Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s'estimant lésé a été suspendu pour une période indéterminée en attendant l'issue d'une enquête disciplinaire pour avoir accédé au Système de gestion des délinquants (le « SGD ») de l'employeur sans autorisation et pour avoir communiqué les renseignements avec un membre de la famille qui était incarcéré – après l'enquête, le fonctionnaire s'estimant lésé a été rétrogradé pour une période de deux ans – ses griefs contestaient sa suspension et sa rétrogradation – l'employeur a soulevé une objection préliminaire au grief contestant la suspension et a fait valoir que la suspension était de nature administrative et non disciplinaire – durant l'enquête, la direction a conclu que le fonctionnaire s'estimant lésé n'avait eu aucune intention malveillante ou criminelle et qu'il n'avait pas accédé aux dossiers pour réaliser un profit pécuniaire, mais qu'il était naïf et n'avait pas compris la gravité de son geste – la direction ne connaissait pas encore l'ampleur ou l'étendue des renseignements communiqués ou les raisons pour lesquelles le fonctionnaire s'estimant lésé avait accédé aux dossiers et elle a donc maintenu la suspension alors qu'elle poursuivait l'enquête – à l'audience disciplinaire, le fonctionnaire s'estimant lésé a reconnu ses actes – la direction a conclu qu'il pouvait se racheter s'il était conseillé et elle lui a imposé une rétrogradation de 24 mois pour restaurer la confiance et lui donner le temps d'assimiler ce qu'il avait fait – l'arbitre de grief a jugé que l'employeur avait agi rapidement pour mener l'enquête et que ses motifs pour poursuivre la suspension étaient sincères et convaincants – l'employeur n'avait aucune intention disciplinaire lorsqu'il a suspendu le fonctionnaire s'estimant lésé – l'objection de l'employeur quant à la compétence à l'égard du grief relatif à la suspension a été accueillie – l'employeur avait démontré que le fonctionnaire s'estimant lésé avait commis une faute de conduite et que l'imposition de mesures disciplinaires était justifiée – la pénalité imposée était raisonnable compte tenu de la gravité de la faute de conduite. Objection accueillie; grief contre la suspension rejeté. Grief contre la rétrogradation rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date: 20150203
  • Dossier: 566-02-8094, 8095 et 8575
  • Référence: 2015 CRTEFP 16

Devant un arbitre de grief


ENTRE

PETER PETROVIC

fonctionnaire s'estimant lésé

et

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL
(Service correctionnel du Canada)

défendeur

Répertorié
Petrovic c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada)

Affaire concernant des griefs individuels renvoyés à l'arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Steven B. Katkin, arbitre de grief
Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Corinne Blanchette, Union of Canadian Correctional Officers - Syndicat des agents correctionnels du Canada - CSN
Pour le défendeur:
Pierre-Marc Champagne, avocat
Affaire entendue à Abbotsford (Colombie-Britannique)
du 5 au 8 novembre 2013.
(Traduction de la CRTEFP)

I. Griefs individuels renvoyés à l'arbitrage

1 Peter Petrovic, le fonctionnaire s'estimant lésé (le « fonctionnaire »), était, pendant les périodes en question, employé par le Service correctionnel du Canada (l'« employeur » ou SCC) en tant qu'agent correctionnel, classifié au groupe et au niveau CX-02, à l'établissement Kent (l'« établissement ») à Abbotsford, en Colombie-Britannique.

2 Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (la « Commission ») pour remplacer la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « CRTFP ») et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l'article 396 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013, un arbitre de grief saisi d'un grief avant le 1er novembre 2014 continue d'exercer les pouvoirs prévus à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; LRTFP) dans sa version antérieure à cette date.

3 Le 1er novembre 2012, le fonctionnaire s'est vu imposer une suspension pour une période indéfinie sans traitement en attendant une enquête disciplinaire pour avoir eu accès au Système de gestion des délinquants (« SGD ») de l'employeur sans autorisation et pour avoir partagé les renseignements avec d'autres personnes. Le 10 novembre 2012, le fonctionnaire a déposé deux griefs contre la suspension, qui ont été renvoyés à l'arbitrage en vertu de l'alinéa 209(1)b) de la LRTFP.

4 Dans l'un des griefs (dossier de la CRTEFP 566-02-8094), le fonctionnaire a soutenu que la suspension constituait une discrimination fondée sur la situation de famille en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C. (1985), ch. H-6; LCDP). Le 4 février 2013, le fonctionnaire a donné avis à la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP) en vertu de l'article 210 de la LRTFP. Au moyen d'une lettre en date du 19 février 2013, la CCDP a informé l'ancienne Commission qu'elle n'avait pas l'intention de formuler des observations sur cette question.

5 L'employeur a soulevé une objection selon laquelle le grief contestant la suspension sans traitement ne pouvait être renvoyé à l'arbitrage en vertu de l'article 209 de la LRTFP, puisqu'il s'agissait d'une mesure administrative et non disciplinaire.

6 Dans le deuxième grief (dossier de la CRTEFP 566-02-8095; le « grief visant la suspension »), on a allégué que la suspension du fonctionnaire était injustifiée et excessive. Dans ces deux griefs, on a demandé à titre de mesure corrective l'annulation de la suspension, une indemnisation pour le salaire perdu et les possibilités perdues de faire des heures supplémentaires, des primes pour travail durant des jours fériés, des primes de poste, des primes pour travail durant les fins de semaine, des intérêts sur les montants dus et la modification de la pension du fonctionnaire.

7 Le 1er mars 2013, le fonctionnaire a été rétrogradé à un poste CX-01 pour une période de 24 mois. Il a contesté par grief cette rétrogradation le 24 mars 2013 (dossier de la CRTEFP 566-02-8575). Les mesures correctives demandées étaient les mêmes que pour les deux premiers griefs.

8 La convention collective applicable est celle conclue entre le Conseil du Trésor et l'Union of Canadian Correctional Officers - Syndicat des agents correctionnels du Canada - CSN (UCCO-SACC-CSN) (le « syndicat ») dont la date d'expiration est le 31 mai 2010 (la « convention collective »).

9 L'ancienne Commission a regroupé ces trois griefs pour les besoins de l'audience. Pendant l'audience, la représentante du fonctionnaire a indiqué que le syndicat retirait le grief visant la discrimination en vertu de la LCDP (dossier de la CRTEFP 566-02-8094) et elle a confirmé cela par lettre au greffe de l'ancienne Commission après l'audience.

10 L'employeur a reconnu que le fonctionnaire n'avait pas fait l'objet d'une enquête ou d'une mesure disciplinaire pour des actions survenues avant 2012.

II. Résumé de la preuve

11 Huit témoins ont témoigné durant l'audience. Les témoins de l'employeur étaient Shawn Huish, sous-directeur; Mark Langer, conseiller en relations de travail; Mark Noon-Ward, sous-directeur; Bill Thompson, directeur, qui travaillaient tous à l'établissement pendant la période pertinente. Les personnes suivantes ont témoigné pour le compte du fonctionnaire : le fonctionnaire lui-même; John Randle, président de la section locale du syndicat; Rob Cater, gestionnaire correctionnel à l'établissement et superviseur du fonctionnaire; Darrel McKamey, CX-02 et délégué syndical à l'établissement.

12 La lettre disciplinaire envoyée au fonctionnaire le 1er mars 2013 se lit en partie comme suit :

[Traduction]

[…]

Vous avez omis de protéger les renseignements personnels des détenus dans l'accomplissement de vos fonctions et avez abusé de ces renseignements. En outre, vous avez divulgué certains de ces renseignements sans le consentement du détenu. […] Dans certains cas, vous avez eu accès aux dossiers du SGC et de RADAR des détenus incarcérés dans d'autres établissements et d'autres régions.

[…]

Pendant l'enquête disciplinaire et l'audience disciplinaire, vous avez admis sans hésiter avoir eu accès aux renseignements du SGD et de RADAR sur les détenus sans autorisation et avoir partagé des renseignements concernant la date de naissance d'un détenu avec votre [membre de la famille]. Pendant l'enquête disciplinaire, vous avez admis avoir partagé des renseignements du dossier du SGD de votre [membre de la famille] avec [membre de la famille] et avoir communiqué des renseignements sur une évaluation communautaire effectuée au sujet de [autre membre de la famille] avec [ce membre].

A. Pour l'employeur

1. Témoignage de M. Huish

13 M. Huish était le sous-directeur de l'établissement depuis décembre 2010 et il a été directeur intérimaire de la mi-septembre au 26 novembre 2012. À la mi-octobre 2012, le directeur d'un établissement de l'Est du Canada, où un membre de la famille du fonctionnaire était incarcéré, a communiqué avec lui. Le directeur a informé M. Huish qu'il avait été porté à son attention qu'un membre de la famille du fonctionnaire avait reçu certains renseignements de ce dernier et que le fonctionnaire avait eu accès au dossier d'autres délinquants. M. Huish a déclaré que, alors qu'il était sous-directeur, il ne savait pas que le membre de la famille du fonctionnaire était un détenu. M. Huish a informé M. Langer et l'Administration régionale (AR) de ce renseignement.

14 M. Huish a demandé à l'Administration centrale (AC) du SCC de fournir un registre d'activité sur le nombre de fois où le fonctionnaire a eu accès au SGD du SCC entre le 1er janvier et le 15 octobre 2012 (pièce E-1, onglet 5). M. Huish a expliqué que le SGD est la principale base de données de l'employeur, qui contient des renseignements au sujet des délinquants. Chaque fois qu'il a accès au SGD, un registre électronique est créé. M. Huish a déclaré qu'il a fallu environ une semaine avant de recevoir les rapports, qui étaient en différents formats.

15 Les rapports indiquaient que le fonctionnaire avait eu accès au SGD beaucoup plus souvent que ce que l'on aurait pu prévoir. M. Huish a déclaré qu'une partie du travail d'un CX-02 est la gestion des cas, ce qui comprend l'examen des dossiers des délinquants. Habituellement, le nombre de cas est d'environ 12 à 15 délinquants dans l'établissement. Le fonctionnaire a travaillé au Poste principal de contrôle des communications (PPCC) de l'établissement. M. Huish a déclaré qu'il n'était pas inhabituel pour un CX-02 du PPCC d'examiner plus d'un dossier de délinquant qu'un CX-02 travaillant dans d'autres unités, puisqu'un CX-02 du PPCC examinait également les dossiers de détenus transférés à l'établissement et à l'extérieur de ce dernier.

16 M. Huish a déclaré que les rapports indiquaient que le registre d'activité du fonctionnaire était plus important que ce qui aurait été exigé d'une personne travaillant au PPCC. Il a examiné le dossier de détenus qui n'étaient pas à l'établissement ou n'y avaient jamais été, qui se trouvaient dans d'autres régions ou qui étaient à l'établissement où était incarcéré le membre de sa famille. Il était évident que le fonctionnaire avait fait beaucoup plus que ce qu'il avait besoin de savoir pour accomplir ses fonctions. M. Huish a déclaré que, si un agent correctionnel n'a pas un besoin de savoir dans le cadre de son emploi, il ne doit pas examiner le dossier d'un délinquant.

17 M. Huish a dit qu'un agent correctionnel obtient un compte du SGD par l'entremise d'un coordonnateur qui le familiarise avec le SGD. L'agent correctionnel signe une déclaration et, chaque fois qu'il a accès au SGD, un avertissement apparaît à l'écran pour lui rappeler les règles applicables. M. Huish a expliqué qu'un autre système, appelé RADAR (Rapports automatisés de données appuyant la réinsertion), est un sous-ensemble du SGD. Bien que l'on puisse avoir accès aux deux systèmes séparément, le même avertissement apparaît à l'écran des deux systèmes. M. Huish a insisté pour dire que d'importants renseignements personnels figurent dans le SGD et que l'accès aux dossiers à partir de l'extérieur de l'établissement ou aux dossiers de membres de la famille contrevient aux règles du SCC.

18 M. Huish a reçu un rapport de vérification du personnel en date du 18 octobre 2012 sur des dossiers de délinquants auxquels a eu accès le fonctionnaire. Le rapport contenait certains noms de détenus notoires ayant des liens avec des gangs de motards et de rue. M. Huish a reçu un deuxième rapport préparé par l'AC du SCC qui portait sur toutes les régions nationales, à savoir le Pacifique, les Prairies, le Québec et l'Atlantique, et qui présentait une répartition différente de l'information. Comme ce rapport contenait des noms qui étaient répétés, il a été transféré à une feuille de calcul, ce qui a éliminé le double emploi.

19 Le 1er novembre 2012, M. Huish a envoyé au fonctionnaire un avis d'enquête disciplinaire ainsi qu'une lettre de suspension pour une période indéfinie sans traitement en attendant la fin de l'enquête disciplinaire. M. Huish a dit qu'à ce moment, l'employeur se préoccupait beaucoup du fonctionnaire et du fait qu'il représentait un risque pour le personnel, les détenus et sa réputation.

20 En ce qui concerne le risque pour le personnel, M. Huish a dit que l'employeur avait examiné la portée de l'accès par le fonctionnaire au SGD d'autres régions et qu'il avait eu accès à des renseignements au sujet de détenus qui avaient des liens avec des gangs. Étant donné les personnes dont il examinait les dossiers, la direction ne pouvait savoir à l'époque s'il était un agent double d'éléments du crime organisé, ce qui aurait pu mettre le personnel de l'établissement en danger.

21 Pour ce qui est du risque pour les détenus, comme le fonctionnaire avait partagé des renseignements du SGD avec le membre de sa famille incarcéré, la direction craignait qu'il puisse avoir fait la même chose pour les autres détenus. Le SGD contient des renseignements sensibles au sujet des détenus, comme les infractions qu'ils ont commises, leurs antécédents et leur affiliation à un gang. Si le fonctionnaire partageait des renseignements avec son proche au sujet de détenus de sa rangée, ces autres détenus auraient pu être en danger.

22 En ce qui concerne la réputation de l'employeur, M. Huish a déclaré qu'il y avait un risque que les médias et le public apprennent qu'un employé du SCC avait eu accès à des renseignements concernant environ 1 000 détenus, ce qui constitue une atteinte importante à la vie privée.

23 M. Huish a renvoyé à l'« Entente globale » conclue par l'employeur et le syndicat, dont les dispositions, comme le prévoit le préambule « […] ont pour objet de clarifier certaines dispositions de la convention collective des agent-es correctionnel-les (CX) ». La section III-C de l'Entente globale concerne la suspension durant l'enquête, dont les paragraphes 2 et 3 prévoient ce qui suit :

2. Dans les cas où le ou la gestionnaire au niveau local est satisfait-e que le maintien de la présence de l'employé-e sur les lieux du travail pose un risque grave et immédiat envers le personnel, les détenu-es, le public ou la réputation du SCC, l'employé-e peut être suspendu-e sans traitement jusqu'à ce que l'enquête soit terminée et qu'une décision ait été rendue à son sujet.

3. Dans les cas mentionnés au paragraphe 2) ci-dessus, le ou la gestionnaire au niveau local doit revoir le statut de l'enquête à toutes les trois (3) semaines et considérer la possibilité de réintégration à l'intérieur d'une période raisonnable en autant qu'il n'y a plus de risque sérieux ou immédiat. À toutes les trois (3) semaines, le ou la gestionnaire au niveau local, doit informer l'employé-e de la décision et des justifications. Les raisons doivent être suffisantes pour permettre à l'employé-e de comprendre les raisons de la décision.

24 M. Huish a dit que le document utilisé par la direction du SCC pour établir les critères justifiant une suspension sans traitement selon une évaluation du risque pour la réputation de l'établissement, son personnel, ses détenus ou le public est connu comme le « critère Larson », dont le fondement se trouve dans la décision rendue par l'ancienne Commission des relations de travail dans la fonction publique dans Larson c. Conseil du Trésor (Solliciteur général du Canada - Service correctionnel), 2002 CRTFP 9. M. Langer a rédigé le premier document d'évaluation du critère Larson, en date du 31 octobre 2012.

25 Au sujet des renseignements que le fonctionnaire a divulgués à son proche, M. Huish a déclaré que les renseignements que lui a communiqués le directeur de l'établissement où le proche du fonctionnaire était un détenu durant un appel téléphonique étaient que le détenu avait demandé une visite familiale privée et qu'un rapport d'évaluation communautaire avait été préparé. Lorsqu'un agent de libération conditionnelle de l'établissement du détenu a partagé les renseignements au sujet de l'évaluation avec lui, il a dit à l'agent de libération conditionnelle qu'il connaissait déjà le contenu du rapport, puisqu'il avait été informé par un membre de la famille au SCC. L'agent de libération conditionnelle avait rédigé un rapport d'observation que M. Huish avait consulté.

26 Le 5 novembre 2012, M. Huish a envoyé un ordre de convocation pour une enquête disciplinaire qui devait se tenir le 3 janvier 2013.

27 Le 22 novembre 2012, M. Huish a envoyé au fonctionnaire un examen sur trois semaines du critère Larson, qui confirmait la suspension sans traitement. À l'appui, M. Huish a déclaré qu'il était d'avis que le fonctionnaire représentait toujours un risque; M. Huish n'avait pas encore terminé le rapport et il croyait qu'il y avait trop de questions sans réponse au sujet du risque pour le personnel et les détenus.

28 Entre le 22 novembre et le 26 novembre 2012, le jour où M. Thompson est devenu le directeur de l'établissement, M. Huish a déclaré qu'il avait passé du temps avec lui et l'avait informé de la question au sujet du fonctionnaire. M. Huish n'a fait aucune autre intervention sur la question.

29 En contre-interrogatoire, M. Huish a déclaré que les documents qu'il a consultés pour imposer la suspension sans traitement étaient les deux dossiers de l'AC et le rapport sous forme de feuille de calcul préparé afin de rendre les renseignements plus gérables. Il a déclaré que le fonctionnaire avait consulté le dossier de 993 détenus. À la question de savoir si le SGD fait la différence entre des appels de fichiers, des écrans ou des images, M. Huish a répondu qu'il y avait un certain nombre d'écrans pour chaque détenu. Lorsqu'on lui a dit que le rapport de vérification du personnel contenait uniquement 259 écrans, M. Huish a dit qu'il n'était pas d'accord. M. Huish a répété qu'il s'en était remis au rapport verbal du directeur de l'établissement où le proche du fonctionnaire était incarcéré, puisque le rapport d'observation de l'agent de libération conditionnelle n'avait pas été traduit.

30 M. Huish a déclaré que, bien que l'enquête fût en cours, les enquêteurs l'avaient informé le ou vers le 7 novembre 2012. Ils ne croyaient pas que le fonctionnaire avait une intention criminelle, avait exercé une activité criminelle ou vendait des renseignements. Ils l'ont trouvé très naïf.

31 M. Huish a déclaré que l'AR avait demandé une analyse des liens pour ce qui est des dénominateurs communs au sujet du crime organisé et d'autres éléments criminels en fonction du nom des détenus aux dossiers électroniques desquels le fonctionnaire avait eu accès le plus souvent. De tels liens n'ont pas été trouvés, et M. Huish a reçu l'information plusieurs jours après la séance d'information du 7 novembre 2012.

32 Renvoyé à un courriel en date du 2 novembre 2012 de la région des Prairies de l'employeur au sujet du rapport de vérification du personnel qui déclarait que le fonctionnaire ne représentait pas une menace pour le personnel, les délinquants ou la sécurité de l'établissement, M. Huish a dit qu'il avait été mis au courant de cette information. Au sujet de la région de l'Atlantique, cette dernière a indiqué qu'aucun lien entre le fonctionnaire et le crime organisé n'avait été trouvé.

33 M. Huish a déclaré que les courriels du fonctionnaire des six mois précédents avaient été examinés, mais qu'ils n'avaient pas divulgué d'échanges de renseignements avec les détenus.

34 M. Huish a déclaré qu'à la période pertinente, il y avait entre 300 et 400 détenus à l'établissement. Il a dit que la plupart des membres du personnel du SCC avaient accès au SGD et qu'un tel accès pouvait être suspendu. À la question de savoir quel poste de l'établissement n'avait aucun contact avec les détenus, M. Huish a dit que la plupart des postes du personnel en avaient, à l'exception des commis aux dossiers, des agents correctionnels travaillant dans les miradors ou les patrouilles mobiles près du périmètre de l'établissement et ceux travaillant à l'entrée principale et au PPCC. Il a ajouté que la plupart des postes à l'AR n'ont pas de contact avec les détenus, y compris les postes de commis et les agents correctionnels affectés à l'AR ou au centre de gestion du matériel.

35 Interrogé sur le risque pour la réputation de l'employeur ou la question de savoir si les actions du fonctionnaire avaient été rapportées dans les médias, M. Huish a dit qu'il ne savait pas et que rien de cette nature n'avait été porté à son attention.

36 M. Huish a déclaré qu'il n'avait pas discuté de la suspension sans traitement du fonctionnaire avec son superviseur et qu'il n'avait pas examiné les rapports d'évaluation du rendement du fonctionnaire.

37 En réinterrogatoire, à la question de savoir si les personnes qui occupent ces postes sans contact avec les détenus avaient besoin d'un accès au SGD, M. Huish a répondu que certains en ont besoin et d'autres pas. Il a dit qu'il avait examiné la question de savoir si le fonctionnaire pouvait être placé dans un tel poste en toute sécurité.

38 À la question de savoir pourquoi il a confirmé la suspension sans traitement le 22 novembre 2012, M. Huish a déclaré qu'à l'époque, selon les renseignements connus de l'employeur, le fonctionnaire avait fait preuve de mauvais jugement, il était naïf et il n'avait pas tenu compte des règles sur la protection de la vie privée. Il savait que le fonctionnaire n'avait aucune intention criminelle et qu'il n'avait exercé aucune activité criminelle. Même s'il savait ce que le fonctionnaire ne faisait pas, M. Huish ne savait toujours pas pourquoi il avait eu accès aux dossiers des détenus, ce qu'il avait fait avec les renseignements auxquels il avait eu accès et s'il avait utilisé les renseignements pour un gain personnel, financier ou non. Le 22 novembre, M. Huish ne pouvait faire confiance au fonctionnaire. Il était convaincu qu'il n'y avait aucun poste approprié à l'établissement dans lequel réintégrer le fonctionnaire, puisqu'il avait besoin de plus de renseignements.

2. Témoignage de M. Langer

39 M. Langer est un conseiller en relations de travail à l'établissement depuis 2003. Il a assisté à l'audience disciplinaire du fonctionnaire qui s'est tenue le 8 janvier 2013, à laquelle son rôle était de consigner la procédure puis de faire préparer une transcription. Il a déclaré qu'à l'époque, le taux de rémunération maximal pour un CX-02 était de 70 131$ et qu'il était de 66 088 $ pour un CX-01.

40 En contre-interrogatoire, M. Langer a déclaré que les CX-02 affectés au PPCC font plus d'heures supplémentaires que l'agent correctionnel moyen.

41 À la question de savoir s'il savait si des agents correctionnels étaient affectés à des postes dans d'autres secteurs, il a répondu que certains pouvaient l'être à l'AR et certains dans d'autres établissements, mais rarement dans d'autres départements du même établissement. Il a ajouté qu'à l'occasion des agents correctionnels de l'établissement étaient affectés à d'autres fonctions, ce qui comprend du travail de bureau.

42 En ce qui concerne les agents correctionnels qui ont des relations non appropriées avec les détenus, M. Langer a déclaré qu'un cas s'est produit avant son arrivée, la personne a été renvoyée et, dans un autre cas, la personne a été réaffectée, mais il ne pouvait se rappeler à quelles fonctions.

43 Dans un cas d'utilisation excessive de la force, l'agent a été affecté à un poste qui n'avait aucun contact avec les détenus.

44 En ce qui concerne les tâches administratives, M. Langer a déclaré que cela pouvait dépendre de la capacité de l'agent à accomplir ces fonctions et de la question de savoir si la personne pouvait avoir accès à des renseignements confidentiels.

3. Témoignage de M. Noon-Ward

45 M. Noon-Ward a été sous-directeur et directeur intérimaire à l'établissement durant la période en question. Il a été informé de plusieurs questions relatives aux relations de travail à l'établissement, y compris celles concernant le fonctionnaire.

46 Le 13 décembre 2012, M. Noon-Ward a envoyé une lettre sur le critère Larson au fonctionnaire, confirmant la suspension sans traitement. Il a justifié cela par le risque pour l'établissement, le fonctionnaire et les détenus. À ce moment, l'enquête n'était pas terminée et l'audience disciplinaire n'avait pas eu lieu. Même s'il a été conclu que le fonctionnaire n'avait pas d'intention criminelle, la direction ne connaissait pas la profondeur ou l'étendue du partage de renseignements par le fonctionnaire ou la raison pour laquelle il avait eu accès aux dossiers.

47  M. Noon-Ward a eu des conversations avec le fonctionnaire avant l'audience disciplinaire pour exprimer les préoccupations de la direction. Pendant l'audience, le fonctionnaire a réalisé que ce qu'il avait fait était mal et il a admis ses actions. Cependant, il ne comprenait pas la gravité de ses actions ou les conséquences possibles, qui comprenaient une poursuite éventuelle contre le SCC pour atteinte à la vie privée, la possibilité de représailles contre le fonctionnaire, son proche ou sa famille si les renseignements étaient transmis aux détenus et l'embarras potentiel pour le SCC si l'information était rendue publique.

48 Le 18 janvier 2013, M. Noon-Ward a envoyé un courriel pour annuler l'accès par le fonctionnaire au SGD et à RADAR, puisque la direction envisageait son retour au travail après sa suspension administrative. Depuis la plus récente lettre Larson, l'enquête a pris fin et il a été conclu que le fonctionnaire n'avait pas d'intention malveillante ou criminelle. Bien que le risque pour l'établissement et le SCC fût réduit, les actions du fonctionnaire étaient répréhensibles et violaient la politique du SCC et les lois sur la protection de la vie privée. Il restait la question de la confiance, puisque ni M. Noon-Ward ni M. Thompson ne croyaient que le fonctionnaire n'utiliserait pas le SGD de façon non appropriée. Même si à leur avis le fonctionnaire ne comprenait toujours pas la gravité de ses actions, à l'audience disciplinaire, il a admis qu'il avait tort et ses actions n'ont pas été faites pour un gain monétaire. La direction croyait que le fonctionnaire était un bon agent, qui pouvait être récupéré et géré, selon des limites.

49 M. Noon-Ward a dit que la rétrogradation du fonctionnaire pour une période de 24 mois avait été décidée pour lui donner le temps de réfléchir à ce qu'il avait fait et de rétablir la confiance avec la direction. La mesure disciplinaire représentait de six à sept semaines de sanction pécuniaire, ce qui était une pression financière moindre qu'une sanction pécuniaire ou une suspension. La direction croyait que le fonctionnaire n'avait rien appris de ces sanctions. Il n'a pas été mis fin à l'emploi du fonctionnaire parce que ses gestionnaires l'appuyaient.

50 En contre-interrogatoire, M. Noon-Ward a dit que lui-même et M. Thompson ont été informés par les enquêteurs en décembre 2012. Ils ont appris que le fonctionnaire n'avait pas réellement échangé de dossiers avec des éléments criminels et que les enquêteurs croyaient que le fonctionnaire n'avait aucune intention criminelle et qu'il n'avait pas eu accès aux dossiers pour un gain monétaire. L'enquête a révélé que, même si un certain nombre de dossiers auxquels le fonctionnaire avait eu accès concernaient le travail, il avait eu accès à un certain nombre d'autres dossiers pour lesquels il n'avait pas un besoin de savoir.

51 À la question de savoir si un agent correctionnel serait au courant de l'exigence d'aviser le commissaire à la protection de la vie privée d'une atteinte à la vie privée, M. Noon-Ward a répondu que les agents correctionnels n'ont pas tendance à avoir ce degré de précision. Si un agent porte atteinte à la sécurité, il est censé en informer ses collègues.

52 M. Noon-Ward a été renvoyé à des courriels en date du 18 janvier 2013 qu'il a envoyé à des gestionnaires correctionnels de l'établissement, ordonnant que le fonctionnaire ne devait pas occuper un poste de CX-02 ou avoir accès au SGD et on lui a demandé si le fonctionnaire avait occupé un poste CX-02 après le courriel. M. Noon-Ward a dit que c'était possible, puisque tous les gestionnaires correctionnels n'étaient pas au courant du courriel et que, dans le cas de gestionnaires correctionnels intérimaires, il n'avait pas partagé les détails du cas du fonctionnaire avec eux. Lorsqu'il a été établi que le fonctionnaire occupait un poste CX-02, M. Noon-Ward a fait corriger la situation. M. Noon-Ward croyait que les détenus concernés n'avaient pas appris qu'il avait été porté atteinte à leur vie privée.

4. Témoignage de M. Thompson

53 Lorsqu'il a accédé au poste de directeur de l'établissement, M. Huish a informé M. Thompson de plusieurs questions relatives aux relations de travail, dont l'une concernait le fonctionnaire. Lorsque le directeur Thompson a été en congé du 7 au 14 décembre 2012, M. Noon-Ward a agi en son nom.

54 Dans une lettre adressée au fonctionnaire en date du 2 janvier 2013, le directeur Thompson a joint une copie vérifiée du rapport d'enquête disciplinaire, l'a informé que l'audience disciplinaire se tiendrait le 8 janvier 2013 et a confirmé sa suspension sans traitement en vertu du critère Larson. Le directeur Thompson a confirmé la suspension parce qu'il n'avait pas encore décidé s'il était sécuritaire de faire revenir le fonctionnaire au travail en raison des allégations contre lui et déterminé s'il pouvait occuper un autre poste dans l'intervalle. Il croyait qu'il était important de rencontrer le fonctionnaire, puisqu'il avait accepté le rapport d'enquête et qu'il souhaitait déterminer si le fonctionnaire était récupérable. Le directeur Thompson savait déjà que le fonctionnaire avait admis les allégations et qu'il n'avait pas d'intention criminelle. Il a envoyé une autre lettre Larson, en date du 3 janvier 2013.

55 Le directeur Thompson a dit qu'il croyait que le fonctionnaire ne comprenait pas bien ses actions. Il l'a trouvé naïf et il l'a déclaré durant l'audience disciplinaire. Même si le fonctionnaire comprenait que ces sections étaient mauvaises, il ne comprenait pas la gravité de l'accès aux dossiers.

56 Le directeur Thompson a déclaré que l'audience disciplinaire du 8 janvier 2013 était très importante pour lui parce qu'il n'en était pas encore venu à une conclusion concernant une mesure disciplinaire. Après l'audience, il a consulté plusieurs personnes de l'organisation de l'employeur. Puisqu'il croyait que le fonctionnaire était récupérable et que le lien de confiance avec lui n'avait pas été rompu, il l'a réintégré au niveau CX-02 le 18 janvier 2013, à des fonctions limitées, jusqu'à ce qu'il prenne une décision au sujet de la mesure disciplinaire.

57 Dans une lettre adressée au fonctionnaire en date en date du 1er mars 2013, le directeur Thompson lui a imposé une rétrogradation de 24 mois au poste CX-01. Il a choisi cette mesure parce qu'il souhaitait que le fonctionnaire comprenne ce qu'il avait fait avant de revenir à un poste CX-02. Il n'a pas envisagé une suspension parce que cela représentait une perte monétaire et le fonctionnaire n'aurait rien appris de cela. La rétrogradation allait donner au fonctionnaire la possibilité d'être encadré et de voir ce que d'autres CX-02 font dans des situations différentes.

58 Le directeur Thompson a dit qu'il envisageait une rétrogradation d'un an, mais a pensé que ce n'était pas suffisamment long pour encadrer le fonctionnaire. Il a déclaré qu'il n'avait pas réfléchi en mois, mais uniquement en années. À la question de savoir pourquoi, le directeur Thompson a répondu qu'il ne pouvait le dire.

59 Le directeur Thompson a déclaré que les actions du fonctionnaire contrevenaient à l'article 15 et aux alinéas 18a), b) et c) de la « Directive du commissaire DC 060 - Code de discipline » (le « Code de discipline »). Les circonstances atténuantes dont il a tenu compte étaient les huit années de service du fonctionnaire accompagnées de bons rapports d'évaluation du rendement et le fait qu'il n'avait aucune mesure disciplinaire antérieure.

60 En contre-interrogatoire, le directeur Thompson a dit que, lorsque M. Huish l'a informé, il était au courant des rapports de l'AR de ses analyses des menaces pour le personnel, les délinquants ou le public et la violence entre détenus. Il savait également que les enquêteurs avaient rencontré ceux de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) qui ont dit qu'il n'avait trouvé aucun indice d'abus de confiance par le fonctionnaire, comme le définit le Code criminel (L.R.C. (1985), ch. C-46; le « Code criminel »). Le directeur Thompson a été informé par les enquêteurs le ou vers le 27 novembre 2012, moment auquel ils avaient interrogé le fonctionnaire une fois. Ils l'ont avisé que le fonctionnaire éprouvait une certaine curiosité à avoir accès aux dossiers des détenus, mais qu'ils n'avaient discerné aucune intention criminelle à ce moment.

61 À la question de savoir comment l'encadrement du fonctionnaire se déroulerait durant sa rétrogradation, le directeur Thompson a répondu que le superviseur du fonctionnaire était le mieux placé pour répondre. Son rôle ne consistait pas à établir des normes ou des objectifs pour le superviseur.

62 Interrogé au sujet du rendement du fonctionnaire entre le 18 janvier et le 1er mars 2013, le directeur Thompson a dit qu'il n'y avait rien à noter, puisqu'il se présentait au travail. Il a été informé de l'attitude du fonctionnaire par M. Langer.

63 Le directeur Thompson a déclaré qu'à sa connaissance, les médias n'avaient pas parlé des activités du fonctionnaire.

64 Le directeur Thompson a reconnu que le rapport d'enquête indiquait que le fonctionnaire avait utilisé le SGD pour donner à son proche des renseignements en avril 2012.

65 À la question de savoir si la communication du rapport d'évaluation communautaire de l'autre proche du fonctionnaire avait été soulevée à l'audience disciplinaire, le directeur Thompson ne pouvait précisément se rappeler, mais il a dit qu'on avait fait référence au partage de renseignements. Il a reconnu que le rapport d'enquête ne semblait pas contenir de conclusion au sujet du partage de ce rapport.

66 En réinterrogatoire, le directeur Thompson a dit qu'il avait probablement vu les rapports d'analyse de l'AR lorsqu'il a examiné le rapport d'enquête provisoire le 27 ou le 28 novembre 2012. Il a alors été renvoyé au rapport sur les menaces pour le personnel, les délinquants ou le public, qui concluait qu'il n'y avait aucun indice d'une telle menace et on lui a demandé pourquoi il n'avait pas fait revenir le fonctionnaire au travail à ce moment. Il a dit qu'il n'était pas convaincu qu'il n'y avait pas de problème de sécurité et qu'il n'avait pas encore interrogé le fonctionnaire. Il croyait qu'une analyse plus approfondie était nécessaire, puisque le fonctionnaire avait eu accès au dossier de détenus notoires, et le directeur Thompson ne savait pas ce que cela signifiait.

67 Le directeur Thompson a été renvoyé à un courriel de M. Langer à l'AC en date du 28 novembre 2012 afin d'organiser une téléconférence pour discuter de la question de savoir si la suspension du fonctionnaire devait se poursuivre. Il a dit qu'il avait reçu des avis contradictoires et qu'il souhaitait interroger le fonctionnaire avant de prendre une décision.

68 Le directeur Thompson a dit que l'attitude du fonctionnaire de janvier à mars 2013 a joué un rôle dans sa décision de le rétrograder plutôt que de mettre fin à son emploi.

B. Pour le syndicat

1. Témoignage du fonctionnaire s'estimant lésé

69 Le fonctionnaire est employé par le SCC depuis le 31 janvier 2004. Il a commencé comme CX-01 à l'établissement de Matsqui. En janvier 2008, il est arrivé à l'établissement en tant qu'employé occupant un poste d'attache CX-02. Il a travaillé dans la cour et les unités résidentielles jusqu'en juillet 2010, moment où il a été affecté temporairement au PPCC pendant trois ou quatre mois, après quoi il a été réaffecté à la cour pendant six mois. Il a ensuite été assigné au PPCC jusqu'à la date de sa suspension.

70 Le 1er novembre 2012, le fonctionnaire a été convoqué à une réunion avec M. Huish, à laquelle un représentant syndical et un gestionnaire correctionnel ont également assisté. Il a été informé qu'il était suspendu sans traitement pour avoir abusé du SGD et avoir mis en danger la sécurité du personnel. M. Huish ne lui a pas demandé d'explications au sujet de son accès au SGD durant la réunion. On lui a demandé s'il avait des problèmes ou des craintes au sujet de sa sécurité ou de celle de son proche. Le fonctionnaire ne comprenait pas pourquoi sa sécurité était mentionnée et croyait qu'il y avait un malentendu. Il a dit que lui-même et son épouse ont visité pour la dernière fois son proche la fin de semaine du 26 et du 27 octobre 2012.

71 Le fonctionnaire a dit que les enquêteurs l'avaient interrogé deux fois, la première fois le 8 novembre 2012. Ils avaient une liste de dossiers de détenus auxquels il avait eu accès. Le fonctionnaire a dit qu'au départ, il ne reconnaissait pas tous les noms de la liste, mais plus tard il a fait remarquer qu'environ 15 noms visaient deux régions, c.-à-d. des détenus transférés d'une région à une autre. Il a dit que la liste contenait le nom de 34 détenus, aux dossiers desquels il avait eu accès plus de 10 fois. De ce nombre, 14 faisaient partie de ses cas à l'établissement, 15 résidaient dans les unités où il avait travaillé, 3 provenaient d'une unité de 96 détenus et 2 étaient en liberté conditionnelle, dont un qu'il avait supervisé alors qu'il travaillait à l'établissement de Matsqui. Il a admis aux enquêteurs qu'il avait eu accès à certains dossiers par curiosité.

72 Le fonctionnaire a déclaré qu'il ne souscrivait pas à l'affirmation de M. Huish selon laquelle il avait partagé l'évaluation communautaire aux fins d'une visite familiale privée avec son proche. Le fonctionnaire a dit qu'il avait rempli la demande de visite et que l'évaluation visait la période postérieure à la mise en liberté de son proche, puisqu'il bénéficiait d'un soutien en vue d'une mise en liberté en janvier 2013. Le membre de sa famille était dans un établissement à sécurité moyenne et il bénéficie d'un soutien pour un transfert à un établissement à sécurité minimale. Le fonctionnaire a dit que l'évaluation communautaire avait été effectuée en premier et que des préoccupations avaient été soulevées quant à la façon dont l'entrevue avait été consignée et à un effet négatif possible que cela pouvait avoir sur le proche incarcéré.

73 Lorsque le fonctionnaire a été interrogé par la suite par un agent de libération conditionnelle pour une évaluation, il a mentionné ces préoccupations et l'agent de libération conditionnelle les a notées au dossier. Le fonctionnaire a admis aux enquêteurs qu'il avait eu accès au dossier de son proche, à l'occasion, pour voir comment il allait. Le fonctionnaire savait que son proche avait dit à l'agent de libération conditionnelle de son établissement qu'il avait vu le rapport.

74 Le fonctionnaire a déclaré que, lorsqu'il a travaillé du 18 janvier au 1er mars 2013, il était payé au taux d'un CX-02. Au cours de la troisième semaine suivant son retour au travail, il a été affecté au PPCC.

75 Le fonctionnaire a dit que le fait de travailler au PPCC l'obligeait à avoir accès aux dossiers pour le déplacement de détenus, comme l'attribution des cellules, les transferts à l'établissement et à l'extérieur de ce dernier et les permissions de sortir pour raisons d'ordre médical.

76 Au sujet de sa perte monétaire, le fonctionnaire a déclaré qu'alors qu'il travaillait au PPCC, il faisait deux ou trois quarts de travail supplémentaire par mois, ce qui représentait 4 000 $ à 5 000 $ par année en primes de poste, en plus de son salaire de CX-02. Depuis sa rétrogradation au poste CX-01, il a fait un ou deux quarts de travail supplémentaire. En tant que CX-01, il était plus probable qu'il se voit affecter à des quarts de nuit pour faire les heures supplémentaires, ce pour quoi il a obtenu une prime de poste.

77 Appelé à commenter les témoignages de M. Noon-Ward et de M. Thompson selon lesquels il ne comprenait pas la gravité de ses actions, le fonctionnaire a dit qu'il était à la maison depuis deux mois et que l'affaire le touchait personnellement. Il avait de la difficulté à comprendre leur point de vue sur la vie privée des détenus.

78 En contre-interrogatoire, le fonctionnaire a déclaré qu'en tant que CX-01, il était plus probable qu'il obtienne des quarts de nuit pour faire les heures supplémentaires que s'il était un CX-02.

2. Témoignage de M. Randle

79 M. Randle a dit que lui-même et un délégué syndical avaient rencontré M. Huish, qui les a informés que le fonctionnaire avait été suspendu sans traitement pour une grave atteinte à la vie privée. M. Huish se préoccupait de la sécurité du fonctionnaire, puisqu'il [traduction] « craignait que le fonctionnaire vende » des renseignements ou qu'il subisse un chantage par des membres de gangs. M. Huish a mentionné le proche du fonctionnaire, ce qui était le moment où M. Randle avait appris que le membre de la famille du fonctionnaire était incarcéré. M. Huish a demandé à M. Randle de communiquer avec le fonctionnaire afin de s'assurer qu'il allait bien et de lui demander s'il avait besoin de quelque chose pour assurer sa sécurité.

80 M. Randle a assisté à l'entrevue des enquêteurs avec le fonctionnaire. Il a indiqué qu'à la fin, les deux enquêteurs ont dit au fonctionnaire qu'il avait une brillante carrière devant lui.

81 M. Randle a déclaré qu'il n'avait reçu aucune plainte de membres du syndicat selon lesquels le fonctionnaire représentait un risque pour leur sécurité et qu'il n'avait reçu aucune plainte des détenus au sujet de représailles.

82 M. Randle a dit qu'en tant que CX-01, il a accès au SGD parce qu'il travaille avec des détenus dans des unités résidentielles, même s'il n'a pas de cas de détenus.

3. Témoignage de M. Cater

83 Même s'il était le superviseur du fonctionnaire, M. Cater n'était pas au courant des allégations contre lui durant la période d'octobre à novembre 2012. Il a seulement entendu dire que le fonctionnaire avait eu accès aux dossiers du SGD de détenus qui ne se trouvaient pas à l'établissement.

84 Entre octobre 2012 et janvier 2013, M. Cater n'a pas eu connaissance de menaces de représailles par des détenus contre le fonctionnaire ou de menaces à la sécurité de ce dernier. En outre, il n'a pas eu connaissance de refus par des employés de travailler avec le fonctionnaire en raison des allégations.

85 M. Cater a dit qu'il savait que l'employeur pouvait retirer à l'employé l'accès au SGD, mais qu'il ne connaissait pas de circonstances dans lesquelles cela s'était produit.

86 M. Cater a dit que M. Huish, le sous-directeur ou le directeur ne lui a pas demandé son opinion au sujet de la suspension sans traitement du fonctionnaire.

4. Témoignage de M. McKamey

87 En novembre 2012, M. McKamey a été affecté au PPCC et il était un délégué syndical. Lui-même et le vice-président de la section locale du syndicat de l'époque ont rencontré M. Huish le 9 novembre 2012 et il leur a parlé de l'accès par le fonctionnaire aux dossiers des détenus. M. McKamey a dit que M. Huish avait justifié la poursuite de la suspension sans traitement du fonctionnaire par le fait que la direction n'était pas satisfaite des conclusions des enquêteurs.

88 M. McKamey a dit qu'en tant que membre de l'équipe du PPCC, il n'avait aucune préoccupation quant au retour au travail du fonctionnaire.

III. Résumé de l'argumentation

A. Pour l'employeur

1. Le grief visant la suspension

89 Le grief visant la suspension a été renvoyé à l'arbitrage en application de l'alinéa 209(1)b) de la LRTFP, à savoir pour une mesure disciplinaire qui a entraîné le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire.

90 Pour se déclarer compétent, un arbitre de grief doit être convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que la suspension sans traitement en attendant une enquête était une décision disciplinaire et non administrative.

91 Le pouvoir de l'employeur d'imposer de façon administrative à un employé une suspension pour une période indéfinie sans traitement en attendant une enquête figure à la section III-C, paragraphes 2 et 3, de l'Entente globale.

92 Le premier document d'évaluation du critère Larson en date du 31 octobre 2012 a été rédigé par M. Langer. M. Huish a donné la raison de l'envoi de la lettre du 1er novembre 2012 qui imposait la suspension pour une période indéfinie sans traitement, à savoir la possibilité d'un risque pour le personnel, les détenus et la réputation de l'employeur.

93 À l'appui de la confirmation de la suspension pour une période indéfinie sans traitement dans sa lettre du 22 novembre 2012, M. Huish a déclaré qu'il était d'avis que le fonctionnaire représentait toujours un risque, qu'il n'avait pas encore terminé le rapport d'enquête et qu'il croyait qu'il y avait trop de questions sans réponse au sujet du risque pour le personnel et les détenus. Même s'il savait ce que le fonctionnaire ne faisait pas, M. Huish ne savait toujours pas pourquoi le fonctionnaire avait eu accès aux dossiers des détenus, ce qu'il a fait avec les renseignements auxquels il a eu accès et s'il a utilisé les renseignements pour un gain personnel, financier ou non.Le 22 novembre, M. Huish ne pouvait faire confiance au fonctionnaire.

94 Lorsqu'il a été informé par les enquêteurs le 7 novembre 2012, M. Huish a appris que ces derniers avaient conclu que le fonctionnaire n'avait aucune intention criminelle ni aucun lien avec des gangs. M. Huish ne savait toujours pas pourquoi le fonctionnaire avait eu accès aux dossiers des détenus, ce qu'il a fait avec les renseignements auxquels il a eu accès et s'il a utilisé les renseignements pour un gain personnel, financier ou non. L'employeur a fait valoir qu'il était donc raisonnable de supposer que M. Huish n'avait aucun renseignement suffisant pour annuler la suspension sans traitement du fonctionnaire.

95 Dans une lettre en date du 13 décembre 2012, M. Noon-Ward a confirmé la suspension pour une période indéfinie sans traitement du fonctionnaire. Même s'il avait été conclu que le fonctionnaire n'avait pas d'intention criminelle, la direction ne connaissait pas la profondeur ou l'étendue du partage de renseignements par le fonctionnaire ou la raison pour laquelle il avait eu accès aux dossiers.

96 Dans une lettre adressée au fonctionnaire en date du 2 janvier 2013, le directeur Thompson a joint une copie vérifiée du rapport d'enquête disciplinaire, l'a informé que l'audience disciplinaire se tiendrait le 8 janvier et a confirmé sa suspension sans traitement parce qu'il n'avait pas encore décidé s'il était sécuritaire de faire revenir le fonctionnaire au travail en raison des allégations contre lui et a conclu que le fonctionnaire ne pouvait occuper un autre poste dans l'intervalle.

97 Pour le directeur Thompson, l'audience disciplinaire était essentielle, puisqu'il n'avait que le rapport d'enquête et qu'il n'avait pas rencontré le fonctionnaire. Il souhaitait déterminer si le fonctionnaire était récupérable. À l'audience, le directeur Thompson a déclaré qu'il comprenait que le fonctionnaire était naïf et il semblait plus évident pour lui que les actions du fonctionnaire étaient dues à sa curiosité et à un manque de jugement.

98 Après des consultations, le directeur Thompson a fait revenir le fonctionnaire au travail sous certaines restrictions, en attendant sa décision. L'employeur a fait valoir que la preuve n'a révélé aucun indice d'intention d'imposer une mesure disciplinaire au fonctionnaire durant la période de l'enquête.

99 Au soutien de ses observations, l'employeur a renvoyé à King c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2011 CRTFP 45 et à Cassin c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2012 CRTFP 37.

2. Le grief visant la rétrogradation

100 En ce qui concerne les sanctions disciplinaires, un arbitre de grief peut décider si une inconduite s'est produite; le cas échéant, l'arbitre de grief doit poser la question de savoir si l'inconduite justifiait la mesure disciplinaire et, dans l'affirmative, si la mesure disciplinaire imposée était raisonnable ou appropriée dans les circonstances. Un arbitre de grief ne devrait pas substituer son propre point de vue s'il est conclu que l'employeur était raisonnable.

101 Le pouvoir de l'employeur d'imposer une rétrogradation disciplinaire est établi à l'alinéa 12(1)c) de la Loi sur la gestion des finances publiques (L.R.C. (1985), ch. F-11; LGFP), qui est ainsi rédigé :

12. (1) Sous réserve des alinéas 11.1(1)f) et g), chaque administrateur général peut, à l'égard du secteur de l'administration publique centrale dont il est responsable :

[…]

c) établir des normes de discipline et prescrire des mesures disciplinaires, y compris le licenciement, la suspension, la rétrogradation à un poste situé dans une échelle de traitement comportant un plafond inférieur et les sanctions pécuniaires […]

102 Sur la question de savoir si l'inconduite s'est produite, l'employeur a renvoyé à la lettre disciplinaire en date du 1er mars 2013 et il a fait valoir qu'à un certain nombre d'occasions, le fonctionnaire a eu accès au SGD sans autorisation et sans le besoin de savoir. Au sujet du partage de renseignements avec son proche, l'employeur a fait remarquer que cela n'est pas contesté, même si le fonctionnaire a apporté des nuances. Le fait que le fonctionnaire examinait le dossier de son proche était inacceptable et répréhensible.

103 Le fait que le fonctionnaire examinait la date de naissance d'un détenu, même si c'était pour tenter d'aider son proche à faire un gâteau d'anniversaire, était clairement répréhensible et contraire au Serment d'office et de discrétion du fonctionnaire, qu'il a signé le 27 janvier 2004. Ce serment prévoit en partie ce qui suit :

[…] je remplirai avec fidélité et honnêteté les fonctions qui m'incombent en raison de mon emploi dans la fonction publique et que, sans y être dûment autorisé, je ne révélerai ou ne ferai connaître rien de ce qui viendra à ma connaissance par suite de cet emploi […]

104 L'employeur a déclaré que les actions du fonctionnaire contrevenaient à l'article 15 et aux alinéas 18a), b) et c) du Code de discipline, qui sont ainsi rédigés :

Protection et communication de l'information

15.Les employés traiteront l'information reçue dans le cadre de leur emploi d'une manière conforme à la Loi sur l'accès à l'information, à la Loi sur la protection des renseignements personnels, à la Politique sur la sécurité du gouvernement ainsi qu'au serment de discrétion que prêtent tous les employés de la fonction publique du Canada. Ils s'assureront que les renseignements appropriés sont communiqués en temps opportun aux délinquants, aux autres organismes de justice pénale et au public, y compris les victimes, comme l'exigent la loi et les politiques.

[…]

Infractions

18.Commet une infraction l'employé qui :

a. omet de garder en lieu sûr les documents, rapports, directives, manuels, guides ou autres renseignements du Service;

b. ne se conforme pas aux dispositions de la Loi sur l'accès à l'information et de la Loi sur la protection des renseignements personnels;

c. contrevient à la Politique sur la sécurité du gouvernement; […]

105 Quant à la question de savoir si l'inconduite justifiait la mesure disciplinaire, l'employeur a fait valoir qu'une personne raisonnable répondrait par l'affirmative.

106 En ce qui concerne le caractère approprié de la mesure disciplinaire, MM. Noon-Ward et Thompson ont tous les deux dit qu'ils étaient contre la recommandation de l'AC de mettre fin à l'emploi du fonctionnaire. Ils ont consulté les superviseurs et la direction et ils croyaient que le fonctionnaire était récupérable et qu'il est toujours utile à l'employeur. Ils ont conclu que le fonctionnaire avait commis des erreurs de jugement à répétition sur une longue période. Ayant rejeté le licenciement, la seule autre option disciplinaire à la disposition de la direction était la suspension ou la rétrogradation.

107 M. Noon-Ward et le directeur Thompson étaient tous les deux d'avis qu'une suspension n'aurait pas d'effet correctif, puisqu'elle entraînerait uniquement une sanction pécuniaire. Ils croyaient qu'une rétrogradation aurait permis au fonctionnaire de réaliser ses erreurs et d'apprendre de ces dernières, tout en profitant d'une formation et d'un encadrement. Ils croyaient également qu'une rétrogradation imposerait un fardeau financier moindre au fonctionnaire. Selon M. Noon-Ward, la différence entre le salaire d'un CX-02 et celui d'un CX-01 sur deux ans équivaudrait environ à une suspension de six à sept semaines. En ce qui concerne les possibilités d'heures supplémentaires, l'employeur a fait valoir que la preuve n'était pas claire. Il a soutenu que, lorsqu'il a choisi la mesure disciplinaire, M. Thomson a tenu compte des circonstances atténuantes.

108 Au soutien de ses arguments, l'employeur a cité les décisions suivantes : Shaver c. Administrateur général (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences), 2011 CRTFP 43; MacArthur c. Administrateur général (Agence des services frontaliers du Canada), 2010 CRTFP 90; Hillis c. Conseil du Trésor (Développement des ressources humaines Canada), 2004 CRTFP 151; Spawn c. Agence Parcs Canada, 2004 CRTFP 25; Brecht c. Conseil du Trésor (Développement des ressources humaines Canada), 2003 CRTFP 36; McGoldrick c. Conseil du Trésor (Revenue Canada - Douanes et Accise), dossier de la CRTFP 166-02-25796 (19941003); Gauthier c. Administrateur général (ministère de la Défense nationale), 2013 CRTFP 94.

B. Pour le syndicat

109 Le syndicat a soutenu que les deux griefs contestaient les mesures disciplinaires imposées par l'employeur. Il a cité les décisions suivantes : Basra c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 24; Basra c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2010 CRTFP 131 et 2012 CRTFP 53.

110 Le syndicat a revu la chronologie des événements, dont voici les plus importants :

  1. Le 10 septembre 2012, l'agente de libération conditionnelle à l'établissement où le proche du fonctionnaire était incarcéré a rédigé un rapport d'observation au sujet de sa discussion à la même date avec ce proche.
  2. Le 17 octobre 2012, M. Huish a demandé à l'AC un rapport d'activité sur l'accès par le fonctionnaire au SGD entre le 1er janvier et le 15 octobre 2012.
  3. Le 18 octobre 2012, la réponse de l'AC indiquait que le fonctionnaire avait eu accès à 259 documents, même s'il n'est pas certain s'il s'agissait de dossiers, d'écrans ou d'appels de fichiers. M. Huish a déclaré qu'il y avait eu accès à 993 dossiers de détenus, même s'il n'a pas précisé comment il en était arrivé à ce chiffre.
  4. La fin de semaine du 26 et du 27 octobre 2012, le fonctionnaire a eu une visite familiale privée avec son proche.
  5. Le 31 octobre 2012, le premier rapport de l'AR a été publié, et M. Langer a rédigé le document sur le critère Larson.
  6. Le 6 novembre 2012, M. Huish a envoyé un ordre de convocation pour une enquête disciplinaire, et le fonctionnaire a été suspendu sans traitement en attendant la fin de l'enquête.
  7. Entre le 2 et le 5 novembre 2012, des réponses ont été fournies par les régions de l'employeur au sujet des risques de menaces découlant de l'accès par le fonctionnaire aux dossiers de détenus. Ces rapports indiquaient qu'il n'y avait pas de preuve de menace.
  8. Le 6 novembre 2012, comme l'indique le rapport d'enquête, les enquêteurs ont rencontré l'administrateur régional de la Sécurité de la région du Pacifique du SCC, dont les rapports sur l'accès par le fonctionnaire au SGD et à RADAR concluaient que l'atteinte présumée à la sécurité n'avait pas entraîné de menace pour le personnel, les délinquants ou le public. Le même jour, les enquêteurs ont rencontré les enquêteurs de la GRC qui les ont informés qu'ils n'avaient trouvé aucun indice d'abus de confiance par le fonctionnaire, comme le définit le Code criminel.
  9. Le 8 novembre 2012, les enquêteurs ont interrogé le fonctionnaire pour la première fois.
  10. Le 22 novembre 2012, une lettre Larson confirmant la suspension du fonctionnaire a été envoyée.
  11. Au cours de la période du 22 au 26 novembre 2012, M. Huish a informé le directeur Thompson au sujet du fonctionnaire.
  12. Le 27 novembre 2012, les enquêteurs ont informé le directeur Thompson.
  13. Le 28 novembre 2012, les enquêteurs ont mené un deuxième interrogatoire avec le fonctionnaire.
  14. Le 13 décembre 2012 ainsi que les 2, 3 et 17 janvier 2013, des lettres ont été envoyées qui confirmaient la suspension du fonctionnaire.
  15. Le 8 janvier 2013, l'audience disciplinaire du fonctionnaire a eu lieu.
  16. Le 18 janvier 2013, le fonctionnaire est retourné au travail.
  17. À compter du 1er mars 2013, le fonctionnaire a été rétrogradé.

1. Le grief visant la suspension

111 Le syndicat a fait valoir que M. Huish n'a pas consulté les superviseurs du fonctionnaire ou ses rapports de rendement. Il n'avait pas rencontré le fonctionnaire auparavant ni ne l'avait questionné. Le syndicat a déclaré que les motifs pour confirmer la suspension sans traitement du fonctionnaire étaient les mêmes que ceux exprimés dans la lettre initiale. Aucune mise à jour n'a été apportée au critère Larson, ce qui indiquait le manque de sérieux de la direction pour trouver un autre poste au fonctionnaire. Les lettres n'ont jamais mentionné le fait qu'aucune plainte n'avait été déposée au sujet du fonctionnaire par des membres du personnel ou qu'aucun risque pour les détenus n'avait été déterminé, même si la direction avait des éléments de preuve à cet effet. Le syndicat a soulevé le témoignage de M. Langer selon lequel dans des circonstances semblables, d'autres postes avaient été trouvés à des employés.

112 Le syndicat a fait valoir qu'une suspension sans traitement est une mesure disciplinaire prima facie (à première vue). Même si une telle suspension peut être imposée sans intention disciplinaire, elle devient disciplinaire au fil du temps. Au soutien de cet argument, le syndicat a renvoyé aux décisions suivantes : Cabiakman c. Industrielle-Alliance Cie d'Assurance sur la Vie, 2004 CSC 55; Baptiste c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2011 CRTFP 127; Basra,2010 CAF 24.

113 Le syndicat a affirmé que l'Entente globale ne s'appliquait pas, puisqu'il n'y avait pas eu violation de la convention collective. En outre, il n'y avait pas de risque immédiat au moment où le fonctionnaire a été suspendu sans traitement.

114 Le syndicat a soutenu que le directeur Thompson avait changé d'avis après l'audience disciplinaire. Bien qu'il ait envoyé une lettre le 17 janvier 2013, qui confirmait la suspension du fonctionnaire, il l'a fait revenir au travail le lendemain.

115 Le syndicat a soutenu que la suspension devrait être déclarée disciplinaire et que le fonctionnaire devrait se voir rembourser les salaires et avantages sociaux perdus, avec intérêts.

2. Le grief visant la rétrogradation

116 Le syndicat a soutenu que les deux principaux motifs pour la rétrogradation disciplinaire étaient l'accès non approprié par le fonctionnaire aux dossiers des détenus et le partage par lui de renseignements confidentiels. Le syndicat a fait remarquer que le fonctionnaire avait admis ses actions, qu'il éprouvait du remords et qu'il avait présenté ses excuses.

117 En ce qui concerne l'accès non approprié par le fonctionnaire aux dossiers des détenus, le syndicat a déclaré que, bien que cela soit sérieux, le fonctionnaire ne comprenait pas les conséquences de ses actions. L'employeur n'a pas établi la quantité de dossiers auxquels il a eu accès.

118 Pour ce qui est de l'incidence des actions du fonctionnaire sur la réputation de l'employeur, la preuve a démontré qu'il n'y avait eu aucune publicité ou aucun rapport dans les médias au sujet de ses actions. En outre, M. Noon-Ward a indiqué dans son témoignage qu'aucun détenu n'avait été avisé des atteintes à la vie privée.

119 Bien que la déclaration du fonctionnaire selon laquelle il avait agi par curiosité ne soit pas la meilleure excuse, il a été conclu qu'il n'avait aucune intention malveillante ou criminelle.

120 Le syndicat a souligné que, pour ce qui est du partage de renseignements sur les détenus, le directeur Thompson a indiqué dans son témoignage que les enquêteurs n'ont formulé aucune conclusion au sujet des renseignements que le fonctionnaire a communiqués au membre de sa famille qui faisaient l'objet de l'évaluation communautaire.

121 Le syndicat a fait valoir que la justification par l'employeur d'une rétrogradation de 24 mois était que le fonctionnaire aurait le temps d'apprendre des autres CX-02 et qu'il serait encadré. Cependant, le directeur Thompson a indiqué dans son témoignage que le superviseur du fonctionnaire serait le mieux placé pour répondre aux questions au sujet de l'encadrement et qu'il n'avait pas établi les normes ou les objectifs pour les superviseurs.

122 Le syndicat a en outre soutenu que le témoignage du directeur Thompson ne pouvait se justifier, puisqu'en déterminant la longueur de la rétrogradation, il n'a tenu compte que des tranches d'un an.

123 Le syndicat a fait valoir que la rétrogradation de 24 mois représentait une perte financière de six à sept semaines de rémunération pour le fonctionnaire et une perte de possibilité d'heures supplémentaires, puisque les CX-02 au PPCC peuvent faire plus d'heures supplémentaires que les autres CX-02 ou les CX-01. Le syndicat a soutenu que, bien qu'une mesure disciplinaire soit justifiée dans le cas du fonctionnaire, la rétrogradation de 24 mois était excessive dans les circonstances et qu'elle devrait être réduite. Au soutien de ses arguments, il a cité Naidu c. Agence des douanes et du revenu du Canada, 2001 CRTFP 124 et Foon c. Agence des douanes et du revenu du Canada, 2001 CRTFP 126.

C. Réponse de l'employeur

124 En réponse à l'argument du syndicat selon lequel le passage du temps a fait en sorte que la suspension administrative sans traitement du fonctionnaire soit devenue disciplinaire, l'employeur a déclaré que cela peut se produire si le processus d'enquête se déroule sur une longue période. En l'espèce, la preuve a démontré que l'employeur a recueilli les renseignements tout au long de la période de la suspension du fonctionnaire.

IV. Motifs

A. Le grief visant la suspension : dossier de la CRTEFP 566-02-8095

125 L'employeur s'est opposé à ma compétence d'examiner ce grief en soutenant que la suspension sans traitement en attendant l'enquête disciplinaire était de nature administrative et non disciplinaire. En conséquence, le grief ne pouvait être renvoyé à l'arbitrage en application de l'article 209 de la LRTFP.

126 La tâche d'un arbitre de grief de traiter une telle objection a été établie au paragraphe 53 de Cassin :

53 Bien qu'un employeur puisse caractériser une suspension comme étant de nature administrative, un arbitre de grief doit néanmoins vérifier cette affirmation et examiner les circonstances entourant l'intention de l'employeur lorsqu'il a décidé de suspendre un fonctionnaire s'estimant lésé, selon le cas.Cette exigence a d'ailleurs été judicieusement confirmée par l'arbitre de grief dans King, s'exprimant ainsi à cet égard au paragraphe 62 […]

[…]

62. Le point essentiel que je retiens de Frazee et des décisions Basra est que je dois examiner les circonstances du présent cas en fonction de la preuve révélatrice de l'intention du défendeur au moment de la suspension du fonctionnaire sans traitement et par la suite. Si je suis convaincu que le défendeur a démontré que, selon la prépondérance des probabilités, l'intention sous-tendant sa décision « administrative » n'était pas disciplinaire au moment où la décision a été prise et qu'elle est demeurée non disciplinaire pendant la suspension en découlant, je dois donc refuser d'exercer ma compétence. À l'inverse, si le défendeur ne s'est pas acquitté de son fardeau, alors je dois conclure que sa décision était disciplinaire dans son essence, peu importe la description qu'en fait le défendeur, et que, par conséquent, j'ai la compétence nécessaire pour examiner le grief aux termes de l'alinéa 209(1)b) de la Loi.

127 Dans ses observations, le fonctionnaire a également invoqué Cabiakman. Dans King, l'analyse par l'arbitre de grief de ce jugement était la suivante :

[…]

63 Cabiakman, citée par le fonctionnaire, ne me détourne pas de ce point de vue.La décision rendue par la Cour suprême dans Cabiakman concernait un contrat d'emploi individuel régi par le Code civil du Québec, L.Q. 1991, ch. 64. Dans ce contexte, la Cour s'est demandé « […] si l'employeur a le pouvoir unilatéral de suspendre les effets du contrat individuel de travail pour des motifs administratifs […] » (paragraphe 46).Elle a statué comme suit :

[…]

61. L'employeur peut toujours renoncer à son droit de recevoir la prestation du salarié mais il ne peut se soustraire à son obligation de payer le salaire lorsque le salarié demeure disponible pour accomplir un travail dont l'exécution lui est refusée.En choisissant de ne pas mettre un terme au contrat de travail avec les compensations afférentes, fixées selon les principes applicables, l'employeur demeure en principe tenu de respecter ses propres obligations réciproques même s'il n'exige pas la prestation de travail de l'employé.

[…]

Comme l'a mentionné le fonctionnaire, la Cour a énoncé les circonstances exceptionnelles dans lesquelles l'exigence de continuer de verser les paiements en conformité avec le contrat d'emploi peut être écartée (paragraphe 62).

64 Outre le régime législatif clairement différent dans lequel la Cour suprême a examiné les suspensions administratives dans Cabiakman, son analyse ne tient pas compte directement des circonstances dans lesquelles une décision administrative devient disciplinaire.Elle pose une question tout autre que celle à laquelle les cours ont répondu dans Frazee et dans les cas Basra.Je crois donc qu'il est possible et nécessaire d'établir une distinction en ce qui a trait à Cabiakman.

[…]

128 Je suis d'accord avec l'arbitre de grief dans King pour dire que Cabiakman se distingue de la présente affaire.

129 Le syndicat a fait valoir que la suspension du fonctionnaire est devenue disciplinaire au fil du temps. Je ne suis pas convaincu par cet argument. L'employeur a agi promptement pour établir et exécuter de façon diligente son enquête. Lorsqu'il a eu connaissance des allégations contre le fonctionnaire, l'employeur a agi rapidement.

130 Le 1er novembre 2012, M. Huish a nommé les enquêteurs, a envoyé un avis au fonctionnaire pour l'informer de l'enquête disciplinaire et l'a suspendu sans traitement pour une période indéfinie en attendant la fin de l'enquête. Il a envoyé un ordre de convocation le 5 novembre 2012, et l'enquête a commencé le lendemain, la première entrevue du fonctionnaire avec les enquêteurs ayant lieu le 8 novembre 2012.

131 Dans une lettre adressée au fonctionnaire en date du 22 novembre 2012, M. Huish a continué la suspension sans traitement. Il a indiqué dans son témoignage qu'il considérait toujours que le fonctionnaire représentait un risque, que le rapport d'enquête n'était pas terminé, qu'il ne savait pas pourquoi le fonctionnaire avait eu accès aux dossiers de détenus ni ce qu'il avait fait avec les renseignements ou encore si ses actions visaient un gain financier.

132  M. Noon-Ward a confirmé la suspension sans traitement dans une lettre adressée au fonctionnaire en date du 13 décembre 2012. Bien que le texte de cette lettre soit identique à celui de la lettre du 22 novembre, la justification fournie par M. Noon-Ward dans son témoignage était que l'enquête n'était pas terminée et que la direction ne connaissait pas la profondeur ou l'étendue du partage de renseignements par le fonctionnaire ou la raison pour laquelle il avait eu accès aux dossiers de détenus. En outre, l'audience disciplinaire n'avait pas encore eu lieu.

133 Dans des lettres en date du 2, du 3 et du 17 janvier 2013, le directeur Thompson a poursuivi la suspension sans traitement de fonctionnaire. Il a indiqué dans son témoignage qu'il n'avait pas encore décidé s'il était sécuritaire de faire revenir le fonctionnaire au travail et qu'il croyait qu'il était important de le rencontrer.

134 Le directeur Thompson savait à l'époque que le fonctionnaire avait admis les allégations et que les enquêteurs avaient conclu qu'il n'avait aucune intention criminelle.

135 Même s'il savait qu'à l'époque il n'y avait aucun indice de menace pour le personnel, les délinquants ou le public, le directeur Thompson n'était pas convaincu qu'il n'y avait pas de problème de sécurité et il croyait qu'une analyse plus approfondie était nécessaire. En outre, il n'avait pas encore interrogé le fonctionnaire, ce qui selon lui était essentiel à son processus décisionnel.

136 Après avoir interrogé le fonctionnaire pendant l'audience disciplinaire du 8 janvier 2013 et avoir conclu que le lien de confiance n'avait pas été rompu, le directeur Thompson a fait revenir le fonctionnaire au travail, à des fonctions limitées sans accès au SGD et à RADAR, le 18 janvier 2013, en attendant sa décision sur la mesure disciplinaire à imposer.

137 Même si, comme l'a soutenu le syndicat, les différentes lettres confirmant la suspension sans traitement du fonctionnaire n'ont pas mentionné explicitement les raisons pour lesquelles l'employeur poursuivait la suspension, je conclus que les témoignages des témoins de l'employeur sur ce point sont sincères et convaincants.

138 Même si certaines raisons expliquant les actions du fonctionnaire ont été écartées par les enquêteurs, comme son absence d'intention criminelle ou malveillante, selon la preuve, il restait suffisamment de questions sans réponse au sujet de ses actions dans l'esprit de la direction pour justifier la poursuite de la suspension sans traitement jusqu'à la fin de l'enquête.

139 À mon avis, l'employeur a démontré, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'avait pas d'intention disciplinaire lorsqu'il a suspendu le fonctionnaire sans traitement, en attendant l'enquête. Il n'y avait pas l'ombre d'une preuve dans les témoignages de M. Huish, de M. Noon-Ward et du directeur Thompson selon laquelle l'employeur a agi avec une intention disciplinaire.

140 Dans les circonstances, l'objection de l'employeur à ma compétence d'examiner le présent grief au motif qu'il ne s'agit pas d'une mesure disciplinaire au sens de l'alinéa 209(1)b) de la LRTFP est maintenue et le grief est rejeté, parce que je ne suis pas habilité à l'entendre.

B. Le grief visant la rétrogradation : dossier de la CRTEFP 566-02-8575

141 Le directeur Thompson a imposé une sanction disciplinaire sous forme d'une rétrogradation de 24 mois au fonctionnaire à compter du 1er mars 2013, jusqu'au 28 février 2015. En examinant ce grief, je dois répondre aux questions suivantes : Le fonctionnaire a-t-il fait preuve d'inconduite? Si oui, son inconduite justifie-t-elle une sanction disciplinaire? Si oui, la sanction disciplinaire imposée était-elle appropriée dans les circonstances?

142 Le fonctionnaire a reconnu que ses actions étaient telles qu'il aurait dû faire l'objet d'une mesure disciplinaire. En tout état de cause, je n'ai aucune hésitation à conclure que l'employeur a établi que le fonctionnaire avait fait preuve d'inconduite et qu'il avait des motifs pour imposer une mesure disciplinaire.

143 L'enquête et l'analyse effectuées par l'employeur ont permis de conclure qu'à de multiples occasions, le fonctionnaire, sans autorisation appropriée, a eu accès aux dossiers de détenus incarcérés dans d'autres établissements et d'autres régions, au moyen du SGC et de RADAR, dossiers qui n'étaient pas liés à son travail au PPCC. De plus, il a divulgué des renseignements sur un détenu à son proche incarcéré et partagé des renseignements sur un rapport d'évaluation communautaire concernant un autre proche avec cette personne.

144 Une telle conduite contrevient clairement au Code de discipline de l'employeur et au serment de discrétion du fonctionnaire. Aucune justification ne permet à un employé du SCC d'avoir accès aux dossiers de détenus autres que ceux qui sont liés à ses fonctions. Dans ses observations, le syndicat a reconnu que la curiosité du fonctionnaire était une excuse médiocre pour avoir eu accès aux dossiers de détenus sans autorisation.

145 Je me penche maintenant sur la conclusion quant au caractère approprié de la sanction disciplinaire imposée par le directeur Thompson.

146 Dans la lettre disciplinaire, le directeur Thompson a déclaré qu'il a tenu compte des circonstances atténuantes suivantes : les huit années de service du fonctionnaire, son dossier disciplinaire vierge et ses rapports d'évaluation du rendement positifs. La lettre indiquait également que le directeur Thompson croyait que le fonctionnaire n'avait aucune intention malveillante.

147 Durant son interrogatoire principal, le directeur Thompson a été interrogé sur la façon dont il est parvenu à une rétrogradation temporaire de 24 mois. Il a répondu qu'il ne pensait pas qu'une année serait suffisamment longue pour permettre l'encadrement du fonctionnaire. Il a dit qu'il ne réfléchissait pas en mois, mais uniquement en tranches d'une année et qu'il ne pouvait expliquer ce raisonnement. Il fait peu de doute que l'approche du directeur Thompson peut être décrite comme arbitraire.

148 Une rétrogradation temporaire de 24 mois peut à première vue sembler être une sanction sévère. Cependant, examinée en fonction de la différence de salaire entre les postes CX-02 et les postes CX-01 dans la convention collective applicable, ce qui a été reconnu par le syndicat et l'employeur, la perte financière du fonctionnaire sur la période de rétrogradation de deux ans équivalait environ à une rémunération de six semaines.

149 Le fonctionnaire a fait valoir qu'en raison de sa rétrogradation, il avait moins de possibilités de faire des heures supplémentaires. Selon la preuve, en tant que CX-02 travaillant au PPCC, le fonctionnaire avait plus de possibilités de faire des heures supplémentaires que lorsqu'il travaillait comme CX-01.

150 Cependant, le fonctionnaire n'a pas été en mesure de fournir un calcul précis de la perte monétaire subie en raison des possibilités réduites d'heures supplémentaires. En outre, le fonctionnaire n'a pas soutenu ou fait valoir que l'employeur l'avait délibérément placé dans un poste CX-01 où il n'était pas possible de faire des heures supplémentaires. De même, le fonctionnaire n'a pas soutenu qu'il aurait dû être placé dans un poste CX-01 où les fonctions à accomplir étaient à l'intérieur seulement ou qu'il ne devrait pas être tenu d'accomplir des fonctions considérées comme moins agréables. La seule restriction imposée au fonctionnaire en tant que CX-01 est qu'il ne pouvait avoir accès au SGD et à RADAR. Dans les circonstances de la présente affaire, je conclus que je n'ai pas à examiner le facteur des heures supplémentaires pour établir le caractère approprié de la sanction disciplinaire.

151 M. Noon-Ward et le directeur Thompson étaient d'avis qu'une suspension n'aurait pas d'effet correctif, puisqu'elle comporterait une sanction pécuniaire, alors qu'une rétrogradation permettrait au fonctionnaire de réaliser ses erreurs.

152 Néanmoins, si l'employeur avait présenté la sanction disciplinaire comme une suspension sans traitement de six semaines, j'aurais conclu qu'il s'agissait d'une réponse raisonnable, étant donné la gravité de l'inconduite du fonctionnaire.

153 Dans les circonstances, je refuse d'intervenir, et le grief sera rejeté.

154 Pour ces motifs, je rends l'ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

155 Dans le dossier de la CRTEFP 566-02-8094, le grief a été retiré et j'ordonne que le dossier soit fermé.

156 Dans le dossier de la CRTEFP 566-02-8095, le grief est rejeté parce que je ne suis pas habilité à l'entendre.

157 Dans le dossier de la CRTEFP 566-02-8575, le grief est rejeté.

Le 3 février 2015.

Traduction de la CRTEFP

Steven B. Katkin,
arbitre de grief

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