Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Sommaire : L’intimé a soulevé une objection quant à la compétence de l’ancien Tribunal (maintenant la CRTEF) d’entendre la plainte puisqu’une entente de règlement valide et exécutoire avait été signée avec le plaignant. Le retrait de la plainte était sujet à l’exécution par l’intimé de certaines modalités de l’entente et l’intimé était d’avis qu’il s’était entièrement acquitté de ses obligations en vertu de l’entente. Le plaignant, toutefois, était de l’avis que l’entente fût conditionnelle à ce que l’intimé s’acquitte de certains engagements et il a fait valoir que ce dernier n’avait pas respecté ces engagements. Dans l’alternative, le plaignant a allégué que l’entente était nulle et non avenue pour diverses raisons et que la CRTEFP était habilitée à trancher le litige sur le fond. Décision : La CRTEFP a conclu que l’entente était valide et exécutoire liant ainsi les deux parties et que l’intimé avait respecté toutes les modalités de l’entente. La CRTEFP a également conclu que l’entente était raisonnable. La preuve était insuffisante pour établir qu’il existait une inégalité des positions de négociation entre l’intimé et le plaignant, attribuable à l’ignorance, les besoins ou à la détresse de ce dernier. En plus, il n’y avait rien qui permettait à la CRTEFP de conclure que l’intimé avait indûment usé de sa position, en l’espèce, pour obtenir un avantage ou que l’entente était incompatible avec les normes sociales actuelles. En dernier lieu, la CRTEFP a conclu que l’intimé n’avait pas agi de mauvaise foi en exécutant ses obligations contractuelles et qu’il n’avait nullement violé l’entente. Ainsi, l’entente valide et exécutoire entre les parties faisait entièrement obstacle à la tenue d’une audience relativement à cette plainte. La CRTEFP a donc mis fin aux présentes procédures et fermé ce dossier. Plainte rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique et Loi sur l'emploi dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date: 20150525
  • Dossier: 2013-0370
  • Référence: 2015 CRTEFP 47

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique


ENTRE

RICHARD LEDUC

plaignant

et

LE GREFFIER DU CONSEIL PRIVÉ ET SECRÉTAIRE DU CABINET

Intimé

et

AUTRES PARTIES

Répertorié
Leduc c. Le greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet

Plainte d'abus de pouvoir aux termes de l'article 65(1) de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Décision:
La plainte est rejetée faute de compétence
Devant:
Nathalie Daigle, commissaire
Pour le plaignant:
Richard Leduc
Pour l'intimé:
Martin Desmeules
Affaire entendue à Ottawa, ON
Les 7 janvier et 19 février 2015

Introduction

1Le 10 septembre 2014, le greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet (l'intimé) a soulevé une objection quant à la compétence du Tribunal de la dotation de la fonction publique (l'ancien Tribunal) d'entendre cette plainte. L'intimé soutient que suite à une conférence de règlement tenue le 2 mai 2014, il a signé une entente de règlement valide et exécutoire avec le plaignant, Richard Leduc. Le retrait de la plainte était sujet à l'exécution par l'intimé de certaines modalités de l'entente. L'intimé est d'avis qu'il s'est entièrement acquitté de ses obligations en vertu de l'entente.

2Afin de statuer sur l'objection de l'intimé, tout en assurant la confidentialité du processus de conférence de règlement, seulement l'information nécessaire concernant la conférence de règlement et l'entente est relatée dans la décision.

3Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique, L.C. 2013, ch. 40, art. 365 est entrée en vigueur et a créé la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (la CRTEFP). Cette nouvelle Commission remplace l'ancien Tribunal et la Commission des relations de travail dans la fonction publique (l'ancienne Commission) et est responsable du traitement des plaintes déposées en vertu de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13 (la LEFP). Par conséquent, cette décision est rendue par la CRTEFP.

4Pour les raisons qui suivent, la CRTEFP accueille l'objection de l'intimé. La CRTEFP conclut qu'une entente valide et exécutoire lie les parties et qu'elle n'a pas compétence pour entendre cette plainte.

Contexte

5Le 18 octobre 2013, le plaignant a déposé une plainte d'abus de pouvoir auprès de l'ancien Tribunal en vertu de l'article 65(1) de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique (LEFP) suite à sa mise en disponibilité. Le plaignant détenait un poste d'économiste principal au sein du Bureau du Conseil privé (BCP) avant sa mise en disponibilité.

6Le plaignant allègue dans sa plainte que la décision de le mettre en disponibilité était discriminatoire. En vertu de l'article 80 de la LEFP, la CRTEFP peut interpréter et appliquer la Loi canadienne sur les droits de la personne (la LCDP) au moment de déterminer si la plainte est fondée au regard de l'article 65.

7La CRTEFP a statué à la conférence préparatoire, tenue en prévision de l'audience, que seule la question de l'objection soulevée par l'intimé serait examinée à cette étape-ci, et qu'une décision serait d'abord rendue sur cette question avant que la question de fond (à savoir si la mise en disponibilité était discriminatoire) ne soit examinée. Le plaignant a néanmoins présenté certains éléments de preuve à l'audience au sujet de sa cote de sécurité « Très-Secret » qui lui a été retirée pour appuyer sa position que sa mise en disponibilité était discriminatoire. Cette preuve n'a toutefois pas été prise en considération à ce stade-ci des procédures, puisque l'audience portait exclusivement sur la question de savoir s'il y a une entente valide et exécutoire entre les parties et, dans l'affirmative, si les conditions de l'entente ont été respectées par l'intimé.

Protocole d'entente

8Une conférence de règlement a été tenue par l'ancien Tribunal le 2 mai 2014 en présence du Président de l'ancien Tribunal. La conférence avait pour but de permettre aux parties de discuter des points forts et des lacunes de leur dossier en vue de régler la plainte.

9Les parties ont d'abord signé une Entente sur les modalités de la conférence de règlement qui prévoit la confidentialité des discussions lors de la conférence de règlement. La conférence s'est conclue par un règlement de la plainte et un protocole d'entente (l'entente) a été signé. L'entente a été signée le 2 mai 2014 par le plaignant et Monique Lacroix-Labelle, représentante de l'intimé. Mme Lacroix-Labelle était alors la Directrice exécutive des ressources humaines du BCP.

10L'entente contient une clause standard de confidentialité qui précise que les parties conviennent de ne pas divulguer la teneur des conditions de règlement sauf pour des raisons administratives ou judiciaires.

11Le 15 septembre 2014, le plaignant a avisé l'ancien Tribunal qu'il conteste la position de l'intimé qu'une entente de règlement valide et exécutoire a été signée par les parties. Selon lui, l'entente de règlement était conditionnelle à ce que l'intimé s'acquitte de certains engagements et il fait valoir que l'intimé n'a pas respecté ces engagements. Dans l'alternative, il allègue que l'entente est nulle et non avenue pour diverses raisons et que la CRTEFP est habilitée à trancher le litige sur le fond. En dernier lieu, comme argument subsidiaire aux arguments précédents, le plaignant avance que l'intimé a failli à son obligation implicite d'agir de bonne foi en exécutant ses obligations contractuelles.

Question préliminaire

12Au début de l'audience, l'intimé a présenté une requête demandant que le livret intitulé Cahier de documents de l'intimé, contenant l'entente et les détails de la mise en œuvre de l'entente, soit mis sous scellé. L'avocat de l'intimé a expliqué que les modalités de l'entente sont confidentielles et ne devraient être connues de nul autre que les parties. La clause 10 de l'entente prévoit précisément la confidentialité de l'entente. Le plaignant ne s'est pas objecté à la requête.

13Il est bien connu qu'il est important de préserver la confidentialité des détails des discussions menant à une entente de règlement, des conditions de l'entente et de la mise en œuvre de l'entente. Si les déclarations des parties à des négociations de règlement pouvaient être utilisées par des tiers dans des procédures ultérieures, les parties seraient moins enclines à participer à de telles discussions. Pour cette raison, la CRTEFP ordonne la mise sous scellé du Cahier de documents de l'intimé qui contient les documents suivants :

I-1 Protocole d'entente;

I-2 Lettre datée du 12 mai 2014 et ses trois pièces jointes (I-2-A, I-2-B, I-2-C)

I-2-D État des gains daté du 29 mai 2014;

I-3 Courriels échangés par les parties entre le 2 mai et le 9 septembre 2014.

14Par conséquent, ces documents ne seront pas accessibles au public.

Question en litige

Est-ce que la CRTEFP a compétence pour entendre cette plainte suite à l'entente intervenue entre les parties?

Analyse

15L'article 97 de la LEFP prévoit que la CRTEFP peut offrir la médiation en vue de régler les plaintes. Une conférence de règlement s'apparente à une médiation puisqu'elle permet aux parties de discuter d'un possible règlement de la plainte avec un commissaire de la CRTEFP.

16Dans MacDonald c. Canada, 1998 CanLII 8736 (C.F.), la Cour fédérale a conclu qu'une entente de règlement convenue de plein gré constitue un empêchement absolu pour l'employé concerné de faire entendre son grief par l'ancienne Commission.

17Ce principe a été appliqué aux plaintes devant l'ancien Tribunal dans Baker c. Sous-ministre de Travaux publics et Services gouvernementaux, 2013 TDFP 11. Dans l'affaire Baker, l'ancien Tribunal a conclu que lorsqu'un employé dépose une plainte de dotation auprès de celui-ci et que l'employé conclut ensuite une entente de règlement exécutoire avec l'administrateur général du ministère ou de l'agence en question, il se retrouve dans la même position que celui qui dépose un grief et conclut une entente de règlement exécutoire avec son employeur. Dans Baker, l'ancien Tribunal notait ce qui suit au paragraphe 35 de la décision :

À l'instar de la procédure de règlement des griefs, la procédure s'appliquant aux plaintes dans la LEFP vise à fournir aux plaignants et aux administrateurs généraux une méthode ordonnée de règlement des plaintes. La procédure de plainte du Tribunal prévoit, à diverses étapes, des opportunités pour les parties de discuter afin de régler la plainte. Il s'ensuit que si elles concluent une entente exécutoire à la suite d'une médiation, de discussion ou de conférence de règlement, elles ne devraient pas être autorisées à remettre cette entente en cause.

18Dans Baker, l'ancien Tribunal en est donc venu à la conclusion qu'une entente de règlement valide et exécutoire d'une plainte constitue un empêchement absolu pour le plaignant de faire entendre cette plainte par le Tribunal.

19Les deux parties ne mettent pas en doute qu'elles soient arrivées à une entente à l'issue de la conférence de règlement du 2 mai 2014. La question fondamentale est celle de savoir si cette entente était finale et exécutoire ou conditionnelle. Si l'entente était conditionnelle à ce que l'intimé respecte ses engagements et qu'il ne l'a pas fait, la CRTEFP demeure saisie de la plainte. Si l'entente était exécutoire, elle lie les parties et la CRTEFP ne peut entendre la plainte.

20Selon l'intimé, l'entente conclue au cours de la conférence de règlement était finale et exécutoire dès sa signature et il en a respecté toutes les modalités. L'intimé soutient par ailleurs que la CRTEFP demeure saisie des questions d'exécution des ententes de conférence de règlement. Selon l'intimé, la jurisprudence arbitrale en relations de travail ainsi que les décisions de la Cour fédérale dans MacDonald et de la Cour d'appel fédérale dans Amos c. Canada (Procureur général), 2011 CAF 38, appuient sa position. L'intimé demande donc à la CRTEFP de conclure que l'entente était exécutoire, qu'il a respecté toutes les modalités de l'entente et que la CRTEFP, en conséquence, n'est plus saisie de la plainte et n'a pas compétence pour l'entendre.

21La CRTEFP a pris connaissance du contenu de l'entente. Son libellé précise que les parties acceptent le protocole d'entente en guise de règlement final et définitif des trois plaintes suivantes: (1) la plainte à la CRTEFP (auparavant l'ancien Tribunal); (2) une plainte de harcèlement au Bureau du Conseil privé; et (3) une plainte à la Commission canadienne des droits de la personne. Le plaignant s'engage, dans l'entente, à respecter quatre modalités, qui sont stipulées aux paragraphes 1 à 4 de l'entente. L'intimé, pour sa part, s'engage à respecter trois modalités. Celles-ci sont stipulées aux paragraphes 5 à 7 de l'entente.

22Le paragraphe 8 de l'entente stipule, par la suite, que celle-ci est sujette à une condition. Ce paragraphe se lit comme suit :

8. La présente entente est conditionnelle au paiement [du montant stipulé au paragraphe 7 de l'entente] au plaignant. À ce moment, le plaignant retirera les plaintes stipulées dans cette entente. Si le montant n'était pas versé tel que prévu, cette entente serait nulle et non avenue et la plainte du Tribunal de la dotation procéderait.

23Ce paragraphe prévoit donc que l'entente serait nulle et non avenue si le montant stipulé au paragraphe 7 de l'entente n'était pas versé au plaignant. Le paragraphe 8 est la seule clause conditionnelle de l'entente. Aucune autre clause ne stipule que l'entente est conditionnelle à la réalisation d'une autre modalité.

24En l'espèce, il est clair que l'intimé a versé au plaignant le montant stipulé dans l'entente moins un cent (1 ¢). Selon la preuve déposée à l'audience, l'intimé a offert de lui verser le plein montant négocié en deux versements puisque le système informatique de paye ne permettait pas que le plein montant soit versé en un seul versement. Cependant, le plaignant a spécifiquement demandé, par le biais de ses courriels datés du 9 et 12 mai 2014, qu'un seul versement soit effectué afin d'accélérer les choses. Dans ses courriels, il demande à recevoir un seul versement et que ce soit au montant négocié moins un cent (1 ¢). Il informe ensuite l'intimé de ce qui suit dans son courriel du 12 mai 2014 : « J'accepte qu'un seul versement prenant la forme d'un chèque papier du montant de […] soit effectué. Je suis ainsi d'accord avec ce changement au point 7 du protocole d'entente».  D'ailleurs, le plaignant n'a pas allégué, à l'audience, qu'il y a eu défaut de la part de l'intimé au sujet de cette modalité de l'entente, c'est-à-dire le paiement du montant convenu.

25Le 29 mai 2014, l'intimé a donc versé au plaignant le montant convenu, c'est-à-dire, le montant stipulé au paragraphe 7 de l'entente moins un cent (1 ¢). Le talon de chèque daté du 29 mai 2014 faisant état du versement a été déposé en preuve.

26L'intimé souligne que, malgré le libellé du paragraphe 8, l'entente n'était pas conditionnelle mais exécutoire puisque l'entente ne renfermait aucun élément donnant aux parties l'option de changer d'avis ou de ne pas respecter leurs obligations en vertu de l'entente. En particulier, le libellé de l'entente ne renfermait aucun élément donnant à l'intimé l'option de se désister du contrat, de changer d'avis, de ne pas respecter ses obligations ou de ne pas verser le montant convenu au plaignant.

27L'intimé fait aussi valoir que la Cour fédérale dans la décision MacDonald, au paragraphe 35, a retenu l'intention exprimée par les paroles et les actes d'une personne de donner son accord comme critère objectif pour déterminer si une entente est exécutoire. Cette approche a été suivie dans la jurisprudence subséquente de l'ancienne Commission et est applicable, selon l'intimé, dans les dossiers de plainte devant la CRTEFP. L'intimé souligne que la décision Van de Mosselaer c. Conseil du Trésor (ministère des Transports), 2006 CRTFP 59, est particulièrement utile dans cette analyse. L'arbitre Love notait, au paragraphe 46, qu'un règlement est exécutoire lorsqu'il est clair qui sont les parties, quels étaient les griefs faisant l'objet de l'entente, quelle est la contrepartie à verser et quelles sont les obligations mutuelles des parties pour la mise en application.

28Selon l'intimé, tous ces critères sont rencontrés en l'espèce : les parties sont clairement identifiées dans l'entente, de même que les plaintes faisant l'objet de l'entente, ainsi que la contrepartie à verser et les obligations mutuelles que doivent respecter les parties pour sa mise en application.

29La CRTEFP note que le fait que les parties ont signé l'entente le 2 mai 2014 manifestait leur l'intention, à l'issue de la conférence de règlement, de régler leur différend par le biais d'une entente. Or, l'entente était-elle, au moment de sa signature, finale et exécutoire ou conditionnelle? Initialement, elle devait être exécutoire. Les premières lignes de l'entente précisent que les parties acceptent l'entente en guise de règlement final et définitif des trois plaintes susmentionnées. Toutefois, le paragraphe 8 de l'entente a été ajouté à la demande du plaignant et ce paragraphe modifie, dans une certaine mesure, la portée de l'entente. Ce paragraphe précise que l'entente serait nulle et non avenue si le montant stipulé au paragraphe 7 de l'entente n'était pas versé au plaignant. Cependant, le versement de ce montant au plaignant n'est pas facultatif ou optionnel, étant donné que l'intimé s'engage spécifiquement dans l'entente à verser ce montant au plaignant. La clause que l'on retrouve au paragraphe 8 de l'entente ne s'apparente donc pas une clause conditionnelle habituelle, où l'entente négociée devient exécutoire après qu'une condition extérieure à l'entente ait été réalisée. Ce serait le cas d'un contrat de vente d'une maison qui deviendrait exécutoire, par exemple, après que la clause conditionnelle de l'obtention de financement ait été réalisée. Dans ce dernier cas, une tierce partie (non signataire de l'entente) est impliquée dans la réalisation de la clause conditionnelle.

30Ici, toutefois, il n'est pas nécessaire de trancher la question à savoir si l'entente était, au moment de sa signature, finale et exécutoire ou conditionnelle. Ce qui importe, c'est qu'elle lie les parties depuis le 29 mai 2014, date où l'intimé a versé au plaignant le montant convenu. Si l'intimé n'avait pas versé ce montant au plaignant, le plaignant aurait pu se fonder sur ce fait pour faire valoir que l'entente était nulle et non avenue. Toutefois, depuis que l'intimé a versé ce montant au plaignant, le paragraphe 8 de l'entente est devenu théorique. Le protocole d'entente lie donc les parties et constitue un règlement exécutoire.

31Or, le plaignant affirme que même si la CRTEFP conclut que l'entente est exécutoire et qu'elle lie les parties, elle est nulle et non avenue puisque l'intimé a fait preuve de mauvaise foi avant et pendant sa signature et que ceci justifie son annulation. En d'autres mots, il fait valoir que l'entente est viciée puisqu'il y aurait eu, en l'espèce, iniquité, influence indue, contrainte et fausses représentations.

Exigence de négociation de bonne foi

32Le plaignant allègue, en premier lieu, que l'entente est inéquitable puisque le BCP n'a pas tenu compte de ses intérêts légitimes avant et pendant sa signature. Il a expliqué que sa plainte de harcèlement contre le BCP était pendante au moment de la signature de l'entente et que c'est de mauvaise foi que l'intimé a tardé à répondre à cette plainte. Il allègue aussi que c'est de mauvaise fois que l'intimé a omis de lui fournir des informations pertinentes avant la signature de l'entente et que cela a engendré des rapports de force inégaux. Plus précisément, il fait valoir que l'intimé a pris trop de temps pour répondre à une demande d'accès à l'information qu'il a présentée au BCP en novembre 2013. À l'appui de son argument, il a déposé les résultats d'une enquête menée par le Commissariat à l'information (CAI) suite à la plainte qu'il a déposée contre le BCP. Dans son rapport d'enquête, le CAI conclut que le BCP n'a pu démontrer que les prorogations de délai estimées par le BCP pour répondre à sa demande étaient entièrement raisonnables.

33Le plaignant souligne qu'il a, en conséquence, été désavantagé durant les négociations puisqu'il n'avait pas reçu la documentation qu'il avait demandée. Il signale que l'intimé a ainsi contrevenu à l'article 1375 du Code civil du Québec, qui a trait à l'obligation d'agir de bonne foi tant au moment de la naissance de l'obligation qu'à celui de son exécution ou de son extinction. Selon lui, les parties doivent, en vertu de cet article, favoriser une divulgation franche et entière des faits qui peuvent faire varier les conditions de l'entente et mettre à la disposition de l'autre partie les renseignements clés qui lui permettront de prendre une décision éclairée.

34Le plaignant allègue, en deuxième lieu, qu'il a subi une influence indue de la part de l'intimé et que c'est suite à cette influence indue et sous la contrainte qu'il a signé l'entente. Il a affirmé qu'il n'était pas accompagné pendant la conférence de règlement, et qu'il n'a pas réussi à contacter son épouse, ni son avocat, pendant la journée de négociation afin d'obtenir leur rétroaction sur l'offre qui lui était faite. De même, il a expliqué que la perte de son emploi était sur le point de provoquer sa faillite personnelle. Il se sentait donc obligé de conclure l'entente.

35Il allègue, en dernier lieu, que l'intimé lui a sciemment fait des représentations fausses ou trompeuses au sujet de l'une des modalités de l'entente. Pour cette raison, il prétend que son consentement n'était pas libre et éclairé. Une représentation fausse ou trompeuse est une déclaration inexacte au sujet d'un fait qui est important pour inciter d'une manière déloyale l'autre partie à conclure le contrat.

36À l'appui de son argument que l'intimé lui a fait des représentations fausses ou trompeuses, le plaignant a expliqué qu'il a été induit en erreur au sujet de la modalité de l'entente qui prévoit que l'intimé lui remettra deux lettres de recommandation, l'une provenant de Mme Lacroix-Labelle et l'autre de Stephen Burt, Secrétaire adjoint du Cabinet intérimaire. Il s'agit de l'engagement pris par l'intimé au paragraphe 5 de l'entente.

37À l'audience, le plaignant a expliqué qu'il a demandé ces deux lettres de recommandations afin d'en faire bon usage dans le cadre de sa recherche d'emploi, suite à sa mise en disponibilité. Il soutient que l'intimé l'a toutefois intentionnellement laissé tomber dans sa recherche d'emploi lorsque son ancien superviseur au BCP, qui a été contacté par un employeur potentiel pour une référence, lui a donné une référence négative.

38Autrement dit, le plaignant avance que l'intimé l'a intentionnellement induit en erreur en s'engageant à lui remettre ces deux lettres de recommandations positives puisqu'il l'a incité à croire que toutes les références qu'il recevrait du BCP seraient positives. Si le plaignant s'était douté que son ancien superviseur lui donnerait une référence négative dans le cadre d'une vérification de référence, a-t-il expliqué, il n'aurait jamais signé l'entente.

39L'intimé dément toutes les allégations selon lesquelles il y aurait eu iniquité, influence indue, contrainte ou fausses représentations. Il soutient  que l'entente a été conclue de bonne foi et que l'opération n'était ni déraisonnable, ni inadmissible, au regard de la jurisprudence. Il se fonde sur un passage de la décision Van de Mosselaer pour appuyer sa position. Dans cette décision, l'arbitre Love notait que malgré le fait qu'une entente de règlement lie les parties, la CRTEFP détient quand même le pouvoir discrétionnaire de décider qu'une entente ne devrait pas être appliquée s'il s'agit d'une opération déraisonnable. Toutefois, il s'agit d'une norme très élevée. L'arbitre Love notait ce qui suit au paragraphe  42 de la décision:

… [l'ancienne Commission] a un pouvoir discrétionnaire résiduel pour déterminer si l'entente devrait ne pas être appliquée du fait qu'il s'agit d'une opération déraisonnable. Il s'agit d'une norme très élevée qui a fait l'objet d'une observation dans l'affaire MacDonald (supra). Au paragraphe 27, on se réfère dans cette affaire à la cause Stephenson v. Hilti (Can.) Ltd. (1989), 1989 CanLII 191 (NS SC), 29 C.C.E.L. 80 (N.S.S.C.T.D.), qui a résumé le critère à appliquer relativement à une opération déraisonnable :

[…]

Une opération peut être rejetée parce que déraisonnable si la preuve démontre :

  1. l'existence d'une inégalité des positions de négociation attribuable à l'ignorance, au besoin ou à la détresse de la partie la plus faible;
  2. Que la partie la plus forte a indûment usé de sa position pour obtenir un avantage; et
  3. que l'entente conclue est nettement injuste pour la partie la plus faible ou, comme on l'a écrit dans Harry v. Kreutziger, qu'elle est suffisamment incompatible avec les normes sociales de la moralité commerciale qu'elle devrait être annulée.

40La CRTEFP note aussi que la Cour d'appel de la Colombie Britannique, dans l'affaire Harry v. Kreutziger, 1978 CanLII 393, (1978), 95 DLR (3d) 231 (BC CA), a examiné de façon détaillée la question des opérations déraisonnables. Le juge Lambert note, à la p. 241, qu'une opération déraisonnable est, en somme, une transaction qui est tellement déraisonnable qu'elle nécessite l'intervention de la Cour compte tenu de toutes les circonstances entourant la conclusion de l'entente.

41Pour les raisons qui suivent, la CRTEFP ne peut conclure que l'entente était déraisonnable. Tel que noté dans Stephensen, le premier critère à appliquer relativement à une opération déraisonnable est celui de l'existence d'une inégalité des positions de négociation attribuable à l'ignorance, au besoin ou à la détresse de la partie la plus faible. Ici, d'abord, la simple affirmation du plaignant qu'il ignorait les enjeux négociés dans l'entente ne constitue pas une preuve suffisante pour conclure à l'inégalité des positions de négociation attribuable à son ignorance. Selon la preuve au dossier, le plaignant occupait un poste plutôt sénior au sein du gouvernement avant sa mise en disponibilité. Il s'est aussi montré très érudit, savant et cultivé à l'audience.

42Ensuite, bien que le plaignant a affirmé qu'il ne recevait plus son salaire d'économiste et que la perte de son emploi était sur le point de provoquer sa faillite personnelle, il n'a pas présenté d'éléments de preuve pour appuyer ses dires. Son témoignage à lui seul ne permet donc pas de tirer la conclusion qu'il traversait une réelle période de détresse économique.

43Somme toute, d'après le témoignage non contredit de Mme Lacroix-Labelle, le plaignant n'a pas porté à l'attention de cette dernière et des autres personnes présentes à la conférence de règlement qu'il se sentait contraint de signer l'entente ce jour-là, c'est-à-dire le 2 mai 2014, ou qu'il éprouvait un sentiment de détresse.

44Selon la preuve présentée par l'intimé, les parties se sont d'abord rencontrées dans le cadre d'une première conférence de règlement le 17 avril 2014. Mme Lacroix-Labelle et M. Burt représentaient l'intimé ce jour-là. Le plaignant, quant à lui, n'était pas accompagné. Des progrès ont été réalisés dans les négociations au cours de la matinée, mais puisque Mme Lacroix-Labelle et M. Burt n'avaient pas le mandat de conclure une entente comportant une contrepartie financière, la conférence de règlement a avorté aux alentours de midi.

45Mme Lacroix-Labelle a cependant obtenu, par la suite, un nouveau mandat de négociation de la part de l'intimé et elle a donc demandé qu'une nouvelle conférence de règlement soit tenue. Lors de cette deuxième conférence de règlement, qui a été fixée au 2 mai 2014, le plaignant n'était toujours pas accompagné, mais il a indiqué avoir accès à un avocat. Selon Mme Lacroix-Labelle, il régnait une bonne ambiance lors de la conférence, ce qui a permis aux parties de discuter librement des enjeux en question.

46En particulier, Mme Lacroix-Labelle a expliqué que les parties en sont d'abord arrivées à une entente de principe en fin de matinée le 2 mai 2014. Le plaignant a alors précisé devoir consulter son épouse et son avocat avant de conclure l'affaire. Il a, pour cette raison, quitté la salle de conférence aux alentours de midi. Ce dernier a expliqué à l'audience qu'il n'a finalement pas été en mesure de rejoindre, ni son épouse, ni son avocat, au cours de la journée. Il n'a toutefois pas informé l'autre partie de ceci. Les négociations se sont donc poursuivies et les parties en sont arrivées à une entente définitive en fin d'après-midi. Les deux parties ont signé l'entente sur place vers les 16h45 et se sont serré la main, tout en se souhaitant bonne chance.

47Ainsi, rien ne permet de conclure que le plaignant se sentait contraint de signer l'entente ce jour-là ou qu'il éprouvait un sentiment de détresse.

48Pour toutes ces raisons, la CRTEFP conclut que la preuve est insuffisante pour établir qu'il existait une inégalité des positions de négociation, entre l'intimé et le plaignant, attribuable à l'ignorance, les besoins ou à la détresse de ce dernier.

49Cela conduit au deuxième critère à appliquer relativement à une opération déraisonnable, à savoir si l'intimé a indûment usé de sa position, ici, pour obtenir un avantage.

50La CRTEFP ne partage pas l'avis du plaignant que l'intimé a indûment usé de sa position pour l'inciter à signer l'entente afin d'éviter que ses plaintes ne soient entendues. D'abord, la CRTEFP note qu'aucune preuve n'a été apportée par le plaignant pour étayer son allégation que l'intimé a indûment usé de sa position pour lui cacher des renseignements clés qui auraient fait varier les conditions de l'entente s'ils avaient été connus. Il est vrai que la demande d'accès à l'information présentée par le plaignant au BCP en date du 25 novembre 2013 était toujours en cours de traitement au moment de la conférence de règlement au mois de mai. Cependant, aucune preuve probante n'appuie l'argument du plaignant que l'intimé a tardé à lui communiquer des renseignements dans le but de lui cacher certains faits pour l'inciter à signer l'entente. Le rapport produit par le CAI indique que la demande du plaignant a généré un grand nombre de documents, soit 1,310 pages, et que le BCP lui a fait parvenir une réponse finale le 4 septembre 2014.

51Le plaignant se fonde sur un document qu'il a reçu du BCP, un organigramme, pour appuyer sa position que l'intimé lui a caché le fait qu'un poste d'économiste relevait encore du Secrétariat de l'évaluation des renseignements (SÉR) au BCP, au moment où les parties ont conclu l'entente. Il a affirmé qu'il avait été informé, lors de sa mise en disponibilité, que l'équipe du SÉR ne comprendrait plus d'économistes. Il a donc expliqué qu'il n'aurait pas signé l'entente s'il avait su que ce poste d'économiste n'avait pas été aboli.

52M. Burt a cependant clarifié cette question à l'audience. Ce dernier a expliqué que le plaignant n'a pas été induit en erreur au moment de sa mise en disponibilité au sujet des postes d'économistes au sein du SÉR. Il a confirmé que le SÉR n'emploie plus d'économistes dans son équipe puisque le SÉR fait maintenant appel aux experts de d'autres ministères lorsqu'il a besoin de données spécifiques. Il a aussi expliqué que la version de l'organigramme obtenue par le plaignant contenait une mention d'un « EC-05 » à un endroit puisqu'il s'agissait de la classification d'origine d'une personne venue en détachement au BCP travailler sur des questions de politique. Selon M. Burt, l'intimé n'a donc jamais induit le plaignant en erreur au sujet des postes d'économistes au sein du SÉR. La CRTEFP accepte le témoignage de M. Burt selon lequel le plaignant n'a pas été induit en erreur à ce sujet.

53Le plaignant se fonde aussi sur un courriel rédigé le 23 juillet 2014 par un employeur potentiel pour appuyer sa position que l'intimé lui a caché des renseignements clés qui auraient fait varier les conditions de l'entente s'ils les avaient connus. Ce courriel contient un compte-rendu par l'employeur potentiel des commentaires que l'ancien superviseur du plaignant, Michael Kaduck, Directeur, Division Europe, BCP, a fait à son sujet dans le cadre d'une vérification des références. Il ne s'agit toutefois pas d'un courriel dont le BCP avait copie et ce courriel a été rédigé après la signature de l'entente. Il est donc clair que l'intimé n'a pas caché ce document au plaignant au moment de la signature de l'entente.

54Le plaignant fait cependant valoir que ce courriel démontre que l'intimé avait l'intention de l'induire en erreur au sujet des lettres de recommandations. Il a souligné qu'il n'aurait pas signé l'entente en mai 2014 s'il avait su que son ancien superviseur lui donnerait, deux mois plus tard, une référence négative. Il maintient que l'intimé, en s'engageant à lui remettre deux lettres de recommandations, s'est aussi engagé à lui remettre des références positives dans le cadre d'éventuelles vérifications de références.

55Or, il existe une différence entre, d'une part, le fait de remettre des lettres de recommandations à un employé et, d'autre part, le fait de répondre à des questions posées par un employeur potentiel dans le cadre d'une vérification de références. Ici, l'entente n'aborde pas la question des références que d'anciens superviseurs du plaignant au BCP pourraient être appelés à offrir s'ils étaient contactés comme répondants. En d'autres mots, l'intimé ne s'est pas engagé dans l'entente à ne fournir aux prochains employeurs du plaignant que des références positives dans le cadre de vérifications de références. L'intimé s'est plutôt engagé à remettre au plaignant deux lettres de recommandations préparées par deux personnes préalablement identifiées par les parties et il a entièrement rempli son obligation en remettant ces deux lettres au plaignant.

56Ainsi, rien ne permet de conclure que l'intimé a indûment usé de sa position, en l'espèce, pour obtenir un avantage.

57Cela conduit, finalement, au troisième critère à appliquer relativement à une opération déraisonnable, à savoir si l'entente conclue est tellement injuste pour le plaignant ou tellement incompatible avec les normes sociales de la moralité commerciale qu'elle devrait être annulée. En d'autres mots, tel que mentionné dans la décision Harry, la transaction est-elle « tellement déraisonnable qu'elle nécessite l'intervention de la Cour compte tenu de toutes les circonstances entourant la conclusion de l'entente »?

58La CRTEFP estime que la réponse à cette question est non. Aucune preuve probante n'appuie cette allégation que l'entente est nettement injuste ou incompatible avec les normes sociales actuelles.

59De prime abord, la CRTEFP note qu'aucune preuve n'a été apportée par le plaignant de ce qui constituerait une indemnité juste, par rapport à une indemnité injuste, en l'espèce. Par conséquent, rien ne permet à la CRTEFP de tirer la conclusion que l'indemnité qui lui a été accordée était injuste. En fait, la CRTEFP est d'avis que l'entente ne lui était pas défavorable au regard des différents gains qu'elle lui a apportés. La CRTEFP juge donc que le plaignant n'a pas établi que le règlement était nettement injuste pour lui.

60Selon le plaignant, l'entente est également illicite ou immorale parce qu'elle prévoit que le plaignant, en signant l'entente, renonce « à intenter devant quelques cours ou organismes que ce soit, tout recours, appel, grief ou plainte contre sa Majesté du Chef du Canada… en raison des circonstances liées aux différentes plaintes qui font l'objet du présent règlement».  

61En vertu de cette modalité, qu'il juge illicite ou immorale, le plaignant a renoncé à toutes voies de recours au sujet des questions qui font l'objet du règlement. Il s'agissait d'une façon pour l'intimé de s'assurer que le règlement exécutoire ne ferait pas l'objet d'un jugement ultérieur par une cour ou un tribunal. Le plaignant n'a pas présenté de preuve démontrant qu'il s'agit d'une clause injuste ou abusive.

62Selon l'intimé, il s'agit en fait d'une clause habituelle qui protège le caractère définitif d'une entente. Dans l'affaire Baker, auparagraphe 36, l'ancien Tribunal notait justement que « [l]e caractère définitif d'une entente revêt une très grande importance pour les parties ».

63La CRTEFP conclut donc qu'il n'a pas été démontré que l'entente est incompatible avec les normes sociales actuelles ou que la transaction en jeu en est une qui est « tellement déraisonnable qu'elle nécessite l'intervention de la Cour ».

64La CRTEFP rejette, pour toutes ces raisons, l'argument du plaignant que l'intimé a employé des méthodes malhonnêtes, comme l'influence indue, la contrainte, les fausses représentations, ou un autre type de comportement inadmissible, afin d'obtenir son consentement à l'entente. La preuve objective montre plutôt qu'une entente légitime a bel et bien été conclue en mai 2014, mais que le plaignant en est arrivé à la conclusion, un peu plus de deux mois plus tard, soit lorsqu'il a pris connaissance de la référence donnée par M. Kaduck, que l'entente ne répondait plus entièrement à ses besoins.

Obligation d'exécution de bonne foi

65Dans l'alternative, le plaignant fait valoir que l'intimé a violé l'entente puisqu'il n'a pas respecté la condition implicite d'agir de bonne foi énoncée dans la décision de la Cour suprême dans l'affaire Bhasin c. Hrynew, 2014 CSC 71. Dans cette affaire, la Cour suprême a énoncé que l'exécution du contrat comporte une obligation d'honnêteté.

66Le plaignant avance, en se fondant sur cette jurisprudence, que l'intimé a violé son obligation implicite d'agir de bonne foi. Selon lui, son ancien supérieur, M. Kaduck, était lié par les termes de l'entente, même s'il n'était pas un signataire de l'entente, et il n'avait pas le droit de lui donner une référence négative. Autrement dit, il estime qu'il avait un intérêt contractuel légitime de s'attendre à recevoir uniquement de bonnes références de la part de son ancien employeur.

67L'intimé dément l'allégation qu'il a failli à sa tâche d'exécuter ses obligations contractuelles de bonne foi. Il prétend avoir exécuté ses obligations contractuelles de manière honnête et raisonnable.

68La preuve démontre qu'une fois que l'entente a été conclue, Mme Lacroix-Labelle a immédiatement pris des mesures pour respecter sa mise en application. À l'audience, elle a donné les détails des démarches qu'elle a entreprises auprès de différents intervenants et une série de courriels appuient ses dires.

69Tel que mentionné auparavant, la CRTEFP ne souscrit pas à l'argument du plaignant qu'il avait un intérêt contractuel légitime de s'attendre à recevoir uniquement des références positives de la part de son ancien employeur. D'une part, son ancien superviseur, M. Kaduck, n'était pas un signataire de l'entente et il n'était pas au fait des modalités de l'entente puisque celle-ci était confidentielle. D'autre part, M. Kaduck a seulement fourni une référence pour le plaignant à sa demande puisque ce dernier avait donné son nom comme référence à un employeur potentiel. M. Kaduckn'avait toutefois pas été averti qu'il serait contacté comme répondant pour le plaignant puisque ce dernier n'avait pas pris la peine de le prévenir qu'il avait donné son nom dans le cadre d'une vérification des références. M. Kaduck a quand même fourni la référence demandée. Enfin, la question des références données dans le cadre d'une vérification de références ne faisait pas partie des modalités négociées par les parties. Tel que mentionné auparavant, il s'agit d'une question indépendante de la question des lettres de recommandations, qui, elle, fait partie des modalités négociées dans l'entente.

70À l'audience, M. Kaduck a expliqué qu'il a été contacté par un employeur potentiel qui lui a posé des questions au sujet du rendement passé du plaignant. Il a répondu franchement aux questions en offrant des exemples de son comportement au travail. En ce faisant, il a donc décrit les forces et faiblesses du plaignant au travail. La CRTEFP estime que M. Kaduck a agi comme il se doit puisque son rôle comme répondant était de répondre franchement et honnêtement aux questions.

71La CRTEFP conclut donc que l'intimé n'a pas agi de mauvaise foi en exécutant ses obligations contractuelles et qu'il n'a nullement violé l'entente.

Conclusion

72La CRTEFP conclut qu'une entente exécutoire lie les deux parties et que l'intimé a respecté toutes les modalités de l'entente. Plus précisément, la preuve établit que l'intimé a rempli son engagement énoncé au paragraphe 5 de l'entente en ce qui concerne les lettres de recommandation. Il a, de même, preuve à l'appui, accordé au plaignant l'avantage énoncé au paragraphe 6 de l'entente et remis au plaignant la somme convenue au paragraphe 7 de l'entente. En conséquence, la CRTEFP n'est plus saisie de la plainte et n'a pas compétence pour l'entendre.

Décision

73La CRTEFP accueille l'objection de l'intimé. L'entente valide et exécutoire entre les parties fait entièrement obstacle à la tenue d'une audience relativement à cette plainte. La CRTEFP met donc fin aux présentes procédures et ferme ce dossier.

Nathalie Daigle
Commissaire

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