Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

L’agent négociateur a déposé un grief de principe alléguant que l’employeur a omis de mettre en œuvre la convention collective des Services techniques dans les délais prescrits par celle-ci – les parties ont présenté un énoncé conjoint des faits et consenti à ce que la Commission émette une déclaration affirmant que l’employeur avait contrevenu à son obligation contractuelle en vertu de la convention collective en omettant d’en appliquer entièrement les modalités (24 % d’entre elles n’ont toujours pas été appliquées) dans le délai prescrit de 150 jours – la Commission a conclu qu’elle avait compétence pour émettre la déclaration demandée par les parties - elle a conclu que la réponse de l’employeur au palier final, qui a été émise plus de six mois après le renvoi à l'arbitrage, ne pouvait pas écarter la compétence de la Commission parce qu’au moment du renvoi, il y avait une question non résolue - la Commission a autorisé la déclaration.Grief de principe accueilli.

Contenu de la décision



Loi sur la Commission des relations
de travail et de l’emploi dans la
fonction publique et Loi sur les
relations de travail dans
la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  20161004
  • Dossier:  569-02-156
  • Référence:  2016 CRTEFP 103

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique


ENTRE

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

agent négociateur

et

CONSEIL DU TRÉSOR DU CANADA

employeur

Répertorié
Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor du Canada


Affaire concernant un grief de principe renvoyé à l’arbitrage


Devant:
Margaret T.A. Shannon, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique
Pour l’agent négociateur:
Amarkai Laryea, Alliance de la Fonction publique du Canada
Pour l'employeur:
Karen Clifford, avocate
Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés les 27 et 28 juillet 2016.
(Traduction de la CRTEFP)

MOTIFS DE DÉCISION

I. Grief de principe renvoyé à l’arbitrage

1        L’agent négociateur, l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC), a déposé un grief de principe, le 31 mars 2014, alléguant que le Conseil du Trésor du Canada (l’« employeur ») n’avait pas mis en œuvre la convention collective des Services techniques (TC) (la « convention collective »), laquelle a été conclue par les parties, le 1er août 2013, dans les délais prescrits par celle-ci.

2        Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (la « nouvelle Commission »), qui remplace la Commission des relations de travail dans la fonction publique (l’« ancienne Commission ») et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. En vertu de l’article 393 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013, une instance engagée au titre de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; la « Loi ») avant le 1er novembre 2014 se poursuit sans autres formalités en conformité avec la Loi, dans sa forme modifiée par les articles 365 à 470 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013.

II. Résumé de la preuve

3        La preuve relative à la présente décision est fondée sur un énoncé conjoint des faits qui a été présenté par les parties.

4        Le 1er août 2013, l’AFPC et l’employeur ont conclu une entente provisoire. Le 19 septembre 2013, l’AFPC l’a ratifiée. Le 18 octobre 2013, les parties l’ont signée. Le 10 mars 2014, l’employeur a présenté une demande à l’ancienne Commission, en vue d’obtenir une prolongation de la période de la mise en œuvre de l’entente en vertu de l’art. 117 de la Loi. Le 13 mars 2014, l’AFPC a écrit à l’ancienne Commission exprimant son opposition à l’égard de la demande de l’employeur. Le 18 mars 2014, l’employeur a écrit à l’ancienne Commission et il a retiré sa demande de prolongation au motif qu’elle ne pouvait être présentée en vertu de l’alinéa 117a). Le 31 mars 2014, l’AFPC a déposé le présent grief de principe en vertu de l’art. 220 et, le 4 juillet 2014, elle l’a renvoyé à l’arbitrage. Le 13 janvier 2015, l’employeur a rendu une réponse au dernier palier au grief de principe, en l’accordant. De plus, les parties ont convenu qu’un commissaire prononcerait une déclaration affirmant que l’employeur a contrevenu à son obligation contractuelle prévue à la convention collective en omettant d’en appliquer entièrement les modalités (24 % d’entre elles n’ont toujours pas été appliquées) dans le délai prescrit de 150 jours.

5        Les parties souhaitent que la nouvelle Commission rende une décision qui comprendrait la déclaration présentée ci-dessous :

[Traduction]

L’employeur a contrevenu à son obligation contractuelle prévue à la convention collective des Services techniques (TC) en omettant d’en appliquer entièrement les modalités (24 % d’entre elles n’ont toujours pas été appliquées) dans le délai prescrit de 150 jours. Les parties conviennent également qu’une telle déclaration de la part de la Commission constitue un règlement complet de la présente affaire.

6        Les parties ont déposé des arguments écrits relatifs à la question de savoir si la nouvelle Commission avait compétence pour rendre une déclaration en l’espèce, étant donné que l’employeur a donné suite au grief après le renvoi de celui-ci à l’arbitrage, et qu’il semble maintenant ne plus y avoir de question non résolue.

III. Résumé de l’argumentation

A. Pour le fonctionnaire s’estimant lésé

7        Il importe de noter que la réponse au dernier palier dans cette affaire a été rendue le 13 janvier 2015, c’est-à-dire clairement après le renvoi à l’arbitrage, le 4 juillet 2014. Cette réponse n’a pas la même force exécutoire qu’une déclaration rendue par la nouvelle Commission et elle n’invalide aucunement sa compétence pour rendre une ordonnance relative à la réparation demandée. L’ancienne Commission, en vertu de ce qui est maintenant l’art. 12 de la Loi, a conclu qu’il lui était possible d’utiliser, au besoin, le pouvoir qui lui était conféré par cet article pour régler un différend puisque ce pouvoir implique la réalisation d’objets de la Loi ou est rationnellement lié à leur réalisation (voir Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor, 2010 CRTFP 88).

8        Dans Puxley c. Conseil du Trésor (Transports Canada), dossier de la CRTFP 166-02-22284 (19940705), la Commission des relations de travail dans la fonction publique a décidé qu’un employeur est libre de modifier une mesure disciplinaire pendant ou même après la procédure de règlement des griefs, mais avant un renvoi à l’arbitrage, soustrayant ainsi à la compétence de la Commission des questions qui, autrement, auraient pu être renvoyées à l’arbitrage. Une fois qu’un grief a été correctement renvoyé à l’arbitrage, un employeur ne peut unilatéralement éteindre la compétence de la Commission en prétendant modifier la sanction imposée.

9        Pour ce qui est de la compétence de la nouvelle Commission, bien qu’un grief de principe ne soit pas un grief portant sur une mesure disciplinaire, les situations sont analogues. De plus, rendre la déclaration demandée respecte l’esprit de la Loi et le pouvoir discrétionnaire de la nouvelle Commission en vertu de l’art. 232. 

B. Pour l’employeur

10        Il est incontestable que la nouvelle Commission a les pouvoirs pour rendre une déclaration attestant qu’il y a eu violation de la convention collective. La Loi confère aux commissaires et aux arbitres de griefs de vastes pouvoirs les autorisant à rendre une ordonnance si l’arbitre de grief ou la nouvelle Commission estime que cela est indiqué dans les circonstances. La question est de savoir si la reconnaissance de la réponse au dernier palier a la même force exécutoire qu’une déclaration rendue par la nouvelle Commission. De plus, la question est de savoir si la réponse suffit à invalider la compétence de la nouvelle Commission, étant donné que la date de cette réponse est postérieure de six mois à la celle du renvoi du grief à l’arbitrage.

11        La décision dans Bélanger c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2012 CRTFP 42, est très pertinente. Dans cette affaire, à la suite d’un renvoi à l’arbitrage, les parties ont demandé d’annuler l’audience et qu’une ordonnance sur consentement qui serait présentée à l’ancienne Commission soit approuvée et incorporée dans sa décision. S’appuyant sur ce cas, l’employeur soutient que le règlement du grief de principe au moyen de la déclaration qui avait fait l’objet d’un accord favoriserait l’intérêt supérieur des relations de travail harmonieuses.

IV Motifs

12        Les observations des parties m’ont convaincue que j’ai la compétence pour rendre la déclaration qu’elles souhaitent toutes deux obtenir. La réponse au dernier palier de l’employeur, rendue plus de six mois après le renvoi à l’arbitrage, ne peut pas écarter la compétence de la nouvelle Commission parce qu’au moment où le renvoi a été effectué, il existait toujours une question non résolue. Il faut se concentrer sur la situation factuelle existante au moment du renvoi à l’arbitrage pour établir si la nouvelle Commission a la compétence pour entendre un grief et en décider (voir Parkolub et Hu c. Agence du revenu du Canada, 2007 CRTFP 64, et Puxley). La compétence de la nouvelle Commission pour trancher une question est établie le jour où a lieu le renvoi du grief à l’arbitrage. Jusqu’à ce jour, l’ancienne Commission avait compétence, et l’employeur ne pouvait l’écarter en produisant une réponse au dernier palier après cette date.

13        Puisque j’ai conclu que j’avais la compétence pour statuer en l’espèce, et que j’ai conclu à partir des observations des parties et avec leur consentement que la déclaration demandée favoriserait l’intérêt supérieur des relations de travail harmonieuses entre elles, j’accepte de rendre la déclaration demandée à titre de règlement complet de toutes les questions toujours non résolues liées au présent grief de principe.

14        Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

15        Le grief de principe est accueilli.

16        Suivant le consentement mutuel des parties et à titre de règlement complet de toutes les questions toujours non résolues liées au présent grief de principe, je formule la déclaration présentée ci-dessous :

[Traduction]

L’employeur a contrevenu à son obligation contractuelle prévue à la convention collective des Services techniques (TC) en omettant d’en appliquer entièrement les modalités (24 % d’entre elles n’ont toujours pas été appliquées) dans le délai prescrit de 150 jours. Les parties conviennent qu’une telle déclaration de la part de la Commission constitue un règlement complet de la présente affaire.

17        Le dossier 569-02-156 est fermé.

Le 4 octobre 2016.

Traduction de la CRTEFP

Margaret T.A. Shannon,
une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique

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