Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

L’administrateur général de l’employeur a rétrogradé la fonctionnaire s'estimant lésée en raison de son rendement insuffisant – la fonctionnaire s’estimant lésée a déposé un grief relativement à sa rétrogradation et l’a renvoyé à l’arbitrage – le grief n’a pas été déposé dans les délais prescrits – la lettre envoyée par la fonctionnaire s’estimant lésée à son employeur, ne constitue pas un grief, mais plutôt un simple avis signifiant qu’elle avait l’intention d’exercer ses droits pour s’opposer à la rétrogradation à un moment donné à l’avenir – la fonctionnaire s’estimant lésée a cependant présenté des raisons claires, logiques et convaincantes justifiant le retard – la Commission a accordé, par souci d’équité, sa demande de prorogation du délai pour présenter le grief – par ailleurs, l’argument de la fonctionnaire s’estimant lésée selon lequel la rétrogradation constitue une mesure disciplinaire modifie la nature du grief et, conformément au principe énoncé dans Burchill c. Procureur général du Canada, [1981] 1 C.F.109 (C.A.), cet argument est hors de la portée du grief – la Commission saisie d’un grief individuel portant sur le licenciement ou la rétrogradation pour rendement insuffisant doit examiner le caractère raisonnable de l’évaluation du rendement effectuée par l’employeur, et non le caractère raisonnable de la décision de licencier ou de rétrograder un fonctionnaire – si l’évaluation est jugée raisonnable, la Commission doit conclure que la rétrogradation était motivée, et elle ne peut alors intervenir dans la décision de rétrograder le fonctionnaire s’estimant lésée – les faits en l’espèce appuient la conclusion de l’administrateur général selon laquelle le rendement de la fonctionnaire s’estimant lésée était insuffisant. Le délai pour présenter le grief est prorogé.Le grief est rejeté sur le fond.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date: 2016-01-25
  • Dossier: 568-32-234 et 566-32-4724
  • Référence: 2016 CRTEFP 3

Devant la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique


ENTRE

LUCIE GAGNÉ

fonctionnaire s'estimant lésé

et

AGENCE CANADIENNE D’INSPECTION DES ALIMENTS

employeur

Répertorié
Gagné c. Agence canadienne d’inspection des aliments

Affaire concernant une demande visant la prorogation d’un délai visée à l’alinéa 61b) du Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique et affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Catherine Ebbs, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique
Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Sylvain Lallier, avocat
Pour l'employeur:
Pierre Marc Champagne, avocat
Affaire entendue à Montréal (Québec),
du 3 au 5 décembre 2014 et du 12 au 14 janvier 2015.

I. Introduction

1 Lucie Gagné, la fonctionnaire s’estimant lésée (la « fonctionnaire »), a commencé sa carrière à la fonction publique fédérale en 1992. Jusqu’en janvier 2010, elle était inspectrice des pratiques équitables d’étiquetage et de la salubrité des aliments (un poste classifié au groupe et niveau EG-04) à l’Agence canadienne d’inspection des aliments (l’« employeur »), un organisme distinct au sens de la Loi sur la gestion des finances publiques (L.R.C. (1985), ch.F-11) (la « LGFP »).

2 L’employeur soutient qu’en 2006, il a commencé à soulever ses préoccupations auprès de la fonctionnaire au sujet de son rendement. Il a essayé de l’aider à réaliser ses objectifs, mais son rendement est demeuré insuffisant. En janvier 2010, l’administrateur général de l’employeur (l’« administrateur général ») a rétrogradé la fonctionnaire en raison de son rendement insuffisant. Selon l’alinéa 12(2)d) de la LGFP, un administrateur général d’un organisme distinct peut « prévoir, pour des raisons autres qu’un manquement à la discipline ou qu’une inconduite, […] la rétrogradation à un poste dans une échelle de traitement comportant un plafond inférieur de toute personne employée » par cet organisme.

3 Le 16 mars 2010, la fonctionnaire a déposé une formule de grief auprès de l’employeur. Elle a soutenu que son rendement n’avait jamais été insuffisant. Étant donné que la décision visée par le grief concernait une rétrogradation pour rendement insuffisant au sens de l’alinéa 12(2)d) de la LGFP, le grief a été présenté directement au dernier palier de la procédure de règlement des griefs, conformément à la convention collective conclue entre l’employeur et l’Alliance de la Fonction publique du Canada. La convention collective est venue à échéance le 31 décembre 2011. Le 23 septembre 2010, l’employeur a rejeté le grief.

4 La Commission des relations de travail dans la fonction publique (l’« ancienne Commission ») a reçu le renvoi à l’arbitrage de la fonctionnaire le 2 novembre 2010.

5 Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (la « Commission »), qui remplace la Commission des relations de travail dans la fonction publique et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l’article 393 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013, une procédure entamée aux termes de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2) (la « LRTFP ») avant le 1er novembre 2014 doit se poursuivre conformément à la LRTFP, dans sa version modifiée par les articles 365 à 470 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013.

6 Une audience en lien avec cette affaire a été tenue du 3 au 5 décembre 2014 et du 12 au 14 janvier 2015.

7 En plus des éléments de preuve et des arguments sur le fond, les parties ont soulevé les questions préliminaires suivantes :

  • Elles sont en désaccord quant à la portée exacte du grief.
  • L’employeur a soutenu que la Commission n’avait pas compétence parce que le grief a été déposé en retard; la fonctionnaire a nié cette allégation.
  • Si la Commission conclut que le grief a été déposé en retard, la fonctionnaire demande une prorogation du délai pour déposer le grief.

8 Les parties ont d’abord présenté des éléments de preuve relatifs à deux questions préliminaires, soit le respect du délai pour déposer un grief et la demande de prorogation du délai présentée par la fonctionnaire. Elles ont ensuite présenté les éléments de preuve sur le fond et elles ont convenu que les éléments de preuve quant aux questions préliminaires seraient également examinés dans le cadre de l’analyse sur le fond. Les parties ont convenu que l’employeur présenterait sa preuve et ses arguments en premier, et ce, aux deux étapes.

9 L’employeur a cité les témoins suivants à témoigner :

  • André Lambert était le gestionnaire d’inspection, à Montréal-Est, en 2006 et 2007; pendant cette période, les superviseures de la fonctionnaire relevaient de lui. En mai 2007, M. Lambert a été promu au poste d’inspecteur en chef, à Montréal-Est et, en cette qualité, il a pris la décision de rétrograder la fonctionnaire.
  • En 2007, le Dr Sylvain St-Hilaire est devenu le gestionnaire d’inspection, à Montréal-Est. Les superviseures de la fonctionnaire relevaient de lui à compter de cette période. Le Dr St-Hilaire a recommandé à M. Lambert de rétrograder la fonctionnaire.

10 À l’origine, la fonctionnaire était représentée par l’agent négociateur. Toutefois, l’agent négociateur a retiré sa représentation et, lors de l’audience, la fonctionnaire était représentée par un avocat. La fonctionnaire a témoigné pour son propre compte et elle n’a cité aucun autre témoin à témoigner.

11 Pour les motifs indiqués plus loin dans la présente décision, voici mes conclusions:

  • Le grief renvoyé à l’arbitrage visait la rétrogradation de la fonctionnaire pour rendement insuffisant et, par conséquent, son argument selon lequel la rétrogradation constituait une mesure disciplinaire n’a pas été remis en cause devant la Commission.
  • La fonctionnaire a présenté son grief au dernier palier en dehors du délai prévu à la convention collective.
  • Aux fins d’un traitement équitable, la Commission proroge le délai pour présenter le grief.
  • Le grief est rejeté sur le fond.

II. Portée du grief

12 Au début de l’audience, la fonctionnaire a indiqué qu’elle présenterait deux arguments. Elle a d’abord soutenu que la rétrogradation pour rendement insuffisant n’était pas raisonnable et elle a ajouté que la rétrogradation constituait une mesure disciplinaire au sens de l’alinéa 209(1)b) de la LRTFP.

13 L’employeur s’est opposé à ce que la fonctionnaire fasse valoir devant la Commission que la rétrogradation constituait une mesure disciplinaire. Il a indiqué qu’elle tentait de présenter un argument qu’elle n’avait pas présenté pendant la procédure interne de règlement des griefs. Il a également mentionné le formulaire de renvoi à l’arbitrage de la fonctionnaire où elle a décrit la décision donnant lieu au grief comme se rapportant à l’alinéa 209(1)d) de la LRTFP, qui porte sur une rétrogradation ou un licenciement imposé « pour toute raison autre qu’un manquement à la discipline ou une inconduite ».

14 En guise de réponse, la fonctionnaire a soutenu que le formulaire de renvoi à l’arbitrage constituait une exigence procédurale qui n’imposait aucune limite quant au sujet de ses arguments pendant l’audience.

15 Lorsqu’un employé présente un grief en invoquant certains motifs, il ne peut renvoyer le grief à l’arbitrage en invoquant des motifs autres que ceux qui constituaient le fond du grief initial (Burchill c. Procureur général du Canada, [1981] 1 C.F. 109 (C.A.)).

16 Dans son grief, présenté le 16 mars 2010, la fonctionnaire n’a pas indiqué l’argument selon lequel la rétrogradation constitue une mesure disciplinaire. En outre, lorsqu’elle a renvoyé le grief à l’arbitrage, elle a précisé que le grief ne visait que l’alinéa 209(1)d) de la LRTFP, qui est libellé comme suit :

d) soit la rétrogradation ou le licenciement imposé pour toute raison autre qu’un manquement à la discipline ou une inconduite, s’il est un fonctionnaire d’un organisme distinct désigné au titre du paragraphe (3).

17 L’argument de la fonctionnaire selon lequel la rétrogradation constitue une mesure disciplinaire modifie la nature du grief et, conformément au principe Burchill, je conclus que cet argument est hors de la portée du grief. Il ne serait pas équitable de permettre à la fonctionnaire, à la dernière minute, d’élargir la portée de l’audience du grief pour y inclure des éléments qui n’ont pas été soulevés antérieurement.

III. Question relative aux délais

18 Selon la clause 17.02 de la convention collective, les employés qui estiment avoir été traités de façon injuste ou qui s’estiment lésés par une action ou l’inaction de l’employeur au sujet de questions autres que celles qui découlent du processus de classification ont le droit de présenter un grief. Selon la clause 17.05 de la convention collective, les employés doivent remettre le grief à leur surveillant immédiat ou au chef de service local qui l’acheminera au représentant de l’employeur autorisé à traiter les griefs.

19 Conformément à la clause 17.10 de la convention collective, un grief doit être présenté « […] au plus tard le trente-cinquième (35e) jour qui suit la date à laquelle il ou elle est notifié, oralement ou par écrit, ou prend connaissance, pour la première fois, de l’action ou des circonstances donnant lieu au grief ».

20 Le 15 janvier 2010, la fonctionnaire, accompagnée du représentant de l’agent négociateur, a rencontré M. Lambert et un agent des ressources humaines. M. Lambert a indiqué qu’à cette rencontre, il a informé la fonctionnaire de vive voix de la décision de la rétrograder et il lui a demandé de lui faire part de ses préférences relativement à un poste classifié à un groupe et niveau moins élevé (EG-03). Toutefois, selon la fonctionnaire, la rencontre a été tenue uniquement pour discuter des options au cas où l’on déciderait de la rétrograder.

21 Le 19 janvier 2010, la fonctionnaire a rédigé un courriel à l’intention de M. Lambert dans lequel elle a indiqué ce qui suit :

Suite à la rencontre du 15 janvier 2010 avec le représentant de l’employeur, où la décision de ce dernier a été présentée soit :

-Choisir entre les postes :

Hygiène des viandes : Abattoir 129

Hygiène des viandes : Abattoir 39-D

ou

Une autre proposition de poste EG-03 à Montréal-Est

[…]

22 Le 27 janvier 2010, M. Lambert a envoyé une lettre à la fonctionnaire pour l’informer de la décision de la rétrograder et de son droit de présenter un grief. Selon cette dernière, il s’agissait de la première fois qu’elle prenait connaissance de la décision de la rétrograder.

23 Le 31 janvier 2010, la fonctionnaire a envoyé une lettre à M. Lambert dans laquelle elle a indiqué qu’elle n’était pas d’accord avec la décision de la rétrograder ni avec le processus qui a été suivi. Elle a rédigé ce qui suit :

[…]

En premier lieu, je désire vous informer que je suis en complet désaccord avec votre décision de procéder à ma rétrogradation. À cet égard, soyez informé que j’exercerai tous les recours prévus à la convention collective pour contester cette décision et faire valoir valablement tous mes droits.

[…]

24 Le 16 mars 2010, la fonctionnaire a rempli et présenté à l’employeur la formule de grief individuel.

25 Le 23 septembre 2010, l’employeur a rejeté le grief au motif qu’il avait été déposé en dehors des délais prescrits. Il a réitéré sa position dans sa réponse au renvoi à l’arbitrage de la fonctionnaire.

26 Pour les motifs suivants, je conclus que le grief n’a pas été déposé dans les délais prescrits.

27 La décision de l’employeur relative à la rétrogradation a été communiquée oralement à la fonctionnaire le 15 janvier 2010. Je suis d’avis que le courriel de la fonctionnaire, en date du 19 janvier 2010, dans lequel elle reconnaît que la « décision » de l’employeur avait été présentée à la réunion, confirme qu’elle comprenait que l’employeur avait décidé de la rétrograder. La clause 17.10 de la convention collective est claire. La fonctionnaire disposait d’un délai de 35 jours à compter de la date à laquelle elle a été notifiée, oralement ou par écrit, de la décision donnant lieu au grief. Par conséquent, elle avait jusqu’au 19 février 2010 pour présenter son grief. La lettre en date du 27 janvier 2010 ne confirmait que la décision relative à la rétrogradation.

28 La fonctionnaire a fait valoir que sa lettre du 31 janvier 2010 constituait un grief conformément à la LRTFP et à la convention collective parce qu’elle a informé l’employeur qu’elle n’était pas d’accord avec la décision relative à la rétrogradation et qu’elle l’avait avisé de son intention d’exercer ses droits de recours.

29 La fonctionnaire a indiqué dans sa lettre à l’employeur qu’elle : « […] exercerai[t] tous les recours prévus à la convention collective pour contester cette décision et faire valoir valablement tous mes droits. » Elle a indiqué en outre « […] j’énonce simplement ma décision de me conformer à vos instructions tout en préservant mes droits. » Voici la lettre complète :

Objet: Votre lettre du 27 janvier 2010

Monsieur,

Par la présente, j’accuse réception de votre lettre du 27 janvier 2010 selon laquelle vous procédez à ma rétrogradation en raison de mon incapacité à satisfaire aux exigences du poste d’inspecteur SAPC de niveau EG-04. À cet égard, vous avez donc procédé à une rétrogradation dans un poste EG-03 au sein du programme de fruits et légumes frais. Annexée â cette lettre, vous avez joint une « offre d’emploi indéterminé » afin d’occuper le poste numéro 9243 dans la section des fruits et légumes frais au sein du bureau de Montréal-Est.

En premier lieu, je désire vous informer que je suis en complet désaccord avec votre décision de procéder à ma rétrogradation. À cet égard, soyez informé que j’exercerai tous les recours prévus à la convention collective pour contester cette décision et faire valoir valablement tous mes droits.

Je désire également vous faire part de mon désaccord avec la façon dont vous avez procédé à cette rétrogradation. Votre lettre laisse sous-entendre que j’accepte la rétrogradation imposée par l’employeur et que je vais accepter une nouvelle offre d’emploi. Or, il sera faux de prétendre que la rétrogradation fut déterminée avec mon consentement. Si j’ai fait le choix d’un autre poste de travail, c’est, bien sûr, en raison de votre décision qui s’avérait immuable.

Autrement dit, je devais être rétrogradé et j’avais l’opportunité d’exercer un choix parmi plusieurs postes de niveau inférieur. Dans ces circonstances, j’ai accepté l’instruction énoncée par l’employeur de m’assigner au poste 9243 dans la section des fruits et légumes frais. J’entends donc me conformer à vos instructions, soit celles de m’affecter au poste d’Inspecteur au programme des produits frais. À cet égard, tel qu’indiqué dans votre lettre du 27 janvier dernier, je me présenterai, dès le 8 février prochain, au bureau de monsieur Éric Jubinville afin de débuter ma nouvelle affectation.

Veuillez, toutefois, prendre note que ma décision de me conformer à vos instructions ne pourra, en aucun moment, être considérée comme étant une acceptation de votre décision de procéder à ma rétrogradation.

Compte tenu de ce qui précède, vous aurez compris que je ne signerai pas de document selon laquelle j’accepte une nouvelle offre d’emploi. Au contraire, j’estime que votre processus décisionnel revêt un caractère unilatéral. Ainsi, vous aurez compris que par la présente j’énonce simplement ma décision de me conformer à vos instructions tout en préservant mes droits.

Veuillez agréer. Monsieur, l’expression de mes sentiments les meilleurs.

[Sic pour l’ensemble de la citation]

30 La preuve a démontré que la lettre avait été envoyée au représentant approprié de l’employeur ainsi qu’au représentant de l’agent négociateur de la fonctionnaire et qu’ils l’ont reçue tous les deux. Par conséquent, la fonctionnaire a soutenu avoir respecté le délai de 35 jours énoncé dans la convention collective, peu importe que le délai commence le 15 janvier 2010, soit la date de la réunion, ou le 27 janvier 2010, soit la date de la lettre.

31 Je n’accepte pas que la lettre de la fonctionnaire constitue un grief. Elle constitue simplement un avis selon lequel elle avait l’intention d’exercer ses droits pour s’opposer à la rétrogradation à un moment donné à l’avenir.

32 Il convient de noter que lorsqu’elle a renvoyé le grief à l’arbitrage, la fonctionnaire n’a pas mentionné sa lettre en date du 31 janvier 2010 au titre de son grief. Elle a plutôt indiqué que son grief se rapportait au document présenté le 16 mars 2010.

33 À l’appui de son argument selon lequel sa lettre du 31 janvier 2010 constituait son grief, la fonctionnaire a cité la clause 17.07 de la convention collective qui indique ce qui suit : « Le grief de l’employée n’est pas considéré comme nul du seul fait qu’il n’est pas conforme au formulaire fourni par l’Employeur. » Toutefois, dans le cas de la fonctionnaire, la question portait non seulement sur le fait que la lettre du 31 janvier 2010 n’avait pas été présentée au moyen du formulaire approprié, mais aussi le fait que la lettre indiquait clairement qu’elle n’avait que l’intention d’exercer ses options en matière de recours à l’avenir, ce qui était insuffisant pour être considéré comme étant un grief.

34 La fonctionnaire a soutenu en outre que l’article 63 du Règlement sur les relations de travail dans la fonction publique (DORS/2005-79) (le « Règlement ») empêchait l’employeur de s’opposer au non-respect du délai. Selon cette disposition, un grief peut être rejeté au motif qu’il a été présenté en retard uniquement s’il a été rejeté au palier inférieur pour cette même raison.

35 Tel qu’il a été mentionné ci-dessus, le grief a été présenté directement au dernier palier. La décision rendue au dernier palier indique clairement que le grief a été rejeté parce qu’il a été déposé hors délai. Cependant, la fonctionnaire a indiqué que lorsque le représentant de son agent négociateur a signifié le grief au représentant de l’employeur, ce dernier a dit qu’il était hors délai, mais il l’a accepté en ajoutant que « tout le monde fait des erreurs et nous aussi de temps en temps nous dépassons les limites ». La fonctionnaire a soutenu que cette remarque démontrait que l’employeur avait effectivement renoncé à la question liée au respect des délais et elle a insisté sur le fait que la Commission devait faire preuve de souplesse dans son interprétation des dispositions procédurales de la convention collective et de la LRTFP.

36 Peu importe les commentaires de la personne qui a reçu la formule de grief la décision de l’employeur était claire – le grief a été rejeté parce qu’il a été déposé en retard. La personne qui a fait le commentaire lorsque le grief a été déposé n’était pas le décideur ultime et ses commentaires ne constituent pas la décision de l’employeur relativement au grief.

37 Par conséquent, je conclus que le grief a été présenté au dernier palier en dehors du délai prévu à la convention collective.

Demande de prorogation de délai

38 À l’audience, la fonctionnaire a demandé que la Commission, advenant une décision voulant que le grief ait été présenté hors délai, lui accorde une prorogation du délai de présentation de son grief afin qu’il soit entendu sur le fond.

39 Le pouvoir de la Commission de proroger le délai dans lequel un grief ou un renvoi de grief à l’arbitrage doit être présenté est prévu à l’article 61 du Règlement, qui prévoit ce qui suit :

61. Malgré les autres dispositions de la présente partie, tout délai, prévu par celle-ci ou par une procédure de grief énoncée dans une convention collective, pour l’accomplissement d’un acte, la présentation d’un grief à un palier de la procédure applicable aux griefs, le renvoi d’un grief à l’arbitrage ou la remise ou le dépôt d’un avis, d’une réponse ou d’un document peut être prorogé avant ou après son expiration :

a) soit par une entente entre les parties;

b) soit par la Commission ou l’arbitre de grief, selon le cas, à la demande d’une partie, par souci d’équité.

40 Dans Schenkman c. Conseil du Trésor (Travaux publics et Services gouvernementaux Canada), 2004 CRTFP 1, au paragr. 75, il a été indiqué que, selon la jurisprudence applicable, les critères suivants doivent être pris en compte pour décider si une prorogation doit être accordée :

                   […]

  • le retard est justifié par des raisons claires, logiques et convaincantes;
  • la durée du retard;
  • la diligence raisonnable du fonctionnaire s’estimant lésé;
  • l’équilibre entre l’injustice causée à l’employé et le préjudice que subit l’employeur si la prorogation est accordée;
  • les chances de succès du grief.

                   […]

41 La fonctionnaire a fourni les renseignements suivants :

Entre le 31 janvier et le 28 février 2010, elle s’est efforcée de remplir la formule de grief de façon aussi exhaustive et exacte que possible.

Au début de mars 2010, elle a dû prendre un congé pour se rendre dans une autre ville afin de prendre soin d’un membre de sa famille qui se rétablissait à la suite d’une opération importante. Le tout est arrivé subitement, avec peu de préavis, et la fonctionnaire est partie immédiatement après que son employeur lui ait accordé verbalement son congé.

  • À l’origine, elle a demandé un congé d’une semaine, mais elle a ensuite demandé une autre semaine, qui lui a été accordée.
  • Pendant son congé (du 2 au 14 mars 2010), elle a subvenu aux besoins d’un membre de sa famille.
  • Elle est retournée au travail le 15 mars 2010; elle a immédiatement rempli la formule de grief, elle l’a signée et l’a présentée à l’employeur.
  • L’employeur a également omis de respecter un délai puisqu’il lui a fallu un peu plus de six mois pour rendre sa décision au dernier palier.

42 La fonctionnaire a soutenu qu’elle avait des motifs clairs et convaincants justifiant le retard. En outre, la preuve a démontré qu’elle avait fait preuve de diligence raisonnable, en ce qu’elle a rempli et présenté le grief dès qu’elle est retournée au travail. Elle a fait valoir que l’employeur n’avait subi aucun préjudice puisqu’il s’agissait d’un retard très court.

43 L’employeur a soutenu que la Commission devrait rejeter la demande de prorogation de délai. Il a indiqué que le délai prévu à la convention collective représente un consensus auquel sont parvenus l’employeur et l’agent négociateur et que, par conséquent, il devrait être respecté.

44 L’employeur a adopté la position selon laquelle la fonctionnaire n’a pas fait preuve de diligence raisonnable lorsqu’elle n’a pas déposé le grief dans le délai imparti, plus particulièrement parce qu’elle ne devait que remplir une courte formule. Il est d’avis que le motif invoqué par la fonctionnaire, soit un membre de la famille malade, n’était pas clair ni convaincant.

45 Selon l’alinéa 61b) du Règlement, la Commission dispose d’un pouvoir discrétionnaire relativement à la prorogation d’un délai pour présenter un grief à quelque palier de la procédure applicable aux griefs que ce soit, et ce, « par souci d’équité ».

46 L’ancienne Commission a conclu dans Cloutier c. Conseil du Trésor (ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration),2008 CRTFP 31, au paragr. 13, que les demandes de prorogation devraient être accordées avec parcimonie :

[13] […] Bien que l’alinéa 61 b) du Règlement permette la prorogation de ce délai, une telle demande est accordée avec parcimonie afin de ne pas déstabiliser le régime de relations de travail créé par la Loi et l’entente des parties.

47 Il est bien établi que les cinq facteurs énoncés dans Schenkman sont pris en compte dans l’analyse de la Commission de la question de savoir si l’équité exige qu’elle accorde une prorogation de délai. Dans chaque cas, elle examine les facteurs dans le contexte des faits particuliers et elle décide ensuite du poids à accorder à chaque facteur. Tel qu’il est indiqué au paragr. 51 de Gill c. Conseil du Trésor (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences),2007 CRTFP 81, au paragr. 51 :

[51] L’importance accordée à chacun des critères n’est pas nécessairement la même. Les faits du cas déterminent comment ils sont appliqués et quelle valeur probante est accordée à chacun. Chaque critère est examiné et apprécié en fonction du contexte factuel. Il arrive que des critères ne s’appliquent pas ou qu’il y en ait seulement un ou deux qui pèsent dans la balance.

48 Dans une affaire plus récente portant sur les demandes de prorogation de délai, soit Apenteng c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2014 CRTFP 19, au paragr. 88, l’ancienne Commission a expliqué davantage la façon dont les critères s’appliquent à l’analyse :

[88] L’analyse repose sur des faits et est effectuée selon le principe sous-jacent de l’article 61 du Règlement, soit « par souci d’équité ». Il en découle qu’il n’y a pas, dans les critères énoncés dans Schenkman, de formules forfaitaires ou de seuils qui empêchent un décideur de déterminer s’il y a lieu, par souci d’équité, d’accorder une prorogation de délai.

49 Après avoir examiné les éléments de preuve et appliqué les facteurs énoncés dans Schenkman, j’accorde la demande de prorogation du délai pour présenter le grief au dernier palier.

50 J’estime que la fonctionnaire a présenté des raisons claires, logiques et convaincantes permettant de justifier le retard. Elle avait clairement l’intention de présenter un grief dès le début et croyait, de bonne foi, que le délai commençait le 27 janvier 2010, soit la date de la lettre. Par conséquent, elle croyait disposer d’un délai de 35 jours à compter du 27 janvier 2010 pour présenter son grief. Toutefois, cette période a été abrégée de manière inattendue par un événement hors de son contrôle lorsqu’elle a été appelée, avec peu de préavis, à prendre soin d’un proche parent pendant qu’il se rétablissait d’une opération sérieuse.

51 En ce qui concerne les facteurs énoncés dans Schenkman, j’estime que le retard en l’espèce était considérablement plus court que d’autres retards dans certaines des décisions présentées. Je conclus en outre que le retard n’a causé aucun préjudice à l’employeur relativement à la préparation et à la présentation de ses arguments. D’autre part, la fonctionnaire subirait un préjudice si elle n’avait pas la possibilité de présenter son cas, qui n’est ni frivole ni vexatoire à première vue. La décision visée par le grief porte sur la rétrogradation pour rendement insuffisant, laquelle constitue une mesure sérieuse de la part de l’employeur qui a entraîné des répercussions importantes pour la fonctionnaire.

52 En fonction de l’ensemble des faits, je conclus que, par souci d’équité, il y a lieu d’accorder la prorogation du délai en l’espèce.

IV. Fond

Contexte

53 La fonctionnaire occupait le poste d’inspecteur des pratiques équitables d’étiquetage et de la salubrité des aliments. Elle s’est jointe à l’employeur en 1997, l’année de sa création. Elle exerçait des fonctions semblables depuis son entrée à la fonction publique fédérale, en 1992.

54 Voici les principales fonctions du poste d’inspecteur classifié au groupe et niveau EG-04 qu’occupait la fonctionnaire :

  • planifier, organiser et mener des inspections et des enquêtes;
  • cerner les problèmes et les questions possibles liés à la consommation des produits alimentaires, informer les agents de programme et obtenir et mettre en œuvre les conseils et l’orientation techniques;
  • inspecter et évaluer les établissements et les systèmes de contrôle traitant des produits alimentaires afin d’assurer leur salubrité et leur qualité;
  • analyser les résultats des inspections et des enquêtes, décrire les questions principales et fournir des recommandations;
  • veiller à la conformité avec les dispositions législatives;
  • enquêter les plaintes de commerçants et de consommateurs et les renvois provenant d’autres ministères;
  • obtenir des échantillons d’aliments aux fins d’analyse et consigner et expliquer les résultats;
  • valider l’étiquetage;
  • fournir des conseils sur demande;
  • assurer la bonne gestion de tout rappel de produits.

55 Lorsqu’ils effectuent des enquêtes, les enquêteurs traitent avec les détaillants et les producteurs. Le poste exige que son titulaire fasse preuve de tact et soit en mesure de persuader d’autres personnes. Certaines inspections font partie de programmes de prévention, tandis que d’autres sont menées en réponse aux plaintes reçues de consommateurs ou de concurrents.

56 En ce qui concerne les programmes de prévention, les inspecteurs ont le temps de planifier les activités. Toutefois, ils ne peuvent planifier d’autres tâches avec le même niveau de précision, par exemple lorsqu’ils répondent aux plaintes.

57 Au cours d’une inspection, un inspecteur effectue plusieurs tâches, y compris les suivantes :

  • Consulter le dossier de l’entreprise, de l’exportateur, etc.;
  • Préparer tout le matériel requis;
  • Procéder à l’inspection sur le terrain;
  • Effectuer l’inspection en respectant les directives pertinentes;
  • Rédiger le rapport d’inspection;
  • Faire le suivi.

58 En plus des inspections, les inspecteurs prélèvent des échantillons d’aliments, ce qui exige le déplacement vers un site, l’achat du produit en question, le prélèvement d’un échantillon à l’aide des méthodes appropriées, l’emballage de l’échantillon et de veiller à ce que le produit soit livré de façon sécuritaire à un laboratoire. Différentes règles doivent être suivies selon le type d’échantillon d’aliments.

59 Les inspecteurs doivent également exercer un certain nombre de tâches administratives.

60 Les inspecteurs doivent enregistrer les données dans deux systèmes informatisés :

  • le système de gestion des incidents (SGI), dans lequel un inspecteur ouvre un dossier pour chaque inspection et inscrit toutes les actions prises jusqu’à la fermeture du dossier;
  • le module de planification opérationnelle (MPO), dans lequel l’inspecteur inscrit toutes les activités effectuées sur une base mensuelle, ainsi que les heures consacrées à chaque activité. Les inspecteurs notent les heures sur une feuille et les remettent sur une base régulière.

61 La direction consulte ces bases de données lorsqu’elle planifie l’utilisation des ressources. Si les inspecteurs ne respectent pas les échéanciers concernant l’inscription de données dans les systèmes informatisés, la direction pourrait prendre des décisions en fonction de renseignements qui ne sont pas exacts.

62 Les inspecteurs tiennent également à jour des dossiers sur papier. Lorsqu’une inspection est achevée, l’inspecteur s’assure que le dossier est complet et il l’envoie aux fins de classement. Si ce n’est pas effectué, les renseignements ne seront pas à la disposition des autres inspecteurs qui pourraient en avoir besoin.

Avant l’exercice 2006-2007

Preuve de l’employeur

63 La fonctionnaire a agi à titre de superviseure par intérim du 15 septembre 2005 au 31 mars 2006; elle relevait alors directement de M. Lambert. Ce dernier a indiqué que pendant cette période, la fonctionnaire avait fait preuve de bon jugement et qu’il avait tiré profit de sa longue expérience et de ses connaissances approfondies. Toutefois, il lui a dit qu’elle devait apprendre à travailler plus rapidement. Il a conclu qu’il avait aimé travailler avec elle.

Preuve de la fonctionnaire

64 Les examens de rendement de la fonctionnaire pour les exercices 2001-2002, 2002-2003 et 2004-2005 étaient positifs et ne comprenaient aucune préoccupation. Pendant cette période, la fonctionnaire a eu deux superviseurs.

65 Le rendement de la fonctionnaire n’a pas été évalué en 2003-2004. Pendant cette année, elle a déménagé à un autre bureau où elle est demeurée jusqu’à la date de sa rétrogradation. Elle a déclaré qu’elle avait été en mesure de s’adapter à son nouveau milieu de travail.

66 Dans le cadre de son évaluation de 2004-2005, l’employeur a indiqué que la fonctionnaire avait presque réalisé l’objectif de « réduire le temps de traitement (environ 25 %) des commandes de travail. »

67 En 2005-2006, M. Lambert a effectué une évaluation du rendement positive pour la période où la fonctionnaire a agi à titre de superviseure par intérim. On lui a alors offert un poste de superviseur, mais elle l’a refusé parce qu’elle préférait être inspectrice.

Exercice 2006-2007

Preuve de l’employeur

68 En 2006-2007, la fonctionnaire avait deux superviseures, soit Catherine Beauregard et Stephanie Frechette, qui relevaient toutes les deux de M. Lambert. Ni Mme Beauregard ni Mme Frechette n’ont témoigné à l’audience.

69 En décembre 2006, les superviseures de la fonctionnaire étaient préoccupées par le rendement de cette dernière et elles ont commencés à envoyer des copies conformes au gestionnaire lorsqu’elles envoyaient des courriels de rappel à la fonctionnaire. M. Lambert a affirmé qu’il recevait rarement une copie des courriels envoyés par un superviseur à un employé. En l’espèce, les superviseures de la fonctionnaire l’ont fait afin que M. Lambert soit au courant des mesures prises pour aider la fonctionnaire à mieux atteindre les objectifs de son emploi et respecter les échéanciers établis.

70 En décembre 2006 et en janvier 2007, les superviseures ont rédigé de nombreux courriels en vue de rappeler à la fonctionnaire qu’elle devait terminer certaines tâches qui étaient en retard. Des échéanciers ont été établis pour certaines des tâches, alors que pour d’autres, une prorogation a été accordée. Les tâches comprenaient l’achèvement des dossiers et leur présentation aux fins de classement, la remise des feuilles du MPO, les suivis relativement aux dossiers et la saisie de renseignements dans le SGI. Une fois, en décembre 2006, une collègue a demandé à la fonctionnaire de lui donner une mise à jour au sujet d’un dossier particulier, ce que la fonctionnaire n’a pas fait avant la fin de janvier 2007.

71 Le 8 février 2007, à la demande de ses superviseures, M. Lambert a rencontré la fonctionnaire. Il a discuté avec elle de ses retards dans l’exécution de ses tâches, de son organisation au travail et de ses communications avec les membres de l’équipe, en particulier avec ses superviseures. Il lui a suggéré quelques approches qu’elle pourrait adopter pour améliorer son rendement. À la fin de la rencontre, M. Lambert était d’avis que la fonctionnaire comprenait la problématique et avait la motivation requise pour mieux atteindre les objectifs de l’employeur.

72 Après la réunion du 8 février 2007, l’employeur a offert à la fonctionnaire l’occasion de suivre quelques séances de formation.

73 En février et en mars 2007, les superviseures ont continué d’envoyer des courriels à la fonctionnaire, avec copies conformes à M. Lambert, relativement à certaines de ses tâches qui auraient dû être terminées.

74 Mme Frechette, Mme Beauregard et M. Lambert ont signé l’évaluation du rendement de 2006-2007. Les superviseures ont déclaré que la fonctionnaire aidait les autres, qu’elle avait une bonne attitude et qu’elle s’impliquait au sein de l’équipe. Toutefois, elles ont également indiqué qu’il existait un certain nombre de problèmes liés à son rendement, notamment :

  • elle n’était pas ponctuelle;
  • elle n’achevait pas ses dossiers, malgré les nombreuses réunions avec ses superviseures et les nombreux avis provenant de ces dernières.
  • elle ne réalisait pas l’objectif de deux sorties par semaine.

75 Les superviseures ont indiqué avoir soulevé les problèmes auprès de la fonctionnaire, tant par écrit que lors des réunions mensuelles. Elles ont ajouté qu’« un effort devra absolument être fait à ce niveau pour le prochain exercice 2007/2008. »

76 La fonctionnaire n’a pas demandé une révision de son évaluation du rendement pour 2006-2007.

77 Dans l’évaluation de 2006-2007, les superviseures ont aussi indiqué ce qui suit :

Le manque de personnel, les départs et les affectations de certains employés vers d’autres postes dans l’organisation n’ont pas permis l’atteinte des objectifs de rendement donnés au dernier exercice […]

78 Selon la preuve présentée, en 2006-2007, au bureau où travaillait la fonctionnaire, il y avait 64 postes financés qui pouvaient être dotés, dont 50 étaient déjà dotés et 14 étaient vacants.

79 M. Lambert a affirmé que lorsqu’il manquait de personnel, les priorités et les objectifs étaient modifiés par les superviseurs. Selon lui, les conséquences d’un manque de personnel étaient subies de façon égale par tout le personnel.

Preuve de la fonctionnaire

80 La fonctionnaire faisait partie d’une équipe d’environ 15 personnes. Toutefois, un manque de personnel a mené à une charge de travail plus lourde pour les autres inspecteurs. En ce qui concerne la fonctionnaire, cela signifiait qu’elle devait établir des priorités pour gérer ses tâches.

81 Après l’arrivé de Mme Beauregard et de Mme Frechette à titre de superviseures, une pression a été exercée sur les inspecteurs pour qu’ils atteignent leurs objectifs.

82 La fonctionnaire a été surprise lorsqu’on lui a demandé de rencontrer seule M. Lambert, le 8 février 2007. À cette époque, son équipe éprouvait des difficultés. M. Lambert lui a parlé de ses retards dans son travail, mais de manière vague. Toutefois, elle se sentait à l’aise pendant la réunion et elle était toujours ouverte à recevoir des suggestions sur les façons dont elle pouvait s’améliorer.

83 La fonctionnaire a reçu son évaluation du rendement de 2006-2007 en juin 2007. Elle comprenait les attentes, mais elle ne croyait pas qu’il était nécessaire de traiter chaque cas comme un cas urgent. Elle ne se rappelait pas si elle avait des réunions mensuelles avec ses superviseures ou si elle avait reçu des courriels de rappels au sujet des retards, mais elle indique que c’était possible. Elle n’a pas demandé une révision de l’évaluation de 2006-2007, par respect envers l’autorité de ses superviseures, mais elle n’était pas d’accord avec les conclusions négatives.

84 Selon la fonctionnaire, les tâches administratives, comme la remise du formulaire du MPO, la saisie des renseignements dans le SGI et l’achèvement des dossiers sur papier et leur envoi aux fins de classement ne constituaient pas une partie importante de son travail. Les tâches consistant à planifier les inspections, à se déplacer aux sites, à consulter, à mener des enquêtes conformément aux directives de l’employeur, à parvenir à des conclusions et à en faire les suivis étaient plus importantes.

85 Les inspecteurs devaient accepter d’être en disponibilité certaines semaines du mois afin qu’une personne soit disponible pour traiter les cas urgents. La fonctionnaire a présenté un tableau indiquant 10 noms, y compris le sien, et les dates auxquelles les inspecteurs étaient en disponibilité entre le 1er janvier 2007 et le 28 janvier 2008. Selon le tableau, la fonctionnaire avait été en disponibilité pendant sept semaines et deux vendredis au cours de cette période.

86 La fonctionnaire a tenté de faire valoir au moyen de ce tableau qu’il y avait une pénurie d’inspecteurs dans son équipe pendant la période visée. Toutefois, le tableau ne permet pas de démontrer son allégation. Il indique 10 noms et les jours auxquels les personnes qui y figurent sont en disponibilité, mais aucun détail n’est précisé quant à l’endroit où travaillent les personnes y figurant ou si d’autres personnes ont travaillé avec eux qui n’étaient pas nommés au tableau. En outre, la fonctionnaire n’a pas présenté le tableau aux témoins de l’employeur afin d’obtenir leurs commentaires quant à savoir s’il démontrait qu’il y avait un manque d’inspecteurs.

Exercice 2007-2008

Preuve de l’employeur

87 D’avril à juin 2007, les superviseures de la fonctionnaire ont continué d’envoyer des courriels de rappel à la fonctionnaire pour qu’elle termine les tâches en retard. Elles l’ont également rencontrée en vue de discuter de son rendement.

88 En juillet 2007, une collègue a été assigné à travailler avec la fonctionnaire afin de l’aider à fermer ses dossiers. Pendant cette période, la fonctionnaire n’a pas voyagé et n’a reçu aucun nouveau dossier.

89 D’août 2007 à mars 2008, les superviseures ont envoyé plusieurs courriels de rappel à la fonctionnaire dans lesquels elles lui ordonnaient d’exécuter certaines tâches qui étaient en retard et de corriger les incohérences figurant dans certains dossiers. En novembre 2007, Mme Beauregard a rédigé un courriel à l’intention de Mme Frechette au sujet de ses préoccupations quant au fait que la fonctionnaire ne rendait pas compte de toutes ses heures de travail.

90 En décembre 2007, l’employeur a retiré certains dossiers à la fonctionnaire et l’a affectée au prélèvement des échantillons d’aliments.

91 M. Lambert a expliqué qu’une équipe d’inspecteurs devait exécuter un certain nombre de tâches différentes. La prise d’échantillons d’aliments constituait une tâche moins compliquée qui était souvent attribuée aux inspecteurs ayant une expérience moindre ou qui éprouvaient des difficultés à exercer d’autres activités.

92 À la fin de 2007, le Dr St-Hilaire est devenu le gestionnaire en chef, à Montréal-Est. Il a déclaré que lui et Mme Frechette avaient discuté de la situation de la fonctionnaire et avaient consulté un agent des ressources humaines afin de connaître les types d’interventions qui pourraient s’appliquer à la fonctionnaire. À compter de ce moment-là, le Dr St-Hilaire a reçu des copies des courriels que les superviseures envoyaient à la fonctionnaire.

93 Mme Frechette et le Dr St-Hilaire ont signé l’évaluation du rendement de 2007-2008 de la fonctionnaire. Mme Frechette a inclus une liste des activités auxquelles la fonctionnaire avait participé au cours de l’exercice. Elle a indiqué que la fonctionnaire continuait à éprouver des difficultés à respecter les échéanciers. Elle a également déclaré qu’en décembre 2007, en raison du fait que très peu de travail avait été terminé relativement à ses dossiers, la fonctionnaire avait été réaffecté à la cueillette d’échantillons d’aliments pendant les trois derniers mois de l’exercice ainsi qu’à l’achèvement de ses dossiers et à l’exécution des tâches administratives. La fonctionnaire n’a pas demandé une révision de l’évaluation de 2007-2008.

94 La fonctionnaire a informé ses superviseures en mai 2008, qu’elle avait recueilli un total de 183 échantillons d’aliments, de novembre 2007 à mars 2008, relativement à deux projets différents.

Preuve de la fonctionnaire

95 La charge de travail de la fonctionnaire était lourde en 2007-2008.

96 La fonctionnaire a rempli ses formulaires du MPO et elle les a toujours remis, même s’ils étaient parfois en retard. Les superviseures avaient raccourci le délai dont disposaient les inspecteurs pour les remettre. Lorsqu’elle prévoyait être en retard, elle en informait la secrétaire qui recueillait les feuilles et qui saisissait les renseignements dans le système du MPO.

97 La fonctionnaire a déclaré qu’en raison de ses priorités, certaines tâches étaient exécutées en retard. Elle a précisé qu’elle ne laissait pas les dossiers non complétés par négligence. De plus, si un dossier du SGI était fermé par erreur, il était très difficile de le corriger et, par conséquent, la fonctionnaire et d’autres personnes attendaient pendant une courte période pour s’assurer que les dossiers étaient achevés. Elle a déclaré que ce que les superviseures estimaient être des retards découlait de sa planification et du fait qu’elle regroupait les tâches semblables. Elle a également déclaré que les tâches administratives ne constituaient pas une partie importante de son travail.

Exercice 2008-2009

Preuve de l’employeur

98 En août 2008, la fonctionnaire a présenté des demandes de remboursement de dépenses visant la période de novembre 2006 à juillet 2008. M. Lambert et le Dr St-Hilaire ont expliqué que la présentation d’une demande de remboursement de dépenses effectuées au cours d’un exercice précédent était problématique puisque l’employeur ne faisait aucune prévision budgétaire pour de telles demandes tardives.

99 Dans d’autres courriels, les superviseures ont rappelé à la fonctionnaire de terminer ses tâches en retard. Dans certains cas, ils lui ont également demandé de corriger les incohérences et les erreurs, par exemple le classement erroné ou le fait de ne pas inclure les notes d’inspection dans un dossier.

100 Le Dr St-Hilaire a été tenu au courant du rendement de la fonctionnaire et des mesures prises par ses superviseures. Il était préoccupé par le fait que la fonctionnaire ne respectait pas les priorités établies par ses superviseures. Il se préoccupait aussi du fait qu’elle n’accomplissait pas suffisamment de travail, étant donné le nombre de jours qu’elle y consacrait, ce qui l’a mené à croire qu’elle ne rendait pas compte de toutes ses heures de travail.

101 Le Dr St-Hilaire a rencontré la fonctionnaire le 10 novembre 2008, avec le représentant de son agent négociateur, Mme Frechette et un agent des ressources humaines. Le Dr St-Hilaire a discuté avec la fonctionnaire de ses préoccupations selon lesquelles elle ne démontrait aucune amélioration de son rendement. Il lui a demandé d’indiquer les mesures d’adaptation que l’employeur pourrait lui offrir. Elle a répondu qu’elle souhaitait changer l’emplacement de son bureau, ce qui a été effectué. Le Dr St-Hilaire lui a donné jusqu’au 28 novembre 2008 pour élaborer un plan; aucun nouveau dossier ne lui a été attribué pendant cette période.

102  Le Dr St-Hilaire a tenu une autre réunion avec la fonctionnaire, le représentant de son agent négociateur, Mme Frechette et un agent des ressources humaines le 1er décembre 2008. La fonctionnaire a rendu compte de ce qu’elle avait fait depuis la dernière réunion. Une liste de tâches devant être terminées avant le 8 janvier 2009 lui a ensuite été donnée. Selon le Dr St-Hilaire, ces tâches devraient être accomplies en 14 jours; il a donné un délai de 20 jours à la fonctionnaire pour les exécuter.

103 Une autre réunion a été tenue le 8 janvier 2009 avec le Dr St-Hilaire, la fonctionnaire et le représentant de son agent négociateur. La fonctionnaire a expliqué qu’elle n’avait pas été en mesure d’exécuter toutes ses tâches en raison d’une séance de formation imprévue et des difficultés qu’elle avait éprouvées pour planifier des réunions. Le Dr St-Hilaire a fait valoir qu’il était préoccupé par le fait qu’elle n’était pas en mesure de rendre compte de toutes ses heures. Encore une fois, il lui a demandé si elle avait besoin d’aide et elle a répondu par la négative. Il lui a également rappelé l’importance de communiquer avec ses superviseures et de les tenir au courant de ce qu’elle faisait et si elle avait besoin d’aide. Une liste de tâches à exécuter en janvier lui a été remise. Lors de cette réunion, la fonctionnaire a déclaré qu’elle exerçait ses fonctions de manière professionnelle et qu’elle remettait en question la nécessité des réunions.

104 La fonctionnaire a informé son superviseure qu’elle avait exécuté les tâches du mois de janvier. Elle a ensuite commencé à traiter les dossiers en retard.

105 Mme Frechette et M. Lambert ont signé l’évaluation du rendement de 2008-2009. Mme Frechette y a écrit ce qui suit :

Lucie a beaucoup de difficulté à réaliser les tâches qui lui sont demandées dans un délai raisonnable. Depuis environ trois ans, plusieurs options ont été tentées afin de lui permettre de reprendre les nombreux retards accumulés dans son travail. Les inspections à faire dans les différents projets salubrité et étiquétage, les plaintes à traiter, la disponibilité sur l’horaire de garde, les rappels, sont toutes des tâches régulières du travail d’un inspecteur SAPC. Ces différentes tâches n’ont pas été demandées à Lucie pour une assez longue période de temps afin qu’elle puisse terminer ses nombreux dossiers en retard. L’aide de d’autres inspecteurs lui a aussi été offerte, ainsi que la possibilité de refaire certaines formations déjà suivies. Malgré toutes ces tentatives, le rendement de Lucie est toujours insuffisant. Dernièrement, nous lui avons demandé de recommencer à faire les tâches régulières d’un inspecteur SAPC et lui offrons un encadrement serré pour l’aider à accomplir son travail. Un suivi est présentement en cours et la situation sera évaluée de nouveau à son retour de vacances.

[sic pour l’ensemble de la citation]

106 La fonctionnaire a demandé que M. Lambert révise son évaluation. M. Lambert a rencontré les superviseures, le gestionnaire en chef et la fonctionnaire. Il a conclu que la procédure suivie par les superviseures était juste, et que les préoccupations notées dans l’évaluation du rendement étaient fondées.

Preuve de la fonctionnaire

107 La fonctionnaire était d’avis qu’elle avait eu un rendement exceptionnel en 2008-2009. Comme elle avait une surcharge de travail, il était normal qu’elle accomplisse certaines tâches administratives en retard. Le nombre d’échantillons d’aliments qu’elle a prélevés pendant cette période était 10 fois plus élevé que le nombre habituellement prélevé annuellement par les inspecteurs.

108 La prise d’échantillons d’aliments constitue un travail simple, mais important. En 2007, la fonctionnaire a rencontré le chef du laboratoire et elle a ensuite préparé un guide détaillé à l’intention des inspecteurs sur le prélèvement d’échantillons d’aliments.

109 La fonctionnaire a déclaré que le prélèvement d’échantillons d’aliments exige de se déplacer à un site, de prendre un échantillon, de suivre attentivement les directives afin que l’échantillon soit approprié aux fins d’analyse et d’établir une liaison avec les laboratoires. Le travail est très précis; la prise d’un échantillon peut prendre jusqu’à trois heures de travail. Toutefois, les éléments de preuve présentés par la fonctionnaire indiquent qu’elle pouvait prélever de multiples échantillons d’aliments au cours d’une seule journée.

110 La fonctionnaire a présenté les renseignements suivants au sujet du travail qu’elle avait accompli :

  • Dans le cadre d’un certain projet, son bureau a eu la tâche de prélever 122 échantillons et, de ce nombre, elle en a prélevé 97; elle a expliqué qu’il s’agissait d’un nombre disproportionné par rapport à ses collègues. Toutefois, en contre-interrogatoire, elle a reconnu qu’elle avait prélevé ces 97 échantillons d’aliments en 24 jours au cours de la période allant de mai 2008 à février 2009.
  • En mai et en juin 2008, elle a effectué huit inspections. Chacune de ces inspections lui a pris au moins une journée en plus du temps pour exécuter les tâches administratives.
  • Les 7 et 8 juillet 2008, elle a exécuté les tâches liées à un projet de dépistage au détail.
  • Elle a prélevé 10 échantillons d’aliments en six jours, du 27 août au 15 octobre 2008.
  • Elle a mené quatre inspections du 21 janvier au 11 mars; ces inspections lui ont pris 4 jours à compléter.
  • Elle a prélevé huit échantillons d’aliments du 28 août au 15 octobre 2008.

111 La fonctionnaire a également présenté un document qui indiquait qu’elle avait prélevé 76 échantillons d’aliments aux fins d’un projet de Santé Canada, et ce, du 9 novembre 2007 au 10 janvier 2008. Elle a affirmé que l’employeur n’était pas au courant de ce travail considérable.

112 En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a reconnu que la preuve permettait de confirmer que l’employeur était au courant de son travail relativement au projet de Santé Canada. De plus, elle a reconnu que même si le document visait une période de trois mois, il indiquait que 76 échantillons d’aliments avaient été prélevés en sept jours. Elle avait prélevé jusqu’à 10 échantillons d’aliments en une seule journée. Elle a expliqué que le document n’indiquait pas tout le travail effectué au cours des trois mois. Toutefois, en plus des jours indiqués, des heures auraient été consacrées à la préparation des demandes de remboursement des dépenses liées au travail.

113 L’employeur a informé la fonctionnaire qu’il lui attribuerait moins de travail afin qu’elle puisse reprendre les retards dans ses dossiers. Elle a déclaré que malgré ce qui lui avait été dit, cela ne s’est pas produit.

114 La fonctionnaire a essayé d’expliquer qu’elle n’était pas responsable des retards, lesquels faisaient partie de la nature du travail. Il existait de nombreuses raisons pour lesquelles un dossier devait demeurer ouvert. Si une mesure n’avait pas été prise, le dossier ne pouvait être fermé et les travaux administratifs ne pouvaient être accomplis.

115 En ce qui concerne sa demande de remboursement des dépenses qui a été présentée un an en retard, la fonctionnaire a expliqué qu’elle n’était pas au courant qu’elle pouvait demander le remboursement des dépenses. En outre, il ne s’agissait pas d’un montant important.

Exercice 2009-2010

Preuve de l’employeur

116 Le 7 mai, 2009, le Dr St-Hilaire a rencontré la fonctionnaire, le représentant de son agent négociateur et un agent des ressources humaines. Il lui a dit que son rendement était inférieur à celui de ses collègues. Il y avait également trois cas où elle avait démontré une mauvaise attitude. Encore une fois, il lui a demandé d’indiquer pourquoi elle éprouvait des difficultés et si elle avait besoin d’aide de l’employeur. Elle a répondu en répétant les commentaires qu’elle avait déjà faits.

117 Le Dr St-Hilaire a informé la fonctionnaire que ses collègues avaient commencé à se plaindre au sujet de son rendement. Il a exprimé des doutes sur les capacités de la fonctionnaire à effectuer le travail exigé d’un employé occupant un poste classifié au groupe et niveau EG-04. Il lui a demandé de songer à la question de savoir si elle avait besoin d’aide ou si elle avait des solutions à apporter et de quelle manière elle envisageait son avenir.

118 Le 13 mai 2009, le Dr St-Hilaire a rencontré la fonctionnaire, le représentant de son agent négociateur et un agent des ressources humaines. La fonctionnaire a affirmé qu’elle se sentait coincée par le processus et qu’elle estimait que son rendement était excellent. Elle a dit au Dr St-Hilaire qu’il était manipulé par ses superviseures. Il a encore exprimé des doutes sur sa capacité à effectuer le travail exigé d’un employé occupant un poste classifié au groupe et niveau EG-04. Il a ensuite accepté un plan proposé par le représentant de l’agent négociateur de la fonctionnaire. Il a été convenu que la fonctionnaire achèverait ses dossiers en retard au cours des huit prochaines semaines et qu’elle présenterait un rapport écrit à la fin de chaque semaine. Dans le cadre de ce plan, elle devait aussi planifier ses semaines au moyen de discussions avec une superviseure, au début et à la fin de chaque semaine.

119 Le 15 mai 2009, Mme Frechette a envoyé une communication écrite au Dr St-Hilaire dans laquelle elle a exprimé ses préoccupations au sujet du fait que la fonctionnaire ne reconnaissait pas qu’elle éprouvait des problèmes de rendement. Le Dr St-Hilaire a répondu que même si c’était le cas, il leur incombait de continuer à prendre les mesures appropriées, comme la période de supervision intensive.

120 Le 25 mai 2009, le Dr St-Hilaire a rencontré la fonctionnaire et le représentant de son agent négociateur. Il a exprimé son mécontentement au sujet du fait que lorsqu’ils ont convenu que la fonctionnaire achèverait tous ses dossiers au cours de huit semaines, elle ne lui avait pas dit qu’elle serait en congé pendant une partie de cette période. La fonctionnaire a assuré le Dr St-Hilaire qu’elle serait néanmoins en mesure d’achever ses dossiers avant son congé.

121 Le 8 juin 2009, Mme Frechette a envoyé une communication écrite à la fonctionnaire pour l’informer que ses tâches pour la semaine n’avaient pas été complétées. Elle a ajouté ce qui suit :

Si tu ne parviens pas à atteindre ces objectifs sans raison valable, nous nous verrons dans l’obligation de prendre des mesures administratives ou autres. En effet, l’encadrement dont tu bénéficies présentement a pour but de corriger ton rendement insatisfaisant, et le fait de ne pas respecter l’échéancier établi, sera interprété comme une mauvaise volonté de ta part, par conséquent des mesures plus sévères seront de mise.

122 Le 11 juin 2009, le Dr St-Hilaire a rencontré la fonctionnaire, Mme Frechette et le représentant de son agent négociateur. Lors de cette réunion, la fonctionnaire a déclaré qu’elle achèverait à temps le travail qui lui avait été attribué, ce qu’elle n’a pas fait.

123 En juillet 2009, Mme Frechette a envoyé de nombreux courriels à la fonctionnaire, avec copies conformes au Dr St-Hilaire. Dans chaque courriel, Mme Frechette informait la fonctionnaire des problèmes liés à ses dossiers, y compris le fait qu’elle ne créait pas de copies électroniques des étiquettes, qu’il y avait des problèmes de classement, que les renseignements n’étaient pas saisis dans le SGI à temps, que les dossiers n’étaient pas à jour et qu’ils n’étaient pas fermés ni envoyés aux fins de classement et que les mesures consignées dans sa feuille du MPO ne pouvaient pas être vérifiées.

124 Deux autres réunions ont été tenues les 10 et 25 août 2009 avec le Dr St-Hilaire, la fonctionnaire, le représentant de son agent négociateur et Patrick Blondeau, le gestionnaire en chef par intérim. La fonctionnaire n’avait pas achevé ses tâches et le Dr St-Hilaire lui a répété que l’employeur remettait en question sa capacité à exécuter les fonctions d’un poste classifié au groupe et niveau EG-04. La fonctionnaire n’a pas expliqué les difficultés qu’elle éprouvait, mais elle a indiqué qu’en ce qui concerne certains dossiers, elle attendait une réponse des compagnies.

125 Lors d’une réunion tenue le 15 septembre 2009, le Dr St-Hilaire a donné une lettre à la fonctionnaire l’informant que son rendement était toujours insuffisant. Il a décrit les mesures prises par l’employeur, y compris la période de supervision intensive et les nombreuses réunions avec lui. Il l’a informé que l’employeur estimait qu’elle n’était pas en mesure d’accomplir les fonctions d’un poste classifié au groupe et niveau EG-04. Il a ajouté qu’elle l’avait induit en erreur au sujet de ses dossiers. Il a ensuite indiqué que si aucune amélioration n’était constatée à l’avenir, l’employeur se verrait dans l’obligation de prendre des mesures, lesquelles pourraient comprendre une rétrogradation ou un licenciement. Il lui a donné 10 jours pour réfléchir à ses prochaines étapes.

126 Le Dr St-Hilaire a expliqué qu’il avait pris ces mesures parce qu’aucun des efforts déployés par l’employeur n’avait été fructueux et qu’aucun nouveau plan n’avait été déterminé. La charge de travail de la fonctionnaire n’était pas plus lourde que celle de ses collègues. En fait, l’employeur avait allégé sa charge de travail afin de lui donner le temps d’achever ses dossiers. Le Dr St-Hilaire a conclu que la fonctionnaire n’était pas en mesure d’exercer les fonctions d’un poste classifié au groupe et niveau EG-04.

127 Une réunion a été fixée le 25 septembre 2009. Le même jour, le représentant de l’agent négociateur a informé l’employeur que la fonctionnaire n’y assisterait pas parce qu’elle ne se sentait pas à l’aise et qu’elle était d’avis que le délai de 10 jours qui lui avait été donné à la suite de la réunion du 15 septembre était composé de jours ouvrables et que, par conséquent, il n’était pas échu. Le Dr St-Hilaire s’est présenté au bureau de la fonctionnaire et lui a dit qu’il souhaitait la rencontrer, ce qu’elle a toutefois refusé.

128 Au moyen d’un courriel envoyé le même jour, le Dr St-Hilaire a informé la fonctionnaire que son attitude était irrespectueuse et inacceptable. Il l’a informé qu’elle ne comprenait pas la gravité de sa situation et qu’elle n’était pas intéressée à garder son poste. Il l’a ensuite informé qu’il examinerait diverses options.

129 Le Dr St-Hilaire a indiqué à la fonctionnaire qu’il tiendrait une réunion avec elle et le représentant de son agent négociateur le 7 octobre 2009; elle a refusé d’y assister.

130 Mme Frechette et M. Lambert ont signé l’évaluation du rendement de 2008-2009 de la fonctionnaire. Mme Frechette a déclaré que la fonctionnaire éprouvait beaucoup de difficultés à exécuter ses tâches dans un délai raisonnable, et ce, même après avoir bénéficié d’une aide supplémentaire pendant trois ans et de périodes pendant lesquelles elle n’était pas tenue d’exercer un certain nombre de fonctions habituellement attribuées aux inspecteurs.

131 M. Lambert a rencontré la fonctionnaire le 25 novembre 2009 en vue de discuter de son évaluation du rendement de 2008-2009 parce qu’elle en avait demandé la révision. Il a ensuite rencontré Mme Frechette et le Dr St-Hilaire. Il a déterminé que les commentaires indiqués dans l’évaluation étaient justifiés.

132 M. Lambert se rappelait que lors de la réunion du 25 novembre 2009 ou d’une autre réunion, la fonctionnaire lui avait donné un livre de documents indiquant tous les travaux qu’elle avait accomplis au cours d’une certaine période. Il a indiqué que la fonctionnaire ne souscrivait pas aux objectifs fixés à son égard et qu’elle estimait que ses superviseures ne se rendaient pas compte de tout le travail qu’elle avait accompli.

133 À la fin de 2009, le Dr St-Hilaire a recommandé à M. Lambert de rétrograder la fonctionnaire parce qu’elle ne semblait pas capable d’effectuer les fonctions d’un poste classifié au groupe et niveau EG-04 de façon satisfaisante, et ce, même après trois ans de suivi et d’aide supplémentaire de la part de l’employeur

134 M. Lambert a rencontré la fonctionnaire le 15 janvier 2010 et l’a informée qu’il avait été décidé de la rétrograder à un poste classifié au groupe et niveau EG-03.

135 Le 19 janvier 2010, la fonctionnaire a envoyé un courriel à M. Lambert. Elle lui a indiqué quel poste classifié au groupe et niveau EG-03 elle préférait.

136 Le 27 janvier 2010, M. Lambert a envoyé une lettre à la fonctionnaire dans laquelle il confirmait sa rétrogradation.

137 Le 31 janvier 2010, la fonctionnaire a envoyé une communication écrite à M. Lambert dans laquelle elle a indiqué qu’elle était complètement en désaccord avec la rétrogradation et qu’elle exercerait ses droits de recours. Toutefois, entre-temps, elle occuperait le poste classifié au groupe et niveau EG-03.

138 M. Lambert était d’avis que le processus suivi pour essayer d’aider la fonctionnaire à atteindre les objectifs fixés était juste et équitable. L’employeur a essayé par tous les moyens de veiller à ce que la fonctionnaire se conforme aux exigences, et il a fait tous les efforts pour lui permettre de s’acquitter de ses tâches de façon satisfaisante. M. Lambert a déclaré qu’il n’avait jamais été impliqué dans un dossier où l’employeur avait mis tant d’efforts pour aider un employé. L’employeur a décidé de rétrograder la fonctionnaire au lieu de la licencier, reconnaissant ainsi sa bonne attitude, son expérience et sa capacité de réflexion.

139 Le Dr St-Hilaire a affirmé que les superviseures de la fonctionnaire et lui avaient appuyé la fonctionnaire de différentes façons, y compris en lui donnant de la formation, en demandant à ses collègues de l’aider, en mettant en place des mesures visant à lui donner le temps d’achever ses dossiers, en lui donnant des exemples de travaux accomplis par autrui, en prorogeant les délais, en lui retirant son obligation d’être en disponibilité, en tenant des réunions fréquentes, parfois en la présence du représentant de l’agent négociateur, et en mettant en place une période de supervision intensive.

140 Le Dr St-Hilaire a déclaré que l’employeur avait offert à la fonctionnaire un niveau de soutien auquel il n’avait jamais été témoin dans toute autre situation. Il a affirmé que la fonctionnaire ne reconnaissait pas qu’elle avait des lacunes; néanmoins, les superviseures de la fonctionnaire et lui étaient dans l’obligation de prendre des mesures visant à l’aider à atteindre les objectifs de son poste.

Preuve de la fonctionnaire

141 Selon la fonctionnaire, son rendement n’a pas changé au fil des ans. Elle a fait preuve de diligence, d’organisation, d’esprit de collaboration et elle avait de bonnes habitudes de travail.

142 La fonctionnaire a affirmé qu’elle ne parlait pas souvent à ses superviseures, mais qu’elle avait probablement eu des réunions avec elles. Elle a expliqué à ses superviseures qu’elle n’était pas responsable des retards, qui faisaient plutôt partie de la nature du travail. Selon elle, les objectifs fixés à son égard n’étaient pas réalistes. Elle a ajouté qu’elle respectait ses superviseures et qu’elle avait toujours agi de manière professionnelle et dans le meilleur intérêt de l’employeur. Elle a refusé que l’on exerce de la pression à son endroit afin qu’elle commette des erreurs.

143 Au cours de ses réunions avec le Dr St-Hilaire, la fonctionnaire a accepté les objectifs par respect pour l’autorité et elle a essayé d’expliquer que la nature du travail signifiait que des retards hors de son contrôle pouvaient survenir.

144 Lors de sa réunion avec M. Lambert, le 25 novembre 2009, la fonctionnaire lui a montré des documents qui démontraient tout le travail qu’elle avait fait en 2008-2009, y compris l’exécution d’inspections et le prélèvement d’échantillons d’aliments. Elle lui a indiqué qu’elle en avait fait autant, sinon plus, que tout autre inspecteur.

145 En contre-interrogatoire, la fonctionnaire a énoncé les points suivants :

  • Lorsque l’objectif de réduire le temps nécessaire pour mener à terme chaque dossier lui a été imposé, elle s’est efforcée de l’atteindre, mais cela ne modifiait pas la nature de son travail.
  • Elle a éprouvé des difficultés à présenter ses feuilles du MPO à temps parce que ses superviseures avaient raccourci le délai.
  • Même si elle ne se souvenait pas d’avoir assisté à des réunions avec ses superviseures, elle a supposé qu’un certain nombre de réunions avait été tenues.
  • Elle respectait Mme Frechette et suivait ses directives, mais les retards sont survenus parce qu’elle devait établir les priorités.
  • Les échéanciers n’étaient parfois pas réalistes.
  • Les retards dans la présentation des feuilles du MPO étaient courts et ne causaient aucun préjudice à l’employeur.
  • Elle discutait seulement avec ses superviseures lorsque c’était nécessaire aux fins de son travail et elle ne les informait pas toujours des retards.
  • Ses superviseures avaient moins d’expérience que la fonctionnaire et ne comprenaient pas toujours la nature du travail.
  • Les superviseures portaient jugement trop rapidement.
  • La fonctionnaire a reçu tous les courriels que ses superviseures lui avaient envoyés en vue de l’informer de ses lacunes, mais elle ne se souvenait pas de toutes les réunions.
  • Elle n’était pas d’accord avec les commentaires négatifs dans son évaluation de 2006-2007; selon elle, les superviseures avaient exagéré les événements, n’appréciaient pas son travail et modifiaient la réalité.
  • Elle a accompli son travail au mieux de ses capacités, lesquelles correspondaient à celles de ses collègues.
  • Elle n’était pas responsable des retards survenus dans ses dossiers.
  • Ses superviseures n’ont pas reconnu que sa charge de travail en 2008-2009 était exceptionnellement lourde.
  • Même si l’employeur a indiqué qu’il avait réduit sa charge de travail, ce n’est pas réellement le cas parce les tâches qui lui ont été retirées lui ont éventuellement été attribuées de nouveau.
  • Son milieu de travail est passé d’un milieu où les employés travaillaient de manière indépendante à un milieu dirigé en fonction d’échéanciers irréalistes.
  • Ses superviseures essayaient de la discréditer.
  • Les superviseures comparaient les nouveaux inspecteurs aux inspecteurs chevronnés.

Arguments quant au bien-fondé

Pour l’employeur

146 Comme les parties ont convenu que l’employeur présenterait ses éléments de preuve en premier, elles ont également convenu que ce dernier débuterait aussi la présentation des arguments.

147 L’article 230 de la LRTFP limite le pouvoir de révision d’une décision visant à rétrograder un employé pour rendement insuffisant. La Commission ne peut pas substituer son opinion à celle de l’employeur. Elle doit plutôt déterminer si l’évaluation de l’administrateur général voulant que le rendement du fonctionnaire soit insuffisant est raisonnable. Cette analyse doit être axée sur le processus donnant lieu à la détermination d’une conduite insuffisante et, plus particulièrement, elle doit tenir compte des quatre critères suivants :

  • L’employeur a-t-il agi de bonne foi?
  • Le fonctionnaire était-il assujetti à des normes de rendement appropriées?
  • L’employeur a-t-il communiqué clairement au fonctionnaire les normes de rendement?
  • L’employé a-t-il reçu les outils, la formation et l’encadrement nécessaires pour atteindre les normes de rendement?

148 La fonctionnaire avait de bonnes intentions, mais il semble qu’elle n’était pas en mesure de suivre un rythme de travail approprié aux fins d’un poste classifié au groupe et niveau EG-04. Elle a bien exécuté certaines tâches, mais elle n’a pas achevé le travail lié à ses dossiers en temps opportun. Des problèmes ont été constatés relativement à la fermeture de dossiers, au classement, au suivi et à la communication avec ses supérieures. Elle a accordé priorité à d’autres tâches que celles qui lui avaient été demandées par ses superviseures, et ce, même après avoir reçu des rappels écrits. Elle a également laissé entendre que les tâches administratives n’étaient pas importantes.

149 Il y a eu beaucoup de changements dans le milieu de travail de la fonctionnaire depuis 2001, notamment de nouvelles superviseures, un échéancier plus court pour présenter les feuilles du MPO, une technologie accrue et un accent sur la réduction du temps nécessaire pour exécuter les tâches. La fonctionnaire était réfractaire au changement et a insisté sur le fait que ses superviseures ne comprenaient pas la nature du travail d’un inspecteur.

150 La preuve n’a pas étayé l’allégation de la fonctionnaire voulant que sa charge de travail soit exceptionnellement lourde. Au contraire, il ressort de la preuve que le travail qu’elle a consigné ne correspondait pas aux heures consacrées à ce travail. De plus, aucun élément de preuve n’a étayé son allégation qu’il y avait un manque d’inspecteurs de 2006-2007 à janvier 2010.

151 Selon la preuve présentée, pendant plus de trois ans, l’employeur a fixé des attentes claires et a pris des mesures pour aider la fonctionnaire à y répondre, y compris en réduisant sa charge de travail, en tenant des réunions régulièrement, en lui offrant des occasions de formation ainsi que l’aide d’un collègue et en mettant en place une période de supervision plus intensive. L’employeur a agi de bonne foi. De plus, il appréciait la fonctionnaire, comme en témoigne sa décision de la rétrograder plutôt que de mettre fin à son emploi. L’employeur a reconnu qu’il était désagréable pour la fonctionnaire de faire l’objet d’une supervision plus intensive, mais cela ne constitue pas une preuve de mauvaise foi.

152 La conclusion de l’employeur en ce qui concerne le rendement insuffisant était partagée non seulement par les superviseures, mais également par M. Lambert et le Dr St-Hilaire.

Pour la fonctionnaire

153 Selon la fonctionnaire, même si l’article 230 de la LRTFP limite la compétence de la Commission, cette dernière ne doit pas se limiter à l’examen du processus qui a été suivi, conformément à ce que l’employeur a suggéré. La Commission doit également examiner le caractère raisonnable de la décision de l’employeur voulant que le rendement de la fonctionnaire soit insuffisant.

154 La fonctionnaire a soutenu qu’elle s’était acquittée d’un mandat compliqué depuis 1992 et qu’aucune préoccupation n’avait été constatée relativement à ses capacités professionnelles. Les problèmes que l’employeur a constatés ne touchaient que les tâches administratives (le non-respect des échéanciers et les retards à fermer les dossiers et de les présenter aux fins de classement), lesquelles sont loin d’être les éléments les plus importants de son travail. L’employeur n’a pas établi qu’elle n’était pas en mesure d’exercer les fonctions de son poste. En outre, elle a établi que les retards dans l’exécution de ses tâches administratives découlaient du fait qu’elle avait une charge de travail lourde en raison du manque de personnel. De plus, elle a démontré que, dans certains cas, les superviseures lui avaient demandé de fermer des dossiers qui ne pouvaient l’être parce que des mesures devaient encore être prises à leur endroit.

155 La fonctionnaire a soutenu que M. Lambert et le Dr St-Hilaire ne comprenaient pas assez bien le travail d’un inspecteur et elle a indiqué que l’employeur n’avait pas cité ses deux superviseures à témoigner. Par conséquent, la Commission ne dispose d’aucune preuve des représentants de l’employeur ayant une connaissance directe de sa situation.

156 La fonctionnaire a de plus fait valoir que l’employeur n’avait pas démontré que son processus était raisonnable. Il a présenté des incidents isolés qui ne permettaient pas d’établir qu’elle éprouvait des difficultés chroniques à respecter les échéanciers. Par exemple, bien qu’elle ait présenté une demande de remboursement de frais de déplacement après la fin de l’exercice, il n’existait aucune procédure établie pour présenter ces demandes et, par conséquent, le retard a causé un préjudice minimal à l’employeur.

157 Les superviseures ont exagéré l’importance des retards de la fonctionnaire à remettre les renseignements relatifs au MPO, lesquels découlaient en partie du fait que la superviseure avait raccourci l’échéancier, passant de 10 à 4 jours après la fin de chaque mois. La fonctionnaire a consulté la secrétaire qui a traité les renseignements relatifs au MPO afin de s’assurer que les retards ne causaient aucun problème. Elle a ensuite établi la priorité des autres tâches.

158 Même s’il n’existe aucune preuve de mauvaise foi, les préoccupations des superviseures concernaient des tâches mineures et n’auraient pas dû avoir été utilisées comme fondement à la décision voulant que le rendement de la fonctionnaire soit insuffisant. La Commission devrait conclure que la décision de l’employeur ne répond pas au critère du caractère raisonnable. Elle devrait ordonner la réintégration de la fonctionnaire au poste classifié au groupe et niveau EG-04 rétroactivement au 27 janvier 2010, sans aucune perte de salaire et tout autre avantage financier.

Réponse de l’employeur

159 L’employeur a soutenu que les lacunes de la fonctionnaire étaient graves et que les retards dans la saisie des renseignements et dans la fermeture des dossiers signifient que la direction et ses collègues n’avaient pas accès à des renseignements à jour.

V. Analyse

Principes généraux

160 Un employé d’un organisme distinct visé par le paragraphe 209(3) de la LRTFP peut déposer un grief relativement à sa rétrogradation pour rendement insuffisant et le renvoyer à l’arbitrage, (alinéa 209(1)(d) de la LRTFP).

161 En l’espèce, l’employeur est un organisme distinct désigné par le paragraphe 209(3) de la LRTFP (voir Décret désignant des organismes distincts pour l’application de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (DORS/2005-59)). La compétence d’un arbitre de grief qui examine un tel grief est limitée par l’article 230 qui prévoit ce qui suit :

230. Saisi d’un grief individuel portant sur le licenciement ou la rétrogradation pour rendement insuffisant d’un fonctionnaire de l’administration publique centrale ou d’un organisme distinct désigné au titre du paragraphe 209(3), l’arbitre de grief ou la Commission, selon le cas, doit décider que le licenciement ou la rétrogradation étaient motivés s’il conclut qu’il était raisonnable que l’administrateur général estime le rendement du fonctionnaire insuffisant.

162 Le pouvoir de l’arbitre de grief dans les affaires assujetties à l’article 230 de la LRTFP est décrit dans Mazerolle c. Administrateur général (ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2012 CRTFP 6, au paragr. 125, comme suit :

125 […] L’arbitre de grief doit examiner le caractère raisonnable de l’évaluation du rendement effectuée par l’employeur, et non le caractère raisonnable de la décision de licencier ou de rétrograder un fonctionnaire. Il en découle, tel qu’observé dans Raymond, que je suis limitée à tirer une conclusion parmi les deux suivantes : soit que l’évaluation à savoir que le rendement du fonctionnaire était insatisfaisant était raisonnable, soit qu’elle ne l’était pas. Si l’évaluation était raisonnable, je dois conclure que le licenciement était motivé, et je ne puis alors intervenir dans la décision de licencier le fonctionnaire. Si l’évaluation du rendement du fonctionnaire était déraisonnable, son licenciement serait annulé. Aucune autre conclusion n’est possible.

163 Dans Raymond c. Conseil du Trésor, 2010 CRTFP 23, au paragr. 131, l’arbitre de grief énumère les critères suivants comme étant pertinents à l’analyse visant à déterminer si l’évaluation négative de l’administrateur général du rendement du fonctionnaire était raisonnable :

131 […] Ainsi, je ne vois pas comment on pourrait conclure qu’il était raisonnable qu’un administrateur général estime le rendement de l’un de ses fonctionnaires insuffisant, si preuve est faite que :

  • · L’administrateur général ou les superviseurs qui ont apprécié le rendement du fonctionnaire se sont livrés à un exercice empreint de mauvaise foi;
  • · Le fonctionnaire n’était pas assujetti à des normes de rendement appropriées;
  • · L’employeur n’avait pas communiqué clairement au fonctionnaire les normes de rendement qu’il devait satisfaire; ou
  • Le fonctionnaire n’avait pas reçu les outils, la formation et l’encadrement nécessaires pour atteindre les normes de rendement dans un délai jugé raisonnable.

164 L’employeur a soutenu que l’article 230 de la LRTFP limite la Commission à l’analyse de la conclusion de l’administrateur général relative au rendement insatisfaisant en appliquant uniquement les facteurs énoncés dans Raymond. En d’autres termes, la Commission est limitée à décider uniquement si le processus suivi était raisonnable et équitable.

165 La fonctionnaire a fait valoir que l’analyse de la Commission devait tenir compte non seulement du caractère raisonnable du processus suivi, mais également de la conclusion tirée. Cette position est conforme à la décision de la Cour suprême dans Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragr. 47, qui examine la définition du caractère raisonnable et fournit de l’orientation à ce sujet :

[47] […] La cour de révision se demande dès lors si la décision et sa justification possèdent les attributs de la raisonnabilité. Le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

166 Ainsi, dans son examen du caractère raisonnable du jugement de l’administrateur général, la Commission doit prendre en compte non seulement les facteurs du processus décisionnel touchés par la décision, tels que ceux énumérés spécifiquement dans Raymond, mais également si la décision s’inscrit dans la portée des issues possibles et acceptables qui sont justifiables au regard des faits et de la loi. Tel qu’il est indiqué dans Forner c. Administrateur général (ministère de l’Environnement), 2014 CRTFP 95, au paragr. 183, « [l]a CSC a défini ce que signifie le caractère raisonnable dans un sens large ou théorique et l’affaire Raymond permet de comprendre ce qu’il signifie dans le contexte de la Loi. »

167 Mme Beauregard, Mme Frechette, M. Lambert et le Dr St-Hilaire sont parvenus à un consensus selon lequel le rendement de la fonctionnaire était insuffisant de 2006-2007 à 2010. Les mêmes lacunes ont été constatées de manière constante au cours de cette période. La fonctionnaire ne terminait pas les dossiers, elle ne saisissait pas les renseignements dans le SGI en temps opportun, elle ne présentait pas la feuille du MPO en temps opportun et elle ne respectait pas les directives de ses superviseures. De plus, elle indiquait que des tâches avaient été exécutées qui ne pouvaient pas être vérifiées, elle ne communiquait pas avec les superviseures, elle ne rendait pas compte de toutes ses heures de travail et elle ne reconnaissait pas la validité des préoccupations. Il y avait d’autres éléments de preuve selon lesquels elle exécutait d’autres tâches en retard, par exemple, répondre à un collègue et présenter une demande de remboursement de dépenses.

168 Selon l’employeur, la fonctionnaire ne rendait pas compte de toutes ses heures de travail. Le Dr St-Hilaire a soulevé cette préoccupation auprès d’elle en présence du représentant de son agent négociateur. Il lui a dit que les tâches qu'elle prétendait accomplir étaient insuffisantes par rapport au temps qu'il lui fallait pour les terminer.

169 Même si la fonctionnaire a soutenu qu’elle respectait l’autorité, elle ne tenait pas compte ou n’était pas en mesure de suivre les directives claires qui lui étaient données par ses superviseures, et ce, de manière constante. Elle a affirmé que le fait qu’elle accomplissait les tâches administratives en retard ne constituait pas un motif suffisant pour permettre à l’employeur de conclure que, dans l’ensemble, son rendement était insuffisant. Selon elle, les tâches administratives revêtaient une importance mineure et, par conséquent, elle était d’avis qu’elles étaient de faible priorité. Toutefois, elle devait exécuter ces tâches, ce qui était indiqué clairement dans le document intitulé « Description de travail générique » dans lequel l’une des principales activités de son poste était de « tenir des bases de données et des dossiers électroniques ». Dans le même document, la première caractéristique figurant sous l’en-tête « Responsabilité » était la suivante :

Saisir dans des bases de données (p.ex. SPRINT, SGI) les plaintes, les résultats des enquêtes et des inspections et les données d’échantillonnage, afin de les rendre accessibles aux gestionnaires du Bureau de la salubrité et des rappels des aliments, aux collègues et aux spécialistes et agents de programme.

170 En outre, l’employeur a expliqué que la tenue à jour des bases de données était importante puisque la direction les utilisait pour attribuer et planifier les ressources, et que d’autres inspecteurs les utilisaient lorsqu’ils menaient des recherches dans le cadre de leurs propres dossiers. La fonctionnaire a démontré qu’elle n’était pas en mesure d’exécuter ces tâches en temps opportun.

171 La fonctionnaire n’a pas tenu compte des opinions des superviseures sur son rendement; selon elle, ils manquaient d’expérience et ne comprenaient pas la nature du travail. Toutefois, il ressort de la preuve présentée que M. Lambert et le Dr St-Hilaire, de qui relevaient les superviseures immédiates, étaient également d’avis que le rendement de la fonctionnaire était insuffisant.

172 La fonctionnaire a soutenu qu’aucun poids ne devrait être accordé au témoignage de M. Lambert et du Dr St-Hilaire; elle a ajouté que Mme Frechette et Mme Beauregard devraient témoigner. Toutefois, j’estime que les éléments de preuve de l’employeur étaient suffisants pour établir ses arguments, et ce, pour les motifs suivants :

  • Il a fourni une preuve documentaire suffisante indiquant les préoccupations de superviseures immédiates de la fonctionnaire au cours d’une période de plus de trois ans.
  • La preuve documentaire indiquait également les mesures qu’elles ont prises pour informer la fonctionnaire de ces préoccupations et pour lui offrir un soutien et une supervision supplémentaires.
  • La preuve documentaire a été étayée par le témoignage de M. Lambert et du Dr St-Hilaire qui, à titre de gestionnaires des superviseures, avaient une connaissance directe de la situation en raison des renseignements qui leur ont été transmis par les superviseures et du fait qu’ils recevaient une copie conforme de la correspondance envoyée à la fonctionnaire et qu’ils rencontraient cette dernière.
  • La fonctionnaire a reconnu avoir reçu des communications écrites et avoir rencontré ses superviseures immédiates, M. Lambert et le Dr St-Hilaire, lors de réunions.
  • La fonctionnaire n’a pas remis en question la crédibilité des superviseures. Elle a plutôt remis en question leur compétence et leur connaissance de la nature du travail.
  • En ce qui concerne un certain nombre des incidents indiqués dans les courriels des superviseures, la fonctionnaire a soutenu que les retards étaient hors de son contrôle. Il aurait été utile d’entendre ce que les superviseures avaient à dire à ce sujet. Néanmoins, même si j’accepte les explications de la fonctionnaire, il existe bon nombre d’autres exemples de lacunes qui justifient amplement la conclusion selon laquelle son rendement était insuffisant.

173 La fonctionnaire a fait valoir que sa charge de travail, particulièrement en 2007-2008 et en 2008-2009, était exceptionnellement lourde et qu’en raison de celle-ci, elle ne pouvait exécuter les tâches administratives à temps. Toutefois, les éléments de preuve qu’elle a présentés à ce sujet n’étaient pas concluants.

174 La fonctionnaire a fourni des documents portant sur les travaux suivants qu’elle avait accomplis :

  • 2007 : Elle était parfois en disponibilité. Toutefois, aucun renseignement n’a été fourni quant à savoir si ces périodes de disponibilité avaient entraîné l’ouverture de dossiers qu’elle devait mener à terme.
  • 2008-2009 : Elle a prélevé 97 échantillons d’aliments aux fins du projet du Programme des pratiques équitables d’étiquetage et du programme d’analyse de la composition des aliments et de la fraude commerciale de 2008-2009 pendant 24 différents jours au cours d’une période de 8 mois, de mai à la fin de janvier.
  • 2008 : Elle a effectué 8 inspections en mai et en juin.
  • 2008 : Elle a prélevé 10 échantillons d’aliments en 6 jours, du 27 août au 15 octobre aux fins de 2 projets.
  • 2008 : Elle a effectué 2 dépistages.
  • 2008 : Elle a effectué 2 inspections et a prélevé 3 échantillons d’aliments.
  • 2009-2010 : Elle a prélevé 76 échantillons d’aliments sur 6 jours aux fins d’un projet de Santé Canada.
  • 2009 : Elle a effectué 4 inspections de janvier à mars.
  • 2009 : Elle a prélevé 10 échantillons d’aliments d’août à octobre.

175 Selon la fonctionnaire, chaque prélèvement d’échantillon d’aliment pouvait prendre jusqu’à trois heures de travail. Elle a également déclaré qu’une inspection pouvait prendre un ou deux jours. Il lui fallait la moitié d’une journée pour exécuter chacune des tâches liées au dépistage.

176 Les éléments de preuve sur le nombre d’heures nécessaires pour prélever un échantillon d’aliments portaient à confusion. À l’origine, la fonctionnaire a déclaré que le prélèvement d’un échantillon d’aliment pouvait prendre jusqu’à trois heures. Toutefois, selon sa preuve documentaire, elle était régulièrement en mesure de prélever de multiples échantillons d’aliments au cours d’une seule journée. Elle a expliqué que d’autres heures étaient ensuite nécessaires pour d’autres activités, comme le déplacement et le suivi, ainsi que pour remplir les demandes de remboursement des dépenses.

177 Une comparaison des estimations de temps de la fonctionnaire et de la preuve documentaire qu’elle a présenté m’amène à conclure que la preuve a démontré que la fonctionnaire avait effectué un certain nombre de tâches différentes au cours des années, mais cela ne permet pas d’établir que sa charge de travail était excessive pendant cette période.

178 Je conclus que les faits appuient la conclusion de l’administrateur général selon laquelle le rendement de la fonctionnaire était insuffisant. Au cours d’une période de trois ans, la fonctionnaire a démontré qu’elle n’était pas disposée à exercer toutes les fonctions de son poste ou qu’elle n’était pas en mesure de les exercer. Elle a considérablement sous-estimé la gravité de ses lacunes lorsqu’elle les a décrites comme des retards dans l’exécution de tâches administratives mineures. Ses lacunes comprenaient également le fait qu’elle n’avait pas suivi les directives de ses superviseures et qu’elle n’avait pas communiqué avec elles, même après avoir été informé, à maintes reprises, de l’importance de cet aspect de son travail. Ces faits démontrent que le jugement de l’administrateur général était raisonnable.

179 Y a-t-il d’autres facteurs à prendre en compte, incluant ceux énumérés dans Raymond, qui remettent en question le caractère raisonnable du jugement de l’administrateur général?

180 Il n’existe aucune preuve de mauvaise foi de la part de l’employeur. Pendant plus de trois ans, Mme Frechette, Mme Beauregard, M. Lambert et le Dr St-Hilaire ont essayé d’aider la fonctionnaire à atteindre ses objectifs de manière satisfaisante. M. Lambert et le Dr St-Hilaire ont tous les deux indiqué qu’ils n’avaient jamais été impliqués dans un dossier où autant d’aide a été donnée à un employé.

181 La fonctionnaire a fait valoir que les attentes de l’employeur étaient déraisonnables. Toutefois, la preuve a démontré le contraire. La fonctionnaire n’a pas démontré que sa charge de travail était excessive au point où elle n’était pas en mesure d’atteindre les attentes fixées à son égard. En outre, les domaines où il a été constaté que la fonctionnaire éprouvait des difficultés étaient tous à bon droit visés par la description des responsabilités d’un inspecteur. En 2009, des plans de travail ont été élaborés de concert avec la fonctionnaire et le représentant de son agent négociateur, ainsi qu’avec un agent des ressources humaines; aucun d’eux, y compris la fonctionnaire, n’ont mentionné qu’ils étaient préoccupés par le fait que les objectifs étaient déraisonnables. Il ressort également de la preuve que l’employeur a fait preuve de souplesse et qu’il a prorogé les délais, le cas échéant.

182 L’employeur a communiqué clairement et fréquemment ses attentes à la fonctionnaire. Les éléments de preuve comprenaient de nombreux courriels et rapports de réunions dans lesquels les superviseures ont fixé des attentes précises quant aux tâches qui devaient être exécutées dans des délais précis. De même, lorsque M. Lambert et le Dr St-Hilaire ont rencontré la fonctionnaire, ils lui ont également expliqué clairement les domaines où elle éprouvait des difficultés et lui ont suggéré des façons d’améliorer son rendement. Au cours de la série de réunions que le Dr St-Hilaire a tenues avec elle, les prochaines étapes ont été énoncées clairement et la fonctionnaire a souscrit à chacune des étapes.

183 Les éléments de preuve comprenaient de nombreux exemples démontrant que l’employeur avait offert à la fonctionnaire des outils, de la formation et de l’encadrement pour l’aider à atteindre ses objectifs, par exemple :

  • les possibilités de formation;
  • des réunions régulières avec les superviseures;
  • une période pendant laquelle une collègue l’a aidée et au cours de laquelle aucun nouveau dossier ne lui a été attribué;
  • des périodes pendant lesquelles moins de travail et des tâches moins compliquées lui étaient attribuées;
  • une période de supervision intense élaborée par l’employeur, le représentant de l’agent négociateur et la fonctionnaire qui comprenait des plans de travail, des réunions régulières et une rétroaction régulière;
  • des rappels réguliers des tâches qui lui avaient été attribuées et qui devaient être achevées.

184 La preuve a également révélé que parfois, lorsque l’employeur lui demandait si elle avait besoin d’aide supplémentaire, elle n’acceptait pas. Plus particulièrement, le Dr St-Hilaire lui a demandé à maintes reprises s’il existait des raisons qu’il ne connaissait pas qui pourraient expliquer les problèmes qu’elle éprouvait relativement à son rendement et si l’employeur pouvait lui offrir d’autres moyens pour l’aider. Elle n’a fait aucune autre demande, sauf celle de changer de bureau, ce qui a été effectué immédiatement.

185 Je conclus que la fonctionnaire n’a pas démontré l’existence d’autres facteurs, y compris ceux énumérés dans Raymond, qui remettent en question la conclusion voulant que l’administrateur général avait des motifs de conclure que le rendement de la fonctionnaire était insuffisant.

VI. Conclusion

186 Pendant plus de trois ans, l’employeur a communiqué clairement à la fonctionnaire que son rendement était insuffisant. Il lui a donné des directives claires quant à la façon de corriger ses lacunes et il lui a offert, de bonne foi, des séances de formation et différentes façons de l’aider. Les domaines où le rendement était insuffisant n’étaient pas, comme l’a allégué la fonctionnaire, négligeables. Ils portaient sur des questions clés, notamment le fait de ne pas suivre les directives de ses superviseures, de ne pas atteindre ses objectifs et de ne pas communiquer avec ses superviseures, ainsi que le fait de ne pas exécuter les tâches administratives en temps opportun.

187 La fonctionnaire a soutenu que l’employeur avait commis une erreur lorsqu’il a conclu que son rendement était insuffisant au motif que les lacunes concernaient des questions mineures et que son rendement était bon à d’autres égards. Tel qu’il a été indiqué ci-dessus, je n’accepte pas que les lacunes étaient négligeables. Cependant, je suis d’accord avec le fait que l’administrateur général a reconnu que le rendement de la fonctionnaire était satisfaisant à certains égards et, pour ce motif, il a décidé de la rétrograder plutôt que de mettre fin à son emploi.

188 Je conclus donc que la conclusion de l’administrateur général selon laquelle le rendement de la fonctionnaire était insuffisant est raisonnable et, en conséquence, le grief est rejeté.

189 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

VII. Ordonnance

190 La Commission proroge le délai pour présenter le grief.

191 Le grief est rejeté sur le fond.

Le 25 janvier 2016.

Catherine Ebbs,
Une formation de la
Commission des relations de travail
et de l’emploi dans la fonction publique

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