Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

L'employée s'est plainte que les représentants de son agent négociateur ont contrevenu à leur obligation de représentation équitable lorsqu'ils ont omis de déposer des griefs en son nom – avant que la Commission puisse trancher les plaintes, l'employée et les représentants de son agent négociateur ont conclu des ententes de règlement et ont demandé que la Commission intègre les modalités de leurs ententes dans des ordonnances sur consentement – les ententes de règlement prévoyaient la prorogation des délais pour le dépôt des griefs par l'agent négociateur de l'employée pour le compte de cette dernière – l'employeur n'était pas une partie aux ententes de règlement – la Commission peut ordonner à un défendeur nommé de prendre des mesures de redressement prévues par le paragraphe 192(1) de la Loi, seulement lorsqu'elle décide que la plainte est fondée – la Commission n'a rendu aucune décision de la sorte sur le bien-fondé des plaintes et l'employeur n'était pas un défendeur nommé – de plus, l'employée et les représentants de son agent négociateur ne pouvaient pas s'entendre de manière contraire aux dispositions de la Loi et du Règlement sur les relations de travail dans la fonction publique, qui prévoyaient à l'époque que les délais de dépôt de griefs pouvaient être prorogés au moyen d'une entente entre l'employée ou les représentants de son agent négociateur et son employeur, ou par une décision du président de la Commission – puisque l'employeur n'avait pas consenti à une prorogation des délais de dépôt des griefs pour le compte de l'employée, elle‑même et les représentants de son agent négociateur auraient dû présenter des demandes officielles pour proroger ces délais. Demandes rejetées.

Contenu de la décision



Loi sur la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique et Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date: 20150220
  • Dossier: 561-34-161 et 462
  • Référence: 2015 CRTEFP 20

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique


ENTRE

MARCIA BUFFORD, LORI HALL, ROBYN BENSON, MARLENE ETTEL,
VALERIE GRUNDY, DES SCOTT ET
ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

demandeurs

et

AGENCE DU REVENU DU CANADA

défenderesse

Répertorié
Bufford et al. c. Agence du revenu du Canada

Affaire concernant des plaintes visées à l'article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
John G. Jaworski, une formation de la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique
Pour la demanderesse Bufford:
Simon Renouf, avocat
Pour les autres demandeurs:
Andrew Raven, avocat
Pour la défenderesse:
Peter Cenne, Agence du revenu du Canada
Décision rendue sur la base d'arguments écrits
déposé le 18 septembre et le 10 octobre 2013.
(Traduction de la CRTEFP)

I. Demandes devant la Commission

1 La présente décision porte sur les demandes déposées par Marcia Bufford, l'une des demandeurs, et par les autres demandeurs — Lori Hall, Robyn Benson, Marlene Ettel, Valerie Grundy, Des Scott et l'Alliance de la Fonction publique du Canada (l'« AFPC ») – concernant la délivrance d'ordonnances sur consentement intégrant leur entente de règlement afin de régler deux plaintes de pratique déloyale de travail que Mme Bufford avait déposées à l'égard des autres demandeurs.

II. Contexte

2 Mme Bufford travaillait pour l'Agence du revenu du Canada (l'« ARC » ou l'« employeur ») jusqu'au 12 août 2009, date à laquelle, selon l'employeur, elle a démissionné de son poste.

3 Le 20 avril 2007, Mme Bufford a déposé une plainte (« plainte no 1 ») auprès de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « CRTFP ») en vertu de l'alinéa 190(1)g) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; la « LRTFP ») contre Mme Hall, Mme Benson, Mme Ettel, Mme Grundy et M. Scott, tous des représentants de l'AFPC. Dans la plainte no 1, on alléguait une contravention à l'article 187 de la LRTFP, comme suit :

  1. Entre janvier et avril 2004, Mme Hall a omis de déposer un grief ou de suivre des procédures, ce qui a mené à l'épuisement des délais et à des pertes de mesures de réparation.
  2. Entre mai et juillet 2006, Mme Hall a fait une déclaration erronée quant à son pouvoir d'agir en tant que représentante syndicale.
  3. Entre août et novembre 2006, Mme Ettel a omis de déposer des griefs, ce qui a mené à l'épuisement des délais et à des pertes de mesures de réparation.
  4. Entre novembre 2006 et janvier 2007, Mme Grundy a omis de présenter des arguments adéquats et des communications opportunes qui ont compromis le bien-être et les échéanciers de Mme Bufford.
  5. En janvier 2007, Mme Benson a omis d'enquêter sur des affaires, de façon à permettre une résolution afin de promouvoir les arguments et de protéger les mesures de réparation.
  6. Entre février et avril 2007, M. Scott a omis de déposer des griefs, ce qui a entraîné l'épuisement des délais, et a omis de présenter des arguments complets, ce qui a eu une incidence sur les droits, les mesures de réparation et les intérêts primordiaux de Mme Bufford.

4 Le 6 juin 2007, l'AFPC a déposé une réponse à la plainte no 1 au nom de Mme Hall, de Mme Benson, de Mme Ettel, de Mme Grundy et de M. Scott, niant toute contravention à l'article 187 de la LRTFP et déclarant également que, en partie, la plainte était hors délai.

5 La plaine no 1 devait être entendue par la CRTFP du 27 au 29 octobre 2009 à Edmonton, en Alberta. Cette audience a été reportée à la demande de Mme Bufford le 22 octobre 2009.

6 Le 19 janvier 2010, Mme Bufford a cherché à modifier la plainte no 1 en y ajoutant des allégations selon lesquelles l'AFPC avait agi d'une façon qui était arbitraire, discriminatoire ou de mauvaise foi, et qu'elle avait contrevenu à l'article 187 de la LRTFP selon les faits présumés suivants :

  1. Le 3 juillet 2009, l'employeur a écrit à Mme Bufford, lui demandant de retourner au travail ou de démissionner de son poste.
  2. Le 12 juillet 2009, Mme Bufford a écrit à l'employeur et l'a informé qu'elle ne se sentait pas en sécurité de travailler à son bureau pour un certain nombre de raisons.
  3. Le 17 juillet 2009, l'employeur a écrit à Mme Bufford, en insistant pour qu'elle démissionne au plus tard le 24 juillet 2009 et que, en l'absence d'une démission, selon l'employeur, Mme Bufford serait réputée avoir abandonné son poste.
  4. Le 8 août 2009, Mme Bufford a écrit à l'employeur pour demander des précisions.
  5. Le 12 août 2009, l'employeur a écrit à Mme Bufford, en indiquant qu'il avait interprété sa correspondance comme une indication selon laquelle elle démissionnait et qu'il acceptait censément sa démission.
  6. Après avoir reçu la correspondance de l'employeur datée du 12 août 2009, Mme Bufford a demandé l'aide de l'AFPC et a fourni les documents pertinents à un représentant de l'AFPC. Mme Bufford a été informée par le représentant de l'AFPC que des mesures avaient été prises afin d'organiser une rencontre avec les représentants de l'employeur pour discuter de l'affaire.
  7. Le représentant de l'AFPC a informé Mme Bufford qu'il avait renvoyé son affaire à un délégué syndical afin d'aider au dépôt d'un grief afin de retirer sa démission et que Mme Bufford cherchait à obtenir une mesure d'adaptation en milieu de travail auprès de son employeur.
  8. Le 2 septembre 2009, le délégué syndical de l'AFPC a envoyé une formule de grief vide à Mme Bufford, lui demandant de la remplir et de la signer, de la numériser et de la lui retourner, ce qu'a fait Mme Bufford.
  9. Le 2 septembre 2009, le délégué syndical a informé Mme Bufford qu'on lui avait indiqué de ne pas déposer un grief en son nom. Le 8 septembre 2009, Mme Bufford a communiqué avec la première représentante à qui elle avait eu affaire à l'AFPC et a demandé de l'aide. Le 13 septembre 2009, Mme Bufford a tenté une fois de plus de communiquer avec la première représentante de l'AFPC, lui demandant de l'aide.
  10. Le 21 octobre 2009, la première représentante de l'AFPC a envoyé un courriel à Mme Bufford et l'a informée qu'on lui avait indiqué au début d'août 2009 que l'AFPC ne pouvait rien faire de plus pour elle.

7 Le 31 mars 2010, la CRTFP a ordonné que les nouvelles allégations soulevées par Mme Bufford constituaient une nouvelle plainte contre l'AFPC (« plainte no 2 »), qui a été réputée avoir été déposée le 19 janvier 2010.

8 Le 12 août 2010, l'AFPC a déposé sa réponse à la plainte no 2. Elle a nié avoir agi d'une façon qui était arbitraire, discriminatoire ou de mauvaise foi à l'égard de sa représentation de Mme Bufford dans le cadre de son litige avec l'employeur concernant la fin de son emploi et que la plainte no 2 était hors délai.

9 La plainte no 1, dont l'audience avait été reportée du 18 au 20 janvier 2011, avait été reportée à la demande des autres demandeurs.

10 La CRTFP a ordonné que les deux plaintes soient entendues en même temps; cependant, elle n'a pas regroupé les plaintes.

11 L'employeur n'est pas une partie aux plaintes.

12 Mme Bufford et les autres demandeurs, mais non l'employeur, ont été consultés quant à leur disponibilité pour l'audition des plaintes et, le 25 juin 2012, ils ont informé la CRTFP qu'ils étaient disponibles en vue de la tenue d'une audience à Edmonton, en Alberta, du 28 au 31 janvier 2013.

13 Le commissaire Howes de la CRTFP a été nommé en vertu de l'article 44 de la LRTFP pour entendre et trancher les deux plaintes.

14 Le 11 décembre 2012, un avis d'audience a été envoyé à Mme Bufford et aux autres demandeurs concernant les plaintes.

15 Le 11 décembre 2012, la CRTFP a correspondu, par courriel, avec Mme Bufford et les autres demandeurs, en envoyant une copie à l'employeur; cette correspondance indiquait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Comme les parties le savent peut-être, plus tôt dans les procédures mentionnées ci-dessus, l'employeur a reçu une copie conforme en application de l'article 7 du Règlement, en tant que « personne pouvant être touchée par le résultat des procédures ». La [CRTFP] a envoyé une copie conforme à l'employeur au moyen d'une c.c. de ses documents à l'intention de M. H.A. Newman – Services juridiques du Conseil du Trésor. À l'époque, on avait indiqué aux parties d'en faire de même.

Quelque part au cours du processus – aux alentours de l'ouverture du dossier de la 2e plainte – il semble que la correspondance de la [CRTFP] a cessé d'être envoyée en copie conforme à M. Newman en raison d'une erreur administrative.

La [CRTFP] recommencera à envoyer une copie conforme de sa correspondance aux Services juridiques du Conseil du Trésor relativement à ces affaires et demande aux parties d'en faire de même en application de l'article 7 du Règlement. Sauf indication contraire à l'égard de la [CRTFP] et des parties, une copie conforme de la correspondance devrait être envoyée à Richard Fader (courriel indiqué ci-dessus).

[…]

16 Le 13 décembre 2012, un avis d'audience modifié a été envoyé en ce qui a trait aux plaintes, la différence dans l'avis étant qu'il a été envoyé en copie conforme à l'avocat de l'employeur.

17 Le 13 décembre 2012, l'avocat de Mme Bufford a écrit à l'avocat des autres demandeurs en réponse à la correspondance envoyée le 7 décembre 2012, de l'avocat pour les autres demandeurs. Le 13 décembre 2012, une lettre a répondu aux questions posées par l'avocat des autres demandeurs comme suit :

  1. les témoins que Mme Bufford avait l'intention d'appeler;
  2. une divulgation documentaire concernant la plainte de Mme Bufford de 2007 en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C. (1985), ch. H-6);
  3. l'événement dans les 90 jours suivant le dépôt de chaque plainte, qui porte sur les questions relatives aux délais;
  4. un énoncé précis des mesures de réparation demandées par Mme Bufford;
  5. une divulgation des documents sur lesquels Mme Bufford avait l'intention de se fier à l'audience.

18 La correspondance de l'avocat de Mme Bufford datée du 13 décembre 2012 a été envoyée en copie conforme à l'avocat de l'employeur aux Services juridiques du Conseil du Trésor.

19 Quant aux mesures de réparation que Mme Bufford a indiqué qu'elle demandait, tel qu'il en est question dans la correspondance de son avocat datée du 13 décembre 2012, Mme Bufford a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

  1. Une ordonnance en vertu de l'alinéa 192(1)d) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique de proroger le délai pour déposer un grief dans l'affaire de l'arbitrage en dépit de l'expiration de tout délai en application d'une convention collective, sous réserve des conditions pouvant être prescrites par la [CRTFP].
  2. Une ordonnance selon laquelle Mme Bufford peut être représentée par un conseiller juridique de son choix, aux frais du syndicat, dans tout arbitrage.
  3. Ou, subsidiairement, les dommages et les coûts pour accorder à Mme Bufford une réparation intégrale à tous les égards en ce qui a trait à la perte de son emploi et au manquement à l'obligation de représentation équitable dans le présent cas.
  4. Toute autre mesure de réparation susceptible d'être conseillée par l'avocat, qui peut être attribuée par la Commission des relations de travail dans la fonction publique à la suite de l'audition de ces affaires.

20 Entre le 12 décembre 2012 et le 17 décembre 2012, 10 courriels ont été échangés entre la CRTFP et les bureaux de l'avocat de Mme Bufford et l'avocat des autres demandeurs, dont les quatre derniers ont été envoyés en copie conforme à l'avocat de l'employeur. L'objet de ces courriels était l'organisation d'une conférence préparatoire à l'audience concernant les plaintes. L'avocat de l'employeur n'a répondu à aucune correspondance par courriel, malgré une référence particulière le concernant dans l'avant-dernier courriel envoyé par l'avocat des autres demandeurs le 17 décembre 2012, à 11 h 41 (HNE) et a répondu à la CRTFP le même jour, à 11 h 48 (HNE), comme suit :

[Traduction]

[…]

Le 17 décembre 2013, 11 h 41

J'ai d'autres dates disponibles après le 7 janvier, mais peut-être devrions-nous demander à  Richard Fader avant de passer en revue la disponibilité de tout le monde. Entre-temps, je retiens le 7 janvier à 10 h, heure normale de l'Est.

[…]

Le 17 décembre 2012, 11 h 48

[…] Cependant, on ne demande pas normalement la disponibilité de l'employeur pour les conférences préparatoires à l'audience ou les audiences, sauf s'il a demandé – et qu'il a obtenu – le statut d'intervenant. Je ne crois pas qu'il y ait de nombreuses situations dans l'ensemble des plaintes au DRÉ actuellement devant la [CRTFP] lorsqu'une telle demande a été formulée; l'employeur reçoit habituellement une copie conforme de la correspondance uniquement en tant que « personne pouvant être touchée par les procédures » conformément à l'article 7 du Règlement.

21 Le 7 janvier 2013, l'avocat des autres demandeurs a écrit à l'avocat de Mme Bufford et a envoyé une copie conforme à la CRTFP et à l'avocat de l'employeur, comme suit :

[Traduction]

Après la conférence téléphonique de gestion de cas menée ce matin, nous établissons par la présente la base de la position [des autres demandeurs] selon laquelle la [CRTFP] n'a pas compétence pour entendre ces plaintes au motif qu'elles sont hors délais.

Le 2 septembre 2009, Jerad Cooper, qui était alors délégué syndical du Syndicat des employé-e-s de l'impôt, a informé Mme Bufford qu'elle n'était pas dans une situation lui permettant de déposer un grief dans l'affaire concernant l'acceptation par l'employeur de la démission de Mme Bufford le 12 août 2009. M. Cooper a également informé Mme Bufford qu'elle n'était pas en mesure de déposer un grief portant sur l'« obligation de prendre des mesures d'adaptation », car cette question avait déjà fait l'objet d'un grief et que l'employeur y avait répondu.

[L'AFPC] fait valoir que [Mme Bufford] était informée des événements donnant lieu à [la plainte no 2] le 2 septembre 2009 lorsque la position définitive de [l'AFPC] lui a été communiquée. Étant donné que [la plainte no 2] est réputée avoir été déposée le 19 janvier 2010, la plainte a été déposée 139 jours après la communication par [l'AFPC]. En vertu du paragraphe 190(2) de la LRTFP, une plainte doit être déposée au plus tard 90 jours après le jour où [Mme Bufford] a eu ou aurait dû avoir connaissance des mesures où des circonstances ayant donné lieu à la plainte. Le délai prescrit par la LRTFP est obligatoire et la [CRTFP] n'a pas la compétence pour le proroger.

En ce qui concerne la première plainte, le 8 décembre 2010, John Haunholter a répondu à la demande de précisions de la [CRTFP] découlant de la conférence préparatoire à l'audience du 29 novembre 2010. Cette réponse maintenait l'objection liée au délai quant à [Mme] Ettel et [Mme] Hall.

La première plainte allègue des défauts de représentation précis par [Mme Ettel et Mme Hall]. La plainte établit ensuite des périodes précises concernant ces défauts présumés. Dans le cas de [Mme] Hall, la période des défauts de représentation présumés va de janvier à avril 2004 et de mai à juillet 2006. Dans le cas de [Mme] Ettel, la période indiquée dans la plainte est d'août à novembre 2006. La plainte est datée du 20 avril 2007. La date aux fins du délai est donc le 20 janvier 2007. [Les autres demandeurs soutiennent] que la [CRTFP] n'a pas la compétence pour statuer sur [la plainte no 1] contre [Mme] Hall et [Mme] Ettel, car il est indiqué que les défauts de représentation présumés ont eu lieu intégralement en dehors du délai de 90 jours.

[…]

22 L'audience portant sur les plaintes devant la commissaire Howes de la CRTFP s'est tenue du 28 au 31 janvier 2013; cependant, elle n'a pas été terminée. Il était prévu qu'elle se poursuivrait le 3 mai 2013. Le 23 avril 2013, les demandeurs ont demandé que l'on reporte la suite de l'audience, car ils avaient entamé des discussions de règlement. Le 24 avril 2013, l'audience prévue pour le 3 mai 2013 à Edmonton, en Alberta, a été reportée.

23 Le 1er août 2013, l'avocat des autres demandeurs a confirmé que les demandeurs en étaient arrivés à un règlement entre eux à l'égard des plaintes et ont déposé des demandes en vue d'obtenir des ordonnances sur consentement.

24 L'ordonnance sur consentement demandée par les demandeurs qui traite de la plainte no 1 est comme suit :

  1. La plainte visant Mme Hall, Mme Benson, Mme Ettel, Mme Grundy et M. Scott est rejetée.
  2. La plainte visant l'AFPC est accueillie.
  3. Les délais pour renvoyer les griefs no 70042929 et no 70042930 à l'arbitrage ont été prorogés de 45 jours à compter de la date à laquelle l'ordonnance a été délivrée et reçue par les parties.
  4. Dès la réception de la décision de l'employeur aux griefs susmentionnés au dernier palier de la procédure de règlement des griefs, les griefs seront renvoyés à l'arbitrage dans le cadre habituel de la procédure et selon les délais la régissant. À l'arbitrage, on considérera que tous les délais liés au dépôt des griefs ont été respectés.
  5. Les griefs sont réputés avoir été présenté en temps opportun.
  6. Les griefs no 70042929 et no 70042930 sont réputés avoir été déposés en temps opportun, de sorte que la question du bien-fondé des griefs doit être abordée à l'arbitrage dès le renvoi des griefs susmentionnés à l'arbitrage.
  7. L'AFPC nommera un agent aux griefs et à l'arbitrage n'ayant pas participé aux griefs ou aux plaintes de Mme Bufford à l'arbitrage du grief susmentionné. Pendant ledit arbitrage du grief susmentionné, l'AFPC mettra tout en œuvre afin d'obtenir une indemnisation intégrale pour l'ensemble des pertes découlant de l'objet du grief, y compris une indemnisation pour les frais juridiques engagés par Mme Bufford.

25 L'ordonnance sur consentement demandée par les demandeurs qui traite de la plainte no 2 est comme suit :

  1. La plainte est accueillie.
  2. L'AFPC déposera, dans les 45 jours suivant la date à laquelle l'ordonnance est délivrée et reçue par Mme Bufford et par l'AFPC, un grief au nom de Mme Bufford à l'employeur quant aux circonstances entourant la cessation d'emploi de Mme Bufford aux environs d'août et de septembre 2009, laquelle, soutient Mme Bufford, était une démission injuste, involontaire et sans fondement.
  3. Le grief susmentionné sera déposé au dernier palier de la procédure de règlement des griefs et sera considéré comme ayant été déposé en temps opportun à tous les égards, en dépit du fait que les circonstances visées ont eu lieu en août et en septembre 2009.
  4. Dès la réception de la réponse de l'employeur au grief susmentionné au dernier palier de la procédure de règlement des griefs, le grief sera renvoyé à l'arbitrage dans le cadre habituel de la procédure et selon les délais la régissant. À l'arbitrage, on considérera que tous les délais liés au dépôt du grief ont été respectés.
  5. L'AFPC nommera un agent aux griefs et à l'arbitrage n'ayant pas participé aux griefs ou aux plaintes de Mme Bufford à l'arbitrage du grief susmentionné. Pendant ledit arbitrage du grief susmentionné, l'AFPC mettra tout en œuvre afin d'obtenir une indemnisation intégrale pour l'ensemble des pertes découlant de l'objet du grief, y compris une indemnisation pour les frais juridiques engagés par Mme Bufford.

26 Le 13 août 2013, la CRTFP a écrit à l'employeur, car il ne semblait pas avoir participé à la préparation des ordonnances sur consentement demandées et a demandé à l'employeur de présenter tous les arguments qu'ils pourraient avoir.

27 Le 18 septembre 2013, l'employeur a écrit à la CRTFP en réponse à la correspondance du 13 août 2013. Le 10 octobre 2013, les demandeurs ont répondu à la correspondance de l'employeur le 18 septembre 2013.

28 En vertu de l'article 44 de la LRTFP, ces demandes d'ordonnances sur consentement m'ont été attribuées par la présidente de la CRTFP.

29 Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365; la « LCRTEFP ») a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (la « CRTEFP »), qui remplace la CRTFP et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l'article 393 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013, une instance engagée au titre de la LRTFP avant le 1er novembre 2014 se poursuit sans autres formalités en conformité avec la LRTFP, dans sa forme modifiée par les articles 365 à 470 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013. De plus, en vertu de l'article 395 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013, le commissaire de la CRTFP saisi de cette affaire avant le 1er novembre 2014 a les mêmes attributions qu'une formation de la CRTEFP. Le 3 novembre 2014, la CRTEFP a modifié le Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (DORS/2005-79), qui est devenu le Règlement sur les relations de travail dans la fonction publique (le « Règlement »).

30 Cette décision porte sur les demandes formulées par les demandeurs concernant la délivrance d'ordonnances sur consentement suivant leur entente de règlement à l'égard des plaintes.

31 Au moment de cette décision, ni la CRTFP ni la CRTEFP n'avaient reçu une demande déposée par Mme Bufford ou en son nom par quiconque en vue de proroger le délai pour déposer des griefs ou renvoyer des griefs à l'arbitrage.

III. Résumé de l'argumentation

A. Pour l'employeur

32 L'ARC adopte la position selon laquelle je n'ai pas la compétence en vertu du paragraphe 192(1) de la LRTFP pour délivrer les ordonnances sur consentement demandées. Les parties aux plaintes sont Mme Bufford et les autres demandeurs. L'effet des ordonnances sur consentement aurait des répercussions directes sur l'employeur, qui n'est pas une partie aux plaintes.

33 Les demandeurs ne peuvent pas s'entendre sur le règlement des plaintes d'une façon qui a des répercussions sur l'employeur, qui n'est pas la partie visée par la plainte. Pendant toute la durée de la période pertinente, le paragraphe 192(1) de la LRTFP précisait ce qui suit :

192. (1)Si elle décide que la plainte présentée au titre du paragraphe 190(1) est fondée, [la CRTFP ou la CRTEFP] peut, par ordonnance, rendre à l'égard de la partie visée par la plainte toute ordonnance qu'elle estime indiquée dans les circonstances et, notamment :

[…]

34 Mon pouvoir de réparation est prescrit de façon plus détaillée à l'alinéa 192(1)d) de la LRTFP, qui, de façon claire, n'envisage pas une ordonnance contre l'employeur. Pendant toute la durée de la période pertinente, l'alinéa 192(1)d) de la LRTFP précisait ce qui suit :

192. (1)d)en cas de contravention par une organisation syndicale de l'article 187, lui enjoindre d'exercer, au nom du fonctionnaire, les droits et recours que, selon [la CRTFP ou la CRTEFP], il aurait dû exercer ou d'aider le fonctionnaire à les exercer lui-même dans les cas où il aurait dû le faire […]

35 L'objet des demandes des ordonnances sur consentement va bien au-delà de ce qui est établi à l'alinéa 192(1)d) de la LRTFP et pourrait être traité de façon plus appropriée avec une demande de prorogation du délai où l'employeur est une partie.

36 Mon acceptation des demandes et la délivrance des ordonnances sur consentement auraient pour effet d'imposer à l'employeur une mesure de réparation afin de régler les plaintes déposées à l'égard des autres demandeurs. L'employeur serait confronté au fait d'avoir à défendre des cas dont il n'est pas informé d'une intention de Mme Bufford de donner suite aux griefs dont certains faits à l'appui remontent à 10 ans. Le passage du temps a créé un préjudice pour l'employeur à défendre sa position.

37 L'employeur a également fait valoir que, dans toute plainte où il pourrait être une personne touchée, il a le droit d'être informé et de recevoir un avis préalable suffisant pour se présenter et participer aux audiences.

38 La correspondance par courriel de la CRTFP datée du 11 décembre 2012, à l'intention des demandeurs et de la division de représentation patronale du Conseil du Trésor, reconnaissait que la CRTFP avait omis par inadvertance entre mai 2010 et décembre 2012 d'envoyer une copie conforme à l'employeur pour chaque correspondance entre les demandeurs. Dans cette même correspondance, la CRTFP a indiqué que cette erreur serait corrigée [traduction] « à l'avenir » et, depuis décembre 2012, on a envoyé à l'employeur et il a reçu toute la correspondance de mai 2010 à décembre 2012.

39 Même si l'employeur a effectivement reçu un avis concernant l'audience de janvier 2013 devant la commissaire Howes de la CRTFP à l'égard des plaintes par l'entremise de la division de la représentation patronale du Conseil du Trésor le 12 décembre 2012, la CRTFP n'a pas informé l'employeur de l'intention continue de Mme Bufford de donner suite à ses griefs et ne l'a pas informé suffisamment à l'avance de l'audience de janvier 2013. Bien que l'employeur reconnaisse que l'erreur concernant les avis était administrative, le résultat demeure que l'ARC n'a pas reçu un avis adéquat concernant l'audience; elle n'a donc pas été en mesure de présenter sa position lors de celle-ci. La déclaration faite par les demandeurs dans leurs demandes selon laquelle l'employeur a été informé et qu'il a choisi de ne pas participer est inexacte.

B. Pour Mme Bufford

40 Mme Bufford soutient que l'employeur a reçu un avis adéquat ainsi que le droit de présenter sa position à l'audience de janvier 2013 devant la commissaire Howes de la CRTFP en ce qui a trait aux plaintes. Mme Bufford fait plus particulièrement référence à un courriel envoyé le 21 janvier 2013 par l'avocat de Mme Bufford à la CRTFP, dont l'avocat de l'employeur a reçu une copie conforme, qui indiquait ce qui suit :

[Traduction]

Bonjour Lisa, nos recueils de pièces seront copiés cette semaine. Je propose de faire des copies comme suit : 1 pour M. Raven, 1 pour les témoins pour permettre aux témoins de les consulter, 1 pour moi-même et 1 pour la commissaire Howes [de la CRTFP]. Je crois comprendre que personne ne comparaîtra pour le Conseil du Trésor ou le gouvernement du Canada.

41 Mme Bufford indique que l'avocat de l'employeur n'a pas répondu au courriel du 21 janvier 2013, dont il est question ci-dessus au paragraphe 40, et qu'il n'a pas répondu à un courriel précédent envoyé par l'avocat des autres demandeurs le 7 janvier 2013, auquel était joint une lettre de l'avocat des autres demandeurs à l'intention de l'avocat de Mme Bufford, également datée du 7 janvier 2013.

42 En dépit du fait qu'elle était informée que deux plaintes avaient été déposées et en dépit du fait qu'elle savait qu'une audience avait été prévue en janvier 2013 devant la commissaire Howes de la CRTFP et que les demandeurs se préparaient à la tenue de l'audience, l'ARC n'a en aucun temps demandé le statut d'intervenant à l'égard des plaintes en application de l'article 14 du Règlement. L'ARC a reçu une copie conforme de toute la correspondance en tant que [traduction] « personne susceptible d'être touchée par les procédures ». Il incombait à l'ARC de demander le statut d'intervenant et elle a choisi de ne pas le faire. L'ARC ayant reçu un avis, en tant que [traduction] « personne susceptible d'être touchée par les procédures », la commissaire Howes de la CRTFO avait le droit de donner suite à la procédure en son absence lorsque l'ARC a choisi de ne pas comparaître. À l'appui à cette proposition, Mme Bufford renvoie à Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada c. Canada (Ministre de l'Environnement), [1992] A.C.F no 553 (Div. 1re Inst.) (QL); Hoyne v. Aerospace, Transportation and General Workers Union of Canada (CAW Canada Local 222), [2002] OLRB Rep. Novembre/Décembre 1062; International Union of Painters and Allied Trades, Local Union 1891 v. AB & C Renovations Inc., [2011] O.L.R.D. No. 3679 (QL).

43  Finalement, l'ARC n'a présenté aucun motif quant à son défaut de répondre ou de demander le statut d'intervenant à l'égard des plaintes.

C. Pour les autres demandeurs

44 La position des autres demandeurs est que j'ai la compétence en vertu du paragraphe 192(1) de la LRTFP d'accorder les ordonnances sur consentement demandées par les demandeurs en guise de mesure de réparation à l'égard des plaintes. J'ai le pouvoir de rendre les ordonnances que je considère nécessaires afin de traiter un défaut de se conformer à l'article 187 de la LRTFP, y compris la prorogation des délais pour déposer des griefs.

45 Dans Ménard c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2010 CRTFP 124, la CRTFP est arrivée à la conclusion que sa compétence n'était pas limitée aux mesures de réparation prévues à l'alinéa 192(1)d) de la LRTFP. Aux paragraphes 28 et 29 de Ménard,la CRTFP indique ce qui suit :

28 Les alinéas 192(1)a) à f) de la [LRTFP] renvoient aux ordonnances particulières en lien avec les diverses contraventions de la [LRTFP] qui peuvent faire l'objet d'une plainte selon le paragraphe 190(1). Une analyse sommaire des alinéas 192(1)a) à f) de la [LRTFP] révèle que l'intention du législateur est de prévoir des ordonnances spécifiquement adaptées aux différentes contraventions de la [LRTFP]. De façon générale, l'ordonnance vise à rendre au plaignant ou à la plaignante ce qui a été perdu ou non reçu à la suite de la contravention de la [LRTFP]. Dans le cas particulier d'un manquement au devoir de représentation, l'alinéa192(1)d) de la [LRTFP] stipule que la [CRTFP] peut enjoindre le syndicat à exercer, au nom du plaignant ou de la plaignante, les droits et recours qu'il aurait dû exercer ou de l'aider à les exercer lui-même. Il est clair que la mesure de réparation vise directement la contravention commise.

29 Dans ce cadre juridique, le mot « notamment » du paragraphe 192(1) de la [LRTFP] sert à introduire ou à « noter » les mesures particulières adaptées à diverses contraventions de la [LRTFP]. Il ne doit cependant pas être compris comme limitant les pouvoirs de la [CRTFP] d'ordonner d'autres mesures en autant que ces mesures aient un lien logique avec la contravention commise.

46 Les autres demandeurs font valoir que Ménard est conforme à l'« interprétation la plus large et la plus équitable » qui doit être accordée aux dispositions de la LRTFP, selon ce qu'a précédemment affirmé un arbitre de grief dans Amos c. Administrateur général (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2008 CRTFP 74 (confirmée dans 2011 CAF 38).

47 Je dois avoir le pouvoir d'accorder une prorogation du délai pour déposer un grief; autrement, le fait d'ordonner à une organisation syndicale de renvoyer ou de déposer un grief qui est hors délai constituerait une mesure de réparation inefficace. Les arguments de l'ARC selon lesquels l'objet des demandes d'ordonnance sur consentement pourrait être traité de façon plus adéquate au moyen d'une demande de prorogation des délais sont futiles et ont été à juste titre rejetés par la CRTFP dans Ménard au paragraphe 39, où il est indiqué ce qui suit :

La défenderesse a pour sa part indiqué que la mesure de réparation appropriée serait qu'elle aide la plaignante à présenter une demande au président de la [CRTFP] afin qu'il consente à proroger le délai de grief pour permettre à la plaignante d'en déposer un nouveau. Même si cette mesure de réparation est reliée à la faute commise par la défenderesse, j'estime qu'il s'agit là d'un détour inutile et pas nécessairement efficace pour redonner à la plaignante l'opportunité de faire valoir ses droits auprès de son ancien employeur. En effet, rien ne garantit, comme l'a fait valoir la plaignante, que le président de la commission accordera la prorogation de délai. En cas de refus du président, la plaignante se retrouverait sans aucun recours.

48 J'accorderais une mesure de réparation en application du paragraphe 192(2) de la LRTFP en mettant Mme Bufford dans la même position qu'elle aurait été si la contravention à la LRTFP ne s'était pas produite. Je dois avoir le pouvoir d'ordonner des mesures qui ont un lien logique avec la contravention. L'affaire Ménard a annulé le retrait de l'agent négociateur du grief de la plaignante, ce qui signifiait effectivement que le grief devait être traité par l'employeur comme s'il n'avait jamais été retiré. En conséquence, ma compétence doit inclure le pouvoir de proroger les délais afin de permettre aux griefs de Mme Bufford d'être entendus selon leur bien-fondé.

49 Les ordonnances sur consentement demandées ne constituent pas une ordonnance contre l'employeur, mais une ordonnance contre les parties qui se sont plaintes, tel que cela est envisagé au paragraphe 191(1) de la LRTFP, car le libellé proposé enjoint l'AFPC de prendre des mesures en ce qui concerne la présentation et la poursuite des griefs de Mme Bufford. Pour faciliter ces mesures, les ordonnances sur consentement indiquent que les délais par ailleurs applicables doivent être prorogés. Il est évident que les ordonnances sur consentement demandées réclament que l'AFPC prenne une mesure de réparation, et aucune mesure n'est ordonnée ou dirigée contre l'employeur.

50 Les commissions des relations de travail dans d'autres compétences ayant des dispositions similaires au paragraphe 192(1) de la LRTFP ont ordonné des prorogations des délais dans les situations où l'exercice d'un tel pouvoir est justifié. L'article 99 du Code canadien du travail (L.R.C. (1985), ch. L-2) est un exemple de disposition similaire et précise ce qui suit :

99. (1) S'il décide qu'il y a eu violation des paragraphes 24(4) ou 34(6), des articles 37, 47.3, 50 ou 69, des paragraphes 87.5(1) ou (2), de l'article 87.6, du paragraphe 87.7(2) ou des articles 94, 95 ou 96, le [Conseil canadien des relations industrielles] peut, par ordonnance, enjoindre à la partie visée par la plainte de cesser de contrevenir à ces dispositions ou de s'y conformer et en outre :

[…]

b) dans le cas de l'article 37, enjoindre au syndicat d'exercer, au nom de l'employé, les droits et recours que, selon lui, il aurait dû exercer ou d'aider l'employé à les exercer lui-même dans les cas où il aurait dû le faire;

[…]

(2) Afin d'assurer la réalisation des objectifs de la présente partie, le [Conseil canadien des relations industrielles] peut rendre, en plus ou au lieu de toute ordonnance visée au paragraphe (1), une ordonnance qu'il est juste de rendre en l'occurrence et obligeant l'employeur ou le syndicat à prendre des mesures qui sont de nature à remédier ou à parer aux effets de la violation néfastes à la réalisation de ces objectifs.

51 Le Conseil canadien des relations industrielles a renoncé aux délais en indiquant à un syndicat de déposer un grief ou de le renvoyer à l'arbitrage.

52 La Loi de 1995 sur les relations de travail de l'Ontario,L.O. 1995, ch. 1, Ann. A, prévoit ce qui suit :

[…]

96. (4) Si l'agent ne parvient pas à régler la question ou que la [Commission des relations de travail de l'Ontario], à sa discrétion, juge que cette enquête par un agent des relations de travail n'est pas opportune, elle peut faire enquête elle-même. Si elle est convaincue que quiconque, et notamment un employeur, une association patronale, un syndicat, un conseil de syndicats ou un employé ont enfreint la présente loi, elle décide, s'il y a lieu, de quelle façon ces personnes ou associations doivent rétablir la situation. À cet effet, elle peut notamment, malgré les dispositions d'une convention collective, ordonner, selon le cas, l'une ou plusieurs des mesures suivantes :

[…]

b) la réparation par le contrevenant du préjudice qui en a résulté […]

[…]

53 Le Labour Relations Code de la Colombie-Britannique,R.S.B.C., 1996, c. 244, stipule ce qui suit :

[Traduction]

[…]

14 (4) Si, à la suite d'une enquête, la [Commission des relations de travail de la Colombie-Britannique] est convaincue qu'une personne commet, ou a commis, un acte prohibé aux articles 5, 6, 7, 9, 10, 11 ou 12, elle peut ordonner l'une des mesures suivantes :

a) rendre une ordonnance instruisant la personne de mettre fin à l'acte;

b) dans le cadre de la même ordonnance ou d'une ordonnance subséquente, instruire à la personne de corriger l'acte […]

[…]

54 Pour ma part, comme les commissions de relations de travail de l'Ontario et de la Colombie-Britannique et la Commission canadienne des relations industrielles, je jouis de pouvoirs de réparation étendus qui me permettent de rétablir Mme Bufford dans la situation où elle se serait trouvée s'il n'y avait eu aucune contravention à la LRTFP.

55 Si je détermine que le paragraphe 192(1) de la LRTFP contient des lacunes, ce qui ne me permettrait pas de rendre les ordonnances sur consentement demandées, l'article 36 de la LRTFP, tel qu'il existait au moment du dépôt des demandes d'ordonnances sur consentement, me donnait le pouvoir de réparation d'exercer tous les pouvoirs accessoires à la réalisation des objets de la LRTFP. L'article 36 prévoyait ce qui suit :

36. La [CRTFP] met en œuvre la [LRTFP] et exerce les pouvoirs et fonctions que celle-ci lui confère ou qu'implique la réalisation de ses objets, notamment en rendant des ordonnances qui exigent l'observation de la [LRTFP], des règlements pris sous le régime de celle-ci ou des décisions qu'elle rend sur les questions qui lui sont soumises.

56 La CRTFP et les cours fédérales ont confirmé le pouvoir de réparation permettant de prendre une telle mesure, car il est nécessaire que la LRTFP soit appliquée d'une façon qui est conforme à ses objets ainsi qu'à son esprit général.

57 Dans Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor (groupe Services des programmes et de l'administration), 2010 CRTFP 88, la CRTFP a déclaré ce qui suit au paragraphe 166 :

[…] En outre, et c'est une question de droit, je crois que la [CRTFP] peut invoquer l'article 36 au besoin pour régler ce conflit parce qu'agir de la sorte est rationnellement et donc implicitement lié à la réalisation des objets de la [LRTFP], régler les conflits avec efficience et maintenir des relations patronales-syndicales fructueuses.

58 Le passage du temps, comme l'alléguait l'employeur, les événements pouvant remonter jusqu'à 10 ans, ne peut pas faire obstacle à l'exercice de mon pouvoir discrétionnaire de concevoir une mesure de réparation adéquate. L'employeur n'a présenté aucune preuve selon laquelle il a subi un préjudice. L'employeur est pleinement informé des plaintes et des faits qui y ont mené, car celles-ci ont été déposées en 2007 et en 2010, respectivement.

59 L'employeur était informé de l'audience de janvier 2013 devant la commissaire Howes de la CRTFP à l'égard des plaintes, car il en avait été informé et qu'on lui avait donné la possibilité d'y participer et de faire reconnaître sa qualité si tel était son souhait. Il ne peut adopter la position selon laquelle il n'a pas reçu un avis adéquat et suffisant.

IV. Motifs

60 Deux plaintes distinctes ont été déposées par Mme Bufford contre les autres demandeurs. L'essence des plaintes est que les autres demandeurs ont omis de déposer et de donner suite, en son nom, aux griefs contre son employeur.

61 Mme Bufford et les autres demandeurs ont fait valoir que l'employeur n'avait aucun droit de s'opposer aux demandes d'ordonnances sur consentement, car l'employeur était informé des plaintes, avait reçu des copies conformes de la correspondance, n'avait pas cherché à obtenir le statut d'intervenant et avait choisi de ne pas participer à l'audience de janvier 2013 devant la commissaire Howes de la CRTFP à l'égard des plaintes. Ces arguments sont sans fondement.

62 Les parties aux plaintes sont Mme Bufford et les autres demandeurs. Les plaintes ne nomment pas l'employeur; et il n'y est pas non plus une partie.

63 L'audition des plaintes devant la commissaire Howes de la CRTFP a commencé; cependant, elle ne s'est jamais terminée. La CRTFP a été informée que les demandeurs avaient entamé des discussions de règlement et on lui avait transmis éventuellement deux demandes d'ordonnances sur consentement.

64 Il n'existe aucune preuve selon laquelle l'employeur, qui n'est pas une partie aux plaintes, avait été invité à participer aux discussions de règlement, voire qu'il était informé de ces discussions.

65 En ce qui concerne la plainte no 1, l'ordonnance sur consentement demandée stipule au paragraphe 3 que les délais pour renvoyer deux griefs distincts, le grief no 70042929 et le grief no 70042930, sont prorogés à 45 jours à compter de la date à laquelle l'ordonnance a été délivrée et reçue par les demandeurs. Les paragraphes 5 et 6 de cette même ordonnance sur consentement demandée stipulent que les griefs sont présumés avoir été présenté d'une manière opportune ou en temps opportun. La prorogation du délai et le fait d'ordonner que les griefs soient réputés avoir été présentés d'une manière opportune sont une réparation qui ne vise aucun des autres demandeurs, mais va clairement à l'encontre des intérêts de l'employeur.

66 En ce qui concerne la plainte no 2, l'ordonnance sur consentement demandée indique au paragraphe 2 que, dans un délai de 45 jours à compter de la date à laquelle l'ordonnance est délivrée et reçue par les demandeurs, l'AFPC doit déposer un grief au nom de Mme Bufford auprès de l'employeur, et ce grief, selon le paragraphe 3 de cette même ordonnance sur consentement demandée, sera réputé avoir été déposé dans le délai à tous les égards, en dépit du fait que les circonstances visées ont eu lieu en août et en septembre 2009. Le paragraphe 4 de cette même ordonnance sur consentement demandée stipule que tous les délais applicables pour le dépôt du grief seront réputés avoir été respectés. Le fait d'ordonner que les délais ont été respectés est une mesure de réparation qui ne va pas à l'encontre des autres demandeurs, mais qui est directement à l'encontre des intérêts de l'employeur.

A. Paragraphe 192(1) de la LRTFP

67 Pendant toute la durée de la période pertinente, le paragraphe 192(1) de la LRTFP stipulait ce qui suit :

192. (1) Si [la CRTFP ou la CRTEFP] décide que la plainte présentée au titre du paragraphe 190(1) est fondée, [la CRTFP ou la CRTEFP] peut, par ordonnance, rendre à l'égard de la partie visée par la plainte toute ordonnance qu'elle estime indiquée dans les circonstances et, notamment :

[…]

d) en cas de contravention par une organisation syndicale de l'article 187, lui enjoindre d'exercer, au nom du fonctionnaire, les droits et recours [qu'elle] aurait dû exercer ou d'aider le fonctionnaire à les exercer lui-même dans les cas où il aurait dû le faire […]

68 Le pouvoir prévu au paragraphe 192(1) de la LRTFP est discrétionnaire. Il n'y a aucune exigence de rendre une ordonnance quelconque. En outre, le prononcé de l'ordonnance est fondé dans les faits sur une détermination selon laquelle la plainte est bien fondée. Même si l'audition des plaintes a commencé devant la commissaire Howes de la CRTFP, celle-ci ne s'est jamais terminée et les parties aux plaintes – Mme Bufford et les autres demandeurs – ont conclu une entente de règlement. Ni la CRTFP ni moi n'avons rendu une détermination quelconque sur le bien-fondé des plaintes.

69 Le paragraphe 192(1) de la LRTFP est également très précis quant à savoir contre qui une ordonnance peut être prononcée. Il prévoit le pouvoir discrétionnaire, si une plainte est fondée, de rendre une ordonnance contre la partie visée par la plainte. Les parties visées par les plaintes sont les autres demandeurs. Par conséquent, bien qu'il existe un pouvoir discrétionnaire de rendre des ordonnances ainsi que la compétence de rendre une ordonnance après avoir déterminé qu'une plainte est bien fondée, celles-ci, en application du paragraphe 192(1) de la LRTFP, ne peuvent être rendues contre l'employeur, car l'employeur n'est pas l'une des parties visées par la plainte.

70 Étant donné que les conditions établies au paragraphe 192(1) de la LRTFP n'ont pas été respectées, je ne peux pas accueillir les demandes d'ordonnances sur consentement en vertu de ce paragraphe.

B. Délais pour le dépôt des griefs/Demande de proroger les délais

71 La plainte no 1 renvoie au défaut par Mme Hall, Mme Benson, Mme Ettel, Mme Grundy et M. Scott de déposer des griefs au nom de Mme Bufford pour la période allant de janvier 2004 à avril 2007. Il est évident que, étant donné que les griefs liés à ces événements remonteraient éventuellement, à compter de la date des demandes d'ordonnances sur consentement, jusqu'à neuf ans et demi. La plainte no 2 renvoie au défaut par l'AFPC de déposer un grief lié à la cessation d'emploi de Mme Bufford, qui a eu lieu en août 2009, un peu moins de quatre ans avant la date des demandes d'ordonnances sur consentement et, par conséquent, bien au-delà du délai au cours duquel il est permis de déposer un grief contre cette mesure prise par son employeur. En conséquence, il est très clair que l'essentiel de la mesure de réparation que je devrais ordonner, selon ce qui a été convenu par Mme Bufford et les autres demandeurs, est à l'encontre de l'employeur.

72 Les autres demandeurs ont fait valoir que, si le paragraphe 192(1) est déficient, l'article 36 de la LRTFP, tel qu'il existait au moment du dépôt des demandes d'ordonnances sur consentement, me donnait le pouvoir de prendre les mesures pour rendre une ordonnance en vue de proroger les délais liés au dépôt des griefs et au renvoi des griefs à l'arbitrage. L'article 36 prévoyait ce qui suit :

36. La [CRTFP] met en œuvre la [LRTFP] et exerce les pouvoirs et fonctions que celle-ci lui confère ou qu'implique la réalisation de ses objets, notamment en rendant des ordonnances qui exigent l'observation de la [LRTFP], des règlements pris sous le régime de celle-ci ou des décisions qu'elle rend sur les questions qui lui sont soumises.

73 Le 1er novembre 2014, l'article 36 de la LRTFP a été renuméroté, devenant l'article 12 de la LRTFP. L'article 12 de la LRTFP est ainsi rédigé :

12. La [CRTEFP] met en œuvre la [LRTFP] et exerce les attributions que celle-ci lui confère ou qu'implique la réalisation de ses objets, notamment en rendant des ordonnances qui en exigent l'observation, celle des règlements pris sous son régime ou des décisions qu'elle rend sur les questions dont elle est saisie.

74 Le 1er novembre 2014 également, l'article 19 de la LCRTEFP est entré en vigueur. L'article 19 de la LCRTEFP est ainsi rédigé :

19. La [CRTEFP] exerce les attributions que lui confère la [LCRTEFP] ou toute autre loi fédérale.

75 La LRTFP est divisée en quatre parties différentes. Les plaintes portant sur l'obligation de représentation équitable (plaintes en vertu de l'alinéa 190(1)g) de la LRTFP) relèvent de la partie 1 de la LRTFP, intitulée « Relations de travail ». L'article 36 de la LRTFP s'y trouvait au moment du dépôt de ces demandes d'ordonnances sur consentement. L'article 12 de la LRTFP s'y trouve désormais.

76 Les griefs individuels contre l'employeur, que les autres demandeurs, selon les déclarations de Mme Bufford, ont omis de déposer en son nom, relèvent de la partie 2 de la LRTFP, qui est intitulée « Griefs ». Pendant la durée de toutes les périodes pertinentes, le paragraphe 237(1) de la LRTFP (que l'on trouve à la partie 2 de la LRTFP) prévoyait ce qui suit :

237. (1)La [CRTFP ou CRTEFP] peut prendre des règlements relatifs à la procédure applicable aux griefs, notamment en ce qui concerne :

[…]

d) leur délai de présentation pour chaque palier de la procédure applicable;

[…]

f) le mode et le délai de leur renvoi à l'arbitrage après leur présentation jusqu'au dernier palier inclusivement […]

77 En vertu des articles 237 et 238 de la LRTFP, la CRTFP a établi le Règlement et la CRTEFP l'a modifié.

78 Pendant toute la durée de la période pertinente, la partie 2 du Règlement était intitulée « Griefs » et comprenait les articles 61 à 106.

79 Au moment du dépôt de ces demandes d'ordonnances sur consentement, l'article 61 du Règlement prévoyait ce qui suit :

61. Malgré les autres dispositions de la présente partie, tout délai, prévu par celle-ci ou par une procédure de grief énoncée dans une convention collective, pour l'accomplissement d'un acte, la présentation d'un grief à un palier de la procédure applicable aux griefs, le renvoi d'un grief à l'arbitrage ou la remise ou le dépôt d'un avis, d'une réponse ou d'un document peut être prorogé avant ou après son expiration :

a) soit par une entente entre les parties;

b) soit par le président, à la demande d'une partie, par souci d'équité.

80 Le Règlement a clairement codifié, à l'article 61, le pouvoir de proroger les délais quant au dépôt de griefs et à leur renvoi à l'arbitrage.

81 Au moment du dépôt de ces demandes d'ordonnances sur consentement, l'article 45 de la LRTFP prévoyait que le président de la CRTFP pouvait autoriser le vice-président à exercer n'importe quelle attribution du président, y compris les attributions déléguées au président par la CRTFP. L'article 45 de la LRTFP est ainsi rédigé :

45. Le président peut déléguer à tout vice-président les attributions que lui confère la présente loi ou que lui délègue la [CRTFP].

82 Au moment du dépôt de ces demandes d'ordonnances sur consentement, le pouvoir de proroger les délais quant au dépôt des griefs et à leur renvoi à l'arbitrage a été conféré à la présidente de la CRTFP et seule la présidente, ou un vice-président de la CRTFP, dans la mesure où ce pouvoir lui a été délégué par la présidente en application de l'article 45 de la LRTFP, pourraient exercer ce pouvoir. Il est bien établi en droit que les demandeurs dans cette affaire ne peuvent se soustraire par contrat au Règlement, ce qui exige l'approbation de l'employeur ou celle de la présidente de la CRTFP ou de son délégué, afin de proroger le délai prescrit pour le dépôt d'un grief ou son renvoi à l'arbitrage.

83  Le 3 novembre 2014, l'article 61 du Règlement a été modifié pour préciser ce qui suit :

61. Malgré les autres dispositions de la présente partie, tout délai, prévu par celle-ci ou par une procédure de grief énoncée dans une convention collective, pour l'accomplissement d'un acte, la présentation d'un grief à un palier de la procédure applicable aux griefs, le renvoi d'un grief à l'arbitrage ou la remise ou le dépôt d'un avis, d'une réponse ou d'un document peut être prorogé avant ou après son expiration :

a) soit par une entente entre les parties;

b) soit par la [CRTEFP] ou l'arbitre de grief, selon le cas, à la demande d'une partie, par souci d'équité.

84 Depuis le 3 novembre 2014, le pouvoir de proroger les délais quant au dépôt des griefs et à leur renvoi à l'arbitrage dans des circonstances semblables à celles-ci est accordé à la CRTEFP.

85 Même si les délais pour déposer les griefs individuels sont établis dans les conventions collectives, ils étaient également établis pendant la durée de toutes les périodes pertinentes en vertu de l'article 68 du Règlement. Pendant la durée de toutes les périodes pertinentes, le délai pour renvoyer les griefs à l'arbitrage est établi à l'article 90 du Règlement. Il est évident que les deux demandes d'ordonnances sur consentement visant à offrir une réparation considérable en défaveur de l'employeur relativement aux griefs qui, selon les allégations de Mme Bufford, n'ont jamais été déposées par les autres demandeurs en son nom. Cette réparation, telle qu'elle est établie dans les demandes d'ordonnances sur consentement, est expressément contre l'employeur et constitue une réparation qui devrait être demandée par un fonctionnaire s'estimant lésé, ou en son nom, par l'intermédiaire d'une entente conclue avec l'employeur en vue de proroger les délais en application de l'alinéa 61a) du Règlement. À défaut de l'existence d'une telle entente, une demande de proroger les délais en application de l'alinéa 61b) du Règlement aurait pu être déposée avant le 3 novembre 2014, auprès de la présidente de la CRTFP ou, à compter du 3 novembre 2014, auprès de la CRTEFP.

86 Les parties à une entente visant à proroger le délai en application de l'alinéa 61a) du Règlement seraient la fonctionnaire s'estimant lésée et l'employeur. Il n'y a aucun élément de preuve selon lequel il existe une entente entre Mme Bufford et l'employeur en vertu de l'alinéa 61a) du Règlement de proroger les délais pour déposer les griefs ou de les renvoyer à l'arbitrage et, à ce titre, la mesure qu'il est approprié de prendre pour proroger le délai pour déposer les griefs ou renvoyer un grief à l'arbitrage maintenant consiste à déposer une demande en ce sens en vertu du Règlement.

87 Dans le cas concernant la prorogation des délais pour le dépôt de griefs et la prorogation des délais pour renvoyer des griefs à l'arbitrage, la partie contre qui la réparation est demandée est l'employeur. Il n'existe aucun élément de preuve selon lequel une demande a été produite par Mme Bufford ou en son nom avant le 3 novembre 2014, auprès de la présidente de la CRTFP ou à compter du 3 novembre 2014, auprès de la CRTEFP afin de proroger le délai en application de l'alinéa 61b) du Règlement quant au dépôt des griefs ou à leur renvoi à l'arbitrage.

88 Les décideurs, en vertu de la LRTFP ainsi qu'en vertu de l'ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.R.C. (1985), ch. P –35), ont établi un ensemble de précédents quant aux demandes de prorogation du délai pour proroger le délai pour le dépôt des griefs et leur renvoi à l'arbitrage. L'AFPC est bien informée de cette jurisprudence étant donné que, à plusieurs reprises, elle a représenté des demandeurs qui cherchaient à proroger les délais pour le dépôt des griefs et leur renvoi à l'arbitrage.

89 Il est troublant de constater que, en dépit des plaintes déposées, personne, ni Mme Bufford, ni son avocat, ni l'AFPC n'ont déposé une demande de prorogation des délais pour le dépôt des griefs. Il n'y a rien, en dépit du dépôt des deux plaintes, qui a empêché l'un d'eux de déposer une demande en application de l'alinéa 61b) du Règlement afin de proroger les délais pour le dépôt des griefs et, au besoin, de renvoyer les griefs à l'arbitrage. La plainte no 1 a été déposée six ans avant le dépôt de ces demandes d'ordonnances sur consentement, et la plainte no 2, trois ans avant cette date.

C. Demande d'avoir le statut d'intervenant

90 Le terme « intervenor » (intervenant) est défini dans le Black's Law Dictionarycomme suit : [traduction] « personne qui participe volontairement à une action en justice en suspens en raison d'un intérêt personnel dans celle-ci ».

91 Au moment du dépôt de ces demandes d'ordonnances sur consentement, l'article 14 du Règlement prévoyait que quiconque ayant un intérêt substantiel dans une affaire dont est saisie la CRTFP peut demander à celle-ci d'y être ajouté à titre de partie ou d'intervenant et que la CRTFP peut, après avoir donné aux parties l'occasion de présenter leurs observations à l'égard de la demande, ajouter la personne à titre de partie ou d'intervenant.

92 Pendant la durée de toutes les périodes pertinentes, l'article 1 du Règlement a établi différentes définitions pour les termes qui figurent dans l'ensemble du Règlement. « Document introductif » s'entend de nombreuses choses différentes, selon l'objet du document. En application de l'alinéa 1v) du Règlement, il désigne une plainte visée à l'article 190 de la LRTFP.

93 Pendant la durée de toutes les périodes pertinentes, l'article 4 du Règlement prévoyait, à la réception d'un document introductif, l'envoi de copies à l'autre partie et à toute personne susceptible d'être touchée par la procédure. Pendant la durée de toutes les périodes pertinentes, le paragraphe 7(2) du Règlement prévoyait que toute personne qui a présenté un document introductif devait fournir une copie de ce document à la personne qui a présenté le document introductif et à quiconque a reçu un document d'introduction en vertu de l'article 4 du Règlement.

94 Il semble que, du point de vue de la position de Mme Bufford et des autres demandeurs, la personne en défaut serait l'employeur. Mme Bufford a fait valoir que l'employeur avait été informé de l'audience de janvier 2013 devant la commissaire Howes de la CRTFP à l'égard des plaintes, qu'il avait le droit de participer à l'audience, qu'il avait reçu une copie conforme de la correspondance et qu'il aurait pu demander le statut d'intervenant.

95 Le fait que, pendant la durée de toutes les périodes pertinentes, l'article 4 et le paragraphe 7(2) du Règlement exigeait la fourniture de copies des documents présentés à l'égard des plaintes à d'autres personnes ou organisations ne les transforme pas en partie aux plaintes contre qui une réparation pourrait être ordonnée sans égard à l'application régulière de la loi. Il incombait à Mme Bufford, si elle cherchait à obtenir une réparation contre quelqu'un, d'engager une procédure contre cette partie. Si l'employeur était une partie légitime, l'employeur aurait dû être nommé à titre de partie par Mme Bufford. L'employeur n'est pas tenu de demander le statut d'intervenant. Il n'incombe pas à une personne qui n'est pas une partie d'obtenir le statut d'intervenant dans toute procédure engagée par les parties, uniquement du fait qu'elle pourrait avoir un intérêt à l'égard de l'affaire.

96 Dans Ménard, la plaignante s'est plainte que son agent négociateur avait omis de respecter l'article 187 de la LRTFP en retirant un grief qu'elle avait déposé. La CRTFP a ordonné que le retrait du grief de la plaignante soit annulé et que l'agent négociateur de la plaignante lui assure une représentation entière et complète. L'affaire Ménard n'accorde pas la réparation substantielle que Mme Bufford et les autres demandeurs aux présentes demandent. Même si Ménard, en apparence, semble accorder une réparation substantielle contre l'employeur, rien dans cette décision n'empêchait l'employeur de se prévaloir de toutes les défenses disponibles en réponse au grief, y compris un argument portant sur le délai. Dans le cas présent, la réparation demandée abrogerait expressément cette défense.

97 Les arguments de Mme Bufford sont axés sur le fait que l'employeur a choisi de ne pas participer à l'audience de janvier 2013 devant la commissaire Howes de la CRTFP à l'égard des plaintes et que, à ce titre, il devrait subir les conséquences liées à son absence. Comme on l'a présenté dans les motifs ci-dessus, l'audience ne s'est pas terminée et la commissaire Howes de la CRTFP n'a formulé aucune constatation. Mme Bufford et les autres demandeurs ont entrepris des discussions de règlement. Rien ne les a empêchés d'inviter l'employeur à participer à ces discussions et d'entreprendre une entente de règlement tripartite, en vertu de laquelle l'employeur a consenti à la prorogation des délais. Selon la preuve et les arguments de l'employeur, il est évident que l'employeur, à tout le moins, n'était pas d'accord avec la réparation demandée dans les demandes d'ordonnances sur consentement et, compte tenu de l'ensemble de la preuve dont je suis saisi, il semble hautement improbable que l'employeur ait participé à des discussions de règlement.

98 Si j'ai tort dans mon raisonnement relativement à l'interprétation du paragraphe 192(1) de la LRTFP ou à mon interprétation de la loi quant à la demande de prorogation du délai pour le dépôt des griefs, pour l'ensemble des motifs décrits aux présentes, je refuse d'exercer le pouvoir discrétionnaire qui m'est accordé en vertu de la LRTFP et ne délivrerai pas les ordonnances sur consentement demandées par les demandeurs relativement à la plainte no 1 et à la plainte no 2.

99 Pour ces motifs, je rends l'ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

100 Les demandes d'ordonnances sur consentement sont rejetées.

Le 20 février 2015.

Traduction de la CRTEFP

John G. Jaworski,
une formation de la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique

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