, ainsi qu’un organigramme décrivant le classement de son poste dans l’organisation.

31 Les fonctionnaires ont indiqué que la description de travail (pièce G-1, onglet 1) ne comporte pas une description des fonctions complète et courante.

32 Les fonctionnaires ont invoqué Jennings et Myers c. Conseil du Trésor (ministère des Pêches et des Océans), 2011 CRTFP 20, au paragr. 52, et ils ont indiqué qu’il s’agissait de savoir si la description de travail nationale générique était complète et courante et si, dans la négative, quels termes et expressions devaient être ajoutés pour qu’elle soit complète et courante.

33 Les fonctionnaires ont indiqué qu’il est important d’examiner la signification des termes « formation », « coaching » et « mentorat ». Les fonctions différentes suivantes ne figurent pas dans la description de travail : [traduction] « […] chaque membre […] est responsable de faire une démonstration du travail et d’orienter les employés, nouveaux et actuels […] ».

34 Les fonctionnaires ont invoqué les définitions suivantes tirées de la version électronique du dictionnaire Merriam-Webster Dictionary :

[Traduction]

[…]

formation […]

: un processus à l’aide duquel une personne apprend les habiletés nécessaires aux fins d’un art, d’une profession ou d’un emploi

[…]

coach […]

: une personne qui enseigne à un athlète ou à un interprète et qui le forme

: une personne qui enseigne aux membres d’une équipe sportive et qui les forme et qui prend des décisions quant à la façon dont l’équipe joue pendant les parties

: un enseignant privé qui donne des leçons à une personne portant sur un sujet particulier

[…]

mentor […]

: une personne qui enseigne à une personne moins chevronnée qui est souvent moins âgée ou qui lui donne de l’aide et des conseils

[…]

35 Les fonctionnaires ont soutenu que le lien entre ces concepts consiste en le fait d’enseigner à une personne ayant moins d’habiletés ou d’expérience.

36 Ces définitions devraient être comparées aux définitions des termes « démonstration » et « orientation » qui figurent dans la description de travail. Ces définitions figurent ci-dessous (également tirées de la version électronique du dictionnaire Merriam-Webster Dictionary) :

[Traduction]

démonstration […]

: un acte consistant à démontrer quelque chose à une personne quant à la façon d’utiliser ou d’effectuer quelque chose

: un événement où les personnes se réunissent afin de démontrer qu’ils appuient ou qu’ils s’opposent à une chose ou à une personne

: un acte consistant à démontrer ou à prouver quelque chose

[…]

orientation […]

: une aide ou un conseil qui indique ce qui doit être fait : l’acte ou le processus de guider une personne ou une chose

: le processus de contrôler le vol d’un objet (comme un missile)

37 La distinction que les fonctionnaires ont faite entre la formation, le coaching, le mentorat et la démonstration consiste en l’enseignement ou en la « façon » et la « raison » de faire quelque chose.

38 Dans le cadre de son témoignage, Mme Martin a expliqué que les nouveaux employés aux postes CR-03 étaient jumelés avec des employés plus chevronnés. Elle a expliqué que divers aspects d’un formulaire qui existait à ce moment-là devaient être paraphés afin d’indiquer que l’employé avait suivi une formation relativement à certaines tâches, lequel était ensuite utilisé aux fins d’établissement de l’horaire.

39 Mme Martin a indiqué qu’elle était l’un des trois ou quatre employés qui formaient la plupart des nouveaux employés. Ces « formateurs » ne suivaient aucune formation officielle sur la façon de mener la formation, mais qu’il s’agissait d’une habileté et d’une capacité qu’ils avaient acquises dans l’exercice quotidien de leur emploi.

40 Selon le témoignage de Mme Martin, la description de travail était incomplète, puisqu’elle n’indiquait pas le fait qu’elle formait les nouveaux employés.

41 Mme Sullivan, le témoin du défendeur, n’a occupé le poste de CR-03 que brièvement et ne pouvait pas commenter au sujet des pratiques en place entre 2008 et 2010.

42 Mme Sullivan a indiqué que les employés CR-03 étaient consultés dans le cadre du processus et des trousses de formation ont été créées en 2012 en raison de ces consultations.

43  Mme Compton a témoigné qu’elle se souvenait qu’un formulaire était utilisé, mais elle ne se souvenait pas qu’un CR-03 le signe. Elle a également indiqué le jumelage des nouveaux employés avec des commis plus chevronnés, semblable à un système de jumelage décrit par Mme Sullivan. Les fonctionnaires ont invoqué Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences), 2012 CRTFP 86, aux paragr. 10 et 11, où une distinction est faite entre l’orientation et la formation en cours d’emploi dans le cadre du témoignage des fonctionnaires s’estimant lésés. Il existe une différence entre l’orientation écrite et une formation en cours d’emploi dans le cadre d’un système de jumelage et le système en place pendant la période pertinente ressemble à un système de jumelage.

44 Les fonctionnaires ont soutenu que le système de jumelage diffère de ce qui est prévu dans la description de travail sous la rubrique « Gestion des ressources humaines ». Cette section met l’accent sur le travail d’équipe et la collaboration quotidienne, ce qui diffère légèrement d’une formation en cours d’emploi officielle avec un compagnon qui montre, démontre et guide le nouvel employé quant à ce qu’il doit faire et lui enseigne et explique la « raison » des tâches.

45 Les manuels utilisés par les commis de soutien sont très épais. Les nouveaux employés doivent avoir une autre formation que simplement celle de manipuler des documents comptant des centaines de pages.

46 La formation plus officielle décrite dans le cadre du témoignage de Mme Sullivan et le coaching et le mentorat offerts par le coach ou mentor de la TILT a eu lieu à un moment donné après 2010. Le témoignage de Mme Sullivan n’indiquait pas exactement la formation des nouveaux employés, surtout entre 2008 et 2010 où un commis de soutien principal était jumelé à un nouvel employé aux fins d’une formation en cours d’emploi.

47 Les fonctionnaires ont invoqué les principes généraux énumérés dans Jennings et Myers et ils ont indiqué ce qui suit :

  • la description de travail n’indique pas de façon exacte le jumelage ou le système de jumelage en place pour former les nouveaux employés;
  • les termes « démonstration » et « orientation » n’indiquent pas de façon exacte le rôle des employés CR-03 en ce qui concerne la formation des nouveaux employés;
  • la formation en cours d’emploi et l’orientation constituent des fonctions distinctes et différentes;
  • le fait que les employés CR-03 n’exerçaient plus les fonctions de formation après 2010 de la même manière qu’ils le faisaient avant ne signifie pas que la « formation », le « coaching » et le « mentorat » devraient être exclus de la description de travail, dont la date est du 14 septembre 2006.

48 Un employeur ne peut pas utiliser un libellé large ou vague qui ne décrit pas entièrement le travail d’un employé afin de se soustraire de son obligation de fournir un exposé des fonctions complet; voir Carter c. Conseil du Trésor (ministère des Pêches et des Océans), 2011 CRTFP 89.

49 Dans Alliance de la Fonction publique du Canada, le système de jumelage a été reconnu comme faisant partie du rôle de coaching et l’arbitre de grief a ordonné qu’il soit ajouté à une description de travail générique pour les agents des services à la clientèle employés par le Bureau du Commissaire des Tribunaux de révision et du RPC et de la SV.

B. Pour le défendeur

50 Le défendeur a soutenu que l’expression « démonstration du travail et d’orienter » englobe le système de jumelage. Le fait que Mme Martin pouvait avoir exercé des fonctions au-delà des fonctions d’un CR-03 et avoir exécuté le travail d’un coach ou mentor CR-04 ou d’un chef d’équipe PM-03 ne devrait pas faire l’objet d’un grief visant la description de travail, mais d’un grief pour rémunération d’intérim.

51 Les fonctions d’un commis de soutien sont, en grande partie, établies; rien n’est laissé au hasard. Par exemple, le Manuel des centres de traitement du RPC et de la SV (pièce G-1, onglet 8, page 12), indique aux employés où placer certaines feuilles ou comment créer un dossier ou le placer dans une pochette et, si une chose exceptionnelle se produit, le manuel leur indique de poser des questions à leur chef d’équipe. Les références figurant partout dans les manuels indiquent aux commis de soutien de poser des questions au chef d’équipe. Selon les éléments de preuve, les chefs d’équipe et les commis de soutien travaillent à proximité géographique, à seulement quelques pas les uns des autres.

52 En l’espèce, il n’existe aucune preuve convaincante selon laquelle des éléments nécessaires sont manquants dans la description de travail. L’arbitre de grief ne devrait pas la modifier simplement parce que trois ou quatre commis de soutien parmi un nombre très important étaient des compagnons en 2008. Le grief comporte un contexte temporel. Le libellé figurant dans la description de travail doit s’appliquer à tous les commis de soutien et non pas seulement à quelques-uns.

53 Le défendeur a fait une distinction de l’affaire Alliance de la Fonction publique du Canada au motif que la description de travail des employés du tribunal exigeait qu’ils demandent d’abord de l’aide de leurs collègues, alors que les commis de soutien en l’espèce devaient demander l’aide de leur chef d’équipe.

54 Le défendeur a également distingué Carter sur la base des faits essentiels de ce cas – concernant des armes à feu – qui sont plus spécialisés qu’un outil.

55 Le fait d’aider les collègues juniors dans le cadre d’un système de jumelage constitue une tâche si courante et fondamentale qu’il n’exige pas une mention particulière dans une description de travail; voir Taylor c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Droits et accise), dossier de la CRTFP 166-02-20396 (19901221). Le fait de montrer à de nouveaux collègues comment faire le travail ne fait pas en sorte qu’il s’agisse d’une formation; il s’agit de lui donner une démonstration et de l’orienter. Les commis de soutien ne sont pas des formateurs. Le texte actuel figurant dans la description de travail suffit pour décrire les fonctions exercées au lieu de travail.

56 Le défendeur a fait valoir qu’il incombe aux fonctionnaires de prouver que la description de travail ne constitue pas un exposé des fonctions courant et complet. Deux cas récents permettent de résumer le droit : Wilcox c. Conseil du Trésor (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences), 2013 CRTFP 145, et Suric c. Conseil du Trésor (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences), 2013 CRTFP 44. Un arbitre de grief ne devrait pas corriger une description de travail tant qu’elle décrit de manière générale les fonctions pertinentes; voir Bowen et al. c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2013 CRTFP 87. La décision Belliveau et Sinnesael c. Conseil du Trésor (ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire), 2013 CRTFP 69, définit le terme « courant » comme une période près de l’époque du grief. Le défendeur indique qu’il existe des difficultés temporelles en l’espèce, puisque le grief déposé en 2008 fait renvoi à la description de 2006, mais les éléments de preuve sont déposés en 2013. Le défendeur indique que l’argument temporel est fondé en partie sur le formulaire utilisé par Mme Martin qui n’existait pas au moment du dépôt du grief et qui n’est pas actuellement utilisé. L’argument principal consiste en la question de savoir si le système de jumelage utilisé va au-delà du texte de la description nationale générique. Le défendeur indique que le système de jumelage est visé par les termes « démonstration » et « d’orienter » les employés nouveaux et existants.

57  Le recueil de jurisprudence et de doctrine du défendeur comprend d’autres cas qui n’ont pas été expressément invoqués, mais qui semblent comporter des principes généraux ou des exemples. Il s’agit de Fedun et autres c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Impôt), dossiers de la CRTFP 166-2-28278 à 28288 (19980611); Hughes c. Conseil du Trésor du Canada (Ressources naturelles Canada), 2000 CRTFP 69; Jaremy et al. c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Accise, Douanes et Impôt), 2000 CRTFP 59; Kerswill c. Conseil du Trésor (Ressources naturelles Canada), 2000 CRTFP 91; Parker et al. c. Conseil du Trésor (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences), 2009 CRTFP 109.

C. Réplique des fonctionnaires s’estimant lésés

58 En ce qui concerne l’argument du défendeur selon lequel un grief pour rémunération d’intérim devrait être produit, les fonctionnaires ont affirmé que la formation faisait partie des fonctions d’un CR-03 et qu’elle devrait être reconnue dans une description de travail.

59 Certains des documents invoqués par le défendeur – plus particulièrement les rôles des chefs d’équipe et du coach ou mentor de la TILT – renvoient à l’interaction avec les employés permanents qui est distincte des exigences de formation spéciale des nouveaux employés.

V. Motifs

60 En l’espèce, il incombe aux fonctionnaires d’établir le bien-fondé de leurs arguments selon la prépondérance des probabilités. Le témoignage de Mme Martin et de Mme Sullivan au sujet de la formation en cours d’emploi comportait une nuance et l’agente de la négociation me demande de rejeter le témoignage de Mme Sullivan. Je refuse de le faire. Tous les témoins semblent avoir fait de leur mieux pour répondre attentivement aux questions. Je n’ai aucune préoccupation quant à la crédibilité ou à la fiabilité de leur témoignage. Essentiellement, selon le témoignage de Mme Martin ou de Mme Sullivan, la tâche d’un nouveau CR-03 concernait l’exposition au tri du courrier, aux tâches très prescrites sans réflexion créative ou jugement et la capacité de poser des questions à un chef d’équipe ou à un coach et mentor de la TILT ou à un employé plus chevronné qui exécute le même travail. Je remarque une certaine confusion dans le témoignage de Mme Martin entre ses fonctions à titre de chef d’équipe et de commis de soutien. Je remarque qu’elle a témoigné au sujet de ses fonctions à titre de commis de soutien et de chef d’équipe, mais il est évident qu’elle n’était une commis de soutien que de mars 2008 à la fin de janvier 2009, date à laquelle elle est devenue une chef d’équipe.

61 Un élément clé de son témoignage portait sur un formulaire que Mme Martin a indiqué qu’un commis de soutien plus chevronné utilisait pour vérifier le travail d’un commis de soutien plus junior. Je remarque que le formulaire que Mme Martin a indiqué avoir utilisé n’a pas été déposé en tant que pièce. Le témoignage comportait une certaine discussion sur le fait que les chefs d’équipe utilisaient le formulaire aux fins d’établissement d’horaire afin de s’assurer que les commis de soutien dont l’horaire prévoit un certain type de tri avaient été formés relativement à ce dernier. Le formulaire n’était pas utilisé lorsque Mme Sullivan était une commis de soutien ni lorsqu’elle est devenue une chef d’équipe en 2010.

62 On doit se souvenir du fait que Mme Martin a indiqué avoir créé le formulaire selon les instructions de son chef d’équipe lorsqu’elle était une chef d’équipe. Cela signifie qu’elle a créé le formulaire à un moment donné après janvier 2009. Je remarque que le grief a été déposé le 29 octobre 2008. Au moment du dépôt du grief, le formulaire n’était pas utilisé aux fins de formation des commis de soutien. Par conséquent, Mme Martin doit avoir utilisé le formulaire dans le cadre de son rôle de chef d’équipe et non de commis de soutien offrant une formation à d’autres commis de soutien.

63 Le droit dans ce domaine ne prête pas à controverse, mais je remarque que son application peut entraîner des difficultés. Voici les principes pertinents, tels qu’ils ont été établis dans Jennings et Myers, au paragr. 52 :

  • une description de travail doit renfermer suffisamment de renseignements pour rendre compte précisément de ce que fait un employé;
  • elle ne doit pas omettre de mentionner une fonction ou responsabilité particulière que le fonctionnaire doit remplir;
  • une description de travail comprenant des descriptions générales et génériques est acceptable dans la mesure où elle satisfait à cette exigence fondamentale;
  • il n’est pas indispensable qu’une description de travail comprenne une liste détaillée de toutes les activités exercées dans le cadre d’une tâche particulière.

64 Je dois décider si la description de travail nationale générique de 2006 comporte un exposé complet et courant des fonctions des fonctionnaires et décrit l’interaction des nouveaux employés avec les employés existants.

65 Je remarque que le terme « courant » indique un élément temporel et la jurisprudence récente de la CRTFP suggère que ce terme doit être rapproché à la période à laquelle la demande de description de travail a été présentée : Belliveau et Sinnesael. L’élément temporel est important à l’égard des parties pour divers motifs. L’agent négociateur soutient que le fonctionnaire a droit à la description, même si les fonctions ont été modifiées, et le défendeur met essentiellement l’accent sur le moment auquel le grief est entendu. Il semble que les méthodes de formation du défendeur ont changé avec le temps, passant d’un accent mis sur la formation en cours d’emploi à une formation en salle de classe, au mentorat par un chef d’équipe ou un coach et mentor de la TILT, mais il existe un certain élément commun au cours de ces périodes – soit les membres de l’équipe aident les membres de l’équipe. Il s’agit clairement d’une démonstration et d’une orientation. Tel que cela a été mentionné dans mes motifs ci-dessus, je remarque que le témoignage de Mme Martin comporte une certaine confusion temporelle lorsqu’elle discute de l’utilisation d’un formulaire qu’elle a créé après le dépôt du grief et qui n’existe plus ou qui n’est plus utilisé par l’employeur et qui ne m’a pas été soumis en preuve. Il s’agit d’un élément clé de l’argumentation de l’agent négociateur.

66 La description est ainsi rédigée :

[Traduction]

[…]

Aucune responsabilité continue quant aux ressources humaines. Le travail est effectué en milieu d’équipe, dont chaque membre de l’équipe contribue à la réalisation des objectifs de l’unité de travail. Chaque membre de l’équipe est responsable de faire une démonstration du travail et d’orienter les employés, nouveaux et actuels, en ce qui concerne les pratiques et les procédures de travail, p. ex. le traitement des demandes ou des documents, la manipulation des documents classifiés, l’utilisation des systèmes de suivi informatiques ou de l’équipement de production de bureau et la contribution à l’amélioration de l’équipe au moyen d’une rétroaction constructive. Il s’agit d’une responsabilité partagée entre tous les membres de l’équipe.

[Je souligne]

67 Je suis d’avis que le texte constitue une description complète et exacte. La fonction du courrier est importante. Ces employés travaillent dans le cadre d’une équipe. Les membres d’une équipe s’entraident et, souvent, les employés à long terme aident les nouveaux employés. Je suis d’avis que l’emploi est assez prescrit et détaillé et qu’il pourrait être nécessaire qu’un employé pose des questions. Il existe une multitude de questions liées à la fonction de tri du poste.

68 À l’heure actuelle, un coach et mentor de la TILT est disponible, ainsi que les chefs d’équipe, pour répondre à la plupart des questions. Toutefois, selon la réalité pratique, un nouvel employé peut fort bien poser des questions à un employé plus chevronné qui travaille à proximité. Les fonctionnaires pourraient interpréter l’aide offerte à un membre moins chevronné comme une formation, un coaching ou un mentorat. Toutefois, d’un point de vue objectif, je suis d’avis que le fait qu’un collègue pose des questions ne fait pas en sorte que la personne qui répond aux questions assume le rôle de formateur, de coach ou de mentor et le fait de lui donner des réponses ne signifie pas qu’un commis de soutien plus chevronné offre une formation, un coaching ou un mentorat au nouvel employé.

69 Selon le témoignage de Mme Compton, le défendeur a créé le poste de coach et mentorat de la TILT qui, conjointement avec la capacité de communiquer avec un chef d’équipe, offre la formation, le coaching et le mentorat des nouveaux employés. Selon son témoignage, Mme Compton était d’avis qu’un poste de coach ou mentor plus axé était nécessaire au niveau CR-04. Dans le passé, cela faisait partie des fonctions du chef d’équipe. Par exemple, Mme Martin a témoigné qu’un élément de ses fonctions à titre de chef d’équipe consistait à répondre aux questions et elle a reconnu que le poste a été modifié à celui d’un coach ou mentor. Mme Sullivan a témoigné que les chefs d’équipe étaient à 30 secondes de marche de la salle du courrier. Même si Mme Compton a reconnu que le coach et mentor de la TILT compenserait le fait que les nouveaux employés se fient à leurs collègues plus chevronnés, je n’interprète pas son témoignage comme indiquant que le travail d’un coach ou mentor CR-04 et celui des commis de soutien principaux étaient identiques. Mme Compton a indiqué que, dans la mesure où le travail du CR-03 participait à un système de jumelage, le nouvel employé pourrait poser des questions aux employés plus chevronnés qui travaillent à proximité. Elle a également témoigné que les commis de soutien principaux n’étaient pas des formateurs. Tel que je l’ai indiqué antérieurement dans mes motifs, elle a également indiqué que, même si un formulaire était utilisé, elle n’a jamais vu un document exigeant qu’un commis de soutien principal approuve le travail d’un nouvel employé. De plus, le témoignage des deux parties était conforme en ce qui concerne le fait que les commis de soutien CR-03 qui étaient plus chevronnés ne participaient pas aux évaluations de rendement officielles d’autres commis de soutien ou à l’ajout de précisions aux dossiers personnels ou aux feuilles d’activités d’apprentissage.

70 Les fonctionnaires ont fait valoir que [traduction] « le fait que les employés CR-03 n’exerçaient plus les fonctions de formation après 2010 de la même manière qu’ils le faisaient avant ne signifie pas que la “formation”, le “coaching” et le “mentorat” devraient être exclus de la description de travail, dont la date est de septembre 2006 ». Je n’accepte pas cet argument. Cet argument présuppose que le texte de la description de travail des fonctionnaires était insuffisant avant 2010 et que leur travail n’y était pas décrit de façon convenable. Il n’existe aucun élément de preuve qui indique que le texte de la description de travail ne décrivait pas de façon exacte le travail des commis de soutien CR-03.

71 Dans Alliance de la Fonction publique du Canada invoquée par les fonctionnaires, la description de travail ne comportait pas une description du rôle de partage du savoir assumé par les fonctionnaires s’estimant lésés (voir le paragr. 16). L’employeur a également reconnu que la description de travail générique n’était pas exacte en ce qui concerne la question liée à l’exigence d’agir à titre d’un coach ponctuel (voir le paragr. 64). L’arbitre de grief a conclu que la description de travail était incomplète en raison de cette lacune et d’autres lacunes. Ce n’est pas le cas en l’espèce. L’arbitre de grief a conclu que la réalité du travail des fonctionnaires s’estimant lésés dépassait les descriptions génériques limitées.

72 Il est également important de noter que les circonstances de ce cas se rapportaient à un lieu de travail considérablement différent comportant des responsabilités considérablement différentes. Dans Alliance de la Fonction publique du Canada, les faits concernaient le travail d’un agent du service à la clientèle (ASC) au Bureau du Commissaire des Tribunaux de révision, Régime de pensions du Canada (RPC) et Sécurité de la vieillesse (BCTR) qui était « chargé d’administrer la procédure d’appel […] et des lois y afférentes » (voir le paragr. 4). L’ASC servait de premier point de contact pour les appelants ou leur conseiller en ce qui concernait les détails du processus de mise au rôle d’une audience ou d’autres formes de preuve requises. Le poste exigeait certaines connaissances de situations médicales variées et de la façon dont elles pourraient touchées le traitement du cas (voir le paragr. 5). Il a fallu entre quatre et six mois pour apprendre les éléments fondamentaux de l’emploi et un nouvel ASC pouvait progresser au « statut de compagnon » après neuf mois en fonction et cela prenait de deux à trois ans pour apprendre la législation pertinente (voir le paragr. 13). L’ASC participait aussi au traitement des demandes de report d’audience. L’ASC était censé s’adresser à son compagnon afin d’obtenir les informations voulues et à titre de premier contact avant de consulter la direction.

73 L’emploi d’un ASC qui travaille au BCTR constitue un emploi considérablement plus complexe que celui d’un commis de soutien travaillant à la prestation de services. Cela dit, je ne souhaite pas minimiser l’importance du travail d’un commis de soutien, puisque sans un tri et l’organisation appropriés des documents, le défendeur ne pourrait pas offrir des services efficaces relativement aux demandes ou aux paiements concernant le Régime de pensions du Canada ou la Sécurité de la vieillesse. Toutefois, la tâche consiste en une tâche de débutant, routinière et très prescrite. Mme Martin pourrait avoir estimé qu’à titre de commis de soutien CR-03 qu’elle offrait une formation, un coaching et un mentorat à ses collègues. Toutefois, selon la situation en matière de relations de travail, elle ne faisait que faire une démonstration du travail et d’orienter un nouvel employé.

74 Selon la preuve dont je suis saisi, je comprends les détails des tâches concernées dans le cadre des responsabilités d’un commis de soutien et je ne suis pas en désaccord avec l’argument des fonctionnaires selon lequel une simple lecture du manuel ne suffirait pas pour effectuer le travail. Toutefois, le fait d’aider d’autres employés membres d’une équipe ne fait pas en sorte que la personne offrant l’aide assume un rôle de formateur, de coach ou de mentor, peu importe si la personne qui est un compagnon est un employé plus chevronné. Les fonctionnaires n’ont pas fourni suffisamment d’éléments de preuve pour établir, selon la prépondérance des probabilités, que la description de travail ne saisit pas l’ampleur des responsabilités concernées à l’aide des descripteurs figurant dans la description de travail actuelle.

75 Les termes et expressions qui suivent figurant dans la description de travail actuelle, « [c]haque membre […] est responsable de faire une démonstration du travail et d’orienter les employés, nouveaux et actuels […] », sont suffisamment larges pour englober le fait qu’un compagnon plus chevronné montre à un compagnon moins chevronné ce qu’il doit accomplir et la raison pour l’accomplir. Comme le texte « […] faire une démonstration du travail et d’orienter les employés, nouveaux et actuels […] » suffit pour englober ce travail, aucun texte particulier ne doit être ajouté à la description générique.

76  Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

VI. Ordonnance

77 Le grief est rejeté.

Le 26 mars 2014.

Traduction de la CRTFP

Paul Love,
arbitre de grief


Annexe (Traduction de la crtfp)

Liste des fonctionnaires s’estimant lésés

Rachel Anderson
Mandi Schubert
Colleen MacCormac
Carmen Doyle
Sandra L. Sims
Serafina Melita
Free Deresse
Lisa Liu

Sheena Smirl
Patricia Martin
Krista Karo
Zoe MacDonald
Jennifer Paget
German Ebert-Correa
Parmjit Birk
Daniela Dickson
Ashley Clark

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