Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé a présenté un grief au sujet de l’annulation soudaine et du report à une date ultérieure de son plan de retour au travail à la fin de sa convalescence, à la suite d’un accident du travail – les modifications lui ont causé une perte financière puisqu’il ne pouvait plus recevoir une rémunération [traduction] « d’accident du travail » – il a allégué que la décision de lui retirer sa rémunération d’accident du travail était injuste et était motivée par le désir de ses gestionnaires de réduire leurs dépenses budgétaires – le fonctionnaire s’estimant lésé a renvoyé le grief à la Commission en vertu de l’alinéa 209(1)b) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, ce qui nécessite qu’un grief soit lié à une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire – le fonctionnaire s’estimant lésé a admis que sa perte financière n’était pas liée à une mesure disciplinaire et qu’à travers tous les paliers de la procédure de grief, il n’avait jamais présenté une telle affirmation – étant donné que le grief n’est pas visé par l’alinéa 209(1)b), la Commission n’a pas compétence pour l’entendre. Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

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  • Date: 2016-02-01
  • Dossier: 566-02-8334
  • Référence: 2016 CRTEFP 6

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique


ENTRE

BARRY MATCHETT

fonctionnaire s'estimant lésé

et

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL
(Service correctionnel du Canada)

employeur

Répertorié
Matchett c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada)

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Bryan R. Gray, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique
Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Lui-même
Pour l'employeur:
Karen Clifford, avocate
Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés le 17 novembre 2015.
(Traduction de la CRTEFP)

Résumé

1 Barry Matchett, le fonctionnaire s’estimant lésé (le « fonctionnaire »), est un gestionnaire à Service correctionnel Canada (l’« employeur »). Il travaille à l’Établissement de l’Atlantique de l’employeur, un établissement à sécurité maximale, situé à Renous, au Nouveau-Brunswick. Il dépose un grief concernant l’annulation soudaine et le report à une date ultérieure de son plan de retour au travail, à la suite d’un congé pour accident du travail qui, selon ses dires, lui a causé une perte financière.

2 Le grief a été renvoyé à la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (la « Commission ») aux fins d’arbitrage.

3 Une audience d’une journée a été tenue afin d’entendre le grief et les preuves à l’appui. Pour les motifs indiqués dans la présente décision, j’ai conclu, durant l’audience, que la Commission n’a pas compétence pour entendre le grief et, par conséquent, le grief est rejeté.

4 Le fonctionnaire a déposé le grief le 9 janvier 2013 et l’a renvoyé à l’ancienne Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « CRTFP ») aux fins d’arbitrage le 20 mars 2013. Le 1er novembre 2014, la Commission a été créée pour remplacer la CRTFP – voir la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365). Conformément à l’article 393 de la Loi no 2 sur le Plan d’action économique de 2013, une procédure amorcée en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2) (la « LRTFP ») avant le 1er novembre 2014 se poursuit sans autres formalités en conformité avec la LRTFP, dans sa forme modifiée par les articles 365 à 470 de la Loi no 2 sur le Plan d’action économique de 2013.

Faits

5 Le fonctionnaire a été blessé au travail à l’Établissement de l’Atlantique. Après une période de convalescence, son équipe médicale a indiqué qu’il était prêt pour un retour graduel au travail. Comme il ressort de plusieurs courriels échangés entre les employés compétents de son lieu de travail, une date a été convenue pour son retour au travail. Selon ces courriels, il devait se présenter à une formation linguistique en français dès son retour.

6 Selon le témoignage du fonctionnaire et plusieurs courriels échangés déposés en preuve, l’employeur a unilatéralement modifié son plan de retour au travail en lui donnant un très court préavis. Il allègue que la modification de son plan de retour au travail lui a causé une perte financière puisqu’il ne pouvait plus recevoir une rémunération [traduction] « d’accident du travail » et qu’il a ensuite dû présenter une demande d’indemnité d’accident du travail.

7 Le fonctionnaire allègue que la décision de l’employeur de lui retirer sa rémunération d’accident du travail était injuste et qu’elle était motivée par le désir de ses gestionnaires de réduire leurs dépenses budgétaires afin de s’assurer de recevoir leur rémunération au mérite annuelle.

La compétence de la Commission

8 Le fonctionnaire a renvoyé son grief individuel à la Commission en vertu de l’alinéa 209(1)b) de la LRTFP, ce qui nécessite que le grief soit lié à une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire.

9 L’employeur fait valoir que, tout au long du processus de grief, le fonctionnaire n’a présenté aucune allégation ni fait référence aux éléments présentés à l’alinéa 209(1)b). De plus, selon l’employeur, peu importe que le fonctionnaire ait subi ou non une « sanction pécuniaire », aucune preuve d’une quelconque mesure disciplinaire prise contre le fonctionnaire ne révélait que l’affaire pouvait être visée par le champ d’application de l’alinéa 209(1)b).

10 Dans son témoignage et lors de son contre-interrogatoire, le fonctionnaire a admis qu’à aucun moment il n’a subi une mesure disciplinaire pour quelque raison que ce soit en lien avec le changement de son plan de retour au travail. Il a volontiers reconnu qu’à aucun moment durant le processus de grief, il n’a dit à son employeur qu’il affirmait avoir subi des mesures disciplinaires.

11 En raison des aveux sincères du fonctionnaire, l’audience ne pouvait pas se poursuivre. Je n’ai pas compétence pour entendre le grief en vertu de l’alinéa 209(1)b) de la LRTFP, puisque cette disposition nécessite qu’un grief individuel renvoyé à l’arbitrage soit porté jusqu’au dernier palier de la procédure de grief inclusivement, puis que le grief soit lié à une mesure disciplinaire entraînant (en l’espèce) une sanction pécuniaire.

12 Le fonctionnaire a non seulement admis n’avoir subi aucune mesure disciplinaire, mais il a reconnu que cette allégation de mesure disciplinaire n’avait pas été présentée à un quelconque palier de la procédure de grief avant le renvoi à l’arbitrage.

13 De nombreuses décisions de la Commission sont fondées sur la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans Burchill c. Canada (Procureur général), [1981] 1 C.F. 109 (C.A.) dont voici un extrait :

[Traduction]

[…] après le rejet de son seul grief présenté au dernier palier de la procédure de règlement des griefs, le requérant ne pouvait présenter à l’arbitrage un nouveau grief ou un grief différent, ni transformer son grief en un grief contre une mesure disciplinaire entraînant le congédiement […]

14 Dans son argument, le fonctionnaire a cité McMullen c. Agence du revenu du Canada, 2013 CRTFP 64, qui est une décision interlocutoire sur la compétence. Il a affirmé que McMullen accorde le pouvoir d’assouplir quelque peu la directive présentée par la Cour d’appel fédérale dans Burchill. L’arbitre de grief, dans McMullen, au paragr. 113, est allé au-delà des plaidoyers écrits officiels du processus interne de grief et a conclu que « [l]es allégations et les arguments avancés par la fonctionnaire n’ont aucunement pris l’employeur au dépourvu. »

15 L’avocate de l’employeur a répondu à l’argument de McMullen en laissant entendre que la décision n’avait pas été suivie et qu’elle aurait été infirmée si elle avait fait l’objet d’un appel.

16 McMullen se distingue par ses faits, puisqu’on y conclut, au paragraphe 105, que la fonctionnaire, dans cette affaire, a fait l’objet d’une « réunion, […] de nature disciplinaire ». Aucune preuve n’indique en l’espèce que le fonctionnaire a subi une quelconque mesure qui ressemblerait à une mesure disciplinaire.

17 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

18 Le grief est rejeté pour défaut de compétence.

Le 1er février 2016

Traduction de la CRTEFP

Bryan Gray,
une formation de la Commission des
relations de travail et de l’emploi
dans la fonction publique

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