Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé était un agent correctionnel occupant un poste classifié au groupe et niveau CX-02 – en raison d’une incapacité découlant d’un accident du travail, il n’était plus en mesure d’immobiliser les détenus et il ne devait donc pas avoir de contact avec eux – finalement, le fonctionnaire s’estimant lésé a été accommodé dans un poste classifié au groupe et niveau WP-03, pour lequel l’échelle salariale était inférieure à celle de son poste classifié CX-02 – il a allégué qu’il y avait des mesures d’adaptation préférables qui minimiseraient les répercussions sur son revenu d’emploi, notamment de le nommer à un poste hybride classifié CX-02 sans contact avec les détenus ou à un poste classifié au groupe et niveau AS-05 – l’employeur a établi que le poste hybride proposé serait dépouillé des fonctions essentielles du poste CX-02 et qu’il ne serait ni utile ni productif – il en découlerait également une préoccupation importante en matière de sûreté et de sécurité – l’obligation de prendre des mesures d’adaptation ne va pas jusqu’à exiger d’un employeur qu’il modifie les fonctions essentielles ou principales d’un poste ou qu’il les attribue de façon permanente à d’autres employés – la modification de l’emploi du fonctionnaire s’estimant lésé en créant un poste hybride constituerait une contrainte excessive pour l’employeur – la nomination du fonctionnaire s’estimant lésé à un poste AS-05 constituerait une promotion – l’obligation de prendre des mesures d’adaptation ne va pas jusqu’à exiger d’un employeur qu’il accorde une promotion à une personne à un poste de niveau supérieur – le fonctionnaire s’estimant lésé s’est également plaint au sujet de commentaires que deux gestionnaires de l’employeur auraient formulés – il n’a pas été démontré que l’un des gestionnaires avait formulé les commentaires allégués – les déclarations de l’autre gestionnaire n’ont pas été jugées discriminatoires ou comme constituant du harcèlement. Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date: 2016-01-06
  • Dossier: 566-02-4894
  • Référence: 2016 CRTEFP 1

Devant un arbitre de grief


ENTRE

KIM MAGEE

fonctionnaire s'estimant lésé

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(Service correctionnel du Canada)

employeur

Répertorié
Magee c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada)

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l'arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
David Olsen, arbitre de grief
Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Andrew Astritis, avocat
Pour l'employeur:
Joshua Alcock, avocat
Affaire entendue à Saskatoon (Saskatchewan),
du 23 au 25 septembre 2014, et du 9 au 12 juin 2015.
(Traduction de la CRTEFP)

I. Grief individuel renvoyé à l'arbitrage

A. Introduction

1 Kim Magee, le fonctionnaire s'estimant lésé (le « fonctionnaire »), était un agent correctionnel classifié CX-02, pour le Service correctionnel du Canada (le « SCC »). Il a été blessé dans l'exercice de ses fonctions et il a eu besoin d'une période de traitement et de réhabilitation prolongée. En 2008, il a quitté le milieu de travail afin de suivre d'autres traitements. Une évaluation de l'état physique en février 2009 indiquait qu'il pouvait retourner au travail, mais qu'il ne devait pas avoir de contact avec les détenus, car il n'était plus en mesure de les immobiliser. En fin de compte, il a été accommodé dans un poste d'agent, Services aux victimes, classifié WP-03.

2 Il n'a pas été contesté que le poste d'agent, Services aux victimes, représente une mesure d'adaptation raisonnable; cependant, M. Magee a soutenu qu'il y avait des mesures d'adaptation préférables, notamment, un poste AS-05 auquel il aurait dû être promu. Il a également mentionné un poste hybride à l'intérieur de sa classification actuelle, soit CX-02, à la barrière principale du Centre psychiatrique régional à Saskatoon et au Centre de contrôle de l'établissement, où il n'aurait pas à immobiliser des détenus. L'un ou l'autre de ces postes aurait maintenu son salaire de base, ainsi que les primes et les heures supplémentaires, relativement intact. Il a maintenu que l'employeur avait contrevenu à son obligation de prendre des mesures d'adaptation en le plaçant dans le poste d'agent, Services aux victimes, à un salaire moindre et que, par conséquent, il avait subi des dommages, notamment pécuniaires, importants.

3 Une des questions en litige consiste à déterminer si l'obligation de l'employeur de prendre des mesures d'adaptation comprend le fait de promouvoir un employé handicapé pour lui permettre de conserver sa rémunération brute. La question de savoir si le fait d'affecter le fonctionnaire à des postes dans le centre de contrôle ou à la barrière principale du Centre psychiatrique régional constituerait une contrainte excessive pour l'employeur, est également en litige.

4 Le 21 octobre 2009, M. Magee a présenté un grief à son employeur, le Service correctionnel du Canada, qui est rédigé en ces termes :

[Traduction]

Je présente un grief parce que mon employeur a négligé ses obligations en omettant de prendre des mesures d'adaptation en milieu de travail conformément à la politique du Conseil du trésor sur l'obligation de prendre des mesures d'adaptation, ce qui, par conséquent, m'a causé de graves préjudices financiers, physiques et psychologiques. Je présente un grief parce que, en raison de mon invalidité, mon employeur a fait preuve de discrimination à mon égard de façon continue et a contrevenu à la Loi canadienne sur les droits de la personne, ainsi qu'à l'article 19 et à tous les articles connexes de notre convention collective.

5 À titre de mesure corrective, M. Magee a demandé ce qui suit :

[Traduction]

Que la direction mette en œuvre des mesures d'adaptation permanentes immédiatement, conformément à mon état de santé décrit et que je ne subisse aucune perte de traitement en raison de toute mesure d'adaptation permanente. Que je sois indemnisé pour toutes les pertes subies, y compris le salaire et les avantages, en plus d'inclure toutes les pertes de traitement et toutes les dépenses supplémentaires qui pourraient découler de la situation. Que l'employeur me verse une indemnisation de 20 000 $ pour les préjudices moraux, psychologiques et physiques soufferts et dont je souffrirai de façon continue en raison de la négligence de mon employeur. Que l'employeur me verse une indemnisation d'un montant de 20 000 $ en raison de la discrimination inconsidérée et délibérée dont j'ai été victime. Je demande que le présent grief ne me porte pas préjudice dans mes rapports futurs avec l'employeur. Je demande que toutes les répercussions fiscales découlant du présent grief soient assumées par l'employeur. Je demande des excuses écrites du ministère.

6 Le 6 janvier 2010, après avoir résumé l'essence du grief, l'employeur a répondu comme suit au grief au deuxième palier :

[Traduction]

Même si vous présentez un grief contre le fait que l'employeur n'a pas pris de mesure d'adaptation dans le milieu de travail, il est indiqué que vous avez été temporairement accommodé à l'Administration centrale régionale des Prairies depuis le 26 mai 2009. En outre, pendant notre réunion subséquente du 23 décembre 2009, il a été confirmé que votre affectation se poursuivrait selon le taux de rémunération de votre poste d'attache dans le secteur des Affaires des détenus pendant la période du 4 janvier 2010 au 30 avril 2010, moment auquel, si l'affectation vous est satisfaisante ainsi qu'à la direction, une offre permanente au niveau ASO quatre vous sera présentée. Par conséquent, votre grief et votre mesure corrective sont rejetés.

[Sic pour l'ensemble de la citation]

7 Le 27 septembre 2010, l'employeur a répondu au grief au dernier palier de la procédure de règlement des griefs, après avoir récité l'essence du grief en ces termes :

[Traduction]

Avant qu'une décision soit rendue au dernier palier, une consultation a eu lieu en présence de Fred Sadori, représentant du Syndicat des employé-e-s du Solliciteur général (SESG).

Après avoir examiné attentivement l'ensemble des renseignements pertinents au dossier, j'en suis arrivé à la conclusion que la direction a travaillé de concert avec vous, ainsi qu'avec la Commission des accidents du travail de la Saskatchewan dès le début, afin de trouver une solution qui répond à vos besoins médicaux et que, par conséquent, vous avez fait l'objet de mesures d'adaptation adéquates conformément à la Loi canadienne sur les droits de la personne, la Politique sur l'obligation de prendre des mesures d'adaptation du Conseil du Trésor et la convention collective conclue avec l'AFPC.

8 Le 8 décembre 2010, l'Alliance de la Fonction publique du Canada a renvoyé le grief à l'arbitrage, informant l'ancienne Commission que le fonctionnaire était un membre du groupe AS au service du Service correctionnel du Canada et que le grief portait sur l'article 19, « Élimination de la discrimination » de la convention collective du groupe Services des programmes et de l'administration, qui venait à échéance le 10 juin 2010.

9  Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (la « nouvelle Commission ») qui remplace la Commission des relations de travail dans la fonction publique (l'« ancienne Commission ») et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l'article 396 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013, un arbitre saisi d'un grief avant le 1er novembre 2014, continue d'exercer les pouvoirs prévus par la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; LRTFP) dans sa version antérieure à cette date.

10 Le grief a été entendu à Saskatoon, du 23 au 25 septembre 2014, et du 9 au 12 juin 2015.

11 À l'audience, M. Magee a présenté des éléments de preuve et il a cité deux témoins à témoigner : son médecin, le Dr Robert Parker, et le conseiller régional en prévention des incendies et vice-président du local 401, Terry Taylor. L'employeur a cité à témoigner Paul Urmston, qui, pendant la période pertinente, était le sous-commissaire délégué, Opérations dans la collectivité. M. Urmston était responsable de 11 établissements, de 3 pavillons de ressourcement et du Centre psychiatrique régional. L'employeur a également cité Caleigh Miller à témoigner. De mars 2009 à septembre 2010, Mme Miller était la chef des ressources humaines pour les services correctionnels, en plus d'être responsable du Centre psychiatrique régional et d'un pavillon de ressourcement; à compter du printemps 2010, elle était la coordonnatrice régionale du retour au travail. Enfin, Ed Suchorab, l'actuel gestionnaire de l'évaluation et des interventions, responsable de la gestion des agents de libération conditionnelle et qui, en 2009, était le coordonnateur intérimaire du retour au travail, et Laurie Burnouf, gestionnaire régionale des Services aux victimes et gestionnaire de M. Magee depuis mars 2010, ont également été cité à témoigner au nom de l'employeur.

II. Résumé de la preuve

12 M. Magee a commencé son emploi auprès du SCC en septembre 2001 en tant qu'agent correctionnel classifié au groupe et niveau CX-01, au Pénitencier de la Saskatchewan. Après plusieurs mois, il a été nommé par intérim à un poste classifié CX-02 et a été détaché au Centre psychiatrique régional. En 2006, il a été nommé à un poste permanent classifié CX-02.

13 Selon sa description, les fonctions de base d'un agent correctionnel classifié CX-01 et CX-02 sont essentiellement les mêmes, mais des fonctions et responsabilités supplémentaires sont assignées aux agents CX-02. Les fonctions courantes consistent à prendre soin des détenus, de les prendre en charge, de les escorter à l'intérieur de l'établissement ainsi qu'à leurs rendez-vous à l'extérieur de l'établissement, par exemple à la cour ou chez le médecin, et de rompre les perturbations. Les responsabilités supplémentaires d'un CX-02 comprennent la responsabilité des unités d'isolement et la supervision des douches et des séances d'exercice des détenus. Les agents correctionnels classifiés CX-02 se voient également attribuer des cas et assurent une gestion des cas individuel auprès de détenus.

14 M. Urmston a témoigné que le Centre psychiatrique régional est une installation pour hommes et femmes. Le Centre comprend entre 240 et 250 places, ainsi qu'un hôpital de 24 et 12 places et une aile psychiatrique pour les patients. Les hommes et les femmes sont séparés en vertu de procédures opérationnelles précises. Le personnel du Centre est composé d'infirmières et d'infirmiers, d'agents correctionnels, du personnel des programmes, de psychiatres et de psychologues.

15 L'installation comprend différentes unités ayant différentes spécialisations, notamment l'unité d'isolement, qui traite des maladies psychiatriques plus graves. Cette unité est complètement séparée du reste de l'établissement. L'unité Churchill est réservée aux femmes. L'unité Assiniboine traite les délinquants aux prises avec un dysfonctionnement sexuel ayant une causalité psychiatrique et l'unité McKenzie est une installation offrant une variété de services.

16 Même si les détenus sont largement confinés à leurs unités, ils circulent tout de même dans l'établissement, pour aller au gymnase et la bibliothèque. Ils doivent également sortir de l'établissement pour se rendre à l'hôpital et devant les tribunaux. Certains des détenus effectuent des activités de travail à l'intérieur de leurs unités.

17 Certains emplacements de l'établissement qui n'ont pas été construits de façon assez sécuritaire pour résister à une violation de plus de 12 heures ne sont pas accessibles aux détenus. Ces emplacements sont le Poste principal de contrôle et des communications (le « PPCC »), l'entrée principale, l'infirmerie, les dispensaires et les unités d'isolement, où les patients souffrant d'une affection aiguë sont situés.

18 Il n'y a eu qu'une seule violation du PPCC en 29 ans.

19 En avril 2003, M. Magee escortait un détenu devant l'établissement lorsqu'il a glissé sur de la glace. Il est tombé sur son coup, son épaule et son bras. Au début, il croyait souffrir seulement d'une élongation musculaire et il a continué à travailler. Environ un an plus tard, on l'a envoyé passer une IRM. Le diagnostic a révélé qu'il avait subi une rupture de la coiffe des rotateurs et que le mouvement de ses tendons avait été touché.

20 En 2006, il a subi une chirurgie à l'épaule.

21 Il est retourné travailler au Centre psychiatrique régional. La chirurgie n'a pas été un succès. Le fonctionnaire se plaignait de douleur. On l'a informé que la chirurgie avait été intrusive et qu'il faudrait jusqu'à un an pour que la douleur diminue.

22 Environ un an après la chirurgie, le fonctionnaire a passé une autre IRM. Au cours de cette année, il avait immobilisé des délinquants. Il a appris qu'il avait subi un claquement du tendon et une rupture de la coiffe des rotateurs et d'autres muscles dans son épaule. Son médecin l'a informé qu'il devait subir une autre chirurgie et qu'il était possible qu'il ne soit pas en mesure de retourner au travail en tant qu'agent correctionnel.

23 Le fonctionnaire a informé Dave Burbach, le gestionnaire correctionnel responsable de l'établissement de l'horaire et de la mutation, que son médecin lui avait indiqué qu'il pourrait ne pas être en mesure d'effectuer un retour au travail en tant qu'agent correctionnel. Selon le fonctionnaire, M. Burbach lui a alors répondu qu'il n'avait pas à s'inquiéter, car il y avait un certain nombre de postes où il pouvait être placé à son retour au travail. Ils ont commencé à discuter de quelques possibilités. M. Burbach lui a laissé entendre qu'il serait un bon choix pour le collège de formation du personnel, où il pourrait continuer à exercer son rôle d'agent correctionnel; cependant, avant la chirurgie, aucune mesure concrète n'a été prise pour donner suite à cette occasion.

24 La deuxième chirurgie a eu lieu en 2008. La convalescence a duré un peu plus d'un an. M. Magee a indiqué que la chirurgie n'avait pas très bien fonctionné. Son bras a dû demeurer en écharpe pendant une période anormalement longue. Son épaule lui permettait très peu de mouvement et il a suivi des traitements de physiothérapie pendant une période prolongée. Il n'a été en mesure d'effectuer un retour au travail qu'en 2009.

25 En 2008, quelque temps après sa deuxième chirurgie, Ed Suchorab, le coordonnateur intérimaire du retour au travail de l'époque, a téléphoné au fonctionnaire à son domicile pour lui dire qu'il voulait qu'il effectue un retour au travail dans un poste d'agent social. Le titulaire du poste d'agent social surveille le gymnase et la salle de musculation des délinquants et le vestiaire des travailleurs détenus. L'agent social doit également composer avec la population carcérale en général pendant les séances d'exercice et travailler directement avec les délinquants au gymnase. Selon M. Magee, il y avait fréquemment des conflits violents dans ces secteurs; par conséquent, il a répondu à M. Suchorab qu'étant donné qu'il venait de subir une chirurgie et que son bras était en écharpe, il s'exposerait lui-même à un risque s'il acceptait le poste.

26 M. Magee a témoigné qu'en guise de réponse, M. Suchorab lui a dit qu'il était paresseux, qu'il ne voulait pas travailler et qu'il était responsable de sa blessure. M. Magee a déclaré s'être senti rabaissé et que M. Suchorab n'était nullement préoccupé pour son bien-être et sa sécurité.

27 M. Magee a reconnu n'avoir présenté aucune plainte de harcèlement. Il ne se souvenait pas s'il s'était adressé à son syndicat relativement à cet incident.

28 Dans son témoignage, M. Suchorab a nié avoir formulé les commentaires que M. Magee lui a attribués.

29 M. Magee a affirmé avoir eu d'autres interactions avec M. Suchorab après son retour au travail et lorsqu'il a occupé un poste AS-05 par intérim. À l'époque, M. Suchorab était le coordonnateur par intérim du retour au travail. Il a eu plusieurs discussions avec M. Magee à propos de son placement. À ce moment, M. Suchorab a indiqué au fonctionnaire qu'il ne méritait aucune promotion et qu'il serait chanceux d'avoir un emploi d'ouvrier jardinier ou de concierge. M. Magee n'a présenté aucune plainte de harcèlement; il ne se souvient pas non plus s'être adressé au syndicat à propos de cet incident.

30 M. Suchorab ne se souvenait pas d'avoir eu une conversation de cette nature avec M. Magee. En tant que coordonnateur par intérim du retour au travail, il a effectivement discuté avec M. Magee. Il a ajouté que les discussions portaient probablement sur le processus d'accommodement et qu'il aurait renvoyé le fonctionnaire à Caleigh Miller, au Centre psychiatrique régional, car il s'agissait de l'emplacement qui était responsable de son retour au travail. Il a déclaré qu'il était très irrité que M. Magee ait formulé ces allégations à son encontre et qu'elles étaient contraires à sa personnalité.

31 En janvier 2009, la physiothérapeute de M. Magee a écrit à M. Burbach pour l'informer que le fonctionnaire serait probablement aux prises avec un certain nombre de restrictions : ne pas soulever de poids de plus de 15 à 20 livres au-dessus de sa tête; ne pas soulever de poids de plus de 25 livres à la hauteur des épaules; ne pas lever les bras au-dessus de la tête pendant plus de quelques minutes. La physiothérapeute a également indiqué que son contact direct avec les détenus devait être limité en raison de son incapacité à les immobiliser. Elle a demandé à ce que l'employeur prenne des mesures d'adaptation en le plaçant dans un poste qui tient compte des restrictions indiquées ci-dessus.

32 Les ressources humaines ont demandé des précisions, à savoir si les restrictions étaient permanentes ou temporaires ainsi que le moment où le fonctionnaire pourrait retourner à des fonctions complètes, sans restriction ou et ne faisant pas l'objet de mesures d'adaptation. Le 4 février 2009, le [traduction] « centre de réhabilitation physique » a recommandé que M. Magee ne retourne pas à un poste auprès de son employeur qui exigerait qu'il soit éventuellement tenu d'immobiliser un détenu et/ou de se défendre, compte tenu de sa capacité amoindrie de mouvement et de la force diminuée de son épaule droite (dominante).

33 Mme Miller est intervenue pour la première fois en vue de faciliter le retour au travail de M. Magee en mars 2009. Elle a travaillé avec les représentants syndicaux, la direction de l'établissement et M. Magee. Ils ont examiné différents emplois. Initialement, ils ont examiné son emploi CX-02 actuel; cependant, il a été déterminé qu'il ne serait pas en mesure d'exercer les fonctions essentielles du poste.

34 Cette détermination était fondée sur le rapport d'évaluation de la capacité physique et fonctionnelle de la Commission des accidents du travail (la « CAT ») de la Saskatchewan, daté du 4 février 2009. M. Magee a présenté ce rapport à l'employeur le 24 mars 2009.

35 Le 6 mars 2009, Mme Miller a écrit à M. Burbach. Il a indiqué que M. Magee lui avait dit qu'il avait eu certaines discussions avec lui sur son retour au travail au collège de formation du personnel. Elle a vérifié si un poste était disponible au collège de formation du personnel et ce n'était pas le cas. Elle en a informé M. Magee.

36 Le 17 mars 2009, Mme Miller a communiqué avec le gestionnaire des programmes et des interventions en santé mentale pour chercher un poste en tant qu'agent des programmes sociaux pour M. Magee. Selon sa compréhension, M. Magee avait l'éducation requise ainsi que de l'expérience dans ce domaine et, par conséquent, ce poste lui conviendrait. Le poste était à un niveau équivalent à celui du poste d'attache de M. Magee, selon la rémunération prévue par les conventions collectives.

37 Mme Miller a été informée qu'aucun poste permanent n'était vacant à la direction générale et qu'on ne prévoyait pas d'ouverture dans un avenir rapproché.

38 En mai 2009, Mme Miller a trouvé un poste AS-05 vacant à l'Administration centrale régionale. M. Magee a eu plusieurs discussions avec M. Burbach, qui l'a informé du poste. Il a également parlé avec Regan Carver, le chef de la sécurité, à qui il se rapporterait. M. Magee a été affecté à ce poste à titre d' [traduction] « affectation intérimaire », tel que décrit par Mme Miller, et ce, pour quatre mois moins un jour, du 26 mai 2009 jusqu'au 25 septembre 2009. La description de travail a été communiquée à la CAT et à l'employé. Aucune préoccupation n'a été soulevée.

39 Les fonctions du poste comprenaient l'examen des vidéos sur le recours à la force pour la région des Prairies et la formulation de recommandations à l'intention des membres du personnel relativement à la comparaison entre leurs actions et la directive du commissaire sur le recours à la force.

40 Le 28 mai, le poste a été affiché aux fins de dotation pour une durée indéterminée. M. Magee a postulé au poste. Il a répondu aux critères de sélection et il a été invité à passer un examen écrit le 10 juin 2009, afin d'évaluer les qualifications essentielles des critères de mérite.

41 Il a passé l'examen et, en fin de compte, on l'a informé qu'il avait échoué à l'examen par un point. Il a témoigné avoir vêcu beaucoup de stress au moment de passer l'examen et qu'il n'avait jamais fait un examen de cette nature auparavant.

42 Le 30 juillet 2009, M. Magee a informé Mme Miller qu'il ne s'était pas qualifié dans le cadre du processus de nomination pour le poste AS-05. Elle l'a informé qu'il ne pourrait pas être muté au poste AS-05, car cela serait considéré comme une promotion. M. Magee n'a pas soulevé la question de savoir s'il pourrait faire l'objet d'une nouvelle évaluation pour le poste AS-05 et il ne l'a pas demandé non plus. Mme Miller a témoigné que, même si un employé bénéficie d'un statut de placement prioritaire, il ne peut être évalué qu'une seule fois dans le cadre d'un processus de nomination.

43 M. Urmston savait que M. Magee était accommodé dans un poste AS-05 pendant quatre mois moins un jour, qu'il travaillait pour M. Regan, le directeur de la sécurité, et qu'il passait en revue les bandes sur le recours à la force. Selon M. Urmston, M. Magee n'exerçait pas les fonctions complètes du poste, car l'analyste est tenu de se rendre aux établissements pour examiner les angles de caméra. Étant donné que le fonctionnaire ne peut se rendre aux établissements, il n'était pas en mesure d'accomplir cet aspect de l'emploi.

44 M. Urmston ne savait pas qu'en certaines occasions, M. Magee s'était rendu aux établissements pour ramasser ou retourner les bandes sur le recours à la force.

45 Selon le témoignage de M. Urmston, comme M. Magee n'a pas été retenu dans le cadre du processus de nomination, il n'a pas démontré qu'il avait la capacité d'exercer les fonctions du poste; néanmoins, M. Urmston a accepté de l'affecter à ce poste pour une période supplémentaire, car il n'avait pas d'autre travail pour lui. Il a déclaré que si un employé est à son domicile pendant une période de six mois ou plus, il y a moins de 20 % des chances qu'il revienne au travail. Il a déclaré que le fait de l'affecter à ce poste pour une période temps supplémentaire ne constituait pas une opinion quant aux qualifications de M. Magee à l'égard de l'emploi; toutefois, selon sa compréhension, le travail du fonctionnaire était adéquat.

46 Les Ressources humaines ont quelque peu envisagé la possibilité de nommer M. Magee au poste AS-05 de façon rétroactive sans afficher le poste compte tenu de son statut de placement prioritaire. Cependant, M. Urmston n'était pas prêt à envisager cette possibilité, étant donné que M. Magee n'avait pas répondu aux qualifications essentielles du poste et qu'il avait déjà [traduction] « enfreint les règles » en prolongeant son affectation.

47 Le 3 septembre 2009, M. Magee a informé Mme Miller qu'il était très mécontent à l'égard du processus. Selon M. Magee, il aurait dû être nommé au poste AS-05 pour une durée indéterminée, car il s'était blessé au travail et qu'il incombait au ministère de prendre soin de lui.

48 M. Carver, le gestionnaire de M. Magee, a préparé un rapport d'évaluation le concernant pour la période du 20 mai 2009 au 30 septembre 2009, dans lequel il a déclaré que son travail sur le portefeuille du recours à la force avait été bon.

49 M. Magee s'est éventuellement plaint auprès du Tribunal de la dotation dans la fonction publique (le « TDFP »). Selon lui, le Service correctionnel du Canada aurait dû l'accommoder et le nommer au poste AS-05. Il a de plus allégué que le défaut de le nommer au poste pour une durée indéterminée représentait un abus de pouvoir.

50 À ce stade, je m'éloigne de la chronologie de la preuve afin de revoir la preuve liée à la plainte devant le TDFP.

51 La plainte a été entendue par le TDFP les 24 et 25 février 2011. Elle a été rejetée avec motifs le 13 avril 2011, puisque le Tribunal a conclu qu'il n'y avait eu aucun abus de pouvoir (voir Magee c. le commissaire du Service correctionnel du Canada, 2011 TDFP 12).

52 Dans les motifs de décision, le Tribunal a souligné ce qui suit au paragraphe 6 :

Le plaignant […] ne remettait pas en question le processus d'évaluation pour le poste AS-05 en tant que tel ni les qualifications des personnes nommées. Ses préoccupations se limitaient au fait que l'intimé n'avait pas pris de mesures d'adaptation à son endroit en le nommant au poste AS-05.

53 Le Tribunal a souligné ce qui suit au paragraphe :

Mme Miller a déclaré que si le plaignant avait démontré qu'il possédait les qualifications essentielles au moment d'être évalué pour le poste AS-05, il aurait été nommé au poste grâce à son droit de priorité. Cependant, lorsqu'il a été établi qu'il ne possédait pas les qualifications essentielles, sa candidature n'a pas été retenue en vue de la nomination à durée indéterminée.

54 Le Tribunal a déclaré ce qui suit au paragraphe 14 :

[…] il n'y a eu aucun abus de pouvoir dans la décision de l'intimé de ne pas nommer le plaignant au terme du processus de nomination interne annoncé pour le poste AS-05. Le Tribunal juge que le plaignant ne possédait pas les qualifications essentielles établies pour ce poste. Ce dernier n'a d'ailleurs pas contesté l'examen visant à évaluer les connaissances ni les résultats qu'il a obtenus et il ne met pas en doute le processus d'évaluation au terme duquel il a été jugé non qualifié. Selon l'art. 30(2)a), pour être nommée, une personne doit posséder les qualifications essentielles établies pour le poste. Une personne ne possédant pas les qualifications essentielles ne peut pas être nommée.

55 Le Tribunal souligne au paragraphe 16 ce qui suit :

Le plaignant avance qu'il pouvait néanmoins être nommé au poste […] en tant que bénéficiaire de priorité […][en partant] du principe qu'il se considère qualifié et que selon lui l'intimé aurait dû prendre des mesures d'adaptation à son endroit en le nommant au poste.

56 Le Tribunal a soulevé que le fondement de la demande du plaignant voulant qu'il soit qualifié n'était pas clair, car il n'a pas contesté la conclusion du comité d'évaluation quant à son échec à l'examen écrit visant à évaluer les connaissances. Cependant, le Tribunal a affirmé que si le plaignant se fondait sur sa nomination initiale pour démontrer qu'il était qualifié, il faut garder à l'esprit qu'il a été nommé pour moins de quatre mois et que la Loi sur l'emploi dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, par. 12 et 13) (la « LEFP ») crée une exception à l'égard des nominations de moins de quatre mois répondant aux critères de mérite établis à l'article 30.

57 Mme Miller a témoigné que les qualifications essentielles pour le poste AS-05 n'avaient pas seulement été déterminées par les examens écrits. Les qualifications essentielles comprennent les études, l'expérience, les facteurs de connaissances et les qualités personnelles, ce qui a été présenté dans l'avis d'offre d'emploi de ce poste.

58 De retour à la chronologie de l'affaire, le 22 septembre 2009, Mme Miller a écrit à M. Suchorab pour décrire les événements jusqu'à cette date, selon son point de vue. Elle a souligné que, pendant une conversation ce jour-là avec M. Magee, ce dernier l'a informée que la CAT et son médecin avaient établi une restriction et qu'il ne devait avoir [traduction] « aucun contact avec les détenus ». M. Magee lui a remis un billet de médecin du Dr Parker qui indiquait : [traduction] « Ce patient peut retourner au travail – on recommande qu'il n'ait aucun contact avec les détenus – déficience permanente ». Selon elle, il s'agissait d'un nouveau renseignement, car une conversation anecdotique avec la CAT avait indiqué qu'il n'y avait aucune préoccupation à l'égard de différents postes, et que le fonctionnaire ne pouvait simplement pas retourner dans un poste CX ou à titre de premier répondant. Elle a souligné que, étant donné ce nouveau renseignement, en bonne conscience, elle ne pouvait pas faciliter un retour au Centre psychiatrique régional, où tous les postes comprenaient des contacts avec les détenus.

59 Elle a écrit à la CAT pour demander des renseignements à jour concernant l'état de la demande de M. Magee. Elle a été informée qu'il n'y avait aucune modification en ce qui concernait les limitations relatives à l'emploi, notamment qu'il ne serait pas en mesure d'effectuer un retour à un poste qui pourrait le placer dans une situation où il aurait à immobiliser un détenu ou à se défendre. Mme Miller a témoigné que selon le billet du Dr Parker et les renseignements de M. Magee, elle était arrivée à la conclusion que M. Magee ne pouvait faire l'objet d'un placement à un poste CX au Centre psychiatrique régional ou à tout autre poste au sein de l'établissement, car les détenus avaient accès à l'ensemble des secteurs.

60 Le Dr Parker a témoigné qu'au moment de rédiger le billet, il était préoccupé par le fait que M. Magee ne puisse pas exercer de façon sécuritaire un emploi dans le cadre duquel il entretiendrait des contacts avec les détenus, car il n'était pas en mesure d'immobiliser un détenu ou de se défendre. Pendant l'audience, il a déclaré qu'il ne serait pas aussi préoccupé si M. Magee se trouvait dans un endroit sûr ou s'il était escorté. Pendant son contre-interrogatoire, le Dr Parker a admis qu'il aurait pu être utile de le préciser dans son billet.

61 À peu près à ce moment, M. Magee a exprimé un intérêt à l'égard d'un poste d'analyste AS-04, qui exigeait un diplôme universitaire ou un équivalent dans la fonction publique. Il a soulevé auprès de Mme Miller la possibilité de rédiger un examen d'équivalence universitaire pour le poste AS-04, puisqu'il n'était pas titulaire d'un diplôme universitaire.

62 Le fonctionnaire a également informé Mme Miller de la possibilité qu'un poste d'agent de sécurité et d'entretien CX-02 s'ouvre sous peu. Il a indiqué qu'il pourrait souhaiter obtenir un droit de priorité en raison d'une invalidité, mais qu'il hésitait car cela évoquait la possibilité d'avoir à accepter un poste dans un autre ministère; il ne voulait pas quitter le Service correctionnel du Canada. Mme Miller lui a répondu que ce poste n'était pas disponible. Dans sa note à l'intention de M. Suchorab, elle a déclaré qu'elle aimerait idéalement nommer M. Magee au poste d'analyste AS-04 pour une période temporaire de quatre à six mois. Elle a indiqué qu'elle prendrait les mesures pour lui permettre de rédiger l'examen d'équivalence universitaire et que, s'il le réussissait, ils devraient envisager de le muter à ce poste, car il ne s'agissait pas d'une promotion. Elle a indiqué que s'il ne se qualifiait pas, ils devraient trouver d'autres solutions.

63 Mme Miller a pris des mesures pour permettre à M. Magee de faire l'examen d'équivalence et lui a remis certains documents préparatoires qui ne compromettaient pas le processus. M. Magee a passé l'examen d'équivalence universitaire le 17 novembre 2009. Il ne l'a pas réussi.

64 Mme Miller a fortement recommandé que M. Magee s'inscrive au droit de priorité en raison d'une invalidité, ce qui ferait en sorte que les gestionnaires dans les autres ministères seraient tenus de prendre sa candidature en considération avant celles d'autres candidats. En fin de compte, il s'est effectivement inscrit à la fin de septembre 2009. M. Magee lui a dit qu'il préférerait obtenir un poste à l'extérieur du Centre psychiatrique régional. Il lui a dit qu'il était préoccupé par sa sécurité et celle des autres s'il se trouvait à l'intérieur des murs de l'établissement.

65 La nomination intérimaire de M. Magee en tant que AS-05 a été renouvelée du 26 septembre 2009 au 22 janvier 2010. La direction n'était pas prête à prolonger la nomination au-delà du 22 janvier 2010, car elle prévoyait donner suite au processus de nomination AS-05 qui était presque terminé pour doter le poste pour une durée indéterminée.

66 Le 8 octobre 2009, on a demandé au fonctionnaire s'il était intéressé par un autre poste d'analyste AS-04 dans le secteur des Affaires des détenus qui avait été affiché. On l'a informé que puisqu'il bénéficiait désormais d'un droit de priorité ministériel, il n'avait pas à poser sa candidature. M. Magee a indiqué que ce poste ne l'intéressait pas en raison de la différence de salaire.

67 Le 10 décembre 2009, Mme Miller a informé les relations de travail, qui se préparaient à la tenue de la présente audience de grief, que la restriction relative à [traduction] « l'absence de contact avec les détenus » émanait du médecin de M. Magee et de la CAT. À son avis, cette restriction éliminait les postes au Centre psychiatrique régional, puisque tous les postes comprenaient des contacts avec les détenus. Elle a indiqué que l'employeur demandait des renseignements médicaux supplémentaires afin d'étudier d'autres options de placement pour déterminer s'il pouvait travailler avec des détenus en liberté conditionnelle et des délinquants en fuite. Elle a également indiqué que M. Suchorab et elle rencontreraient le gestionnaire de cas de la CAT et la réadaptation professionnelle pour discuter d'autres possibilités.

68 Je m'éloigne de la chronologie de l'affaire à ce stade pour me pencher sur la preuve concernant la possibilité de prendre des mesures d'adaptation à l'égard de M. Magee au PPCC et à l'entrée principale. Le 22 décembre 2009, Mme Miller et M. Burbach ont discuté de cette possibilité. M. Burbach était d'avis que le PPCC et l'entrée principale étaient des postes non-répondants. Mme Miller a indiqué, toutefois, que le poste à l'entrée principale était un poste armé; elle ignorait toutefois s'il y avait des préoccupations relatives à l'utilisation des armes à feu compte tenu des limitations physiques de M. Magee. Elle a observé que l'agent correctionnel affecté au secteur de sécurité des visiteurs à la barrière principale devait procéder à la fouille des véhicules, soulever des paquets sur la machine à rayons X et les numériser,  et effectuer la fouille des visiteurs des détenus. Il y avait un risque d'altercation avec le visiteur dans l'éventualité où des articles de contrebande seraient décelés ou l'entrée lui serait refusée. M. Burbach a indiqué qu'habituellement les CX effectuaient une rotation au PPCC tous les quatre heures en raison de l'environnement physique à l'intérieur (mauvais éclairage, caméras vidéo, avertisseurs et alarmes) ainsi qu'en raison de la concentration requise. Elle a souligné qu'elle s'attendait à ce que des symptômes de fatigue mentale et physique surviennent après un quart de travail de 8, de 12 ou de 16 heures à ce poste.

69 Elle a témoigné qu'il y avait un désaccord entre M. Suchorab et elle, car celui-ci estimait que l'on pouvait placer M. Magee dans des postes où il y avait un contact limité avec les détenus, alors qu'elle était d'avis que selon les rapports du médecin de M. Magee, il ne pouvait y avoir aucun contact avec les détenus.

70 Le 22 décembre 2009, le Dr Parker a écrit à la CAT, indiquant en partie ce qui suit :

[Traduction]

Vous posiez des questions à propos du contact avec les détenus pendant son programme de retour au travail et, comme je l'ai mentionné ci-dessus, il s'agit d'une question de sécurité qui devrait être examinée dans la mesure du risque où M. Magee n'est pas en mesure de se défendre ou d'aider un autre prisonnier ou collègue. J'aimerais voir une analyse des demandes d'emploi pour tout emploi qui lui est proposé. M. Magee croit que le seul endroit sûr pour lui serait d'être éloigné de tout contact direct avec les détenus.

71 L'affaire de M. Magee a été renvoyée au Comité du retour au travail, composé de représentants du Syndicat des agents correctionnels du Canada et de la direction, notamment un gestionnaire correctionnel, le président local du syndicat, un représentant local du syndicat et Mme Miller, en qualité de représentante des Ressources humaines. Le comité est arrivé à la conclusion que le fait de placer M. Magee dans l'un ou l'autre de ces postes, au PPCC ou à la barrière principale, contreviendrait aux restrictions médicales en place.

72 On a demandé à M. Magee si l'employeur avait envisagé de le nommer au poste CX-02 à la barrière principale. Il a déclaré [traduction] « pas selon ses souvenirs »; cependant, il aurait accepté un tel poste, car il aurait été en mesure de demeurer un CX-02.

73  Le fonctionnaire, M. Urmston et M. Barry Stolar se sont rencontrés le 23 décembre 2009. Au cours de cette rencontre, M. Urmston l'a informé qu'il ne le replacerait pas dans l'établissement aux postes à la barrière principale et au PPCC. Il l'a informé qu'il avait décidé de le placer dans un poste d'analyste des griefs dans le cadre d'une affectation de trois mois. Une entente en ce sens a été signée par M. Urmston, M. Magee et M. Stolar.

74 Le 31 décembre 2009, la CAT a écrit au Dr Parker en indiquant que l'employeur et la CAT avaient besoin de précisions quant à savoir ce que l'on entendait par [traduction] « aucun contact avec les détenus ». La lettre indiquait en partie ce qui suit :

[Traduction]

Le fait que M. Magee travaille dans un établissement correctionnel signifie qu'il sera toujours en contact avec des détenus. C'est quelque chose qui me préoccupe et qui préoccupe l'employeur. À l'heure actuelle, l'employeur s'efforce de trouver un poste convenable à l'intérieur de l'établissement; cependant, il y a des obstacles quant à l'endroit où il serait en mesure de travailler, compte tenu du fait qu'il n'est pas en mesure d'avoir de contacts avec les détenus.

75 M. Magee a témoigné qu'à son avis, le poste CX-02 à la barrière principale ne comprenait aucun contact direct avec les détenus. Il a déclaré que l'entrée de sécurité principale était un immeuble indépendant situé approximativement à 100 mètres du Centre psychiatrique régional. De l'avis de M. Magee, la barrière principale ne faisait pas partie de l'établissement correctionnel. Il a déclaré qu'il y avait deux postes dans l'immeuble. L'un d'eux était un poste sécurisé protégé par du verre pare-balles, qui était un poste armé. Avant sa deuxième chirurgie, le poste était doté par des CX-02 et, par la suite, il était doté par des CX-01, car tous les postes armés étaient dotés par des CX-01. Il a déclaré que le poste était armé afin d'empêcher quiconque d'attaquer l'établissement ou d'empêcher une tentative d'évasion par un délinquant. Il y avait des meurtrières pour accueillir des carabines. La personne à ce poste contrôle la barrière donnant accès à l'établissement. Les délinquants sont escortés à travers cette barrière pour se rendre à leurs rendez-vous dans des camionnettes sécurisées.

76 Selon M. Magee, les visiteurs entrent par la porte principale et parlent avec l'agent dans le poste armé. L'agent, s'il est satisfait, ouvre une deuxième porte, et le visiteur entre dans l'établissement, où la personne est rencontrée par un CX-02, qui est désarmé, mais qui porte des menottes et un vaporisateur de poivre. On interdit aux visiteurs d'apporter des téléphones cellulaires ou toute somme d'argent supérieure à cinq dollars. L'objet de la visite est documenté par l'agent correctionnel CX-02 et les articles du visiteur doivent être balayés. Étant donné que l'agent correctionnel est un agent de la paix, il peut procéder à une fouille au moyen d'un détecteur manuel, au besoin. M. Magee a déclaré qu'il n'y avait aucun incident lorsqu'il travaillait dans ce secteur, même si l'entrée avait été refusée à certains visiteurs. Les heures de visites sont entre 6 h 45 et 23 h. Après 23 h, la barrière principale est verrouillée.

77 Une fois qu'un véhicule est autorisé à franchir la barrière, cet agent se rend à l'entrée des véhicules et procède à la fouille du véhicule pour déceler des articles de contrebande, des armes, de la drogue ou de l'alcool. Si l'agent correctionnel n'est pas satisfait, le véhicule est verrouillé dans l'entrée des véhicules et on communique avec l'agent correctionnel et la police. Si l'agent éprouve des préoccupations pour la sûreté et la sécurité, il communique par radio avec le PPCC pour obtenir de l'aide. M. Magee a déclaré que l'agent n'avait aucun contact avec les délinquants.

78 M. Magee a travaillé à la barrière principale avant de s'absenter pour sa deuxième chirurgie. Il ne savait pas que les normes de mutation  avaient été modifiées pour prévoir que les postes CX puissent être ajustés sur le plan opérationnel et affectés à une autre partie de l'établissement une fois que la barrière est fermée aux visiteurs. Il a reconnu qu'il ne serait pas en mesure d'exercer ces fonctions, à moins d'être escorté.

79 M. Magee a reconnu que, si l'agent qui fouille les véhicules décèle de la contrebande, la situation pourrait devenir volatile et il pourrait y avoir un risque de conflit. S'il y avait des perturbations, le fonctionnaire ne pourrait pas les adresser en raison de ses restrictions. On lui a demandé si, lorsqu'il fouillait sous un véhicule, une personne pouvait se cachait en dessous et si cela pouvait constituer un risque éventuel. M. Magee a répondu qu'il n'avait jamais entendu parler qu'une personne avait tenté d'entrer par effraction dans l'établissement.

80 Il a également été convenu que le fait de tirer avec une carabine pourrait lui causer des blessures supplémentaires à son épaule et aggraver son état.

81 M. Taylor a témoigné avoir été un agent correctionnel pendant 8 ou 9 ans au cours de sa carrière. La dernière fois qu'il a agi en cette qualité était en 1988. Il a également décrit le rôle des agents correctionnels à la barrière principale. Il a reconnu qu'il n'avait jamais travaillé à la barrière principale du Centre psychiatrique régionale. Il a ajouté que l'agent CX-02 dans un poste non armé portait un vaporisateur de poivre aux fins de protection. À sa connaissance, une seule agression physique d'un agent non armé par un visiteur au Pénitencier de la Saskatchewan a eu lieu au cours de sa carrière. En outre, il était au courant qu'un agent CX-02 comptant de longues années de service auprès du Service correctionnel du Canada, qui a travaillé à la barrière principale du Pénitencier de la Saskatchewan pendant une période de 4 ou 5 ans à scanner les visiteurs et qui n'était plus capable de se déplacer comme auparavant.

82 M. Taylor a déclaré qu'il y avait d'autres circonstances où des personnes sont postées à la barrière principale dans le poste non armé; par exemple, les femmes enceintes et les personnes avec des invalidités temporaires, comme celles qui ont un bras ou une jambe dans le plâtre.

83 M. Magee a décrit le rôle du PPCC, soit le Poste principal de contrôle et des communications. Le titulaire de ce poste est responsable de l'ensemble des activités de sûreté et de sécurité de l'établissement. Il surveille l'ensemble des alarmes pour les barrières externes ainsi que les barrières internes; il est responsable des alarmes incendies et de fournir de l'aide par soutien radio aux agents correctionnels de l'unité; il est responsable de surveiller les écrans vidéo pour la surveillance des détenus. M. Magee a déclaré que les détenus ne sont jamais autorisés à entrer dans la salle de contrôle, car cela pourrait compromettre la sécurité de l'établissement. Le poste est situé à l'intérieur de l'établissement; cependant, il a souligné qu'il n'y avait aucune interaction directe avec les détenus à l'entrée ou à la sortie. Il a reconnu que les détenus nettoient ce secteur et, s'ils le font, ils sont escortés, même si l'essentiel du travail est effectué par les responsables de l'entretien de l'établissement.

84 Il a reconnu que ce poste pouvait être accablant pour les sens et qu'il s'agit d'une rotation de quatre heures difficiles. Une des raisons pour laquelle les agents correctionnels effectuent une rotation pendant leur poste est de leur permettre de demeurer alertes. Il a proposé d'alterner entre la barrière principale et le PPCC, puisqu'il ne serait pas idéal de passer plus de quatre heures dans ce poste. À la question de savoir s'il croyait qu'il y avait un risque important de surcharge associé au fait de se trouver dans le PPCC pendant quatre heures tous les jours par opposition au fait d'effectuer une rotation à d'autres postes, M. Magee a déclaré que, comme pour d'autres emplois, il s'y habituerait. Il a reconnu que, dans son emploi actuel, il était devenu difficile d'utiliser l'ordinateur.

85 Le poste est doté par deux agents, un CX-01 et un CX-02. Pendant le poste de minuit, il n'y a qu'un seul agent, un CX-02. Il a déclaré qu'il s'agit habituellement de postes tournants de quatre heures. À son avis, les agents à la barrière principale et au PPCC pourraient éviter le contact avec les détenus.

86 On a demandé au Dr Parker s'il avait été questionné à propos de la possibilité que M. Magee travaille à la barrière principale et qu'il inscrive les visiteurs, les balaie et fouille les véhicules. Il a déclaré qu'il faudrait déterminer son habileté et sa capacité fonctionnelle, le risque d'altercation physique et si le poste était armé, et évaluer la sécurité du poste et s'il était nécessaire de grimper sur les véhicules, compte tenu des limitations relatives à son épaule. Une fois tous les renseignements obtenus et examinés et si le risque est faible, on pourrait déterminer si le poste conviendrait. Il a déclaré que M. Magee et lui étaient ouverts à un certain nombre de possibilités où le risque qu'il ait à immobiliser des détenus est faible.

87 Le Dr Parker a reconnu qu'il y aurait une préoccupation potentielle si M. Magee était nommé au poste CX-02 à la barrière principale et qu'il devait utiliser les menottes. Il ne se souvenait pas d'avoir parlé avec M. Magee du poste à la barrière principale. Le Dr Parker a reconnu que ses renseignements concernant les fonctions des postes d'agent correctionnel au PPCC et à la barrière principale ne lui ont été communiqués que par M. Magee. Il a convenu qu'idéalement, M. Magee ne devrait pas être nommé à un poste à l'intérieur de l'établissement.

88 M. Urmston a témoigné qu'il n'y avait aucun poste d'agent correctionnel au Centre psychiatrique régional qui n'exigeait aucun contact avec les détenus. La prémisse fondamentale du poste consiste à travailler avec des détenus et à aider les délinquants à devenir des citoyens respectueux des lois, en les sollicitant et en les encourageant. Le rôle principal des agents correctionnels consiste à travailler avec les détenus et à contrôler les délinquants au sein des établissements. Ce sont eux qui exercent le plus de contrôle et de pouvoir sur les délinquants, car ils sont avec eux la majeure partie de la journée. Ils voient les délinquants dans leurs unités résidentielles et surveillent leurs activités dans l'ensemble de l'établissement. Le service correctionnel dépend des rapports d'observation des CX-02 dans le cadre des rapports de gestion des cas et sur les observations des CX-01 pour les rapports des renseignements de sécurité. Les CX formulent des recommandations en ce qui concerne les absences temporaires, la rémunération des détenus, les déplacements à l'extérieur de la cellule et les achats des détenus, et ils peuvent formuler des recommandations qui peuvent avoir une incidence sur la libération conditionnelle du délinquant. L'agent correctionnel est la personne à qui le délinquant s'adresse dans l'unité s'il éprouve des difficultés.

89 M. Urmston a déclaré que la description de travail pour le poste CX-02 a été acceptée par le Syndicat des agents correctionnels du Canada. La principale différence entre les CX-01 et CX-02 est que le premier n'effectue pas de gestion de cas, alors que le deuxième peut se voir affecter jusqu'à six délinquants, ce qui inclut le fait d'entretenir un contact régulier et des communications régulières avec les détenus, de documenter le comportement des détenus et de préparer des rapports sur la gestion des cas. C'est le CX-02 qui travaille au sein de l'unité qui communique avec le détenu, qui sait comment va réellement le détenu et s'il fait des progrès.

90 Les principales activités du poste CX-02 sont les suivantes :

[Traduction]

Participer, en tant que membre de l'équipe, à l'élaboration des plans correctionnels pour la réinsertion des détenus.

Observer, contrôler et diriger les activités quotidiennes des détenus, y compris les activités récréatives, sociales, culturelles et de perfectionnement personnel, les visites et la correspondance, les arts et métiers, les événements spéciaux et les escorter à l'extérieur de l'établissement.

Effectuer les dénombrements et les patrouilles tout en surveillant les déplacements et autres activités des détenus à l'intérieur de l'établissement.

Effectuer les vérifications de sécurité et des fouilles systématiques des unités résidentielles, des installations physiques, des bâtiments, des véhicules, des détenus, d'autres personnes et leurs effets personnels, ainsi que tout autre endroit où peuvent se trouver des objets interdits.

Motiver et encourager les détenus à perfectionner leurs compétences nécessaires à la vie courante dans leur environnement communautaire par l'intermédiaire de débouchés comme la participation à des programmes.

Informer les détenus en ce qui a trait aux politiques, aux procédures et aux lignes directrices.

Fournir du mentorat et de l'encadrement en cours d'emploi aux agents correctionnels au niveau d'entrée et aux étudiants en stage.

Effectuer les activités relatives à la gestion de cas pour les détenus qui leur sont affectés en tant que membre de l'équipe de gestion des cas. Cela sous-tend le maintien d'un contact régulier et d'une communication régulière avec les détenus auxquels il est affecté et le suivi du processus de réinsertion [c.-à-d., documenter le comportement des détenus]. Traiter et remplir les rapports sur la gestion des cas et les demandes et les rapports des détenus.

Superviser un groupe de détenus dans l'unité résidentielle et les secteurs de travail.

Pratiquer la réanimation cardiopulmonaire [RCP] en réponse aux incidents et prêter une aide et un soutien immédiats, une fois que le secteur est sécurisé, aux parties blessées, au besoin. Le ou la titulaire peut également devoir utiliser l'appareil respiratoire autonome pour secourir des personnes dans des endroits enfumés.

Surveiller les déplacements et les activités des visiteurs et des entrepreneurs civils, ainsi que les activités et les événements sociaux à l'établissement et sur la réserve pénitentiaire. Le ou la titulaire du poste détient le statut d'agent ou agente de la paix.

91 M. Urmston a indiqué que les seules activités principales du poste qui pourraient être effectuées sans avoir de contact avec les détenus sont l'élaboration de plans de corrections pour la réinsertion des détenus, le mentorat et l'encadrement des agents correctionnels au niveau d'entrée et, possiblement, la surveillance des déplacements et des activités des visiteurs et des entrepreneurs civils s'ils travaillent à l'extérieur de l'établissement.

92 En ce qui a trait à la possibilité d'un poste CX-2 exclusivement au collège de formation du personnel, M. Urmston a témoigné que l'employé perdrait éventuellement le fil des événements à l'intérieur de l'établissement et que ces connaissances ne seraient plus à jour, ce qui nuirait à l'efficacité de son enseignement aux nouveaux employés.

93 La description de travail CX-1 a été révisée aux environs de 2009. La principale différence entre les deux postes est que le CX-2 a une responsabilité de gestion de cas.

94 Les principales activités du poste CX-1 sont les suivantes :

[Traduction]

Superviser, contrôler et surveiller les déplacements et les activités des détenus à l'intérieur et à l'extérieur de l'établissement; effectuer des dénombrements et des patrouilles.

Effectuer les vérifications de sécurité et les fouilles des unités résidentielles, des installations physiques, des bâtiments, des véhicules, des détenus, des autres personnes et de leurs effets personnels ainsi que de tout autre endroit où peuvent se trouver des objets interdits.

Surveiller les déplacements et les activités des visiteurs et des entrepreneurs civils, ainsi que les activités et les événements sociaux à l'établissement et sur la réserve pénitentiaire.

Participer, en tant que membre de l'équipe de l'unité correctionnel, à l'élaboration et à la mise en œuvre des programmes de l'unité, et formuler des commentaires à cet égard.

Fournir du mentorat et de l'encadrement en cours d'emploi aux agents correctionnels au niveau d'entrée et aux étudiants en stage.

Faire preuve de professionnalisme dans l'exercice des fonctions de sécurité afin de présenter un exemple comportemental positif aux détenus et favoriser un environnement contribuant au perfectionnement des compétences nécessaires à la vie courante.

Dans le cadre des fonctions, encourager les détenus à participer aux programmes de réinsertion.

Consigner les observations sur les déplacements et le comportement des détenus dans des registres des activités précis afin de tenir les superviseurs informés.

Participer à des escortes et à des transferts de détenus en dehors de l'établissement.

Saisir et consigner les objets interdits aux fins de sécurité.

Pratiquer la réanimation cardiopulmonaire [RCP] en réponse aux urgences médicales et prêter une aide et un soutien immédiats, une fois que le secteur est sécurisé, aux parties blessées, au besoin. Le ou la titulaire peut également devoir utiliser l'appareil respiratoire autonome pour secourir des personnes dans des endroits enfumés.

Le ou la titulaire du poste détient le statut d'agent ou agente de la paix.

[Sic pour l'ensemble de la citation]

95 M. Urmston a déclaré que les seules activités du poste CX-02 qui pourraient être effectuées sans entretenir de contact avec les détenus seraient de contribuer à l'élaboration et à la mise en œuvre des programmes de l'unité, fournir du mentorat et de l'encadrement en cours d'emploi aux agents correctionnels au niveau d'entrée et aux étudiants en stage, et consigner les objets interdits. En ce qui concerne la fonction de mentorat, M. Urmston a signalé que la capacité d'une personne qui a cessé d'entretenir un contact avec les détenus de contribuer de façon significative diminuerait au fil du temps, car ses connaissances deviendraient moins pertinentes en l'absence d'une expérience continue supplémentaire en tant qu'agent correctionnel ayant des contacts avec les détenus.

96 M. Urmston a fait référence aux conditions de travail avec lesquelles les agents correctionnels doivent fonctionner, tel qu'il est mentionné, en partie, dans la description de travail CX-02, qui est rédigée en ces termes :

[Traduction]

Il y a une exposition directe et quotidienne à des détenus pouvant être agités, imprévisibles ou non collaboratifs, ou qui peuvent tenter d'avoir recours à l'intimidation ou à la violence […] Il y a une exigence d'intervenir dans les situations menaçantes ou violentes afin de protéger la sécurité du public, des membres du personnel, des détenus et de l'établissement [p. ex., agressions, émeutes, prises d'otages], où le recours à la force peut s'avérer nécessaire. Le titulaire peut être victime de violence verbale ou d'agression physique par les détenus, et est autorisé à prendre toutes les mesures d'autodéfense nécessaires [le détenu peut avoir une intention meurtrière]. Une anxiété grave et une blessure éventuelle peuvent survenir pendant les incidents violents et suite à ceux-ci, ce qui pourrait entraîner l'invalidité temporaire ou permanente, voire le décès, du ou de la titulaire, de membres du public et d'autres membres du personnel ou de détenus. Il n'y a aucun contrôle en ce qui a trait à la fréquence ou à la durée des incidents individuels pouvant survenir à l'intérieur de l'établissement ou pendant les escortes. L'exigence relative aux horaires de poste tournant perturbe la routine ainsi que les réseaux de soutien personnels et familiaux.

[Sic pour l'ensemble de la citation]

97 Lorsque l'on examine d'autres emplois où le personnel non correctionnel est exposé à des détenus, une indemnité calculée selon le facteur pénologique est versée en plus du taux de rémunération régulier pour les membres du personnel qui doivent avoir des contacts avec les délinquants. Cette indemnité varie selon le niveau de sécurité en fonction du niveau de risque et varie de 1 400 $ à 2 000 $. S'il y a un incident, les membres du personnel activent une alarme de protection personnelle et se retirent de la situation. Ce sont les agents correctionnels qui répondent à l'incident.

98 Le taux de rémunération de l'agent correctionnel ne comprend aucune indemnité calculée selon le facteur pénologique. Le risque auquel ils sont exposés est considérablement plus élevé que pour les autres membres du personnel, car ils sont tenus de répondre aux incidents causés par des détenus au sein de l'établissement et d'en prendre le contrôle, en plus d'être formés sur la façon d'y parvenir de façon efficace. En conséquence, le risque est intégré à l'échelle salariale de base et en représente un élément important. Les exigences en matière de scolarité pour le poste CX-02 correspondent à une 12e année, même s'il est rémunéré d'une façon similaire à des postes qui demandent des études universitaires. Si l'élément relatif au contact avec les détenus devait être supprimé de la description de travail des CX, les tâches restantes consisteraient essentiellement à pousser des boutons et à ouvrir des barrières.

99 M. Urmston a également témoigné à propos de la possibilité qu'une personne comme M. Magee travaille à la barrière principale. Avant 2005, l'entrée principale était dotée par du personnel contractuel du Corps canadien des commissionnaires, lequel était rémunéré près du salaire minimum. On s'est aperçu que ces ressources ne pourraient pas aider s'il y avait un incident, ce qui entraînait un manque de souplesse pour la direction. Une prise d'otage pourrait survenir et durer de cinq à six heures, mais ses répercussions pourraient se faire ressentir bien au-delà de cette période et la direction a besoin de la souplesse nécessaire pour organiser les ressources de la façon la plus efficace et efficiente possible, et ce, jusqu'à ce que les choses retournent à une [traduction] « nouvelle normalité », ce qui comprend des contacts entre les membres du personnel et les détenus. Dans ces circonstances, il est nécessaire de pouvoir compter sur un agent correctionnel qui peut avoir des contacts avec les détenus.

100 En ce qui concerne le poste au PPCC, M. Urmston a indiqué que les postes CX se déplaçaient dans l'ensemble de l'établissement. À l'intérieur de l'établissement, la direction examine chacun des postes en ce qui concerne l'efficacité et l'efficience. Certains postes ont des quarts complets. D'autres postes ont des quarts de quatre heures. Le PPCC surveille tous les mouvements à l'intérieur de l'établissement. Le CX à ce poste doit surveiller 30 écrans, contrôler toutes les portes, les sorties et les entrées et répondre à toutes les alarmes de façon continue. La direction limite la durée du quart à quatre heures, autrement, il y aurait une perte d'efficacité. L'agent correctionnel effectue une rotation à l'extérieur du PPCC après quatre heures pour occuper d'autres postes. La direction doit s'assurer qu'une personne remplit toutes les fonctions du poste d'une façon efficace, efficiente et économique.

101 Par poste, on entend un poste à l'intérieur de l'établissement qui est doté pour une période de 8 à 24 heures. M. Urmston a témoigné que, en prenant en considération le nombre de jours où un employé donné ne travaille pas, que ce soit pendant les fins de semaine, les jours fériés, les vacances ou tout autre congé, 1,87 personne doit être embauchée en moyenne pour chaque poste qui est doté. Personne n'est employé à temps partiel à l'établissement.

102 Pour veiller à ce que chaque poste soit doté adéquatement, la composition de la liste de service est établie en consultation avec le syndicat qui établit les postes, la durée des postes et la composition ou la [traduction] « construction » de l'équipe. La liste de service est examinée par le directeur aux fins d'efficience et d'efficacité, conformément aux descriptions de travail. Le directeur atteste la liste de service et l'achemine à l'Administration centrale à l'intention du commissaire.

103 Les employés bougent au sein de la liste et font une rotation à tous les postes. L'une des valeurs fondamentales du service correctionnel est la force de son personnel, notamment le perfectionnement du personnel. Le CX-02 a la responsabilité du mentorat des CX-01. Le fait d'avoir occupé différents rôles facilite ce mentorat.

104 Le parcours de carrière du CX-02 mène au poste de gestionnaire correctionnel, puis à celui d'agent de libération conditionnelle. Il est impossible d'élaborer un parcours de carrière si on n'occupe qu'un seul poste. Il est donc nécessaire pour eux d'effectuer une rotation à travers les différents postes pour répondre aux nécessités du service et perfectionner les membres du personnel.

105 En ce qui concerne la dotation au PPCC, M. Urmston a indiqué que le poste à cet emplacement comporte de lourdes responsabilités et que la personne qui l'occupe est assujettie à un stress important. C'est la raison pour laquelle la durée de ce poste est limitée à quatre heures. On a laissé entendre que M. Magee pourrait effectuer une rotation entre le PPCC et la barrière principale. M. Urmston a indiqué que ce n'était pas pratique, même si cela n'était pas impossible. Il faudrait établir deux listes de service, ce qui serait perturbateur pour le personnel et pour la relation entre la direction et le syndicat, avec qui les listes de service sont élaborées.

106 Le PPCC est un poste de 24 heures. Ce n'est pas le cas de l'entrée des visiteurs. Si un incident survenait à l'établissement, il est possible de réduire le personnel à l'entrée principale et d'envoyer la personne à l'intérieur de l'établissement pour gérer le problème. Si la personne ne peut pas avoir de contact avec les détenus, on ne peut pas agir ainsi. Le poste à l'entrée des visiteurs peut être laissé sans personnel en soirée. Il s'agit du seul établissement où il est possible de le faire, car les détenus proviennent d'une grande région géographique et qu'il n'y a pas beaucoup de visiteurs. Les autres établissements ne peuvent pas être ajustés sur le plan opérationnel.

107 Étant donné que la durée maximum pendant laquelle une personne pourrait être affectée à un poste au PPCC est de quatre heures, M. Magee ne pourrait effectuer un poste de huit heures à cet endroit et, s'il n'est pas nécessaire de doter la barrière principale en soirée, il n'y aurait pas de travail pour M. Magee afin d'équilibrer le poste. Du point de vue de M. Urmston, ces options ne sont pas viables.

108 En réponse à la preuve de M. Taylor, l'employé de longue date qui travaille à l'entrée des visiteurs du Pénitencier de la Saskatchewan est un CX et il a des contacts avec les détenus.

109 Selon M. Urmston, le fait de demander aux membres du personnel de travailler en tant que remplaçants permanents sans contact avec les détenus réduit la souplesse de l'établissement pour répondre aux crises. À son avis, cela donnerait lieu à une préoccupation importante en matière de sûreté et de sécurité.

110 M. Urmston a également affirmé que les CX occupent tous les postes armés et qu'ils reçoivent une formation sur l'ensemble des armes. Il a décrit le poste comme étant dynamique par opposition à statique.

111 M. Urmston a également expliqué que même si on retirait la responsabilité relative à la gestion de cas d'un poste CX-02, l'employé ne retournerait pas aux tâches d'un poste CX-0, puisqu'il aurait toujours la responsabilité de manipuler des armes, ce que M. Magee ne pouvait pas faire en raison de son invalidité à l'épaule.

112 M. Urmston a établi une distinction entre une mesure d'adaptation temporaire et une mesure d'adaptation permanente. Un employé faisant l'objet d'une mesure d'adaptation temporaire est toujours inscrit à l'horaire. Lorsqu'une personne fait l'objet d'une mesure d'adaptation temporaire, la direction peut généralement prédire à quel moment la personne sera disponible pour accomplir de nouveau l'ensemble de ses fonctions, par exemple à son retour d'un congé parental ou lorsqu'une personne a entièrement récupéré d'une invalidité temporaire. D'autre part, si un employé est atteint d'une invalidité permanente, la mesure d'adaptation devra être pour une durée indéterminée et pourrait comprendre l'augmentation du personnel pour être en mesure de répondre aux besoins liés à la rotation de l'établissement.

113 De retour à la chronologie de l'affaire, le 19 janvier 2010, Mme Miller a écrit à la gestionnaire de cas à la CAT, l'informant que M. Magee n'occuperait pas son poste d'agent correctionnel et qu'on lui avait offert une affectation au taux de rémunération d'attache en tant qu'analyste des affaires des détenus AS-04, dont les fonctions étaient similaires au travail qu'il accomplissait précédemment au poste AS-05. Elle a mentionné qu'il occuperait ce poste jusqu'au 30 avril 2010.

114 Le Dr Parker a écrit à la CAT le 25 janvier 2010 :

[Traduction]

Je crois comprendre que cet employeur a beaucoup de possibilités d'emploi où il n'y a pas de contact avec les détenus et, en fait, il a occupé un tel poste au cours des derniers mois. Dans l'intérêt de sa sécurité, il ne devrait pas avoir de contact avec des détenus, même si je m'aperçois qu'il y a beaucoup de travailleurs contractuels et de personnes qui pourraient ne pas être en mesure de se défendre et qui occupent un poste leur permettant d'être surveillés par d'autres employés ou de travailler avec d'autres employés à l'établissement correctionnel. Je vous encourage à rencontrer cet employeur afin de discuter de tels postes.

115 Mme Miller a témoigné n'avoir jamais vu les lettres du Dr Parker à la CAT datées du 22 décembre 2009 ou du 25 janvier 2010. Le Dr Parker a témoigné qu'il supposait, au moment d'écrire à la CAT, que cette dernière communiquerait avec l'employeur.

116 Après le 10 janvier 2010, M. Magee a été nommé à un poste d'analyste pour les services exécutifs au niveau CX-02, qui consiste à gérer les griefs des détenus. M. Magee a indiqué qu'il éprouvait de la difficulté à rédiger des rapports.

117 Le 23 février 2010, le chef régional de la dotation a écrit à M. Magee, indiquant qu'un poste auquel il s'intéressait n'était pas disponible et, entre-temps, il a cherché à obtenir de la rétroaction sur un poste d'agent, Services aux victimes.

118 Le 26 février 2010, le Dr Parker a écrit à Mme Miller en ce qui concerne les limitations relatives au travail de M. Magee à l'égard du contact avec les détenus, en indiquant ce qui suit :

[Traduction]

Idéalement, je ne voulais pas qu'il ait des contacts avec les détenus pour des raisons de sécurité pour lui-même et ses collègues, et je comprends qu'il y a des emplois dans le Centre psychiatrique régional où il n'y a aucun contact avec les détenus ou un contact minimal. M. Magee occupait un emploi à l'externe pour le système juridique sans avoir de contact avec les détenus. Idéalement, j'aimerais que M. Magee occupe un emploi à l'extérieur de l'établissement, peut-être auprès de personnes ayant déjà commis des infractions ou en surveillant le respect de la liberté conditionnelle. Je comprends que cet emploi pourrait parfois exiger que M. Magee entre dans l'établissement et nous pouvons accepter cela dans le cadre d'un petit risque à l'égard de toute personne qui entre dans l'établissement. J'espère que vous êtes en mesure de prendre des mesures d'adaptation à l'égard de M. Magee. Si cela est acceptable pour vous, il devrait faire l'objet d'une analyse relative aux exigences d'emploi et d'une évaluation de la capacité fonctionnelle, mais je suggère que même si cela est fait, en raison de sa blessure, il ne sera pas en mesure de se défendre adéquatement ou d'aider d'autres agents correctionnels dans le cadre d'une confrontation physique.

[Sic pour l'ensemble de la citation]

119 Selon cette lettre et la correspondance précédente du Dr Parker, Mme Miller a une fois de plus conclu qu'elle devrait chercher un poste à l'extérieur de l'établissement. Aucune autre considération n'a été accordée à la recherche d'un emploi pour le fonctionnaire au Centre psychiatrique régional.

120 En mars 2010, M. Magee a été renvoyé à un poste d'agent, Services aux victimes, classifié WP-03. On a pris des mesures pour que M. Magee soit affecté à l'unité des Services aux victimes le 2 mars 2010 pendant un mois pour déterminer s'il s'agissait d'un poste qui lui convenait et s'il pouvait exercer les fonctions du poste. La direction a reçu un certificat de santé le 1er mars 2010 indiquant que M. Magee pouvait occuper un poste à l'extérieur de l'établissement dans le cadre duquel il travaillerait avec des personnes ayant déjà commis une infraction ou en surveillant le respect de la liberté conditionnelle. Le taux de rémunération pour les WP-03 est inférieur à celui des CX-02. M. Magee a expliqué que, pendant cette affectation, il a été rémunéré selon le taux de rémunération de son poste d'attache CX-02, mais cela a cessé lorsqu'il a signé l'entente en vue d'accepter le poste en mai 2010, dont les faits sont récités plus loin dans la présente décision.

121 M. Magee a décrit la nature du travail d'un agent, Services aux victimes, lequel comprend l'inscription des nouvelles victimes dans un ordinateur, des contacts téléphoniques avec des victimes pour leur communiquer des renseignements auxquels ils ont légalement droit en ce qui concerne les déplacements des détenus, notamment le moment où un délinquant quitte l'établissement, par exemple pour un rendez-vous chez le médecin, et les informer de façon générale du secteur où le délinquant se rend.

122 M. Magee a indiqué que la majorité du travail était lié à l'utilisation du téléphone et de l'ordinateur. Il était différent du poste AS-05 puisqu'il était assis à un bureau toute la journée, alors que dans l'autre poste, il passait une partie de la journée à passer en revue les bandes sur le recours à la force sur un écran, et l'autre partie de la journée à travailler à un bureau à préparer des rapports et consulter d'autres collègues. Il a indiqué que le salaire pour ce poste s'élevait à 66 186 $, et que la seule possibilité de gagner un revenu supplémentaire était à l'occasion d'événements se déroulant la fin de semaine. Il n'y avait aucune possibilité officielle de travailler des heures supplémentaires.

123 Le 24 mars 2010, M. Lamb, le chef régional de la dotation, a indiqué que la gestionnaire de l'unité des Services aux victimes, Laurie Burnouf, était heureuse du rendement de M. Magee et qu'elle estimait qu'il conviendrait très bien à ce poste. Elle était prête à le muter à ce poste. Comme il a été mentionné, M. Magee a indiqué qu'il était réticent à accepter le poste, car le taux de rémunération était inférieur à celui du poste CX-02.

124 Les Ressources humaines croyaient que cela constituerait une offre d'emploi raisonnable. Puisque le sommet de l'échelle salariale était légèrement inférieur au taux de rémunération actuel de M. Magee, celui-ci bénéficierait d'un droit de priorité en matière de réintégration et continuerait d'être renvoyé à des postes à un niveau supérieur. La CAT a également indiqué que toute offre d'emploi constituait une offre d'emploi raisonnable et a indiqué que si M. Magee n'acceptait pas une offre d'emploi raisonnable, ses prestations auprès de la CAT prendraient fin.

125 Le 7 mai 2010, M. Magee a accepté une offre de mutation officielle au poste d'agent, Services aux victimes, au groupe et niveau WP-03, accompagné des conditions d'emploi connexes. L'entente prévoyait en partie qu'on lui accorderait un droit de priorité en matière de réintégration pour que sa candidature soit prise en considération pour des postes dont le groupe et le niveau sont équivalents au poste qu'il occupait au moment où on a déclaré qu'il bénéficiait d'un droit de priorité pour une période d'un an à compter de la date de nomination.

126 M. Magee a indiqué avoir été forcé d'accepter ce poste, puisque l'employeur a déclaré qu'il s'agissait d'une offre raisonnable et que, s'il ne l'acceptait pas, il devrait une fois de plus se fier aux prestations de la CAT. La CAT a déclaré entre-temps que s'il n'acceptait pas cette offre ou toute autre offre, elle mettrait fin à ses prestations de la CAT.

127 M. Urmston a eu une discussion avec M. Magee à savoir s'il devait accepter le poste WP-03. Il a indiqué qu'il s'agissait d'une conversation difficile. La CAT a déterminé que le poste WP-03 était une offre d'emploi raisonnable et que si M. Magee ne l'acceptait pas, ses prestations de la CAT prendraient fin. S'il refusait le poste, il n'y avait aucun autre poste pour lui. Il serait renvoyé à la liste des employés bénéficiant d'un droit de priorité.

128 Il a déclaré qu'il aurait pu envoyer une lettre à M. Magee, mais ce n'est pas la façon d'agir avec les personnes. Il est parfois nécessaire d'avoir une conversation difficile. L'échelle salariale WP-03 n'était pas éloignée de l'échelle salariale pour le poste CX-02 et il y avait désormais un nouveau parcours de carrière qui s'offrait à lui, et son rendement au travail était bon.

129 En mai 2010, M. Magee a été nommé à un poste WP-03.

130 En dehors de ses allégations selon lesquelles l'intimé a omis de prendre des mesures d'adaptation adéquate à son égard dans le nouveau poste auquel il a été affecté, M. Magee a également allégué que la direction n'avait pas respecté son obligation de prendre des mesures d'adaptation en retardant une évaluation ergonomique de son poste de travail WP-03.

131  Voici un examen de la preuve se rapportant à cette question. Mme Burnouf, la gestionnaire régionale de l'unité des Services aux victimes a été la gestionnaire de M. Magee à compter du 1er mars 2010, lorsqu'il a commencé son emploi en tant qu'agent, Services aux victimes. À ce moment, il ne lui a communiqué aucun renseignement médical laissant entendre qu'il avait besoin d'une évaluation ergonomique.

132 Lorsqu'il s'est joint à l'unité, il lui a expliqué la raison pour laquelle il bénéficiait d'un droit de priorité et qu'il avait été blessé dans l'exercice de ses fonctions. Il lui a expliqué qu'il se sentait courbaturé, que son épaule lui causait de la douleur et qu'il était inconfortable. Elle lui a demandé s'il avait fait l'objet d'une évaluation ergonomique. Il ignorait de quoi il s'agissait.

133 M. Magee a témoigné que, le 26 avril 2010, il a rencontré Mme Burnouf et d'autres personnes. Il a alors été convenu que son poste de travail ferait l'objet d'une évaluation ergonomique. Mme Burnouf en a fait la demande le 28 avril 2010.

134 M. Magee a affirmé que l'évaluation a été retardée. Il a posé des questions à ce sujet un certain nombre de fois. On lui a indiqué qu'on éprouvait certains problèmes relativement à la responsabilité liée à la prestation de l'évaluation.

135 Mme Burnouf était en congé entre le 19 mai et le 11 juin 2010, et le gestionnaire intérimaire régional des Services aux victimes a présenté d'autres demandes relatives à une évaluation ergonomique.

136 Le 8 juin 2010, M. Magee a quitté le travail en faisant valoir qu'il n'était pas en mesure de s'asseoir à son poste de travail. Le 28 juin, il a indiqué qu'il ne retournerait pas au travail, car des rendez-vous avec son médecin étaient prévus et qu'il n'y retournerait pas tant que son poste de travail n'aurait pas fait l'objet d'une évaluation ergonomique. Depuis qu'il avait commencé à travailler à l'unité des Services aux victimes, le 1er mars 2010, il s'était absenté 28,25 jours. Mme Burnouf a écrit aux Ressources humaines le 18 juin et leur a dit qu'il était essentiel et extrêmement urgent que l'on procède dès que possible à l'évaluation.

137 Le même jour, Mme Burnouf a indiqué à M. Magee (pendant une conversation téléphonique) qu'elle ignorait où il se trouvait et qu'elle s'attendait à avoir de ses nouvelles. Elle lui a indiqué que, essentiellement, il [traduction] « manquait à l'appel ». Elle lui a demandé de lui remettre un billet de médecin, car il était absent du travail depuis le 8 juin. Il lui a répondu que son médecin avait refusé de lui remettre un billet et il a indiqué que des documents avaient été remplis et envoyés à la CAT. M. Magee lui a également dit qu'il n'était pas en congé de maladie, mais qu'il recevait des prestations de la CAT.

138 Mme Miller a témoigné que Santé Canada n'offrait plus d'évaluations ergonomiques.

139 En conséquence, elle a entrepris de communiquer avec la CAT pour voir si elle accepterait de payer pour l'évaluation, étant donné que M. Magee disposait d'un dossier actif à la CAT. Elle a communiqué avec la CAT quelques jours après avoir été mise au courant de la situation. La CAT a indiqué qu'elle embaucherait un ergonome pour examiner le poste de travail de M. Magee et qu'elle en assumerait les coûts.

140 Mme Miller a déclaré dans son témoignage que lorsque Service Canada offrait des évaluations ergonomiques, l'employé devait d'abord présenter l'avis d'un médecin. Habituellement, la personne menant les évaluations ergonomiques prenait de deux à quatre semaines pour organiser l'évaluation, puis de deux à quatre semaines supplémentaires pour présenter le rapport. Si de l'équipement était requis, le délai pour la mise en œuvre variait selon la nature de l'équipement visé.

141 L'évaluation du poste de travail de M. Magee a commencé le 12 juillet 2010, en présence de M. Magee, et a été achevée le 20 juillet 2010. L'évaluation recommandait l'achat d'équipement supplémentaire, dont un porte-document format légal, des accoudoirs articulés pour son fauteuil, un casque d'écoute mains libres ainsi qu'un plus petit clavier.

142 Mme Burnouf a parlé avec M. Magee et lui a confirmé par écrit que toutes les exigences relatives à son poste de travail seraient en place pour le vendredi 23 juillet 2010. Il lui a indiqué qu'il ne retournerait pas au travail avant d'avoir vu son médecin et d'avoir parlé à sa physiothérapeute.

143 Le 22 juillet, Mme Burnouf a pris des mesures pour que l'on fabrique un nouveau fauteuil de bureau ergonomique avec des accoudoirs pivotant pour M. Magee aux frais du Service correctionnel du Canada. L'achat du nouveau fauteuil allait au-delà des recommandations de l'évaluation ergonomique.

144 Le 27 juillet 2010, M. Magee a informé Mme Burnouf qu'il ne retournerait pas au travail au mois d'août 2010, selon les directives de sa physiothérapeute. Mme Burnouf a souligné qu'il avait été absent du bureau du 8 juin 2010 au 22 juillet 2010, période pendant laquelle il était rémunéré par la CAT; cependant, après cette période, ses traitements étaient couverts par le budget de l'unité.

145 M. Magee est retourné au travail le 25 août 2010. Tout l'équipement recommandé était en place. La CAT a recommandé un retour au travail progressif. Il a travaillé quelques heures par jour pendant quelques jours. Il a quitté le lieu de travail le 1er septembre 2010 et n'y est retourné que le 24 mai 2011, lorsqu'il a commencé son retour progressif au travail. Il était en congé pour accident de travail.

146 Selon le témoignage du Dr Parker, le retard relatif aux modifications de son équipement peut avoir été un facteur ayant aggravé sa blessure à l'épaule.

147 Il est également allégué que Mme Burnouf a fait des commentaires discriminatoires à l'égard de M. Magee. Voici un examen de la preuve se rapportant à cette question. M. Magee a indiqué que Mme Burnouf lui avait dit qu'elle croyait qu'il souffrait de stress, et cela lui a fait sentir comme s'il était responsable de sa blessure. Elle a utilisé l'expression [traduction] « congé de maladie » pour décrire certaines de ses absences qui étaient, à son avis, dues au stress. Il s'est opposé à son utilisation de l'expression [traduction] « congé de maladie », en affirmant que son absence du travail était le fait d'un accident de travail. Il a également indiqué que Mme Burnouf l'avait accusé de ne pas se présenter au travail et d'être absent sans permission (ASP), même s'il lui avait dit qu'il voyait son médecin ou qu'il avait des rendez-vous en physiothérapie.

148 Il a également indiqué que Mme Burnouf l'avait informé qu'elle ne croyait pas que le poste d'agent, Services aux victimes, lui convenait, car cela le stressait.

149 Mme Burnouf a déclaré qu'elle croyait en une politique de la porte ouverte et qu'elle avait eu de nombreuses discussions avec M. Magee au cours des cinq années précédentes. La plupart des discussions ont été initiées par M. Magee. M. Magee s'est souvent absenté du travail. Lorsqu'il est retourné au travail à temps plein, il prenait des congés de maladie les vendredis. À son avis, ses absences les vendredis étaient une tendance. Elle lui a dit qu'il allongeait ses fins de semaine. Elle était préoccupée par le fait que lorsqu'une personne s'absentait, il y avait une incidence sur la charge de travail des autres employés de l'unité. En tant que gestionnaire, elle devait s'assurer que les employés étaient au travail. M. Magee n'était pas heureux et a indiqué ne pas avoir aimé qu'elle soulève cette question.

150 En juin 2010, M. Magee s'est absenté du milieu de travail. Aucun billet de médecin justifiant son absence ne lui a été offert. Elle a déclaré qu'en tant que gestionnaire, elle avait la responsabilité d'assurer l'assiduité des membres du personnel.

151 Elle a reconnu avoir désigné son absence comme un [traduction] « congé de maladie ». Elle a expliqué qu'elle était au courant de la distinction entre un [traduction] « congé pour accident de travail » et un [traduction] « congé de maladie », mais, de façon générique, on les désigne comme un [traduction] « congé de maladie ». Elle ne se souvenait pas qu'il ne se soit jamais opposé à l'utilisation de l'expression [traduction] « congé de maladie » et, si elle avait été informée que cela le perturbait, elle aurait utilisé la terminologie appropriée.

152 Elle a nié lui avoir dit que l'emploi à l'unité des Services aux victimes n'était pas approprié pour lui. Au contraire, elle l'a encouragé. C'était M. Magee qui lui a dit qu'il n'appartenait pas à l'unité et qu'il devrait être un agent correctionnel ou œuvrer dans le domaine de la sécurité. À son avis, il était bon avec les victimes d'actes criminels, car ses antécédents étaient dans le domaine du counseling et de l'aide aux personnes en difficulté. Elle lui a dit que son rendement était positif et qu'il avait effectué un bon travail. Ses allégations l'ont surprise et l'ont blessée. Elle l'a pris très personnellement, car ils avaient travaillé ensemble pendant cinq ans et qu'ils avaient une bonne relation.

F. Dommages

153 M. Magee a témoigné que le salaire maximum pour le poste CX-02 est de 71 000 $ par année et que le niveau de rémunération maximum pour le poste d'agent, Services aux victimes est de 66 000 $. Il a également indiqué qu'en tant que CX-02, il avait la possibilité de travailler des heures supplémentaires, d'effectuer différents postes et de gagner une prime les fins de semaine et les jours fériés. Les agents correctionnels ont la possibilité de gagner ces primes supplémentaires en fonction d'une rotation. Il a déclaré que, en tant que CX-02, il cherchait toujours des possibilités de travailler des heures supplémentaires. Il a déclaré que le revenu total qu'il avait gagné au cours de la dernière année passée à titre de CX-02 se situait entre 109 000 $ et 113 000 $. Il a laissé entendre que, pendant un certain nombre d'années, son revenu dépassait les 100 000 $.

154 Cependant, selon les feuillets T4 de M. Magee que son avocat a produits à la demande de l'avocat de l'intimé après le témoignage de M. Magee sur cette question, son revenu d'emploi pour 2009 s'élevait à 71 489,49 $; pour 2008, à 65 124,50 $; pour 2007, à 78 721,51 $; et pour 2006, à 91 632,82 $.

155 M. Magee était propriétaire d'une terre de plusieurs acres et d'un certain nombre de chevaux. À la lumière de sa diminution de salaire, il a témoigné qu'il n'avait plus les moyens d'embaucher une personne pour prendre soin de ses chevaux et accomplir d'autres tâches; il n'était pas non plus en mesure de le faire lui-même, car il n'en avait pas l'énergie. En conséquence, il a dû déménager sa famille et vendre ses chevaux. Il a déclaré qu'il venait de terminer la construction d'un immeuble sur la terre et qu'il n'était pas en mesure d'en assumer les coûts. Selon son témoignage, il a vendu la propriété en subissant une perte importante et il a dû déménager à la ville. Cela a causé un stress important dans son ménage, ce qui l'a poussé à prendre un congé lié au stress en 2011.

156  Il a également déclaré avoir eu d'autres problèmes de santé, y compris une grave maladie non liée au travail. Cependant, il a fait valoir que la majorité du stress découlait du milieu de travail, y compris de l'échec d'une tentative de médiation en ce qui concerne son grief avec l'employeur. Son médecin lui a donné une ordonnance afin de l'aider à composer avec son anxiété et son stress.

157 M. Magee a témoigné qu'il avait acheté la terre à l'extérieur de Saskatoon en 2006 pour un montant situé [traduction] « entre 100 000 $ et 200 000 $ ». Il ne pouvait pas être plus précis. Il avait une maison, qu'il a rénovée, un garage pour trois voitures et un enclos à chevaux. Il l'a vendu en 2009 pour 291 000 $, mais il a soutenu qu'il l'avait vendu à perte, car il avait investi de l'argent dans la propriété. Il a reconnu que pendant qu'il était propriétaire de la terre, il avait acheté, vendu et entraîné des chevaux pour gagner un revenu supplémentaire qui complétait son revenu d'emploi. Il a déclaré avoir perdu plus d'argent qu'il n'en a gagné. Il présumait que l'écart entre les taux de rémunération de base de son poste actuel et le poste CX aurait pu lui permettre de conserver sa terre.

158 Le Dr Parker a témoigné que, le 30 avril 2010, il a remarqué que M. Magee éprouvait des problèmes de stress lié à son placement professionnel, qu'il éprouvait une détresse émotionnelle et qu'il devait quitter le travail en raison de la douleur à l'épaule. Le Dr Parker a affirmé que M. Magee l'avait informé que parce qu'il gagnait un revenu moindre au travail, il n'avait plus les moyens d'entretenir ses chevaux ou de pratiquer son passe-temps, soit faire de la moto. Cependant, le Dr Parker a également reconnu que conduire une moto aggraverait les problèmes de M. Magee au niveau du cou et de l'épaule.

159 Le Dr Parker a préparé un rapport à l'intention de la CAT le 31 janvier 2012, dans lequel il a décrit l'historique des forces et de la dépression de M. Magee. Il a fait l'observation suivante :

[Traduction]

Malheureusement, l'employé estime qu'il a été lésé par le système. Il prétend s'être blessé aux épaules dans le cadre de son travail et ne plus pouvoir exercer son emploi précédent et que, suite à ses blessures, il a été placé dans un poste moins bien rémunéré et qu'il n'est pas en mesure de maintenir le niveau de vie qu'il avait auparavant.

160  Il a indiqué n'avoir reçu aucun renseignement de son psychologue et que la CAT devrait communiquer directement avec ce dernier.

161 Le Dr Parker a témoigné qu'à la lumière des blessures que M. Magee a subies aux épaules et de la douleur chronique qu'il éprouve, sa capacité de fonctionner dans le milieu de travail était, en général, difficile. M. Magee était préoccupé par le fait qu'il avait moins d'occasions d'effectuer des heures supplémentaires. Il a soulevé que, d'un point de vue médical, le fait d'accomplir des heures supplémentaires, étant donné ses problèmes, aggraverait la situation.

III. Résumé de l'argumentation

A. Argument de l'agent négociateur

162 La présente affaire soulève un certain nombre de questions distinctes.

163 La principale question consiste à déterminer si l'employeur aurait pu prendre ou non une mesure d'adaptation à l'égard du fonctionnaire sans subir une contrainte excessive, tout en réduisant au minimum les répercussions sur son revenu d'emploi.

164 Après sa chirurgie en 2008, M. Magee est retourné au travail en 2009 en tant que AS-05 intérimaire. Il a été affecté à ce poste pour une période de quatre mois moins un jour. Il a posé sa candidature pour être nommé à ce poste pour une durée indéterminée, mais sa candidature n'a pas été retenue. L'employeur a prolongé la nomination intérimaire jusqu'à la fin de 2009. M. Magee a témoigné relativement aux commentaires positifs qu'il a reçus à propos de son rendement au travail. L'employeur a omis d'examiner adéquatement si M. Magee pouvait faire l'objet d'une mesure d'adaptation au poste AS-05 de façon permanente.

165 L'employeur aurait également pu prendre une mesure d'adaptation à l'égard de M. Magee en tant que CX au Centre psychiatrique régional, limitant ses fonctions au PPCC et à la barrière principale. Ces postes ne comprennent aucun contact avec les détenus.

166 Malgré le fait que le Dr Parker ait indiqué qu'il accepterait un contact minimal avec les détenus, on n'en a pas tenu compte.

167 Les autres questions présentées en l'espèce sont de nature plus périphérique, y compris le défaut de l'employeur de fournir une évaluation ergonomique en temps opportun, les commentaires dégradants formulés par M. Suchorab et, en plus, les commentaires inappropriés de Mme Burnouf, qu'ils aient été intentionnels ou non.

168 M. Magee a été franc, candide et direct tant lors de son témoignage principal qu'en contre-interrogatoire. Il a témoigné à propos de son accident du travail, des chirurgies qu'il a subies et du fait qu'il avait parlé à M. Burbach avant sa chirurgie en 2008 et qu'on l'avait assuré qu'il y avait un certain nombre de postes disponibles pour lui à son retour.

169 Dans Centre universitaire de santé McGill (Hôpital général de Montréal) c. Syndicat des employés de l'Hôpital général de Montréal, 2007 CSC 4, même si les principaux faits sont différents en raison de la présence d'une convention collective, néanmoins, la Cour suprême du Canada a statué que « [l]es facteurs permettant de conclure que la contrainte est excessive ne sont pas consacrés et doivent être appliqués avec souplesse et bon sens » (paragr. 15). Au paragraphe 22, la Cour a souligné que « [l]e caractère individualisé du processus d'accommodement ne saurait être minimisé […] » et l'effort en vue de prendre une mesure d'adaptation à l'égard de l'employé doit être fait pendant toute la durée de la relation d'emploi.

170 Dans Brant (County) v. Ontario Public Service Employees Union, Local 256, 2013 ONSC 1955, la Cour divisionnaire de l'Ontario résume les principes généraux en ce qui concerne l'obligation de prendre des mesures d'adaptation aux paragraphes 55, 63, 64 et 65.

171 Au paragraphe 65, la Cour a décrit les principaux principes qui s'appliquent aux mesures d'adaptation à l'égard d'un employé qui a subi une blessure au travail. Au paragraphe 65, à l'alinéa (8), la Cour a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

Même si un employé qui demande une mesure d'adaptation raisonnable en milieu de travail n'a pas le droit de créer son propre placement professionnel, un facteur important dont il faut tenir compte, même s'il n'est pas reconnu uniformément dans la jurisprudence pertinente, consiste à déterminer si, sans contrainte excessive, l'employé peut être retourné à l'emploi qu'il occupait avant de subir une blessure au travail comme l'a observé l'arbitre de grief dans la présente affaire en citant Ontario Public Service Employees Union (Kerna) à la p. 34 :

La jurisprudence a établi que les employeurs sont tenus d'adopter un processus en quatre étapes en ce qui concerne les efforts liés aux mesures d'adaptation. D'abord, il doit déterminer si l'employé handicapé peut exercer un emploi tel qu'il existe. Si cela n'est pas possible, alors l'employeur doit évaluer si l'emploi actuel de l'employé peut être modifié de façon à ce qu'il soit convenable. Si cela n'est toujours pas possible, l'employeur doit alors déterminer si un autre emploi dans le milieu de travail est convenable. Enfin, si l'employé handicapé ne peut pas exercer les fonctions et les responsabilités essentielles d'un poste existant différent, cet emploi différent peut-il être modifié?

172 Le critère est celui de la contrainte excessive. Il n'est pas fondé sur de la spéculation et doit être appuyé par une preuve tangible. Au paragraphe 65, sous-alinéa 12, la Cour a dressé une liste de facteurs non exclusifs qui ont été relevés et qui exercent une influence sur la détermination relative à une contrainte excessive, par exemple un coût financier, une atteinte à une convention collective, des problèmes liés au moral des autres employés, l'interchangeabilité de l'effectif et des installations et les préoccupations relatives à la santé et à la sécurité.

173 Dans Kirby c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2015 CRTEFP 41, au paragraphe 136, la Commission résume sa jurisprudence relative à une contrainte excessive.

174 Dans Audet c. Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, 2006 TCDP 25, le Tribunal canadien des droits de la personne, au paragraphe 42, a souligné qu'une fois que l'existence de discrimination été établie prima facie, l'intimé peut justifier la norme contestée en établissant ce qui suit, selon la prépondérance des probabilités :

(1) L'intimé a adopté la norme dans un but rationnellement lié à l'exécution du travail en cause;

(2) l'intimé a adopté la norme particulière en croyant sincèrement qu'elle était nécessaire pour réaliser ce but légitime lié au travail;

(3) la norme est raisonnablement nécessaire pour réaliser ce but légitime lié au travail. Pour prouver que la norme est raisonnablement nécessaire, l'intimé doit démontrer qu'il est impossible de composer avec le plaignant sans que l'intimé subisse une contrainte excessive. Il appartient à l'intimé de démontrer qu'il a envisagé et rejeté raisonnablement toute forme possible d'accommodement (Colombie-Britannique (Superintendent of Motor Vehicles) c. Colombie-Britannique (Council of Human Rights), [1999] 3 R.C.S. 868 (arrêt Grismer).

175 Le Tribunal canadien des droits de la personne a également déclaré au paragraphe 51 :

La Cour suprême, dans l'arrêt Meiorin au paragraphe 64, conseille aux cours de justice et aux tribunaux administratifs de tenir compte des diverses manières dont il est possible de composer avec les capacités d'un individu. Un employeur devrait se renseigner sur la possibilité d'exécuter le travail de différentes manières tout en réalisant l'objet légitime lié à l'emploi que vise l'employeur. Les aptitudes, les capacités et l'apport potentiel du plaignant et de ceux qui sont dans la même situation que lui doivent être respectés autant qu'il est possible de le faire.

176 Dans cette affaire, le Tribunal canadien des droits de la personne, au paragraphe 59, a conclu que l'employeur avait appliqué ses critères de sécurité d'une manière mécanique, sans prendre en considération les circonstances individuelles sur le plaignant.

177 Quant aux faits de la présente affaire, la nomination intérimaire de M. Magee au poste d'agent de projet de la sécurité, classifié AS-05, élimine tout doute que l'employeur aurait pu prendre une mesure d'adaptation à son égard sans perte de salaire. L'emploi consistait à passer en revue les bandes des incidents sur les interventions prévues auprès des détenus afin de déterminer ce qui a été fait correctement ou incorrectement. Il a commencé ce travail en mai 2009 dans le cadre d'une nomination intérimaire. Il s'est absenté du travail pendant environ un an. Environ deux semaines après son retour au travail, il a posé sa candidature à un poste AS-05 d'une durée indéterminée. On prévoyait doter quatre postes.

178 On lui a demandé de répondre à un examen à choix multiple. La note de passage était de 50. Il a échoué par un point. Mme Miller a témoigné qu'en conséquence, il n'était plus considéré comme un candidat dans le cadre de ce processus de nomination.

179 À la fin septembre 2009, la décision de prolonger la nomination intérimaire de M. Magee jusqu'en janvier 2010 a été prise. M. Carver, son superviseur, a demandé une prolongation. L'avocat a soutenu qu'en vertu de la LEFP et de son règlement, il n'est pas nécessaire de répondre aux critères de mérite si la durée de la nomination intérimaire est de moins de quatre mois. Si une nomination est prolongée au-delà de quatre mois, il est nécessaire de satisfaire aux critères de mérite selon la recommandation du gestionnaire de l'employé.

180 La preuve a révélé que le travail du poste intérimaire et du poste d'une durée indéterminée était le même et que M. Magee accomplissait bien ses tâches. Il n'existe aucune preuve relative à une préoccupation quelconque. L'évaluation de M. Carver était positive. S'il exerçait les fonctions du poste de manière satisfaisante et qu'aucune préoccupation à l'égard de sa capacité d'exercer ces fonctions n'a été soulevée, il satisfaisait aux critères de mérite.

181 Malgré cette preuve, sa candidature n'a pas été prise en considération aux fins de nomination après qu'il ait échoué à l'examen. Dans la décision du TDFP, on souligne que Mme Miller a témoigné que s'il avait répondu aux qualifications essentielles, il aurait été nommé à ce poste.

182 À compter de la fin septembre 2009, il était inscrit sur la liste des employés bénéficiant d'un droit de priorité, ce qui signifiait qu'il pouvait être nommé à un poste avant une autre personne. Compte tenu de son droit de priorité, il aurait pu être nommé au poste AS-05 pour une durée indéterminée dans le cadre d'un processus non annoncé, à condition que M. Carver atteste par écrit qu'il répondait aux critères de mérite. En décembre 2009, la direction a envisagé de nommer M. Magee de façon rétroactive au poste AS-05 dans le cadre d'un processus non annoncé. M. Urmston a rejeté la proposition même s'il n'y avait aucune obligation de nommer des candidats qualifiés à partir du processus de nomination qui avait été mené pour le poste AS-05.

183 En vertu de l'itération précédente de la LEFP, les nominations ont été faites en fonction du mérite relatif. Dans le système actuel, il faut seulement établir que la personne nommée réponde à l'ensemble des qualifications essentielles des critères de mérite.

184 M. Urmston a présenté deux motifs à l'appui de son refus de nommer M. Magee rétroactivement au poste AS-05. D'abord, M. Magee a échoué à l'examen écrit en juin 2009. Il est possible qu'il n'ait pas répondu aux critères de mérite en juin 2009, mais ce que l'employeur a omis de faire est d'évaluer s'il avait satisfait aux critères de mérite à l'automne 2009 à la lumière de son évaluation du rendement positive. L'employeur avait une obligation continue de tenir compte de la candidature de M. Magee aux fins d'une nomination au poste AS-05. L'employeur ne s'est pas attardé à cette obligation. M. Magee a témoigné qu'il n'avait jamais passé un test comme celui-là au cours de sa carrière.

185 Dans Canada (Procureur général) c. Bates (1re inst.), [1997] 3 C.F. 132, la Cour fédérale, Section de première instance, a déterminé que le principe du mérite doit être appliqué tout en reconnaissant les réalités contextuelles. Dans cette affaire, l'employée avait été engagée pour une durée déterminée de cinq ans et avait un excellent dossier de rendement. Le ministère a mené une procédure de sélection dans le but de choisir, parmi les fonctionnaires dont le contrat était sur le point d'expirer, ceux à qui il offrirait une nouvelle nomination pour une durée déterminée. Le ministère a jugé que l'intimée ne remplissait pas les conditions requises pour être reconduite dans ses fonctions en raison du fait qu'elle avait échoué à deux examens écrits portant sur ses connaissances.

186 La Cour a déclaré ce qui suit au paragr. 40 :

[…] en appliquant le principe du mérite, on doit être conscient de la réalité critique des faits de l'affaire et de la situation personnelle des personnes en cause et, au besoin, y réagir. Il est incontestable qu'on peut conclure, à la lecture de leurs décisions, que Mme Preto et M. Rosenbaum étaient vivement préoccupés par l'existence d'un écart aussi grand entre le rendement pratique au travail et les résultats à un examen écrit. Il est évident que, dans ces deux décisions, Mme Preto et M. Rosenbaum ne cherchaient pas à accorder un avantage à Mme Bates, mais plutôt à corriger l'écart constaté pour s'assurer que Mme Bates soit traitée avec justice et sur un pied d'égalité avec tous les autres candidats.

187 La décision dans Bates signifie qu'il faut évaluer le rendement passé par rapport à tout écart dans un examen écrit pour déterminer si une déficience pourrait expliquer la différence. Cela pourrait mener l'employeur à se demander si le fait que M. Magee avait été absent pendant un an a eu des répercussions sur sa note d'examen.

188 Dans Tremblay c. Canada (Procureur général), 2003 CFPI 465, la Cour fédérale, Section de première instance, a déclaré que pour que le principe de mérite fonctionne de façon efficace, il incombait à l'employer d'être réceptif aux besoins particuliers des candidats individuels. Voir les paragraphes 22 à 32.

189 La priorité principale est qu'il existait une obligation continue de prendre des mesures d'adaptation à l'égard de M. Magee après septembre 2009, lorsqu'on lui a accordé un droit de priorité.

190 La deuxième explication que M. Urmston a donnée pour ne pas avoir nommé M. Magee au poste AS-05 de manière rétroactive était que ce dernier ne pouvait pas exercer toutes les fonctions de l'emploi. Dans la décision du TDFP, au paragraphe 11, il est indiqué que Mme Miller a témoigné que s'il avait démontré qu'il possédait les qualifications essentielles au moment d'être évalué pour le poste AS-05, il aurait été nommé au poste. Dans l'avis d'offre d'emploi pour le poste d'agent de projet de la sécurité, décrivant les qualifications essentielles, il n'y a aucune mention du besoin d'entrer dans les établissements. Dans le plan de retour au travail daté du 29 mai 2009, il est indiqué que la description de travail pour le poste d'agent de projet AS-05 avait été communiquée à la CAT et au fonctionnaire, et qu'aucune préoccupation n'avait été soulevée.

191 M. Urmston a affirmé que l'agent de projet, Sécurité, n'aurait à se rendre dans les établissements correctionnels que trois ou quatre fois par année. Il n'y a aucune preuve qu'on ait envisagé de lui permettre cela après septembre 2009.

192 Mme Miller a témoigné qu'elle disposait du billet écrit du Dr Parker indiquant que le fonctionnaire ne devait avoir aucun contact avec les détenus. Mme Miller savait, à la suite de la précision de la CAT, ce que cela signifiait. Le Dr Parker a reconnu que, si M. Magee devait se rendre à l'intérieur d'un établissement, il s'agissait d'un risque acceptable. Il ne se rendait pas dans les établissements pour immobiliser des détenus. Il serait allé aux établissements pour expliquer ses conclusions aux agents correctionnels en ce qui a trait à la gestion des interventions prévues. L'employeur l'a rejeté du revers de la main et ne lui en a jamais expliqué la raison. Il n'était pas du tout clair que l'employeur avait enquêté à savoir s'il s'agissait d'une partie importante du travail ou si le fait de lui fournir une escorte de trois à quatre fois par année constituait une contrainte excessive. L'employeur n'a présenté aucune preuve démontrant qu'il ait tenté de réorganiser l'emploi.

193 En ce qui concerne la question de savoir si la décision du TDFP règle la question et empêche la Commission d'examiner l'affaire de façon approfondie, deux questions sont soulevées : la première est celle de savoir si la doctrine de la préclusion est déclenchée, et la deuxième, si c'est le cas, existe-t-il un fondement permettant à la Commission d'entendre la question en toute justice?

194 Dans Penner c. Niagara (Commission régionale de services policiers), 2013 CSC 19, la Cour suprême a adopté une approche souple à l'égard de la préclusion dans le but de conférer aux tribunaux le pouvoir discrétionnaire de refuser de l'appliquer s'il en résultait une injustice, même si les conditions d'application sont réunies. Voir le paragraphe 8. La Cour, au paragraphe 31, a déclaré que « [l]'objectif est de faire en sorte que l'application de la préclusion découlant d'une question déjà tranchée favorise l'administration ordonnée de la justice, mais pas au prix d'une injustice concrète dans une affaire donnée ».

195 Dans Murray c. Canada (Commission de l'immigration et du statut de réfugié), 2014 CF 139, la Cour fédérale, suite à la décision de la Cour suprême dans Penner, a conclu qu'il était déraisonnable que le Tribunal canadien des droits de la personne constate que le TDFP avait tranché essentiellement les mêmes questions que celles soulevées dans la plainte en matière de droits de la personne en appliquant la doctrine de la préclusion. Le demandeur avait déposé une plainte en matière de droits de la personne comportant des allégations de discrimination systémique, d'environnement de travail malsain, d'obstacles à l'avancement des employés des minorités visibles et de harcèlement devant le Tribunal canadien des droits de la personne, tout en déposant également une plainte comportant des allégations de discrimination dans le cadre d'un processus de nomination devant le TDFP.

196 Dans Hughes c. Canada (Ressources humaines et Développement des compétences), 2014 CF 278, la Cour fédérale s'est penchée sur une demande de contrôle judiciaire fondée sur le principe de l'autorité de la chose jugée et la doctrine de la préclusion d'une décision du Tribunal Canadien des droits de la personne qui concluait que des actes discriminatoires avaient été commis relativement aux plaintes présentées par M. Hughes à propos du défaut de l'employeur de prendre des mesures d'adaptation à l'égard de sa déficience, alors qu'il avait également déposé des plaintes auprès de l'ancienne Commission à propos de son incapacité à conserver un emploi permanent. Ces plaintes ont été rejetées.

197 La Cour a rejeté la demande de contrôle judiciaire. En rejetant la demande, la Cour a déclaré que la question à trancher consistait à déterminer si les questions soulevées devant le Tribunal canadien des droits de la personne avaient été tranchées par l'ancienne Commission. Si la réponse à cette question est négative, le principe de l'autorité de la chose jugée ne s'applique pas. Si, d'autre part, les questions présentées devant les tribunaux étaient les mêmes, les trois exigences du critère pour la doctrine de la préclusion seraient manifestement satisfaites (voir également Ontario [Community Safety and Correctional Services] v. De Lottinville, 2015 ONSC 3085).

198 L'agent négociateur a fait valoir que la doctrine de la préclusion n'est pas déclenchée dans la présente affaire. La question qui est présentée est différente de celle qui découle de la décision de nommer des personnes dans le cadre d'un processus de nomination particulier dont le TDFP était saisi. Ce que le Tribunal a tranché, c'est qu'il n'y a eu aucun abus de pouvoir dans le cadre de ce processus, car le fonctionnaire a échoué l'examen. Le Tribunal, au paragraphe 18, a statué qu'il ne pouvait pas se fonder sur sa nomination intérimaire initiale à titre d'indication qu'il était qualifié, car il s'agissait d'une nomination intérimaire de moins de quatre mois. Par conséquent, la nomination était soustraite à l'exigence voulant qu'elle soit fondée sur le mérite.

199 La question de savoir si l'employeur aurait dû mettre en place un processus non annoncé afin de nommer M. Magee au poste AS-05 pour une durée indéterminée est une question différente. Cette affaire ne relève pas de la compétence du TDFP.

200 Même si la doctrine de la préclusion s'appliquait, l'utilisation du pouvoir discrétionnaire lié à son exercice dans cette affaire est manifestement injustifiée. Le TDFP n'avait pas le pouvoir d'ordonner la nomination du plaignant. S'il avait conclu qu'il y a eu un abus de pouvoir, il avait le pouvoir d'ordonner la révocation d'une nomination.

201 La préoccupation la plus importante est que la décision du TDFP ne présente aucune analyse de l'obligation continue de prendre des mesures d'adaptation, mais se penche simplement sur la question de savoir si un employé a démontré ou non qu'il était qualifié. L'employeur ne subit aucun préjudice du fait qu'on lui demande de rendre compte et de montrer qu'il s'est penché sur la question de savoir si M. Magee répondait au processus d'évaluation fondé sur le mérite. Cependant, le fait que les plaintes en matière de droit de la personne de M. Magee n'aient pas été traitées adéquatement lui porte atteinte.

202 En ce qui concerne la question de savoir si M. Magee aurait pu faire l'objet d'une mesure d'adaptation au Centre psychiatrique régional, la preuve de M. Magee, de M. Taylor et du Dr Parker est pertinente à cette question. La barrière principale pour le traitement des visiteurs est située à quelque 100 m de l'établissement principal. D'un côté de l'immeuble, il y a une entrée des véhicules pour les livraisons à l'établissement. La barrière principale est dotée par un CX-01, qui se trouve dans un secteur sécurisé protégé par du verre pare-balles. Il s'agit d'un poste armé. Un CX-02 permet aux visiteurs d'entrer par la porte et balaye les articles qu'ils amènent à l'établissement. Il s'agit d'un poste non armé, même si la personne porte un vaporisateur de poivre.

203 La personne armée dans le secteur sécurisé décide s'il convient de permettre à une personne d'entrer dans l'établissement. Le poste comprend des meurtrières à partir de laquelle cette personne peut superviser les personnes qui entrent dans l'établissement. M. Taylor a témoigné que le seul incident lié à la sécurité dont il pouvait se souvenir au cours de sa carrière était qu'une femme avait giflé un agent correctionnel qui la fouillait. Cet incident ne s'était pas produit à cet établissement.

204 Dans l'éventualité d'un incident, l'agent armé occupant le poste sécurisé peut appeler du renfort par radio s'il éprouve des préoccupations en matière de sécurité. La personne armée derrière le comptoir pourrait se défendre avec un vaporisateur de poivre et se retirer dans le secteur sécurisé, immédiatement adjacent au comptoir. L'agent dans le secteur non sécurisé est également tenu de sortir et d'inspecter les véhicules qui entrent dans l'établissement. Les détenus n'ont pas accès à ce secteur.

205 L'employeur a indiqué que ce poste CX-02 ne convient pas aux fins d'une mesure d'adaptation en raison de la restriction médicale relative voulant qu'il n'y ait aucun contact avec les détenus. L'employeur s'est uniquement fondé sur la note manuscrite du Dr Parker datée du 23 septembre 2009, qui indiquait [traduction] « ce patient peut retourner au travail. On recommande qu'il n'ait aucun contact avec les détenus – déficience permanente ».

206 En date du 22 décembre 2009, Mme Miller a indiqué qu'elle aimerait donner suite à la mesure d'adaptation temporaire de M. Magee au PPCC du Centre psychiatrique régional et à l'entrée principale, mais qu'elle ne pouvait le faire en raison de la restriction du médecin voulant qu'il n'y ait pas de contact avec les détenus. Elle a souligné qu'il était nécessaire que M. Magee confirme auprès de son médecin s'il pouvait travailler dans des secteurs qui comportaient un contact direct avec les détenus, sans être assujetti à l'exigence de réagir en cas d'urgence.

207 Le Dr Parker a écrit le 26 février 2010 pour préciser les restrictions relatives au travail de M. Magee en ce qui concerne les contacts avec les détenus. Il a déclaré en partie ce qui suit :

[Traduction]

[…] idéalement, je ne voulais pas qu'il ait des contacts avec les détenus pour des raisons de sécurité pour lui-même et ses collègues, et je comprends qu'il y a des emplois dans le Centre psychiatrique régional où il n'y a aucun contact avec les détenus ou un contact minimal. M. Magee occupait un emploi à l'externe pour le système juridique sans avoir de contacts avec les détenus. Idéalement, j'aimerais que M. Magee occupe un emploi à l'extérieur de l'établissement, peut-être auprès de personnes ayant déjà commis des infractions ou en surveillant le respect de la liberté conditionnelle. Je comprends que cet emploi pourrait parfois exiger que M. Magee entre dans l'établissement et nous pouvons accepter cela dans le cadre d'un petit risque à l'égard de toute personne qui entre dans l'établissement.

208 Le Dr Parker a perçu cela comme une modification des restrictions. Mme Miller ne s'est pas penchée sur celles-ci. M. Magee a fait valoir que lorsqu'on est confronté à une situation ambiguë, il convient de demander des renseignements supplémentaires au médecin traitant.

209 Le PPCC est le secteur où les flux vidéo sont centralisés à l'intérieur de l'établissement. M. Magee ne croyait pas qu'il y aurait un problème lié à son entrée et à sa sortie de l'établissement. La préoccupation principale soulevée par l'employeur était l'endurance du fonctionnaire à ce poste. L'agent négociateur ne demandait pas une nomination à temps plein de M. Magee à ce poste, mais qu'il effectue une rotation au poste à la barrière principale à partir de ce poste. Il est compréhensible qu'une personne ne doive pas passer plus de quatre heures au PPCC. On ne sait pas clairement pourquoi il ne pouvait pas accomplir un quart de quatre heures de façon régulière, comme c'est le cas, par exemple, des contrôleurs aériens. Il n'existe aucune preuve réelle démontrant un préjudice à l'égard d'un employé accomplissant des postes de quatre heures de façon régulière.

210 M. Urmston a parlé des préoccupations en matière de logistique liées au fait d'avoir deux listes d'employés. La position de l'employeur est qu'il ne devrait pas être tenu de créer un poste hybride permanent si la personne est par ailleurs capable d'accomplir son travail régulier. Selon la jurisprudence, la première chose à faire est de déterminer si l'employé peut exercer ses propres fonctions d'une façon quelconque.

211 M. Urmston a affirmé que le rôle d'un CX consiste à maintenir le rôle et l'intégrité de l'établissement. C'est ce que l'employé au PPCC et à la barrière principale fait. On a laissé entendre qu'une personne travaillant au PPCC sans exercer simultanément le travail d'un CX sur le terrain pourrait, d'une certaine façon, avoir une incidence sur la façon dont leurs fonctions sont exercées. Cependant, l'employeur n'a présenté aucune preuve concrète d'une incidence préjudiciable. Ce poste n'a jamais été offert à M. Magee, cependant, M. Magee a indiqué qu'il l'aurait accepté si on le lui avait offert.

212 Le salaire d'un CX-02 en date de juin 2010 s'élevait à 71 183 $. Le feuillet T4 de M. Magee pour 2006 montrait un revenu brut de 91 632,82. Cela représente une différence d'environ 20 000 $ entre le salaire de base d'un CX-02 et le salaire qu'il gagnait en tant qu'agent, Services aux victimes. De plus, une prime de poste s'applique à tous les CX. Même si l'on accepte l'argument de l'employeur selon lequel il n'aurait pas exercé les fonctions essentielles d'un CX-02, s'il avait été nommé à ce poste, il aurait eu une possibilité de gagner une rémunération au titre des heures supplémentaires.

213 L'argumentation de l'agent négociateur porte principalement sur ces deux postes, c'est-à-dire le poste AS-05 et le poste hybride au PPCC et à la barrière principale. M. Burbach a recommandé un poste d'enseignement au collège de formation du personnel. Selon la preuve, aucun poste n'était disponible.

214 Il est manifeste que M. Magee avait besoin d'une évaluation ergonomique. Le Dr Parker a écrit à la CAT le 6 juin 2009 pour l'informer que M. Magee pourrait avoir besoin d'une évaluation ergonomique de son poste de travail. Un mois s'est écoulé sans que rien ne se produise. Des mises à niveau devaient être apportées au milieu de travail avant que M. Magee puisse effectuer un retour au travail. Le Dr Parker a affirmé que cela aurait pu être un facteur ayant aggravé sa blessure.

215 En ce qui a trait aux commentaires discriminatoires que M. Suchorab aurait formulés à l'égard de M. Magee, cela faisait partie du processus de retour au travail découlant de la chirurgie de 2008. Après cette chirurgie, on lui a demandé de retourner au travail en présence de détenus. On a allégué qu'il ne voulait pas retourner au travail et, par conséquent, il s'est senti responsable de ses propres blessures. M. Suchorab a aussi dit à M. Magee qu'il aurait de la chance d'obtenir un emploi d'ouvrier jardinier ou de concierge, et qu'il ne méritait rien de mieux.

216 M. Suchorab a déclaré qu'il ne ferait jamais de tels commentaires et qu'il n'avait eu aucune discussion avec M. Magee au cours de cette période, ce qui soulève une question de crédibilité. M. Magee a signalé des commentaires précis qui lui confèrent de la crédibilité à propos du transfert d'une personne n'ayant pas pris part à la discussion. La réponse de M. Suchorab était évasive. Il n'y a aucun motif laissant entendre que M. Magee aurait inventé les commentaires.

217 En ce qui concerne les commentaires de Mme Burnouf, il n'est pas allégué qu'elle ait inventé quoi que ce soit. M. Magee a fait savoir qu'il voyait une distinction entre un congé de maladie et un congé pour accident de travail. En outre, ses commentaires selon lesquels il était ASP correspondent à ses commentaires indiquant qu'il manquait à l'appel. Les notes prises par M. Magee à ce moment indiquent qu'il a perçu ses remarques relatives au congé de maladie comme une critique à son égard et qu'elles lui ont fait sentir qu'il était responsable de son accident de travail. Il n'est pas nécessaire qu'un commentaire soit intentionnel pour être discriminatoire. Il est possible qu'elle n'ait pas eu l'intention de blesser M. Magee, mais tel a été le résultat.

218 Pour ce qui est d'une réparation, si la Commission arrive à la conclusion que M. Magee aurait dû être nommé au poste AS-05 dans le cadre d'un processus non annoncé, des dommages devraient lui être octroyés afin de tenir compte de la différence de salaire entre le poste AS-05, qui était de 78 400 $ en date de 2010, et le poste WP-03, qui était de 67 179 $. Même s'il a été blessé pendant une partie de cette période, la preuve laisse entendre que, pris ensemble, le fait d'accomplir un travail différent et d'être assis à un bureau à accomplir des tâches monotones et le défaut d'avoir effectué une évaluation ergonomique ont contribué à ses problèmes continus. M. Magee n'était pas responsable de ces problèmes et il ne devrait pas être pénalisé pour cette raison.

219 Subsidiairement, on devrait lui donner la première possibilité d'accomplir le travail du poste AS-05 et d'être soit nommé au poste, soit lui donner la possibilité de s'y qualifier.

220 En ce qui a trait au poste hybride au PPCC et à la barrière principale, le poste CX-02 en date de 2010 était rémunéré 71 183 $, alors que le poste WP-03 était rémunéré 67 179 $. Il a droit à la différence pour la période en cause. En outre, il devrait être rémunéré pour les heures supplémentaires perdues.

221 Le fonctionnaire demande également une indemnisation pour les préjudices moraux en application de l'alinéa 53(2)e) de la Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C., 1985, ch. H-6), d'un maximum de 20 000 $, ainsi qu'une indemnité spéciale d'un montant de 20 000 $ en application du paragraphe 53(3) de la Loi parce que l'employeur s'est adonné d'une façon inconsidérée à une conduite discriminatoire.

B. Arguments de l'employeur

222  En général, l'avocat de l'employeur était d'accord avec les principes importants établis par l'avocat de l'agent négociateur. Il a toutefois souligné que les étapes requises dans l'analyse des griefs soulevant des allégations en matière de droit de la personne n'ont pas été respectées dans l'argument de l'agent négociateur. Plus particulièrement, il faut d'abord déterminer si le fonctionnaire a établi une preuve prima facie de discrimination. Le critère permettant de déterminer si une preuve prima facie a été établie devrait être appliqué comme suit :

1. Le plaignant est-il membre d'un groupe protégé?

2. Le membre a-t-il subi un traitement préjudiciable?

3. Existe-t-il un lien entre l'appartenance à un groupe et l'intention ou le comportement désavantageux? Voir McGill, précité, paragraphes 48 à 50.

223 La Cour d'appel de l‘Ontario dans Ontario (Director, Disability Support Program) v. Tranchemontagne, 2010 ONCA 593, s'est penchée sur le critère pour établir une preuve prima facie de discrimination.

224 Pendant toute la durée des procédures, il incombe au demandeur d'établir une preuve prima facie. Ce n'est qu'une fois la preuve prima facie établie que le fardeau est transféré à l'employeur.

225 Le fait que le poste WP-03 représente une mesure d'adaptation raisonnable n'est pas contesté. L'agent négociateur a indiqué qu'il existait de meilleures mesures d'adaptation. Le poste WP-03 utilise les compétences et l'expérience de M. Magee. Ce que l'on remet en question, c'est la question de savoir s'il y a des mesures d'adaptation préférables. Si l'on arrive à la conclusion que les autres postes en litige ne pouvaient pas être offerts, le poste WP-03 ne constitue pas une mesure d'adaptation déraisonnable.

226 L'agent négociateur allègue qu'on a omis de suivre certaines étapes de la procédure. Cependant, l'obligation de prendre des mesures d'adaptation ne présente aucun élément procédural distinct.

227 Dans Canada (Procureur général) c. Cruden, 2013 CF 520, confirmée dans 2014 CAF 131, la Cour fédérale a tranché qu'il était déraisonnable que le Tribunal canadien des droits de la personne arrive à la conclusion que l'on avait contrevenu à une obligation procédurale de prendre des mesures d'adaptation, même s'il était impossible de prendre une mesure d'adaptation à l'égard de l'employé handicapé sans contrainte excessive.

228 Au paragraphe 69, la Cour fédérale a déclaré ce qui suit :

[…] l'arrêt Meiorin n'étaye pas de façon raisonnable l'argument selon lequel il existe une obligation procédurale distincte dans le processus d'accommodement qui peut être violée, malgré une conclusion de fond selon laquelle il existe une contrainte excessive, et qui donnerait lieu à des mesures de réparation.

229 L'obligation de prendre des mesures d'adaptation n'exige pas d'un employeur qu'il prenne des mesures d'adaptation à l'égard d'un employé à l'intérieur de sa classification d'emploi lorsqu'un employé n'est pas en mesure d'exercer les fonctions de base ou essentielles de son travail.

230 Cela ne veut pas dire que l'employeur n'a pas une obligation de modifier le travail ou de regrouper les fonctions, mais il existe une limite quant à l'étendue de la modification requise. L'employeur soutient dans cette affaire que, peu importe l'emplacement du seuil, les étapes nécessaires pour prendre des mesures d'adaptation à l'égard de M. Magee en tant qu'agent correctionnel dépassent grandement ce qui est requis.

231 Dans Hydro-Québec c. Syndicat des employé-e-s de techniques professionnelles et de bureau d'Hydro-Québec, section locale 2000 (SCFP-FTQ), 2008 CSC 43, la Cour suprême du Canada a affirmé au paragraphe 15 que « [l]'obligation d'accommodement n'a cependant pas pour objet de dénaturer l'essence du contrat de travail, soit l'obligation de l'employé de fournir, contre rémunération, une prestation de travail ». Au paragraphe 16, la Cour a également souligné ce qui suit :

Le critère n'est pas l'impossibilité pour un employeur de composer avec les caractéristiques d'un employé. L'employeur n'a pas l'obligation de modifier de façon fondamentale les conditions de travail, mais il a cependant l'obligation d'aménager, si cela ne lui cause pas une contrainte excessive, le poste de travail ou les tâches de l'employé pour lui permettre de fournir sa prestation de travail.

232 Le Tribunal des droits de la personne de l'Ontario en est récemment arrivé à la même conclusion dans Yeates v. Commissionaires Great Lakes, 2010 HRTO 906.

233 Dans Everaz Inc. NA Canada v. Shopmens (International Association of Bridge, Structural Ornamental and Reinforcing Iron Workers, Local Union No. 805), 2010 CanLII 96500 (AB GAA),et dans l'affaire d'un grief de Glenn Dale Curry, ALTA. G.A.A. 2010-009, l'arbitre de différends Alan Beattie a examiné la jurisprudence arbitrale et celle de la cour sur l'obligation de prendre des mesures d'adaptation et est arrivé à la conclusion qu'un certain nombre de normes ou de critères avaient été soulevés. À la page 17 de la version PDF de la décision, l'arbitre signale que l'un des principes est qu'un employeur [traduction] « n'a pas à créer un nouvel emploi, ou un emploi qui n'est pas productif, ou un emploi dont les fonctions essentielles ont été éliminées ou un emploi qui modifie les conditions de travail d'une façon fondamentale ».

234 Dans Pourasadi v. Bentley Leathers Inc., 2015 HRTO 138, le Tribunal des droits de la personne de l'Ontario, après avoir récité les buts et les objectifs d'une mesure d'adaptation telle que définie dans Hydro-Québec, a affirmé ce qui suit au paragraphe 28 :

[Traduction]

Comme le Tribunal l'a soutenu dans de nombreuses affaires, l'obligation de prendre des mesures d'adaptation pourrait exiger d'organiser le milieu de travail de l'employé d'une façon qui permet à l'employé d'exercer les fonctions essentielles de son poste. Cependant, cela n'exige pas une modification permanente aux fonctions essentielles d'un poste ou l'attribution permanente des fonctions essentielles d'un poste à d'autres employés. L'obligation de prendre des mesures d'adaptation n'exige pas non plus d'exempter des employés d'exercer les fonctions essentielles de leur poste.

235 Dans Gables Lodge Limited v. C.U.P.E., Local 1315 (2009), 187 L.A.C. (4th) 286, l'arbitre de différends de la Nouvelle-Écosse, William Kydd, a examiné la jurisprudence et est arrivé à la conclusion suivante au paragraphe 54 :

[Traduction]

En 2008, dans Hydro-Québec, précitée, la Cour suprême a déclaré qu'en raison du « caractère individualisé de l'obligation d'accommodement et de la diversité des circonstances qui peuvent survenir, toute règle rigide est à éviter ». Je suis d'avis d'interpréter cette affirmation comme empêchant l'adoption de la règle suggérée dans Re Better Beef voulant qu'un employeur ne soit pas tenu de prendre différentes tâches de postes existants et de créer un nouveau poste. Hydro-Québec, au contraire, indique qu'une mesure d'adaptation devrait être prise si les circonstances permettaient le regroupement de différentes tâches et être accordée à un travailleur handicapé, sans contrainte excessive pour l'employeur, ce qui permettrait à l'employé d'exercer un emploi utile et productif. D'autre part, l'affirmation dans Hydro-Québec selon laquelle l'obligation de prendre des mesures d'adaptation doit être compatible avec la règle qui « oblige les employés à fournir leur prestation de travail » doit signifier que « le seuil de contrainte excessive est franchi si l'employeur est tenu de maintenir un employé handicapé dans un poste qui n'est ni utile ni productif en soi dans le contexte de l'opération de l'employeur », comme l'a résumé l'arbitre Kennedy dans Re Hamilton Civic Hospitals, précité. »

236 Le témoignage de M. Urmston indiquait que la nature essentielle des postes CX comprend un contact avec des détenus. Les descriptions de travail des postes sont un produit conjoint du syndicat et de l'employeur qui tient compte de la compréhension commune des emplois et de leurs conditions de travail. Huit des douze fonctions ne pouvaient pas être exercées sans avoir de contact avec des détenus. L'activité numéro 1 pouvait être exercée dans un sens théorique. L'activité numéro 7, la formation, pouvait être exercée pendant une période de temps, jusqu'à ce que ses compétences s'atrophient. L'activité numéro 11, surveiller les visiteurs et les entrepreneurs, pouvait être exercée dans le cadre du poste CX-01.

237 Cependant, le CX-02 a la responsabilité de gérer des cas des détenus, ce qui ne peut être accompli sans avoir de contact avec les détenus. Si vous éliminez le contact avec les détenus des descriptions de travail des CX, il ne reste rien. L'agent négociateur a mentionné une obligation de regrouper les fonctions; cependant, les fonctions essentielles seraient éliminées du poste et il ne resterait qu'un nouveau poste comprenant de nouvelles fonctions et, probablement, une nouvelle classification. M. Urmston a témoigné qu'un nouveau poste ne serait ni utile ni productif. Les employés sont affectés à des postes, non pas à des postes à l'intérieur de l'établissement. Les CX-01 et CX-02 sont des postes. Le PPCC et la barrière principale sont des postes à l'intérieur de l'établissement.

238 Il est nécessaire de maintenir la souplesse de l'effectif dans l'environnement correctionnel, qui est imprévisible, afin qu'il s'adapte à tout scénario. La souplesse se perd ou est éliminée lorsqu'un employé ne peut pas être affecté à quelque poste que ce soit à l'intérieur de l'établissement, au besoin. C'est la raison pour laquelle la direction et le syndicat ont convenu qu'il n'était ni efficace ni productif de pourvoir les postes à la barrière principale avec des commissionnaires, car on ne pouvait pas faire appel à ceux-ci dans tout l'établissement au besoin.

239 Le système de la liste d'employés permet d'assurer que tous les employés effectuent une rotation à tous les postes et de s'assurer que toutes les fonctions sont exercées. Ce système tient compte des absences et des vacances prévues. Tous les employés qui travaillent dans l'établissement travaillent dans l'ensemble des différentes unités et, lorsqu'ils agissent à titre de remplaçants, on attend d'eux qu'ils occupent un poste n'importe où à l'intérieur de l'établissement, selon les besoins. M. Magee ne pouvait pas occuper les différents postes de la liste; il pouvait uniquement travailler à un poste fixe. Une rotation entre le PPCC et l'entrée principale poserait également un risque pour la sécurité. Il perturberait l'équilibre de la rotation. Essentiellement, M. Magee agirait à titre de remplaçant permanent, mais cela aurait une incidence sur les opérations, car il ne pourrait être remplaçant qu'à deux postes différents. Si M. Magee était un remplaçant flottant, il ne pourrait pas prendre la relève d'autres postes, car il ne serait pas en mesure d'effectuer l'autre travail. Ce serait comme si l'employeur devait embaucher un employé supplémentaire.

240 M. Urmston a également indiqué qu'il avait des préoccupations en matière de sécurité liées à la nature répétitive de l'exercice des fonctions dans les deux postes, qui est, à son avis, [traduction] « destructrice d'âme ». De plus, on ne peut pas dire de la modification proposée qu'elle apporterait un avantage productif quelconque pour l'employeur.

241 L'élément lié à la sécurité fait partie d'une contrainte excessive. On ne peut pas rejeter le point de vue de M. Urmston en l'assimilant à des impressions, compte tenu de ses longs antécédents dans le système correctionnel.

242 Dans Government of The Province of British Columbia v. British Columbia Government and Service Employees' Union, 2013 CanLII 61077 (BC LA) (« Pearson »), l'arbitre de différends John Hall s'est penché sur l'obligation de l'employeur de prendre des mesures d'adaptation dans une situation où un agent correctionnel provincial qui avait subi une grave blessure au dos hors du travail a reçu un diagnostic d'invalidité permanente et n'était plus en mesure d'exercer un élément fondamental de son emploi avant sa blessure.

243 Après avoir subi une chirurgie, l'employé a été placé au centre de contrôle de l'établissement dans le cadre d'une affectation ou d'une mesure d'adaptation temporaire. En fin de compte, il a fait l'objet d'une restriction médicale concernant l'immobilisation des détenus et a cherché à demeurer en permanence au centre de contrôle. L'employeur était en désaccord et l'a retiré du poste au centre de contrôle.

244 L'employé a reçu un autre emploi dans un autre ministère; cependant, il a subi des conséquences financières négatives qui ont mené au grief. Le syndicat a fait valoir qu'une mesure d'adaptation raisonnable pourrait comprendre l'acceptation du non-exercice d'une fonction fondamentale et que l'employé aurait dû être maintenu au poste dans le centre de contrôle de façon permanente.

245 L'arbitre de différends a rejeté le grief du syndicat et a présenté le raisonnement suivant aux pages 71 à 73 (version PDF) :

[Traduction]

[…] la Cour suprême du Canada dans Hydro-Québec a indiqué que l'obligation de prendre des mesures d'adaptation devrait être évaluée « globalement ». Et, comme on l'a déjà expliqué, il existe une jurisprudence acceptable concernant les propositions voulant qu'une contrainte excessive doive être approchée avec « bon sens » et que la durée prévue d'une mesure d'adaptation est un facteur pertinent.

En ce qui a trait à la durée prévue de toute mesure d'adaptation, il est important de reconnaître certaines des raisons pour lesquelles le contact avec les détenus est une fonction fondamentale d'un agent correctionnel. Entre autres facteurs, il s'agit d'un aspect inhérent du modèle de supervision directe, et permet aux membres du personnel de « rester à l'écoute » des problèmes éventuels. Un agent correctionnel faisant l'objet d'une mesure d'adaptation qui ne participe pas à la rotation [Runner/Control Prowl] de deux heures n'a aucun contact avec des détenus, quels qu'ils soient. Comme en a témoigné un témoin : « si vous éliminez le contact, vous n'êtes pas un agent correctionnel [et] si vous êtes au centre de contrôle, vous devenez un opérateur d'ordinateur […] travaillant dans une prison, c'est aussi clair que cela pour moi ». Cette évaluation est appuyée par la description générique du poste d'agent correctionnel, où seule une très petite minorité des fonctions énumérées n'exigent pas un contact avec les détenus – il s'agit de l'essence même de l'emploi dans le cadre des activités normales.

Qui plus est, un agent correctionnel ayant une restriction selon laquelle il ne peut avoir aucun contact avec les détenus ne peut évidemment pas participer à la rotation dans les postes dans d'autres secteurs de l'établissement. Le système de rotation n'est pas exclusivement à l'avantage des employés (c.-à-d. prendre « une pause » de certains postes stressants); il est également essentiel à l'intérêt de l'employeur d'assurer que son complément de personnel est souple, qu'il soit suffisamment familier et qu'il bénéficie d'une expérience au sein de l'ensemble de la prison. Comme le fait valoir l'employeur, la rotation est avantageuse pour l'employé individuel et pour l'établissement dans son ensemble.

[…]

J'ai rejeté plus tôt l'approche du « critère nettement tranché » et j'ai autorisé les situations où un employé ayant une invalidité permanente peut faire l'objet d'une mesure d'adaptation sans contrainte excessive. Cependant, la durée d'une telle mesure d'adaptation doit être mesurée en mois, et non pas en années multiples, comme il aurait été nécessaire dans le cas d'une mesure d'adaptation à l'égard de M. Pearson au FRCC. Pour les motifs présentés ci-dessus – y compris, notamment, les fins légitimes présentées par les agents correctionnels qui ont des contacts avec les détenus, l'interférence avec les droits d'autres employés, et l'importance des risques pour la sécurité du préposé – j'arrive à la conclusion que le fait de prendre des mesures d'adaptation d'une durée indéterminée à l'égard de M. Pearson dans le poste de contrôle constituerait une contrainte excessive pour l'employeur. La même conclusion se rapporte à n'importe quel poste au FRCC.

Je suis également d'avis que le placement de M. Pearson au poste de TAES par l'intermédiaire du processus de l'article 13 constituait une mesure d'adaptation raisonnable dans les circonstances. Je suis d'accord avec le syndicat que le processus ne peut pas remplacer l'obligation de prendre des mesures d'adaptation; cependant, on ne peut pas l'ignorer dans le cadre de la matrice factuelle générale.

[…]

[…] Le syndicat ne fait pas non plus valoir, subsidiairement, que le poste de TAES était une mesure d'adaptation déraisonnable, malgré les répercussions financières concomitantes pour M. Pearson (que je reconnais facilement). Il existe un certain nombre de décisions jurisprudentielles qui confirment qu'un employé a droit à une mesure d'adaptation raisonnable et ne peut insister sur une solution plus appropriée ou parfaite.

246 En l'espèce, la preuve est que l'environnement physique au PPCC est exténuant, avec 30 écrans à surveiller en plus des alarmes. S'il s'agissait d'un placement permanent sans rotation à d'autres postes, il existerait un risque grave qu'une personne développe une insensibilité aux différents stimuli, avec le risque concomitant d'omettre de répondre aux problèmes. Cette insensibilité ne se manifesterait pas avant d'être en situation de crise, auquel cas il serait trop tard. Il pourrait très bien s'agir de situations de vie ou de mort. Il n'y a aucun doute que M. Magee, avec les meilleures intentions, croit pouvoir exercer ces tâches sans risque pour le personnel, les détenus ou lui-même.

247 Les préoccupations de M. Urmston ont plus de poids que cette croyance. M. Urmston a également témoigné que le fait d'être situé à un seul poste signifie que vous ne sortez pas de l'établissement et que vous ne [traduction] « restez pas à l'écoute ». Vous ignorez ce qui se passe dans l'établissement. Même s'il y a une séance d'information le matin, au début du quart, cette séance d'information ne remplace pas le fait de se trouver dans l'établissement et de savoir ce qui se passe. En outre, le fait de compter sur une personne qui ne peut pas être déplacée d'un poste nuit à la souplesse de l'employeur de placer les membres du personnel là où on a besoin d'eux en réponse à une crise ou suite à une crise.

248 La mesure d'adaptation proposée porterait atteinte aux droits des autres employés. La liste d'employés, qui comprend la rotation des autres employés, leur donne des possibilités de perfectionner leurs compétences et fournit un soulagement du stress associé au contact avec les détenus. Il pourrait s'avérer nécessaire de prendre des mesures d'adaptation temporaires à l'égard d'autres employés au PPCC ou à la barrière principale. Si ces postes sont dotés en permanence, l'employeur n'a plus cette capacité.

249 Après qu'une mesure d'adaptation a été mise en place, l'employé concerné doit être rémunéré conformément au travail qu'il accomplit. Dans Teamsters Union, Local 419 v. Waste Management of Canada (Catalano Grievance), [2014] O.L.A.A. No. 222 (QL), l'employé, un conducteur pour une société de gestion des déchets, a subi plusieurs blessures au dos. L'employeur a pris une mesure d'adaptation à son égard en l'affectant dans un poste de répartiteur non syndiqué, mais au même taux de rémunération et avec les mêmes avantages. Lorsqu'il est devenu manifeste que sa déficience était permanente, l'employeur l'a laissé à ce poste, mais a réduit ses traitements et a éliminé ses avantages en vertu de la convention collective. L'employé a présenté un grief, soutenant que l'employeur avait commis un acte discriminatoire à son égard au motif d'une invalidité. L'employeur a fait valoir qu'une fois qu'il était manifeste que les limitations de l'employé étaient permanentes, sa mesure d'adaptation en dehors de l'unité de négociation est également devenue permanente et l'employeur avait le droit de le rémunérer au même niveau que les autres employés exerçant le même travail.

250 L'arbitre de grief a rejeté le grief et a présenté le raisonnement suivant au paragraphe 9 :

[Traduction]

Il est maintenant bien établi, depuis la décision de la Cour d'appel dans Orillia Soldiers Memorial Hospital, qu'un employeur qui prend une mesure d'adaptation à l'égard d'un employé dans un nouveau poste en raison d'une invalidité doit rémunérer l'employé au niveau correspondant au travail qui est fourni et non pas au niveau de l'emploi que l'employé exerçait lorsque l'invalidité est survenue. Dans cette affaire, la convention collective n'exigeait pas de l'employeur qu'il continue de verser des avantages à un employé pendant qu'il était en congé de maladie après l'expiration de ses prestations d'invalidité à long terme. La Cour d'appel, en tranchant que la convention collective ne discriminait pas au motif d'une invalidité, a indiqué clairement que, même si l'obligation de prendre des mesures d'adaptation exige d'un employeur qu'il tente de faciliter le retour au travail de l'employé handicapé à son ancien poste, lorsque l'employé peut uniquement faire l'objet d'une mesure d'adaptation à un poste différent, l'employeur doit rémunérer l'employé au taux du travail accompli. S'exprimant au nom de la Cour, le juge Rosenberg a déclaré : « Il ne s'agit pas d'un acte discriminatoire interdit d'établir une distinction aux fins de rémunération entre des employés qui assurent une prestation de services à l'employeur et ceux qui ne le font pas. » Cette approche a depuis été adoptée dans d'autres affaires, dont Cambridge Hospital et Loblaws en appui de la proposition voulant que, lorsque des employeurs prennent des mesures d'adaptation à l'égard d'employés handicapés dans des emplois qui différent de leur emploi antérieur, l'employeur n'a qu'à rémunérer l'employé conformément au niveau de rémunération reçue par les autres employés qui accomplissent le même travail. L'employeur n'est pas tenu de maintenir le niveau de rémunération antérieur à la blessure d'un employé qui peut uniquement faire l'objet d'une mesure d'adaptation dans un emploi moins rémunéré.

251 Les descriptions de travail des postes CX-01 et CX-02 se fondent sur les contacts avec les détenus. La description de travail établit non seulement les fonctions, mais les conditions dans lesquelles les fonctions sont exercées. Les conditions de travail sont uniques, exigeantes, désagréables et potentiellement dangereuses, dans la mesure où elles sont liées à l'interaction avec les détenus. Toutes les différentes composantes, compétences et capacités sont liées aux détenus. M. Urmston a décrit une indemnité calculée selon le facteur pénologique pour des postes qui ont un contact occasionnel avec les détenus qui ne participaient pas à des interventions auprès des détenus ou à l'immobilisation de ceux-ci. L'élément du travail lié à la rémunération se rapporte au danger de l'emploi. Lorsque les commissionnaires exerçaient les fonctions à la barrière principale, ils recevaient près du salaire minimum. Le salaire pour cet emploi atteint maintenant un minimum de 70 000 $ par année.

252 Dans Sioui c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2009 CRTFP 44, la vice-présidente Pineau a tranché le cas d'un fonctionnaire qui avait travaillé en tant qu'agent correctionnel dans un établissement de sécurité maximale et qui avait été licencié en vertu du paragraphe 12(1) de la Loi sur la gestion des finances publiques, (L.R.C., 1985, ch. F-11). Il était devenu inapte de façon permanente à occuper son poste d'agent correctionnel puisqu'il ne pouvait plus travailler auprès des détenus ni utiliser une arme à feu. De plus, les démarches pour lui trouver un autre emploi au sein de la fonction publique se sont avérées infructueuses. Il a déposé un grief contestant son licenciement et l'arbitre de grief a eu à trancher si l'employeur avait pris les mesures d'adaptation nécessaires en vue de réintégrer M. Sioui dans le milieu de travail sans subir de contrainte excessive.

253 Après avoir examiné la jurisprudence pertinente, elle a examiné la façon dont elle s'appliquait aux circonstances de l'affaire dont elle était saisie, en partie comme suit, aux paragraphes 89 à 91 :

Il a été mis en preuve qu'il est impossible pour un agent correctionnel de travailler dans le milieu carcéral, compte tenu de ses fonctions de surveillance des détenus, sans avoir un contact avec eux et sans arme à feu. Ces exigences professionnelles sont impossibles à adapter. L'employeur a établi que les autres fonctions au pénitencier requièrent de près ou de loin un contact avec les détenus dans leurs allées et venues et qu'il n'est pas possible de soustraire un travailleur de ces contacts sans rendre la tâche inutile.

Pour ces raisons, l'obligation d'avoir un contact avec les détenus et de porter une arme constitue, à mon avis, une exigence professionnelle justifiée et incontournable qu'il n'est pas possible de modifier sans mettre en péril la santé et la sécurité d'autres employés.

 À l'instar des conclusions de la Cour suprême du Canada dans Hydro-Québec, je suis d'avis que l'employeur doit tenir compte également du contexte de travail, dans ce cas-ci, la santé et la sécurité de ses autres employés. Dans les circonstances de la présente affaire, l'employeur ne peut changer de façon fondamentale les exigences professionnelles du poste sans qu'il y ait contrainte excessive.

254 Elle a conclu dans les circonstances de cette affaire que l'employeur s'était acquitté de son obligation de prendre des mesures d'adaptation à l'égard de son poste d'agent correctionnel ainsi que de son obligation de trouver un arrangement raisonnable qui aurait permis au fonctionnaire de continuer à travailler au sein de la fonction publique fédérale. Le grief a été rejeté.

255 Si on conclut que M. Magee aurait pu effectuer un retour à l'intérieur de l'établissement, il convient de souligner que M. Magee a omis de participer au processus. Le dernier billet de médecin du Dr Parker indique que, idéalement, M. Magee aimerait occuper un emploi en dehors de l'établissement, car cela représenterait le [traduction] « meilleur scénario » pour lui. Ainsi, toute autre option arrive au deuxième rang. Le Dr Parker a écrit à propos du travail auprès de récidivistes et a suggéré que M. Magee travaille dans la collectivité. Si M. Magee croyait qu'il pouvait faire l'objet d'une mesure d'adaptation au Centre psychiatrique régional, il a orienté la conversation dans une autre direction. Personne n'a témoigné qu'il a soulevé à un moment quelconque la question d'une mesure d'adaptation au PPCC ou à la barrière principale. M. Magee a convenu qu'il n'avait pas soulevé cette question. La compréhension de Mme Miller selon laquelle il préférait faire l'objet d'une mesure d'adaptation à l'extérieur de l'établissement n'est pas contestée. La lettre présentée par M. Magee au Dr Parker témoigne de son état d'esprit.

256 Dans Central Okanogan School District No. 23 c. Renaud, [1992] 2 R.C.S. 970, le juge Sopinka de la Cour suprême du Canada a décrit les responsabilités de l'employeur, du syndicat et de l'employé dans le cadre de l'exercice de l'obligation de prendre des mesures d'adaptation. La Cour a souligné, aux pages 994 et 995, que l'employé avait également l'obligation d'aider à trouver un compromis approprié.

257 Dans Ellis v. General Motors of Canada Limited, 2011 HRTO 1453, au paragr. 29, le Tribunal des droits de la personne de l'Ontario a signalé qu'un employé n'avait pas le droit de s'attendre à une mesure d'adaptation privilégiée ou parfaite, mais était plutôt [traduction] « tenu d'accepter une mesure d'adaptation qui répond à ses besoins ».

258 Dans la présente affaire, M. Magee n'a jamais proposé de faire l'objet d'une mesure d'adaptation à la barrière principale ou au PPCC.

259 L'agent négociateur a présenté un argument sur la façon dont l'obligation de prendre des mesures d'adaptation pourrait s'appliquer à une situation de dotation continue, notamment en plaçant l'employé au poste AS-05. L'employeur soutient que cet argument ne peut pas être accueilli. Le poste AS-05 représente une promotion par rapport au poste CX-02. Il n'y a aucune exigence de prendre une mesure d'adaptation à l'égard d'un employé dans un poste qui constitue une promotion. L'agent négociateur a tenté de surmonter le fait qu'une nomination au poste AS-05 constituait une promotion en fonction de la prémisse voulant que l'employeur tente de minimiser la perte de salaire, en s'appuyant sur la totalité de la rémunération que pourrait éventuellement recevoir un CX-02, y compris les primes et les heures supplémentaires.

260 Cette analyse présente plusieurs problèmes. Le revenu supplémentaire au regard des primes et des heures supplémentaires n'est pas garanti. M. Magee a effectivement eu une année où son revenu s'est élevé à 91 000 $. Au cours des autres années, cependant, il n'y avait aucune preuve importante en ce qui concerne les heures supplémentaires. Il existe deux types de rémunérations, celle fondée sur les heures de travail régulières, et les primes, qui constituent une rémunération pour le travail accompli au-delà des heures régulières prévues ou pour les conditions de travail défavorables les fins de semaine ou les jours fériés.

261 S'il existe un certain nombre de mesures d'adaptation convenables où il n'est habituellement pas nécessaire d'effectuer des heures supplémentaires, l'employeur n'est pas tenu d'augmenter la rémunération horaire de ces postes afin d'intégrer un élément relatif à une prime ou à des heures supplémentaires.

262 Le Règlement définissant le terme « promotion » (DORS/2005-376), définit une promotion aux fins du paragraphe 51(5) de la LEFP comme signifiant ce qui suit :

l'attribution à un fonctionnaire des fonctions d'un poste dont le taux de rémunération maximal dépasse celui de son niveau de titularisation, au moment de l'attribution, d'une somme égale ou supérieure, selon le cas :

a) à la plus faible augmentation de l'échelle de rémunération du nouveau poste, si celui-ci compte plus d'un taux de rémunération;

b) à 4 % du taux de rémunération maximal de l'ancien poste, si le nouveau poste compte un seul taux de rémunération.

263 Le poste WP-03 présente le taux de rémunération le plus élevé sans constituer une promotion. Il est plus élevé que celui du poste CX-01, mais inférieur d'environ 3 000 $ à celui du poste CX-02. Le taux de rémunération du poste AS-05 est supérieur d'environ 8 000 $ à celui du poste CX-02.

264 Le paragraphe 30(1) de la LEFP établit que des nominations, y compris celles qui constituent des promotions, doivent être fondées sur le mérite.

265 L'agent négociateur s'appuie la rémunération totale lorsqu'il fait valoir que l'obligation de prendre des mesures d'adaptation comprend une obligation de réduire au minimum la perte de salaire; cependant, il n'a pas été en mesure de présenter une jurisprudence quelconque à l'appui de sa position. Dans Ellis, précitée, le Tribunal des droits de la personne de l'Ontario s'est penché sur la question de savoir si l'obligation de prendre des mesures d'adaptation s'étend au fait d'exiger d'un employeur qu'il accorde une promotion à une personne. Le Tribunal a indiqué ce qui suit au paragraphe 28 :

[Traduction]

J'aborderai ensuite la question du placement privilégié par le demandeur, qui était au poste de chef de groupe. Je suis arrivé à la conclusion ci-dessus que le demandeur était capable d'exercer les fonctions du poste de chef de groupe à l'intérieur de ses limites, nonobstant le fait qu'il s'agissait d'un poste qui exigeait, au besoin, qu'il effectue les fonctions du poste de ponceur de surface de terrasse. Cependant, à mon avis, l'obligation de prendre des mesures d'adaptation ne s'étend pas au fait d'exiger de l'employeur qu'il accorde une promotion à une personne à un poste de niveau supérieur auquel il n'aurait par ailleurs pas été promu, que cela soit pour des raisons liées à l'ancienneté ou au mérite. Le but de l'obligation de prendre des mesures d'adaptation dans le contexte d'un emploi consiste à veiller à ce qu'un employé handicapé ait la possibilité de continuer à exercer les fonctions essentielles de son emploi si ses besoins peuvent faire l'objet d'une mesure d'adaptation sans causer une contrainte excessive pour l'employeur. Au moment d'aborder la mesure d'adaptation prise à l'égard d'un employé, la première considération consiste à déterminer si l'employé peut faire l'objet d'une mesure d'adaptation dans son poste d'attache sans contrainte excessive. Même si le droit dans ce domaine se développe toujours, il a été reconnu que, si cela n'est pas possible, l'obligation de mesure d'adaptation peut s'étendre à l'examen d'autres postes. Cependant, l'obligation de prendre des mesures d'adaptation n'a pas été examinée dans le but d'inclure l'octroi d'une promotion à un employé handicapé qui n'aurait par ailleurs pas eu droit à ladite promotion. À mon avis, agir ainsi irait au-delà du fait d'assurer un traitement égal à un employé handicapé, ce qui est protégé en vertu du paragr. 5(1) du Code.

[Je souligne]

266 Dans Baum v. Calgary (City), 2008 ABQB 791, la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta, dans un appel de la décision d'un comité du Tribunal des droits de la personne selon laquelle le demandeur n'avait pas été victime d'un acte discriminatoire au motif d'une invalidité et que le défendeur, la ville ou l'employeur, avait pris une mesure d'adaptation à son égard jusqu'à en subir une contrainte excessive, a formulé des commentaires sur la question de savoir si l'obligation de prendre des mesures d'adaptation comprenait une mesure d'adaptation à l'égard d'un employé dans un poste constituant une promotion dans le contexte de l'ancienneté dans un environnement syndiqué aux paragraphes 52 et 53 :

[Traduction]

En ce qui concerne la question relative au syndicat, on a présenté au Comité une preuve selon laquelle les syndicats avec lesquels la Ville traite sont très sensibles aux questions comme l'ancienneté. On peut dire la même chose en ce qui a trait aux promotions. Mme McDermid a témoigné que la ville envisagerait de prendre une mesure d'adaptation à l'égard d'un employé dans un poste constituant une promotion, mais seulement en dernier recours. Elle a indiqué que, à son avis, ils n'étaient tout simplement pas encore arrivés à ce point avec M. Baum avant qu'il démissionne. Le fait qu'un employé puisse faire l'objet d'une mesure d'adaptation dans un poste constituant une promotion pourrait éventuellement porter atteinte à d'autres candidats à ce poste, plus particulièrement s'ils comptent plus d'ancienneté que l'employé visé par la mesure d'adaptation. La preuve présentée par la ville (et, plus particulièrement, la preuve de Wilf Steckler, le gestionnaire des relations de travail pour la Ville) a confirmé que ce processus avait été suivi pendant une certaine période de temps et qu'il avait été compris et accepté par les 11 syndicats comme étant approprié et équitable dans l'ensemble des circonstances, compte tenu des intérêts particuliers et des obligations juridiques. En conséquence, le traitement de M. Baum n'était pas arbitraire, mais était fondé sur les lignes directrices de la ville et du syndicat que devaient respecter tous les employés, et non pas uniquement les employés handicapés. On peut difficilement affirmer que M. Baum a été traité de façon arbitraire à cet égard.

Ma conclusion à cet égard est renforcée par un examen de certaines des affaires traitant de la question relative à l'obligation de prendre des mesures d'adaptation […]

267 Ce que la Cour indique dans Baum, c'est qu'il est possible qu'un certain nombre d'employés cherchent à obtenir une promotion. Il existe une obligation de trouver du travail qu'un employé handicapé peut faire, conformément à ses limites. Il n'existe aucune obligation de trouver un emploi qui constitue une promotion. Si l'employé handicapé cherche à obtenir une promotion, il doit suivre les mêmes processus que toute autre personne. C'est ce qui a été fait dans la présente affaire.

268 On fait valoir qu'en raison du fait que l'obligation de prendre des mesures d'adaptation est permanente, il n'aurait pas fallu mettre fin à l'examen de la candidature de M. Magee pour le poste AS-05 lorsqu'il a échoué à l'examen des connaissances et qu'on a déterminé qu'il n'était pas qualifié pour ce poste. Selon l'employeur, cela irait à l'encontre de la décision rendue dans Baum, car l'employé se verrait accorder un traitement plus favorable que les autres employés qui cherchent à obtenir la même occasion. Cela soulève également une question pratique dans les situations où un employé handicapé demande une mesure d'adaptation. À quel moment disons-nous que l'évaluation des qualités a été cristallisée et que vous pouvez nommer quelqu'un d'autre?

269 L'agent négociateur a fait valoir que l'examen pourrait ne pas avoir évalué ses qualifications de façon précise et que l'expérience de M. Magee aurait dû être prise en considération au moment de déterminer s'il avait fait preuve de mérite. Dans Bates, précitée, la demanderesse a soulevé l'écart entre l'expérience et les résultats de l'examen dans le cadre du processus de dotation. M. Magee ne l'a pas fait. Dans Magee, précitée, la décision du TDFP relative à la plainte en matière de dotation de M. Magee concernant le poste AS-05, le Tribunal a souligné ce qui suit au paragraphe 6 :

Le plaignant a précisé qu'il ne remettait pas en question le processus d'évaluation pour le poste AS-05 en tant que tel ni les qualifications des personnes nommées. Ses préoccupations se limitaient au fait que l'intimé n'avait pas pris de mesures d'adaptation à son endroit en le nommant au poste AS-05.

270 Le Tribunal a conclu ce qui suit au paragraphe 14 :

 Le Tribunal juge que le plaignant ne possédait pas les qualifications essentielles établies pour ce poste. Ce dernier n'a d'ailleurs pas contesté l'examen visant à évaluer les connaissances ni les résultats qu'il a obtenus et il ne met pas en doute le processus d'évaluation au terme duquel il a été jugé non qualifié.

271 Il s'agit d'une situation très différente de ce qui s'est produit dans la jurisprudence citée par l'avocat de l'agent négociateur, où l'évaluation elle-même, dans le cadre du processus de dotation, a été contestée. Rien n'empêchait M. Magee de soulever ce type d'argument devant le TDFP.

272 La doctrine de la préclusion fait en sorte que la conclusion du TDFP revêt un caractère obligatoire dans la présente affaire, puisque les parties sont les mêmes et que la question abordée est la même, c'est-à-dire celle de savoir si M. Magee était qualifié pour le poste AS-05.

273 En outre, il a été souligné qu'après l'achèvement du processus de nomination, il y avait une obligation continue d'évaluer les qualifications de M. Magee pour le poste AS-05. On a laissé entendre que parce que M. Magee a continué d'exercer le rôle d'un AS-05 après septembre 2009, en exerçant certaines des fonctions de l'emploi, l'employeur doit avoir eu l'impression qu'il était qualifié pour le poste. Cet argument pose deux problèmes. L'agent négociateur demande à la présente Commission de trancher qu'il était qualifié pour le poste. Il y a une question réelle en ce qui concerne la compétence de la présente Commission dans l'exercice de son mandat en vertu de la LRTFP de trancher cette question. En outre, l'argument ignore la preuve de M. Urmston selon laquelle, à son avis, M. Magee n'était pas qualifié pour le poste. Il lui a permis de continuer à occuper le poste, car, s'il ne lui attribuait pas certaines tâches, il aurait été obligé de l'envoyer à la maison. M. Urmston était moins préoccupé par les [traduction] « subtilités » de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique et préférait continuer à faire appel à lui.

274 En ce qui a trait à l'argument voulant que l'employeur n'ait pas respecté son obligation de prendre des mesures d'adaptation à l'égard de M. Magee en raison du retard dans son évaluation ergonomique, la présente Commission n'a pas compétence pour trancher cette affaire. Toutes les questions concernant l'évaluation ergonomique, y compris tout ce qui découle d'un point de vue des ressources humaines, sont des questions qui relèvent de la Loi sur l'indemnisation des agents de l'État (L.R.C., 1985, ch. G-5) (« LIAE »)

275 En supposant, sans le reconnaître, que la Commission ait compétence pour trancher cette question, l'employeur ne conteste pas que le retard dans l'exécution de l'évaluation ergonomique n'aurait pas dû se produire. Toutefois, cela ne signifie pas que le retard a causé la blessure ou retardé le retour au travail du fonctionnaire. Quarante-quatre jours se sont écoulés entre la première fois que la question a été soulevée et le moment où l'équipement a été en place, à l'exception de la chaise. Dans Ontario Public Service Employees Union (Alviani) v. Ontario (Revenue), 2011 CanLII 10252, une décision de la Commission de règlement des griefs de l'Ontario, aux paragraphes 44 et 49, on n'a pas donné suite à une demande d'évaluation ergonomique et celle-ci a été ignorée pendant un mois. La Commission dans cette affaire n'a pas conclu à une contravention de l'obligation de prendre des mesures d'adaptation, car un employeur n'est pas tenu d'être [traduction] « parfait » dans ses démarches relatives aux mesures d'adaptation.

276 Le Dr Parker a affirmé que l'évaluation aurait pu aider M. Magee, ou pas. On ne peut pas conclure qu'une blessure en a découlé et les faits ont bien démontré qu'il avait subi deux chirurgies antérieurement. Le Dr Parker a suggéré, en juin 2009, qu'une évaluation ergonomique soit faite; cependant, ni le Dr Parker ni M. Magee n'ont communiqué cette information à l'employeur. Lorsque M. Magee est effectivement retourné au travail, l'équipement était en place.

277 En ce qui a trait aux commentaires inappropriés de M. Suchorab, ils n'ont pas été visés par le grief, qui a été présenté en octobre 2009. Les premiers commentaires ont prétendument été formulés en 2008 et sont hors délai. Les autres commentaires ont supposément été formulés en 2009, et M. Magee ne pouvait pas dire au cours de quel mois. Il n'est pas approprié de les examiner compte tenu du délai du grief. Il ne s'est pas acquitté du fardeau de la preuve. M. Magee a affirmé que les commentaires avaient été formulés; M. Suchorab l'a nié. M. Suchorab a indiqué qu'il ne parlerait pas de cette façon à un membre du personnel, que cela ne reflétait pas son caractère et qu'il aurait appuyé un employé tentant d'effectuer un retour au travail. Aucun motif n'a été présenté quant à la raison pour laquelle il aurait fait de tels commentaires.

278 M. Magee n'a pas signalé les commentaires à son superviseur ou au syndicat. Il n'a pas présenté un grief ou une plainte en vertu de la politique sur le harcèlement. Il a continué d'entreprendre des discussions avec M. Suchorab. Selon la prépondérance des probabilités, il est probable que la version de M. Suchorab soit exacte.

279 En ce qui a trait à l'allégation voulant que Mme Burnouf ait fait des commentaires inappropriés, cette dernière se souvient très bien des événements. Elle était alors préoccupée par la tendance de M. Magee en ce qui concerne l'utilisation des congés de maladie. Elle occupait le poste de gestionnaire par intérim. Ses commentaires à propos du fait qu'il était ASP ou, en ses mots, qu'il [traduction] « manquait à l'appel » étaient au plus indélicats, mais ne constituaient pas du harcèlement au motif d'une invalidité. Son utilisation du terme [traduction] « congé de maladie » par opposition à [traduction] « congé pour accident de travail » correspond simplement à l'usage d'un terme dans la langue courante. Son utilisation n'équivaut pas à un acte discriminatoire ou à du harcèlement.

280 La prétention selon laquelle elle a dit à M. Magee qu'il n'était pas apte à l'emploi et qu'il devrait être en congé lié au stress est contredite par le fait qu'elle croyait qu'il avait un bon rendement au travail et, à ce titre, il est peu probable qu'elle lui ait dit qu'il devrait aller ailleurs. Elle a manifestement été troublée par les allégations de M. Magee, car elle a fait des efforts considérables au fil des ans en vue de bâtir une relation personnelle avec lui.

281 En ce qui a trait à la mesure de réparation, aucune ordonnance de rémunération ne devrait remontrer à plus de 25 jours avant la date du grief. Voir Canada (Office national du film) c. Coallier (C.A.F.), [1983] A.C.F. no 813 (C.A.) (QL). Toute mesure de réparation devrait tenir compte des périodes où M. Magee était absent du travail et en congé pour accident du travail. La Commission ne peut pas ordonner la nomination de M. Magee au poste AS-05. La Commission ne peut pas non plus nommer M. Magee au poste d'agent correctionnel.

C. Réfutation de l'agent négociateur

282 Dans la décision de la Cour suprême du Canada dans McGill, précitée, la juge Abella, dans sa dissidence aux paragraphes 48 et 49, a déclaré qu'il existe une différence entre discrimination et distinction, et que toutes les distinctions ne sont pas discriminatoires. Elle ne procède pas à une analyse comme l'a fait la majorité à propos de la durée de la période pendant laquelle une personne doit être en congé non payé avant d'atteindre le stade de la contrainte excessive.

283 Dans Tranchemontagne, précité, le contexte est celui d'une mesure d'adaptation précise en milieu de travail. L'affaire porte sur la question de savoir si le refus des prestations d'invalidité à un alcoolique est discriminatoire. Les affaires relatives à une mesure d'adaptation découlant du milieu de travail sont de meilleurs guides.

284 Ce qui est clair, c'est qu'en raison de son invalidité, M. Magee a subi une perte financière importante.

285 Même si les fonctions principales des postes CX comprennent un contact avec les détenus, les fonctions du CX-01 consistent à maintenir la sécurité et la sûreté de l'établissement. Vous pourriez toujours fournir ce service à la barrière principale et au PPCC, que vous ayez des rapports avec des détenus ou non.

286 En ce qui a trait à la rotation, une mesure d'adaptation à la barrière principale ou au PPCC n'empêche pas la souplesse; elle ne fait qu'y nuire. C'est là que l'analyse de ce en quoi consiste une contrainte excessive entre en jeu.

287 Il faut être prudent au moment d'appliquer les principes découlant des affaires portant sur les milieux carcéraux. Le contexte est différent, de même que la preuve. Sioui, précité, traite de la région du Québec. Aux paragraphes 86 et 87, l'arbitre de grief a souligné qu'il y avait en fait des postes non armés au SCC qui n'exigeait aucun contact avec les détenus, mais ces postes n'étaient pas à Donnacona; ils étaient à Laval ou dans la région de Montréal. L'employeur était prêt à appuyer la réintégration du fonctionnaire dans ces postes, mais celui-ci n'a pas collaboré au processus.

288 L'allégation voulant que M. Magee ait formulé des commentaires à propos d'éviter le contact avec les détenus doit être examinée dans son contexte, alors que M. Suchorab le poussait à effectuer un retour au travail sans restriction. Les postes au PPCC et à la barrière principale ne lui ont jamais été offerts. Il est injuste pour le fonctionnaire de laisser entendre qu'il aurait évité ces postes.

289 Il faut examiner une promotion dans le contexte d'une mesure d'adaptation. Dans la présente affaire, le poste AS-05 ne présentait aucun avantage pécuniaire comparativement à ce qu'il gagnait en tant que CX-02. Le fait que le poste AS-05 soit considéré comme une promotion est tout simplement arbitraire, car le Conseil du Trésor l'a défini en termes de calcul mathématique. En supposant qu'aucun poste WP-03 n'était disponible, le seul poste disponible était celui qui était réputé être une promotion; ensuite, M. Magee se retrouvait sans emploi.

290 Même si personne d'autre n'avait posé sa candidature au poste AS-05, le fonctionnaire n'aurait pas été nommé. Cela contredit la preuve de Mme Miller devant le TDFP voulant que, si M. Magee avait satisfait aux qualifications essentielles au moment de son évaluation pour le poste AS-05, il aurait été nommé au poste de façon prioritaire. En l'espèce, l'application de ces directives du Conseil du Trésor à propos de ce qui constitue une promotion n'est pas conforme aux obligations de l'employeur en matière de droit de la personne.

291 Pour ce qui est de l'évaluation ergonomique, le Dr Parker a fait part de ses préoccupations à la CAT tout au long de la période.

292 Si la preuve de M. Suchorab selon laquelle il n'aurait jamais dit les mots que M. Magee lui a imputés car cela ne faisait pas partie de son caractère était un argument viable, on pourrait l'utiliser afin de contredire toute plainte de harcèlement. Le fait que M. Magee n'ait pas présenté un grief ou une plainte de harcèlement n'est pas surprenant, compte tenu du rôle de M. Suchorab visant à aider les employés à retourner au travail et à trouver un poste.

293 En ce qui concerne la réparation, M. Magee a, à tout le moins, droit à la différence de salaire entre les postes WP-03 et AS-05.

IV. Motifs

294 L'agent négociateur soutient que la question principale en l'espèce consiste à déterminer si l'employeur aurait pu prendre ou non une mesure d'adaptation à l'égard du fonctionnaire sans subir une contrainte excessive, tout en minimisant les répercussions sur son revenu d'emploi. Cela aurait pu être accompli en nommant M. Magee au poste AS-05 pour une durée indéterminée. L'employeur aurait également pu prendre une mesure d'adaptation à l'égard de M. Magee en tant que CX au Centre psychiatrique régional, limitant ses fonctions au Poste principal de contrôle et des communications et à la barrière principale, car ces postes ne comprennent aucun contact avec les détenus.

295 Les autres questions soulevées par l'agent négociateur sont plutôt périphériques et comprennent le défaut d'effectuer une évaluation ergonomique en temps opportun, les commentaires dégradants présumés de la part de M. Suchorab et les commentaires inappropriés présumés de la part de Mme Burnouf.

296 La question principale consiste à déterminer si l'employeur a commis un acte discriminatoire à l'égard de M. Magee au motif d'une invalidité et, le cas échéant, si le fait de prendre une mesure d'adaptation à l'égard de son invalidité en le nommant au poste AS-05 ou en tant que CX au Centre psychiatrique régional, dans un emploi hybride à la barrière principale, en alternance au centre de contrôle de l'établissement, imposerait une contrainte excessive à l'employeur.

297 M. Magee allègue expressément qu'en raison de son invalidité, l'employeur a commis un acte discriminatoire à son égard et, ce faisant, a contrevenu à l'article 19 de sa convention collective et à la Loi canadienne sur les droits de la personne.

298 L'article 19.01 de la convention collective du groupe Services des programmes et de l'administration venant à échéance le 10 juin 2010 est rédigé en ces termes :

Il n'y aura aucune discrimination, ingérence, restriction, coercition, harcèlement, intimidation, ni aucune mesure disciplinaire exercée ou appliquée à l'égard d'un employé-e du fait de son âge, sa race, ses croyances, sa couleur, son origine nationale ou ethnique, sa confession religieuse, son sexe, son orientation sexuelle, sa situation familiale, son incapacité mentale ou physique, son adhésion à l'Alliance ou son activité dans celle-ci, son état matrimonial ou une condamnation pour laquelle l'employé-e a été gracié.

299 De plus, l'alinéa 226(2)a) de la LRTFP prévoit qu'un arbitre de grief ou la Commission peut, relativement à toute affaire renvoyée à l'arbitrage, interpréter et appliquer la Loi canadienne sur les droits de la personne.

300 Pour démontrer une discrimination prima facie, M. Magee doit démontrer qu'il avait une caractéristique protégée contre la discrimination en vertu de la convention collective ou de la Loi canadienne sur les droits de la personne; qu'il a éprouvé une incidence négative à l'égard de son emploi; et que la caractéristique protégée était un facteur de cette incidence négative (voir Moore c. Colombie-Britannique (Éducation), 2012 CSC 61 au paragr. 33. L'un des motifs de distinction illicite énumérés dans la convention collective est une incapacité physique. L'article 3 de la Loi canadienne sur les droits de la personne stipule que la déficience est un motif de distinction illicite. L'article 25 de la Loi définit le terme « déficience » comme une « [d]éficience physique ou mentale, qu'elle soit présente ou passée […] ». La preuve selon laquelle M. Magee souffrait d'une déficience physique est claire. Il ne fait aucun doute que son invalidité a été un facteur dans le fait qu'il a éprouvé une incidence négative relativement à son emploi, car il n'était plus en mesure d'exercer ses fonctions régulières en tant qu'agent correctionnel.

301 Dans le cas d'une conclusion relative à l'existence d'une preuve prima facie de discrimination, il incombe à l'employeur de justifier la conduite à l'intérieur du cadre des exemptions disponibles en vertu du droit en matière de droits de la personne.

302 L'article 15 de la Loi canadienne sur les droits de la personne stipule qu'une restriction qui découle d'une exigence professionnelle justifiée ne constitue pas un acte discriminatoire. La question de savoir si cette argumentation est disponible est tranchée en déterminant si les besoins relatifs à des mesures d'adaptation de la personne imposeraient une contrainte excessive à l'employeur.

303 Il est manifeste que M. Magee ne peut pas exercer les fonctions du poste CX-02 telles qu'elles existent compte tenu de son invalidité, car il ne pourrait pas effectuer un retour à un poste qui le placerait dans une situation où il aurait à immobiliser un détenu ou à se défendre en raison de son amplitude de mouvement réduite et de la force diminuées de son épaule droite (dominante), comme l'a déterminé la Commission des accidents du travail de la Saskatchewan en février 2009, et tel qu'il a été démontré dans les rapports médicaux du Dr Parker datés du 22 septembre 2009.

304 Étant donné qu'il n'est pas possible pour M. Magee d'exercer les fonctions régulières de son emploi CX-02, peuvent-elles être modifiées de façon à accommoder ce dernier sans causer une contrainte excessive pour l'employeur?

Poste hybride à la barrière principale et au PPCC

305  L'agent négociateur soutient que le poste CX peut être modifié et que les fonctions à la barrière principale et au PPCC devraient être regroupées afin de créer un poste hybride car ces postes n'exigent aucun contact avec les détenus.

306 Dans Hydro-Québec, précitée, la Cour suprême du Canada a confirmé que l'obligation de prendre des mesures d'adaptation ne dénature pas complètement pas l'essence du contrat de travail, soit l'obligation de l'employé d'offrir une prestation de travail contre une rémunération. Le critère n'est pas la question de savoir s'il était impossible pour un employeur d'accommoder les caractéristiques d'un employé. L'employeur n'a pas l'obligation de modifier de façon fondamentale les conditions de travail, il a cependant l'obligation, sans subir de contrainte excessive, d'aménager le poste de travail ou les tâches de l'employé pour permettre à ce dernier d'accomplir ses fonctions.

307 Le Tribunal des droits de la personne de l'Ontario, dans Yeates, précitée, définit une mesure d'adaptation dans le milieu de travail comme étant le fait d'adapter le travail en fonction des besoins de l'employé, de sorte qu'il puisse exercer les fonctions essentielles du poste.

308 L'arbitre de grief Alan Beattie dans Everaz, précitée, a examiné la jurisprudence et a conclu qu'un employeur n'a pas à créer un nouvel emploi, un emploi qui n'est pas productif, un emploi dont les fonctions essentielles ont été éliminées ou un emploi qui modifie les conditions de travail d'une façon fondamentale.

309 Dans le même sens, le Tribunal des droits de la personne de l'Ontario, dans Pourasadi, précitée, a conclu que l'obligation de prendre des mesures d'adaptation peut exiger de l'employeur qu'il organise le milieu de travail d'un employé de façon à permettre à ce dernier d'exercer les fonctions essentielles de son travail. Cela n'exige pas une modification permanente aux fonctions essentielles du poste ou l'attribution permanente des fonctions essentielles du poste à d'autres employés, et cela n'exige pas d'exempter des employés d'exercer les fonctions essentielles de leur poste.

310 J'accepte la preuve de M. Urmston voulant que la nature essentielle des postes CX exige un contact avec les détenus. Les descriptions de travail syndicales-patronales mixtes en tiennent comptent. La principale différence entre les CX-01 et CX-02 est que les CX-01 n'effectuent pas de gestion de cas, alors que les CX-02 peuvent se voir assigner jusqu'à six délinquants et que l'agent doit travailler dans l'unité tout en entretenant un contact régulier et des communications régulières avec les détenus et qu'il doit documenter le comportement des détenus et préparer des rapports sur la gestion des cas. Les personnes employées dans ces deux postes sont tenues d'observer, de contrôler et d'orienter les activités quotidiennes des détenus, à l'intérieur et à l'extérieur de l'établissement. Les deux postes exigent l'exécution de vérifications de sécurité et la fouille des unités résidentielles, des installations physiques, des bâtiments, des véhicules, des détenus et de leurs effets personnels. Pour les deux postes, les employés sont tenus de motiver et d'encourager les détenus à perfectionner leurs compétences nécessaires à la vie active et à participer à des programmes de réinsertion. Ils doivent surveiller les déplacements et les activités des visiteurs et des entrepreneurs civils, ainsi que les activités et les événements sociaux au sein de l'établissement et sur la réserve pénitentiaire.

311  Les seules activités qui pourraient être effectuées sans contact avec les détenus seraient de contribuer à l'élaboration et à la mise en œuvre des programmes de l'unité, fournir du mentorat en cours d'emploi aux agents correctionnels au niveau d'entrée et aux étudiants en stage et consigner les objets interdits.

312  La preuve a clairement démontré que M. Magee ne peut pas exercer les fonctions essentielles énumérées dans les deux descriptions de travail, lesquelles, selon la preuve, constituent les fonctions essentielles du poste, car elles exigent un contact avec les détenus. J'accepte la preuve de M. Urmston que le poste hybride proposé par l'agent négociateur serait un poste dépouillé de ses fonctions essentielles et qu'il ne serait ni utile ni productif.

313 D'après les faits, j'en conclus qu'il faudrait éliminer les fonctions essentielles de ces postes. La jurisprudence ne va pas jusqu'à exiger d'un employeur, dans le cadre de l'obligation de prendre des mesures d'adaptation, qu'il modifie les fonctions essentielles ou principales d'un poste ou qu'il les attribue de façon permanente à d'autres employés, ce qui serait le cas si M. Magee était affecté pour une durée indéterminée à un poste regroupé impliquant ces deux postes.

314 J'accepte également la preuve de M. Urmston selon laquelle un employé qui est un remplaçant permanent dans un poste CX et qui a une restriction physique qui l'empêche d'avoir un contact avec les détenus réduit la souplesse de l'établissement en vue de répondre aux crises, ce qui constitue une préoccupation importante en matière de sécurité et de sûreté.

315 Le poste dans le PPCC comporte une responsabilité importante et la personne affectée à ce poste est assujettie à un grand nombre de stresseurs, avec plus de 30 écrans à regarder, des alarmes qui sonnent, ainsi que l'ouverture et la fermeture des barrières. C'est la raison pour laquelle la durée de ces quarts est limitée à quatre heures et que les employés y sont affectés en rotation. S'il s'agissait d'un placement permanent, il existe un risque important que M. Magee ou, toute autre personne qui y est assignée de façon permanente, puisse omettre de réagir à des problèmes qui pourraient très bien être une question de vie ou de mort. Ce risque est exacerbé par les difficultés de M. Magee liées à sa gestion du stress dans le milieu de travail et dans sa vie personnelle, tel qu'il a été mentionné par le Dr Parker.

316 De plus, le poste CX-02 à la barrière principale est un poste de répondant et, si M. Magee devait occuper ce poste en permanence, l'établissement perdrait cette souplesse. En outre, une telle mesure d'adaptation porterait manifestement atteinte aux droits des autres employés en entravant leur capacité d'effectuer une rotation temporaire à un poste où ils n'ont pas de contact avec les détenus. Je suis d'avis qu'une telle affectation porterait atteinte de façon importante à l'obligation du service correctionnel de prendre des mesures d'adaptation à l'égard des autres employés. Je fais référence ici à la preuve de M. Urmston selon laquelle le poste CX-02 à la barrière principale est un poste utilisé afin de prendre une mesure d'adaptation à l'égard des agentes correctionnelles enceintes ou des agents correctionnels qui ont des membres fracturés. Si M. Magee était affecté à ce poste pour une durée indéterminée, cette mesure d'adaptation ne serait plus disponible.

317 Le fait que M. Magee n'ait jamais proposé de faire l'objet d'une mesure d'adaptation à la barrière principale ou au PPCC n'est pas sans importance.

318 Je trouve instructifs les commentaires de l'arbitre de différends Hall dans Pearson, précitée, et de la vice-présidente Pineau dans Sioui, précitée, qui traitaient toutes deux d'agents correctionnels qui avaient subi des invalidités permanentes et qui ne pouvaient plus avoir de contact avec les détenus.

319 Les commentaires suivants de l'arbitre de différends Hall semblent particulièrement aptes, aux pages 71-72 (version PDF) :

[Traduction]

 […] [I]l est important de reconnaître certaines des raisons pour lesquelles le contact avec les détenus est une fonction fondamentale d'un agent correctionnel.[…] Entre autres facteurs, il s'agit d'un aspect inhérent du modèle de supervision directe, et permet aux membres du personnel de « rester à l'écoute » des problèmes éventuels. Un agent correctionnel faisant l'objet d'une mesure d'adaptation qui ne participe pas à la rotation [Runner/Control Prowl] de deux heures n'a aucun contact avec des détenus, quels qu'ils soient. Comme en a témoigné un témoin : « si vous éliminez le contact, vous n'êtes pas un agent correctionnel [et] si vous êtes au centre de contrôle, vous devenez un opérateur d'ordinateur […] travaillant dans une prison, c'est aussi clair que cela pour moi ». Cette évaluation est appuyée par la description générique du poste d'agent correctionnel, où seule une très petite minorité des fonctions énumérées n'exigent pas un contact avec les détenus – il s'agit de l'essence même de l'emploi dans le cadre des activités normales.

Qui plus est, un agent correctionnel ayant une restriction selon laquelle il ne peut avoir aucun contact avec les détenus ne peut évidemment pas participer à la rotation dans les postes dans d'autres secteurs de l'établissement. Le système de rotation n'est pas exclusivement à l'avantage des employés (c.-à-d. prendre « une pause » de certains postes stressants); il est également essentiel à l'intérêt de l'employeur d'assurer que son complément de personnel est souple, qu'il soit suffisamment familier et qu'il bénéficie d'une expérience au sein de l'ensemble de la prison. Comme le fait valoir l'employeur, la rotation est avantageuse pour l'employé individuel et pour l'établissement dans son ensemble.

[…]

[…] Pour les motifs présentés ci-dessus – y compris, plus particulièrement, les fins légitimes présentées par les agents correctionnels qui ont des contacts avec les détenus, l'interférence avec les droits d'autres employés et l'importance des risques pour la sécurité du préposé – j'arrive à la conclusion que le fait de prendre des mesures d'adaptation d'une durée indéterminée à l'égard de M. Pearson dans le poste de contrôle constituerait une contrainte excessive pour l'employeur.

320 La vice-présidente Pineau, dans Sioui, précitée, a conclu qu'il était impossible pour un agent correctionnel de travailler dans le milieu carcéral sans avoir de contact avec les détenus, compte tenu de ses fonctions de surveillance des détenus, dans ce cas, sans porter une arme à feu. Elle a de plus ajouté que ces exigences professionnelles ne pouvaient être modifiées sans compromettre la santé et la sécurité d'autres employés.

321 D'après les faits, j'en conclus que le fait de modifier l'emploi CX de M. Magee en créant un poste hybride à la barrière principale et au poste principal de contrôle constituerait une contrainte excessive pour l'employeur.

322 Si un employeur n'est pas en mesure de modifier l'emploi actuel de l'employé sans subir une contrainte excessive, il doit alors déterminer si un autre emploi dans le milieu de travail est convenable.

323  On n'a pas fait valoir que le poste d'agent, Services aux victimes, au groupe et niveau WP-03 était une mesure d'adaptation déraisonnable. La preuve de Mme Burnouf appuie la conclusion qu'il utilise les antécédents de M. Magee dans le domaine du counseling et de l'aide aux personnes et que son rendement dans ce poste avait été positif. Cette conclusion est également appuyée par la preuve de M. Urmston  selon laquelle l'échelle salariale WP-03 ne présentait pas un écart important par rapport à l'échelle salariale du poste CX-02, et qu'il y avait désormais un parcours de carrière que M. Magee pouvait suivre, ce qui n'aurait pas été le cas si M. Magee avait été nommé à un poste CX hybride en raison de son invalidité. D'après les faits, j'en conclus que le poste WP-03 était une mesure d'adaptation raisonnable.

A. Le poste AS-05

L'agent négociateur soutient que l'employeur n'a pas examiné adéquatement si M. Magee pouvait faire l'objet d'une mesure d'adaptation au poste AS-O5 pendant une durée indéterminée.

324 Le Tribunal des droits de la personne de l'Ontario, dans Ellis, précitée, est arrivé à la conclusion que l'obligation de prendre des mesures d'adaptation ne va pas jusqu'à exiger d'un employeur qu'il accorde une promotion à une personne à un poste de niveau supérieur, que cette décision soit fondée sur l'ancienneté ou le mérite. La Cour du Banc de la Reine de l'Alberta, dans Baum, précitée, a constaté que si un employé devait faire l'objet d'une mesure d'adaptation dans un poste constituant une promotion, cela pouvait éventuellement porter atteinte à d'autres candidats pour le poste. Il me semble qu'il s'agit d'une limite raisonnable et justifiable à l'égard de l'obligation de prendre des mesures d'adaptation de l'employeur et j'adopte la justification dans ces décisions.

325 L'agent négociateur fait valoir que le fait de nommer M. Magee à un poste AS-05 ne constitue pas une promotion au motif que l'employeur devrait tenter de minimiser la perte de salaire en se fondant sur la rémunération totale qu'il pourrait recevoir en tant que CX-02, y compris les primes et les heures supplémentaires. M. Magee a laissé entendre dans sa preuve que son revenu en tant que CX-02 lorsqu'il travaillait dans ce poste dépassait de beaucoup 100 000 $ pendant un certain nombre d'années. Il y avait en fait une année, soit 2006, où son revenu s'est élevé à 91 632,86 $; cependant, au cours des autres années pour lesquelles il a fourni ses déclarations T4, la preuve n'appuyait pas la conclusion voulant qu'il ait accompli des heures supplémentaires en nombre important ou qu'il ait gagné d'autres primes. Son revenu d'emploi pour 2009 était de 71 489,49 $; pour 2008, 65 124,50 $, pour 2007, 78 721,51 $. En somme, la preuve n'a pas démontré que M. Magee était certain d'accomplir un nombre important d'heures supplémentaires ou de gagner d'autres primes au cours de n'importe quelle année donnée.

326 En date de 2010, la preuve indique que le salaire maximum pour le poste WP-03 était de 67 179 $, pour le poste CX-02, de 71 183 $ et pour le poste AS-05, de 78 400 $.

327 Il n'est pas contesté que, selon le Règlement définissant le terme « promotion », le poste WP-03 est celui qui a le taux de rémunération le plus élevé sans constituer une promotion. Il est supérieur à celui du poste CX-01, mais inférieur à celui du poste CX-02 d'environ 4 000 $. Le taux de rémunération du poste AS-05 était supérieur d'environ 8 000 $ à celui du poste CX-02; et, conformément au règlement, ce poste constituerait une promotion.

328 L'agent négociateur soutient qu'il faut examiner une promotion dans le contexte d'une mesure d'adaptation. Dans la présente affaire, il ne recevait aucun avantage pécuniaire dans le poste AS-05 par rapport à ce qu'il gagnait en tant que CX-02 si vous tenez compte de sa rémunération brute, y compris les heures supplémentaires et les primes. Le fait que l'on considère le poste AS-05 comme une promotion est simplement arbitraire, car le Conseil du Trésor l'a défini en termes de calcul mathématique.

329 L'agent négociateur n'a pas été en mesure de présenter une jurisprudence faisant autorité relativement à son argument selon lequel le fait de nommer M. Magee à un poste AS-05 ne constituait pas une promotion si l'on tenait compte de sa rémunération brute. Les arbitres de différends s'appuient fréquemment sur les taux de rémunération relatifs de deux postes à titre de critère décisif pour déterminer si une nomination à un nouveau poste peut être qualifiée de promotion. Voir Brown et Beatty, dans Canadian Labour Arbitration, 4e édition, au paragraphe 6:2100. En outre, le revenu au-delà du taux de rémunération régulier qui est fondé sur la possibilité d'effectuer des heures supplémentaires ainsi que sur les primes différentielles de fin de semaine et de poste n'est pas garanti. Dans tous les cas, d'après les faits, il n'a pas été établi que M. Magee gagnait, de façon constante, un revenu brut équivalent au salaire du poste AS-05. Un employeur n'est pas tenu de maintenir le niveau de rémunération antérieur à la blessure d'un employé qui peut uniquement faire l'objet d'une mesure d'adaptation dans un emploi moins rémunéré.

330 J'arrive à la conclusion que le fait de nommer M. Magee au poste AS-05 selon les faits de la présente affaire aurait constitué une promotion. L'obligation de prendre des mesures d'adaptation n'exige pas d'un employeur qu'il accorde une promotion à une personne à un poste de niveau supérieur. Malgré cette conclusion, je tiendrai compte des autres arguments présentés par l'agent négociateur à l'égard du poste AS-05.

331 L'agent négociateur a soutenu que l'examen écrit dans le processus de nomination AS-05 pourrait ne pas avoir évalué de manière appropriée les qualifications du fonctionnaire. Il a ajouté que l'agent de dotation aurait dû tenir compte de son expérience dans le poste et de son évaluation positive dans la détermination quant à savoir s'il était qualifié, en se fondant sur la jurisprudence citée.

332 La difficulté liée à cet argument est que, contrairement aux situations de faits mentionnées dans Bates et Tremblay, M. Magee n'a pas soulevé cette question pendant le processus de nomination ou devant le TDFP lorsque ce dernier a tranché sa plainte en matière de dotation. Aucun argument n'a été présenté voulant que le comité d'évaluation aurait dû se fier à son expérience pour déterminer s'il s'était qualifié dans ce processus. À mon avis, cet argument aurait dû être présenté dans le cadre des discussions informelles après qu'il a été évalué et qu'on l'a informé qu'il n'était pas qualifié, moment auquel le comité d'évaluation aurait eu la possibilité de se pencher sur cet argument. De même, cet argument aurait pu être présenté devant le TDFP, qui avait clairement compétence pour trancher cette question, par opposition à un argument final pendant l'audience de son grief qui a eu lieu quelque cinq ans après les événements.

B. Évaluation ergonomique

333 Le paragraphe 208(2) de la LRTFP stipule qu'un fonctionnaire ne peut présenter de grief individuel si un recours administratif de réparation lui est ouvert sous le régime d'une autre loi fédérale, à l'exception de la Loi canadienne sur les droits de la personne. En conséquence, l'employeur fait valoir que la présente Commission n'a pas compétence pour examiner toute question concernant l'évaluation ergonomique, y compris tout ce qui découle de la perspective des droits de la personne, étant donné que ces questions relèvent de la LIAE. Il existe une autre procédure administrative aux fins de recours pour traiter la question d'une indemnité pour un accident du travail en vertu de la LIAE, et un arbitre de grief n'a pas compétence sur une telle demande.

334 Cependant, la LIAE ne traite pas des questions de savoir si un employeur avait pris une mesure d'adaptation adéquate à l'égard d'un employé handicapé, y compris si un employeur aurait dû fournir une évaluation ergonomique dans une situation où l'employé allègue avoir fait l'objet d'un traitement discriminatoire.

335 Par conséquent, en supposant que j'ai compétence pour examiner cette question, j'arrive à la conclusion que, bien qu'il y ait eu un certain délai en vue de prendre des mesures pour mener l'évaluation ergonomique, ce délai était essentiellement imputable au fait que Santé Canada ne paie plus pour cette évaluation. Il était nécessaire que Mme Miller s'adresse à la CAT et cherche à obtenir son appui en vue de payer pour l'évaluation. Une fois que l'évaluation a été achevée, le nouvel équipement, à l'exception de la nouvelle chaise achetée à partir du budget de l'unité et qui n'était pas requise dans le cadre de l'évaluation, a été mis en place presque immédiatement. La preuve est équivoque quant à savoir si le délai a contribué à l'invalidité continue de M. Magee. D'après les faits, je ne suis pas convaincu que la mesure d'adaptation à l'égard du fonctionnaire a été retardée ou empêchée.

C. Commentaires inappropriés allégués de M. Suchorab

336 Les premiers commentaires ont prétendument été formulés à un moment quelconque en 2008 et n'ont pas été repris dans le grief présenté en octobre 2009. M. Magee aurait dû présenter un grief à cet égard à ce moment. En conséquence, je n'ai pas compétence pour me pencher sur cette allégation dans le cadre du grief.

337 Les deuxièmes commentaires imputables à M. Suchorab étaient liés au poste AS-05 et laissaient entendre que M. Magee ne méritait pas une promotion. Ces commentaires ont prétendument été accompagnés d'une remarque méprisante. Cet incident n'est pas mentionné dans le grief. De toute façon, en supposant que j'ai compétence pour trancher cette question, M. Suchorab ne se souvenait d'aucune conversation de cette nature et il a affirmé que celles-ci allaient à l'encontre de son caractère. La fiabilité du témoignage de ces témoins est en cause. Au moment de procéder à des évaluations de la fiabilité, l'observation du juge O'Halloran dans Rex v. Pressley, [1948] B.C.J. No. 63 (QL) (B.C.C.A.), au paragraphe 12, s'avère utile :

[Traduction]

Le juge ne saurait deviner ce qui est dans le cœur et l'esprit des témoins qui comparaissent devant lui. La justice ne donne pas automatiquement raison au meilleur acteur à la barre des témoins. Le critère judiciaire le plus satisfaisant consiste à déterminer si la vérité est en harmonie avec la prépondérance des probabilités, telle qu'elle est démontrée par les faits et les circonstances eu égard aux circonstances de l'affaire.

Il incombait à M. Magee de s'acquitter du fardeau d'établir, selon la prépondérance des probabilités, que, selon toute vraisemblance, M. Suchorab avait formulé les commentaires que M. Magee lui impute. M. Magee n'a présenté aucune plainte de harcèlement; il ne se souvient pas non plus s'être adressé au syndicat à propos de cet incident.

338 Étant donné qu'aucune plainte n'a été déposée dans les délais prescrits, que le syndicat n'a pas été informé et qu'il n'y a aucune certitude en ce qui a trait au moment où les commentaires ont prétendument été formulés, et compte tenu du fait qu'on a constaté que M. Magee avait embelli son témoignage lorsqu'il a déclaré que son revenu en tant que CX-02 avait dépassé 100 000 $ pendant un certain nombre d'années, alors que la preuve documentaire indiquait autrement, j'en conclus que M. Magee ne s'est pas acquitté de son fardeau d'établir, selon la prépondérance des probabilités, que M. Suchorab avait formulé les commentaires qui lui sont imputés.

D. Commentaires inappropriés allégués de Mme Burnouf

339 M. Magee s'est plaint du fait que Mme Burnouf avait utilisé le terme [traduction] « congé de maladie », alors que c'était un accident de travail qui était responsable de son absence du travail. Il s'est également plaint que Mme Burnouf l'avait accusé de ne pas se présenter au travail et d'être ASP, même s'il lui avait dit qu'il voyait son médecin et qu'il organisait sa physiothérapie. Il a également affirmé que Mme Burnouf l'avait informé qu'elle ne croyait pas que le poste d'agent, Services aux victimes, lui convenait, car cela le stressait. Une fois de plus, le grief ne comprend aucune mention de ces incidents.

340 Mme Burnouf a témoigné qu'en 2010, M. Magee était absent du milieu de travail et qu'elle n'avait reçu aucun billet de médecin pour justifier cette absence. C'est dans ce contexte qu'elle a utilisé le terme [traduction] « ASP » ou [traduction] « manquer à l'appel », comme elle l'a formulé. Elle a déclaré qu'en tant que gestionnaire, elle avait la responsabilité d'assurer l'assiduité des membres du personnel. Elle a reconnu avoir désigné son congé comme un congé de maladie et a indiqué qu'elle connaissait la distinction entre le congé pour accident de travail et le congé de maladie, mais qu'elle avait utilisé l'expression de façon générique. Elle a témoigné que M. Magee ne s'était jamais opposé au fait qu'elle utilise ce terme. Elle a nié lui avoir dit que l'emploi à l'unité des Services aux victimes n'était pas approprié pour lui; au contraire, elle a affirmé qu'à son avis, compte tenu de ses antécédents dans le domaine du counseling et de l'aide aux personnes, il avait eu un bon rendement dans ce poste.

341 Lorsqu'un employé est inscrit à l'horaire de travail et qu'il s'absente dans des circonstances où il est tenu de justifier son absence, par exemple au moyen d'un billet de médecin, le terme approprié est que l'employé est absent sans permission.

342  J'éprouve de la difficulté à comprendre en quoi l'utilisation de ce terme dans les circonstances est discriminatoire ou constitue un acte de harcèlement. La direction a la responsabilité de gérer l'effectif. Mme Burnouf reconnaît avoir utilisé le terme [traduction] « congé de maladie » dans un sens générique. J'accepte sa preuve selon laquelle M. Magee ne s'est jamais opposé au fait qu'elle utilise ce terme, car je n'ai aucun doute que si cette question avait été soulevée, comme elle en a témoigné, et qu'elle avait été consciente que cela le perturbait, elle aurait utilisé le terme approprié. De toute façon, à mon avis, l'utilisation de cette expression n'équivaut pas à un acte discriminatoire ou à du harcèlement.

343 J'accepte la preuve de Mme Burnouf voulant qu'elle n'ait pas dit à M. Magee que l'emploi d'agent, Services aux victimes, ne lui convenait pas. Ses efforts considérables au fil des ans en vue d'encourager M. Magee dans sans carrière, son évaluation selon laquelle il avait un bon rendement dans son poste, ses efforts en vue de bâtir une relation personnelle positive avec lui et sa détresse évidente à l'égard des affirmations de M. Magee me semblent sincères.

344 Pour ces motifs, je rends l'ordonnance qui suit :

(L'ordonnance apparaît à la page suivante)

V. Ordonnance

345 Le grief est rejeté.

Le 6 janvier 2016.

Traduction de la CRTEFP

David Olsen,
arbitre de grief

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