Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La fonctionnaire s’estimant lésée a allégué que l’employeur n’avait pas appliqué correctement la Directive sur la réinstallation intégrée (la « Directive ») du Conseil national mixte, en ce qui concerne sa réinstallation – elle a allégué que l’employeur lui avait fait perdre une occasion d’acheter une résidence à un meilleur prix, qu’il lui avait refusé le droit de reporter l’inscription de sa copropriété afin qu’elle puisse bénéficier d’un marché plus favorable et qu’il devrait lui rembourser les dépenses liées à un certain nombre d’inspections de résidence – à l’audience, l’employeur a fourni une liste d’ inspections de résidence pour lesquelles il était prêt à rembourser la fonctionnaire s’estimant lésée, sous toutes réserves – la fonctionnaire s’estimant lésée a décidé d’agir de façon proactive lorsqu’elle a appris qu’elle était la candidate reçue à un concours et elle a commencé à chercher une résidence avant d’avoir obtenu toutes les autorisations en vertu de la Directive – elle a présenté une offre d’achat sur une résidence, qui était conditionnelle à ce qu’elle obtienne l’autorisation de réinstallation à une date précise – lorsque l’autorisation n’a pas été concrétisée, elle n’a pas demandé une prolongation de la date et l’entente n’a pas été conclue – elle a signé son offre d’emploi un mardi, et l’employeur a envoyé l’autorisation de réinstallation à Royal Lepage ce vendredi-là – Royal Lepage a communiqué avec elle le lundi suivant, ce qui, selon elle n’était pas dans le délai de 48 heures prévu à la Directive – l’arbitre de grief a conclu que Royal Lepage avait communiqué avec la fonctionnaire s’estimant lésée dans le délai requis – de plus, étant donné qu’aucune preuve n’a démontré que la fonctionnaire s’estimant lésée avait tenté de retirer ou de reporter la condition de son offre, elle n’a pas prouvé que l’employeur avait contrevenu à la Directive ou qu’elle avait, par conséquent, subi une perte – la fonctionnaire s’estimant lésée n’a pas prouvé qu’elle avait subi une perte sur la différence de prix entre la résidence pour laquelle elle avait fait une offre et celle qu’elle avait finalement achetée, puisque des facteurs autres que le prix auraient pu avoir une influence – selon la Directive, la fonctionnaire s’estimant lésée devait attendre l’autorisation écrite avant d’avoir le droit d’être remboursée – selon l’application normale de la Directive, un employé doit mettre sa résidence sur le marché immédiatement et ne peut attendre que le marché soit plus favorable – l’intention de la Directive est de rembourser à un employé les dépenses autorisées découlant de la réinstallation, mais la réinstallation ne doit pas devenir un exercice financier permettant à l’employé de choisir un moment optimal pour vendre sa résidence – la fonctionnaire s’estimant lésée a été traitée selon l’esprit de la Directive. Grief rejeté.

Contenu de la décision

  • Date: 20151023
  • Dossier: 566-02-6427
  • Référence: 2015 CRTEFP 84

Loi sur les relations de travail Devant un arbitre de grief dans la fonction publique

Devant un arbitre de grief


ENTRE

LISA WALZAK

fonctionnaire s'estimant lésé

et

CONSEIL DU TRÉSOR (ministère de la Santé)

employeur

Répertorié
Walzak c. Conseil du Trésor (ministère de la Santé)

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Linda Gobeil, arbitre de grief
Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Vance Coulas, Institut professionnel de la fonction publique du Canada
Pour l'employeur:
Léa Bou Karam, avocate
Affaire entendue à Edmonton (Alberta)
le 10 juin 2014.

I. Grief individuel renvoyé à l’arbitrage

1 Le 8 mars 2007, Lisa Walzak, la fonctionnaire s’estimant lésée (la « fonctionnaire »), a présenté un grief relativement à une décision de son employeur, le ministère de la Santé (l’« employeur »). Dans son grief, elle a allégué que l’employeur n’avait pas appliqué correctement la Directive sur la réinstallation intégrée (la « Directive ») du Conseil national mixte (le « CNM ») en ce qui concerne sa réinstallation de Calgary à Edmonton, en Alberta, en 2005.

2 Plus précisément, la fonctionnaire a allégué que son employeur n’avait pas agi de manière diligente lorsqu’il a décidé de la réinstaller et que, par conséquent, elle a perdu une occasion d’acheter une résidence à un meilleur prix. Elle a également soutenu que l’employeur avait commis une erreur lorsqu’il lui a refusé le droit de reporter l’inscription de son logement en copropriété sur le marché immobilier afin qu’elle puisse bénéficier d’un marché plus favorable. Enfin, elle a soutenu que l’employeur devait lui rembourser les frais liés à un certain nombre d’inspections de maison qu’elle a assumés elle-même.

3 L’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (l’« agent négociateur ») a représenté la fonctionnaire. La convention collective pertinente entre l’employeur et l’agent négociateur est celle du groupe Sciences appliquées et examen des brevets qui est venue à échéance le 30 septembre 2007 (la « convention collective »). La clause 36.01 de la convention collective comprend plusieurs directives du CNM, notamment la Directive. Conformément au Règlement du CNM, un grief découlant d’une directive du CNM est renvoyé à l’employeur au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs et, s’il n’est pas résolu, il est ensuite renvoyé au Comité exécutif du CNM. Si l’employé estime toujours qu’il a été lésé par la décision du Comité exécutif du CNM, il peut, avec l’appui de l’agent négociateur, renvoyer le grief à l’arbitrage en vertu de l’alinéa 209(1)a) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2) (la « Loi »).

4 Le 22 janvier 2009, Catherine Chagnon, au nom de l’employeur, a informé la fonctionnaire que l’employeur avait rejeté son grief. L’affaire a ensuite été renvoyée au CNM aux fins de décision définitive dans le cadre de la procédure de règlement des griefs (voir l’exposé conjoint des faits, aux paragraphes 5 et 6).

5 En novembre 2011, le Comité exécutif du CNM a essentiellement décidé ce qui suit :

[Traduction]

[…] Il a été convenu que la preuve présentée démontre que la fonctionnaire a été traitée conformément à l’esprit de la Directive en ce qui a trait à la consultation (clause 2.2.2.3), à la nécessité de soumettre une analyse de cas pour retarder la vente d’une résidence (clauses 8.2 et 2.13.1), à l’option de ne pas vendre (clause 13.3.2.2), à la valeur de l’évaluation de la résidence (clause 8.9), aux allers-retours pour l’évaluation et pour régler la vente de la résidence (section 8.12) et aux frais juridiques (clauses 8.8 et 8.11).

Plus précisément, le Comité a soulevé que la politique ne couvre pas les déplacements pour les besoins d’évaluation. La Directive établit que lorsque l’échange de correspondance par messagerie ou moyens électroniques n’est pas suffisant pour régler la vente, l’employé sera autorisé à retourner à son lieu de travail précédent pour régler la vente. Toutefois, la fonctionnaire s’estimant lésée n’a pas soumis la documentation nécessaire pour démontrer que sa présence était nécessaire.

Pour ce qui est des frais juridiques (commission de courtage et pénalités pour rupture d’hypothèque), le Comité a déterminé que la commission de courtage n’était pas remboursable dans ce cas, car la vente privée d’une résidence n’implique pas de commission.

Le Comité est d’avis que le refus de rembourser l’inspection des résidences et la prise en charge des frais de pénalité pour rupture d’hypothèque sont théoriques, car les deux ont déjà été traités à des paliers différents de griefs.

Pour ce qui est des coûts des appels téléphoniques relatifs à la vente et à l’achat d’une résidence, le Comité convient que le ministère devrait absorber les coûts des appels téléphoniques liés à la réinstallation de la fonctionnaire s’estimant lésée, et que celle-ci devrait soumettre au ministère un reçu détaillé des appels pour se les faire rembourser.

[…]

[Sic pour l’ensemble de la citation]

6 Au début de l’audience, les parties ont expliqué que le Comité exécutif du CNM était composé de membres représentant les agents négociateurs et l’employeur. L’agent négociateur en l’espèce fait partie du Comité exécutif du CNM et a participé à cette décision, laquelle était unanime.

7 Le 13 janvier 2012, le grief a été renvoyé à l’arbitrage aux termes de l’alinéa 209(1)a) de la Loi.

8 Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (la « nouvelle Commission »), qui remplace la Commission des relations de travail dans la fonction publique (l’« ancienne Commission ») et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le Plan d’action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l’article 396 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013, un arbitre saisi d’un grief avant le 1er novembre 2014 continue d’exercer les pouvoirs prévus à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique dans sa version antérieure à cette date.

II. Résumé de la preuve

9 À l’audience, les parties ont présenté l’exposé conjoint des faits suivants, ainsi que les pièces auxquelles je ferai référence par onglet. Le représentant de la fonctionnaire a également déposé les pièces G-1 et G-2. En dernier lieu, à la fin de l’audience, l’employeur a déposé une liste des inspections de résidence qu’il était prêt à rembourser, sous toutes réserves.

                        [Traduction]

Grief

1. Le 8 mars 2007, Mme Walzak a déposé un grief indiquant ce qui suit :

 « Il s’agit d’un grief du CNM relativement à la Directive sur la réinstallation intégrée.

Je dépose un grief relativement aux éléments suivants en ce qui concerne ma réinstallation de Calgary à Edmonton :

1. Le manque de diligence raisonnable en ce qui a trait à la consultation (clause 2.2.2.3)

2. La nécessité inappropriée de soumettre une analyse de cas pour retarder la vente d’une résidence (clauses 8.2 et 2.13.1)

3. Le refus de la possibilité d’exercer l’option de ne pas vendre (clause 13.3.2.2)

4. Le manque de diligence raisonnable dans l’évaluation de la valeur de la résidence (clause 8.9)

5. Le refus de rembourser les frais d’inspection de la résidence (clause 8.16)

6. Le refus des avantages en vertu de la clause 8.12 en ce qui concerne les allers-retours aux fins d’évaluation et pour régler la vente de la résidence

7. Le refus des avantages en vertu des clauses 8.8 et 8.11 en ce qui a trait aux frais juridiques

8. L’exigence de prendre en charge les frais de pénalités pour rupture d’hypothèque en raison d’un manque de diligence raisonnable de la part du mandataire de l’employeur

9. L’exigence de prendre en charge les coûts des appels téléphoniques relatifs à la vente et à l’achat d’une résidence. »

2. À titre de réparation, Mme Walzak a demandé « une réparation intégrale à tous égards en ce qui concerne les éléments qui précèdent ».

3. Une réponse au grief a été reçue le 5 août 2008 dans laquelle le grief a été rejeté.

4. Le 26 août 2008, le grief a été transmis au deuxième palier du CNM.

5. Le 22 janvier 2009, une réponse au grief au deuxième palier a été reçue dans laquelle le grief a été rejeté.

6. Le grief a été transmis au dernier palier du CNM.

7. Le 5 décembre 2011, une réponse a été reçue pour le Comité exécutif du CNM dans laquelle le grief a été accueilli, en ce que les frais des appels téléphoniques seraient remboursés en fonction des reçus et que les questions liées à la rupture d’hypothèque et à l’inspection de la résidence ont été tranchées aux paliers antérieurs de la procédure de règlement des griefs.

8. Le 13 janvier 2012, le grief de Mme Walzak a été renvoyé à l’arbitrage aux termes de l’alinéa 209(1)a) de la LRTFP.

Antécédents professionnels

9. Mme Lisa Walzak est une employée nommée pour une période indéterminée de Santé Canada qui travaille à Calgary et qui, en avril 2005, a accepté un poste intérimaire, à titre de coordonnatrice, Direction générale des produits de santé et des aliments, Centre régional de déclaration d’effets indésirables (classifié SG-SRE-05) à Edmonton.

10.À ce moment, son poste d’attache était à Calgary, où elle était propriétaire d’un logement en copropriété. Pendant qu’elle occupait son poste intérimaire à Edmonton, elle était considérée comme étant en situation de voyage.

11.Une lettre d’offre, en date du 14 novembre 2005, a été donnée à Mme Walzak dans laquelle le poste de coordonnatrice à Edmonton lui était offert pour une période indéterminée.

12.Mme Walzak a accepté l’offre le 15 novembre 2005 et elle occupe toujours ce poste.

13.Comme elle a accepté le poste, Mme Walzak est devenue admissible à l’aide à la réinstallation de Calgary à Edmonton en vertu de la Directive sur la réinstallation intégrée (la « DRI »).

Offre d’achat conditionnelle, 10025, 94e Rue.

14.Le 1er novembre 2005, Mme Walzak a signé une offre d’achat conditionnelle pour une maison familiale individuelle située au 10025, 94e Rue, à Edmonton, au montant de 175 000 $.

15.L’offre devait rester ouverte jusqu’au 18 novembre 2005 et elle était conditionnelle à ce qui suit :

· une inspection satisfaisante de la résidence;

· l’approbation d’une aide à la réinstallation aux termes de la DRI.

16.Une inspection de la propriété a été effectuée le 15 novembre 2005 et n’a révélé aucun vice majeur.

17.Le 18 novembre 2005, l’employeur a envoyé l’avis d’autorisation de réinstallation à un fournisseur de services tiers (c’est-à-dire aux services de réinstallation de Royal Lepage).

18.Le 18 novembre 2005, Mme Walzak n’avait toujours pas obtenu d’approbation aux fins de la DRI et, par conséquent, l’offre est devenue caduque.

19.Royal Lepage a communiqué avec Mme Walzak le 21 novembre 2005.

20.Le 30 novembre 2005, elle a assisté à une séance de consultation avec Royal Lepage.

Autres tentatives d’achat

21.Le 30 novembre 2005, une offre de 210 000 $ a été présentée pour la résidence située au 10454, 86e Av., qui n’a pas été acceptée par le vendeur.

22.Le 10 janvier 2006, une offre a été présentée pour la résidence située au 9394, 98e Rue, qui n’a pas été acceptée par le vendeur.

23.Le 14 février 2006, une offre de 240 000 $ a été présentée pour la résidence située au 9708, 80e Av., qui a été acceptée mais qui a échoué l’inspection de résidence qui a suivi. Les frais d’inspection de 428 $ ont été remboursés à Mme Walzak.

24.Le 2 mars 2006, une offre de 222 500 $ a été présentée pour la résidence située au 9818, 80e Av., qui a été acceptée mais qui a échoué l’inspection de résidence qui a suivi. Les frais d’inspection de 374,50 $ ont été remboursés à Mme Walzak.

25.Le 22 mars 2006, une offre a été présentée pour la résidence située au 7518, 93e Av., qui n’a pas été acceptée par le vendeur.

26.Le 23 mars 2006, une offre a été présentée pour la résidence située au 9838, 84e Av., qui a été acceptée mais qui a échoué l’inspection de résidence qui a suivi.

L’achat de la résidence située au 9245, 92e Rue.

27.Le 5 avril 2006, une offre de 242 000 $ a été présentée pour la résidence située au 9425, 92e Rue, qui a été acceptée et qui a réussi l’inspection de résidence qui a suivi. Cette résidence a été achetée par Mme Walzak.

28.Les frais d’inspection pour cette résidence n’ont pas été remboursés à Mme Walzak.

Situation du marché immobilier en Alberta en 2005-2006

29.Durant la période où Mme Walzak s’efforçait d’acquérir une résidence, le marché immobilier à Edmonton et Calgary étaient décrits comme étant  « frénétique » et comme ayant un faible inventaire.

30.Les vendeurs avaient souvent le luxe de choisir parmi de multiples offres.

31.Durant la période allant de la mi-novembre 2005 à la mi-avril 2006, le prix moyen d’une maison familiale individuelle à Edmonton a augmenté de près de 17,5 %.

32.De décembre 2005 à mars 2006, le prix moyen d’un logement en copropriété à Calgary a augmenté de plus de 20 %.

Vente de la résidence située au 204-1420, rue Memorial, à Calgary

33.Le 1er décembre 2005, Mme Walzak a demandé de retarder la mise sur le marché de sa résidence à Calgary afin de profiter des fluctuations saisonnières du marché.

34.Mme Walzak a reçu un courriel en date du 1er décembre 2005 qui indiquait qu’elle devait soumettre une analyse de cas pour reporter l’inscription de sa propriété à vendre, laquelle pouvait ou non être approuvée.

35.Le 15 décembre 2005, elle a été informée que son analyse de cas avait été refusée.

36.En décembre 2005, la valeur de la propriété située au 204-1420, rue Memorial, a été établie à 222 000 $ par un évaluateur de biens immobiliers.

37.Mme Walzak n’a inscrit sa propriété à vendre ni en décembre 2005, ni en janvier 2006, ni en février 2006.

38.Le 7 février 2006, Mme Walzak a vendu sa propriété dans le cadre d’une vente privée en acceptant une offre de 240 000 $ présentée par la personne qui louait la résidence située au 204-1420, rue Memorial, qui a ensuite été modifiée à 239 520 $ parce qu’il s’agissait du prêt maximal que l’institution financière était prête à accorder à l’acheteur.

[Sic pour l’ensemble de la citation]

10 Dans sa déclaration d’ouverture, le représentant de la fonctionnaire a déclaré qu’en l’espèce, tant l’employeur que Royal Lepage, qui agissait au nom de l’employeur à titre de fournisseur de services, avaient fait preuve d’un manque de soutien et de souplesse à l’égard de la fonctionnaire. Le processus n’était pas transparent et, par conséquent, la fonctionnaire a subi une perte financière importante.

11 Le représentant de la fonctionnaire a soutenu qu’elle avait perdu l’occasion d’acheter une résidence à Edmonton, en novembre 2005, en raison de l’inaction de Royal Lepage. S’il avait agi dans les 48 heures, la fonctionnaire aurait acheté la résidence située au 10025, 94e Rue, à Edmonton, pour un prix moins élevé que celui qu’elle a dû payer quelques mois plus tard, soit en avril 2006. Son représentant a également indiqué qu’elle n’avait pas obtenu le soutien nécessaire aux fins de la vente de son logement en copropriété situé à Calgary, et que, par conséquent, il a été vendu à un prix inférieur à la valeur de marché. Le représentant de la fonctionnaire a également affirmé que dans les circonstances, la fonctionnaire devrait avoir droit au remboursement des frais d’inspection de résidence qu’elle a payés et à une indemnité pour la perte des possibilités, ce qui s’élève, selon lui, à un montant de 110 000 $ pour les deux transactions.

12 À l’audience, alors que l’employeur contestait toujours l’allégation de la fonctionnaire, son avocate a déclaré que, sous toutes réserves, l’employeur était prêt à rembourser à la fonctionnaire trois inspections de résidence, à la condition qu’elle présente une preuve de paiement acceptable. Une liste des inspections que l’employeur était prêt à payer a été fournie à la fin de l’audience.

13 L’avocate de l’employeur a soutenu qu’aux termes de la Directive, la fonctionnaire n’avait droit ni à la perte de possibilités ni aux dépenses qu’elle a engagées avant d’avoir obtenu toutes les approbations nécessaires aux termes de la Directive. L’avocate a insisté sur le fait qu’en l’espèce, le Comité exécutif du CNM, dont faisait partie l’agent négociateur (lequel avait participé à la prise de décision), a rejeté le grief sur le fond.

A. Pour la fonctionnaire s’estimant lésée

14 Mme Walzak est une employée nommée pour une période indéterminée qui travaillait à Calgary, où elle était propriétaire d’un logement en copropriété. En avril 2005, elle a accepté un poste intérimaire à titre de coordonnatrice de la Direction générale des produits de santé et des aliments, à Edmonton. Elle était classifiée au groupe et niveau SG-SRE-05.

15 Lors de son témoignage, la fonctionnaire a indiqué qu’après un processus de dotation, le 14 novembre 2005, l’employeur lui a offert le poste de coordonnatrice, et ce, pour une période indéterminée. Elle a indiqué qu’elle savait déjà, le 1er novembre 2005, qu’elle était la candidate reçue en raison d’un courriel que lui avait envoyé Zena Kwan, une gestionnaire de l’employeur.

16 La fonctionnaire a déclaré qu’elle savait qu’il y avait une pénurie de résidences à Edmonton. Par conséquent, aussitôt qu’elle a su qu’elle était la candidate reçue, le 1er novembre 2005, elle a décidé d’être proactive dans sa recherche d’une nouvelle résidence. Elle a expliqué qu’elle souhaitait avoir l’esprit tranquille et s’installer rapidement, même si cela signifiait qu’elle devait assumer certains coûts, comme l’inspection de résidence, avant d’obtenir toutes les approbations aux termes de la Directive. Elle a indiqué qu’à ce moment-là, les marchés de l’habitation à Edmonton et à Calgary étaient très frénétiques. (Voir l’exposé conjoint des faits aux paragraphes 29 à 32; et les onglets 14 à 24).

17 La fonctionnaire a témoigné que bien qu’elle n’ait pas signé la lettre d’offre d’emploi, ce qu’elle a éventuellement fait le 15 novembre 2005, elle a présenté une offre pour une résidence située sur la 94e Rue, à Edmonton, le 1er novembre 2005 (voir l’exposé conjoint des faits au paragraphe 14 et à l’onglet 8, page 3). L’offre était conditionnelle à ce qu’elle obtienne l’approbation de réinstallation de l’employeur au plus tard le 18 novembre 2005. Elle a indiqué qu’après avoir été informée qu’elle était la candidate reçue, elle espérait recevoir la lettre d’offre d’emploi dans les 10 jours. Elle a également indiqué que pour avoir droit aux avantages aux termes de la Directive, elle devait attendre 48 heures après la signature de l’offre d’emploi avant que Royal Lepage communique avec elle (voir la section 2.2.3.1 de la Directive).

18 La fonctionnaire a témoigné avoir signé la lettre d’offre le 15 novembre 2005 (pièce, onglet 6). Toutefois, même si l’employeur a envoyé l’autorisation intitulée [traduction] « Avis de réinstallation » à Royal Lepage le 18 novembre 2005 (onglet 7, les deux dernières pages), elle n’a pas eu de nouvelles de Royal Lepage dans les 48 heures suivant la signature de la lettre d’offre (voir l’exposé conjoint des faits, aux paragraphes 17 et 18, et la clause 2.2.3.1 de la Directive). Par conséquent, elle n’a pas été en mesure de finaliser l’offre qu’elle avait présentée pour la résidence située à Edmonton au plus tard le 18 novembre 2005; l’offre a échoué. Elle a indiqué que Royal Lepage avait finalement communiqué avec elle le 21 novembre 2005 et qu’elle avait assisté à une séance de consultation avec son représentant le 30 novembre 2005 (voir l’exposé conjoint des faits, aux paragraphes 19 et 20).

19 En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a expliqué qu’elle s’attendait à recevoir l’autorisation de Royal Lepage au plus tard le 17 novembre 2005. Elle a admis qu’elle aurait pu faire retirer la date d’échéance du 18 novembre 2005 comme condition et poursuivre la transaction, mais elle n’aurait alors pas pu bénéficier de la Directive et elle aurait été laissée à elle-même

20 La fonctionnaire a soutenu que la somme de 422,65 $ versée pour l’inspection de la résidence de la 94e Rue, en novembre 2005, ne lui a pas été remboursée parce que, selon ce qu’on lui a dit, elle n’avait pas reçu d’autorisation préalable pour y donner suite (pièce, onglet 9).

21 La fonctionnaire a indiqué dans son témoignage avoir alors examiné 20 autres propriétés, ce qui n’était pas facile puisqu’elle souhaitait une résidence située dans un secteur sécuritaire, à distance de marche de son travail. Elle a déclaré qu’entre novembre 2005 et mars 2006, elle a fait une série d’offres qui n’ont pas été acceptées ou pour lesquelles l’inspection de la résidence a échoué (voir l’exposé conjoint des faits, aux paragraphes 21 à 26).

22 En avril 2006, la fonctionnaire a fait une offre sur une résidence de la 92e Rue qui a été acceptée; cette résidence a réussi l’inspection.

23 La fonctionnaire a indiqué que les inspections qu’elle a fait faire concernant les différentes propriétés n’avaient pas toutes été remboursées. En contre-interrogatoire, elle a admis ne pas avoir soumis à son employeur toutes les demandes de remboursement pour ces inspections (voir l’exposé conjoint des faits, aux paragraphes 21 à 27).

24 La fonctionnaire a indiqué dans son témoignage qu’en même temps qu’elle tentait d’acheter une résidence à Edmonton, elle tentait de vendre son logement en copropriété à Calgary. Toutefois, puisqu’elle croyait, en décembre 2005, que le marché pour la vente de son logement en copropriété serait meilleur plus tard, elle souhaitait en retarder la mise sur le marché jusqu’en mars 2006. Elle a expliqué que, selon la clause 3.4.2.2 de la Directive, si elle ne souhaitait pas vendre son logement en copropriété à ce moment, elle devait choisir [traduction] « de ne pas vendre » dans les 14 jours à compter du moment où elle a reçu l’évaluation de l’employeur. Elle a expliqué qu’avant de décider de ne pas vendre conformément à la section 3.4.2.2 de la Directive, elle a décidé, en vertu de la clause 8.2 de cette même Directive, de présenterune demande officielle à son employeur visant à reporter la vente de son logement en copropriété jusqu’en mars 2006. Le 1er décembre 2005, elle a fourni à l’employeur un courriel justifiant le report jusqu’à mars. Sa demande a été rejetée le 15 décembre 2005 (onglets 25 à 27). La fonctionnaire a indiqué qu’elle n’avait alors d’autre choix que de choisir l’option de retrait en vertu de la clause 3.4.2.2 et de vendre son logement en copropriété de Calgary seule, puisqu’elle croyait obtenir un meilleur prix en l’inscrivant plus tard.

25 La fonctionnaire a indiqué dans son témoignage que tout au long du processus de vente de son logement en copropriété, elle n’a pas reçu de renseignements adéquats de la part de Royal Lepage. De plus, elle souhaitait en savoir plus au sujet de la location et des droits découlant de la politique (pièce G-1). Bien que quelqu’un ait communiqué avec elle le 1er novembre 2005 au sujet de la vente de son logement en copropriété, la rencontre n’a eu lieu que le 30 novembre 2005. Elle a indiqué dans son témoignage que le 2 décembre 2005, Royal Lepage l’avait informée que son logement en copropriété était évalué à 222 000 $ (onglet 28).

26 La fonctionnaire a également indiqué qu’elle croyait que l’évaluation était trop basse et a ajouté que son voisin avait vendu son logement en copropriété 258 000 $ en février 2006. Toutefois, la fonctionnaire a admis que son logement en copropriété était au deuxième étage de l’immeuble, alors que celui de son voisin se trouvait au quatrième étage (pièce G-2). Elle a vendu son logement en copropriété elle-même, sans l’aide d’un courtier immobilier, le 5 février 2006, pour 239 520 $. Selon elle, elle l’aurait vendu pour un montant plus important si son employeur lui avait permis de retarder l’inscription jusqu’en mars 2006. Selon la fonctionnaire, elle a subi une perte en raison de la rigidité de son employeur.

27 La fonctionnaire a déclaré que la réinstallation avait eu une incidence négative sur elle et que le fait de ne pas savoir où elle vivrait et à quel moment avait été très stressant. Selon elle, elle avait vécu une expérience très difficile, à l’égard de laquelle son employeur n’a fait preuve d’aucune souplesse ou transparence.

B. Pour l’employeur

28 Leslie Jones a témoigné pour l’employeur. M. Jones est l’analyste principal des politiques et programmes responsable de la Directive depuis les douze dernières années.

29 M. Jones a expliqué que la réinstallation d’un employé commence par la lettre d’offre indiquant son nouvel emplacement de travail. La Direction des ressources humaines informe ensuite la division des Finances qui, à son tour, autorise le fournisseur de services, dans ce cas Royal Lepage, à communiquer avec l’employé réinstallé. Selon la Directive, Royal Lepage a 48 heures à partir de l’avis pour communiquer avec l’employé (voir la clause 2.2.3.1 de la Directive).

30 M. Jones a fait remarquer que la Directive précise clairement qu’un employé ne doit engager aucune dépense de réinstallation avant d’obtenir par écrit toutes les autorisations nécessaires, à défaut de quoi il est responsable de ces dépenses (voir les clauses 2.1.1 et 2.2.2.2 de la Directive). M. Jones a indiqué dans son témoignage que la nécessité d’avoir toutes les autorisations appropriées avant d’engager des dépenses est également clairement indiquée au paragraphe 3 de la lettre d’offre que la fonctionnaire a reçue le 14 novembre 2005 (onglet 6).

31 M. Jones a déclaré qu’en ce qui concerne la vente du logement en copropriété de la fonctionnaire à Calgary, l’intention de la Directive est que si un employé doit vendre une propriété en vertu de cette dernière, la propriété doit être mise sur le marché immédiatement, afin de rembourser la valeur actuelle du bien immobilier et non pour attendre que le marché s’améliore.

32 M. Jones a fait remarquer qu’en l’espèce, la fonctionnaire avait un délai de 14 jours civils, à partir du moment où elle a reçu l’évaluation de Royal Lepage le 2 décembre 2005, pour décider si elle mettrait son logement en copropriété en vente conformément à la Directive ou si elle se prévaudrait de l’option de vendre la propriété elle-même à l’extérieur de la portée de la Directive (voir la clause 3.4.2.2 de la Directive et l’onglet 28).

33 M. Jones a indiqué que même si la fonctionnaire a tenté de faire une analyse de cas pour ne pas avoir à se prévaloir de son choix [traduction] « de ne pas vendre » conformément à la clause 3.4.2.2 de la Directive, sa demande a été rejetée et elle a décidé de vendre son logement en copropriété elle-même. M. Jones a indiqué qu’il ne savait pas pourquoi la demande de prolongation des délais avait été rejetée (voir la clause 8.2 de la Directive et l’onglet 27).

III. Résumé de l’argumentation

A. Pour la fonctionnaire s’estimant lésée

34 Le représentant de la fonctionnaire a soutenu que l’employeur n’avait pas traité cette dernière de façon équitable et qu’elle avait fait face à une situation difficile sans son aide. Il a insisté pour dire que tout au long du processus de réinstallation, l’employeur avait été rigide et n’avait pas fourni à la fonctionnaire le soutien dont elle avait besoin.

35 Le représentant de la fonctionnaire a soutenu que cette dernière n’a souvent pas reçu à temps les renseignements dont elle avait besoin et qu’elle a dû prendre des décisions à la hâte.

36 Le représentant de la fonctionnaire a soutenu que cette dernière a perdu, en novembre 2005, une occasion d’acheter une résidence parce que le fournisseur de services de l’employeur n’a pas communiqué avec elle dans le délai de 48 heures prévu à la Directive. L’employeur devrait être tenu responsable de sa perte.

37 En outre, le représentant de la fonctionnaire a fait valoir que l’employeur n’avait pas correctement abordé la vente du logement en copropriété de Calgary de la fonctionnaire, contrairement à la section 8.10 (frais d’évaluation) de la Directive. Il a insisté pour dire qu’à tout le moins, elle aurait dû être en mesure de reporter l’inscription de son logement en copropriété jusqu’en mars 2006. Il est évident que si l’employeur avait attendu jusqu’à mars 2006, elle aurait obtenu plus d’argent. Son représentant a soutenu que le fait que son voisin a vendu son logement en copropriété pour 258 000 $ démontrait que si l’employeur avait accepté d’attendre simplement une brève période avant l’inscription du logement en copropriété, la fonctionnaire aurait obtenu un montant de vente beaucoup plus élevé que si elle l’avait inscrit en décembre 2005. Son représentant a également fait remarquer qu’elle avait eu deux ans, conformément à la clause 2.13.1 de la Directive, pour mettre son logement en copropriété sur le marché et qu’à tout le moins, l’employeur n’avait pas été raisonnable lorsqu’il a refusé son analyse de cas pour reporter l’inscription du logement en copropriété.

38 Enfin, le représentant de la fonctionnaire a soutenu que l’employeur n’était pas raisonnable lorsqu’il a décidé de ne pas rembourser toutes les inspections de résidence que la fonctionnaire avait organisées sur les propriétés pour lesquelles elle avait présenté des offres.

B. Pour l’employeur

39 L’avocate de l’employeur a fait valoir que le fardeau de la preuve en l’espèce incombait à la fonctionnaire. Elle devait démontrer que l’employeur n’avait pas respecté ses obligations prévues à la convention collective et que, par conséquent, elle avait subi un préjudice démontré. L’avocate m’a renvoyée à Wambolt c. Agence du revenu du Canada, 2013 CRTFP 55.

40 L’avocate de l’employeur a soutenu que l’objet de la Directive est clair : il s’agit de rembourser des dépenses raisonnables et justifiables à la suite d’une réinstallation. Il ne s’agit pas d’améliorer la situation financière d’un employé (voir la clause 1.2.4 de la Directive). En outre, les avantages doivent être précisés dans la Directive. L’avocate a soutenu que les allégations de la fonctionnaire ne sont pas visées par la Directive et que si elle a engagé des dépenses en raison d’une erreur d’interprétation ou d’une autre forme d’erreur, la Directive précise clairement que ces dépenses ne seront pas nécessairement remboursées (voir laclause 1.2.6 de la Directive).

41 L’avocate de l’employeur a soutenu qu’aux termes de la Directive, l’employé a la responsabilité d’obtenir l’autorisation écrite s’il souhaite se voir rembourser une dépense engagée (voir les clauses 2.1.1, 2.1.2 et 2.2.2 de la Directive). Si l’employé décide d’agir de son propre chef, comme l’a fait la fonctionnaire lorsqu’elle a décidé de vendre elle-même son logement en copropriété, alors les avantages de la Directive ne s’appliquent pas.

42 En ce qui concerne l’allégation de la fonctionnaire selon laquelle elle a perdu, en novembre 2005, une possibilité d’acheter une résidence pour un montant moindre, l’avocate de l’employeur a insisté pour dire qu’elle savait qu’une réinstallation ne se ferait pas dès la réception de la lettre d’offre le 14 novembre 2005. L’avocate a fait valoir que la fonctionnaire aurait pu faire modifier la date d’échéance du 18 novembre 2005 et procéder avec la transaction. Elle n’a même pas envisagé cette option.

43 L’avocate de l’employeur a soutenu que la Directive précise clairement qu’aucune dépense engagée avant le 18 novembre 2005 n’aurait dû être engagée (voir laclause 2.1.2 de la Directive). Par conséquent, le coût de l’inspection de la résidence sur la 94e Rue n’a pas été remboursé puisqu’il a été engagé avant l’approbation de la réinstallation de la fonctionnaire, le 18 novembre 2005.

44 En ce qui concerne l’argument de la fonctionnaire selon lequel elle a payé un prix plus élevé pour la résidence qu’elle a achetée que ce qu’elle aurait payé si l’employeur ou Royal Lepage avait été plus diligent, l’avocate de l’employeur a soutenu que je ne pouvais tirer cette conclusion puisqu’il s’agissait d’une pure spéculation. L’avocate a insisté pour dire qu’aucune comparaison réelle n’avait été faite entre les propriétés. Il ne suffit pas d’indiquer que le prix de la première résidence à l’égard de laquelle la fonctionnaire a fait une offre était inférieur à ce qu’elle a finalement payé. De nombreux facteurs qui n’ont pas été avancés, comme l’emplacement exact des résidences, leur taille, etc., pourrait expliquer la différence de prix.

45 L’avocate de l’employeur a soutenu que le même raisonnement s’appliquait à la vente du logement en copropriété de Calgary de la fonctionnaire. Elle a décidé de ne pas mettre son logement en copropriété sur le marché et d’agir seule, sans un courtier immobilier et sans être protégée par la Directive. C’était sa décision d’attendre que le marché se porte mieux. Le fait que l’évaluation réalisée en décembre 2005 soit inférieure au montant qu’a reçu son voisin n’est pas pertinent. Encore une fois, de nombreux facteurs pourraient expliquer la différence; par exemple, le fait que le logement en copropriété du voisin n’était pas situé sur le même étage que celui de la fonctionnaire.

46 L’avocate de l’employeur m’a renvoyée à Hicks c. Conseil du Trésor (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences), 2006 CRTFP 60, et a insisté pour dire qu’il y aurait toujours des fluctuations du marché. En l’espèce, elles ne sont pas une raison pour justifier les demandes de la fonctionnaire.

47 L’avocate de l’employeur a également fait remarquer que le Comité exécutif du CNM a examiné le présent grief et qu’il l’a rejeté.

IV. Motifs

48 Dans ses remarques, le représentant de la fonctionnaire a soutenu que cette dernière avait droit à des dommages de 110 000 $ pour ce qui a été désigné comme étant les inactions et la rigidité de l’employeur et de Royal Lepage. Je dois souligner que, dès le départ, il n’y a aucune preuve à l’appui de ce montant.

49 La fonctionnaire a soutenu avoir manqué une occasion d’acheter une résidence située sur la 94e Rue, à Edmonton, parce qu’elle n’a pas eu de nouvelles de Royal Lepage dans les 48 heures suivant la signature de sa lettre d’offre le 15 novembre 2005. En conséquence, la date d’échéance du 18 novembre 2005 que la fonctionnaire a indiquée dans son offre n’a pas été respectée et le marché n’a pas été conclu.

50 Je ne souscris pas à cet argument. D’abord, et même si je devais reconnaître que le fait d’être réinstallé peut être stressant et que les gens souhaitent être proactifs, il découle clairement de la Directive que la fonctionnaire ne pouvait pas prendre les dispositions qu’elle croyait nécessaires et s’attendre à être remboursée avant de recevoir l’autorisation appropriée par écrit. Les clauses 2.1.1 et 2.1.2 de la Directive précisent clairement que pour être remboursé, un employé doit d’abord obtenir l’autorisation appropriée par écrit; sinon, l’employé ne sera pas indemnisé pour les dépenses :

2.1.1 Il incombe à l’employeur d’autoriser les réinstallations et de s’assurer que toutes les dispositions prises sont conformes à la présente Directive.

· L’autorisation est fournie à l’avance par écrit.

· L’employeur autorise par écrit le tiers fournisseur de services à fournir à l’employé concerné les services de réinstallation prévus au contrat aux termes du PRI.

                        […]

2.1.2 L’employeur n’est pas responsable de ces frais, sauf si la réinstallation est autorisée subséquemment, et l’employé peut ne pas avoir droit à certains avantages.

51 Dans son témoignage, la fonctionnaire a admis qu’elle était enthousiaste et prête à assumer les coûts, comme ceux de l’inspection d’une résidence, puisque le 1er novembre 2005 elle n’était pas encore autorisée aux termes de la Directive. Dans les circonstances, je conclus qu’elle n’avait clairement pas droit à un remboursement de l’inspection effectuée pour cette première résidence. En effet, l’agent négociateur n’a pas contesté l’interprétation à donner à ces clauses. Son argument reposait sur l’application par l’employeur de la Directive.

52 En outre, la fonctionnaire a soutenu que comme Royal Lepage n’a pas communiqué avec elle et n’a pas pris les dispositions appropriées dans les 48 heures, elle a dû laisser expirer son offre sur la résidence de la 94e Rue puisqu’elle ne respectait pas la date d’échéance du 18 novembre 2005.

53 La clause 2.2.3.1 de la Directive est en partie libellée comme suit :

2.2.3.1 Le tiers fournisseur de services :

· Le tiers fournisseur de services assure la prestation des services conformément au contrat et à la présente Directive.

· communique dans les 48 heures avec l’employé qui lui a été référé et confirme les renseignements personnels et les dates prévues pour les services de counselling, conformément au contrat;

[…]

54 Selon la preuve en l’espèce, la fonctionnaire a signé sa lettre d’offre le 15 novembre 2005 (voir l’exposé conjoint des faits, au paragraphe 12). Royal Lepage en a été informé le 18 novembre 2005 (onglet 7, deux dernières pages). La fonctionnaire a été contactée le 21 novembre (voir l’exposé conjoint des faits, au paragraphe 19).

55 La clause 2.2.3.1 de la Directive précise que le fournisseur de services doit établir le premier contact dans les 48 heures. En l’espèce, Royal Lepage a été autorisé à communiquer avec la fonctionnaire le 18 novembre 2005 (pièce, onglet 7, deux dernières pages et exposé conjoint des faits, au paragraphe 17). Comme l’atteste la feuille d’accompagnement des deux dernières pages de l’onglet 7, le 21 novembre 2005 était un lundi. Ainsi, à mon avis, Royal Lepage a communiqué avec la fonctionnaire dans les 48 heures après en avoir été avisé, si l’on tient compte du fait que les 19 et 20 novembre étaient un samedi et dimanche. Par conséquent, Royal Lepage a respecté l’obligation de communiquer avec la fonctionnaire dans les 48 heures et je conclus que Royal Lepage a communiqué avec cette dernière le lundi 21 novembre 2005, conformément aux clauses 2.2.1.3 et 2.2.3.1 de la Directive (voir l’exposé conjoint des faits, au paragraphe 19). La Directive n’exige pas que Royal Lepage communique avec la fonctionnaire dans les 48 heures suivant la signature par cette dernière d’une lettre d’offre, comme son témoignage le suggère, mais bien qu’il communique avec [traduction] « l’employé qui lui a été référé » dans les 48 heures, ce qu’il a fait.

56 De plus, je suis d’accord avec l’avocate de l’employeur pour dire que rien dans la preuve n’indique que la fonctionnaire a tenté de modifier ou de reporter la date d’échéance du 18 novembre 2005, qu’elle a elle-même inclus dans l’offre visant la résidence sur la 94e Rue, à Edmonton. Je ne peux donc pas trancher en faveur de la fonctionnaire puisqu’elle ne s’est pas acquittée du fardeau de me convaincre que l’employeur a contrevenu à la Directive et qu’elle en a subi une perte.

57 Enfin, même si j’ai tort en ce qui concerne ce qui précède, il n’y a pas non plus de preuve pour attester que la fonctionnaire a subi une perte de la différence de prix entre la résidence pour laquelle elle a fait une offre et celle qu’elle a finalement achetée sur la 92e Rue. Bien que je reconnaisse qu’il y a une différence de prix, 175 000 $ par rapport à 242 000 $, d’autres facteurs, comme l’emplacement, la taille, le voisinage, etc., peuvent l’expliquer, en dehors de la simple date à laquelle la résidence a été achetée.

58 La fonctionnaire a également soutenu que l’employeur était responsable du refus de reporter la vente de son logement en copropriété jusqu’à ce que le marché soit plus favorable, en mars 2006 et que, par conséquent, elle a dû la vendre elle-même, sans le soutien et l’avantage de la Directive. Je ne suis pas convaincue par cet argument. Je n’ai reçu aucun argument au soutien de cette allégation, aucune disposition de la Directive ne m’a été citée comme ayant été violée et je n’ai obtenu aucune décision faisant jurisprudence à l’appui de sa prétention. Les dispositions invoquées par l’employeur m’ont convaincue que l’application normale de la Directive signifie que la résidence doit être mise sur le marché immédiatement, à sa valeur marchande actuelle, et que l’employé ne peut décider à quel moment le marché est plus favorable. Je ne suis pas d’accord pour dire que la clause 2.13.1 de la Directive donne deux ans à l’employé pour mettre sa résidence sur le marché. Cette disposition ne donne pas à l’employé le choix d’inscrire immédiatement la résidence sur le marché à un prix donné ou d’attendre. Elle prévoit uniquement le remboursement à l’employé dans les deux ans de l’inscription auprès du fournisseur de services. La fonctionnaire a allégé que l’employeur avait été déraisonnable en rejetant l’analyse de cas qu’elle avait présentée en faveur du report de la vente de son logement en copropriété de Calgary, mais compte tenu de mon interprétation de la Directive, l’employeur avait le droit de rejeter sa proposition puisqu’elle était contraire à l’intention manifeste de la Directive. Quoi qu’il en soit, en dehors d’une simple allégation selon laquelle l’employeur était déraisonnable, la fonctionnaire ne m’a fourni aucun élément de preuve à l’appui de cette prétention.

59 Le représentant de la fonctionnaire a présenté plusieurs rapports concernant le marché immobilier de 2005 et de 2006 (pièces, onglets 14 à 25). J’ai examiné ces rapports. Ils indiquent clairement qu’il s’agissait, c’est le moins qu’on puisse dire, d’un marché très occupé à Edmonton et à Calgary durant cette période. Même si le marché était en pleine effervescence à ce moment, il est important de garder à l’esprit l’intention de la Directive, soit que l’employé doit se voir rembourser des dépenses légitimes et autorisées qui découlent de la réinstallation. Comme le prévoit la clause 1.2.4 de la Directive, la réinstallation ne devrait pas devenir un exercice financier grâce auquel l’employé peut choisir le moment où le marché est financièrement optimal pour lui. La clause 1.2.4 est libellée comme suit :

1.2.4 Les dépenses doivent être directement liées à la réinstallation de l’employé et doivent être raisonnables et justifiables. Les remboursements ne doivent pas améliorer la situation financière de l’employé et sont étayés de la preuve de débours en conformité avec la Directive. Les dispositions applicables ne porteront que sur les frais légitimes de l’employé, à l’exclusion de tout profit personnel ou du remboursement des extravagances de cet employé.

60 Encore une fois, en l’espèce, il incombait à la fonctionnaire de s’acquitter du fardeau de la preuve. Je conclus que les allégations formulées n’étaient pas appuyées par les faits, les arguments ou la jurisprudence citée.

61 Enfin, je souscris aux conclusions du Comité exécutif du CNM selon lesquelles, en l’espèce, la fonctionnaire a été traitée conformément à l’esprit de la Directive. Le grief est donc rejeté. Toutefois, je prends note qu’à l’audience, l’employeur a entrepris de rembourser à la fonctionnaire, sous toutes réserves, les inspections effectuées sur les trois résidences situées sur la 80e et la 84e Avenue, et sur la 92e Rue.

62 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)

V. Ordonnance

63 Le grief est rejeté.

Le 23 octobre 2015.

Traduction de la CRTEFP

Linda Gobeil,

arbitre de grief

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