Décisions de la CRTESPF
Informations sur la décision
Le fonctionnaire s’estimant lésé a accepté un nouveau poste de sécurité pour lequel il n’y avait pas de description de poste – il a commencé à effectuer certaines des fonctions de son superviseur, en plus des siennes – lui et son superviseur ont créé une ébauche description de poste afin d’y inclure les nouvelles fonctions de « sécurité du personnel » (PERSEC) – l’employeur a refusé d’autoriser la description PERSEC en raison du chevauchement des responsabilités et a confirmé que la description du poste de commis de soutien administratif que le fonctionnaire s’estimant lésé occupait précédemment continuait de s’appliquer – le fonctionnaire s’estimant lésé a affirmé que la description de poste générique ne décrivait pas les fonctions de son poste de façon suffisamment détaillée – il a contesté le fait qu’il n’avait pas reçu un exposé complet et courant de ses fonctions et responsabilités, conformément à l’article 54 de la convention collective – l’employeur n’a pas approuvé les fonctions qui n’étaient pas prévues par la description de poste, mais a accueilli en partie le grief au premier palier de la procédure de grief parce que la description de poste remontait à 2003 – l’employeur a approuvé une description de poste révisée de « commis de soutien aux services d’affaires » – l’arbitre de grief a conclu que le fonctionnaire s’estimant lésé n’était pas autorisé à effectuer les fonctions liées à la sécurité qui, selon les allégations de ce dernier, devaient être incluses à sa description de poste – la preuve a démontré qu’il n’avait jamais eu l’autorisation d’effectuer de telles tâches – la description de poste révisée respectait les exigences de l’article 54 – l’arbitre de grief a soutenu que l’utilisation de termes généraux est admissible dans les descriptions de poste, que le libellé des descriptions n’a pas à être exhaustif et qu’il suffit que les descriptions de poste comprennent les activités requises, ce qui exclut les activités effectuées volontairement. Grief rejeté.
Contenu de la décision
Loi sur les relations de travail dans la fonction publique
- Date: 2016-02-01
- Dossier: 566-02-3095
- Référence: 2016 CRTEFP 7
Devant un arbitre de grief
ENTRE
KEITH JEFFERY DUFFIELD
fonctionnaire s'estimant lésé
et
CONSEIL DU TRÉSOR
(ministère de l’Emploi et du Développement social)
employeur
Répertorié
Duffield c. Conseil du Trésor (ministère de l’Emploi et du Développement social)
Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage
MOTIFS DE DÉCISION
- Devant:
- Deborah M. Howes, arbitre de grief
- Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
- Ray Domeij, agent aux griefs et à l’arbitrage
- Pour l'employeur:
- Bruce Hughson, avocat, et Philip LaCasse
les 26 et 27 février, le 6 mars et le 22 mai 2013.
(Traduction de la CRTEFP)
I. Grief individuel renvoyé à l’arbitrage
1 La présente décision porte sur un grief individuel déposé par Keith Jeffery Duffield, le fonctionnaire s’estimant lésé (le « fonctionnaire »). Dans son grief, le fonctionnaire conteste le fait qu’il n’a pas reçu l’exposé complet et courant de ses fonctions et responsabilités, conformément à l’article 54 de la convention collective conclue entre le Secrétariat du Trésor et l’Alliance de la Fonction publique du Canada pour le groupe Services des programmes et de l’administration, dont la date d’expiration était le 20 juin 2007 (la « convention collective »). Il a affirmé que, pendant plus de deux ans, sa description de travail et la relation hiérarchique qui figurait sur l’organigramme pertinent n’étaient pas exactes.
2 Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (la « nouvelle Commission ») qui remplace la Commission des relations de travail dans la fonction publique (l’« ancienne Commission ») et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont également entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l’article 396 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013, un arbitre de grief saisi d’un grief avant le 1er novembre 2014 continue d’exercer les pouvoirs prévus à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2) dans sa version antérieure à cette date.
3 Le 11 janvier 2007, le ministère de l’Emploi et du Développement social, anciennement Ressources humaines et Développement des compétences Canada (« RHDCC » ou l’« employeur »), a accueilli le grief au premier palier de la procédure de règlement des griefs. RHDCC a accepté d’examiner et de mettre à jour la description de travail de l’époque du fonctionnaire. Treize mois plus tard, RHDCC lui a fourni une description de travail révisée qui, selon le fonctionnaire, n’était pas complète.
4 La seule question entre les parties consiste à déterminer si RHDCC a donné au fonctionnaire un exposé complet et courant de ses fonctions et responsabilités aux termes de l’article 54 de la convention collective.
5 J’estime que RHDCC a fourni au fonctionnaire une description de travail, conformément à ce qui est prévu par l’article 54. Par conséquent, je rejette le grief aux motifs soulevés plus loin dans la présente décision.
II. Résumé de la preuve
6 La situation de fait a été présentée par le fonctionnaire, son gestionnaire, Mike Balfour, gestionnaire régional, Administration et opérations, et le successeur de son gestionnaire, Rod Savard. Ils étaient les seuls témoins.
A. Première affectation - 2004
7 En mars 2004, le fonctionnaire travaillait en tant que commis des services de l’administration et des opérations, Gestion du matériel. Il était classifié au groupe et niveau CR-04. M. Balfour lui a offert une mutation pour qu’il travaille avec Wally Bawol, agent régional des mesures d’urgence et de la sécurité, à la Sécurité, puisque ce dernier avait besoin de soutien dans son rôle.
8 M. Balfour a rencontré le fonctionnaire pour la première fois en février 2001 lorsque ce dernier faisait partie d’un répertoire d’employés qui fournissaient des services de soutien pour six secteurs d’activité. Le fonctionnaire a exercé diverses fonctions à titre d’employé classifié CR-04, dont la gestion du matériel et de l’entreposage.
9 M. Balfour a rencontré M. Bawol et le fonctionnaire pour faire part de ses attentes à l’égard de la mutation. M. Balfour leur a dit qu’il n’y avait pas de description de travail nationale pour le nouveau rôle du fonctionnaire, mais qu’il tentait de calquer le rôle de soutien de sécurité qui existait dans d’autres régions. En se fondant sur la description de travail commune des commis de soutien administratif, les trois ont identifié des domaines où le fonctionnaire pourrait aider M. Bawol. Ces domaines sont devenus les fonctions de l’affectation. M. Balfour a confirmé qu’ils ne pouvaient pas modifier la description de travail sans son approbation. M. Bawol devait rendre compte à M. Balfour tous les mois afin d’évaluer le succès de l’affectation.
10 Le 1er avril 2004, le fonctionnaire s’est présenté pour travailler avec M. Bawol. Le fonctionnaire recevait ses directives de M. Bawol et ce dernier effectuait également ses évaluations du rendement. M. Bawol rendait compte à M. Balfour, ou à son successeur, M. Savard.
11 Durant six mois, tout se déroulait bien. Puis, selon M. Balfour, les choses ont commencé [traduction] « à déraper ». Il n’était pas au courant des changements que le fonctionnaire et M. Bawol apportaient aux fonctions du poste. Des directeurs ont commencé à lui communiquer leurs plaintes et préoccupations à l’égard du fait que le fonctionnaire exerçait des fonctions ou faisait des commentaires qui faisaient partie des fonctions de M. Bawol. Il a effectué le suivi auprès des deux afin de leur rappeler les tâches convenues.
B. Ébauche de description de travail
12 M. Bawol et le fonctionnaire ont commencé à préparer l’ébauche de la description de travail pour les fonctions du fonctionnaire afin que le poste soit classifié différemment (l’« ébauche de description de travail » ou la « description PERSEC » pour désigner la « Sécurité du personnel »). L’ébauche de description de travail indiquait que le titre du poste était « administrateur de la sécurité du personnel (PERSEC) » et que la description de travail devait être en vigueur à partir du 1er avril 2004.
13 Tout changement à la classification du fonctionnaire aurait eu une conséquence sur la classification de M. Bawol, qui était un agent de sécurité sans fonction de supervision antérieure. Cependant, puisque le fonctionnaire lui rendait compte, une opportunité d’améliorer sa classification s’est présentée, surtout s’il supervisait une personne classifiée à titre d’agent de sécurité.
14 Le 15 novembre 2004, M. Bawol a communiqué l’ébauche de description de travail à M. Balfour. Le courriel joint présentait l’opinion de M. Bawol que la description représentait bien les tâches, responsabilités et fonctions du poste. M. Bawol a invité M. Balfour à en discuter avec lui, faute de quoi, il a déclaré qu’il tiendrait pour acquis que M. Balfour était d’accord. À partir de cette date, le fonctionnaire a considéré l’ébauche de description de travail comme étant sa réelle description de travail.
15 M. Balfour savait que tous les membres du personnel souhaitaient que leurs postes fassent l’objet d’un examen de leur classification vers cette époque. La description de travail du fonctionnaire était l’une des premières qu’il a vues.
16 M. Balfour n’était pas d’accord avec l’ébauche de description de travail. Selon lui, M. Bawol demandait au fonctionnaire d’accomplir des tâches visées par sa propre description de travail de M. Bawol. Il trouvait que le libellé utilisé dans l’ébauche de la description de travail allait au-delà du niveau de travail que le fonctionnaire devait effectuer.
17 M. Balfour a parlé à M. Bawol et au fonctionnaire afin de confirmer qu’il n’y avait pas de description de travail nationale pour le rôle de soutien du fonctionnaire. Il a également indiqué que le Comité des postes de direction vacants demandait qu’un processus, une approbation et un avis de poste à pourvoir officiels soient mis en place afin de traiter un changement de description de travail. Il leur a confirmé qu’il n’était pas prêt à accepter une description de travail régionale, alors que les régions se penchaient sur une description de travail nationale pour le rôle de soutien. Il leur a dit qu’il n’était pas prêt à aller plus loin avec l’ébauche de description de travail et qu’ils devaient continuer en fonction de la description de travail commune et approuvée des commis de soutien administratif.
18 M. Balfour a reconnu que le fonctionnaire était très performant dans son rôle, auquel il apportait son initiative et sa grande expérience. Il était capable d’effectuer un large éventail de fonctions en raison de son expérience. Il était prêt à accepter de nouvelles fonctions et son enthousiasme devait parfois être restreint.
19 Le 22 février 2005, un poste de commis de soutien administratif aux services généraux par intérim classifié CR-04, aux services des finances et de l’administration, a été offert au fonctionnaire. Il a accepté le poste. Essentiellement, le changement était dû à une réorganisation, mais il s’agissait du même travail que celui qu’il effectuait depuis avril 2004.
20 Le 4 mars 2005, le fonctionnaire a écrit à M. Balfour et à M. Bawol pour accepter le poste. Il a souligné que, selon lui, la description de travail ne reflétait pas ses fonctions actuelles de PERSEC ou sa relation hiérarchique présentée dans l’ébauche de description de travail. Il leur a demandé de corriger la description de travail et l’organigramme au plus tard en juin 2015.
21 M. Balfour a immédiatement communiqué avec le fonctionnaire afin de planifier une discussion au sujet de son courriel la semaine suivante. M. Balfour a de nouveau indiqué au fonctionnaire qu’il ne procéderait pas à une reclassification des fonctions de son poste, puisque les fonctions de sécurité étaient affectées à M. Bawol et que la description de travail nationale pour les fonctions de soutien à l’agent de sécurité n’avait toujours pas progressé.
C. Demande officielle de description de travail
22 Le 6 septembre 2005, le fonctionnaire a présenté une demande écrite en vertu de l’article 54 pour que Sandra Kadey, consultante en ressources humaines, présente un exposé actuel de ses fonctions de PERSEC. Elle l’a informé qu’elle n’avait pas reçu de demande visant à classifier un poste en sécurité pour lui et qu’il était toujours visé par la description de travail générique des services généraux de l’administration. Elle l’a informée que son superviseur, par l’intermédiaire de son gestionnaire, devait présenter une description de travail mise à jour et une demande d’examen aux fins de classification, mais que tous les postes devaient être revus par le Comité des postes de direction vacants aux fins d’approbation avant d’être classifiés.
23 Le fonctionnaire lui a demandé de continuer de traiter sa demande en fonction de son poste actuel. Il lui a dit que M. Bawol effectuerait le suivi pour le poste de PERSEC avec M. Balfour.
24 Le 7 septembre 2005, Mme Kadey a fourni au fonctionnaire sa description de travail actuelle pour le poste de commis de soutien administratif aux services généraux et la cote de ce poste.
25 Le 20 septembre 2005, le fonctionnaire a demandé une copie de l’organigramme pour son poste; il a été envoyé le jour même.
26 M. Balfour a dit au fonctionnaire et à M. Bawol qu’il n’était pas content que le fonctionnaire ait communiqué avec les Ressources humaines et qu’il ne devait plus traiter avec les Ressources humaines pour la question de la classification. Le fonctionnaire devait traiter avec à son gestionnaire plutôt qu’avec les Ressources humaines.
27 Selon ce renseignement, je constate que le fonctionnaire aurait dû être avisé que M. Balfour n’avait pas approuvé son ébauche de description de travail et qu’il aurait dû communiquer avec M. Balfour pour les étapes suivantes. Le fonctionnaire a plutôt continué de traiter avec M. Bawol et les Ressources humaines.
28 Peu après, M. Balfour a changé de poste et M. Savard est devenu le gestionnaire régional.
D. Grief
29 Le 29 novembre 2006, le fonctionnaire a déposé son grief. M. Bawol venait de prendre sa retraite ce jour-là et M. Savard a occupé le poste d’agent régional des mesures d’urgence et de la sécurité à titre intérimaire. Mark Brass est éventuellement devenu l’agent régional des mesures d’urgence et de la sécurité.
30 M. Savard ne savait pas que le fonctionnaire exerçait des fonctions autres que celles du niveau CR-04 et ne l’a pas autorisé à effectuer de telles fonctions. Il a demandé au fonctionnaire de continuer son rôle en attendant que M. Bawol soit remplacé. Il a nié avoir dit au fonctionnaire de continuer avec le « statu quo », c’est-à-dire de continuer à exercer les fonctions de PERSEC. M. Brass a également dit au fonctionnaire de cesser d’essayer d’effectuer les fonctions d’agent de sécurité.
31 Le fonctionnaire n’a pas postulé au poste d’agent de sécurité.
32 Le 11 janvier 2007, M. Savard a accueilli le grief en partie, puisque la description de travail datait de 2003. Selon lui, la description de travail de PERSEC ne devait pas être utilisée comme modèle. Il a éventuellement approuvé la description de travail pour qu’elle soit celle d’un commis de soutien aux services d’affaires.
III. Résumé de l’argumentation
A. Pour le fonctionnaire
33 Le fonctionnaire a affirmé que la clause 54.01 de la convention collective obligeait l’employeur à lui fournir un exposé complet et courant de ses fonctions. Ces fonctions devaient comprendre celles que la direction lui a attribuées, que ce soit par son superviseur ou directement par un gestionnaire. Il a affirmé qu’il exerçait un éventail de fonctions qui allaient au-delà de sa description de travail obsolète.
34 Il a dit qu’il avait demandé une description de travail mise à jour et qu’il avait même fourni l’ébauche de description de travail, laquelle était représentative, selon son superviseur et lui-même, de ce en quoi comportait son travail à ce moment. Aucune mesure n’a été prise à l’égard de sa demande avant qu’il dépose son grief. Il a demandé la réparation suivante : [traduction] « Que l’employeur s’assure que tous les aspects du travail évalués soient présents dans la description de travail. Que la description PERSEC soit utilisée comme modèle. »
35 Le grief couvrait la période du 1er avril 2004 au 14 décembre 2006. En décembre 2006, son gestionnaire lui a explicitement demandé de cesser d’exercer certaines des fonctions qu’il effectuait depuis près de deux ans.
36 Le fonctionnaire a affirmé que RHDCC devait savoir, à moins de fermer les yeux volontairement, qu’il effectuait des fonctions supplémentaires à ce moment, lesquelles lui étaient attribuées par son superviseur direct, M. Bawol. Il parlait régulièrement à M. Balfour, qui aurait dû le savoir. Le fonctionnaire remplissait des rapports réguliers à l’intention de M. Balfour, qui recevait également des commentaires au sujet de certaines de ses fonctions.
37 Le 11 janvier 2007, au premier palier de la procédure de règlement des griefs, le grief du fonctionnaire a été accueilli, mais personne n’a communiqué avec lui par la suite pour mettre à jour sa description de travail. Treize mois après le dépôt de son grief, il a reçu la description de travail mise à jour qui, selon ses dires, n’était toujours pas exacte et ne présentait toujours pas de description complète de ses fonctions de sécurité. Il a affirmé que le niveau de détail de la description de travail était inexact et que la terminologie était incorrecte.
38 Il voulait que RHDCC lui fournisse une description de travail complète et exacte de ses fonctions, ainsi qu’une évaluation appropriée de ses fonctions, telles qu’elles étaient à l’époque.
39 À l’appui de sa position, le fonctionnaire m’a renvoyé à : Thom c. Conseil du Trésor (ministère des Pêches et des Océans), 2012 CRTFP 34, McKay c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2007 CRTFP 17, Cushnie c. Agence du revenu du Canada, 2007 CRTFP 96, et Manuel et Reid c. Conseil du Trésor (ministère des Transports), 2012 CRTFP 9.
B. Pour RHDCC
40 RHDCC a affirmé avoir admis le grief dans la mesure précisée dans sa réponse au grief. La réponse était rédigée en partie comme suit :
[Traduction]
[…]
J’ai déterminé que votre description de travail actuelle n’est plus valide et doit être mise à jour pour refléter les fonctions actuelles de votre poste.
Par conséquent, votre grief est admis et la mesure corrective que vous demandez sera accordée dans la mesure où un examen et une mise à jour de votre description de travail actuelle seront effectués.
41 RHDCC a fait valoir que la réponse au grief au premier palier (l’accueillir) et la description de travail révisée qui a été remise au fonctionnaire constituent une réponse complète au grief.
42 La description de travail révisée incluait les fonctions qui, selon l’employeur, devaient être effectuées par le fonctionnaire, ce qui ne comprend pas nécessairement toutes les fonctions que le superviseur attribuait à ce dernier. Une description de travail doit comprendre les fonctions qu’un employé doit effectuer, suivant les attentes de la direction (et donc les fonctions que la direction connait), plutôt que tout ce que l’employé fait.
43 L’employeur a affirmé que je devais déterminer si le fonctionnaire était tenu d’effectuer les fonctions et les responsabilités qui, selon ce dernier, ne figuraient pas dans la description de travail. Si je conclus affirmativement, je dois déterminer si la description de travail révisée reflète ces fonctions et ces responsabilités supplémentaires et si elle est conforme aux obligations présentées dans la convention collective.
44 L’employeur a affirmé qu’il incombait au fonctionnaire de démontrer les deux points, selon la prépondérance des probabilités, et que je devais examiner minutieusement la preuve pour m’assurer que la preuve à l’appui de chaque point était claire, cohérente et convaincante.
45 Selon l’employeur, le superviseur du fonctionnaire attribuait à ce dernier des tâches que le superviseur lui-même aurait dû effectuer. Le fonctionnaire ne devrait pas tirer profit du fait qu’un autre employé n’exerce pas les fonctions prévues par sa description de travail.
46 Lorsque le fonctionnaire et son superviseur ont préparé l’ébauche de description de travail, le fonctionnaire savait que son superviseur n’avait pas le pouvoir de l’approuver, et il savait également que le Comité des postes de direction vacants avait le mandat d’examiner toute description de travail unique et tout poste vacant. Il savait que si son ébauche de description de travail avait été approuvée, le poste aurait été affiché. Le fonctionnaire n’a jamais été informé que la description de travail avait été approuvée. Aucun avis de poste à pourvoir n’a été publié.
47 En avril 2005, le fonctionnaire a soulevé des préoccupations au sujet de certaines fonctions, mais a reconnu qu’on ne lui avait jamais demandé d’effectuer certaines des fonctions qu’il affirme faire partie de son travail. Par conséquent, il aurait dû savoir que l’employeur ne s’attendait pas à ce qu’il exerce les fonctions qu’il cherchait à se voir attribuer.
48 Finalement, l’employeur a dit qu’il s’était acquitté de son obligation en vertu de la convention collective. Il a demandé que je rejette le grief.
49 À l’appui de sa position, l’employeur m’a renvoyé aux huit cas suivants : Rondeau et Conseil du Trésor (Revenu Canada – Impôt), dossier de la CRTFP 166-02-27295 (19970220); [1997] C.R.T.F.P.C. no 17 (QL), F.H. c. McDougall, 2008 CSC 53; Batiot et al. c. Agence des douanes et du revenu du Canada, 2005 CRTFP 114, Fedun et al. C. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Impôt), dossier de la CRTFP 166-02-28278 à 28288 (19980611); [1998] C.R.T.F.P.C. no 49 (QL), Jaremy c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Accise, Douanes et Impôt), 2000 CRTFP 59, Hughes c. Conseil du Trésor du Canada (Ressources naturelles Canada), 2000 CRTFP 69, Kerswill et le Conseil du Trésor (Ressources naturelles Canada), 2000 CRTFP 91, et Barnes c. Agence des douanes et du revenu du Canada, 2003 CRTFP 13.
IV. Motifs
A. Le fonctionnaire a-t-il reçu un exposé complet et courant de ses fonctions et responsabilités?
50 La clause 54.01 de la convention collective prévoit des obligations claires. L’employé doit demander un exposé des fonctions par écrit. L’employeur doit alors fournir un exposé complet et à jour des fonctions et des responsabilités du poste de l’employé. L’employeur doit indiquer le niveau de classification; s’il y a lieu, la cote, de même qu’un organigramme qui indique le classement du poste dans l’organisation. La clause est rédigée comme suit :
54.01 Sur demande écrite, l’employé-e reçoit un exposé complet et courant de ses fonctions et responsabilités, y compris le niveau de classification du poste et, le cas échéant, la cote numérique attribuée par facteur à son poste, ainsi qu’un organigramme décrivant le classement de son poste dans l’organisation.
51 Le fonctionnaire avait le fardeau de démontrer que sa description de travail ne constitue pas un exposé complet et courant de ses fonctions et responsabilités. Ce principe a été établi dans Fedun.
52 Afin de répondre à cette question, la présente décision doit porter sur deux questions plus détaillées :
a. Le fonctionnaire avait-il l’autorisation d’effectuer les fonctions et les responsabilités présentées dans l’ébauche de description de travail, qui auraient alors dû être incluses à la description de travail révisée?
b. Le cas échéant, RHDCC a-t-il fourni au fonctionnaire une description de travail courante et conforme, qui reflétait ses fonctions et ses responsabilités?
1. Le fonctionnaire avait-il l’autorisation d’effectuer les fonctions et les responsabilités présentées dans l’ébauche de description de travail, qui auraient alors dû être incluses à la description de travail révisée?
53 Le fonctionnaire a affirmé qu’il avait l’autorisation d’effectuer des fonctions liées à la sécurité et que ces fonctions auraient dû être incluses à sa description de travail.
54 Selon la jurisprudence, le fonctionnaire avait le fardeau de démontrer que l’employeur lui demandait d’effectuer des fonctions qui ne figuraient pas dans sa description de travail (voir Rondeau, au paragr. 16 et Kerswill,au paragr. 3).
a. Soutien documentaire du témoignage relatif à l’autorisation
55 Le fonctionnaire et M. Balfour ont présenté des témoignages contradictoires en ce qui concerne l’autorisation. Les parties ont également fourni un nombre limité de rapports et de courriels afin d’établir si le fonctionnaire exécutait les fonctions figurant dans l’ébauche de sa description de travail. J’ai utilisé les documents afin de déterminer lequel des témoignages était probable. Je conclus que les documents soutiennent la preuve de M. Balfour selon laquelle le fonctionnaire n’était pas autorisé à effectuer les fonctions de sécurité et les autres fonctions qui, selon ses affirmations, lui ont été attribuées dans l’ébauche de description de travail.
56 Le « plan d’apprentissage personnel » de 2004-2005 du fonctionnaire a été présenté à titre d’exemple. Selon le fonctionnaire, ce plan démontrait que la direction reconnaissait la portée élargie de ses fonctions. De plus, le fait que son gestionnaire approuver une formation demandée dans son plan personnel d’apprentissage démontrait également que ce dernier reconnaissait ses fonctions de sécurité supplémentaires. Il a indiqué que, s’il n’avait pas eu l’autorisation d’effectuer ces fonctions, son superviseur et son gestionnaire n’auraient pas approuvé son plan d’apprentissage et il n’aurait pas eu l’autorisation de suivre certaines formations, dont la formation sur le filtrage de sécurité.
57 L’un des objectifs de son plan d’apprentissage était de maintenir et d’appliquer les aptitudes et l’expertise requises de son poste fonctionnel, afin de lui permettre d’appliquer efficacement des directives et de soutenir les autres membres d’équipe ou les clients. Cet objectif appuie une conclusion selon laquelle son rôle était un rôle de soutien administratif, et non de sécurité.
58 Trois de ses objectifs du plan d’apprentissage avaient trait à son avancement professionnel. Il voulait acquérir les connaissances, la reconnaissance professionnelle ou les aptitudes relatives au secteur fonctionnel des opérations administratives, généralement en suivant des cours sur le filtrage de sécurité et d’autres sujets. Il souhaitait perfectionner ses connaissances, la reconnaissance professionnelle ou les aptitudes relatives à d’autres secteurs fonctionnels des opérations administratives afin de pouvoir effectuer des tâches telle la facilitation de séances de planification et de renseignements pour les clients. Il voulait acquérir les connaissances, la reconnaissance professionnelle ou les aptitudes relatives à des secteurs fonctionnels en dehors de RHDCC afin de pouvoir participer à des comités et recommander des procédures afin de répondre aux besoins des clients. Son objectif final était de maintenir une reconnaissance professionnelle et des aptitudes relativement à des secteurs fonctionnels courants de RHDCC, par exemple, garder son certificat de secourisme et de RCR et prendre des affectations intérimaires ou de perfectionnement.
59 Je conclus que le plan d’apprentissage personnel est un plan d’apprentissage et de croissance, et non une preuve d’autorisation des fonctions attribuées. Il ne remplace pas une description de travail et ne peut être considéré comme une autorisation d’ajouter des fonctions ou de les modifier sans que les processus appropriés soient suivis.
60 L’initiative démontrée par le fonctionnaire dans son plan d’apprentissage reflète la preuve présentée oralement par M. Balfour. Les trois objectifs de perfectionnement professionnel du fonctionnaire portaient sur des tâches que lui et M. Bawol avaient incluses dans l’ébauche de description de travail et reflétaient leur plan mutuel voulant que le fonctionnaire assume plus de fonctions de M. Bawol. Cependant, ni les objectifs des plans d’apprentissage ni l’approbation ultérieure pour suivre un cours proposé ne démontraient que RHDCC avait permis au fonctionnaire d’effectuer les tâches auxquelles il aspirait.
61 Un autre exemple est le rapport envoyé par courriel en mai 2005 relativement à « un télécopieur sécurisé de DSB ». Je conclus que ce rapport ne soutient pas la position du fonctionnaire. Le fonctionnaire l’a envoyé à M. Bawol, son superviseur, avec copie conforme à M. Balfour. Dans sa réponse, M. Balfour donnait des directives à M. Bawol en vue de prendre les mesures requises, et non au fonctionnaire. Les fonctions étaient celles du superviseur, pas du fonctionnaire.
62 Un autre exemple était celui d’un rapport de sécurité du personnel de juin 2005, que le fonctionnaire a envoyé par courriel à M. Balfour. Le fonctionnaire a indiqué que ce rapport démontrait que M. Balfour savait et avait accepté le fait qu’il préparait des rapports sur le travail et qu’il effectuait le travail résumé dans le rapport. M. Balfour n’était pas d’accord et a affirmé que, selon sa compréhension, le courriel du fonctionnaire contenait un rapport de M. Bawol et du fonctionnaire, puisque les tâches de sécurité étaient attribuées à M. Bawol et les tâches administratives étaient attribuées au fonctionnaire. Selon M. Balfour, le rapport a été préparé conjointement, puis M. Bawol en a fait une mise à jour explicative.
63 Ici encore, je constate que ce rapport ne prouve pas de manière claire et convaincante que le fonctionnaire avait l’autorisation d’effectuer les tâches qu’il a affirmé effectuer. Il n’indique pas qui a fait la tâche ou quel était le niveau de travail associé à chaque tâche. Les descriptions générales peuvent renvoyer aux tâches administratives ou aux tâches des échelons supérieurs, en fonction du contexte tacite.
64 Les tâches dans la partie [traduction] « Remarques supplémentaires » sont l’exception. On y dresse une liste d’un groupe de tâches semblables à celles qui, selon le fonctionnaire, constituaient ses nouvelles tâches. On y mentionne [traduction] « BCP examine et met à jour aux fins de traitement, les questions de numéro de télécopieur confidentiel en attente, les réunions, la formation, la sécurité et la couverture initiale, les congés, les projets spéciaux et les charges de travail que cela entraîne, conformément aux directives de Wally ». Au mieux, cela démontre que M. Bawol tentait de déléguer des tâches au fonctionnaire. Cependant, cela n’établit ni la portée du travail affecté au fonctionnaire ni le fait qu’il ait été autorisé à le faire ni qu’il en ait le pouvoir.
65 Un quatrième exemple est la candidature, en 2008, du fonctionnaire au poste d’agent régional des mesures d’urgence et de la sécurité, classifié PM-04, à RHDCC. Dans sa lettre de présentation, le fonctionnaire a décrit son expérience. Plus précisément, au sujet du rôle de PERSEC qu’il m’a dit effectuer, il a écrit ce qui suit dans sa lettre : [traduction] « Je remplaçais le précédent agent régional des mesures d’urgence et de la sécurité [M. Bawol, qui a pris sa retraite depuis], comme on me l’ordonnait, lorsqu’il était absent ou en congé ». Dans son curriculum vitae joint, le fonctionnaire a écrit qu’à partir de mars 2005, jusqu’à ce jour, il était agent de sécurité du personnel (mutation/poste d’attache) sous la responsabilité de l’agent régional des mesures d’urgence et de la sécurité. Il a indiqué que sa description de travail et l’exposé de ses qualifications pour son rôle de PERSEC étaient disponibles sur demande et que le poste faisait l’objet d’un examen de classification. Il a également écrit que, d’avril 2004 à mars 2005, il était commis aux services généraux, affecté à la sécurité du personnel (affectation) et il réitéré que la description de travail de PERSEC pouvait être fournie.
66 Je conclus que la candidature n’est pas une preuve de l’autorisation d’effectuer des fonctions additionnelles. Cependant, il s’agit d’une preuve supplémentaire que le fonctionnaire continuait de penser que la description de travail de PERSEC était exacte.
67 Je constate que le fonctionnaire n’a pas été capable de démontrer qu’il avait l’autorisation d’effectuer les fonctions qui, selon ses affirmations, devaient être incluses à sa description de travail. Selon la preuve de ses deux gestionnaires, ils ne lui ont jamais demandé d’effectuer ces tâches pas plus qu’ils ne l’ont autorisé. Les tâches qu’il avait l’autorisation d’effectuer étaient de niveau de soutien administratif, et non d’un niveau plus élevé. Cela signifie qu’aucune fonction de sécurité ne devait être ajoutée à la description de travail révisée.
2. RHDCC a-t-il fourni au fonctionnaire une description de travail courante et conforme,qui reflétait ses fonctions et ses responsabilités?
68 Le fonctionnaire était préoccupé par le manque de détails de sa description de travail révisée et par le fait qu’elle ne comprenait pas d’éléments précis comme ses activités qu’il effectuait volontairement.
69 À partir des cas que les parties m’ont présentés, je retiens les principes suivants, que j’applique en l’espèce.
a) Les descriptions de travail, y compris celles applicables à un certain nombre de postes à l’échelle nationale, doivent être rédigées en termes relativement généraux (voir Fedun, au paragr. 12, où il est question de Taylor c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Douanes, Accise et Impôt), dossier de l’ancienne CRTFP :166-02-23096 (19901221); [1990] C.R.T.F.P.C. No 223 (QL)).
b) L’exposé des fonctions n’a pas à présenter en détails approfondis toutes les variations, combinaisons ou permutation infinies de la manière dont une fonction est effectuée (voir Fedun,au paragr. 12, en faisant référence à Taylor; Jaremy,au paragr. 7, et Hughes, au paragr. 4).
c) Une description de travail doit comporter suffisamment de renseignements pour rendre compte précisément de ce que fait un employé; « […] c’est-à-dire qu’il ne peut omettre de mentionner une fonction ou responsabilité particulière que le fonctionnaire doit remplir » (voir Taylor). Une description de travail contenant des descriptions générales et génériques est acceptable dans la mesure où elle satisfait à cette exigence fondamentale (voir Thom,au paragr. 85).
d) L’exposé des fonctions et des responsabilités ne doit pas omettre de renseignements en raison d’une fonction effectuée seulement à l’occasion (voir Thom,au paragr. 86).
e) L’arbitre de grief n’a pas pour rôle de corriger le libellé ou les expressions utilisées, dans la mesure où les termes décrivent généralement les responsabilités et les fonctions effectuées (voir Thom, au paragraphe 85, qui cite Jarvis c. Conseil du Trésor (Industrie Canada), 2001 CRTFP 84, au paragr. 95).
70 Je conclus que la description de travail est conforme à ces principes. Il s’agit d’une description générale des fonctions et des responsabilités du fonctionnaire. Le libellé est suffisant pour comprendre toutes les fonctions autorisées qui, selon lui, étaient manquantes et n’omettait aucune fonction qu’il devait exécuter. Elle est suffisamment détaillée pour s’appliquer à son travail.
71 En ce qui concerne les activités effectuées volontairement par le fonctionnaire, comme le rôle de commis aux incendies, la description de travail n’a pas à les inclure, puisqu’il s’agit d’activités effectuées volontairement et non des activités qu’il doit effectuer ou pour lesquelles il est évalué.
72 Pour ces motifs, je conclus que la description de travail révisée satisfait aux exigences de l’article 54 de la convention collective.
73 En résumé, le fonctionnaire n’a pas été capable de démontrer qu’il avait l’autorisation d’effectuer des fonctions additionnelles et je conclus que la description de travail révisée reflète avec exactitude les fonctions et les responsabilités qui lui sont assignées. RHDCC s’est conformé à l’article 54 de la convention collective.
74 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :
V. Ordonnance
75 Le grief est rejeté.
1er février 2016
Traduction de la CRTEFP
Deborah M. Howes
arbitre de grief