Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s'estimant lésé était un évaluateur d'entreprises à l'Agence du revenu du Canada – il effectuait aussi du travail externe dans ses temps libres – le fonctionnaire s'estimant lésé a omis de respecter les demandes de l'employeur de cesser ce travail externe – l'employeur lui a imposé une suspension de 10 jours, puis de 20 jours et a, au bout du compte, mis fin à l'emploi du fonctionnaire s'estimant lésé pour conflit d'intérêts et insubordination – l'arbitre de grief a conclu que les activités externes du fonctionnaire s'estiment lésé le mettait dans une situation de conflit d'intérêts réel, potentiel ou apparent et que l'employeur avait le droit de lui ordonner de cesser ces activités – l'arbitre de grief a aussi conclu que le refus du fonctionnaire s'estimant lésé de satisfaire aux demandes de l'employeur constituait une insubordination – de plus, l'arbitre de grief a conclu que les mesures disciplinaires progressives ayant mené au licenciement du fonctionnaire s'estimant lésé étaient justifiées et raisonnables – finalement, l'arbitre de grief a conclu que la preuve présentée par le fonctionnaire s'estimant lésé n'était pas suffisamment claire, et convaincante pour soutenir son allégation selon laquelle son licenciement alors qu'il était en congé de maladie était une pratique discriminatoire interdite par la Loi canadienne sur les droits de la personne. Griefs rejetés.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date: 20150119
  • Dossier: 566-34-2161, 3543 et 3544
  • Référence: 2015 CRTEFP 7

Devant un arbitre de grief


ENTRE

SEAN CAVANAGH

fonctionnaire s'estimant lésé

et

AGENCE DU REVENU DU CANADA

employeur

Répertorié
Cavanagh c. Agence du revenu du Canada

Affaire concernant des griefs individuels renvoyés à l'arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Augustus Richardson, arbitre de grief
Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Lui-même
Pour l'employeur:
Lesa Brown, avocate
Affaire entendue à Toronto (Ontario)
du 27 au 31 octobre 2014.
(Traduction de la CRTEFP)

I - Introduction

1 Le fonctionnaire s'estimant lésé (le « fonctionnaire »), Sean Cavanagh, a contesté les trois mesures disciplinaires suivantes qui ont été prises à son égard par l'Agence du revenu du Canada (l'« ARC » ou l'« employeur ») :

  1. Le 22 février 2007, une suspension de 10 jours (pièce E1, onglet 26), qui a été renvoyée à l'arbitrage le 25 juin 2008, soit le dossier 566-34-2161 de la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (la « CRTEFP ») (« dossier 2161 de la CRTEFP »);
  2. Le 5 mars 2008, une suspension de 20 jours (pièce E1, onglet 32), qui a été renvoyée à l'arbitrage le 11 mars 2010, soit le dossier de la CRTEFP 566-34-3543 (« dossier 3543 de la CRTEFP »);
  3. Le 17 juin 2008, son licenciement (pièce E1, onglet 37), qui a été renvoyé à l'arbitrage le 11 mars 2010, soit le dossier de la CRTEFP 566-34-3544 (« dossier 3544 de la CRTEFP »).

2 Les trois mesures disciplinaires découlaient du fait que l'employeur était d'avis que le travail externe du fonctionnaire constituait un conflit d'intérêts conformément au Code et lignes directrices sur les conflits d'intérêts (le « Code sur les conflits »; pièce E1, onglet 39). L'employeur était également d'avis que le refus du fonctionnaire d'abandonner de telles activités externes constituait de l'insubordination.

3 D'autre part, selon la position adoptée par le fonctionnaire tout au long du processus, ses activités externes ne constituaient pas un conflit d'intérêts et, en conséquence, les mesures disciplinaires étaient injustes, déraisonnables et sans fondement. En ce qui concerne le licenciement, le fonctionnaire a signifié à la Commission canadienne des droits de la personne (« CCDP ») un avis de son intention de soulever des questions en lien avec la Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C., 1985, ch. H-6; la « LCDP »). Dans cet avis, il a allégué ce qui suit :

[Traduction]

[…]

M. Cavanagh était en congé de maladie autorisé en vue de se préparer à une chirurgie importante lorsqu'il a été licencié pour son omission de fournir des renseignements dans un délai arbitraire et inutilement serré. L'employeur a agi ainsi en toute connaissance de la nature et de la gravité de l'état de M. Cavanagh et du fait que les renseignements demandés n'étaient pas de nature urgente.

[…]

4 La CCDP a ensuite indiqué qu'elle ne déposerait aucun argument au sujet du licenciement du fonctionnaire.

II. Historique des procédures

5 À l'origine, au moment du dépôt des griefs, le fonctionnaire était représenté par son agent négociateur, l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada.

6 L'employeur n'était pas disponible pour assister aux premières dates d'audience proposées en mars 2009 relativement au dossier 2161 de la CRTEFP.

7 Le 5 décembre 2008, le fonctionnaire a demandé que le dossier 2161 de la CRTEFP soit mis en suspens en attendant le renvoi à l'arbitrage des dossiers de la CRTEFP 3543 et 3544 et que ces trois griefs soient réunis pour l'audience. L'employeur a consenti aux demandes, lesquelles ont été accordées le 19 décembre 2008. Le fonctionnaire a renouvelé ses demandes le 12 août 2009, lesquelles ont encore été accordées le 13 août 2009.

8 Le 11 mars 2010, le fonctionnaire a renvoyé à l'arbitrage les dossiers 3543 et 3544 de la CRTEFP. Le 15 mars 2010, les parties ont été informées que les dossiers 2161, 3543 et 3544 de la CRTEFP avaient été réunis et seraient entendus ensemble.

9 Une audience a finalement été prévue pour avril 2011. Toutefois, le 6 avril 2011, l'agent négociateur du fonctionnaire a signifié un avis indiquant qu'il ne représentait plus le fonctionnaire relativement aux dossiers de la CRTEFP 2161, 3543 et 3544; il a demandé que l'audience soit reportée à une date ultérieure. L'employeur a consenti à la demande, laquelle a été accordée le 7 avril 2011.

10 Le 20 avril 2011, le fonctionnaire a confirmé qu'il se représenterait lui-même.

11 Le 6 juillet 2011, le fonctionnaire a déposé une plainte de pratique déloyale de travail contre un représentant de son agent négociateur relativement aux dossiers de la CRTEFP 2161, 3543 et 3544. Les dossiers de la CRTEFP 2161, 3543 et 3544 ont ensuite été suspendus en attendant l'issu de la plainte du fonctionnaire.

12 La plainte du fonctionnaire a été tranchée le 28 mars 2014, dans Cavanagh c. Sullivan et Institut professionnel de la fonction publique du Canada, 2014 CRTFP 39.

13  Le 2 avril 2014, les parties ont été informées que les dossiers de la CRTEFP 2161, 3543 et 3544, qui avaient été suspendus en attente de la résolution de la plainte du fonctionnaire, seraient instruits à Toronto, du 27 au 31 octobre 2014.

14 Le 13 août 2014, le fonctionnaire a demandé des renseignements sur le processus d'arbitrage de griefs. Le même jour, il a été orienté vers des renseignements affichés sur Internet relativement au processus d'arbitrage de griefs.

15 Les 8 et 9 septembre 2014, le fonctionnaire a demandé la production des renseignements suivant :

  1. les documents et courriels portant sur les discussions entre l'agent négociateur et l'ARC relativement aux trois griefs, y compris, sans toutefois s'y limiter, celles entre les personnes suivantes :
    1. Bruce Allen, maintenant à la retraite, qui était, pendant toute la période pertinente, le directeur du Bureau des services fiscaux (« BSF ») de Toronto de l'ARC,
    2. les représentants de l'ARC qui ont assisté aux audiences des griefs;
  2. une copie du dossier du fonctionnaire des ressources humaines, de 2005 à 2008;
  3. les feuilles de temps et la correspondance avec ses superviseurs au sujet du congé de maladie et des congés annuels pour 2007 et 2008.

16 Une téléconférence a eu lieu le 25 septembre 2014 à laquelle l'avocate de l'employeur, le fonctionnaire et moi-même avons assisté. Après les discussions, l'employeur a accepté de fournir certains documents au fonctionnaire, y compris le dossier du personnel des Ressources humaines et tout dossier accessoire qui se rapporte aux mesures disciplinaires. En ce qui concerne la demande de documents du fonctionnaire figurant au dossier de son agent négociateur, j'ai accepté de donner des directives en vue de communiquer la demande à l'agent négociateur et l'informer de la nature de la demande du fonctionnaire, et de lui demander s'il serait en mesure de fournir les documents en question.

17 L'employeur a ensuite fourni au fonctionnaire les documents requis.

18 L'agent négociateur a fourni certains des documents aux environs du 10 octobre 2014. Le même jour, le fonctionnaire a déclaré que l'agent négociateur n'avait pas produit tous les documents demandés. Sur mes directives, le fonctionnaire a été informé que s'il était d'avis que son agent négociateur n'avait pas produit les documents nécessaires aux fins de son grief, il pouvait et devait lui signifier une assignation. Au début de l'audience, le fonctionnaire a affirmé qu'il n'avait pas signifié une telle assignation.

19 À l'audience, le fonctionnaire a aussi allégué que l'employeur ne s'était pas conformé à la directive qui lui avait été donnée lors de la conférence du 25 septembre 2014. À cette fin, j'ai entendu le témoignage de Paulene Bourgault, une agente principale des relations de travail de l'employeur. Elle avait examiné les dossiers et produit les documents dont j'avais ordonné la divulgation au fonctionnaire.

20 À la conclusion de ce témoignage, j'étais convaincu que l'employeur avait véritablement fait de son mieux pour se conformer à la directive. Le fonctionnaire n'était pas en mesure de préciser ou d'indiquer un type particulier de document qui, tel qu'il l'a allégué, était manquant.

21 Je souligne également qu'à un moment donné dans le passé, le fonctionnaire a déposé une demande d'accès à l'information (« AI ») et qu'il a reçu au moins une partie des dossiers, des notes et des documents internes de l'employeur. Par conséquent, j'étais convaincu que le chevauchement entre la production des documents par l'employeur et les résultats de la demande d'AI du fonctionnaire étaient suffisants aux fins des présents griefs.

22 La découverte et la divulgation ne constituent pas une recherche à l'aveuglette. Les questions visées par ces trois griefs, lesquels consistent à savoir si un conflit d'intérêts est survenu et si le refus du fonctionnaire de cesser et d'abandonner ses activités externes constituait une insubordination auraient pu être ou ont été traités par les documents et les témoignages dont je suis saisi.

23 Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84), et a créé la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (la « nouvelle Commission ») qui remplace la Commission des relations de travail dans la fonction publique (l'« ancienne Commission ») et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l'article 396 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013, un arbitre de grief saisi d'un grief avant le 1er novembre 2014 continue d'exercer les pouvoirs prévus à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003 ch. 22, art. 2) dans sa version antérieure à cette date.

III. Audience

A. Les faits

24 J'ai entendu les témoignages suivants pour le compte de l'employeur :

  1. M. Allen;
  2. Frank Walkingshaw, qui relevait de M. Allen et qui était, pendant toute la période pertinente, gestionnaire de la Section de l'évitement fiscal et de la vérification spécialisée du BSF de Toronto-Centre, la section où travaillait le fonctionnaire;
  3. Josée Labelle, directrice de la Division des affaires internes et de la prévention de la fraude de l'ARC;
  4. Mme Bourgault, une agente principale des relations de travail de l'ARC.

25 J'ai entendu les témoignages suivants pour le compte du fonctionnaire :

  1. Tony Campione, qui était, pendant toute la période pertinente, un évaluateur d'entreprises dans le même bureau que le fonctionnaire;
  2. le fonctionnaire.

26 Au départ, le fonctionnaire avait indiqué qu'il se pourrait qu'il cite un témoin à témoigner au sujet de la signification de certains termes, notamment [traduction] « juste valeur marchande ». L'avocate de l'employeur a signifié un avis de son intention de s'opposer à une telle preuve en utilisant la pertinence et le fait qu'aucun rapport d'expert n'avait été fourni à titre de motifs.

27 J'ai informé le fonctionnaire du motif de telles exceptions, mais je lui ai indiqué que je ne rendrais aucune décision à ce stade. Il était libre de citer le témoin. Selon le cas, les questions relatives à la pertinence, à l'admissibilité et à la pondération seraient traitées à ce moment-là. Il a ensuite choisi de ne pas citer le témoin (lequel il n'avait pas assigné de toute façon).

28 Je devrais également indiquer que, sauf une exception, les témoins ont présenté leur preuve honnêtement. Leur mémoire a été rafraîchie ou préservée, dans une large mesure, par le volume important de correspondance par courriel, de notes de service et de rapports.

29 Le fonctionnaire constituait la seule exception. Il avait tendance à répondre à des questions qui ne lui avaient pas été posées ou à donner des explications détaillées sur des sujets dont la pertinence n'était pas claire. Son témoignage avait tendance à consister en des arguments ou en des hypothèses, plutôt que de se limiter aux faits.

30 Néanmoins, je suis convaincu que de telles divergences importantes entre les témoignages qui existaient n'étaient pas fondées sur la crédibilité, mais bien sur l'interprétation respective des parties en ce qui concerne les questions et obligations juridiques dont il est question en l'espèce. Pour ce motif, j'énumérerai simplement les faits, dont la plupart sont fondés sur les documents, tel que je les ai interprétés en me basant sur l'ensemble de la preuve dont je suis saisi.

1. Processus d'évaluation d'entreprise au BSF de Toronto-Centre de l'ARC

31 M. Allen était, pendant une grande partie de la période pertinente, le directeur du BSF de Toronto-Centre de l'ARC. Il a déclaré que le bureau était divisé en plusieurs sections. L'une de ces sections était la Division de l'évitement fiscal et de la vérification spécialisée, dirigée, pendant une grande partie de la période pertinente, par M. Walkingshaw à titre de gestionnaire.

32 La Division de l'évitement fiscal et de la vérification spécialisée était, pour sa part, divisée en diverses sections, dont la Section des évaluations d'entreprise qui est dotée en partie par des évaluateurs classifiés AU-03, également connus comme des évaluateurs d'entreprises. Le fonctionnaire était un évaluateur d'entreprises classifié AU-03 à la Section des évaluations d'entreprise, et ce, pendant toute la période pertinente.

33 Selon la description de travail du poste d'évaluateur d'entreprises, les résultats axés sur le service à la clientèle étaient les suivants : [traduction] « […] les services d'évaluation des biens mobiliers pour des renvois de complexité élevée qui sont habituellement effectués par la Division de la validation et de l'exécution et par la Division des appels situées dans la région. » Selon la description fournie, les services d'évaluation des biens mobiliers comprennent [traduction] « […] les évaluations d'entreprise (constituées en personne morale et non constituée), les fiducies, les sociétés de personnes, les biens incorporels (les marques de commerce, les noms commerciaux, les licences, les accords) et l'allocation relative aux biens incorporels, les accords de compensation pécuniaire et les commissions de garantie » (voir la pièce E1, onglet 1).

34 La description de travail énonce les principales activités suivantes (pièces E1, onglet 1) :

[Traduction]

Examiner les opérations de complexité élevée qui comprennent la juste valeur marchande des valeurs et des ressources, conformément aux recommandations des vérificateurs d'impôt ou des agents des appels.

Planifier le cours et la direction de la tâche d'évaluation pour les dossiers de complexité élevée.

Rechercher et analyser les entreprises, l'industrie associée et les lois et la jurisprudence connexes, les facteurs économiques et d'autres renseignements connexes.

Déterminer des méthodologies, élaborer une prévision raisonnable et effectuer une évaluation des risques pour l'entreprise évaluée, et réconcilier les diverses approches à l'appui de la conclusion.

Préparer des rapports d'évaluation en suivant les Normes de la pratique et le Code de déontologie de l'Institut canadien des experts en évaluation d'entreprises.

Demander aux contribuables de répondre aux questions d'évaluation litigieuse et prendre en considération les points communs entre les postes, en vue de résoudre les problèmes.

Examiner et critiquer les évaluations antérieures et recommander à la Division des appels une gamme de valeurs sur lesquelles un règlement peut être fondé.

Agir comme témoin expert devant la Cour canadienne de l'impôt, critiquer les rapports d'évaluation opposés et déterminer les secteurs devant faire l'objet d'un contre-interrogatoire approfondi.

Participer aux comités internes, aux colloques et aux séances de formation.

35 La description (pièce E1, onglet 1) a indiqué ce qui suit au sujet d'un témoin expert :

[Traduction]

[…] est un terme défini qui diffère d'un témoin des faits en ce que le tribunal entend et tient compte de votre avis plutôt que des faits dont vous avez une connaissance directe. La fonction d'un témoin expert est d'informer le juge au sujet de l'évaluation de l'entreprise afin qu'une décision quant à la valeur puisse être prise.

36 Je souligne également qu'un imprimé de février 2008 du site Web interne de l'employeur comprend une description du mandat des évaluateurs d'entreprise de l'ARC comme : [traduction] « […] fournir des conseils d'experts en évaluation et des services de consultation techniques aux clients de l'ARC » (pièce G9). Il indique en outre ce qui suit au sujet de leur travail :

[Traduction]

Les évaluateurs de l'ARC sont des professionnels qui assistent la Vérification, les appels, l'évitement fiscal ou le ministère de la Justice en fournissant un service de qualité de manière rentable. Nos avis d'évaluation sont préparés conformément aux normes et aux éthiques professionnelles en vigueur.

L'évaluation des biens mobiliers a pour objet d'établir la valeur d'un titre de participation au sein d'une société, une société de personnes, une entreprise à propriétaire unique ou une concession. Les évaluateurs examinent tous les biens d'une entité qui contribuent à la valeur, y compris les opérations commerciales et la propriété intellectuelle. Une évaluation des biens mobiliers peut également être demandée pour déterminer la valeur des biens incorporels, comme le fonds commercial, les brevets, les droits d'auteur, les marques de commerce, les licences et les redevances.

37 Passant de la description de travail à l'emploi même, M. Walkingshaw a témoigné en interrogatoire principal et en contre-interrogatoire au sujet des travaux généraux qu'accomplissent les évaluateurs d'entreprises. Le BSF reçoit une déclaration de revenus d'une société. Elle est examinée afin de déterminer si elle devrait être acceptée comme telle ou si, pour une raison quelconque, elle devrait faire l'objet d'un deuxième examen. S'il est déterminé qu'un deuxième examen pourrait être justifié, elle est acheminée à la Section de la vérification. Si la vérification subséquente concerne une question liée à la valeur des biens qui pourrait avoir une incidence sur l'impôt à payer – par exemple, une opération avec lien de dépendance ou un transfert de biens ou d'actions – le dossier pourrait être acheminé à la Section des évaluations d'entreprise en vue d'obtenir une recommandation quant à savoir si une enquête approfondie est requise.

38 À ce stade, en tant que règle, le chef d'équipe de l'évaluateur d'entreprises effectue l'examen initial. Il examine rapidement le dossier pour constater s'il existe réellement une préoccupation et, dans l'affirmative, il l'achemine à un évaluateur d'entreprises aux fins d'enquête approfondie. Toutefois, je souligne que la responsabilité d'un tel examen, même s'il est habituellement effectué par le chef d'équipe, est visée par la description de travail des évaluateurs classifiés AU-03.

39 L'évaluateur d'entreprises peut effectuer une évaluation [traduction] « rapide et brute » (pour reprendre les termes de M. Cavanagh) des biens en question. S'il est déterminé qu'une opposition fiscale est justifiée, l'évaluateur offre un avis d'évaluation plus officiel qui peut être utilisé dans le cadre des procédures judiciaires.

2. Règles de conduite de l'ARC relativement aux conflits d'intérêts

40 Selon la Politique sur les conflits d'intérêts de l'ARC en vigueur pendant toute la période pertinente, ses employés doivent [traduction] « […] éviter tout conflit d'intérêts réel, apparent ou potentiel » (la Politique sur les conflits d'intérêtsfigure à l'onglet 38 d'un livre de documents muni d'onglets déposés par l'employeur à titre de pièce E1). La politique cherchait à [traduction] « […] accroître la confiance du public envers l'intégrité de l'ARC et de son personnel tout en reconnaissant que ses employés peuvent participer à certaines activités externes. » Selon la définition fournie, un conflit d'intérêts comporte les éléments suivants :

[Traduction]

[…] les situations où les biens, les affaires ou les intérêts personnels d'un employé représentent un conflit réel, apparent ou potentiel avec ses fonctions et ses responsabilités publiques, ou les situations qui pourraient affecter le jugement de l'employé quant à la mesure à prendre en ce qui concerne l'intérêt supérieur de l'ARC.

41 L'ARC a également mis sur pied un Comité permanent sur les conflits d'intérêts (le « Comité permanent ») à son Administration centrale, à Ottawa, composé de hauts fonctionnaires et présidé par le sous-commissaire de la Direction générale des ressources humaines. Selon l'explication de M. Allen, le Comité permanent devait traiter des cas les plus difficiles ou offrir un deuxième avis quant à l'existence d'un conflit d'intérêts réel, apparent ou potentiel.

42 À titre d'employé de l'ARC, M. Cavanagh était également assujetti à un Code sur les conflits. L'employeur a déposé en preuve la version du Code sur les conflits du 20 janvier 2003 et l'audience a été menée en tenant pour acquis qu'il s'agissait de la version applicable (pièce E1, onglet 39).

43 L'employeur a fourni une copie du Code sur les conflits à chacun de ses employés et, plus particulièrement, au fonctionnaire. Les employés sont tenus de signer annuellement une attestation selon laquelle ils ont lu et étaient familiers avec les dispositions du Code sur les conflits. Son avant-propos comprend l'énoncé suivant (pièce E1, onglet 39) :

[Traduction]

Vous pouvez occuper un emploi externe ou participer à d'autres activités à moins que cet emploi ou ces activités risquent d'entraîner un conflit d'intérêts. Le Code exige que vous vous comportiez d'une manière qui permet d'éviter la possibilité d'un conflit d'intérêts réel, apparent ou potentiel. Il est donc nécessaire que vous déclariez, de façon confidentielle, toute participation ou intérêt financier externe que vous avez qui pourrait vous soumettre à des exigences incompatibles avec vos fonctions officielles ou remettre en question votre capacité d'accomplir vos fonctions de manière objective.

44 Au paragraphe 22 du Code, il est question des activités externes de la façon suivante, soit de déterminer si les employées peuvent exercer ces activités et les circonstances où un employé pourrait se faire demander de modifier ou d'abandonner ces activités (paragraphe 22, pièce E1, onglet 39) :

[Traduction]

Les employés peuvent occuper un emploi externe ou participer à d'autres activités à moins que cet emploi ou ces activités risquent d'entraîner un conflit d'intérêts. Il incombe à l'employé de présenter au gestionnaire désigné un rapport confidentiel des activités externes qui pourraient les soumettre à des exigences incompatibles avec leurs fonctions officielles ou remettre en question leur capacité d'accomplir les fonctions et leurs responsabilités de façon objective. Le gestionnaire désigné peut exiger que ces activités soient réduites, modifiées ou abandonnées s'il a été déterminé qu'il existe un risque réel ou potentiel de conflits d'intérêts.

45 Comme il est clairement indiqué au paragraphe 22 du Code sur les conflits, les employés qui participent à de telles activités externes sont tenus de soumettre un rapport confidentiel au gestionnaire désigné (pièce E1, onglet 39). (En l'espèce, le gestionnaire désigné était le directeur du BSF de Toronto-Centre, soit M. Allen pour la plus grande partie de la période pertinente).

46 Le gestionnaire désigné examine le rapport confidentiel de l'employé et il détermine s'il existe un conflit d'intérêts réel, apparent ou potentiel. Il donne ensuite des directives à l'employé en conséquence. Dans certains cas, le gestionnaire désigné pourrait acheminer le rapport au Comité permanent aux fins d'examen et de décision.

3. Événements qui ont mené aux mesures disciplinaires

47 Pendant toute la période pertinente, M. Cavanagh était également comptable agréé (« CA »), expert en évaluation d'entreprise (« EEE ») et analyste financier agréé (« AFA »). Il était membre des organisations professionnelles régissant les trois professions et il était assujetti à leurs règles et lignes directrices de conduite professionnelles respectives. (Il n'a jamais expliqué ces règles et lignes directrices précises, autre que dans son témoignage répété selon lequel elles étaient plus rigoureuses que celles régissant les évaluateurs classifiés AU-03 de l'ARC.)

48 Le 16 février 1999, le fonctionnaire a déposé son rapport confidentiel (pièce E1, onglet 2). Le rapport, qui était en forme standard, comprenait l'énoncé normalisé suivant :

[Traduction]

Conformément au Code de la fonction publique, je déclare par la présente les biens non exemptés, les obligations directes et potentielles, les emplois externes et les autres activités, énumérés ci-après, qui, je le comprends parfaitement, pourraient devoir être cédés, limités ou modifiés, s'il est déterminé que de tels biens, obligations ou activités constituent un risque, réel, apparent ou potentiel, de conflit d'intérêts avec les fonctions du poste qui m'est offert ou que j'occupe.

49 Le fonctionnaire a inscrit [traduction] « S.O. » en ce qui concerne les biens et les obligations. En ce qui concerne la [traduction] « description des activités externes », il a répondu ce qui suit (pièce E1, onglet 2) :

[Traduction]

 […] constituent des décisions non fiscales, non liées à l'impôt de sociétés en faillite. Négociations de dettes et refinancement, prise d'inventaire, conformité aux lois des lois non fiscales fédérales et provinciales, conformité aux ententes contractuelles, diverses autres activités liées à la négociation, à la conformité, entre autres, des sociétés et des particuliers éprouvant des difficultés.

50 Je souligne que M. Cavanagh a affirmé que lorsqu'il a rempli le rapport confidentiel, il n'exerçait pas réellement les activités qu'il a énumérées à titre d'[traduction] « activités externes ». Selon son témoignage, à titre d'AFA, il était tenu en vertu de son code de déontologie (lequel il a soutenu être plus exact que celui de l'ARC), d'énumérer toutes les activités qu'il pourrait exercer et non seulement celles qu'il exerçait. De plus, il a indiqué qu'à ce moment-là, il n'exerçait pas ces activités.

51 Dans le cours normal, le rapport confidentiel aurait dû être examiné par le directeur du BSF de Toronto-Centre en 1999. Le directeur aurait alors déterminé si l'activité externe constituait un conflit d'intérêts ou si elle devait être abandonnée ou modifiée. Toutefois, il semble que le rapport ait été mal classé, entre deux fichiers. Par conséquent, il n'a pas été révélé avant environ le mois de juin 2003. À ce moment, Alice Shields, qui était alors directrice du BSF de Toronto-Nord, a demandé à M. Cavanagh de fournir des précisions quant à ce qu'il faisait exactement dans le cadre de ses activités externes.

52 Le fonctionnaire a répondu le 3 juillet 2003 (pièce E1, onglet 3). Voici l'introduction de sa réponse : [traduction] « Même s'il n'y a aucune directive quant à la façon dont vous souhaitez que je précise, je tenterai de décrire les activités que j'exercerais. ». Voici la suite de sa réponse :

[Traduction]

En règle générale, je pourrais évaluer des actions, des intérêts commerciaux et des biens, tant corporels qu'incorporels. Je suis un comptable agréé et un expert en évaluation d'entreprise et cette profession va bien au-delà des questions fiscales et de l'ADRC. En fait, un EEE ne participe pas aux questions fiscales dans la plupart des cas.

Les domaines où j'exercerais la profession visent les questions concernant les affaires matrimoniales dans le cadre desquelles les biens familiaux nets doivent être déterminés. Je pourrais participer aux procédures de faillite qui exigent l'évaluation des biens de la société aux fins de liquidation. L'analyse du flux de trésorerie aux fins de financement par emprunt et de refinancement. L'analyse, la gestion et l'évaluation de l'inventaire comprennent l'exactitude de la déclaration exacte des stocks. Une aide en conformité avec les questions qui ne sont pas de nature fiscale, comme la bourse des valeurs mobilières constitue également une fonction. La rédaction d'ententes de partenariat, de conventions d'actionnaires et d'autres ententes contractuelles fait aussi partie des fonctions des évaluateurs. L'évaluation des intérêts commerciaux aux fins de vente ou d'achat.

Il existe une multitude d'activités qui ne se rapportent pas à l'impôt ou qui ne concernent pas l'ADRC et qui exigent l'expertise dont je suis qualifié à offrir. Ce qui précède constitue un aperçu général des activités auxquelles je pourrais participer sans être en conflit d'intérêts avec mon contrat de travail avec l'ADRC.

53 Tout au long de son témoignage, le fonctionnaire a souligné que le fait qu'il [traduction] « pouvait » exercer certaines des activités qu'il a énumérées, ne signifiait pas qu'il les exerçait réellement, au moins à ce moment-là. Il a soutenu avoir énuméré les activités qu'il [traduction] « aurait pu » ou [traduction] « pourrait » exercer non parce qu'il les exerçait réellement, mais parce que son code de déontologie des CA, des AFA ou des EEE exigeait qu'il fournisse ce type d'information.

54 En juillet 2003, M. Allen était le directeur adjoint de Mme Shileds. Sue Barwick (une agente des relations de travail), le fonctionnaire et lui-même se sont rencontrés le 3 septembre en vue d'obtenir des précisions sur les activités externes du fonctionnaire; voir la pièce E1, onglet 4.

55 On a demandé au fonctionnaire s'il exerçait toujours un travail externe. Il a répondu qu'il avait [traduction] « énuméré toutes les activités que je pourrais exercer, mais je ne les exerce pas toutes à l'heure actuelle » (pièce E1, onglet 4). Il a soutenu que tous les travaux qu'il avait énumérés n'étaient pas de nature fiscale.

56 Lorsque M. Allen a indiqué que de tels travaux pourraient quand même avoir des conséquences fiscales, le fonctionnaire a répondu ce qui suit : [traduction] « […] tout pourrait – à quelle fréquence cela constitue-t-il un conflit avec mon domaine d'influence? Jamais » (pièce E1, onglet 4). À la question de savoir s'il donnait des conseils au sujet de la valeur des biens, le fonctionnaire a répondu ce qui suit : [traduction] « Je fais preuve de diligence raisonnable et non une évaluation. J'examine les contrats conclus par des particuliers et je détermine si la valeur qu'ils paient est exacte. Je vérifie la dette et je redresse la valeur ou je recommande un autre chiffre. »

57 Lors de son témoignage, le fonctionnaire a répété à maintes reprises cet argument. Il a indiqué que lorsqu'il agissait au nom d'un acheteur, il ne fournissait pas une évaluation des biens ou de l'entreprise achetés. Il examine plutôt la situation de l'acheteur et formule un avis quant à savoir s'il s'agit d'un bon achat. Il a affirmé qu'un tel avis n'avait aucun rapport à la valeur du bien ou de l'entreprise achetés et qu'il ne se rapportait qu'à la situation de l'acheteur et à la question de savoir s'il pouvait se permettre l'achat envisagé. Il a indiqué que la valeur des biens achetés n'était pas pertinente à la question de savoir si l'acheteur pouvait ou devait aller de l'avant avec la transaction. Il a précisé qu'il aidait également les acheteurs à obtenir de meilleurs prix au moyen de négociations serrées, un processus qu'il a soutenu ne pas être affecté, d'aucune façon que ce soit, par la valeur de l'article acheté.

58 Le fonctionnaire était plus ou moins clair en ce qui concerne les activités qu'il exerçait réellement de 1999 à 2008 et le moment où il exerçait ces activités.

59 En contre-interrogatoire, le fonctionnaire a indiqué que, selon lui, au moment d'achever le rapport confidentiel de 1999, il n'exerçait pas les activités qui y sont énumérées (pièce E1, onglet 2). Il a indiqué l'avoir déposé à cette date uniquement parce qu'il s'agissait de la première année de son cours pour obtenir la désignation d'AFA et que le code de déontologie de l'AFA exigeait qu'il communique tout ce qu'il pourrait faire et non seulement ce qu'il faisait. À la question de savoir quand il a commencé à exercer les activités qu'il a énumérées, il a répondu qu'il ne savait pas. Il a ensuite donné le récit du début des activités externes.

60 En raison d'une lutte de divorce qui a duré 20 ans et qui a entraîné deux ou trois comparutions devant une cour à titre de partie qui se représente seule, le fonctionnaire avait acquis les connaissances et l'expérience relativement aux questions de conflits matrimoniaux. Des amis lui ont demandé de l'aide dans le cadre de leurs litiges et il a accepté. Il ne le faisait pas pour la rémunération, mais pour aider. Il a ensuite rencontré un homme d'affaires à une fête et a établi, selon ses propres mots, une relation de confiance avec lui.

61 Le premier emploi du fonctionnaire découlait d'une rencontre avec un comptable lors d'un petit-déjeuner d'affaires. Il a indiqué qu'il s'agissait [traduction] « du début de 2000, de 2002 ou de 2003, quelque chose comme ça. » Le comptable lui a dit qu'il avait un client qui lui posait problème et il ne souhaitait plus traiter avec lui et il a proposé au fonctionnaire d'aider le client. Le client a, en fin de compte, demandé au fonctionnaire de l'aider à acheter une entreprise. Le fonctionnaire a été rémunéré pour ce travail. Il a expliqué ce qui s'est produit de la façon suivante :

[Traduction]

Il m'a demandé comment acheter une entreprise […] Je lui ai dit d'émettre une lettre d'intention […] Je l'ai aidé à acheter une entreprise et il m'a ensuite payé […] C'est en quelque sorte la façon que cela s'est déroulé […] il s'agissait d'une source de revenus en honoraires découlant du fait que je présentais des personnes l'une à l'autre […] Je recevais une commission pour recommandation […] et c'est tout, quelques centaines de dollars ici, quelques milliers de dollars là […] Je ne voulais même pas l'argent, il me l'envoyait en me disant que je le méritais […] toutefois, j'ai ensuite déclaré ces montants dans ma déclaration de revenus et mon obligation alimentaire pour enfant a augmenté […] par conséquent, le fait d'aider des personnes à acheter des entreprises est devenu une micro entreprise à laquelle je me fiais.

62 Il semble également que, par 2003, les activités externes du fonctionnaire étaient devenues assez importantes pour exiger qu'elles soient exercées dans le cadre d'une entreprise. Dans son témoignage, le fonctionnaire a indiqué qu'à un certain point (il ne se souvenait pas de la date), il a acquis une compagnie qui avait été démarrée par son beau-père. En 2003, il a changé le nom de la compagnie à FS Capital Corporation (« FSC »). Il a admis qu'il était un directeur de la compagnie, mais il a soutenu qu'il [traduction] « ne s'agissait qu'un titre de l'un des patrons »; il n'en a identifié aucun.

63 Le fonctionnaire a reconnu ne pas avoir produit un rapport confidentiel en 2003 relativement à cet événement particulier. Il a expliqué ne pas avoir produit, à l'époque ou à tout autre moment, de rapport confidentiel sur ses activités externes exercées pour le FSC pour les motifs suivants :

[Traduction]

[…] tout son revenu est attribué aux propriétaires […] il ne s'agit que d'une coquille […] il s'agit de marquage […] il y a des entrées et des sorties de fonds, par conséquent, si vous examinez la déclaration de revenus annuelle de FSC, vous constaterez un revenu nul chaque année […] elle n'a aucun effectif, il ne s'agit que d'une coquille visant à tirer un revenu […] n'importe qui peut dire qu'il en fait partie, je leur attribue simplement l'argent […].

64 Si cela vous paraît complexe, c'est parce que ce l'était. Ce que j'ai pu comprendre du témoignage du fonctionnaire, tant en interrogatoire principal qu'en contre-interrogatoire, est qu'un client communiquait avec FSC (c'est-à-dire avec M. Cavanagh, à titre de directeur) afin d'obtenir un ou plusieurs services offerts dans le cadre de cette entreprise. La société (c'est-à-dire, M. Cavanagh) confiait le service en sous-traitance à une personne pour fournir le service en question et cette personne était ultimement rémunérée. Le répertoire d'entrepreneurs (en supposant qu'il y en avait plusieurs) comprendrait M. Cavanagh. Je reviendrai à la relation entre FSC et M. Cavanagh plus loin dans la présente décision.

65 Le 23 septembre 2003, M. Allen relevait de Mme Shields. Il a décrit l'historique de la question concernant les activités externes du fonctionnaire et l'information sur ces activités qui avait été fournie. M. Allen a souligné que les évaluateurs classifiés au niveau AU-03 fournissent aux divisions de la vérification et de l'exécution, des appels et du recouvrement des recettes, des déterminations de la juste valeur marchande (pièce E1, onglet 5). Après avoir examiné la description de travail du fonctionnaire, son travail à l'ARC et les activités externes qu'il a indiqué exercer ou qu'il pourrait exercer, M. Allen a conclu qu'il examinerait ce qui suit :

[Traduction]

[…] que la participation de M. Cavanagh à l'activité externe le soumettrait à des exigences incompatibles avec ses fonctions et ses obligations officielles. M. Cavanagh a indiqué au cours de l'entrevue qu'il était d'avis que cela ne se produirait pas puisqu'il se récuserait de tout dossier auquel il avait participé. Toutefois, j'estimerai qu'un conflit pourrait survenir en vertu des sous-alinéas 3a), c) et e) de l'annexe B des lignes directrices sur les conflits d'intérêts et, par conséquent, M. Cavanagh serait mis dans une situation de conflit d'intérêts et devrait abandonner ses activités externes.

66 Puisqu'il a fallu du temps à l'employeur pour répondre aux demandes antérieures du fonctionnaire pour avoir des précisions quant au conflit d'intérêts réel, apparent ou potentiel, M. Allen a recommandé qu'il soit accordé au fonctionnaire jusqu'au 1er janvier 2004 pour abandonner ses activités externes (pièce E1, onglet 5).

67 Le 5 novembre 2003, Mme Shields a rédigé une lettre à l'intention du fonctionnaire dans laquelle elle renvoie à des renseignements supplémentaires qu'il a fournis relativement à son rapport confidentiel. Elle l'a informé qu'elle avait conclu que ses activités externes [traduction] « […] risquaient de le soumettre à des exigences incompatibles avec ses fonctions officielles et responsabilités ou pourraient remettre en question sa capacité d'exercer ses fonctions officielles et d'accomplir les devoirs de sa charge en toute objectivité » (pièce G14).

68 Mme Shields est d'avis qu'il existait une possibilité qu'un conflit d'intérêts survienne, contrairement aux alinéas 3a), c) et e) du Code sur les conflits (pièce E1, onglet 39). Par conséquent, elle a ordonné au fonctionnaire d'abandonner ses activités extérieures et elle lui a donné jusqu'au 1er janvier 2004 pour s'y conformer. Elle a exigé une confirmation écrite qu'il avait ainsi abandonné ses activités externes en indiquant que le défaut de s'y conformer pourrait entraîner une mesure disciplinaire à son égard pouvant aller jusqu'au licenciement (pièce G14).

69 M. Cavanagh a répondu par courriel le 13 novembre 2003. Il a demandé à Mme Shields ce qui suit : [traduction] « […] élaborer quant à la façon donc […] [ses activités de son cabinet privé] représentent un conflit relativement aux alinéas que vous avez cités » (pièce G14).

70 À ce moment-là, Mme Shields devait être mutée à un autre poste et M. Allen, alors directeur intérimaire, devait prendre sa place à titre de directeur.

71 Mme Shields et M. Cavanagh ont eu une conversation téléphonique le 17 décembre 2003. Elle a indiqué qu'elle n'avait pas été convaincue par ses observations selon lesquelles les travaux qu'il accomplissait ne différaient pas de ceux accomplis par les consultants externes auxquels l'ARC avait parfois recours. Elle a indiqué qu'il avait demandé d'obtenir une autre explication de sa décision et qu'elle avait accepté de lui en fournir une. Elle a également accepté de proroger le délai du 1er janvier au 28 février 2008 [traduction] « […] afin qu'il ait la possibilité de recevoir les renseignements et de présenter d'autres observations » (pièce G15).

72 Le même jour, le fonctionnaire a envoyé un courriel à Mme Shields dans lequel il a indiqué en partie ce qui suit (pièce G14) :

[Traduction]

Je prévois maintenant que votre successeur [M. Allen] traitera avec moi sur cette question. Afin de m'assurer que nous nous entendons à ce sujet, vous vous êtes engagés à définir les éléments de ma description de travail et des activités externes divulguées qui sont incompatibles ainsi que la façon dont ils sont incompatibles. Plus particulièrement, la façon dont mes activités entraîneraient un conflit ou un conflit perçu et la façon dont mon accès aux renseignements confidentiels pourrait être perçu comme étant conflictuel. Je vous en serai également reconnaissant si vous pouvez également distinguer les activités que j'exerce aux Évaluations à l'ADRC et les contrats conclus par cette dernière avec des évaluateurs externes.

73 Mme Shields lui a répondu par courriel le même jour. Elle a confirmé que d'autres renseignements lui seraient fournis. Toutefois, elle a indiqué, conformément à ce qui suit, qu'elle ne [traduction] « […] traiterait pas des entrepreneurs externes dans le cadre de cette réponse puisque je suis d'avis que ce n'est pas pertinent à ma décision relativement à ta situation » (pièce G14).

74 M. Allen est devenu le directeur du BSF de Toronto-Centre vers le début de2004. Le 22 juillet 2004, il a rédigé une lettre à l'intention du fonctionnaire. Il a rappelé que l'ancienne directrice avait informé le fonctionnaire le 5 novembre 2003 de ce qui suit : [traduction] « […] il existe un conflit entre vos fonctions à titre d'évaluateur de l'Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) et vos activités externes » (pièce G14). Il a indiqué qu'une prorogation avait été accordée antérieurement au fonctionnaire jusqu'au 1er mars 2004 pour abandonner ses activités externes. Il a également indiqué qu'une présentation avait été déposée auprès du Comité permanent, à Ottawa, selon ce qui suit (pièce E1, onglet 8) :

[Traduction]

[…] afin de confirmer qu'il existe réellement un conflit d'intérêts entre les fonctions d'un employé du bureau des services fiscaux, plus particulièrement un évaluateur classifié AU-03, et l'évaluation de biens corporels et incorporels. La décision de Mme Shields a maintenant été confirmée et je souscris à ces conclusions.

75 M. Allen a rappelé au fonctionnaire que le 5 novembre 2003, il avait été ordonné de cesser ses activités externes au plus tard le 1er janvier 2004, de fournir une confirmation écrite qu'il avait en fait abandonné ces activités et qu'une prorogation de ce délai lui avait ensuite été accordée jusqu'au 1er mars 2004. M. Allen a ensuite demandé une confirmation écrite au plus le 13 août 2004 que le fonctionnaire avait cessé [traduction] « ces activités externes » (pièce E1, onglet 8).

76 Le 13 août 2004, le fonctionnaire a envoyé un courriel à M. Allen (pièce E1, onglet 9) qui indiquait ce qui suit :

[Traduction]

J'ai examiné votre lettre du 22 juillet et après l'avoir étudié attentivement, je confirme que je ne fournirai aucun avis d'évaluation de biens corporels et incorporels, conformément à ce qui est indiqué dans votre lettre et je confirme également que je n'exerce actuellement aucune telle activité. Je suis également au courant des questions relatives au conflit d'intérêts et je suis régi par les trois instituts professionnels qui ont clairement exposé les politiques sur les conflits auxquelles je dois me conformer.

77 Je souligne que le fonctionnaire a témoigné qu'il tenait beaucoup à la signification exacte et spécifique des termes et des expressions. Dans ce contexte, je mentionne également qu'il est mentionné dans les éléments de preuve déposés par le fonctionnaire que les EEE, tout comme les CA, offrent des conseils en matière d'évaluation des trois types suivants, dont chacun comporte un niveau plus élevé de garantie :

  1. un calcul;
  2. une estimation;
  3. un avis.

78 Les conseils du troisième type, soit l'avis d'évaluation, comportent le niveau de garantie le plus élevé. Il s'agit d'un document qu'un tribunal s'attendrait à recevoir lorsqu'un EEE témoigne au sujet de la valeur d'un bien ou d'une entreprise et du document qu'un employé classifié AU-03 doit fournir dans l'éventualité où il doit produire des éléments de preuve devant un tribunal à l'appui de la position de l'ARC dans un litige fiscal. Selon le témoignage du fonctionnaire, il a mentionné ce type d'avis dans son courriel du 13 août 2004 et il a supposé que M. Allen comprenait qu'il en était ainsi.

79 Ces questions semblent avoir été mises en suspens jusqu'au milieu de 2005. En avril de la même année, un autre évaluateur classifié AU-03 du BSF de Toronto-Centre, M. Campione, a présenté un rapport confidentiel dans lequel il a demandé la permission de démarrer une entreprise externe liée aux services de consultation en gestion et de soutien juridique (pièce E1, onglet 10, page 1).

80 M. Allen a refusé la demande au motif qu'elle serait incompatible au travail de M. Campione à l'ARC et que cela constituerait un conflit d'intérêts.

81 M. Campione n'a pas souscrit à la décision de M. Allen et il a mentionné que le fonctionnaire, un employé du BSF de Toronto-Centre, exerçait actuellement le même type d'activité (pièce E1, onglet 10, page 1).

82 Je souligne que M. Campione a ensuite déposé un grief contre la décision de M. Allen. Ce grief a été renvoyé à l'arbitrage et il a été rejeté; voir Campione c. Agence du revenu du Canada, 2013 CRTFP 161, au paragr. 83.

83 M. Allen a fait quelques recherches et il a déterminé que le fonctionnaire, M. Campione et Tim Dunham, le chef d'équipe, offraient tous des services professionnels à titre d'EEE sur le site Web de l'Institut canadien des experts en évaluation d'entreprises (« ICEEE »). Il a décidé à ce stade qu'il devrait communiquer avec la Division des affaires internes et de la prévention de la fraude de l'ARC afin qu'elle enquête sur la possibilité de conflits d'intérêts continus ou potentiels au sein du bureau en raison de telles activités externes.

84 L'enquêteur chargé de la tâche a interrogé sept personnes, y compris le fonctionnaire, trois autres évaluateurs et le chef d'équipe. Les entrevues ont été tenues en décembre 2005 et en janvier et juin 2006. Selon les conclusions du rapport subséquent, daté du 21 août 2006, les activités externes du fonctionnaire constituaient un conflit d'intérêts. Les conclusions du rapport rapportent également que le fonctionnaire avait continué d'exercer ses activités, et ce, malgré les directives du 22 juillet 2004 de les cesser (pièce E1, onglet 10, page 19).

85 Une copie du rapport a été fournie au fonctionnaire. Le 20 octobre 2006, M. Allen a rédigé une lettre à l'intention du fonctionnaire. Il a souligné la conclusion du rapport et a ensuite indiqué ce qui suit (pièce E1, onglet 11) :

[Traduction]

La présente lettre sert de directive définitive de cesser immédiatement ces activités et de me fournir un énoncé écrit au plus tard le 27 octobre 2006 confirmant que vous les avez en fait cessées. Le défaut de vous conformer à cette directive pourrait entraîner une mesure administrative ou disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement.

86 Le fonctionnaire a répondu par courriel le 27 octobre 2006. Il a indiqué comme suit qu'il avait reçu la lettre de M. Allen le 24 octobre, mais qu'il n'avait pas [traduction] « […] été en mesure de répondre de manière appropriée à la lettre, nonobstant sa volonté de s'y conformer » (pièce E1, onglet 12). Il a demandé un délai de 30 jours [traduction] « […] pour préparer une réponse appropriée à une question aussi grave et qui comporte une menace de licenciement. » Il a ajouté qu'il souhaitait ce qui suit : [traduction] « […] consulter de manière appropriée le syndicat et d'autres conseillers avant de répondre afin de satisfaire à vos besoins sans toutefois compromettre les miens » (pièce E1, onglet 12).

87 Le 31 octobre 2006, M. Allen a accepté d'accorder au fonctionnaire un délai jusqu'au 14 novembre et indiqué ce qui suit : [traduction] « […] date à laquelle je m'attends à recevoir votre confirmation écrite que vous vous êtes conformé entièrement à la directive qui vous été donnée de cesser immédiatement vos activités commerciales » (pièce E1, onglet 13). Il a répété son avertissement selon lequel le défaut de s'y conformer entraînerait une mesure disciplinaire.

88 À cette date, soit le 30 octobre 2006, le fonctionnaire avait déjà déposé un grief contre la directive de M. Allen en date du 20 octobre, selon laquelle il devait abandonner ses [traduction] « […] activités externes dans le cadre desquelles [il exerçait ses] connaissances et [son] expertise à titre d'expert en évaluation d'entreprise » (pièce G16). Le fonctionnaire a ajouté qu'il [traduction] « […] n'était pas du tout d'accord que ces activités [le plaçaient] dans une situation de conflit d'intérêts relativement à [ses] fonctions à titre d'évaluateur de l'ARC » (pièce G16).

89 Je m'arrête pour souligner qu'à partir du 1er novembre 2006, l'ICEEE a fourni des renseignements sur ses membres au moyen d'une liste en ligne (pièce E36). Les coordonnées du fonctionnaire étaient indiquées comme suit :

Cavanagh, Sean (1996)

FS Capital Corporation                Tél. : 416-545-9559

Bureau 181

157, rue Adelaide Ouest              scavanagh@fscapital.ca

Toronto

90 Le même site Web incluait une page consacrée aux avantages de l'embauche d'un EEE (pièce 36) :

[Traduction]

Il existe de nombreuses raisons pour lesquelles un particulier ou une société pourrait exiger une évaluation d'entreprise, y compris la planification fiscale et successorale, les affaires matrimoniales, les ventes et les acquisitions commerciales, la quantification des dommages commerciaux et de nombreuses autres circonstances.

Peu importe la raison, que ce soit pour effectuer une acquisition, planifier un dessaisissement, joindre un associé à votre entreprise, entreprendre une planification successorale ou fiscale, régler des litiges, évaluer la marque ou les biens comportant des droits de propriété intellectuelle, effectuer une analyse des questions financières des sociétés ou l'évaluation de valeurs mobilières, les experts en évaluation d'entreprises (EEE) sont des experts qui valent la peine d'être connus.

91 La page offre également une base de données interrogeable des 1 100 membres de l'ICEEE [traduction] « […] qui souhaitent faire de la promotion au moyen du site Web de l'Institut » (pièce E36). Une recherche du nom du fonctionnaire a produit une réponse positive (ce qui m'indique qu'il était l'un des membres qui souhaitaient faire de la promotion au moyen du site Web) et les mêmes coordonnées que celles indiquées ci-dessus (pièce E36).

92 L'employeur a également présenté en preuve trois pages du site Web d'Industrie Canada, strategis.gc.ca, qui avaient été imprimées (ou au moins envoyées par télécopieur) le 16 novembre 2006 (pièce E36). Le site Web comprenait une liste de sociétés canadiennes et leurs capacités. La FSC figurait à la liste et comprenait une note qui indiquait que les renseignements avaient été mis à jour le 22 octobre 2006. Le numéro de téléphone et les adresses électronique et postale indiquées étaient les mêmes que celles indiquées ci-dessus. Le fonctionnaire était mentionné à titre de directeur de la société (je note que le terme anglais comportait une erreur d'orthographe; il était écrit « principle » plutôt que « principal », un point auquel nous reviendrons plus tard). Voici la description de la société et des services : [traduction] « Évaluation d'entreprises et services de consultations pour les entreprises. Soutien juridique. Financement des entreprises. » (pièce E36).

93 Le fonctionnaire a témoigné au sujet de la façon que, selon lui, les renseignements avaient été affichés sur le site Web d'Industrie Canada. Il a indiqué avoir reçu un courriel d'Industrie Canada qui comprenait un lien et qu'il avait cliqué sur le lien. Une fois que le site ciblé s'est affiché, il a rempli un questionnaire comptant plusieurs cases déroulantes. Il a indiqué qu'il n'avait pas compris ou constaté que les renseignements seraient affichés dans un site Web public et interrogeable. Il a affirmé qu'il croyait qu'Industrie Canada recueillait simplement des données à des fins internes.

94 Dans son témoignage, le fonctionnaire a expliqué qu'il n'avait pas fourni ces renseignements à l'ICEEE. Il a fait valoir qu'il avait participé, à un moment donné, à un colloque de l'ICEEE, à ses propres frais. Puisque l'ARC n'avait pas payé ses frais de participation, il s'était inscrit de manière privée. Selon lui, l'ICEEE avait alors pris ses renseignements d'inscription et les avait ajoutés aux renseignements de ses membres en ligne.

95 Ce témoignage particulier est typique de la façon dont le fonctionnaire contournait souvent attentivement les faits problématiques au regard de sa position. Le fait qu'il pourrait ne pas avoir fourni les renseignements à l'ICEEE aux fins exactes d'être affichées dans son site Web passe à côté du fait qu'il a fourni ces renseignements à l'ICEEE lorsqu'il s'est inscrit au colloque. En d'autres termes, il s'est représenté à l'ICEEE (et à d'autres participants au colloque) comme faisant partie de FSC. (Je souligne également que, de toute façon, l'enquêteur a discuté avec le gestionnaire d'administration de l'ICEEE qui l'a informé que ces renseignements étaient affichés dans son site Web à la demande de ses membres; voir la pièce E1, onglet 10, page 19).

96 Le 14 novembre 2006, le fonctionnaire a envoyé un courriel à M. Allen. Il a réitéré sa position selon laquelle il ne croyait pas que ses activités étaient en conflit d'intérêts avec ses fonctions à l'ARC. Il a soutenu qu'il y avait de la confusion quant aux activités qui étaient acceptables et celles qui ne l'étaient pas, et pourquoi. Il a conclu de la façon suivante (pièce E1, onglet 14) :

[Traduction]

J'ai déposé un grief contre l'avis de conflit et je crois que l'on devrait traiter le grief avant que je ne soumette la lettre que vous avez demandée. Selon ma compréhension, vous devez maintenant être saisi de mon grief. Encore une fois, ce sera avec plaisir que je me conformerai à votre demande une fois que les activités qui constituent un conflit et celles qui ne le constituent pas seront claires. Je souhaite simplement comprendre la raison pour laquelle une activité pourrait entraîner un conflit afin que je puisse exercer des activités qui sont acceptables à l'ARC. Entre-temps et jusqu'à ce que vous me fournissiez des précisions à l'audience du grief, je demanderai une approbation au cas par cas lorsqu'un client éventuel me demandera de lui fournir des services et à l'égard lesquels un pouvoir discrétionnaire pourrait être nécessaire. Je dois toutefois obtenir une assurance que ces demandes d'approbation seront accélérées. De plus, je souhaiterais déterminer si une activité que j'ai exercée depuis 1999 a donné lieu à des problèmes relatifs à mon emploi. J'ai hâte de régler cette question. Merci de votre patience.

97 Cette citation est fidèle à la réponse du fonctionnaire tout au long de la période où l'employeur a soulevé des préoccupations. Il a fourni des renseignements sur ses activités externes et s'est ensuite opposé à la décision de l'employeur ou rejeté cette dernière selon laquelle il existait un conflit d'intérêts réel ou potentiel. Il a refusé de suivre des directives claires d'abandonner l'activité en soutenant que de telles directives créaient de la confusion, n'étaient pas claires ou étaient incorrectes parce que, selon lui, il n'existait aucun conflit. Plutôt que de suivre la règle [traduction] « travaillez maintenant, déposez un grief plus tard », il ne s'est pas conformé et a ensuite tenté de négocier un compromis qui lui convenait.

98 Le fonctionnaire, son représentant de l'agent négociateur, Dan Rafferty, et M. Allen, se sont rencontrés le 15 novembre 2006. Cette réunion a été animée. M. Allen a insisté sur le fait qu'il voulait que le fonctionnaire se conforme à sa directive en attendant l'issu du grief. À la conclusion de la réunion, M. Cavanagh a rédigé et donné la note suivante à M. Allen, sur laquelle il a inscrit la mention [traduction] « Sous réserve de tous droits » (pièce E1, onglet 15) : [traduction] « La présente vise à vous informer que j'accepte de me conformer à la directive énoncée dans votre lettre du 20 octobre 2006 et répétée dans votre lettre du 31 octobre 2006. »

99 Dans un courriel en date du 27 novembre 2006, le fonctionnaire a rédigé une note à l'intention de M. Walkingshaw, avec copie conforme à M. Rafferty (pièce E1, onglet 16). Le courriel consistait en une réponse détaillée au rapport d'enquête d'août 2006. Il n'est pas nécessaire de reproduire le courriel de deux pages et demi ni tous les 23 points énumérés par le fonctionnaire. Il suffit d'indiquer que les principaux points étaient les suivants (pièce E1, onglet 16) :

[Traduction]

  1. Il avait déposé un rapport confidentiel en 1999.
  2. Il n'avait pas caché le fait qu'il exécutait un travail externe.
  3. Ses collègues et les cadres, et plus particulièrement M. Dunham, étaient au courant du fait qu'il exécutait un travail externe et ne s'y étaient pas opposés à ce moment-là.
  4. Il a indiqué [traduction] « Je ne disposais d'aucune preuve qui m'a démontré que le travail que j'exécutais était conflictuel. Le rapport que j'ai déposé [en 1999] indiquait que j'exercerais certaines activités et non que je les exerçais réellement. »
  5. Il a indiqué : [traduction] « J'ai refusé des dossiers lorsque je connaissais le contribuable ou son représentant. »
  6. Il n'a jamais été informé de la façon dont ses activités pourraient représenter un conflit d'intérêts réel ou potentiel, même s'il avait demandé d'obtenir une telle explication.
  7. Il a indiqué : [traduction] « La norme relative au conflit consiste en un conflit réel ou potentiel. Les possibilités qui m'ont été présentées en tant qu'activités externes étaient d'une telle nature qu'elles ne représenteraient jamais un conflit réel ou potentiel. »
  8. Il a indiqué : [traduction] « Un grief est en cours et toute décision se rapportant à la conclusion de l'enquête devrait être reportée jusqu'à ce que le grief soit tranché. »

100 Le 28 décembre 2006, le fonctionnaire a envoyé un courriel à M. Allen (avec copie conforme à M. Rafferty). Il a indiqué que pendant la réunion du 15 novembre, M. Allen s'était engagé [traduction] « […] à avoir les raisons pour lesquelles les activités [du fonctionnaire] énumérées constituaient un conflit réel ou potentiel avec [ses] fonctions à l'ARC » au plus tard le 15 décembre (pièce E1, onglet 22). Il a souligné qu'il n'avait pas encore reçu ces raisons, mais qu'il était disposé à proroger le délai afin de permettre à M. Allen de respecter cet engagement au plus tard le 5 janvier 2007. Toutefois, si la lettre n'est pas reçue à cette date, […] il présenterait une lettre pour annuler [son] acceptation de ne pas exécuter des travaux d'évaluation externes, la nature desquels a été fournie à [M. Allen] » (pièce E1, onglet 22). Il a ajouté qu'il [traduction] « […] réexaminera le report de [son] travail externe sur réception de la lettre promise [par M. Allen] à la réunion de novembre » (pièce E1, onglet 22).

101 M. Allen a répondu par courriel le 3 janvier 2007 (pièce E1, onglet 22) pour l'informer qu'une lettre en date du même jour (pièce E1, onglet 18) lui avait été envoyée. Dans la lettre, M. Allen a indiqué qu'il fournirait au fonctionnaire des précisions quant au conflit allégué au plus tard le 31 janvier. Toutefois, il a rappelé ce qui suit au fonctionnaire (pièce E1, onglet 18) :

[Traduction]

 […] la directive qui vous a été donnée relativement à votre obligation d'abandonner immédiatement vos activités commerciales externes. La directive est toujours en vigueur. Ma décision de vous fournir des précisions supplémentaires au sujet de votre conflit d'intérêts au plus tard le 31 janvier 2007 ne porte pas atteinte ni ne change ma conclusion initiale qu'il existe un conflit d'intérêts et ne modifie pas ma directive antérieure selon laquelle vous devez cesser et abandonner vos activités commerciales externes.

102 M. Allen a ensuite traité de la décision du fonctionnaire d'annuler son acceptation du 15 novembre 2006 en expliquant qu'elle [traduction] « […] n'annule pas ma directive selon laquelle vous devez cesser vos activités commerciales externes. » Selon M. Allen, l'annulation du fonctionnaire à son acceptation antérieure n'a non seulement perpétué le conflit, mais elle constituait également un acte d'insubordination. M. Allen a informé le fonctionnaire que les deux pouvaient entraîner une mesure disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement (pièce E1, onglet 18).

103 Quelques jours plus tard, soit le 5 janvier 2007, M. Allen a reçu l'analyse provisoire de M. Walkingshaw relativement au conflit d'intérêts possible entre le poste d'évaluateur d'entreprises classifié AU-03 du fonctionnaire et ses activités externes (pièce E1, onglet 19).

104 M. Walkingshaw a effectué un examen et une comparaison détaillés du travail d'un évaluateur classifié AU-03 du BSF de Toronto-Centre et de celui d'un EEE, comprenant aussi les activités externes que le fonctionnaire avait décrites au fil du temps comme étant des activités s'inscrivant dans la portée de ce qu'il pourrait faire ou qu'il faisait déjà. Il a indiqué ce qui suit (pièce E1, onglet 19) :

[Traduction]

[…] toutes les activités énumérées par l'employé comme des services possibles qu'il pourrait offrir à titre d'activités externes exigeraient des connaissances en matière de comptabilité, de vérification, de fiscalités, de pratiques opérationnelles, d'évaluation, de finance et d'autres principes et domaines semblables.

Plus particulièrement, toutes les fonctions énumérées ci-dessus concernent soit la détermination d'une valeur ou la fourniture de conseils fiscaux (dans le cadre des conseils relatifs aux structures les plus avantageuses à utiliser).

Lorsqu'un employé qui est un évaluateur exerce toute activité qui concerne la détermination de valeurs, il se place dans une situation de conflit potentiel parce que toute évaluation pourrait avoir des conséquences fiscales (les déterminations d'une valeur plus élevée ou moins élevé pourraient entraîner des taxes plus ou moins élevées à payer). Un employé ne peut pas participer à la détermination des valeurs sans potentiellement entraîner une conséquence fiscale. Il se peut que les conséquences ne se limitent pas à l'entité concernée, mais qu'elles puissent en toucher d'autres, p. ex. les acheteurs, les vendeurs, les prêteurs, les investisseurs, etc. (Veuillez noter que l'ARC pourrait être une créancière.)

105 M. Walkingshaw a également indiqué que les évaluateurs classifiés AU-03 devaient examiner les questions relatives à l'évaluation qui avaient été relevées dans le cadre du premier examen des dossiers de vérification fiscale afin de déterminer s'il existait effectivement une préoccupation relative à l'évaluation. Si l'évaluateur a fourni des services d'évaluation externes au contribuable concerné, il a indiqué [traduction] qu'« […] un conflit potentiel existerait si l'employé peut exercer ces fonctions en tant que travail externe et qu'il lui incombe ensuite de déterminer les dossiers à sélectionner aux fins d'examen par l'ARC » (pièce E1, onglet 19, page 5).

106 M. Walkingshaw a conclu que les activités externes énumérées par le fonctionnaire pouvaient entraîner des conflits d'intérêts et que de permettre à un employé d'exercer de telles activités entraînerait un conflit apparent (pièce E1, onglet 19, page 6).

107 M. Walkingshaw a produit son rapport définitif le 8 janvier 2007. Le rapport était plus détaillé que la version provisoire et mentionnait le courriel du fonctionnaire du 27 novembre 2006. Toutefois, le résultat était le même. Il a conclu ce qui suit (pièce E1, onglet 20, pages 17 et 18) :

[Traduction]

Peu importe l'intention de la réponse de M. Cavanagh [aux diverses directives d'abandonner ses activités qui lui ont été données], les deux faits suivants sont clairs :

i)   M. Cavanagh ne s'est pas conformé aux directives qui lui ont été données puisqu'il a continué d'exercer des activités externes;

ii)  même si l'on accepte les limitations imposées par M. Cavanagh à ces directives, il a violé l'entente en aidant des clients qui achetaient des entreprises à la juste valeur marchande puisque, pour ce faire, il doit leur donner un avis quant à la valeur (ce qu'il avait accepté de ne pas faire).

108 M. Walkingshaw a ajouté que le fonctionnaire avait créé un conflit réel en continuant d'exécuter le travail qu'il disait faire et qu'il avait également créé [traduction] « […] un conflit d'intérêts apparent en se présentant comme étant disponible pour exécuter ces travaux pendant qu'il travaillait encore à l'ARC » (pièce E1, onglet 20, page 18). Il est d'avis qu'il s'agissait d'un manquement grave au Code sur les conflits.

109 Le 26 janvier 2007, M. Allen a fourni au fonctionnaire les précisions qu'il s'était engagé antérieurement à lui fournir (pièce E1, onglet 21). Celles-ci comptaient cinq pages, dont une liste des domaines de conflit réel, apparent et potentiel qui existaient entre le travail du fonctionnaire à titre d'évaluateur d'entreprises AU-03 et les activités externes qu'il avait indiqué qu'il exerçait ou qu'il pourrait exercer.

110 M. Allen a souligné les domaines dans lesquels le fonctionnaire a dit pouvoir être impliqué, notamment les affaires matrimoniales, les faillites, le flux de trésorerie et les analyses d'inventaire, et il a indiqué ce qui suit (pièce E1, onglet 21) :

[Traduction]

[…] Ces [activités] exigeraient ou pourraient exiger une détermination expresse ou implicite de la valeur de biens ou de la capacité du bien de produire un flux de trésorerie (ce qui constitue en soi un facteur déterminant de la valeur). Encore une fois, une telle détermination pourrait être assujettie à un examen par l'Agence; l'examen pourrait ne pas nécessairement porter sur les affaires de votre client, mais il pourrait concerner une autre partie à l'opération. Votre participation consistant à fournir un avis quant à la valeur est incompatible avec vos fonctions d'évaluateur de l'Agence.

111 M. Allen a ensuite indiqué ce qui suit relativement aux conflits d'intérêts apparents : [traduction] « […] il ne s'agit pas d'une question de savoir si vous avez un tel avantage [en fonction du statut du fonctionnaire à titre d'employé de l'ARC] ou de savoir si votre objectivité est influencée, mais d'une question de savoir si une personne externe pourrait raisonnablement conclure qu'il en est ainsi. » Il indique en outre son opinion selon lequel, [traduction] « […] il pourrait en être ainsi et, par conséquent, il existe un conflit apparent » (pièce E1, onglet 21). Il a donc conclu que la participation du fonctionnaire à ses activités externes devrait être interdite et abandonnée (pièce E1, onglet 21).

112 Le fonctionnaire a répondu à cette lettre le 1er février 2007 (pièce E1, onglet 23). Il a indiqué à M. Allen qu'il avait [traduction] « […] lu rapidement la lettre et, comme vous pouvez bien vous en attendre, je crois que vous avez de nombreuses conceptions erronées au sujet du travail d'évaluation en raison de vos consultations » (pièce E1, onglet 23). Il a ensuite indiqué que le problème pourrait être corrigé en le mutant à la section des prix de cession, au sein de la Division de la vérification. Il a indiqué qu'il accepterait une telle mutation afin de [traduction] « conserver [ses] possibilités non liées à l'ARC », en ajoutant que si son poste d'évaluateur d'entreprises classifié AU-03 [traduction] « […] est ce qui entraîne le conflit, il l'éviterait en n'occupant pas ce poste » (pièce E1, onglet 23).

113 Le 7 février 2007, le fonctionnaire a envoyé un long courriel à M. Allen. Il a renouvelé sa demande de mutation. Il s'est ensuite plaint au sujet de M. Dunham. Il est demeuré d'avis qu'il ne faisait pas l'objet d'un traitement équitable et il a répété qu'il envisageait la possibilité d'annuler son [traduction] « acceptation [du 15 novembre 2006] d'abandonner ses activités […] » (pièce E1, onglet 24). Il a ensuite indiqué ce qui suit :

[Traduction]

Grâce à la divulgation ci-dessus [de ses plaintes au sujet de M. Dunham] et de la capacité de régler mon « conflit » à l'aide d'une mutation, il ne me semble pas raisonnable de détruire le rythme que mon cabinet privé a atteint; d'autres retards me feraient subir des conséquences néfastes et peut-être même un préjudice financier permanent. Je dois [les] atténuer, dans la mesure du possible.

114 Le fonctionnaire a conclu à l'aide de l'observation suivante (pièce E1, onglet 24) :

[Traduction]

Je sais que vous êtes occupés et avez probablement des problèmes plus importants que les miens et c'est la raison pour laquelle vous ne pouvez me faire parvenir des réponses plus rapidement. Toutefois, je ne peux mettre ma vie en suspens jusqu'à ce que mon numéro soit appelé. Par conséquent, tel que je l'ai indiqué, je me prépare à démarrer de nouveau mon cabinet privé et je vous enverrai une lettre par courrier électronique à ce moment-là pour vous en informer.

115 Le 9 février 2007, M. Allen a rédigé une lettre à l'intention du fonctionnaire. Il a accusé réception de la demande de mutation du fonctionnaire et l'a informé qu'il avait acheminé la demande au directeur adjoint de la Division de la vérification. Il a ensuite rappelé au fonctionnaire son acceptation datant du 15 novembre 2006 : [traduction] « […] où vous avez accepté de vous conformer à ma directive de cesser toute activité commerciale externe » (pièce E2). Il souhaitait indiquer clairement que sa directive demeurerait [traduction] « […] en vigueur jusqu'à ce que [le fonctionnaire obtienne] un avis contraire » (pièce E2).

116 Le 13 février 2007, Mark DeMarco, un autre évaluateur qui travaillait au bureau de M. Cavanagh, a reçu un courriel qui semblait provenir de M. Cavanagh. Son objet était le suivant : [traduction] « M. Sean Cavanagh, CA, EEE, a un nouveau titre de poste : directeur » (pièce E37). Le corps du courriel comprenait les énoncés suivants :

[Traduction]

Élargissez votre réseau Plaxo

Invitez vos amis à vous joindre à votre réseau Plaxo afin que vous receviez toujours automatiquement vos dernières coordonnées respectives.

Votre statut de membre

Membre de Plaxo depuis 2004-12-01

M. Sean Cavanagh, CA, EEE, a un nouveau titre de poste

Plaxo a automatiquement mis à jour ces renseignements dans votre carnet d'adresses.

Renseignements relatifs au travail : M. Sean Cavanagh, CA, EEE

                   Directeur, FS Capital Corporationn [sic]

Anciens renseignements relatifs au travail :            Directeur

Nouveaux renseignements relatifs au travail :                   Directeur

Puisque Sean et vous êtes tous deux membres de Plaxo, votre carnet d'adresses comprendra toujours les derniers renseignements au sujet de Sean. Aucune autre mesure n'est requise.

[Le passage en évidence l'est dans l'original]

117 Les énoncés suivants figuraient à la fin du courriel (pièce E37) :

[Traduction]

Ne pas m'informer la prochaine fois que les coordonnées de M. Sean Cavanagh, CA, EEE changent.

Contrôler la fréquence à laquelle vous recevez ces avis par courriel.

Ce message vous a été envoyé par Plaxo au nom de M. Sean Cavanagh, CA, EEE.

[Le passage en évidence l'est dans l'original]

118 En contre-interrogatoire, M. Cavanagh a déclaré ne pas savoir comment ces renseignements ont été saisis dans Plaxo, un site de gestion de contrats en ligne. Il a affirmé qu'il était d'accord que les renseignements étaient [traduction] « évidemment mes renseignements, mais je ne sais pas comment ils ont été saisis dans ce site ». Il a expliqué [traduction] qu'« à cette époque » il y avait [traduction] « de nombreux problèmes dans le cyberespace […] de nombreux logiciels qui effectuaient l'exploration de données et qui volaient des renseignements. » Il a indiqué qu'il était peut-être, à un moment donné, devenu membre de Plaxo (qu'il a décrit comme un genre de Rolodex électronique en ligne), mais il a ensuite suggéré que Plaxo aurait pu explorer les données et les avoir obtenus ailleurs. Il a laissé entendre que Plaxo était lié à son application de courrier électronique Outlook en tant que module d'extension. Lorsqu'il a mis à jour sa Cartev (carte professionnelle virtuelle) dans Outlook, il se peut que les renseignements aient été envoyés automatiquement aux autres membres de Plaxo, sans qu'il ne prenne lui-même de mesures à cet égard.

119 Puisque je traite de cette question, je dois dire que je suis convaincu, en raison de la preuve, que M. Cavanagh était membre de Plaxo depuis 2004 et que lorsqu'il est devenu membre, il s'était décrit comme un « directeur » (« principle » dans la version anglaise). La faute d'orthographe en anglais est importante, car il s'agit de la même faute d'orthographe qui figure dans le site Web d'Industrie Canada. Puisque M. Cavanagh a admis avoir fourni les renseignements figurant sur le site Web d'Industrie Canada, je suis convaincu qu'il était à l'origine de l'erreur initiale.

120 De plus, je crois qu'en février 2007, le fonctionnaire était vraisemblablement responsable du changement des renseignements dans Plaxo lorsque le terme anglais « principle » a été remplacé par le terme « principal ».

121 Il me paraît invraisemblable qu'un programme informatique constate la différence entre les deux termes anglais (lesquelles étaient respectivement correctement épelées) ou comprendre que le mauvais terme anglais avait été utilisé antérieurement. Il me paraît beaucoup plus probable que M. Cavanagh, alors qu'il examinait les renseignements figurant sur le site Plaxo, pour une raison quelconque à ce moment-là, ait constaté l'utilisation du mauvais terme anglais et l'ait modifié.

122 Le 22 février 2007, M. Walkingshaw a signé un rapport sur les mesures disciplinaires. Une mesure disciplinaire sous forme d'une suspension de 10 jours sans rémunération a été imposée au fonctionnaire, à compter du 22 mars 2007 (pièce E1, onglet 26). (Il s'agit de la première des trois questions relatives aux mesures disciplinaires dont je suis saisi.) Selon le rapport, M. Cavanagh a été ordonné de cesser ses activités externes le 22 juillet 2004, au motif qu'elles constituaient un conflit d'intérêts. Il était également indiqué dans le rapport qu'une enquête subséquente avait révélé qu'il avait continué d'exercer les activités externes.

123 Après avoir consigné la mesure disciplinaire, le rapport indique que le fonctionnaire devait se conformer aux directives antérieures d'abandonner ses activités externes et, en outre, [traduction] « […] d'honorer [son] accord conclu avec le directeur en date du 15 novembre 2006 selon lequel [il] avait accepté de se conformer aux directives de cesser toutes les activités commerciales externes » (pièce E1, onglet 26).

124 Le 27 février 2007, M. Cavanagh a déposé un grief contestant la suspension de 10 jours au motif qu'elle était injuste, déraisonnable et sans fondement (pièce G22; dossier de la CRTEFP 2161).

125 Le 5 mars 2007, le fonctionnaire a envoyé un courriel à M. Allen. Il a indiqué qu'il était [traduction] « […] clair que nous étions dans une impasse, avant d'annuler ma lettre d'abandon, j'aimerais savoir si vous souhaiteriez tenir une réunion officieuse en vue de régler la question sans conflit » (pièce E1, onglet 27).

126 M. Allen a répondu le lendemain en indiquant qu'une réunion ne serait pas possible avant le 16 mars 2007. Il a offert d'en organiser une entre le fonctionnaire, Mme Tadesco, directrice adjointe de la Vérification où le fonctionnaire a demandé être muté, et lui-même. Il a proposé une heure et un emplacement (pièce E1, onglet 27).

127 Le fonctionnaire a rejeté cette offre en soulignant que la présence de Mme Tadesco à la réunion (même s'il s'agissait de sa division) ne permettra pas de régler quoi que ce soit. Il a conclu en indiquant qu'il ne croyait pas que la réunion proposée [traduction] « […] règle quoi que ce soit et que rien dans cette dernière ronde de discussion ne me permet de croire qu'une nouvelle orientation pourrait être élaborée » (pièce E1, onglet 27). Par conséquent, il [traduction] « […] [a] refusé la réunion [qu'il avait] demandée et que [M. Allen] avait prévu le 16 » (pièce E1, onglet 27).

128 Le 7 mars 2007, le fonctionnaire a envoyé un autre long courriel à M. Allen. Il a expliqué qu'il avait « offert » la lettre d'abandon : [traduction] « […] en vue de parvenir, de bonne foi, à un règlement de la question concernant le travail externe que j'ai divulgué souhaiter exécuter depuis 1999 » (pièce E1, onglet 28). Il a expliqué qu'il était d'avis que l'enquête subséquente et que ses demandes répétées d'éclaircissements du conflit allégué n'avaient jamais révélé un conflit réel. Il a ensuite indiqué ce qui suit :

[Traduction]

Je dépends, sur le plan économique, des fonds que je tire de mon cabinet externe et je subirais un préjudice important si j'abandonnais ce travail. J'ai cessé d'essayer à parvenir à une solution de rechange qui semble ne pas être ce que nous recherchions. Par conséquent, la lettre d'abandon ne s'applique plus.

En l'absence de votre intention de parvenir à une solution qui permet d'harmoniser mon engagement à la fonction publique et mon cabinet externe et, en outre, de ce qui semble être une volonté démontrée d'abandonner tout travail externe en toute forme quelconque, j'annule, par la présente, la lettre d'annulation fournie le 27 novembre 2006.

[Le passage en évidence l'est dans l'original]

129 Je souligne que les parties ont convenu que le renvoi au 27 novembre 2006 constitue une coquille et que le fonctionnaire voulait dire parler de la note manuscrite du 15 novembre 2006 (pièce E1, onglet 15).

130 M. Allen a répondu au courriel du fonctionnaire le 15 mars 2007 (pièce E1, onglet 29). Il a fortement recommandé au fonctionnaire de réexaminer la résiliation de sa lettre. Il a reconnu que le fonctionnaire avait déposé un grief contre la directive d'abandon de M. Allen. Toutefois, il a ajouté que le fonctionnaire était néanmoins [traduction] « […] tenu de continuer de suivre cette directive, pendant que votre opposition est traitée au cours des étapes appropriées du processus de grief » (pièce E1, onglet 29). M. Allen l'a informé qu'il était disposé à accorder au fonctionnaire jusqu'au 30 mars pour réexaminer sa position et confirmer qu'il cessera et abandonnera ses activités externes (pièce E1, onglet 29). Le défaut de s'y conformer constituerait un motif de mesure disciplinaire.

131 M. Allen n'a reçu aucune réponse. Il a été absent du bureau pendant un certain temps et, à son retour en juillet, il a constaté l'absence de toute réponse. Le 19 juillet 2007, il a écrit au fonctionnaire et lui a répété sa demande; il a également prorogé le délai de conformité au 31 août (pièce E1, onglet 30).

132 Le 7 septembre 2007, M. Allen a envoyé un courriel au fonctionnaire. Il a rappelé au fonctionnaire qu'il lui avait demandé une réponse écrite à sa lettre du 19 juillet au plus tard le 31 août, précisant qu'il n'avait pas reçu une telle réponse (pièce E3). Il souhaitait rencontrer le fonctionnaire le 11 septembre et il a indiqué que puisque la réunion portait sur la question relative au conflit d'intérêts, l'agent négociateur du fonctionnaire pouvait y assister aux fins d'observation (pièce E3).

133 Le fonctionnaire n'a pas assisté à la réunion du 11 septembre 2007 (pièce E4). Une autre réunion a été prévue pour le 17 septembre. M. Allen a informé le fonctionnaire que le défaut d'assister à cette réunion serait considéré comme un acte d'insubordination (pièce E4).

134 La réunion a eu lieu. Le 21 septembre 2007, M. Rafferty a envoyé un courriel à M. Allen après la réunion. Il l'a remercié de sa volonté de discuter des questions soulevées par le fonctionnaire. Il a indiqué ce qui suit au sujet de la réunion (pièce E5) :

[Traduction]

Sean a été très honnête avec vous lorsqu'il a indiqué qu'il ne pouvait simplement pas s'acquitter de ses obligations financières si l'employeur l'empêchait d'exercer, de temps à autre, des activités externes. Aucun problème n'est survenu depuis 1999 lorsqu'il a déposé sa déclaration de conflit.

135 M. Rafferty a ensuite indiqué ce qui suit (pièce E5) :

[Traduction]

[…] [même s'il n'existe] aucune solution facile pour régler la situation pendant que nous attendons l'issu de l'examen indépendant à Ottawa, Sean et moi avons convenu que, parmi les options que nous avons discutées, celle qui est la plus susceptible d'entraîner une situation gagnante-gagnante serait la mutation de Sean aussitôt que possible à la Formation. Évidemment votre approbation serait nécessaire à titre de préalable et je vous demande maintenant si vous seriez disposé à faciliter la mutation de Sean en effectuant ce qui suit :

  1. accepter de lui permettre de quitter les Évaluations pour être muté à la Formation;
  2. communiquer avec le directeur de la Formation et l'informer de l'intérêt de Sean à occuper un poste à la Formation et que vous acceptez qu'il y soit muté. […]

136 M. Allen a répondu à ce courriel le 3 octobre 2007. Même s'il a reconnu l'importance de cette question auprès du fonctionnaire, il a souligné que la question était en cours depuis 2003. Il a ajouté que malgré le fait qu'ils attendaient l'issu de l'examen à Ottawa, M. Cavanagh avait tout de même été ordonné de cesser et d'abandonner ses activités externes. Il a dit qu'il était prêt à communiquer avec d'autres secteurs en vue de les informer du fait que le fonctionnaire souhaitait être muté (et pourquoi), mais qu'il incombait au fonctionnaire de demander une telle mutation, et qu'il incombait à la direction du secteur où la mutation était demandée de prendre la décision (pièce G17).

137 Le 9 janvier 2008, Lysanne Gauvin, sous-commissaire de la Direction générale des ressources humaines de l'ARC, a rédigé une lettre au nom du Comité permanent en réponse au rapport confidentiel de 1999 du fonctionnaire. Elle a souligné la lettre du 26 janvier 2007 de M. Allen (pièce E1, onglet 21) et a mentionné que le travail que le fonctionnaire avait proposé d'exécuter entraînait des conflits d'intérêts réels, apparents ou potentiels et que, par conséquent, ces travaux étaient interdits et devaient cessés. Elle a indiqué que le Comité avait examiné la question et conclu ce qui suit : [traduction] « Il existe l'apparence de conflit en raison de la probabilité que le public percevrait que vous [le fonctionnaire], que ce soit consciemment ou non, serait influencé dans le cadre de l'exercice de vos fonctions officielles par des questions liées à vos intérêts privés » (pièce G24).

138 Environ au même moment, une réunion a été tenue à Ottawa entre le fonctionnaire et M. Rafferty, d'une part, et Sonia Virc, une conseillère principale en relations de travail, d'autre part. La réunion avait pour objet de tenter de régler les multiples griefs de M. Cavanagh et de déterminer s'il y avait une façon de parvenir à une solution mutuellement acceptable aux problèmes qu'il a indiqués éprouver à l'égard du BSF de Toronto-Centre.

139 J'ai informé le fonctionnaire que, habituellement, je n'entends pas de telle preuve parce qu'elle serait privilégiée dans le cadre des négociations en vue d'un règlement. Toutefois, le fonctionnaire souhaitait témoigner quant au sujet discuté parce que, selon lui, la preuve appuyait son allégation selon laquelle son licenciement n'était pas de bonne foi. Il a allégué que le licenciement découlait d'un motif autre, soit de se débarrasser de lui, et que la preuve lui permettait de démontrer cette mauvaise foi. Il a également fait valoir que Mme Virc avait en fait accepté un règlement qui lui était favorable, mais que ce règlement avait été contrecarré par la décision de le licencier qui avait été prise à Toronto.

140 En raison de cet argument, j'ai permis au fonctionnaire de témoigner au sujet de ces discussions et, plus particulièrement, de déposer en preuve la correspondance par courriel qui renvoyait à ces discussions (pièce G30).

141 Le fonctionnaire a affirmé que lui et M. Rafferty avaient été informés à la réunion qu'il était évident que le bureau de Toronto souhaitait se débarrasser de lui. Pendant la réunion, ils ont exploré diverses solutions de rechange au licenciement définitif.

142 Il est ressorti de l'échange de courriels du 18 mars 2008 entre Mme Virc, le fonctionnaire et M. Rafferty que le fonctionnaire souhaitait obtenir une rémunération de 12 mois pour régler la question (pièce G30). La direction a estimé que cela était inacceptable, mais elle était disposée à envisager la cessation d'emploi au motif d'incapacité médicale, aux termes de l'alinéa 51(1)g) de la Loi sur l'Agence du revenu du Canada (L.C. 1999, ch. 17). Une telle cessation d'emploi aurait permis de préserver une partie (mais non l'intégralité) de la pension et d'autres avantages sociaux du fonctionnaire et, plus particulièrement, lui aurait donné droit à une indemnité de départ correspondant à une semaine pour chaque année de service.

143 À son tour, le fonctionnaire a estimé que cela était inacceptable et il a informé Mme Virc le 18 mars 2008 de ce qui suit : [traduction] « […] si l'ARC n'est pas disposée à m'offrir un meilleur règlement, je me fierai à l'AI [assurance invalidité] » (pièce G30). Il a suggéré de reporter la suspension jusqu'à ce que sa demande d'AI soit traitée parce que si elle était acceptée [traduction] « […] l'indemnité de départ ne serait pas aussi utile à rendre l'offre acceptable » (pièce G30).

144 Voici la réponse de Mme Virc qui lui a été acheminée le même jour :

[Traduction]

[…] la principale priorité de la direction est de s'assurer que vous vous conformez à son ordonnance d'abandonner vos activités qui entraînent un conflit d'intérêts et de traiter de votre refus passé. La question de savoir si la suspension sera par la suite remboursée dans le cadre d'un règlement futur en est une que nous pourrions discuter, mais il n'est pas dans l'intérêt supérieur de la direction de retarder indéfiniment la suspension dans ces circonstances, surtout étant donné que même après que vous recevrez les renseignements de votre médecin spécialiste le 25 mars, un certain temps pourrait s'écouler avant que l'AI vous informe de l'approbation ou du refus de votre demande.

[Le passage en évidence l'est dans l'original]

145 À partir de ce qui précède, je suis convaincu que le mieux que l'on puisse dire à ce stade est ce qui suit :

  1. Le fonctionnaire et M. Rafferty exploraient avec Mme Virc plusieurs solutions possibles aux problèmes entre le fonctionnaire et son gestionnaire à Toronto.
  2. Ses gestionnaires, ainsi que Mme Virc, étaient disposés à poursuivre ces négociations.
  3. Toutefois, ses gestionnaires n'étaient pas disposés à suspendre leurs directives de cesser et d'abandonner ses activités entre-temps.

146 Il n'existe aucune preuve selon laquelle la direction, à Toronto ou à Ottawa, ne négociait pas de bonne foi avec le fonctionnaire ni que le licenciement représentait un changement soudain de sa position jusqu'alors.

147 Je suis convaincu que personne du côté patronal n'a, à aucun moment, dit au fonctionnaire qu'elle ne s'attendait pas à ce qu'il se conforme aux directives qui lui ont été données en attendant les discussions visant à régler les griefs et les problèmes dont ils étaient parties.

148 Pour revenir à la chronologie, le 5 mars 2008 (soit avant l'échange de correspondance déjà mentionnée du 18 mars), un deuxième rapport sur les mesures disciplinaires a été rédigé (pièce E1, onglet 32). Le fonctionnaire a été suspendu sans rémunération, du 20 mars au 18 avril 2008.

149 Le 13 mars 2008, M. Cavanagh a déposé un grief, alléguant que la suspension de 20 jours était déraisonnable et non justifiée (pièce G23; dossier de la CRTEFP 3543).

150 Le 24 avril 2008, M. Allen a écrit au fonctionnaire. Il lui a rappelé les nombreuses directives écrites qu'il avait reçues (pièce G25) :

[Traduction]

[…] de cesser et d'abandonner vos activités externes concernant les évaluations qui ont été jugées comme constituant un conflit d'intérêts en vertu de la politique et des lignes directrices sur les conflits d'intérêts de l'Agence. Par conséquent, vous êtes ordonné encore une fois de vous abstenir immédiatement d'exercer ces activités. Cette directive comprend également la fermeture du site Web de votre entreprise.

151 À l'audience, l'employeur a déposé une preuve portant sur le site Web en vue d'expliquer la directive de M. Allen. Il a déposé en preuve un imprimé du site Web de FSC en date du 2 juin 2008 (pièce E6).

152 Le titre de l'une des pages Web était [traduction] « À propos de nous ». Elle comportait les énoncés suivants (pièce E6) :

[Traduction]

FSC est une entreprise de conseils financiers établie en vue d'un rendement élevé à l'aide de normes de déontologie absolue. Notre mission consiste à préserver et à accroître la richesse des particuliers et des sociétés clients. Elle a une expertise spécialisée en droit, en évaluation fiscale et des placements, une perspective axée sur le mérite en mettant l'accent sur la création de la richesse afin d'offrir un service à valeur ajoutée aux clients exigeants ayant un avoir net élevé […].

FSC dispose d'un effectif spécialisé relativement aux services essentiels qu'elle offre, mais ses forces sont dans le domaine de l'association professionnelle avec des experts talentueux de multitudes domaines spécialisés. Notre force consiste à déterminer et à fournir des solutions qui permettent aux clients de mettre l'accent sur ce qu'ils font le mieux.

153 En contre-interrogatoire, le fonctionnaire a été interrogé au sujet de la mention [traduction] « effectif spécialisé ». Je suis d'avis que sa réponse n'était pas particulièrement claire.

154 Toutefois, le fonctionnaire n'a pas identifié d'individu particulier [traduction]  « associé » à FSC. Il n'a pas identifié ni décrit les professionnels (autre que lui-même) qui collaboreraient avec FSC ou en association avec FSC. Il n'a pas expliqué la façon dont l'exercice d'une [traduction] « […] expertise spécialisée en droit, en évaluations fiscales et des placements […] » ne pourrait pas concerner certaines des fonctions qu'il exerce à titre d'évaluateur d'entreprises au BSF de Toronto-Centre.

155 Le fonctionnaire a également été questionné, en contre-interrogatoire, au sujet de la date à laquelle FSC a été constituée en personne morale. Il a répondu ce qui suit :

[Traduction]

[…][Je n'ai] aucune idée […] au milieu de 2004 ou de 2005 […] elle n'était pas exploitée […] j'avais un site Web, mais il n'était pas actif, il était stagnant […] en 2005, mon père est tombé malade […] cela a été une année difficile […] Par conséquent, j'ai décidé de rester encore un an à l'ARC […] lorsque l'on établit un site Web, on veut qu'il semble important, mais cela ne signifie pas que l'on exerce toutes les activités qui y sont affichées […] J'ai énuméré plusieurs activités, mais je n'en ai exercé qu'une […] Je souhaitais simplement établir les bases afin que lorsque je quitterais l'ARC […] je puisse me mettre à la tâche sans tarder.

156 L'énoncé suivant figure à la page [traduction] « Services », dans la section « À propos de nous » du site Web de FCS (pièce E6) :

Le fondement de FSC consiste en l'évaluation d'entreprises et les fusions et les acquisitions dont les services se comparent à la plupart des entreprises spécialisées, dont l'effectif possède une expérience importante en matière d'impôt et concernant l'ARC :

Fusions, acquisitions

Retranchement

Opérations concernant des actions

Actionnariat des salariés

Dissolution des sociétés

Réorganisation d'une société

Dommages

Avis sur la juste valeur marchande

Allocation du prix d'achat

Dépréciation d'un écart d'acquisition

Planification de la relève


            Une expérience en réorganisation des sociétés et en matière contentieuse a permis d'offrir une expertise en matière commerciale et en conséquence fiscale dans le cadre des accords suivants :

Matrimonial                                Société de personnes

Actionnaire                                Coentreprise

157 Le nom du fonctionnaire (ou quelque nom que ce soit) ne figure nulle part dans le site Web. La page des coordonnées affiche le numéro de téléphone, l'adresse électronique et l'adresse postale suivants :

416-545-9559

info@fscapital.ca

Case 181, 157, rue Adelaide Ouest, Toronto.

158 Je souligne que le numéro de téléphone et l'adresse sont les mêmes que ceux fournis à titre de coordonnées de FSC dans les sites Web d'Industrie Canada et de l'ICEEE, tel qu'il a été mentionné ci-dessus. Toutefois, l'adresse électronique est différente. Le nom du fonctionnaire a été remplacé par le terme « Info ». Il n'a pas expliqué, dans son témoignage, la raison pour laquelle il aurait fourni antérieurement une adresse électronique comprenant son nom, pour ensuite la remplacer par une adresse électronique générique.

159 Pour en revenir à la lettre de M. Allen du 24 avril 2008, celui-ci a reconnu que M. Cavanagh avait déposé un grief relativement à la directive et à la mesure disciplinaire qui lui avait été imposée. M. Allen l'a informé qu'il était néanmoins tenu de suivre la directive en attendant l'issu du processus de grief. M. Allen a conclu en indiquant qu'il s'attendait à recevoir une réponse écrite au plus tard le 2 mai 2008, [traduction] « […] indiquant l'acceptation [du fonctionnaire] d'abandonner [ses] activités externes » (pièce G25).

160 M. Allen a indiqué que s'il ne recevait pas une telle réponse dans le délai imparti, qu'il conclurait que le fonctionnaire [traduction] « […] était encore en situation de conflit d'intérêts et [qu'il a] commis un acte d'insubordination » (pièce G25). Il a averti le fonctionnaire que les deux situations pouvaient entraîner une mesure disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement (pièce G25).

161 Le 30 avril 2008, le fonctionnaire a envoyé un courriel à M. Allen (pièce E1, onglet 31) qui indiquait ce qui suit :

[Traduction]

La présente fait état de ma conformité à votre lettre du 24 avril 2008 relativement à la lettre du 9 janvier 2008 provenant de Mme Lysanne Gauvin. Je n'ai pas été employé à titre d'évaluateur d'entreprises et je n'accepterai aucun tel emploi pendant que je travaille à titre d'évaluateur classifié AU-03 à l'ARC.

162 M. Allen a répondu le 1er mai 2008. Il a remercié le fonctionnaire de sa confirmation, mais il a souligné que sa lettre du 24 avril comprenait également une directive selon laquelle il devait fermer son site Web. Il a demandé une réponse au plus tard le 2 mai (pièce E1, onglet 34).

163 Le 6 mai 2008, le fonctionnaire a envoyé un courriel à M. Allen. Il s'est excusé du retard de sa réponse en indiquant que son dos avait [traduction] « […] subit une récidive et [qu'il] éprouvait de grandes douleurs et les médicaments [l']empêchaient d'être aussi attentif que possible » (pièce E1, onglet 34). Il a ensuite posé la question suivante : [traduction] « […] d'où provient votre pouvoir de m'obliger à fermer le site Web? » (pièce E1, onglet 34).

164 Je m'arrête ici pour souligner que pendant le contre-interrogatoire de M. Allen, le fonctionnaire lui a demandé pourquoi il était mécontent de son courriel du 30 avril 2008 dans lequel il a supposément confirmé qu'il n'avait pas été employé à titre d'évaluateur d'entreprises et qu'il ne le serait pas dans le cadre de ses activités externes (pièce E1, onglet 31). M. Allen a répondu que l'historique de la question jusqu'à ce stade lui avait permis de se questionner à savoir si la lettre constituait une confirmation que le fonctionnaire avait abandonné toutes ses activités externes. À ce sujet, je suis convaincu que M. Allen avait plusieurs motifs d'être douteux.

165 Tout d'abord, bien que M. Allen ait demandé une confirmation que toutes les activités externes seraient abandonnées, le fonctionnaire a seulement confirmé qu'il n'agirait pas à titre d'« évaluateur d'entreprises ». Selon le témoignage du fonctionnaire, il est évident qu'il croyait que le travail d'un EEE englobait trois niveaux d'assurance et qu'uniquement les opinions (selon lui) étaient incompatibles avec son travail d'évaluateur d'entreprises à l'ARC. À ce stade, le fait que le fonctionnaire affirme qu'il ne travaillerait pas à titre d'évaluateur d'entreprises ne peut être interprété comme voulant dire qu'il cesserait toutes les activités externes qu'il exerçait sous le couvert de FSC.

166 En deuxième lieu, le fonctionnaire a affirmé qu'à un moment donné, le revenu qu'il tirait de ses activités externes était devenu nécessaire pour lui, partiellement en raison de son obligation de subvenir aux besoins de sa famille. Ce fait, ainsi que son témoignage selon lequel l'objet sous-jacent de FSC était de lui permettre de [traduction] « prendre une longueur d'avance » s'il cessait son emploi auprès de l'ARC, est incompatible avec la suggestion selon laquelle il était disposé, en mai 2008, de cesser toutes ces activités.

167 En troisième lieu, le fait que le fonctionnaire n'ait indiqué, nulle part dans son témoignage, qu'il avait cessé toutes ses activités externes. En tant que personne qui, selon lui, fait attention aux mots qu'il utilise et à leur signification, le courriel du 30 avril 2008 (pièce E1, onglet 31) du fonctionnaire ne peut être interprété comme étant une confirmation soigneusement restreinte qu'il n'effectuera plus d'avis d'évaluation d'entreprises, et qu'il cessera cette activité seulement. Le courriel ne peut être interprété comme étant une confirmation qu'il cesserait d'exercer ses activités externes donc il faisait la promotion à l'intention du public sous les auspices de FSC.

168 Cette conclusion est appuyée par le débat subséquent au sujet de la directive de M. Allen que le fonctionnaire devait également fermer le site Web de FSC.

169 Le 23 mai 2008, M. Allen a écrit au fonctionnaire pour l'aviser que la lettre constituerait son dernier avis ainsi que la dernière directive de cesser et d'abandonner immédiatement toutes les activités externes, y compris ce qui suit (pièce E1, onglet 35) :

  1. les évaluations d'entreprises et les services de consultation;
  2. les activités énumérées dans son rapport confidentiel de 1999;
  3. les activités décrites dans ses présentations au Comité permanent.

170 M. Allen a encore ordonné au fonctionnaire de fermer le site Web de son entreprise. Il lui a ordonné en outre [traduction] « […] de divulguer complètement toutes les activités externes exercées à titre d'évaluateur et toute autre entreprise ou autre emploi exercé au cours des deux dernières années, soit de mai 2006 à mai 2008 » (pièce E1, onglet 35). La menace d'une mesure disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement dans l'éventualité de la non-conformité a été réitérée.

171 Le fonctionnaire a répondu le 30 mai 2008. Il a indiqué qu'il était [traduction] « […] surpris de recevoir la lettre [de M. Allen] comprenant autant de demandes ». Il était confus par la demande de renseignements sur ses activités extérieures de mai 2006 à mai 2008. Il souhaitait discuter de la situation de manière approfondie avec son agent négociateur avant de tenter d'y répondre. Il a demandé la permission d'y répondre le 13 juin. Il a également souligné qu'il était prévu qu'il subisse une intervention chirurgicale (aucune date n'a été fournie; pièce E1, onglet 36). M. Allen a accepté en partie et lui a donné jusqu'au 6 juin pour se conformer à sa directive (pièce E1, onglet 36).

172 Le 6 juin 2008, Simon Ferrand, le nouvel agent négociateur du fonctionnaire, a écrit à M. Allen. Il a indiqué que le dossier venait de lui être attribué. Il a indiqué que la date limite du 6 juin avait été imposée au fonctionnaire pour répondre aux préoccupations soulevées dans la lettre du 23 mai de M. Allen (pièce E1, onglet 35). Il a indiqué que le fonctionnaire était en congé de maladie pendant une période indéterminée et qu'en raison de son état, il n'était pas en mesure de répondre le 6 juin. M. Ferrand a affirmé que [traduction] « […] lorsque M. Cavanagh sera assez bien sur le plan médical pour rédiger sa réponse, je vous en informerai [M. Allen] et il le fera » (pièce E7).

173 Lors de son témoignage, le fonctionnaire a expliqué l'origine de son problème médical, soit un mal de dos, et qu'une chirurgie devait être effectuée au printemps. Toutefois, il n'a pas expliqué comment son état de santé ou la chirurgie l'avait empêché de répondre aux énoncés simples et directs formulés à son égard dans la lettre du 23 mai 2008 (pièce E1, onglet 35).

174 Le 9 juin 2008, M. Allen a écrit au fonctionnaire et à M. Ferrand. Il a de nouveau informé le fonctionnaire du fait que sa participation continue à des activités externes constituait un manquement au Code sur les conflits (pièce E1, onglet 39). Il a exigé qu'ils assistent (par téléconférence, selon le cas) à une audience disciplinaire le 17 juin (pièce E8).

175 M. Ferrand a assisté à la réunion. Le fonctionnaire n'y a pas assisté. M. Allen lui a donné une lettre datée du 17 juin 2008 (pièce E1, onglet 37). Dans la lettre, on y répétait l'historique des enjeux concernant les activités externes du fonctionnaire, les décisions de l'employeur voulant que ces activités constituent un conflit d'intérêts relativement à ses fonctions à l'ARC et l'omission répétée du fonctionnaire de se conformer aux directives de cesser et d'abandonner ces activités.

176 M. Allen a conclu le courriel de la façon suivante (pièce E1, onglet 37) :

[Traduction]

[…] l'administration du régime fiscal canadien dépend de la confiance du public dans l'intégrité de l'Agence du revenu du Canada et de ses employés. Votre omission de vous départir de vos intérêts externes a mis cette confiance à risque. Le lien de confiance qui est essentiel pour continuer de travailler à l'Agence du revenu du Canada a été irrémédiablement rompu.

177 Par conséquent, M. Allen a informé le fonctionnaire de son licenciement à compter du 18 juin 2008 (pièce E1, onglet 37; un grief a été déposé contestant le licenciement, il figure au dossier de la CRTEFP 3544).

B. Argumentation

1. Pour l'employeur

178 L'avocate de l'employeur a commencé son argumentation en soulignant que j'étais saisi des deux enjeux distincts suivants qui se chevauchent :

  1. Le fonctionnaire participait-il à des activités externes qui constituaient un conflit d'intérêts réel, apparent ou potentiel, en violation du Code sur les conflits (pièce E1, onglet 39)?
  2. Le fonctionnaire a-t-il commis un acte d'insubordination lorsqu'il a refusé de se conformer aux directives du directeur selon lesquelles il devait cesser et abandonner ces activités?

179 Si l'une de ces questions ou les deux étaient démontrées, je devais alors examiner la question de savoir si les trois mesures disciplinaires prises par l'employeur étaient justifiées.

180 L'avocate de l'employeur a fait valoir que selon le Code sur les conflits (pièce E1, onglet 39), le directeur du BSF de Toronto-Centre était le gestionnaire délégué et, par conséquent, il avait le pouvoir de prendre une décision relative aux divulgations en matière de conflits.

181 Selon le Code sur les conflits, le gestionnaire délégué était autorisé à exiger la restriction, la modification ou l'abandon d'activités externes [traduction] « […] lorsqu'il a été déterminé qu'il existe un conflit d'intérêts réel ou potentiel » (Code sur les conflits, pièce E1, onglet 39, paragraphe 22).

182 Les désaccords entre un employé et le gestionnaire délégué quant aux dispositions nécessaires pour traiter des conflits doivent être réglés dans le cadre du processus de grief (Code sur les conflits, pièce E1, onglet 39, paragraphe 26) et le défaut de se conformer à de telles directives est assujetti à une mesure disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement (Code sur les conflits, pièce E1, onglet 39, paragraphe 27).

183 L'avocate de l'employeur a soutenu que, selon la preuve, le travail d'un évaluateur classifié AU-03 pourrait comprendre trois types de travail qu'un EEE pourrait effectuer dans le monde extérieur, soit les calculs, les estimations et les avis. Ce chevauchement a entraîné les conflits d'intérêts apparents et potentiels au sens du Code sur les conflits (pièce E1, onglet 39).

184 En outre, un évaluateur d'entreprises au bureau de l'ARC pourrait, de temps à autre, sélectionner des dossiers qui pourraient inclure son propre travail à l'externe. Le fait que de tels événements pourraient survenir a entraîné des conflits d'intérêts potentiels. Le fait que l'évaluateur pourrait renvoyer le dossier à une autre personne en vue d'éviter un véritable conflit ne change pas le fait qu'il existait un conflit d'intérêts potentiel.

185 L'avocate de l'employeur a également soutenu qu'il existait un conflit d'intérêts apparent dans la mesure où les clients du fonctionnaire pourraient avoir estimé que le travail du fonctionnaire leur est plus avantageux, utile ou plus susceptible de leur permettre de bénéficier d'un traitement fiscal plus favorable en raison de son travail parallèle et de son expérience à titre d'évaluateur de l'ARC. Ce qui importait n'était pas de savoir si son travail était effectivement plus susceptible d'entraîner ce résultat; ce qui importait c'était que l'on pourrait croire que ce résultat se produirait en raison de son travail continu à l'ARC.

186 Par conséquent, le fonctionnaire a clairement enfreint le Code sur les conflits (pièce E1, onglet 39), et, par conséquent, l'employeur avait le droit de l'ordonner de cesser et d'abandonner ces activités.

187 L'avocate de l'employeur a également soutenu que je n'avais pas compétence pour rendre ma propre décision quant à savoir s'il existait un conflit d'intérêts entre les activités externes du fonctionnaire et celles de son emploi. La seule question que je peux trancher est celle de savoir si la décision de l'employeur était raisonnable et de bonne foi.

188 L'avocate de l'employeur a ensuite passé en revue les divers rapports qui avaient été rédigés, la correspondance et les réunions entre le fonctionnaire et l'employeur au cours des années. Selon l'ensemble de cette preuve, une directive de cesser et d'abandonner ses activités extérieures avait clairement été donnée au fonctionnaire. Les directives étaient claires. Le fonctionnaire les comprenait, mais il n'en a pas tenu compte ou les a évités de manière constante. Ses refus répétés constituaient une insubordination répétée.

189 En dernier lieu, l'employeur a imposé une mesure disciplinaire progressive de la manière appropriée. Le fonctionnaire a été averti à maintes reprises, avant la première mesure disciplinaire, que son comportement pouvait faire l'objet d'une mesure disciplinaire.

190 La première mesure disciplinaire, une suspension de 10 jours, était appropriée étant donné les avertissements répétés et ses refus répétés.

191 La deuxième mesure disciplinaire, une suspension de 20 jours, s'ajoutait à la première.

192 La troisième mesure disciplinaire, soit le licenciement du fonctionnaire, constituait une réponse justifiée à un employé qui avait ignoré ou refusé de se conformer à la directive, claire et répétée, de son employeur.

193 Dans ses observations, l'avocate de l'employeur m'a renvoyé aux décisions suivantes : Canada (Procureur général) c. Assh, 2006 CAF 358; Threader v. Canada (Treasury Board), [1987] 1 F.C.41 (C.A.); Pagé c. Administrateur général (Service Canada), 2009 CRTFP 26 (demande de contrôle judiciaire refusée dans l'affaire 2009 CF 1299); Duske c. Agence canadienne d'inspection des aliments, 2007 CRTFP 94; Matthews c. Le Conseil du Trésor (Revenu Canada - Douanes et Accise) (dossier de la CRTFP 166–2–20753) (19910111); Oliver c. Agence des douanes et du revenu du Canada, 2003 CRTFP 43; Brazeau c. Administrateur général (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2008 CRTFP 62; Belval c. Conseil du Trésor (Expansion industrielle régionale), dossier de la CRTFP 166-02-15179 (19851121); Cavanagh c. Agence du revenu du Canada, 2014 CRTFP 21.

194 L'avocate de l'employeur a fait valoir que les griefs devraient être rejetés.

2. Pour le fonctionnaire

195 Le fonctionnaire a commencé ses observations en indiquant que le paragraphe 22 du Code sur les conflits (pièce E1, onglet 39) était [traduction] « […] au cœur du problème ». Il a indiqué que le paragraphe 22 ne traite que des conflits [traduction] « réels ou potentiels » et qu'il ne comprenait aucun renvoi aux conflits [traduction] « apparents ». Il a soutenu que les [traduction] « termes revêtent une signification importante » et qu'ils [traduction] « doivent avoir une signification ». L'omission du terme [traduction] « apparent » doit donc signifier que les pouvoirs conférés aux termes du paragraphe 22 étaient limités aux conflits d'intérêts réels et potentiels. Par conséquent, l'employeur n'était pas autorisé à ordonner à un employé d'abandonner des activités externes lorsqu'elles n'entraînaient qu'un conflit d'intérêts apparent, le cas échéant.

196 Le fonctionnaire a ensuite soutenu qu'il ne pouvait exister de conflit potentiel si un conflit réel était impossible ou s'il n'était pas démontré. Il a affirmé (et l'employeur a convenu) qu'il n'existait aucune preuve qu'il avait agi dans le cadre d'un conflit d'intérêts réel. En fait, il avait, à deux reprises dans le passé, renvoyé à d'autres évaluateurs du bureau des dossiers comprenant le nom de personnes ou de comptables qu'il connaissait.

197 Le fonctionnaire a également affirmé qu'il était presque impossible pour lui d'accéder aux renseignements détenus par l'ARC qu'il n'avait pas le droit de voir ou d'utiliser, du moins sans que l'ARC en prenne connaissance à un moment donné.

198 Le fonctionnaire a soutenu qu'un EEE pouvait offrir les trois types d'évaluations suivantes :

  1. un calcul;
  2. une estimation;
  3. un avis.

199 Un avis représentait la forme la plus élevée d'assurance de la valeur qu'un EEE peut donner. Les évaluateurs classifiés AU-03 fournissent des avis pour appuyer l'ARC devant les tribunaux. Puisqu'il avait accepté de ne fournir aucun avis dans le cadre de ses activités externes, le fonctionnaire ne se trouvait donc pas dans une situation pouvant entraîner un conflit réel ou potentiel.

200 Le fonctionnaire a également fait valoir que, quoi qu'il en soit, ses activités externes ne comprenaient aucune forme d'évaluation des biens. Il n'avait jamais fourni à ses clients externes des avis quant à la juste valeur marchande. Il ne faisait que des analyses de leur situation à titre d'acheteur pour déterminer si l'achat proposé était dans leur intérêt. Il n'avait rien à faire avec la valeur ou l'estimation de la valeur du bien acheté. En outre, un tel avis ne se rapportait, d'aucune façon, à l'impôt. Il n'a donné aucun avis fiscal et aucune évaluation pouvant avoir une incidence fiscale.

201 Le fonctionnaire a également affirmé qu'il avait demandé plusieurs fois des précisions quant à la façon dont ses activités externes constituaient un conflit d'intérêts. S'il avait reçu ces précisions, il aurait mis l'accent sur les aspects du travail d'un EEE qui n'empiètent pas sur ses activités à titre d'évaluateur classifié AU-03 au BSF de Toronto-Centre.

202 Le fonctionnaire a également soutenu que ni M. Allen, ni M. Walkingshaw n'avaient d'expérience à titre d'EEE. Ceci étant, ils n'étaient pas bien placés pour comparer ce qu'il a fait à titre d'évaluateur d'entreprises et ce qu'il a fait dans le cadre de ses activités externes.

203 Le fonctionnaire a convenu que les évaluations ont ou pourrait à tout le moins avoir une incidence fiscale, mais il a fait valoir que l'on pourrait en dire autant pour de nombreux autres éléments. Il a ensuite soutenu qu'en règle générale, les considérations fiscales ont peu à avoir, s'il y a lieu, avec une décision d'acheter une entreprise ou un actif de l'entreprise.

204 Le fonctionnaire a affirmé que les affaires invoquées par l'employeur ne s'appliquaient pas à son égard parce qu'elles traitaient toutes de conflits d'intérêts réels et qu'il n'avait été impliqué dans une situation de conflit d'intérêts réel.

205 En ce qui concerne les mesures disciplinaires imposées, le fonctionnaire a soutenu qu'elles étaient déraisonnables, inéquitables et injustes.

206 En ce qui concerne la suspension de 10 jours, le fonctionnaire a fait valoir qu'il avait respecté son engagement du 13 août 2004 selon lequel il ne devait fournir aucun avis d'évaluation relativement à des biens corporels et incorporels, conformément à la lettre de M. Allen du 22 juillet (pièce E1, onglet 8). En outre, il n'y a aucune preuve qu'il a fourni des avis d'évaluation. Par conséquent, il n'a pas contrevenu à la directive figurant à la correspondance de M. Allen du 22 juillet.

207 En ce qui concerne la suspension de 20 jours, le fonctionnaire a de nouveau soutenu qu'il n'existait aucune preuve d'un conflit d'intérêts réel. Il croyait qu'il s'y était conformé. Le problème est survenu parce que l'employeur ne comprenait pas ce qu'il lui ordonnait de faire. La confusion découlant de l'omission de M. Allen de comprendre les fonctions du fonctionnaire n'aurait pas dû être le fondement d'une mesure disciplinaire progressive.

208 Le fonctionnaire a également fait valoir que selon le Code sur les conflits (pièce E1, onglet 39), il devait disposer d'un délai de 120 jours pour renoncer à toute activité externe incompatible à ses fonctions à titre d'employé. Malgré ce droit, il a été licencié avant l'expiration de ce délai.

209 En ce qui concerne le licenciement, le fonctionnaire a affirmé qu'il avait en fait accepté de cesser et d'abandonner ses activités externes. Toutefois, M. Allen a ensuite insisté pour qu'il ferme également son site Web et qu'il divulgue toute activité externe pour la période de mai 2006 à mai 2008. Il a affirmé que l'employeur [traduction] « ne faisait qu'accroître ses demandes pendant qu'[il] était en congé pour sa chirurgie », ce qui constitue une preuve, selon lui, de la volonté de le licencier, peu importe les mesures prises.

210 Pendant qu'il traitait de ce point, le fonctionnaire a insisté sur le fait qu'une page Web ne constituait pas une publicité. Il ne s'agissait que d'un signet que personne ne regardait de toute façon.

3. Réplique de l'employeur

211 L'avocate de l'employeur a soutenu que malgré les insinuations du fonctionnaire, aucune preuve n'a été présentée selon laquelle M. Allen ou l'employeur en général auraient eu un motif inavoué. De même, aucune preuve n'a été déposée à l'appui de la constatation selon laquelle le fonctionnaire souffrait d'une incapacité, encore moins une incapacité qui l'aurait empêché de comprendre et d'agir conformément aux directives qui lui avaient été données.

212 L'avocate de l'employeur a soutenu que la preuve relative aux sites Web de FSC, de Plaxo et d'Industrie Canada, avait clairement démontré que le fonctionnaire faisait effectivement la promotion de ses services à l'échelle mondiale.

213 En dernier lieu, en ce qui concerne l'argument du fonctionnaire sur le délai de 120 jours, l'avocate a indiqué que l'employeur n'avait pas demandé au fonctionnaire de se départir d'un bien ou d'une entreprise. Au contraire, il lui a demandé de cesser et d'abandonner ses activités externes. Il faut du temps pour se départir d'un bien et c'est pourquoi il est justifié qu'un délai soit accordé à cette fin. La même chose ne peut pas être dite d'une activité. Une activité peut cesser immédiatement, ou au plus en quelques jours.

IV. Analyse et décision

214 Après avoir écouté attentivement le témoignage des parties et plus particulièrement celui du fonctionnaire et après avoir examiné les documents et le Code sur les conflits (pièce E1, onglet 39), je suis convaincu de ce qui suit :

  1. Les activités externes du fonctionnaire faisaient en sorte que ce dernier était dans une situation de conflit d'intérêts réel, apparent et potentiel par rapport à ses fonctions d'évaluateur classifié AU-03 au BSF de Toronto-Centre.
  2. L'employeur avait le droit de donner au fonctionnaire des directives visant l'arrêt et l'abandon de ces activités.
  3. Ceci étant, le refus du fonctionnaire de suivre le principe [traduction] « travaillez maintenant, déposez un grief plus tard » et de choisir plutôt de contester ou de résister aux directives de son employeur à toutes les étapes constituait de l'insubordination.
  4. La mesure disciplinaire progressive qui a mené et qui inclut le licenciement imposé par l'employeur était justifiée et raisonnable.
  5. Le fonctionnaire n'a pas réussi à démontrer son allégation en matière de droit de la personne.

215 Voici les motifs qui m'ont amené à ces conclusions.

A. Conflit d'intérêts réel, apparent ou potentiel

216 Je devrais d'abord indiquer que je n'accepte pas l'argument de l'employeur selon lequel je n'ai pas compétence pour trancher la question de savoir si sa décision qu'un conflit d'intérêts a eu lieu – réel, apparent ou potentiel – était légitime; voir Campione, au paragr. 67. Toutefois, je suis également convaincu que la décision de l'employeur voulant qu'un conflit d'intérêts potentiel et apparent soit survenu entre les activités extérieures du fonctionnaire et son travail au BSF de Toronto-Centre était légitime.

217 Selon moi, il est clair que le fonctionnaire, dans le cadre de ses activités externes, offrait plusieurs des services offerts par son poste d'évaluateur à l'ARC de même qu'il effectuait plusieurs des mêmes activités, et qu'il utilisait les mêmes compétences pour ce faire.

218 Une partie des fonctions d'un évaluateur d'entreprises de l'ARC consiste à évaluer la valeur des biens achetés ou vendus. Ces évaluations ont des conséquences fiscales. Il n'existe aucune preuve que chacune des évaluations effectuées par un évaluateur de l'ARC exige un avis officiel assez solide pour pouvoir être présenté devant un tribunal. Du propre aveu du fonctionnaire, les évaluateurs de l'ARC fournissent, à tout le moins, des évaluations [traduction] « rapides et brutes » des valeurs. Je suis d'avis que de telles évaluations correspondent aux calculs ou aux estimations des valeurs qui sont également fournies par les EEE, selon le témoignage du fonctionnaire. Je suis également d'avis que ces évaluations feraient partie des avis que toute personne qui conseille autrui au sujet d'un achat proposé fournirait (ce qui correspond à ce que le fonctionnaire a dit faire à l'externe).

219 L'argument du fonctionnaire selon lequel le fait d'aider un acheteur à déterminer si un bien ou une entreprise particulière est convenable ne comportait pas l'évaluation du bien ou de l'entreprise est simplement invraisemblable. Aucun acheteur, peu importe sa richesse, ne souhaite pas connaître au moins la valeur approximative de ce qu'il achète. Les gens d'affaires riches ne sont pas devenus riches en jetant leur argent par la fenêtre. Ils font des achats prudents. De tels achats exigent des connaissances non seulement au sujet de son propre flux de trésorerie, mais également de la valeur relative de l'article acheté.

220 Une détermination de la valeur n'exigerait pas un avis officiel d'un EEE; une estimation ou un calcul – une évaluation [traduction] « rapide et brute », selon les termes du fonctionnaire – suffirait souvent.

221 Je formulerai les mêmes remarques au sujet de la division des biens matrimoniaux (un autre service dont le fonctionnaire fait la promotion dans le site Web de FSC). Les biens matrimoniaux comprennent notamment les maisons, les biens, les actions dans des sociétés, les régimes d'épargne-retraite (RER) et les pensions. Certains sont faciles à évaluer, d'autres le sont moins. Toutefois, une division juste exige une évaluation de leur valeur respective. Cela fait également partie du travail d'un évaluateur de l'ARC.

222 Ainsi, les activités extérieures du fonctionnaire ont entraîné un conflit d'intérêts potentiel. Le fait que ses conseils – ses évaluations – des biens achetés, vendus ou transférés auraient des conséquences fiscales signifie que les conseils qu'il donne aux contribuables pourraient faire partie d'un dossier fiscal faisant l'objet d'un examen par l'ARC. Son obligation envers son client aurait été de produire le résultat le plus avantageux sur le plan fiscal, ce qui aurait été incompatible avec son obligation envers son employeur de veiller à ce que l'impôt le plus approprié soit payé.

223 Il existe également le risque qu'un dossier auquel le fonctionnaire a fourni un avis lui soit attribué à titre de sélectionneur ou aux fins d'avis. Dans l'éventualité où cette situation survient, la possibilité d'un conflit d'intérêts réel serait immédiatement soulevée.

224 L'un des principaux arguments de M. Cavanagh tout au long de son différend de longue date avec son employeur et à l'audience dont je suis saisi était que si ses activités extérieures ne constituaient pas un conflit d'intérêts réel ou véritable, il ne pouvait y avoir aucun conflit d'intérêts apparent ou potentiel. Cette position pourrait être qualifiée de fallacieuse et, de toute façon, elle ne tient pas compte de son témoignage.

225 En renvoyant les deux dossiers à une autre personne, le fonctionnaire a reconnu qu'il avait traité de tels dossiers, que cela aurait constitué un conflit d'intérêts, ce qui n'est qu'une autre façon d'indiquer que la possibilité d'un conflit serait survenue dès le moment où il aurait constaté qu'il connaissait une personne nommée au dossier. Il ne s'agit que d'un conflit potentiel à ce stade parce qu'il n'avait pas effectué de travail relativement à ce dossier. Toutefois, la situation continue de constituer un conflit potentiel précisément parce que s'il avait choisi de traiter le dossier, un conflit d'intérêts réel serait survenu.

226 Évidemment, un employeur ne peut rien faire pour prévenir tous les conflits qui surviennent parce qu'un employé pourrait constater qu'il connaît une personne concernée par un dossier fiscal qui lui a été attribué de manière aléatoire. Toutefois, il est également logique qu'un employeur puisse réduire les chances qu'un conflit d'intérêts réel – et, par conséquent, potentiel – ne survienne en limitant le nombre de fois que des conflits d'intérêts réels surviendraient à l'égard de ses employés. Je suis d'avis que c'est ce que l'employeur tentait de faire lorsqu'il a ordonné au fonctionnaire de cesser et d'abandonner ses activités externes.

227 Les activités externes du fonctionnaire ont également soulevé l'apparence d'un conflit d'intérêts. Tant ses clients que les autres parties à l'opération pourraient facilement conclure qu'en raison de son expérience et de son emploi à titre d'évaluateur de l'ARC, il dispose de renseignements privilégiés quant à la façon dont l'ARC examine les choses et pourrait réagir à certaines opérations. Il serait raisonnable qu'ils puissent conclure que le fonctionnaire dispose de renseignements privilégiés sur les politiques et les pratiques de l'ARC et qu'il pourrait utiliser ces renseignements en leur faveur; voir, par exemple, Committee for Justice and Liberty c. L'Office national de l'énergie, [1978] 1 RCS 369.

228 Je suis d'avis que la conclusion est simplement évidente en soi. Le fait que le fonctionnaire n'ait pas effectué de tels gestes n'empêche pas une personne raisonnable de croire qu'il aurait pu agir ainsi.

229 Je n'accepte pas non plus l'argument du fonctionnaire voulant qu'il n'ait donné que des avis qui ne se rapportaient pas à l'impôt. La plupart, sinon tous, les transferts de biens comportent des conséquences fiscales. Ces conséquences dépendent au moins en partie de la valeur afférente à ces biens et à ces opérations. La plupart, sinon toutes les personnes impliquées dans de telles opérations veulent connaître les conséquences fiscales potentielles. Le fait de suggérer qu'elles ne le sont pas, comme l'a allégué le fonctionnaire, n'est simplement pas crédible, surtout compte tenu de sa présentation (ou plutôt la représentation de FSC) selon laquelle il avait une [traduction] « […] expertise spécialisée en évaluations juridiques, fiscales et des placements […] ».

230 Par conséquent, je suis convaincu que les préoccupations de l'employeur quant aux activités externes du fonctionnaire étaient entièrement justifiées et qu'il avait raison de croire qu'elles soulèveraient des conflits d'intérêts apparents et potentiels.

B. Droit de l'employeur de donner les directives qu'il a données

231 Tel qu'il a été mentionné ci-dessus, je suis convaincu que les activités externes du fonctionnaire constituaient un conflit d'intérêts apparent et potentiel.

232 La prochaine question consiste à savoir si l'employeur avait également le droit d'ordonner au fonctionnaire de cesser et d'abandonner ces activités externes. Je suis d'avis qu'il avait ce droit. En règle générale, la direction a le droit de se préoccuper – et de limiter dans un cas approprié – des activités externes de ses employés lorsque ces activités portent préjudice à la réputation ou aux activités de l'employeur. Ce droit est indiqué dans une certaine mesure dans le Code sur les conflits (pièce E1, onglet 39).

233 L'observation du fonctionnaire selon laquelle le paragraphe 22 du Code sur les conflits (pièce E1, onglet 39) ne permet à l'employeur de donner une telle directive uniquement aux fins d'un conflit d'intérêts [traduction] « réel ou potentiel » n'est pas fondée. En supposant, sans conclure, que le pouvoir de l'employeur d'ordonner de cesser ou d'abandonner des activités était limité aux conflits réels ou potentiels, je suis convaincu, tel qu'il a été mentionné ci-dessus, qu'il existait un conflit d'intérêts potentiel.

C. Le manquement du fonctionnaire et son refus de suivre la directive de l'employeur constituaient-ils une insubordination

234 La caractéristique essentielle de l'insubordination [traduction] « […] est l'idée de s'opposer à l'autorité »; voir Phillips Cables Limited v. International Brotherhood of Electrical Workers, Local 625 (non reporté, le 28 février 1992), citée dans Cape Breton Victoria Regional School Board v. Canadian Union of Public Employees, [2000] N.S.L.A.A. no 13 (QL), au paragr. 72.

235 Le pouvoir d'un employeur peut être contesté de différentes façons. Le refus d'obéir à un ordre direct qui est clairement compris, sans raison valable, constitue clairement une telle contestation. Toutefois, un employé peut également contester le pouvoir d'un employeur en questionnant la capacité de la direction ou les motifs de ces décisions opérationnelles. Donc, par exemple, le fait de remettre en question bruyamment et à maintes reprises le motif ou l'équité d'une directive d'un superviseur tout en s'y conformant pourrait néanmoins constituer une insubordination; voir Volvo Canada Ltd v. C.A.W., Local 720 (1990), 12 L.A.C. (4e) 129.

236 De même, le fait de commencer tranquillement de manière déraisonnable les travaux attribués peut également être considéré comme de l'insubordination; voir Trilea-Scarborough Shopping Centre Holdings Ltd. v. S.E.I.U., Local 204 (1990), 14 L.A.C. (4e) 396.

237 Cela ne signifie pas que toute question ou demande d'explication auprès d'un superviseur constitue une insubordination. Toutefois, les questions qui sont formulées d'une telle façon à suggérer qu'un superviseur est stupide ou incompétent ou ne sait pas ce qu'il fait seront probablement considérées comme de l'insubordination; voir par exemple, Crossley Carpet Mills Ltd. v. National Automobile, Aerospace and Agricultural Implement Workers Union of Canada (CAW-Canada), Local 4612, [2003] N.S.L.A.A. no 22 (QL).

238 Une constatation d'insubordination exige la preuve de quatre éléments : qu'une directive ait été donnée par l'employeur; que cette directive ait été communiquée clairement à l'employé; que la personne ayant donné la directive ait l'autorité requise pour le faire; que le fonctionnaire ne se soit pas conformé au moins une fois; voir Focker c. Agence du revenu du Canada, 2008 CRTFP 7, et Nowoselsky c. Conseil du Trésor (Solliciteur général Canada), dossier de la CRTFP 166-02-14291 (19840724). Je suis d'avis, selon les faits dont je suis saisi, que ces conditions ont été remplies. En premier lieu, et il s'agit du fait le plus fondamental, le fonctionnaire a refusé à maintes reprises de se conformer aux nombreuses directives claires d'abandonner ses activités extérieures qui lui ont été données par son superviseur autorisé. Ces refus constituaient des actes d'insubordination absolus répétés.

239 En deuxième lieu, le fait que le fonctionnaire ait remis en question à maintes reprises le motif ou le caractère raisonnable des directives de l'employeur et demandé répétitivement des précisions ou des explications en attendant une décision de sa part quant à savoir s'il se conformerait constituait des atermoiements qui correspondaient également à de l'insubordination.

240 S'il n'était pas d'accord avec les directives qui lui ont été données, le recours approprié du fonctionnaire était de faire ce qu'il a fait le 30 octobre 2006, soit de déposer un grief contre la directive. Il s'agissait de son droit en vertu de la convention collective applicable, ce qui a été confirmé par le paragraphe 26 du Code sur les conflits (pièce E1, onglet 39). En attendant l'issu du grief – ou en fait de tout grief – il était tenu d'obéir à la directive. Ce qu'il n'a pas fait.

241 Étant donné cette conclusion, je suis également convaincu que la mesure disciplinaire était justifiée relativement à chacun des trois griefs.

D. La quantité des mesures disciplinaires était-elle justifiée?

242 Je suis saisi de trois griefs. Je les traiterai en ordre.

1. Dossier de la CRTEFP 2161

243 Il s'agit de la suspension de 10 jours imposée en raison du défaut du fonctionnaire de respecter la directive donnée par le directeur le 22 juillet 2004 (pièce E1, onglet 8) et de son omission de respecter l'engagement qu'il avait pris le 13 août 2004 (pièce E1, onglet 9). Le fonctionnaire a soutenu que son courriel du 13 août 2004 constituait sa conformité à la directive dans la mesure où il avait accepté qu'il ne [traduction] « […] fournirai[t] aucun avis d'évaluation de biens corporels et incorporels, conformément à ce qui est indiqué dans votre lettre et je confirme également que je n'exerce actuellement aucune telle activité » (pièce E1, onglet 9).

244 Je ne suis pas d'accord, et ce, pour divers motifs.

245 En premier lieu, il est clair d'une lecture juste de la directive du 22 juillet 2004 (pièce E1, onglet 8) que l'employeur croyait qu'il y avait un conflit entre toutes les activités externes réelles ou potentielles que le fonctionnaire avait déclarées et ses fonctions à titre d'évaluateur classifié AU-03. M. Allen a mentionné la lettre de Mme Shields du 5 novembre 2003 qui ordonnait au fonctionnaire d'abandonner toutes les activités externes qu'il exerçait à ce moment, conformément à sa divulgation (pièce G14). Cette directive ne se limitait pas à une activité en particulier.

246 En deuxième lieu, la directive de M. Allen (pièce E1, onglet 8) renvoie de nombreuses fois aux [traduction] « activités externes » en général. Le renvoi particulier à l'[traduction] « […] évaluation de biens corporels et incorporels » ne figure qu'une seule fois et uniquement dans le contexte du renvoi au Comité permanent pour obtenir un deuxième avis (pièce E1, onglet 8).

247 Ces deux questions prises ensemble m'amènent à conclure qu'une personne raisonnable qui lit les deux lettres en question saurait et comprendrait que l'employeur lui donnait une directive de cesser et d'abandonner toute activité externe et non une seule activité particulière.

248 Pour la même raison, je suis également convaincu que M. Allen avait raison de croire que l' [traduction] « engagement » du fonctionnaire pris le 13 août 2004 (pièce E1, onglet 9) consistait en fait en un engagement à cesser toutes les activités externes, et non une seule.

249 En troisième lieu, et après ce qui précède, je suis convaincu que le fonctionnaire savait exactement ce que son employeur lui demandait de faire et qu'il le savait dès le début. Je suis d'avis que la première attestation d'ignorance par le fonctionnaire quant à ce que Mme Shields lui demandait de faire, ainsi que ses demandes subséquentes et répétées visant à obtenir des [traduction] « précisions » ou un [traduction] « délai pour y répondre » n'étaient qu'une tactique dilatoire.

250 Le fonctionnaire ne s'est pas engagé à abandonner ses activités externes jusqu'à ce qu'il reçoive une lettre mentionnant une activité particulière. Il a ensuite défini et expliqué cette activité (sans communiquer clairement cette définition à son employeur) de sa propre manière soigneusement circonscrite. Ce n'est qu'à ce moment qu'il s'est engagé tel qu'il lui était demandé, et ce, uniquement en ce qui concerne une activité qui, selon lui, il n'avait jamais exercée de toute façon.

251 Évidemment, l'autre facteur est que l'argument du fonctionnaire ne tient pas compte des événements qui se sont déroulés après le 13 août 2004, ni de l'enquête des affaires internes. De plus, l'argument ne tient pas compte du fait que M. Allen indiquait clairement au 31 octobre 2006 (pièce E1, onglet 13) qu'il souhaitait que le fonctionnaire abandonne toutes ses activités externes. Enfin, l'argument ne tient pas compte des réponses argumentatives du fonctionnaire. Je pense, à titre d'exemple, à son courriel du 14 novembre 2006 dans lequel il indique, entre autres, qu'il [traduction] n'« […] abandonnerai[t] ce que vous [M. Allen] percevez être incompatible seulement lorsque j'aurai déterminé ce à quoi cela correspond en fonction de chaque activité » (pièce E1, onglet 14, page 2). Dans son argumentation, il n'est pas question de l'acceptation subséquente du fonctionnaire de respecter la directive de M. Allen du 20 octobre 2006 (pièce E1, onglet 11) et du 31 octobre 2006 (pièce E1, onglet 13), une acceptation qu'il a néanmoins indiquée être sans préjudice (pièce E1, onglet 15).

252 En raison de tous ces événements, subséquents à la directive du 22 juillet 2004 (pièce E1, onglet 8), je suis convaincu que le fonctionnaire comprenait, à cette date, ce que l'employeur lui ordonnait de faire. Ils me permettent également de conclure que le fonctionnaire n'acceptait pas la directive et qu'il n'était pas disposé à s'y conformer en attendant l'issu du grief et qu'il préférait plutôt présenter des arguments et d'éviter, en général, de s'y conformer le plus longtemps que possible.

253 Étant donné les refus prolongés et répétés du fonctionnaire de se conformer aux directives qui, selon moi, étaient claires, je suis convaincu qu'une suspension de 10 jours dans les circonstances constituait une réponse appropriée de la part de l'employeur.

2. Dossier de la CRTEFP 3543

254 Ce dossier porte sur le grief déposé contre la suspension de 20 jours qui a été imposée le 5 mars 2008 (pièce E1, onglet 32). L'employeur a fondé sa décision quant à la mesure disciplinaire et la pénalité sur trois éléments : l'historique de la question et l'omission de M. Cavanagh de se conformer aux directives au moment de la première directive donnée le 5 novembre 2003 (pièce G14) et depuis cette dernière; son annulation le 7 mars 2007 (pièce E1, onglet 28) de son engagement pris le 15 novembre 2006 (pièce E1, onglet 15); la mesure disciplinaire antérieure (suspension de 10 jours, pièce E1, onglet 26). À proprement parler, M. Cavanagh ne pouvait pas faire l'objet d'une mesure disciplinaire relativement à son insubordination avant l'imposition de la suspension de 10 jours le 22 février 2007, puisqu'elle avait déjà été traitée. Toutefois, l'employeur avait le droit de tenir compte de ces antécédents dans le cadre de l'évaluation de la gravité de son insubordination continue après cette date, au moins dans la mesure où l'insubordination se rapportait à la même question et à la même directive.

255 Dans ces circonstances, la suspension de 20 jours constituait une mesure disciplinaire progressive justifiée.

3. Dossier 3544 de la CRTEFP

256 Le présent grief se rapporte au licenciement du fonctionnaire qui a été imposé le 17 juin 2008 (pièce E1, onglet 37). Il a offert les deux motifs fondamentaux suivants à l'appui de son grief :

[Traduction]

Je dépose un grief contre le harcèlement continu et l'intrusion relativement à mes affaires personnelles qui ont mené à la lettre du 17 juin 2008 de l'ARC portant sur mon licenciement. Je dépose un grief contre la décision de l'ARC de me licencier parce que celle-ci est non justifiée, injuste et déraisonnable. Au cours de son enquête, l'ARC a porté atteinte à mes droits à la justice naturelle, y compris sans toutefois s'y limiter, mon droit à ce que tous mes éléments de preuve soit dûment pris en compte et à ce que la force probante appropriée leur soit attribuée. Par conséquent, je n'ai pas eu la possibilité de me défendre.

Je dépose un grief contre la décision de l'ARC de me licencier au motif que ce licenciement est discriminatoire en ce que la décision a été prise pendant que j'étais en congé de maladie et que je souffrais d'une incapacité permanente pour laquelle une chirurgie est prévue.

257 Après avoir examiné l'historique de la correspondance, longue et détaillée, et les réunions entre le fonctionnaire et l'employeur entre 2003 et 2008, je suis convaincu que le premier motif offert par le fonctionnaire n'est pas fondé. Il a eu maintes occasions de fournir des précisions sur ses activités externes. L'employeur lui a expliqué ses préoccupations et son raisonnement à maintes reprises. Il lui a accordé des prorogations à plusieurs reprises.

258 L'allégation du fonctionnaire que, selon cet historique, le principe de justice naturelle ou procédurale lui ait été refusé est simplement incorrecte. Le fait que l'employeur n'ait pas accepté ses arguments ne signifie pas qu'il ne les a pas écoutés ou qu'il n'en a pas tenu compte. Cela signifie simplement qu'il n'y souscrivait pas. Quoi qu'il en soit, toute iniquité procédurale dans le cadre du processus suivi par l'employeur a été entièrement remédiée par l'audience de novo dont je suis saisi; voir Tipple c. Canada (Conseil du Trésor), [1985] ACF no 818 (QL) (CA).

259 Dans ses observations, le fonctionnaire a ajouté la plainte selon laquelle dans sa lettre du 23 mai 2008 (pièce E1, onglet 35), l'employeur n'avait pas le droit de l'obliger de fermer son site Web ni d'exiger une divulgation de toutes ses activités externes pour la période allant de mai 2006 à mai 2008. Il a également soutenu que son courriel du 30 avril 2008 constituait également son engagement d'abandonner ses activités externes (pièce E1, ongle 31) et que, en conséquence, son licenciement n'était pas justifié.

260 En ce qui concerne ces observations, je formulerai les remarques suivantes.

261 En premier lieu, l'objet d'un site Web commercial est de décrire au monde les produits et services qui sont disponibles aux fins de ventes. Une directive de cesser et d'abandonner l'offre de ces services doit également inévitablement inclure un site Web qui fait la publicité de ces mêmes services. Étant donné cet objectif et le fait que le fonctionnaire et FSC étaient, selon la preuve, à toutes fins utiles la même entité, la directive de l'employeur de fermer le site Web était justifiée.

262 En deuxième lieu et en ce qui concerne la divulgation, je suis d'accord que l'employeur n'avait pas le droit d'ordonner une telle divulgation. Il aurait pu demander une telle divulgation et, si le fonctionnaire l'avait fourni, il aurait pu tenir compte des documents divulgués afin de déterminer s'il existait un terrain d'entente. Toutefois, le fonctionnaire n'était pas tenu de faire une telle divulgation et ne pouvait pas faire l'objet d'une mesure disciplinaire pour avoir omis de le faire.

263 Cela étant, je suis également convaincu qu'à ce stade du processus, la décision de l'employeur de licencier le fonctionnaire était fondée, en grande partie, sur son refus répété et continu de se conformer à ses directives de cesser et d'abandonner ses activités externes. Il n'a pas fait l'objet d'une mesure disciplinaire parce qu'il a omis de faire une divulgation. Il a fait l'objet d'une mesure disciplinaire, comme par le passé, parce qu'il avait refusé d'abandonner ses activités externes.

264 En troisième lieu, je suis d'avis que le courriel du fonctionnaire du 30 avril 2008 (pièce E1, onglet 31) ne constituait pas la conformité à la directive de l'employeur de cesser et d'abandonner toutes ses activités extérieures. Tout comme son courriel du 13 août 2004 (pièce E1, onglet 9), il s'agissait d'une réponse qui avait été soigneusement circonscrite pour ne renvoyer qu'à une seule activité parmi les nombreuses activités d'évaluation d'entreprises exercées par un EEE. En outre, il se limitait à une activité qui, selon lui, il n'exerçait pas de toute façon.

265 J'examine maintenant le deuxième motif, fondé sur l'allégation selon laquelle le licenciement était discriminatoire parce que le fonctionnaire était en congé de maladie lorsque la décision a été prise.

266 Selon l'essentiel de l'allégation du fonctionnaire, au printemps de 2008, il attendait une chirurgie pour son dos et il avait besoin d'une certaine période pour examiner et répondre aux directives de l'employeur du 24 avril (pièce G25) et du 1er mai (pièce E1, onglet 34) et 23 mai (pièce E1, onglet 35) 2008. Toutefois, le fonctionnaire n'a présenté aucune preuve suffisamment claire et convaincante à l'audience laissant entendre que la période d'attente de la chirurgie pour son dos touchait sa capacité mentale de comprendre ou de répondre d'une façon quelconque aux directives de l'employeur. Les directives de l'employeur étaient essentiellement les mêmes que celles qui lui avaient été données plusieurs fois auparavant. De plus, le fonctionnaire était effectivement entièrement capable de répondre à l'employeur le 30 avril (pièce E1, onglet 31), le 6 mai (pièce E1, onglet 34) et le 30 mai (pièce E1, onglet 36) et de donner des directives à M. Ferrand le 6 juin (pièce E7).

267 Je souligne également que, logiquement, si l'état de santé du fonctionnaire était assez grave pour l'empêcher d'exercer ses activités externes (et il n'existe aucune preuve à l'appui d'une telle conclusion), il n'aurait également eu aucun problème d'accepter de les abandonner.

268 D'autre part, si son état de santé n'était pas aussi grave, rien ne l'aurait empêché, encore une fois, d'accepter de cesser et d'abandonner ces activités.

269 Par conséquent, il n'existe aucune preuve suffisamment claire et convaincante à l'appui de l'allégation (laquelle constitue simplement une allégation) selon laquelle le fait d'exiger qu'il s'engage à cesser et abandonner ses activités externes pendant qu'il était en congé de maladie en attendant une chirurgie pour son dos est, d'une manière quelconque, injuste ou discriminatoire ou contraire à ses droits prévus à la LCDP.

270 En conclusion, je suis donc d'avis que le conflit d'intérêts du fonctionnaire – potentiel et éventuel – s'est poursuivi pendant un certain nombre d'années, tout comme son insubordination. L'employeur l'a averti à maintes reprises des conséquences possibles de son comportement. Il a refusé de tenir compte de ces avertissements et il a continué de se comporter de la même façon.

271 Étant donné qu'un tel comportement s'est poursuivi pendant plus de deux ans après la première fois que M. Allen a soulevé la question auprès de lui pour la première fois en juillet 2004 (pièce E1, onglet 8), je suis convaincu que la première mesure disciplinaire consistant en une suspension de 10 jours était appropriée et justifiée. Le fonctionnaire a démontré, à l'aide de son comportement jusqu'à ce moment-là, que seule une pénalité rigide, déterminante et sévère ne le remettrait à l'ordre, si possible.

272 La pénalité n'a pas donné le résultat voulu ce qui justifie entièrement donc – pour les mêmes motifs – une deuxième pénalité, soit la suspension de 20 jours. Le refus du fonctionnaire de prendre au sérieux les mesures disciplinaires a justifié la dernière mesure disciplinaire, soit le licenciement.

273 Je suis également convaincu qu'en mai 2008, l'employeur avait véritablement perdu la confiance et la foi à l'égard du fonctionnaire qui sont essentielles à toute relation de travail. L'historique de la relation révèle une tentative continue de la part du fonctionnaire de présenter de fausses déclarations, de cacher ou de dissimuler la nature de ses activités externes. Les questions directes ont été répondues par des réponses trompeuses ou pas tout à fait franches. Le changement des coordonnées fourni à l'égard de FSC ne constitue qu'un seul exemple d'un tel comportement et je conclus que ce dernier consiste en une tentative de cacher sa participation une fois qu'il a appris que son employeur en avait pris connaissance.

274 Tous ces facteurs – individuellement et ensemble – justifiaient toutes les décisions prises par l'employeur en matière de discipline.

E. Allégation en matière de droit de la personne

275 J'ai déjà tranché la question relative aux droits de la personne. Pour ces motifs, je suis convaincu qu'il n'existe aucune preuve suffisamment claire et convaincante selon laquelle l'état physique et mental du fonctionnaire au printemps 2008 était tel qu'une mesure d'adaptation devait être prise à son égard relativement aux directives qu'il cesse et abandonne ses activités extérieures.

276 Pour ces motifs, je rends l'ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

277 Les griefs sont rejetés.

Le 19 janvier 2015

Traduction de la CRTEFP

Augustus Richardson,
arbitre de grief

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