Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La plaignante avait conclu une entente de règlement avec son agent négociateur concernant une plainte pour manquement au devoir de représentation équitable – la plaignante a allégué que l'agent négociateur ne se soumettait pas à l’entente de règlement – la Commission a conclu que l’agent négociateur avait respecté les termes de l'entente de règlement et que c’était plutôt la plaignante qui n’avait pas respecté les termes de l'entente de règlement en ne retirant pas sa plainte – la réparation appropriée était d'ordonner la fermeture du dossier. Demande rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique et Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date: 20150611
  • Dossier: 561-34-497
  • Référence: 2015 CRTEFP 54

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique


ENTRE

JOËLLE FILLET

plaignante

et

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

défenderesse

Répertorié
Fillet c. Alliance de la Fonction publique du Canada

Affaire concernant une plainte visée à l'article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Steven B. Katkin, une formation de la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique
Pour la plaignante:
Elle-même
Pour la défenderesse:
Patricia Harewood, Alliance de la Fonction publique du Canada
Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
le 16 décembre 2013

I. Affaire devant la Commission

1 Le 25 janvier 2011, Joëlle Fillet (la « plaignante »), alors au service de l'Agence du revenu du Canada (l'« employeur »), a déposé auprès de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (l'« ancienne Commission ») une plainte visée à l'article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2, la « LRTFP ») alléguant que son agent négociateur, l'Alliance de la Fonction publique du Canada (la « défenderesse »), avait violé l'obligation de la représenter équitablement conformément à l'article 187.

2 Le 4 août 2011, à la suite d'une séance de médiation, les parties ont conclu une entente de règlement à l'égard de la plainte (l'« entente »), dans laquelle la plaignante a donné quittance à la défenderesse et s'est engagée à retirer sa plainte.

3 Par lettre en date du 23 juillet 2012, la plaignante a avisé l'ancienne Commission qu'elle considérait que l'entente n'avait pas été respectée par la défenderesse et que, par conséquent, elle ne retirait pas sa plainte. La plaignante a souligné en quoi la défenderesse aurait manqué à son obligation de représentation équitable.

4 Une décision préliminaire a été rendue dans Fillet c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2013 CRTFP 43 (Fillet 2013). Cette décision traitait de la compétence d'une formation de l'ancienne Commission pour rendre une décision concernant une allégation voulant que les modalités d'une entente de règlement portant sur une plainte de pratique déloyale n'aient pas été respectées et, le cas échéant, pour ordonner une mesure de réparation. L'ordonnance de cette décision se lit comme suit :

Ordonnance

[17]    Je déclare que les parties ne contestent pas que l'entente de règlement du 4 août 2011 est finale et exécutoire.

[18]    Je déclare en outre qu'une formation de la Commission a la compétence de décider d'une allégation voulant que les modalités d'une entente de règlement portant sur une plainte de pratique déloyale n'aient pas été respectées.

[19] Je déclare également qu'une formation de la Commission a compétence pour ordonner la mesure de réparation qu'elle juge indiquée dans les circonstances.

[20]    Cette affaire sera mise au rôle des audiences afin de déterminer si la défenderesse a manqué aux modalités de l'entente de règlement du 4 août 2011 et, le cas échéant, pour déterminer la mesure de réparation indiquée dans les circonstances.

[Le passage en caractères gras et souligné l'est dans l'original]

5 Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (la « nouvelle Commission »), qui remplace l'ancienne Commission et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no2 sur le plan d'action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l'article 393 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013, une instance engagée au titre de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2) avant le 1er novembre 2014 se poursuit sans autres formalités en conformité avec la LRTFP, dans sa forme modifiée par les articles 365 à 470 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013. De plus, en vertu de l'article 395 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013, le commissaire de l'ancienne Commission saisi de cette affaire avant le 1er novembre 2014 a les mêmes attributions qu'une formation de la nouvelle Commission.

II. Résumé de la preuve

6 La plaignante a d'abord présenté des éléments de preuve à l'appui de ses allégations selon lesquelles la défenderesse aurait enfreint les modalités de l'entente. Ensuite, la défenderesse a produit des éléments de preuve pour répondre aux allégations de la plaignante et à l'appui de sa prétention voulant que les modalités de l'entente auraient été respectées sauf en ce qui concerne le retrait de la plainte, dont la mise en œuvre relève uniquement de la plaignante. Les témoins de la défenderesse étaient David Girard, agent aux griefs et à l'arbitrage de la défenderesse, et Érik Gagné, agent des relations de travail du Syndicat des employé-e-s de l'impôt (SEI), un des éléments constitutifs de la défenderesse. Les parties ont déposé en preuve 23 documents.

7 L'entente a été signée par la plaignante et M. Girard. La plaignante a affirmé qu'elle était lucide et compétente lors de la signature de l'entente et qu'elle avait eu l'occasion d'en faire la lecture avant de la signer. L'entente a été déposée en preuve, de consentement, et se lit comme suit :

[…]

Les parties ont décidé de recourir à la médiation pour résoudre la plainte CRTFP 561-34-497 soumise par Joëlle Fillet. Les parties conviennent que tous les aspects de la présente affaire ont été réglés à leur satisfaction aux conditions énoncées ci-dessous.

Les parties conviennent de ce qui suit :

L'Alliance de la fonction publique, sous réserve de quelque position qu'elle pourrait vouloir adopter dans les cas futurs mettant en cause des questions ou circonstances semblables, convient par les présentes de ce qui suit :

  1. de réactiver le grief no 2010-1280-70071825 et de représenter la plaignante au troisième et quatrième palier de grief. Le dossier sera par la suite transmis à la section de la représentation pour analyse et renvoi à l'arbitrage. L'Alliance s'engage, en cas de refus de renvoi à l'arbitrage, de fournir un avis écrit et détaillé des motifs du non-renvoi. La plaignante aura l'occasion de fournir son point de vue avant la décision finale de l'Alliance;
  2. Le représentant de l'Alliance attitré au dossier sera un membre du personnel du Syndicat des employés-ées de l'Impôt. La première rencontre avec la plaignante et chacun des représentants aura lieu en présence de David Girard, agent aux griefs et à l'arbitrage.
  3. de demander un amendement du grief afin d'y inclure la mention suivante dans le libellé :
    • « ainsi que l'abus de droit dont j'ai été victime lors du non-renouvellement de mon contrat »
  4. de demander un amendement du grief afin d'y inclure la mention suivante dans le libellé :
    • « Je demande que l'employeur annule sa décision de ne pas prolonger mon contrat et qu'aucune autre mesure ne lui soit substituée »
    • « Je demande que l'employeur me réintègre dans mes fonctions, et ce, rétroactivement au 14 mai 2010 »
  5. de faire des représentations auprès de l'agence de revenu du Canada afin d'obtenir des explications sur les motifs de refus de la candidature de la plaignante aux divers concours sur lesquels elle a postulé entre février 2010 et le 4 août 2011;

Joëlle Fillet convient par les présentes de ce qui suit :

  1. de retirer la plainte 561-34-497;
  2. libère de toute responsabilité l'Alliance de la fonction publique du Canada, ses servants et ses représentants à l'égard des plaintes, demandes ou autres recours découlant du présent litige;

Les parties conviennent par les présentes de ce qui suit :

  1. de ne pas divulguer la teneur des présentes conditions de règlement sauf pour des raisons administratives ou juridiques;
  2. la présente entente constitue un règlement total et final des questions et conditions spécifiques associées à la plainte de la fonctionnaire et ne crée aucun précédent.

[…]

8 La plaignante allègue que la défenderesse n'aurait pas respecté les clauses 1, 2, 3, 4 et 5 de l'entente. Je traiterai de chacune de ces allégations séparément.

A. Allégation de non-respect de la clause 1 de l'entente

1. Réactivation du grief individuel de la plaignante

9 Le premier volet de la clause 1 de l'entente est l'engagement de la défenderesse à réactiver le grief individuel de la plaignante. Dans un courriel envoyé le 18 août 2011, à 13 h 10, M. Girard a avisé la plaignante qu'elle serait représentée au troisième palier de la procédure applicable par Bill Blair, vice-président régional de la défenderesse, et que ce dernier se chargerait de faire réactiver son grief et de demander de modifier ledit grief.

10 Dans un courriel à l'employeur envoyé le 19 août 2011, à 8 h 30, et dans lequel M. Girard est identifié comme ayant reçu copie, M. Blair a mentionné que le grief de la plaignante était en attente d'une présentation au troisième palier de la procédure applicable aux griefs individuels et qu'il voulait modifier le grief en y ajoutant certains éléments, tel qu'il l'a indiqué dans le même courriel.

11 Dans un courriel à M. Blair envoyé le même jour, à 10 h 14, l'employeur l'a informé que la plaignante s'était représentée elle-même au troisième palier de la procédure applicable aux griefs individuels par voie de soumissions écrites et que l'employeur lui avait fourni sa décision à ce palier le 9 mai 2011. La plaignante a accusé réception de cette décision le 18 mai 2011. À 13 h 9, M. Girard a fait parvenir un courriel à la plaignante lui demandant si l'information reçue de l'employeur était véridique et, dans l'affirmative, de lui fournir les documents pertinents et de l'informer si elle avait présenté le grief au quatrième palier. À 15 h 6, la plaignante a répondu à M. Girard qu'elle avait suivi les conseils d'une avocate dont elle avait retenu les services et n'avait pas présenté son grief au quatrième palier. Elle lui a demandé si cela causerait un problème.

12 Toujours le 19 août 2011, dans un courriel envoyé à 15 h 41, M. Girard a avisé la plaignante de ce qui suit :

[…]

Tout d'abord, j'ai bien reçu les documents que tu m'as transmis. Il s'agit d'informations que je ne connaissais pas auparavant et dont nous n'avions pas discuté en médiation. Je vais regarder ce que je peux faire maintenant, mais c'est certain que ça change certaines choses. Selon les informations échangées en médiation, la dernière action que tu avais faite sur le dossier était la transmission au 3e palier.

L'employeur ne répondra pas 2 fois au troisième palier et étant donné que tu n'as pas renvoyé le dossier au quatrième palier, le grief est maintenant clairement hors délai. Je vais tenter, après avoir consulté Éric [sic] de voir quelles sont les avenues possibles. Il me reste encore un « as » ou deux dans la manche.

[…]

13 Dans son témoignage, la plaignante a reconnu que la défenderesse avait réactivé son grief individuel. Elle a aussi reconnu que le 4 août 2011, elle savait que la défenderesse n'avait pas présenté son grief au quatrième palier de la procédure applicable. En ce qui a trait à l'avocate dont elle avait retenu les services, la plaignante a maintenu qu'elle en avait fait part à M. Girard pendant la médiation et qu'elle l'avait mentionné dans un courriel qu'elle lui avait envoyé le 9 septembre 2011. Selon elle, M. Girard ne lui a pas posé de questions à cet égard et lui a dit que la défenderesse allait procéder au quatrième palier. Elle a conclu que ce qu'elle avait fait avec son avocate n'était pas correct.

14 Selon M. Girard, il n'aurait jamais signé l'entente selon le libellé de la clause 1 si la plaignante lui avait dit qu'elle était représentée par une avocate dont elle avait retenu les services dans le cadre des procédures au troisième palier de la procédure applicable aux griefs individuels. S'il l'avait su, il aurait posé les mêmes questions à la plaignante, soit ce qui en était et si le grief avait été présenté au quatrième palier, et il lui aurait demandé une copie des documents. De plus, il n'aurait pas écrit le courriel du 18 août 2011 à la plaignante. M. Girard a ajouté que lorsqu'un grief traite de l'interprétation d'une convention collective, l'approbation de l'agent négociateur est requise. Le grief de la plaignante contestait le non-renouvellement de sa nomination pour une durée déterminée et alléguait que l'employeur avait discriminé contre elle. M. Girard a témoigné qu'il avait appris entre le 18 août 2011, à 13 h 10, et le 19 août 2011, à 13 h 9, que la plaignante avait été représentée par son avocate au troisième palier.

15 M. Gagné a témoigné qu'il avait pris connaissance de l'entente après qu'elle ait été signée. Il n'était pas au courant que la plaignante avait été représentée par une avocate dont elle avait retenu les services au troisième palier de la procédure applicable aux griefs individuels. Il a alors communiqué avec M. Blair pour faire réactiver le grief de la plaignante au troisième palier.

16 Dans un courriel à l'employeur daté du 9 septembre 2011, M. Blair a demandé une prolongation du délai pour présenter le grief individuel de la plaignante au quatrième palier de la procédure applicable au motif que la défenderesse ignorait que la plaignante avait présenté son grief au troisième palier. Par courriel en date du 19 septembre 2011, l'employeur a consenti à la présentation du grief au quatrième palier, mais il a souligné que la question du délai de présentation serait traitée dans sa décision à ce palier.

2. Représentation

17 Le deuxième volet de la clause 1 de l'entente était la représentation de la plaignante aux troisième et quatrième paliers de la procédure applicable aux griefs individuels. Puisque la plaignante avait déjà été représentée par une avocate dont elle avait retenu les services au troisième palier, à l'insu de la défenderesse, il s'agit maintenant d'examiner l'engagement de la défenderesse de représenter la plaignante au quatrième palier.

18 La plaignante a déposé en preuve une copie d'une Formule de transmission des griefs, qu'elle a signée le 12 octobre 2011. La formule a aussi été signée par M. Blair, au nom de la défenderesse, qui a accepté de représenter la plaignante au quatrième palier de la procédure applicable aux griefs individuels.

19 M. Gagné a témoigné qu'il avait présenté le grief individuel de la plaignante au quatrième palier de la procédure applicable le 6 janvier 2012, ce qui a été confirmé par sa lettre à la plaignante du 12 janvier 2012.

20 La plaignante n'a pas contesté le fait que M. Gagné avait présenté son grief au quatrième palier de la procédure applicable aux griefs individuels. Dans son propre témoignage, ainsi que lors du contre-interrogatoire de M. Gagné, la plaignante a principalement porté son attention sur la question de savoir si elle avait autorisé M. Gagné à utiliser le résumé qu'elle avait fait de son grief individuel aux fins de la représenter au quatrième palier. Selon la plaignante, lors d'une réunion avec MM. Gagné et Girard, le 5 décembre 2011, pour discuter de son dossier, elle n'a pas pu l'autoriser à utiliser son résumé, parce que M. Gagné n'a pas pris les documents de la main propre de la plaignante, disant qu'il avait tout le dossier.

21 M. Gagné a témoigné qu'il avait eu connaissance du résumé que la plaignante avait fait de son grief individuel lors de la réunion du 5 décembre 2011, mais qu'il ne se souvenait pas s'il en avait reçu une copie avant ou pendant la rencontre. M. Gagné a dit que le résumé contenait tous les faits allégués par la plaignante et qu'il avait demandé à la plaignante si elle s'opposait à ce qu'il le dépose comme preuve au quatrième palier de la procédure applicable aux griefs individuels. Lors de la même réunion, la plaignante ne lui a pas demandé s'il aurait recours à d'autres documents. M. Gagné a témoigné que lors de sa représentation de la plaignante au quatrième palier, il avait remis une copie du résumé au représentant de l'employeur et qu'ils en avaient discuté ensemble.

3. Analyse du dossier de la plaignante

22 Dans le dernier volet de la clause 1 de l'entente, la défenderesse s'est engagée à transmettre le grief individuel de la plaignante à sa section de la représentation pour analyse et renvoi à l'arbitrage de grief. Si la défenderesse refusait le renvoi à l'arbitrage de grief, elle s'engageait à fournir à la plaignante un avis précisant les motifs de cette décision. Il était prévu que la plaignante aurait l'occasion de fournir son point de vue avant la décision définitive de la défenderesse.

23 Le 1er février 2012, l'employeur a rejeté le grief individuel de la plaignante au quatrième palier de la procédure applicable et a transmis sa décision à la plaignante par lettre en date du 23 février 2012. Les motifs du rejet étaient que le grief avait été présenté au quatrième palier le 13 octobre 2011, soit près de cinq mois suivant la décision au troisième palier, laquelle était datée du 18 mai 2011, et que, par conséquent, la présentation du grief au quatrième palier était hors délai. Le grief a aussi été rejeté sur le fond puisque l'employeur était satisfait que la gestion avait agi de bonne foi dans le non-renouvellement de la nomination pour une durée déterminée de la plaignante et qu'il n'y avait pas eu de discrimination à son égard. Par lettre à la plaignante datée du 27 février 2012, M. Gagné lui a aussi transmis une copie de la décision rendue au quatrième palier ainsi qu'une formule d'avis de renvoi à l'arbitrage de grief qu'elle devait compléter si elle désirait que son grief soit analysé par la section de la représentation de la défenderesse. La plaignante a rempli la formule et l'a transmis à M. Gagné le 28 février 2012.

24 L'analyse du grief individuel de la plaignante a été faite par une analyste aux griefs et à l'arbitrage de la défenderesse, Nicole Brazeau, et a été transmise à M. Gagné, la plaignante et M. Girard le 26 avril 2012. À la suite de l'évaluation du dossier, Mme Brazeau a recommandé que le grief ne soit pas renvoyé à l'arbitrage de grief. L'analyse comprenait 9 pages auxquelles étaient annexées 4 pages d'extraits de la LRTFP et 8 pages de résumés de décisions d'arbitrage de griefs sous le régime de la LRTFP concernant le non-renouvellement de la nomination pour une durée déterminée. Les points soulevés par la plaignante dans le résumé qu'elle avait fait de son grief ont été pris en considération dans l'analyse.

25 La plaignante a eu l'occasion de discuter avec Mme Brazeau avant que l'analyse soit complétée. Après réception de l'analyse, le 26 avril 2012, la plaignante a écrit un courriel à Mme Brazeau le 29 avril 2012 dans lequel elle a indiqué : « […] Après lecture de votre lettre, […] cette dernière semble conforme à notre discussion […] ».

26 La plaignante a témoigné que M. Girard lui avait promis de renvoyer son grief individuel à l'arbitrage de grief. Selon M. Girard, il ne pouvait pas promettre qu'un grief soit renvoyé à l'arbitrage de grief puisque, dans de tels cas, la procédure de la défenderesse prévoit qu'un analyste aux griefs et à l'arbitrage prenne la décision à la suite d'une évaluation du dossier. Il a dit qu'il en avait discuté avec la plaignante lors de la médiation pour ne pas créer de fausses attentes.

27 M. Gagné a dit qu'il était en accord avec l'analyse du grief de la plaignante et qu'il la trouvait approfondie et complète. Selon lui, la décision de l'analyste est maintenue à moins qu'il y ait une nouvelle preuve ou un changement dans les faits.

B. Allégation de non-respect de la clause 2 de l'entente

28 Dans son témoignage, la plaignante a reconnu que la rencontre avec MM. Girard et Gagné avait eu lieu le 5 décembre 2011.

C. Allégation de non-respect des clauses 3 et 4 de l'entente

29 Dans un courriel adressé à l'employeur le 19 août 2011, M. Blair a demandé à l'employeur d'amender le grief individuel de la plaignante au troisième palier de la procédure applicable en reproduisant textuellement les modifications souhaitées contenues aux clauses 3 et 4 de l'entente. M. Gagné a dit que la demande de modifications faisait aussi partie de ses représentations au quatrième palier. Dans un courriel à la plaignante daté du 28 février 2012, M. Gagné a écrit ce qui suit : « […] Lors de ma présentation, j'ai sollicité que le libellé de ton grief soit modifié. La directrice adjointe a refusé de modifier le libellé pour raisons administratives […] » À cet égard, le 24 janvier 2012, l'employeur a envoyé un courriel à M. Gagné l'informant que sa pratique était de ne pas modifier le libellé d'un grief au quatrième palier. La plaignante n'a pas contredit cette preuve de la défenderesse.

D. Allégation de non-respect de la clause 5 de l'entente

30 Dans un courriel du 24 avril 2012, M. Blair a demandé à l'employeur les explications mentionnées à la clause 5 de l'entente. Le même jour, l'employeur a répondu comme suit :

[Traduction]

Mme Fillet n'a pas reçu d'offre de nomination pour une durée déterminée durant l'année au cours de laquelle son nom était inscrit sur la liste de rappel pour les raisons suivantes :

Nous avions 6 employés nommés pour une durée déterminée venant de la VDPE [Vérification des données et programmes d'évaluation] -  et rémunérés par la VDPE. Cela a de toute évidence eu une incidence sur nos besoins et, par conséquent, sur notre embauchage ou absence d'embauchage.

Nous n'avions aucune exigence opérationnelle d'embaucher tous ceux dont le nom figurait sur la liste.

J'estime important de souligner qu'aucune nomination pour une durée déterminée n'a été offerte à d'autres personnes dont le nom figurait sur la liste de rappel - Mme Fillet n'est pas la seule à avoir été touchée.

[…]

31 La plaignante a dit qu'elle n'était pas satisfaite de l'explication de l'employeur contenue dans la lettre que lui a adressée M. Gagné le 27 février 2012. Entre autres, cette lettre expliquait que le bassin d'employés qualifiés avait pris fin le 14 mai 2011 et que, par conséquent, le nom de la plaignante ne figurait plus sur la liste de rappel. La plaignante a dit qu'elle avait demandé à M. Gagné d'aller plus loin.

32 M. Gagné a témoigné qu'il avait demandé à M. Blair de poser les questions à l'employeur, puisque selon la hiérarchie établie, c'est M. Blair qui traite avec les personnes-ressources de l'employeur. M. Gagné ne traite qu'avec les personnes qui représentent l'employeur au quatrième palier de la procédure applicable aux griefs individuels.

33 La plaignante ne savait pas pourquoi sa candidature n'était pas retenue dans le cadre des concours. Selon elle, lors de la médiation, M. Girard lui a promis d'obtenir des informations, mais il ne l'a pas fait. Par ailleurs, la plaignante a reconnu que cela ne faisait pas partie de l'entente. M. Girard a témoigné que, au cours de son emploi auprès de la défenderesse, jamais il ne s'est engagé à faire quoi que ce soit dans une entente écrite ou n'a fait de promesses verbales. Il n'a pas fait de promesse à la plaignante, mais lui a plutôt dit qu'il essaierait.

III. Résumé de l'argumentation

A. Pour la plaignante

34 La plaignante a fait valoir qu'au début elle faisait confiance à la défenderesse, mais qu'elle ne se sentait pas appuyée ou dirigée. Selon elle, certaines choses ont été faites par la défenderesse et d'autres pas du tout ou à moitié. La plaignante a avancé que la défenderesse n'avait pas respecté les clauses 4 et 5 de l'entente et que, pour cette raison, elle devrait être dédommagée.

B. Pour la défenderesse

35 La défenderesse a plaidé qu'elle n'avait pas violé l'entente. Le délai de présentation du grief individuel de la plaignante au quatrième palier de la procédure applicable n'est aucunement la faute de la défenderesse, mais relève plutôt de la responsabilité de l'avocate dont la plaignante avait retenu les services à l'insu de la défenderesse.

36 La défenderesse a présenté le grief individuel de la plaignante au quatrième palier de la procédure applicable et a fait une analyse étoffée des chances de succès à l'arbitrage de grief et à l'égard de laquelle la plaignante avait eu l'occasion de faire ses commentaires.

37 Lors de ses représentations au quatrième palier de la procédure applicable aux griefs individuels, M. Gagné a fourni à l'employeur une copie du résumé que la plaignante avait fait de son grief. Bien que la plaignante ait voulu que M. Gagné aille au-delà de ce qu'elle avait écrit, la défenderesse a avancé qu'elle n'avait aucune obligation de le faire.

38 Concernant les modifications que la plaignante voulait apporter à son grief individuel, la défenderesse a fait valoir que la demande avait d'abord été faite par M. Blair dans son courriel du 19 août 2011 et ensuite par M. Gagné lors des représentations au quatrième palier de la procédure applicable. La défenderesse a plaidé qu'elle n'avait pas d'obligation de résultat.

39 En ce qui a trait à la clause 5 de l'entente, la défenderesse a fait valoir que la plaignante avait témoigné qu'elle n'était pas satisfaite des réponses qu'elle avait reçues. Selon la défenderesse, elle a respecté la clause 5 par les questions posées par M. Blair et la réponse de l'employeur.

40 À l'appui de ses arguments, la défenderesse a cité Bouchard c. Lahaie et al., 2013 CRTFP 143.

IV. Motifs

41 Le paragraphe 15 de Fillet 2013 se lit en partie comme suit :

[…] lorsque les parties à une plainte ont conclu une entente finale et exécutoire en règlement de cette plainte, il n'y a plus lieu d'examiner le fonds de la plainte. Quand une partie allègue le non-respect de l'entente de règlement, la question est plutôt de savoir si les modalités de l'entente ont été enfreintes et, dans l'affirmatif, quelle mesure de réparation est indiquée pour remédier à cette infraction. […]

42 Tel qu'il est indiqué à l'ordonnance de Fillet 2013, les parties ne contestent pas que l'entente du 4 août 2011 est finale et exécutoire.

43 La plaignante a admis avoir retenu les services d'une avocate pour la représenter au troisième palier de la procédure applicable aux griefs individuels à l'insu de la défenderesse. La plaignante a reconnu que la défenderesse avait réactivé son grief. De plus, elle n'a pas contesté que M. Gagné avait présenté son grief au quatrième palier. Cela est suffisant pour conclure que la défenderesse a respecté cette partie de la clause 1 de l'entente.

44 Le point de contestation de la plaignante, à savoir si elle avait autorisé M. Gagné à utiliser au quatrième palier de la procédure applicable aux griefs individuels le résumé qu'elle avait fait de son grief, ne m'aide en rien à décider si la défenderesse a omis de respecter la clause 1 de l'entente et je n'ai donc pas à me prononcer là-dessus.

45 En ce qui a trait à l'avis écrit et détaillé des motifs de la défenderesse pour refuser de renvoyer le grief individuel de la plaignante à l'arbitrage de griefs, je considère que l'analyse faite par Mme Brazeau était approfondie et appuyée sur la législation applicable ainsi que la jurisprudence. La plaignante a eu l'occasion de fournir ses commentaires avant la prise de la décision de non-renvoi.

46 Selon la preuve, je considère que la défenderesse a respecté la clause 1 de l'entente.

47 La plaignante a reconnu que la clause 2 de l'entente avait été respectée par la défenderesse.

48 Quant aux clauses 3 et 4, la demande de modifications a été faite par M. Blair dans son courriel à l'employeur du 19 août 2011. De plus, cette demande a aussi fait partie des représentations qu'a faites M. Gagné au quatrième palier de la procédure applicable aux griefs individuels. Comme cette preuve n'a pas été contredite par la plaignante, je conclus que la défenderesse a respecté les clauses 3 et 4 de l'entente.

49 Concernant la clause 5 de l'entente, la plaignante n'était pas satisfaite des explications fournies par l'employeur à la suite de la demande de M. Blair dans son courriel du 24 février 2012, et transmise à la plaignante par M. Gagné le 27 février 2012. De l'avis de la plaignante, M. Gagné aurait dû pousser plus loin. Toutefois, la clause 5 ne fait pas état du niveau de représentation que la défenderesse s'est engagée de faire. La demande d'explications a été faite et l'employeur a fourni ses explications. La défenderesse n'était pas obligée d'en faire plus en vertu de la clause 5.

50 Enfin, selon la plaignante, lors de la médiation, M. Girard lui aurait promis d'obtenir plus d'informations, mais ne l'a pas fait. M. Girard a dit qu'il n'avait pas fait de promesse à cet égard, mais qu'il essaierait d'obtenir plus d'informations de la part de l'employeur. De toute façon, un tel engagement ne fait pas partie de l'entente. À cet égard, le paragraphe 33 de Vogan c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2004 CRTFP 159, est à propos :

33 Lors d'une séance de médiation, les discussions portent souvent sur divers scénarios. Les parties ont aussi la possibilité d'échanger de l'information sur des questions qu'elles estiment importantes. Les parties ne s'entendent pas nécessairement sur tous les points discutés. En cas de divergence entre les parties sur ce qui a été convenu au cours de la médiation, elles peuvent se reporter au texte de l'entente.

51 Je suis donc d'avis que l'ensemble de la preuve a démontré que la défenderesse a respecté les clauses 1, 2, 3, 4 et 5 de l'entente et que c'est plutôt la plaignante qui n'a pas respecté son engagement à retirer sa plainte, consigné à la clause 6 de l'entente.

52 Pour ces motifs, la Commission rend l'ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

53 Je déclare que la défenderesse a respecté les termes des clauses 1, 2, 3, 4 et 5 de l'entente.

54 De plus, je déclare que la plaignante n'a pas respecté son engagement à retirer sa plainte, consigné à la clause 6 de l'entente.

55 J'ordonne la fermeture de ce dossier.

Le 11 juin 2015.

Steven B. Katkin,
une formation de la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.