Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé conteste son licenciement pour rendement insuffisant – il a reconnu que l’employeur lui avait fourni les outils, la formation et l’encadrement nécessaires pour atteindre les normes de rendement – cependant, il a allégué que les normes de rendement auxquelles il était assujetti n’étaient pas claires et que le fait de ne pas avoir reçu une évaluation du rendement pour l’exercice 2011-2012 l’avait privé de la possibilité de vérifier les attentes de la direction – l’arbitre de grief a conclu que le fonctionnaire s’estimant lésé avait été assujetti à des normes de rendement appropriées qui lui avaient été clairement communiquées - les objectifs fixés dans les ententes de rendement venaient de la description de travail du fonctionnaire s’estimant lésé et les normes étaient décrites de façon méticuleuse et détaillé –plusieurs courriels adressés au fonctionnaire s’estimant lésé reprenaient la rétroaction qu’il avait reçu ainsi que les objectifs et les normes qu’il devait atteindre – aucune preuve n’a démontré qu’il avait contesté les objectifs ou les normes, ou qu’il ne les avait pas compris – bien qu’il n’ait pas reçu d’évaluation du rendement formelle pour l’exercice 2011-12, la direction a évalué son rendement plusieurs fois au cours de cette période et lui a fourni de la rétroaction – le fonctionnaire s’estimant lésé était au courant des attentes de la direction – le fonctionnaire s’estimant lésé a allégué que l’évaluation de son rendement était empreinte de mauvaise foi, mais l’arbitre de grief a conclu que ce n’était pas le cas – rien ne laissait croire que les superviseurs entretenaient quelque préjugé à son égard ou que leurs évaluations était inéquitables ou déraisonnables – l’arbitre de grief a conclu que l’évaluation de l’administrateur général en ce qui concerne le rendement insuffisant du fonctionnaire s’estimant lésé était raisonnable – le fonctionnaire s’estimant lésé a aussi plaidé qu’il n’avait pas reçu suffisamment d’avertissements en ce qui concerne un éventuel licenciement, bien qu’il ait été averti par écrit, en octobre 2012, qu’à défaut d’améliorer son rendement, il pourrait être licencié –le mois suivant, l’évaluation du rendement indiquaient que son rendement était toujours insatisfaisant – le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas établi qu’il ne savait pas que son emploi était en péril – les nombreux courriels, réunions, discussions et évaluations de son rendement, formels et informels, démontraient clairement l’insatisfaction de l’employeur. Grief rejeté

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2016-04-06
  • Dossier:  566-02-8504
  • Référence:  2016 CRTEFP 31

Devant un arbitre de grief


ENTRE

PLACIDE KALONJI

fonctionnaire s'estimant lésé

et

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL
(Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada)

Défendeur

Répertorié
Kalonji c. Administrateur général (Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada)

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l'arbitrage

Devant:
Steven B. Katkin, arbitre de grief
Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Yves Rochon, Association canadienne des employés professionnels
Pour le défendeur:
Léa Bou Karam, avocate
Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
du 15 au 19 septembre 2014.

MOTIFS DE DÉCISION

I. Grief individuel renvoyé à l'arbitrage

1        Le fonctionnaire s’estimant lésé, Placide Kalonji (le « fonctionnaire »), occupait le poste d’agent de recherche, classifié au groupe et au niveau EC-03, auprès de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (« l’employeur » ou la « CISR ») depuis février 2009. Par lettre en date du 4 mars 2013, l’employeur a licencié le fonctionnaire pour rendement insuffisant en vertu de l’alinéa 12(1)(d) de la Loi sur la gestion des finances publiques (L.R.C. 1985, ch. F-11) (la « LGFP »).

2        La lettre de licenciement, datée du 4 mars 2013 (pièce E-1, onglet 1), a été remise au fonctionnaire le 6 mars 2013. Les extraits suivants en résument l’essentiel :

[…]

La présente fait suite à une série d’évaluations et de suivis de votre rendement depuis l’été 2010 à aujourd’hui. La dernière évaluation de votre rendement que vous avez signée le 20 décembre 2012 a conclu que votre rendement est insatisfaisant.

Lors d’une rencontre le 4 octobre 2012, les préoccupations de la gestion concernant votre rendement insatisfaisant vous ont été communiquées en présence du gestionnaire aux Relations du travail et de vos gestionnaires, ainsi que de votre représentant syndical. D’un commun accord avec vous, la gestion vous a fourni du coaching et l’accès à des outils de recherche ainsi que de la formation, dans le but de vous aider à améliorer votre rendement et ainsi répondre aux exigences de votre poste. En dépit de ces mesures, la gestion n’a pas constaté d’amélioration significative et soutenue de votre rendement, qui demeure insatisfaisant.

J’en suis donc arrivé à la conclusion que vous n’êtes pas en mesure d’exécuter les fonctions de votre poste d’Agent de recherche. De plus, étant donné que toutes les mesures prises pour vous aider à améliorer votre rendement n’ont pas porté fruit, j’en conclus qu’il est peu probable que des mesures additionnelles vous permettraient de combler les lacunes identifiées.

[…]

3        Le 15 mars 2013, le fonctionnaire a déposé un grief contestant son licenciement. En guise de mesure corrective, il a demandé d’être réintégré dans un poste classifié EC-03 au sein de l’employeur. Son grief a été renvoyé à l’arbitrage le 9 mai 2013 en vertu du sous-alinéa 209(1)(c)(i) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2) (la « LRTFP »). La convention collective applicable est celle conclue entre le Conseil du Trésor et l’agent négociateur du fonctionnaire, soit l’Association canadienne des employés professionnels, pour le groupe Économique et services de sciences sociales, qui venait à échéance le 21 juin 2014.

4        Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l'emploi dans la fonction publique (la « nouvelle Commission »), qui remplace la Commission des relations de travail dans la fonction publique (l'« ancienne Commission ») et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l'article 396 de la Loi no 2 sur le plan d'action économique de 2013, un arbitre de grief saisi d'un grief avant le 1er novembre 2014 continue d'exercer les pouvoirs prévus à la LRTFP dans sa version antérieure à cette date.

I. Résumé de la preuve

5        L’employeur a cité trois témoins : Simon Coakely, Céline Beaudoin et Annie Constantin. Le fonctionnaire a témoigné en son propre nom et a cité Catherine Smith comme témoin. L’employeur a déposé 31 pièces en preuve et le fonctionnaire en a déposé 23.

A. Pour l’employeur

1. M. Coakely

6        M. Coakely occupait le poste de secrétaire général de la CISR de septembre 2008 jusqu’à sa retraite, en novembre 2013. Il a expliqué qu’à l’époque, la CISR comprenait trois divisions : la section du statut des réfugiés, la section de l’immigration et la section d’appel de l’immigration, aujourd’hui la section d’appel des réfugiés. Ces trois divisions, qui comprenaient quelque 200 employés, relevaient directement du président de la CISR; le secrétaire général était responsable des 800 autres employés de l’employeur.

7        Le fonctionnaire était agent de recherche à la direction des recherches, laquelle faisait partie de la direction générale des opérations de l’employeur. La direction des recherches appuyait surtout la section du statut des réfugiés. Le travail de recherche comprend notamment la préparation des cartables nationaux de documentation, soit des trousses d’information sur les conditions qui prévalent dans différents pays. Ce document est déposé d’office dans toute demande de statut de réfugié et est utilisé par les décideurs ainsi que par le demandeur de statut de réfugié. La méthodologie relative à la préparation de ces documents est établie depuis plusieurs années. L’agent de recherche doit vérifier des documents publics et les auteurs de ces documents, et évaluer le bien-fondé du document. Selon M. Coakely, ces documents ont acquis une renommée mondiale pour la qualité de la recherche.

8        Une autre partie du travail de recherche concerne les réponses aux demandes d’informations et consiste à répondre à des questions précises des décideurs, par exemple de vérifier s’il y a des éléments de preuve démontrant qu’un incident a eu lieu dans un pays. Le résultat d’une telle recherche est partagé avec les parties.

9        M. Coakely a témoigné avoir décidé de mettre fin à l’emploi du fonctionnaire après avoir pris connaissance de la documentation y afférente, soit les évaluations du rendement du fonctionnaire, des courriels et des lettres. Il a aussi discuté avec les personnes impliquées et a tenu au moins une réunion en personne avec ces dernières pour discuter de la documentation concernant le fonctionnaire.

10        M. Coakely a dit que lorsque le rendement d’un employé est insuffisant, la politique de l’employeur est de faire des évaluations semi-annuelles, ou plus fréquemment, comme dans le cas du fonctionnaire. Selon M. Coakely, bien que le fonctionnaire ait démontré quelques améliorations en cours de route, en décembre 2012, la charge de travail du fonctionnaire ne correspondait pas à ce qui est normalement attribué à un agent de recherche. Même si l’employeur a entrepris toutes les démarches possibles afin d’améliorer le rendement du fonctionnaire, incluant du mentorat, de la formation et l’accès à des outils de recherches, son rendement a continué à se détériorer.

11        En contre-interrogatoire, M. Coakely a dit que les employés étaient généralement évalués annuellement. Concernant les ententes de rendement entre la direction et le fonctionnaire, M. Coakely a dit que bien qu’il n’ait pas consulté tous ces documents, il avait à l’époque consulté plusieurs documents de même nature qui étaient contenus dans un dossier qui avait été préparé à son intention.

12        M. Coakely a été renvoyé à l’entente de rendement pour la période de janvier à mai 2012 (pièce E-1, onglet 12), dans laquelle certaines améliorations ont été notées. Il a reconnu que le fonctionnaire avait alors démontré du progrès et que son rendement était acceptable. Toutefois, l’évaluation en question ne couvrait qu’un tiers de l’exercice financier.

13        M. Coakely a reconnu qu’il n’était pas mentionné dans les ententes de rendement pour les périodes du 29 novembre au 17 décembre 2012 (pièce E-1, onglet 27), et du 18 décembre 2012 au 29 janvier 2013 (pièce E-1, onglet 28), que la direction avait assigné au fonctionnaire la tâche d’attribuer des mots-clés aux documents contenus dans les cartables nationaux de documentation.

14        À la question de savoir pourquoi il n’avait pas tenu compte du travail effectué par le fonctionnaire en janvier et février 2013 lorsqu’il a décidé de le licencier, M. Coakely a répondu que pendant cette période, le travail effectué par le fonctionnaire était celui normalement attribué à un employé classifié EC-02, alors qu’il était classifié EC-03.

15        Concernant l’évaluation du fonctionnaire pour la période du 29 mai 2009 au 29 mai 2010 (pièce S-2), M. Coakely a dit qu’elle était passable à certains égards mais qu’il y avait déjà des préoccupations quant au rendement du fonctionnaire malgré le fait qu’il n’en était qu’à ses débuts.

16        À la question de savoir si décembre 2012 était une période achalandée et s’il était préoccupé par l’entrée en vigueur de la loi C-11, ce qui expliquerait que le licenciement ait eu lieu le 4 mars 2013, M. Coakely a répondu qu’il avait attendu que les personnes impliquées dans le dossier du fonctionnaire prennent le temps de bien préparer leurs recommandations avant de prendre sa décision.

17        M. Coakely a ensuite été renvoyé à la politique du Conseil du Trésor intitulé Lignes directrices concernant le licenciement ou la rétrogradation pour rendement insatisfaisant (pièce S-3) (les « Lignes directrices »), plus précisément à la recommandation, sous le titre « Généralités », voulant que l’employé ait reçu suffisamment d’avertissements. M. Coakely ne savait pas si le fonctionnaire avait reçu des avertissements autres que celui contenu dans le courriel du 3 octobre 2012 (pièce E-1, onglet 21).

18        M. Coakely a été renvoyé au passage des Lignes directrices où il est mentionné, sous le titre « Généralités », que des efforts suffisants doivent être déployés « pour lui trouver un autre emploi pour lequel il possède les compétences voulues ». Selon M. Coakely, à l’époque en question, la réorganisation qui touchait la plupart des employés est entrée en vigueur et il fallait placer les employés touchés. De plus, la direction a tenté de trouver un poste classifié EC-02 pour le fonctionnaire, mais ils ont conclu que ce n’était pas possible étant donné son rendement. Ils ne pouvaient pas évaluer le fonctionnaire sur les tâches d’un poste classifié EC-02 parce qu’il n’occupait pas un tel poste.

19        M. Coakely a affirmé qu’il n’était pas au courant d’un conflit entre le fonctionnaire et Mme Beaudoin, mais qu’un tel conflit avait été soulevé lors de la procédure de règlement de griefs.

20        En ré-interrogatoire, M. Coakely a dit que des représentants de la direction, des ressources humaines et du contentieux avaient participé aux discussions au sujet du fonctionnaire. Toutefois, il en est arrivé à sa propre appréciation du dossier.

2. Mme Beaudoin

21        Mme Beaudoin est gestionnaire, Information et analyse de la recherche, Section de recherches sur les pays d’origine, direction des recherches, CISR. Elle occupe ce poste depuis le 30 mars 2010. À l’époque pertinente, elle gérait un groupe d’environ 10 agents de recherche et 5 agents d’analyse de recherches, ainsi que 2 superviseurs, tel qu’il est indiqué sur un organigramme en date du 8 février 2012 (pièce E-1, onglet 31).

22        Les agents de recherche effectuent des recherches et rédigent des rapports de recherche sur les pays d’origine des demandeurs de statut de réfugié. Les agents d’analyse de recherches révisent les rapports rédigés par les agents de recherche. Mme Beaudoin a fait référence à la description de travail de l’agent de recherche (pièce E-1, onglet 3) dont le premier paragraphe, sous le titre « activités principales », se lit ainsi :

Produire des rapports de recherche en cherchant, en analysant et en évaluant les sources d’information et l’information; en effectuant des entrevues; et en rédigeant des rapports selon la méthodologie rigoureuse et le calendrier.

23        Les rapports de recherche utilisent des sources d’information qui fournissent les renseignements sur les conditions qui règnent dans les pays d’origine des demandeurs de statut de réfugié. Mme Beaudoin a affirmé que selon la norme, un agent de recherche doit produire au moins quatre rapports de recherche par mois. Afin que les décideurs puissent prendre des décisions éclairées, la « méthodologie rigoureuse » comprend plusieurs critères pour chaque source, notamment : l’information doit être à jour et provenir de source nommée et non pas anonyme; l’information doit être corroborée avec une autre source anonyme; l’information doit être fiable et accessible au public.

24        Mme Beaudoin a indiqué que « le calendrier » fait état des dates d’échéance à respecter pour la mise à jour des 184 cartables nationaux de documentation. De plus, quotidiennement, il y a plusieurs demandes d’information provenant des décideurs auxquelles il faut répondre en fonction de délais précis.

25        Mme Beaudoin a rencontré le fonctionnaire pour la première fois pendant sa première semaine à titre de gestionnaire. Elle a alors rencontré tous les employés individuellement. À l’époque, la superviseure du fonctionnaire était Jill Zmund.

26        Mme Beaudoin a affirmé n’avoir eu aucun conflit avec le fonctionnaire de mars 2010 jusqu’à son licenciement. Elle a dit qu’elle avait géré le rendement d’environ 20 employés dont 7 ou 8 devaient se conformer à un plan de rendement.

27        Mme Beaudoin a fait référence à un courriel en date du 15 décembre 2010 qu’elle avait envoyé au fonctionnaire et qui résumait leurs rencontres des 1er et 2 décembre 2010. Le fonctionnaire a reconnu que le résumé reflétait les rencontres (pièce E-1, onglet 5). La rencontre du 1er décembre a eu lieu en présence de Mme Beaudoin, de Mme Constantin, qui était la superviseure des réviseurs, et d’Emily Cameron, alors superviseure du fonctionnaire. La rencontre du 2 décembre a eu lieu entre Mme Beaudoin et le fonctionnaire. Le courriel de Mme Beaudoin faisait état, entre autres, de la révision des rapports du fonctionnaire comme suit :

[…]

Il lui a été recommandé de faire preuve de plus de rigueur, d’attention, et de souci de détail dans l’application de la méthodologie de la Direction de la recherche, et également de suivre les conseils donnés par les réviseurs, ou du moins d’en discuter et de faire un suivi avec elles, surtout dans le cas où il déciderait de ne pas adopter un plan de travail ou une méthode proposés.

[…]

[Sic pour l’ensemble de la citation]

28        Mme Beaudoin a dit que bien qu’en décembre 2010 elle avait des doutes sur le rendement du fonctionnaire, elle ne voyait pas la nécessité d’un plan de rendement à ce moment-là. Tous les rapports rédigés par les agents de recherche étaient révisés quotidiennement. Il y avait de la rétroaction qui était considérée comme de la formation, notamment la vérification des sources et de leurs coordonnées et si ces dernières étaient conformes aux critères applicables. De plus, les agents de recherche avaient accès à un guide de rédaction et de style. À l’époque, la direction croyait que la rétroaction aiderait le fonctionnaire à améliorer son rendement.

29        Mme Beaudoin a expliqué que les agents de recherche devaient rédiger un minimum de quatre rapports par mois. Un rapport est révisé par l’agent principal de recherche avant d’être envoyé aux réviseurs. L’agent principal s’attend à ce que ses commentaires écrits soient pris en compte avant que le rapport ne soit envoyé aux réviseurs. Les commentaires peuvent indiquer que l’agent n’est pas sur la bonne voie ou qu’une source est introuvable. Il peut également questionner la vérification d’une source par l’agent ou soulever que l’agent devrait traiter une question d’une certaine façon.

30        Dans un courriel au fonctionnaire en date du 8 mars 2011, résumant une rencontre qu’elle avait eue avec lui le jour même (pièce E-1, onglet 6), Mme Beaudoin a énuméré 11 points auxquels le fonctionnaire devait se conformer. Il était notamment mentionné que le fonctionnaire devait rencontrer Mme Beaudoin chaque matin afin de discuter de l’évolution de son travail. Mme Beaudoin a dit que ces rencontres ont eu lieu quotidiennement au début, mais qu’elles sont par la suite devenues plus occasionnelles. Un autre point mentionnait le fait qu’il ne revenait pas aux réviseurs d’effectuer la majorité des recherches ou de rédiger les rapports du fonctionnaire.

31        Selon le rapport d’évaluation du rendement du fonctionnaire pour la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2011 (pièce E-1, onglet 7), comprenant 22 pages, le rendement du fonctionnaire était insuffisant. Les commentaires de la direction inclus dans le rapport sont ceux de Mmes Beaudoin, Cameron et Constantin. Le rapport d’évaluation indique que la direction avait décidé que Mme Cameron ne superviserait plus le travail du fonctionnaire et que Mme Constantin assumerait cette tâche tout en conservant son rôle de superviseure des réviseurs. Le fonctionnaire était d’accord avec cette décision. Les réponses du fonctionnaire à l’égard de certains des commentaires de la direction ont été incluses au rapport d’évaluation.

32        Parmi les problèmes signalés dans le rapport d’évaluation, il y avait le choix des sources, le manque de clarté dans la rédaction, des carences au niveau de la consultation des sources et l’utilisation d’avis de non-responsabilité. De plus, les discussions du fonctionnaire avec des sources orales n’étaient pas toujours bien documentées. Mme Beaudoin a dit que la direction avait conclu que la charge de travail du fonctionnaire était équitable et que contrairement à l’allégation du fonctionnaire, elle ne signalait pas ses erreurs plus souvent que celles des autres employés.

33        À la suite de discussions qui ont été tenues avec le fonctionnaire les 16 juin et 14 juillet 2011, une entente de rendement entre la direction et le fonctionnaire a été établie pour la période du 14 juillet au 30 septembre 2011 (pièce E-11, onglet 8). Mme Beaudoin a dit que les objectifs fixés dans l’entente de rendement étaient tirés de la description de travail du fonctionnaire et qu’ils se trouvaient dans l’énoncé des critères pour le recrutement des effectifs.

34        Le 21 décembre 2011, à la suite d’une rencontre avec le fonctionnaire et Mme Constantin pour discuter du progrès relatif à son rendement, Mme Beaudoin a fait parvenir au fonctionnaire un courriel résumant leur discussion et soulignant les défis qu’il y avait à relever (pièce E-1, onglet 9). Entre autres, le fonctionnaire a été informé que Mme Constantin mettrait à jour le tableau de suivi de son rendement pour y noter les progrès et les points à améliorer. Il a aussi été informé que la direction s’attendait à ce que toutes les préoccupations qui avaient été soulevées dans le tableau soient adressées.

35        Le tableau de suivi du rendement du fonctionnaire a été préparé par Mme Constantin, en collaboration avec Mme Beaudoin, pour la période du 14 juillet au 21 décembre 2011 (pièce E-1, onglet 10).

36        L’évaluation du rendement du fonctionnaire pour la période de janvier à mai 2012 a été rédigée par Mme Constantin en collaboration avec Mme Beaudoin (pièce E-1, onglet 12). Elles ont constaté une certaine amélioration au niveau de la qualité, mais elles ne pouvaient pas conclure à un rendement suffisant parce que le nombre de rapports produits par le fonctionnaire était en deçà de la moyenne de 4 rapports par mois produits par les autres agents de recherche. La moyenne du fonctionnaire était de 3.5 rapports par mois.

37        Le 23 juillet 2012, Mme Beaudoin a envoyé au fonctionnaire un courriel (pièce E-1, onglet 13) résumant des discussions qui avaient été tenues entre elle, Mme Constantin et lui les 18 et 23 juillet, concernant l’évaluation de son rendement pour la période de mai à la mi-juillet 2012 (pièce E-1, onglet 15). Mme Beaudoin a affirmé qu’un agent de recherche avait besoin d’environ 6 mois en moyenne pour être à l’aise avec le travail. Selon Mme Beaudoin, la qualité des rapports du fonctionnaire s’était détériorée pendant cette période. Lors de ces entretiens avec le fonctionnaire, il a été question de chaque dossier qui avait posé problème. Dans son courriel, Mme Beaudoin a indiqué qu’elle et Mme Constantin n’étaient pas satisfaites de la qualité de ses rapports de recherche et elle a réitéré les 13 lacunes qui avaient été soulevées avec lui. Le courriel mentionne, entres autres, ce qui suit :

[…]

Nous t’avons plusieurs fois suggéré des outils de travail afin d’améliorer ton rendement, que ce soit au niveau de l’analyse, de la rédaction ou de la production. Il semble que ces outils, i.e. le plan de recherche, une première ébauche de questions, le rapport d’activités quotidien, n’aient pas donné les résultats que nous escomptions. De plus, tu n’as pas toujours suivi nos directives concernant l’utilisation de ces outils de travail; par exemple, bien que l’entente de rendement signée en juillet 2011 mentionne explicitement que pour chaque rapport, tu dois fournir un plan de rédaction, tu ne l’as fait qu’à une seule occasion. Il est difficile pour nous de t’aider à atteindre les objectifs si tu n’utilises pas les moyens que nous mettons à ta disposition.

Nous nous attendons donc à ce que tu suives les consignes suivantes, comme nous te l’avions déjà demandé auparavant :

1) à tous les matins, tu iras rencontrer Annie ou Céline pour donner une mise à jour de ton travail, incluant les sources que tu comptes consulter lorsqu’on t’assigne une demande d’information

2) tu en profiteras pour clarifier tout soupçon de malentendu ou toute question qui n’est pas claire; dans le doute, pose des questions, nous sommes toujours disponibles

3) tu rédigeras un rapport d’activités quotidien, incluant le temps consacré à chaque tâche, que tu enverras en fin de journée à Céline et à Annie

4) tu rédigeras une ébauche de questions que tu comptes poser aux sources avant de les leur envoyer et nous les montrera et ce, de façon systématique pour chaque réponse et chaque source que tu entends consulter

5) tu te reliras plusieurs fois avant de remettre ton rapport aux réviseures

6) pour toute question en anglais qui sèmerait ne serait-ce que l’ombre d’un doute, ou tout terme en anglais dont tu n’es pas absolument sûr de la signification, veuille s.v.p. consulter Céline au préalable afin d’éviter un malentendu qui causerait des délais inutiles, comme ce fut le cas par le passé …

[…]

38        Selon l’évaluation du rendement du fonctionnaire pour cette période, sa production était toujours en deçà de la norme établie pour les agents de recherche, soit de quatre rapports par mois. À cet égard, l’évaluation note ce qui suit :

[…]

Nous devons travailler avec Placide afin qu’il arrive à produire à ce rythme et ce, le plus rapidement possible, i.e. dans les trois prochains mois, afin qu’il soit au même niveau que les autres agents de recherche.

39        Le 20 août 2012, Mmes Beaudoin et Constantin ont rencontré le fonctionnaire pendant plus de trois heures. Le but de la rencontre était de discuter des points à améliorer concernant son rendement. Il a également été question de l’entente de rendement de décembre 2011, qui n’avait pas fait l’objet d’une discussion formelle. Cette entente a été signée pendant la rencontre du 20 août. Les points discutés qui nécessitaient une amélioration immédiate ont été résumés dans un courriel que Mme Beaudoin a fait parvenir au fonctionnaire le 22 août 2012 (pièce E-1, onglet 14), qui se terminait ainsi :

[…]

Nous espérons que tu pourras mettre en application ces techniques et que notre discussion t’aura été profitable. Si tu as d’autres questions au sujet des techniques discutées ou si tu as besoin d’aide pour les mettre en application, n’hésite pas à nous en faire part.

En conclusion, nous t’avons réitéré que nous jugeons ton rendement insatisfaisant et que nous nous attendons à ta pleine collaboration afin de remédier à la situation.

Nous effectuerons une évaluation subséquente de ton rendement à la mi-octobre 2012 et nous attendons à une amélioration importante et ce, sur tous les points mentionnés ci-dessus et lors de la rencontre d’hier.

[Sic pour l’ensemble de la citation]

40        Mme Constantin a dit que de part et d’autre, le ton était coopératif durant la rencontre. Elle a dit que les outils mis à la disposition du fonctionnaire comprenaient une série de documents de référence expliquant la méthodologie utilisée par la direction des recherches, par exemple comment faire des recherches; comment faire un rapport; comment choisir des sources ainsi que des rapports modèles. Elle a aussi fait valoir qu’elle et Mme Beaudoin, ainsi que les réviseurs, étaient disponibles en tout temps pour répondre aux questions du fonctionnaire.

41        Pendant les rencontres avec le fonctionnaire, de la rétroaction et des explications sur les commentaires étaient toujours fournies afin qu’ils puissent les appliquer à la rédaction de ses prochains rapports. Mme Constantin a expliqué que chaque rapport est révisé trois fois, parfois par des personnes différentes. La première révision est faite par le superviseur de l’agent de recherche. Par la suite, l’agent de recherche apporte les corrections suggérées et envoie cette version modifiée à un réviseur pour une révision en profondeur. À cette étape, le réviseur vérifie les sources, l’exactitude des informations, la structure du texte et tous les critères applicables. Cette deuxième révision est renvoyée à l’agent de recherche et est accompagnée des explications du réviseur relativement aux changements effectués et à ses recommandations. À cette étape, le réviseur rencontre généralement l’agent de recherche. Une troisième révision est faite par un autre réviseur, et a pour but de vérifier la finition, le langage, etc.

42        La direction a aussi autorisé des dépenses afin que le fonctionnaire suive des cours de formation. La première formation a eu lieu du 21 au 23 mars 2012, et était intitulée « Rédaction stratégique de rapports »; la deuxième formation a eu lieu du 1er au 3 août 2012, et s’intitulait « Rédaction en langage clair et concis » (pièce E-1, onglet 17).

43        Le 20 septembre 2012, Mme Beaudoin a envoyé un courriel au fonctionnaire (pièce E-1, onglet 18), lequel contenait un compte-rendu de leur rencontre de la veille avec Mme Constantin. Au cours de cette rencontre, Mmes Beaudoin et Constantin lui avaient remis ses objectifs de rendement et les critères s’y rattachant qui seraient évalués toutes les deux semaines. La première évaluation a eu lieu le 3 octobre 2012. Mme Beaudoin a expliqué qu’en rapprochant les périodes d’évaluation, elles et Mme Constantin pensaient aider le fonctionnaire puisqu’il aurait plus régulièrement de la rétroaction. De plus, une des réviseures, Kareen Martel, a été chargée de fournir du mentorat au fonctionnaire en fonction de l’évaluation des critères pour chaque rapport qu’il rédigerait. La charge de travail du fonctionnaire a été réduite, tel qu’il a été indiqué dans le courriel comme suit :

[…]

Nous allons te confier trois réponses par mois et réviserons cette charge de travail, qui est moindre que celle établie pour l’ensemble des agents de recherche, dans deux mois, en fonction de ton rendement. Nous avons décidé de ne te confier que trois réponses afin que tu puisses avoir l’occasion de travailler sur les points qui nécessitent amélioration, tel qu’indiqué dans les objectifs de rendement ci-joints, et en utilisant les ressources que nous t’avons fournies et qui sont à ta disposition depuis que tu es employé comme agent de recherches à la Direction des recherches.

Nous espérons que tu viendras nous consulter pour toute question ou toute préoccupation que tu pourrais avoir.

Outre les outils de travail mis à ta disposition, un rappel que le Service d’aides [sic] aux employés peut fournir du soutien si besoin est. Nous t’encourageons à nous informer de tout obstacle ou problème interne ou externe qui pourrait nuire à atteindre tes objectifs de rendement, tels que fixés hier et qui se trouvent dans le document ci-joint (objectifs de rendement).

[…]

44        En réponse à une question du fonctionnaire, Mme Beaudoin lui a dit dans un courriel daté du 25 septembre 2012 (pièce E-1, onglet 19) qu’il devait continuer à fournir ses rapports d’activités quotidiennes. À la question de savoir si les autres agents de recherche devaient le faire, Mme Beaudoin a répondu que cela se faisait à une certaine époque mais que cet exercice était devenu trop exigeant pour les superviseurs.

45        Mmes Beaudoin et Constantin ont tenu une rencontre avec le fonctionnaire le 3 octobre 2012 concernant son évaluation du rendement pour la période du 19 septembre au 3 octobre 2012. Elles lui ont dit que son rendement était insuffisant et que s’il n’y avait pas d’amélioration, l’employeur pouvait mettre fin à son emploi. Le même jour, Mme Beaudoin a fait parvenir au fonctionnaire un résumé de cette rencontre par courriel (pièce E-1, onglet 21), qui incluait ses objectifs pour la période du 4 au 17 octobre 2012. Le résumé incluait ce qui suit :

[…]

Tu as dit être d’accord avec nos évaluations de ton rendement jusqu’à présent. Tu as également dit avoir compris les objectifs de rendement et les trouver raisonnables.

Je t’ai également indiqué que la gestion est tenue de t’informer clairement de son insatisfaction face à ton rendement, et de t’en donner les raisons et des exemples, même si ce n’est ni agréable pour toi ni agréable pour la gestion.

Enfin, nous nous sommes mis d’accord que notre objectif commun était que tu améliores ton rendement pour qu’il soit satisfaisant et réponde aux exigences telles qu’énoncées dans les objectifs de rendement.

Nous t’avons réitéré le fait que nous sommes disponibles à tout moment pour te fournir conseils et aide, et que nous sommes ouvertes à tes suggestions afin d’améliorer ton rendement comme agent de recherche.

Nous t’avons également informé que la situation au chapitre de ton rendement est telle que l’on pourrait mettre fin à ton emploi si ton rendement ne s’améliore pas.

[…]

46        Mme Constantin a affirmé que le fonctionnaire était demeuré assez calme et que le ton de la rencontre était cordial.

47        Le 5 novembre 2012, Mme Beaudoin a fait parvenir au fonctionnaire un courriel auquel était jointe sa dernière évaluation du rendement pour la période du 4 octobre au 5 novembre 2012. L’évaluation portait sur les deux derniers rapports de recherche qu’il avait rédigés (pièce E-1, onglet 22). Il était mentionné dans le courriel que son rendement était toujours insuffisant. Mmes Beaudoin et Constantin ont rencontré le fonctionnaire le lendemain pour discuter de son rendement. Les commentaires à la dernière page de l’évaluation signée par le fonctionnaire (pièce E-1, onglet 23) indiquaient ce qui suit :

Aujourd’hui 6 novembre 2012, Placide, Annie et Céline ont passé en revue chacun des critères et leur évaluation. L’employé Placide a été informé que son rendement est insatisfaisant et que nous allons communiquer avec les Ressources humaines pour la suite à donner, vu les évaluations précédentes et le rendement toujours insatisfaisant. Placide a déclaré s’être attendu à avoir une évaluation ASSEZ SATISFAISANTE parce qu’il estime qu’il fait beaucoup d’efforts pour appliquer toutes les consignes que nous lui avons fournies.

48        Selon Mme Beaudoin, le fonctionnaire n’avait pas fait suffisamment d’effort.

49        L’évaluation du rendement du fonctionnaire pour la période du 6 au 28 novembre 2012 (pièce E-1, onglets 24 et 25) qui concluait à un rendement insuffisant comportait les commentaires suivants de Mmes Beaudoin et Constantin :

Bien que certaines améliorations surtout au niveau de la qualité de la rédaction aient été notées, un problème au niveau de la gestion du temps et de la qualité de la recherche persiste. De plus, la qualité de la communication nécessite également une amélioration. On s’attend également à une amélioration au niveau de la profondeur des entrevues avec les sources orales. Nous avons déjà mentionné ces points lors de plusieurs évaluations précédentes.

Durant la prochaine période d’évaluation, Placide aidera les agentes d’information pour identifier les mots-clés pour faciliter la recherche dans les cartables nationaux de documentation.

50        Mme Beaudoin a dit qu’étant donné que le rendement du fonctionnaire ne s’était pas amélioré de façon suffisante, celui-ci s’est vu attribuer le travail d’un agent d’information classifié EC-02. Ainsi, il a été affecté à l’attribution des mots-clés pour les documents contenus dans les cartables nationaux de documentation. Il devait produire seulement un rapport avant de passer au travail sur les mots-clés.

51        L’évaluation du rendement pour la période du 29 novembre au 18 décembre 2012 (pièce E-1, onglet 26) ne portait que sur les sources consultées pour le rapport sur Trinité-et-Tobago. Son rendement a été jugé insuffisant, notamment parce qu’il « […] a fait preuve d’un manque de rigueur flagrant en omettant de vérifier la nature, le mandat et la crédibilité de ces sources avant de les contacter ». De plus, il avait « […] de la difficulté à distinguer les sources pertinentes des sources non pertinentes ».

52        Pour la période d’évaluation du 18 décembre 2012 au 29 janvier 2013 (pièce E-1, onglet 28), aucun travail de rédaction de rapports de recherche n’a été confié au fonctionnaire en raison des problèmes qu’il éprouvait. Selon Mme Beaudoin, les problèmes du fonctionnaire avaient des conséquences sur la section, puisque cela empiétait sur le temps des réviseurs et de la direction. Leur tâche n’était pas de réécrire les rapports de recherche du fonctionnaire. Cela n’était ni efficace ni équitable sur le plan opérationnel.

53        La pièce E-1, onglet 29, consiste en une série de courriels entre Mme Beaudoin et le fonctionnaire concernant des demandes d’information qui lui ont été attribuées. Selon Mme Beaudoin, ses réponses n’avaient pas été fournies dans les délais prescrits.

54        À la question de savoir quelle avait été la réaction du fonctionnaire aux divers commentaires de la direction entre juillet 2012 et mars 2013, Mme Beaudoin a dit qu’il écoutait et faisait parfois des commentaires. Il n’y avait pas de problème de comportement.

55        En contre-interrogatoire, Mme Beaudoin a affirmé que la norme de quatre rapports par mois était communiquée verbalement et par écrit aux agents de recherche et qu’elle faisait partie des objectifs de rendement des agents de recherche.

56        Lorsqu’elle a été renvoyée aux notes d’évaluation du 19 juillet et 12 août 2010 rédigées par la superviseure du fonctionnaire, Mme Zmund (pièce E-1, onglet 4), Mme Beaudoin a dit avoir compris de la note du 12 août qu’il y avait eu certaines améliorations, c’est-à-dire que plus de travail était attribué au fonctionnaire. Elle a ajouté que le fonctionnaire n’avait pas relevé tous les défis, tel qu’il était indiqué dans la note du 19 juillet 2010 selon laquelle il avait reçu moins de travail que ses collègues.

57        Les réunions matinales avec le fonctionnaire duraient entre 10 et 15 minutes et incluaient certains sujets qui n’avaient pas de lien avec le travail. Mme Beaudoin ne se rappelait pas la fréquence de ces rencontres.

58        Le rapport d’évaluation du rendement du fonctionnaire pour la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2011 (pièce E-1, onglet 7) ne comprenait pas de page de signature. Mme Beaudoin ne savait pas si cette évaluation avait été signée. Elle a ajouté que ce n’était pas nécessaire pourvu que le contenu soit communiqué à l’employé. L’évaluation contient les commentaires du fonctionnaire. En ce qui a trait à sa charge de travail, le fonctionnaire n’en avait pas plus que les autres agents de recherche. Elle a dit que les commentaires du fonctionnaire n’ont pas eu pour effet de modifier son évaluation du rendement insuffisante.

59        Quant à l’évaluation du fonctionnaire pour la période de janvier à mai 2012 (pièce E-1, onglet 11), Mme Beaudoin a reconnu que des progrès avaient été notés. Bien que le rendement du fonctionnaire ait été jugé insuffisant, cette mention ne se trouve pas dans le rapport de rendement. L’évaluation couvrait une période de quatre mois. À la question de savoir si cette évaluation seule avait justifié un licenciement, Mme Beaudoin a répondu que non. Elle a aussi reconnu que l’évaluation dénotait une progression pendant ces quatre mois.

60        L’évaluation du fonctionnaire pour la période de mai à la mi-juillet 2012 (pièce E-1, onglet 13) incluait le commentaire suivant : « […] nous craignons de lui confier de nouvelles réponses à cause de la qualité douteuse des réponses qu’il a rédigées depuis mai (et avant). » Pour Mme Beaudoin, « et avant » signifiait depuis les commentaires d’évaluation du 19 juillet 2010. Lorsqu’il a été suggéré que Mme Constantin avait été satisfaite du travail du fonctionnaire, Mme Beaudoin a répondu que Mme Constantin avait dit qu’il avait fait des progrès.

61        Concernant les rapports d’activités quotidiens, Mme Beaudoin a réitéré qu’à une certaine époque, tous les agents de recherche devaient en produire un, mais que cela était devenu trop lourd pour les superviseurs. La direction a continué de les exiger pour les employés dont ils voulaient suivre le progrès, soit deux ou trois agents. Selon elle, ces rapports prennent environ 15 minutes par jour à préparer.

62        En ce qui a trait aux notes d’entrevue avec des sources, la pratique était de transcrire les notes dans la langue originale de la source. La langue de travail du fonctionnaire était le français et il était possible qu’il rédige ses notes dans cette langue.

63        À la question de savoir pourquoi le travail du fonctionnaire sur les mots-clés n’avait pas été évalué, Mme Beaudoin a répondu qu’il occupait toujours le poste d’agent de recherche et que l’évaluation était basée sur le travail de ce poste. Elle n’a pas demandé à la personne à qui le fonctionnaire se rapportait à cet égard de fournir une rétroaction relativement à son travail en cette capacité. Le fonctionnaire n’a pas été muté à un autre poste.

64        Mme Beaudoin a été renvoyée au courriel qu’elle avait envoyé au fonctionnaire le 11 mai 2011 (pièce E-11, onglet 30), dans lequel elle lui mentionnait qu’un rapport manquait de profondeur et que, entre autres, les consignes relativement aux sources et sa communication avec elle et ses collègues n’avaient pas été suivies. Elle a aussi été renvoyée à la réponse du fonctionnaire par courriel le même jour (pièce S-8) dont le dernier paragraphe se lisait comme suit :

[…]

[…] je ne vous cache pas mon inquiétude sur cet acharnement à déposer dans mon dossier tout malentendu sans chercher à en discuter avec moi? J’aimerais vous rencontrer pour en débattre parce que j’estime que cette façon de faire frise du harcèlement et produit un impact très négatif sur mon rendement, mon moral et voire ma santé.

65        Mme Beaudoin a dit que ce paragraphe l’avait quelque peu préoccupé. Elle ne se rappelait pas s’il y avait eu un suivi avec le fonctionnaire, si elle l’avait rencontré ou si elle avait répondu à son courriel.

66        En ce qui a trait à la norme visant à produire quatre rapports par mois, Mme Beaudoin a dit que les agents de recherche devaient faire à la fois de la recherche et de la rédaction. Elle a reconnu qu’à l’automne 2012, elle avait demandé au fonctionnaire d’être solliciteur pour une campagne de charité. Elle a affirmé ne pas avoir eu d’inquiétude à cet égard, malgré son opinion quant à la capacité du fonctionnaire de gérer de multiples tâches. Mme Beaudoin croyait avoir discuté avec son superviseur du fait qu’il s’agissait d’une expérience gratifiant pour le fonctionnaire qui pourrait avoir un impact positif sur son rôle d’agent de recherche.

67        À la question de savoir s’il pouvait arriver qu’un agent de recherche n’ait pas assez de travail pour atteindre la norme de quatre rapports par mois, Mme Beaudoin a répondu qu’elle ne se rappelait pas si une telle situation s’était produite par le passé. Elle a dit que la langue de travail n’avait aucune incidence sur la charge de travail.

68        Concernant son implication dans la décision de licencier le fonctionnaire, elle a affirmé que la décision ne lui revenait pas. Ses responsabilités relatives à l’évaluation du rendement du fonctionnaire ont cessé au moment du dernier rapport d’évaluation en date du 29 janvier 2012. Elle lui a confié d’autres tâches et le dossier a été transmis à la haute direction pour la suite.

69        Mme Beaudoin a ensuite été renvoyée à une note de service datée du 25 février 2013 à l’intention du secrétaire général, M. Coakley, concernant le licenciement du fonctionnaire. La note de service était signée par Barbara Wyant, directrice générale des ressources humaines et du perfectionnement professionnel de l’employeur (pièce S-1). Mme Beaudoin a affirmé ne pas avoir vu le document signé par Mme Wyant, mais qu’on lui avait demandé de confirmer certains faits qui s’y trouvaient. Elle a nié avoir participé à une discussion avec M. Coakely concernant le licenciement du fonctionnaire.

70        La note de service contient la phrase suivante : « Le 26 octobre 2012, la gestionnaire, Mme Céline Beaudoin, a confirmé que son rendement était toujours insatisfaisant et veulent procéder avec un congédiement en raison de son rendement ». Mme Beaudoin a témoigné que la décision de licencier le fonctionnaire n’était pas la sienne et qu’elle ne pouvait pas se prononcer sur quelque chose qu’une autre personne avait écrit. Elle n’en avait jamais discuté avec Mme Wyant.

71        Mme Beaudoin a reconnu avoir participé à une rencontre avec son directeur, Gordon Ritchie, Mme Wyant et M. Fréchette, directeur des relations de travail, mais ne se souvenait pas de la date de la rencontre.

72        Concernant l’évaluation du fonctionnaire pour la période du 18 décembre 2012 au 29 janvier 2013, Mme Beaudoin a été questionnée à savoir si elle se souvenait de la réaction du fonctionnaire. Elle a répondu ne pas se souvenir de la réunion. Lorsqu’on lui a dit que le fonctionnaire avait quitté la réunion avant la fin, Mme Beaudoin a dit qu’elle se souvenait qu’il ait agi comme tel dans une réunion et qu’elle croyait qu’il était alors en désaccord avec quelque chose qu’elle et Mme Constantin lui avaient dit. Elle se souvenait d’être allée rejoindre le fonctionnaire à son aire de travail pour reprendre le dialogue mais elle ne pouvait pas préciser après combien de temps. Mme Beaudoin a dit qu’elle avait été surprise par la réaction du fonctionnaire, puisqu’il s’agissait de la première fois qu’il quittait ainsi une réunion avant la fin.

73        À la fin du contre-interrogatoire, j’ai demandé à Mme Beaudoin si elle avait déjà recommandé le licenciement du fonctionnaire à qui que ce soit. Elle a répondu avoir discuté avec M. Ritchie des possibilités qui s’offraient, dont le licenciement. Elle a aussi discuté avec le directeur général intérimaire, M. McTaggart, à propos du fait qu’il fallait donner suite aux évaluations. À la question de savoir si elle s’était prononcée en faveur ou contre le licenciement, elle a hésité et a ensuite répondu ni pour ni contre.

74        Après ma question, Mme Beaudoin a affirmé qu’elle avait recommandé le licenciement du fonctionnaire le 6 novembre 2012.

75        En ré-interrogatoire, Mme Beaudoin a dit ne pas avoir participé aux discussions avec la haute direction concernant le licenciement du fonctionnaire. Elle ne se souvenait pas de la date du 26 novembre 2012. Elle était préoccupée par l’évaluation du fonctionnaire et se demandait comment améliorer la situation.

76        Mme Beaudoin a indiqué que l’organigramme du 8 février 2012 (pièce E-1, onglet 31) avait changé en janvier 2013, sans se souvenir de la date précise. Elle a dit que certains employés étaient alors en affectation ou en congé de maladie prolongé.

77        Mme Beaudoin a été renvoyée à l’évaluation pour la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2011 (pièce E-1, onglet 7), à laquelle le fonctionnaire avait inclus une note de Ashley Lawery sur son esprit d’équipe. Mme Beaudoin a dit que l’individu travaillait à l’unité des demandes d’asile. Pour Mme Beaudoin, cela ne faisait pas preuve de l’esprit d’équipe, puisque les évaluations sont basées sur des faits et non pas sur des opinions.

78        À la question de savoir combien d’heures par semaine le fonctionnaire avait consacrées à la campagne de charité, Mme Beaudoin a répondu qu’elle n’avait jamais été impliquée dans une telle campagne, mais qu’elle comprenait qu’il fallait y consacrer plus d’heures au début qu’à la fin de la campagne.

3. Mme Constantin

79        Mme Constantin était une agente d’analyse de la recherche depuis mars 2009. Depuis novembre 2010, elle occupe le poste d’agente principale d’analyse de la recherche. En cette capacité, elle supervise l’équipe des réviseurs et s’assure que les rapports de recherche sont rédigés selon la méthodologie applicable.

80        Mme Constantin a travaillé avec le fonctionnaire de 2009 à 2012. Lorsqu’elle était agente d’analyse de la recherche, il lui arrivait de réviser les rapports du fonctionnaire. Elle a été la superviseure du fonctionnaire de mai 2011 à mars 2013. En cette capacité, elle revoyait ses rapports de recherche, lui fournissait de la rétroaction afin que ses rapports répondent aux critères de la méthode appropriée et s’assurait qu’il avait les outils pour ce faire.

81        En ce qui a trait aux normes de production des réviseurs, Mme Constantin a affirmé qu’ils devaient en moyenne réviser une page par heure, ce qui comprend la vérification des sources et la correction de la grammaire et de la structure. Si le réviseur mettait plus d’une heure par page, cela pouvait vouloir dire que le rapport n’était pas rédigé selon les normes et qu’il y avait beaucoup de corrections à apporter. Leur rôle était d’identifier des problèmes et de recommander des solutions, non pas de réécrire les rapports.

82        Lorsqu’elle révisait les rapports du fonctionnaire entre mars 2009 et novembre 2010, elle a constaté qu’ils n’étaient pas toujours conformes aux normes de recherche et qu’il y avait beaucoup de corrections à apporter avant la publication.

83        Elle était d’accord avec le résumé des rencontres avec le fonctionnaire qui ont eu lieu les 1er et 2 décembre 2010, au sujet du rendement de ce dernier (pièce E-1, onglet 5). Mme Constantin a constaté qu’il devait faire plus d’effort pour suivre les conseils des réviseurs. Elle a de plus constaté qu’il n’avait pas complètement assimilé la méthodologie liée au travail d’un agent de recherche et que, par conséquent, la charge de travail des réviseurs était plus élevée, ce qui pouvait avoir un impact sur la production en général.

84        Concernant le tableau de suivi du rendement du fonctionnaire préparé par Mme Constantin en collaboration avec Mme Beaudoin pour la période du 14 juillet au 21 décembre 2011 (pièce E-1, onglet 10), Mme Constantin a dit que Mme Beaudoin décidait quand il fallait préparer un plan d’évaluation.

85        L’évaluation du rendement du fonctionnaire pour la période de janvier à mai 2012 (pièce E-1, onglet 11), a été rédigée par Mme Constantin, en collaboration avec Mme Beaudoin. Mme Constantin avait observé une certaine amélioration au niveau qualitatif, mais ne pouvait pas conclure que le rendement du fonctionnaire était suffisant parce que le nombre de rapports produits était en deçà de la moyenne de 4 rapports par mois produits par les autres agents de recherche.

86        La première page de l’évaluation pour la période du 6 au 28 novembre 2012 (pièce E-1, onglet 24) incluait ce qui suit en caractères gras : « Selon les normes, trois réponses par mois devraient être produits par l’employé ». Selon Mme Constantin, cette mention en caractère gras a été ajoutée pour que le fonctionnaire puisse se concentrer sur les points à améliorer.

87        Tel qu’il a été mentionné dans le rapport d’évaluation pour la période du 29 novembre au 18 décembre 2012 (pièce E-1, onglet 27), le fonctionnaire a été affecté à la tâche d’aider les agents d’information à attribuer des mots-clés aux documents contenus dans les cartables nationaux de documentation. Selon Mme Constantin, ces fonctions ont été attribuées au fonctionnaire parce son rendement ne s’améliorait pas et qu’on ne pouvait pas produire des rapports inexacts.

88        À la question de savoir s’il y avait eu des rencontres où le fonctionnaire n’avait pas réagi calmement, Mme Constantin s’est souvenue que lors de la rencontre concernant l’évaluation pour la période du 4 octobre au 5 novembre 2012, le fonctionnaire était moins calme que d’habitude. Le fonctionnaire n’était pas d’accord avec l’évaluation et pensait que son rendement pour cette période était suffisant.

89        Mme Constantin a affirmé qu’entre 2009 et mars 2013, elle n’avait pas eu de conflit avec le fonctionnaire. De plus, elle n’a pas remarqué de conflits entre le fonctionnaire et Mme Beaudoin.

90        En contre-interrogatoire, Mme Constantin a affirmé que la méthode appropriée que le fonctionnaire n’assimilait pas est demeurée la même et n’avait pas changé avec le temps.

91        Concernant le courriel du 21 décembre 2011, que Mme Beaudoin a envoyé au fonctionnaire à la suite de la rencontre du même jour (pièce E-1, onglet 9) et dans lequel on demande au fonctionnaire de rédiger un plan de recherche pour chaque rapport, Mme Constantin a dit que, généralement, les agents de recherche n’étaient pas obligés de faire de tels plans. Elle ignorait si le fonctionnaire était le seul à être obligé à le faire puisqu’elle n’était pas au courant des mesures concernant les autres employés.

92        Dans les commentaires à la dernière page de l’évaluation du rendement du fonctionnaire pour la période de janvier à mai 2012 (pièce E-1, onglet 11), il est noté que le fonctionnaire était en vacances en mars 2012. À la question de savoir si les congés ont une influence sur la norme de quatre rapports par mois, Mme Constantin a dit que la norme tenait compte des absences, des vacances et des réunions. Le fonctionnaire devait faire 16 rapports en 4 mois, mais il n’en a fait que 14.

93        À la question de savoir s’il était habituel ou exceptionnel qu’un réviseur se prononce sur une source, Mme Constantin a répondu qu’il ne s’agissait pas d’une mesure exceptionnelle, mais que ce n’était toutefois pas fréquent. L’agent de recherche a la responsabilité de faire une recherche exhaustive sur la source. Il arrive fréquemment qu’un réviseur doive enlever une source parce qu’elle n’est pas fiable. Par conséquent, d’autres sources devront possiblement être vérifiées, ce qui n’est pas toujours possible en raison des contraintes de temps. Ainsi, le contenu du rapport en est affecté, car il sera incomplet.

94        Concernant le rapport d’évaluation du 29 novembre au 18 décembre 2012 (pièce E-1, onglet 26), Mme Constantin a dit que le réviseur veille à ce que la qualité du rapport respecte une norme minimale. Si le travail du fonctionnaire était meilleur, la tâche des réviseurs serait allégée.

95        En ce qui a trait aux courriels qui faisaient état que le fonctionnaire n’avait pas répondu aux demandes d’information dans les délais prescrits (pièce E-1, onglet 29), Mme Constantin a reconnu qu’il était possible qu’un rapport ne soit pas remis à temps sans que l’agent de recherche en soit responsable. Le cas échéant, la direction en tient compte dans le rapport. Toutefois, si l’agent de recherche ne peut rejoindre toutes les sources, il doit le mentionner et donner le contexte, soit les raisons pour lesquelles il n’a pas pu les rejoindre et les mesures prises pour contacter d’autres sources.

96        Mme Constantin a été renvoyée à un échange de courriels entre elle et le fonctionnaire en date du 13 février 2012 (pièce S-10). Dans cet échange, elle l’informait des délais pour finaliser les réponses à des demandes d’information pour audiences concernant le Nigéria seraient repoussées à des dates ultérieures, qu’elle a précisées dans le courriel. À la question de savoir s’il s’agissait d’un exemple de modification des échéances, Mme Constantin a répondu que les délais avaient été modifiés par la force des choses et que ce n’était pas ce que la direction souhaitait. Cela démontrait que le fonctionnaire avait du mal à gérer des tâches multiples, ce qui faisait partie de ses objectifs. À la question de savoir si on remettait au fonctionnaire des dossiers qui n’avaient pas été complétés par d’autres agents de recherche, Mme Constantin a dit ne pas se souvenir que ce soit arrivé.

97        Mme Constantin a ensuite été renvoyée au courriel de Mme Beaudoin au fonctionnaire en date du 23 juillet 2012 (pièce E-1, onglet 13). Parmi les six consignes à être suivi par le fonctionnaire qui figuraient dans ce courriel, il y avait l’obligation de rencontrer soit Mme Beaudoin soit Mme Constantin tous les matins pour donner une mise à jour de son travail. Mme Constantin a dit que ces réunions se tenaient de façon régulière, mais pas tous les matins. Elle a dit que le fonctionnaire venait la rencontrer au moins une fois par semaine, sans toutefois préciser davantage. À la question de savoir s’il y avait la même attente lorsque le fonctionnaire travaillait sur les mots-clés, Mme Constantin a répondu que comme il ne travaillait pas sur les rapports de recherche, il ne venait plus la consulter. Il était possible que ces réunions aient eu lieu jusqu’en décembre 2012. La durée des réunions variait entre 5 et 20 minutes, selon les sujets et la complexité du rapport.

98        À la question de savoir à quoi servaient les rapports quotidiens d’activités du fonctionnaire, Mme Constantin a répondu qu’ils servaient à faire le suivi de l’avancement de son travail. À la question de savoir si elle donnait une rétroaction quotidienne au fonctionnaire, Mme Constantin a dit qu’elle le pouvait, mais que les rapports quotidiens étaient assez sommaires et peu détaillés. De plus, le fonctionnaire ne signalait pas les difficultés qu’il rencontrait. Par conséquent, elles étaient portées à lui fournir la rétroaction lorsqu’il soumettait les rapports. L’exigence de soumettre un rapport quotidien d’activités ne s’appliquait pas à tous les agents de recherche et a été mis en place pour aider le fonctionnaire dans son travail.

99        Dans un courriel adressé à Mme Beaudoin en date du 28 septembre 2012 (pièce S-11), Mme Constantin a mentionné que parmi les prochains objectifs de rendement du fonctionnaire, il devait y avoir la capacité de rédiger ses questions aux sources de façon autonome en se basant sur toute la rétroaction qu’il avait déjà reçue. Mme Constantin a témoigné qu’à cette époque, les superviseurs et réviseurs donnaient beaucoup de rétroaction au fonctionnaire sur les questions à poser aux sources. Elle a décidé qu’il avait eu assez d’aide et qu’il pouvait le faire de façon autonome. À la question de savoir si cela voulait dire que le travail du fonctionnaire s’améliorait, Mme Constantin a dit que ce n’est pas ce que le courriel laissait entendre. Le fonctionnaire devait devenir autonome.

100        Lorsqu’il travaillait sur les mots-clés, le fonctionnaire n’était pas sous la supervision de Mme Constantin. L’attribution des mots-clés est accomplie principalement par les agents d’information. Mme Constantin a expliqué que l’agent de recherche attribuait des mots-clés aux documents sur les droits de la personne qu’il lisait. Une fois le document est sauvegardé dans la banque de données, l’utilisateur peut entreprendre une recherche à l’aide de ces mots-clés.

101        Dans un courriel qu’elle a envoyé au fonctionnaire le 21 novembre 2012, concernant l’affectation relative aux mots-clés (pièce S-12), Mme Constantin a indiqué qu’ils n’avaient pas reçu de demande d’information en français. Mme Constantin a dit que le fonctionnaire rédigeait en français et qu’à l’époque, il n’y avait pas de demandes d’information en français. Selon elle, la langue n’avait pas d’incidence sur la charge de travail puisqu’il fallait mettre l’information à jour.

102        À la question de savoir si du travail de recherche avait été attribué au fonctionnaire après son affectation relative aux mots-clés, Mme Constantin a dit qu’il n’avait pas eu d’autres rapports à rédiger mais qu’il avait continué de travailler sur un dossier que lui avait été confié avant de se voir assigner les mots-clés.

103        Mme Constantin a été renvoyée à un courriel que le fonctionnaire lui avait envoyé le 13 février 2013, et qui comprenait son rapport d’activités pour le jour même (pièce S-13). Mme Constantin ne se souvenait pas du dossier en question et ne savait pas si Mme Cameron lui avait assigné ce travail.

104        Dans un courriel du 6 mars 2013, soit le jour de son licenciement, Mme Constantin a demandé au fonctionnaire de préparer une nouvelle réponse à une demande d’information (pièce S-14). Elle ne se souvenait pas que le dossier lui avait été assigné. Elle a dit que Mme Beaudoin était toujours au courant du travail qui était assigné aux agents de recherche.

105        À la question de savoir si le travail du fonctionnaire sur les mots-clés avait été jugé suffisant, Mme Constantin a dit que les fonctions du fonctionnaire étaient celles d’un agent de recherche classifié EC-03 et qu’elles n’incluaient pas le travail sur les mots-clés. C’est son travail d’agent de recherche qui a été évalué; du 18 décembre 2012 au 29 janvier 2013, le fonctionnaire n’a pas démontré un rendement suffisant. Mme Constantin ne se rappelait pas la réaction du fonctionnaire à la réunion du 29 janvier 2013 concernant son rendement et ne se souvenait pas s’il avait quitté le bureau de Mme Beaudoin avant la fin de la rencontre. Elle ne se souvenait pas non plus si le fonctionnaire l’avait rencontré le 1er février 2013 suite à son courriel du même jour (pièce S-20) pour discuter de la réunion du 29 janvier 2013, pas plus qu’elle ne se souvenait si le fonctionnaire lui avait dit qu’il porterait plainte contre Mme Beaudoin ou qu’il irait aux autorités compétentes.

106        À la question de savoir si des postes vacants à la direction des recherches avaient été pourvus en février 2013, Mme Constantin a dit qu’elle ne le savait pas.

107        En ré-interrogatoire, Mme Constantin a réitéré qu’elle ne se souvenait pas si le fonctionnaire avait dit qu’il porterait plainte contre Mme Beaudoin.

B. Pour le fonctionnaire s’estimant lésé

1. Le fonctionnaire

108        Le fonctionnaire a commencé son emploi chez l’employeur le 23 février 2009. Selon sa lettre d’offre d’emploi (pièce S-16), il était assujetti à une période de stage de 12 mois, qu’il a complété. Son rapport d’évaluation pour la période du 29 mai 2009 au 29 mai 2010, signé le 4 février 2010 par le fonctionnaire et son superviseur d’alors, Sean Dineen (pièce S-2), incluait les commentaires suivants de M. Dineen :

Placide a commencé le travail au Direction des Recherches (DR) en février 2009. Dans son temps au DR, il a préparé tout les RDIs assignés selon les normes qualitatives de la DR, et était capable d’incorporer la méthodologie des recherches du DR à son travail. Son travail était généralement clair, organisé et objectif. Cependant, les Demands d’info pour les Cartables présentent un défi pour lui; il doit mieux planifier/structurer ces réponses et évaluer les sources de façon appropriée.

Placide est un collègue qui est plaisant à travailler avec et il montre la fiabilité.

[Sic pour l’ensemble de la citation]

109        Le fonctionnaire a dit que son évaluation du rendement pour la période du 29 novembre au 18 décembre 2012 (pièce E-1, onglet 26) ne portait que sur sa réponse relative à Trinité-et-Tobago. Il n’était pas content de la conclusion parce que les éléments qui ont fait l’objet de l’évaluation n’étaient pas clairs. Il ne savait pas pourquoi l’évaluation n’était pas signée et ne se souvenait pas d’avoir vu une version signée de l’évaluation.

110        Le fonctionnaire a été surpris par son évaluation du rendement pour la période du 18 décembre 2012 au 29 janvier 2013 (pièce E-1, onglet 28). Entre autres, il s’est posé plusieurs questions sur ce qui a été évalué pour en arriver à une conclusion de rendement insuffisant. Il s’attendait à être évalué sur le travail relatif aux mots-clés. Mme Constantin lui avait dit qu’il faisait bien le travail sur les mots-clés.

111        Le fonctionnaire a fait référence à l’évaluation du 6 au 28 novembre 2012 (pièce E-1, onglet 25), et a affirmé qu’on ne lui avait pas dit qu’il ne préparerait plus de réponses aux demandes d’information et qu’on lui avait assigné d’autres dossiers de recherche entre le 21 novembre 2012 et le 6 mars 2013. À cet égard, il a mentionné son courriel à Mme Constantin en date du 13 février 2013 (pièce S-13), contenant son rapport d’activités de ce jour, ainsi que le courriel que lui a envoyé Mme Constantin le 6 mars 2013 (pièce S-14), lui assignant une nouvelle réponse à préparer.

112        Le fonctionnaire a dit qu’il travaillait généralement en français, parfois en anglais. Selon la norme, les notes devaient être prises dans la langue des sources. Il a ajouté qu’il prenait ses notes en français parce qu’on ne lui avait pas communiqué la norme à l’époque. De plus, on ne lui avait pas reproché de prendre des notes en français.

113        En ce qui concerne l’évaluation pour la période de janvier à mai 2012 (pièce E-1, onglet 12), le fonctionnaire a dit que Mme Beaudoin était d’avis qu’il n’était pas assez autonome pour rédiger des questions pour les sources orales. Il a été surpris par cette allégation parce qu’en général, il rédigeait les questions et les envoyait; il s’était constitué une banque de questions. S’il avait besoin d’aide, il en faisait la demande, surtout pour les questions à rédiger en anglais.

114        Dans la même évaluation, sous la rubrique concernant la communication orale efficace et les relations interpersonnelles efficaces, il est noté que le fonctionnaire devait améliorer son habileté à communiquer avec la direction et avec ses collègues. Il a été surpris par ce commentaire, puisque la communication faisait partie de ses tâches. En ce qui a trait à ses relations avec ses collègues, le fonctionnaire a dit qu’il les consultait au besoin. Il a fait référence à deux de ces demandes, l’une en date du 13 septembre 2011 et l’autre en date du 5 novembre 2012 (pièce S-18). De plus, il offrait de l’aide à ses collègues lorsqu’on lui en faisait la demande. À cet égard, il a donné neuf exemples de cas où il avait aidé ses collègues, le premier en 2010 et les autres en 2012 et 2013 (pièce S-19).

115        Le fonctionnaire a ensuite abordé son allégation qu’il était victime d’un traitement différentiel injuste. Il a dit que Mme Beaudoin lui avait fait des crises de colère à répétition et sans raison. Quand il a voulu voir le directeur, M. Ritchie, celui-ci a refusé. De plus, on lui a imposé certaines règles qu’il trouvait exagérées, comme les rapports quotidiens d’activités que les autres agents de recherche n’étaient pas obligés de faire. Il a fait ces rapports de février 2012 jusqu’à la fin de son emploi. La rédaction des rapports lui prenait entre 15 et 20 minutes par jour. À la fin de la journée, il devait réfléchir sur ce qu’il avait fait, le résumer et l’envoyer par courriel.

116        La direction a aussi exigé qu’il se rapporte à son superviseur tous les matins. Ces rencontres ont eu lieu en moyenne quatre fois par semaine. Parfois, il se présentait au bureau de sa superviseure et elle n’y était pas. Il retournait alors à son bureau. Le fait que Mme Beaudoin venait constamment le voir commençait à affecter son moral. À titre d’exemple, le fonctionnaire a raconté qu’en septembre 2012, il avait dû préparer un rapport et le remettre le vendredi après-midi. Même si aucune heure de retour n’avait été précisée, Mme Beaudoin lui a demandé le rapport huit fois ce jour-là. Elle n’était jamais satisfaite de ce qu’il faisait et il lui a demandé ce qu’il devait faire. Pour le fonctionnaire, la situation était devenue intenable et il ne savait pas ce qu’elle voulait.

117        Le fonctionnaire a ensuite décrit les crises de colère de Mme Beaudoin. Le 5 août 2012, il a été invité au bureau de Mme Beaudoin avec Mme Constantin. Il n’était même pas assis lorsque Mme Beaudoin lui a dit « Va-t’en, va-t’en, qu’est-ce que tu attends? Tu ne fais rien ». Le fonctionnaire a été surpris. Il a dit qu’elle s’était calmée à la suite d’une intervention de Mme Constantin.

118        Le 29 janvier 2013, il a reçu un courriel de Mme Beaudoin l’invitant à une rencontre pour discuter de son évaluation pour la période où il travaillait sur les mots-clés. Avant la rencontre, il a eu le temps de lire les commentaires et la conclusion de rendement insuffisant. Il est arrivé en même temps que Mme Constantin. Il a demandé à Mme Beaudoin sur quoi il avait été évalué. Elle a dit : « Trouves-tu normal ce que tu fais? », en parlant des mots-clés. Le fonctionnaire a dit qu’elle avait été en colère pendant quelques minutes et qu’il était toujours debout. Il s’est senti blessé et déçu. Il s’est demandé ce qu’il avait fait pour mériter un tel traitement. Il a préféré retourner à son bureau. Mme Constantin est venue dans son bureau et lui a dit de rester calme. Cinq minutes après son retour à son bureau, Mme Beaudoin est venue le voir et lui a demandé s’ils pouvaient discuter. Le fonctionnaire a dit qu’il n’avait pas parlé et qu’il lui avait fait signe de s’arrêter avec la main. Elle a poursuivi en disant qu’il voudrait peut-être qu’ils se parlent à un autre moment. Il ne l’a pas regardé et il avait la tête dans ses mains. Le fonctionnaire a dit qu’il est allé à l’hôpital le 30 janvier 2013 et par la suite pour d’autres examens.

119        Le 1er février 2013, le fonctionnaire a envoyé un courriel à Mme Constantin lui demandant de le rencontrer (pièce S-20). Il voulait discuter avec elle au sujet de l’incident du 29 janvier 2013. Lors de leur rencontre le jour même, il a dit qu’il ne comprenait pas pourquoi on lui avait donné une telle évaluation. Mme Constantin n’a pas parlé beaucoup, car c’est le fonctionnaire qui prenait la parole. Il a dit à Mme Constantin qu’il envisageait d’aller voir les autorités compétentes. Mme Constantin a dit que « Céline ne devrait pas faire ça ». Ils se sont alors quittés.

120        Le fonctionnaire a sollicité une rencontre avec Colleen Mahoney, la directrice intérimaire, afin de lui parler de l’incident. La rencontre a eu lieu le 5 février 2013. Il lui a dit qu’il n’avait pas été évalué sur le travail qui lui avait été assigné et qu’il avait fait, et qu’on lui avait dit que son rendement était insuffisant. De plus, il a dit à Mme Mahoney que sa santé en était affectée. Il lui a fait part du commentaire de Mme Constantin et lui a dit qu’il n’avait pas parlé à Mme Beaudoin depuis l’incident. Elle lui a répondu qu’elle essaierait de contacter Mme Beaudoin pour lui en parler et lui a précisé qu’elle partait en voyage pour une semaine.

121        Le fonctionnaire a sollicité l’aide de Mme Mahoney parce qu’il ne se sentait plus capable de travailler de cette façon. Toutefois, il ne lui a pas exprimé cette attente.

122        À son retour, Mme Mahoney est venue voir le fonctionnaire dans son bureau. Elle lui a demandé s’il avait recommencé à parler à Mme Beaudoin et il a répondu affirmativement.

123        Le 7 février 2013, le fonctionnaire a consulté un psychologue et a appelé M. Ritchie de sa maison. Il lui a laissé un message lui disant qu’il voulait lui parler des agissements de Mme Beaudoin. Le fonctionnaire n’a jamais eu de rencontre avec M. Ritchie entre le 11 février et le 6 mars 2013 (pièce S-6). Il voulait lui faire part du comportement de Mme Beaudoin et lui demander s’il pouvait se rapporter à une autre personne.

124        Le fonctionnaire a dit qu’il prenait des médicaments pour la tension, mais qu’après l’incident, la dose a été augmentée. Il a mentionné son problème de santé à Mme Constantin, qui lui a dit qu’il pouvait prendre quelques jours de repos, au besoin. Il a pris une semaine de repos et est retourné au travail.

125         M. Ritchie, Mme Bou Karam et Yves Rochon, le représentant syndical du fonctionnaire, étaient présents à la rencontre qui a eu lieu le jour de son licenciement, soit le 6 mars 2013. Le fonctionnaire ne s’attendait pas à ce qu’on lui parle de licenciement. Il venait de travailler sur deux rapports pour lesquels il n’avait reçu aucun commentaire négatif de la direction. Il a rédigé les rapports de 11 et 8 pages en moins de 2 semaines. Aussi, en février et mars 2013, on lui a demandé d’aider des collègues. Selon lui, ce n’est que dans le courriel du 3 octobre 2012 (pièce E-1, onglet 21), qu’il a pris connaissance pour la première fois d’un avertissement écrit concernant un possible licenciement. Il n’a pas reçu d’autres avertissements à cet égard entre le 3 octobre 2012 et le 6 mars 2013.

126        Le fonctionnaire a dit que Mme Beaudoin lui avait demandé de solliciter des fonds pour une campagne de charité, ce qu’il a fait entre juillet et septembre 2012 avec un collègue de la direction des recherches. Le début de la campagne a nécessité beaucoup d’heures de travail, que ce soit pour des réunions avec les solliciteurs ou pour rencontrer son collègue. Ils devaient envoyer des messages et distribuer les formulaires. Pendant les trois mois de la campagne, le fonctionnaire a consacré environ 20 heures de travail à ces fins.

127        Le fonctionnaire a fait référence à une série de courriels comportant des commentaires favorables sur son travail de la part de Mme Constantin (pièce S-21). Concernant les échéances à respecter pour les réponses, le fonctionnaire a mentionné deux courriels indiquant qu’il devait attendre des réponses des sources afin d’achever ses rapports (pièce S-22). Il a dit que le fait qu’il n’ait pas remis des rapports à temps ne découlait pas d’un manque de volonté. Parfois, les sources ne répondaient pas ou bien elles demandaient de l’argent. Il a aussi produit trois courriels en date des 16 septembre 2010, 24 mai 2011 et 10 novembre 2011, adressés à sa superviseure, Mme Cameron, dans lesquels il a indiqué qu’elle pouvait lui attribuer davantage du travail (pièce S-23). Il a joint son rapport hebdomadaire au premier de ces courriels.

128        Le fonctionnaire a affirmé qu’il n’avait pas vu son évaluation de 2011-2012.

129        En contre-interrogatoire, le fonctionnaire a dit qu’il croyait avoir remis le rapport sur Djibouti à Mme Constantin, en février 2013. Elle en a fait une étude préliminaire et ensuite une révision. Le fonctionnaire a produit un deuxième rapport sur le Djibouti.

130        En ce qui a trait à l’incident du 29 janvier 2013 avec Mme Beaudoin, lors d’une discussion subséquente avec elle dans son bureau il lui a demandé pourquoi elle avait agi ainsi. Elle lui a répondu qu’elle avait l’impression qu’il ne voulait pas travailler. Il lui a alors dit que si elle voulait qu’il fasse quelque chose et qu’il ne l’avait pas fait, il fallait le lui préciser. Mme Beaudoin n’a pas élaboré davantage. À la question de savoir s’il s’agissait d’un malentendu, le fonctionnaire a répondu que non et que c’était très clair qu’il fallait lui expliquer ce qui n’avait pas été fait.

131        En ce qui a trait à l’observation de Mme Constantin qu’il n’était pas assez autonome pour composer des questions à envoyer aux sources orales, le fonctionnaire s’est dit très surpris. Il a soulevé qu’il n’avait pas de problème à cet égard et qu’il avait constitué une banque de questions. Concernant les commentaires de Mme Constantin dans le rapport d’évaluation pour la période du 19 septembre au 3 octobre 2012 (pièce E-1, onglet 20) sur sa difficulté avec les questions, le fonctionnaire a dit que les commentaires étaient d’ordre général et qu’elle aurait dû dire qu’il n’avait pas de difficulté en français. Mme Constantin avait recommandé à un collègue de consulter le fonctionnaire pour avoir de l’aide en français. Si les commentaires de Mme Constantin visaient l’anglais, il n’était pas surpris. Lorsqu’il faisait un entretien téléphonique, il prenait toujours ses notes en français, car il n’était pas facile pour lui de les prendre en anglais. Si on lui parlait en anglais, il comprenait, mais il n’avait pas beaucoup de vocabulaire et il traduisait en français dans sa tête. Après qu’on lui ait fait la remarque concernant la prise de notes, il les a prises en anglais.

132        Le fonctionnaire a dit que selon son rapport d’évaluation pour la période du 29 mai 2009 au 29 mai 2010 (pièce S-2), il rédigeait les réponses en respectant les critères et la direction était satisfaite de son travail. Concernant le commentaire de son superviseur, M. Dineen, selon lequel les demandes d’information pour les cartables présentaient un défi pour le fonctionnaire, ce dernier a témoigné qu’à l’époque, il n’avait pas beaucoup travaillé sur les cartables et que c’était nouveau pour lui.

133        À la question de savoir s’il prenait ses évaluations au sérieux, le fonctionnaire a répondu qu’il les lisait et qu’il essayait de s’améliorer. Il a affirmé n’avoir jamais eu l’impression que l’emploi d’agent de recherche ne lui convenait pas. Il a dit à Mme Beaudoin qu’il voulait éventuellement devenir superviseur.

134        Le fonctionnaire a dit qu’il n’avait pas une nature conflictuelle, mais que sa relation avec Mme Beaudoin l’était. S’il y avait quelque chose avec lequel il n’était pas d’accord, il l’exprimait à Mme Beaudoin. En 2011, il a exprimé son désaccord par courriel à Mme Beaudoin, avec copie à la direction, concernant des remarques qu’elle avait faites. Il avait alors demandé qu’on donne suite à sa préoccupation.

135        Concernant le temps requis pour préparer un des rapports d’activités quotidiens qui comportait deux lignes (pièce S-17), le fonctionnaire a dit que la rédaction du rapport en question ne prenait que quelques minutes, mais que sa réflexion sur les activités dépendait des activités journalières.

136        En ré-interrogatoire, le fonctionnaire a dit qu’il a eu à produire les rapports hebdomadaires dès son entrée en fonction (pièce S-23). Il a dit que sous la supervision de Mme Constantin, le format des rapports a été changé à Excel et que l’on pouvait y voir les rapports de tous les employés.

137        Concernant l’incident du 29 janvier 2013, le fonctionnaire a dit qu’il n’avait pas accepté que Mme Beaudoin ait haussé le ton et qu’il n’en voyait pas la nécessité. Cela et le fait qu’elle soit en colère l’a poussé à quitter son bureau.

138        Concernant sa prise de notes lors des discussions téléphoniques, il n’a pas eu à faire d’entrevues téléphoniques en anglais après avoir été averti de ne plus prendre de notes en français si on lui parlait en anglais. Par conséquent, le problème ne s’est pas présenté de nouveau.

2. Catherine Smith

139        Mme Smith a commencé son emploi à la CISR le 4 juillet 2012, à titre d’agente d’information. Elle a été impliquée dans le projet sur les mots-clés. Le projet faisait partie de la conversion des cartables nationaux de documentation du format papier au format électronique. Il s’agissait d’un projet d’envergure puisqu’il fallait attribuer des mots-clés pour tous ces documents, soit 166 cartables qui pouvaient contenir entre 200 et 2000 pages chacun. Le travail consistait à choisir des mots-clés appropriés en fonction d’une liste préétablie. Pendant la période la plus achalandée, environ sept employés, y compris le fonctionnaire, travaillaient sur l’attribution des mots-clés.

140        Mme Smith a dit que le fonctionnaire avait été placé avec les agents d’information plutôt qu’avec les agents de recherche. Elle ne révisait pas son travail. Elle a témoigné que son travail était apprécié et ne nécessitait aucune révision. Mme Smith a dit qu’une autre employée n’avait pas fait un travail satisfaisant et que son travail relativement aux mots-clés avait dû être réattribué.

141        Mme Smith a témoigné qu’à un certain moment, sans préciser quand, elle a remarqué que Mme Beaudoin criait contre le fonctionnaire. Elle s’en souvenait parce qu’elle a trouvé cela bizarre. Les cris ont duré environ deux à trois minutes, soit le temps de la rendre inconfortable. Elle ne se rappelait pas ce qui avait été dit et elle a ajouté que le fonctionnaire n’avait pas parlé fort. Elle ne croyait pas avoir discuté de l’incident avec le fonctionnaire et, selon elle, il n’aurait pas été approprié d’aller voir Mme Beaudoin à ce sujet.

142        En contre-interrogatoire, Mme Smith a dit que son travail n’inclut pas la révision du travail des autres employés. Selon elle, l’incident avait eu lieu en 2013. Elle a réitéré qu’elle ne se souvenait pas de la teneur des propos de Mme Beaudoin. Elle a dit que le fonctionnaire était tendu et qu’elle ne l’avait pas approché à cet égard parce qu’ils n’étaient pas très proches l’un de l’autre.

143        En ré-interrogatoire, Mme Smith a dit que l’incident avait eu lieu peu de temps avant le dernier jour de travail du fonctionnaire à la CISR.

I. Résumé de l’argumentation

A. Pour l’employeur

144        L’employeur a soutenu que la question en litige est la suivante : est-ce que la décision de l’administrateur général de licencier le fonctionnaire pour rendement insuffisant était raisonnable?

145        L’employeur a soutenu que le cadre juridique est circonscrit par l’article 230 de la LRTFP et l’article 12 de la LGFP. L’employeur a avancé qu’il avait satisfait les quatre critères énoncés au paragraphe 131 de Raymond c. Conseil du Trésor, 2010 CRTFP 23, lui permettant deconclure que la décision de l’administrateur général quant au rendement insuffisant du fonctionnaire était raisonnable.

146        L’employeur a d’abord indiqué que les normes de rendement avaient été clairement communiquées au fonctionnaire. Il a cité 13 des pièces déposées en preuve à l’appui de cette allégation (pièce E-1, onglets 8, 9, 10, 13, 14, 16, 18, 20, 21, 23, 24, 27 et 28). En ce qui a trait aux rapports de rendement qui n’ont pas été signés par le fonctionnaire, l’employeur a fait valoir que le fait de ne pas avoir signé les documents ne veut pas dire qu’ils ne lui ont pas été communiqués. À titre d’exemple, il a mentionné le courriel de Mme Beaudoin au fonctionnaire en date du 15 juillet 2011, auquel était joint un tableau de ses objectifs de rendement et des mesures pour les atteindre (pièce E-1, onglet 8). Dans ce courriel, Mme Beaudoin a souligné que « Les objectifs sont basés sur ceux indiqués dans ton rapport d’évaluation 2010-2011 dont nous avons discuté le 16 juin et le 14 juillet 2011. » L’employeur a soutenu que la communication par courriel satisfait ce critère.

147        Quant au critère selon lequel le fonctionnaire devait être assujetti à des normes de rendement appropriées, l’employeur a soutenu que Mmes Beaudoin et Constantin ont témoigné que les exigences étaient liées à la description de travail du fonctionnaire. L’employeur a fait référence à la première activité principale du poste énumérée dans la description de travail, soit : « Produire des rapports de recherche en cherchant, en analysant et en évaluant les sources d’information et l’information; en effectuant des entrevues; et en rédigeant des rapports selon la méthodologie rigoureuse et le calendrier. » L’employeur a indiqué que cette exigence se trouvait aussi dans les objectifs de rendement du fonctionnaire, notamment pour la période du 14 juillet au 30 septembre 2011 (pièce E-1, onglet 8).

148        L’employeur a ensuite traité le critère voulant que le fonctionnaire ait reçu les outils, la formation et l’encadrement nécessaires pour atteindre les normes de rendement dans un délai jugé raisonnable. Il a approuvé des demandes de formation pour des cours que le fonctionnaire a suivis, soit un cours de rédaction stratégique de rapports, qui a eu lieu du 21 au 23 mars 2012, et un cours de rédaction en langage clair et concis, qui a eu lieu du 1er au 3 août 2012 (pièce E-1, onglet 17). De plus, une des réviseures, Kareen Martel, a été chargée de donner du mentorat au fonctionnaire en fonction de l’évaluation des critères pour chaque rapport qu’il rédigerait. Dès juillet 2011, il y a aussi eu des rencontres formelles et informelles presque quotidiennement avec Mmes Beaudoin et Constantin.

149        Concernant le délai raisonnable pour atteindre les normes de rendement, l’employeur a invoqué le témoignage de Mme Beaudoin selon lequel un agent de recherche a besoin d’environ six mois, en moyenne, pour être à l’aise avec ses fonctions. L’employeur a soutenu que la période visée par le plan de rendement du fonctionnaire, soit de juillet 2011 à novembre 2012, était raisonnable.

150        Selon le dernier critère énoncé dans Raymond, l’évaluation du rendement du fonctionnaire par la direction doit être faite de bonne foi. L’employeur a soumis que la bonne foi est présumée. Il a souligné que plusieurs personnes avaient évalué le rendement du fonctionnaire et qu’à part M. Dineen, les autres superviseurs avaient constaté des problèmes.

151        En ce qui concerne M. Coakely, il a pris connaissance de la note de service et de quelques documents et il en a discuté avec les gestionnaires. L’employeur a soumis que les témoignages de Mmes Beaudoin et Constantin ont démontré le sérieux et la rigueur de l’évaluation du rendement du fonctionnaire. L’employeur a soutenu qu’il n’avait pas été démontré que son évaluation était empreinte de malice ou de mauvaise foi ou que ce dernier avait fait l’objet de partialité ou d’un traitement inéquitable.

152        En ce qui a trait au témoignage du fonctionnaire concernant un conflit ouvert entre lui et Mme Beaudoin, l’employeur a fait valoir que le seul conflit avait eu lieu le 29 janvier 2013, soit après l’évaluation du rendement. Il a ajouté que le fonctionnaire devait démontrer que le conflit avait influencé l’évaluation. Il a soumis que toute amélioration dans le rendement du fonctionnaire était consignée dans les évaluations. De plus, le témoignage de Mme Constantin selon lequel le ton avec le fonctionnaire était coopératif n’a pas été contredit. L’employeur a soutenu que le fonctionnaire était incapable de répondre aux exigences de son poste.

153        Toutefois, pendant son argumentation, l’employeur a admis que l’évaluation du rendement du fonctionnaire pour la période du 18 décembre 2012 au 29 janvier 2013, qui a été jugée insuffisante, (pièce E-1, onglet 28) était invalide. Pendant cette période, le fonctionnaire était affecté au travail sur les mots-clés.

154        Concernant la mesure de licenciement prise par M. Coakely, l’employeur a soumis s’être fié à la note de service signée par Mme Wyant (pièce S-1), qui indiquait qu’étant donné qu’aucun poste EC-02 n’était disponible, la rétrogradation n’était pas une option. L’employeur a soutenu que je n’avais pas compétence pour trancher le caractère approprié de la mesure de rétrogradation ou de licenciement.

155        L’employeur a aussi soutenu que les Lignes directrices n’étaient pas obligatoires.

156        À l’appui de ses arguments, l’employeur m’a aussi renvoyé à : Plamondon c. Administrateur général (ministère des Affaires étrangères et du Commerce international), 2011 CRTFP 90 ; Mazerolle c. Administrateur général (ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CRTFP 6 ; Reddy c. Bureau du Surintendant des institutions financières, 2012 CRTFP 94 ; Agbodoh-Falschau c. Commission canadienne de sûreté nucléaire, 2014 CRTFP 4 et Swan et McDowell c. Agence du revenu du Canada, 2009 CRTFP 73.

B. Pour le fonctionnaire s’estimant lésé

157        En abordant les critères énoncés dans Raymond, le fonctionnaire a reconnu que la direction lui avait fourni les outils, la formation et l’encadrement nécessaires pour atteindre les normes de rendement.

158        Le fonctionnaire a indiqué que ses arguments principaux concernaient tout d’abord le fait qu’il n’avait pas été assujetti à des normes définies et appropriées et que celles-ci étaient vagues et anecdotiques. Deuxièmement, il a fait valoir que les normes applicables ne lui avaient pas été communiquées. Enfin, il a soulevé que son évaluation du rendement était empreinte de mauvaise foi.

159        Le fonctionnaire a d’abord abordé la question de savoir s’il avait été assujetti à des normes de rendement définies et appropriées. Il a soutenu que la direction n’avait pas fixé de normes quantitatives claires en ce qui a trait au pourcentage de coquilles et de fautes de grammaire, d’orthographe et de terminologie acceptables. L’accent étant surtout mis sur les réponses aux demandes d’information.

160        En ce qui a trait à l’évaluation pour la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2011 (pièce E-1, onglet 7), le fonctionnaire a soumis qu’il n’avait pas signé l’évaluation et qu’il s’agissait d’extraits de courriels contenant des commentaires qui étaient parfois des suggestions, parfois des critiques d’ensemble ou encore des exemples anecdotiques de la mauvaise compréhension du fonctionnaire. Sur le plan quantitatif, l’évaluation n’était pas très claire. Selon le fonctionnaire, il n’y avait pas de synthèse dans cette évaluation.

161        Le fonctionnaire a souligné qu’il n’avait pas eu d’évaluation du rendement pour l’exercice financier du 1er avril 2011 au 31 mars 2012. Mme Beaudoin a témoigné qu’elle préparait une évaluation annuelle pour chaque employé et elle ne se souvenait pas de ce qui s’était passé dans le cas du fonctionnaire. Selon le fonctionnaire, puisqu’il était scruté à la loupe, pourquoi n’y a-t-il pas eu une évaluation globale de son rendement pour cette période? Cela soulève un doute puisqu’il n’y avait pas de vision d’ensemble. Le fonctionnaire a soutenu que le fait que l’employeur établisse des normes de rendement sans produire une évaluation annuelle permettant de vérifier si ces normes ont été atteintes constitue une négligence flagrante. Le fonctionnaire a fait l’objet de huit ententes de rendement où les normes n’étaient pas identifiées et pour lesquelles les normes quantitatives n’ont pas toujours été mesurées.

162        Dans les rapports d’évaluation, la colonne d’évaluation fait office de réquisitoire contre le fonctionnaire puisque l’employeur fait étalage d’une panoplie d’erreurs. Toutefois, Mme Constantin a expliqué que pour éviter des erreurs, il y avait un processus strict de révision en trois étapes qui s’appliquait à tous les agents de recherche. Cependant, les agents de recherche n’étaient pas tous scrutés à la loupe. Le fonctionnaire a soumis qu’il était impossible de se relever du système de microgestion. De plus, l’employeur n’a pas évalué ses tâches de la fin novembre 2012 jusqu’à mars 2013.

163        Le fonctionnaire a ensuite soutenu que les normes ne lui avaient pas été clairement communiquées. Il a prétendu qu’il n’y avait pas de barème qualitatif et quantitatif et qu’il était à la merci de la microgestion de la direction, laquelle retenait contre lui des erreurs anecdotiques.

164        L’évaluation du rendement du fonctionnaire pour la période de janvier à mai 2012 (pièce E-1, onglet 12) faisait état d’une certaine amélioration. Mme Constantin a témoigné que le rendement du fonctionnaire pour cette période était insuffisant. Toutefois comme ce constat ne figurait pas sur son évaluation, le fonctionnaire a cru que son rendement était suffisant. Le fonctionnaire a souligné que, selon l’évaluation, il fallait lui confier le nombre de réponses qui correspondait à la norme, soit quatre par mois. De plus, de novembre 2012 à la fin de son emploi, l’employeur ne lui a transmis aucune norme de rendement.

165        Le fonctionnaire a ensuite soutenu qu’en évaluant son rendement, la direction s’est livrée à un exercice empreint de mauvaise foi. Il a soumis que la preuve démontrait que le processus était biaisé et qu’il reposait en grande partie sur un traitement différentiel et une conclusion préétablie.

166        À titre d’exemple, le fonctionnaire m’a renvoyé au premier paragraphe de la lettre de licenciement qui indique que son licenciement a eu lieu deux mois et demi après la dernière évaluation qu’il avait signée, soit le 20 décembre 2012. Par conséquent, la décision de le licencier a été prise sans tenir compte de son travail effectué du 18 décembre 2012 au 6 mars 2013. Les représentants de l’employeur ont refusé d’évaluer le travail d’un poste classifié EC-02 qu’il avait accompli. Le fonctionnaire a soumis qu’il avait travaillé en vain, puisqu’il ne pouvait pas se racheter. Le fonctionnaire a soutenu qu’il était injuste et déraisonnable de la part de l’employeur de ne pas tenir compte des derniers mois d’emploi d’un employé avant de le licencier pour rendement insuffisant. Le fonctionnaire a soumis que contrairement à Mazerolle, où le fonctionnaire s’estimant lésé avait été averti qu’il pouvait être licencié, en l’espèce, le fonctionnaire a été licencié sans préavis.

167        Comme deuxième exemple, le fonctionnaire a indiqué qu’en février 2013, il a pris une semaine de congé pour se rétablir. Malgré cela, il a complété deux réponses à des demandes d’information sur le Djibouti; ce travail n’a pas été évalué. Le fonctionnaire a soutenu que le fait que la direction ait oublié que ce travail lui avait été assigné est une preuve flagrante de mauvaise foi.

168        Le troisième exemple de la mauvaise foi de l’employeur présenté par le fonctionnaire concerne l’attribution du travail sur les mots-clés. Le courriel du 21 novembre 2012 de Mme Constantin (pièce S-12) indiquait qu’il y avait un manque de demandes d’information en français. Selon le fonctionnaire, la direction n’avait plus confiance en sa capacité à accomplir les tâches.

169        À titre de quatrième exemple, le fonctionnaire a soumis que la note de service à M. Coakely (pièce S-1) incluait un rapport unilatéral et inexact de l’évaluation du fonctionnaire par M. Dineen. La note de service indiquait que, selon l’évaluation de M. Dineen, le rendement du fonctionnaire était « passable », alors que ce terme ne figure nulle part dans l’évaluation.

170        De plus, la note de service faisait référence aux commentaires de Mme Zmund du 19 juillet 2010, qui relevaient certaines faiblesses du fonctionnaire, sans toutefois mentionner les notes du 12 août 2010 qui signalaient des améliorations. Le fonctionnaire a soumis qu’à deux reprises, la note de service à M. Coakely mentionne de l’évaluation de 2011-2012, alors que cette évaluation n’a pas été présentée en preuve. De plus, il a soumis que M. Coakely et Mme Beaudoin avaient reconnu que le rendement du fonctionnaire s’était amélioré de janvier à avril 2012, sans toutefois qu’il en soit question dans la note de service à M. Coakely.

171        Comme cinquième exemple, le fonctionnaire a soulevé la possibilité d’une rétrogradation. Il a soumis que l’employeur avait sciemment omis d’évaluer le travail qu’il faisait depuis novembre 2012 et au moment où la note de service a été soumise à M. Coakley. Selon le fonctionnaire, si l’employeur l’avait évalué pendant cette période, il aurait pu constater qu’il faisait bien son travail.

172        Comme sixième exemple de la mauvaise foi de l’employeur, le fonctionnaire a soutenu qu’il n’avait pas fait l’objet d’un nombre suffisant d’avertissements en ce qui concerne la possibilité d’être licencié. À cet égard, il a fait référence aux Lignes directrices où il est indiqué que parmi les principes directeurs guidant la décision de licencier ou de rétrograder un employé dont le rendement est jugé insuffisant, l’employé doit avoir « […] reçu un nombre suffisant d’avertissements quant aux conséquences auxquelles il s’exposait en persistant à ne pas offrir le niveau de rendement exigé ». Le fonctionnaire a souligné avoir reçu un avertissement écrit le 3 octobre 2012, et un avertissement oral lors d’une réunion le lendemain. Il a été licencié sur-le-champ cinq mois après ces avertissements. Le fonctionnaire a soutenu que cela démontre la mauvaise foi, le cynisme et la désinvolture de l’employeur, surtout que Mme Beaudoin avait recommandé son licenciement le 6 novembre 2012. Le fonctionnaire croyait que son emploi allait continuer. Il a soumis que dans toutes les ententes de rendement, il n’a jamais été question des délais pour se conformer aux normes de l’employeur. À l’appui de cet argument, le fonctionnaire a cité Morissette c. Conseil du Trésor (ministère de la Justice), 2006 CRTFP 10, au paragraphe 123.

173        Comme dernier exemple, le fonctionnaire a réitéré que l’employeur ne lui avait jamais expliqué pourquoi il n’avait plus confiance en ses capacités de rédaction de réponses aux demandes d’information. L’évaluation du rendement pour la période du 6 au 28 novembre 2012 (pièce E-1, onglet 25) n’en fait pas mention. En janvier 2013, l’employeur lui a assigné une réponse à une demande d’information sur le Djibouti. Le fonctionnaire n’a pas été surpris, parce qu’on ne lui avait jamais dit qu’il ne rédigerait plus de réponses aux demandes d’information. De plus, on lui a assigné une autre demande le 6 mars 2013, soit le jour de son licenciement.

174        Le fonctionnaire a ensuite abordé son allégation voulant qu’il ait été victime de traitement différentiel. Il a soumis que l’employeur lui avait imposé des attentes et comportements auxquels la plupart des agents de recherche n’étaient pas soumis, par exemple les rencontres quotidiennes et les rapports d’activités quotidiens. Quant au temps requis pour accomplir ces tâches, le fonctionnaire a témoigné que les rapports quotidiens nécessitaient entre 15 à 20 minutes par jour, alors que les rencontres duraient entre 5 à 20 minutes. Il a souligné que les rencontres n’avaient pas lieu tous les jours. Le fonctionnaire a soumis que les rencontres quotidiennes et les rapports d’activités quotidiens lui prenaient en moyenne 1 heure 40 minutes par semaine.

175        Selon l’employeur, les rapports d’activités étaient exigés pour aider le fonctionnaire à améliorer son rendement. Toutefois, Mme Beaudoin a témoigné que l’employeur avait cessé d’exiger des rapports d’activités quotidiens de tous les agents de recherche parce qu’ils nécessitaient trop de supervision. À la question de savoir si elle avait donné de la rétroaction au fonctionnaire sur ses rapports quotidiens, Mme Constantin a répondu que non, parce qu’ils étaient trop succincts. Selon la preuve, puisque les activités du fonctionnaire étaient discutées lors de ses rencontres avec Mmes Beaudoin et Constantin, la préparation des rapports devenait inutile. En raison du temps que le fonctionnaire devait consacrer à ces deux tâches, il bénéficiait de moins de temps que les autres agents de recherche pour se conformer à la norme de quatre rapports par mois exigée par l’employeur. De plus, le temps accordé à la campagne de charité a miné la possibilité que le fonctionnaire puisse atteindre les objectifs. À l’appui de cet argument, le fonctionnaire m’a renvoyé à Pugh c. Administrateur général (ministère de la Défense nationale), 2013 CRTFP 123, au paragraphe 146.

176        Le fonctionnaire a ensuite abordé la question du comportement de Mme Beaudoin envers lui. Il a fait état de quatre incidents à cet égard. Le 5 août 2012, alors qu’il avait été invité au bureau de Mme Beaudoin avec Mme Constantin, Mme Beaudoin, en colère, lui a sommé de quitter son bureau avant même qu’il puisse s’asseoir. Deuxièmement, en 2011, il a envoyé un courriel à Mme Beaudoin, avec copie conforme à la direction, dans lequel il a exprimé son désaccord concernant des remarques qu’elle avait faites. Il a demandé qu’on donne suite à sa préoccupation. Troisièmement, en septembre 2012, il devait remettre un rapport le vendredi après-midi. Bien qu’on ne lui ait pas donné d’heure fixe pour retourner le rapport terminé, Mme Beaudoin est allée le voir huit fois dans la journée pour le lui demander.

177        Le quatrième incident est celui du 29 janvier 2013. Le fonctionnaire a souligné le témoignage de Mme Smith qui a dit que Mme Beaudoin avait crié contre le fonctionnaire. Le fonctionnaire en a parlé à Mme Mahoney. Il a également écrit à M. Ritchie et lui a laissé un message sur sa boîte vocale à ce sujet. Le fonctionnaire s’est senti humilié par cet incident.

178        En guise de conclusion, le fonctionnaire a soutenu que la décision de l’employeur de le licencier était empreinte de mauvaise foi. Il a ajouté que les évaluations de l’employeur étaient déraisonnables et qu’il était pris dans une spirale dont il ne pouvait se sortir. Il a soumis que, selon la preuve, il était généralement apprécié par ses collègues. Il a soutenu avoir été soumis aux plans de rendement pendant 15 mois. De janvier à avril 2012, son rendement a été jugé suffisant, et de décembre 2012 à février 2013, son rendement n’a pas été évalué. L’employeur ne lui a jamais dit qu’il devait réussir à se conformer aux normes à une date déterminée.

179        À l’appui de ses arguments, le fonctionnaire m’a renvoyé à : Raymond; Agbodoh-Falschau; Mazerolle; Plamondon; Gauthier c. Administrateur général (ministère de la Défense nationale), 2013 CRTFP 94; Bahniuk c. Agence du revenu du Canada, 2011 CRTFP 75 et Djan c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2001 CRTFP 60.

C. Réplique de l’employeur

180        L’employeur a soumis que ses normes étaient définies et appropriées. Même si certains éléments ne sont pas quantifiables, comme la rigueur, les normes étaient claires. L’employeur a plaidé que rien dans la preuve n’indiquait que le fonctionnaire avait dit qu’il n’avait pas compris ce sur quoi il était évalué.

181        En ce qui a trait à l’évaluation du rendement du fonctionnaire pour 2011-2012, l’employeur a souligné qu’il y en a eu plusieurs pendant cette période.

182        Concernant l’argument du fonctionnaire selon lequel il ne pouvait répondre parfaitement à la norme parce qu’il est normal de faire des erreurs, l’employeur a fait référence à l’évaluation pour la période de janvier à mai 2012 (pièce E-1, onglet 11), dans lequel il avait soulevé des erreurs et des améliorations. Selon l’employeur, souvent les erreurs ne sont pas relevées parce qu’il n’est pas inhabituel d’en trouver dans les rapports. Il a toutefois soumis que les erreurs du fonctionnaire n’étaient pas normales compte tenu de son niveau et qu’elles étaient nombreuses.

183        Quant à l’évaluation du fonctionnaire relativement à son travail sur les mots-clés, l’employeur a soutenu qu’il voulait que le fonctionnaire se conforme aux normes de rendement d’un agent de recherche classifié EC-03, et non à celles d’un agent classifié EC-02.

184        En ce qui a trait à la recommandation de Mme Beaudoin, en date du 6 novembre 2012, visant le licenciement du fonctionnaire, l’employeur a fait référence à l’évaluation pour la période du 4 octobre au 5 novembre 2012 (pièce E-1, onglet 23) qui contient les commentaires suivants :

L’employé Placide a été informé que son rendement est insatisfaisant et que nous allons communiquer avec les Ressources humaines pour la suite à donner, vu les évaluations précédentes et le rendement toujours insatisfaisant.

185        Concernant la possibilité de rétrograder le fonctionnaire, l’employeur a cité Plamondon, au paragraphe 59, à l’appui de son allégation que l’arbitre de grief n’a pas compétence à cet égard.

186        L’employeur a soumis que l’évaluation du rendement du fonctionnaire avait été faite sur une période de 16 mois, soit de juillet 2011 à novembre 2012, et que rien n’a démontré que son rendement était suffisant.

187        En ce qui a trait à l’argument du fonctionnaire que ses collègues appréciaient son travail, l’employeur a soumis que l’évaluation du rendement d’un employé ne revient pas à ses collègues.

IV. Motifs

188        En vertu de la LGFP, l’administrateur général a le pouvoir de licencier un fonctionnaire lorsqu’il est d’avis que son rendement est insuffisant. La compétence d’un arbitre de grief saisi d’une affaire portant sur le licenciement d’un fonctionnaire pour rendement insuffisant est limitée par l’article 230 de la LRTFP, qui se lit comme suit :

230 Saisi d’un grief individuel portant sur le licenciement ou la rétrogradation pour rendement insuffisant d’un fonctionnaire de l’administration publique centrale ou d’un organisme distinct désigné au titre du paragraphe 209(3), l’arbitre de grief ou la Commission, selon le cas, doit décider que le licenciement ou la rétrogradation étaient motivés s’il conclut qu’il était raisonnable que l’administrateur général estime le rendement du fonctionnaire insuffisant.

189        Dans Reddy, l’arbitre de grief a résumé comme suit la jurisprudence ayant trait à la portée de la compétence d’un arbitre de grief dans de tels cas :

87 Puisque la Loi[LRTFP] est entrée en vigueur en 2005, l’article 230 a été pris en considération dans Raymond, Plamondon et Mazerolle. Les trois décisions en sont venues à la même conclusion concernant la portée de l’intervention de l’arbitre de grief. Le rôle de l’arbitre de grief est de déterminer s’il était raisonnable que l’employeur juge que le rendement de l’employé était insuffisant, pas si le licenciement était raisonnable. Si l’évaluation de l’employeur selon laquelle le rendement de l’employé était insuffisant est raisonnable, je dois conclure que le licenciement qui en résulte est justifié, et je ne peux pas intervenir dans cette décision, puisque ma compétence est épuisée. Le licenciement ne peut être annulé que si l’évaluation de l’employeur selon laquelle le rendement était insuffisant est déraisonnable. Aucune autre conclusion n’est possible. Par exemple, je ne peux substituer mon avis à celui de l’employeur en ce qui a trait à l’évaluation du rendement de l’employé. Comme l’a reconnu l’arbitre de grief dans Raymond, au paragraphe 123, « […] l’employeur est dans une meilleure position qu’un arbitre de grief pour apprécier la qualité du rendement d’un fonctionnaire qu’il voit fonctionner au quotidien ». De la même façon, je ne peux substituer mon avis à celui de l’employeur en ce qui concerne l’évaluation des mesures ayant entraîné le licenciement et imposer une sanction que j’estime plus appropriée.

88 Ainsi, la portée de mon intervention se limite à répondre à une seule question : « Était-il raisonnable, selon les éléments de preuve présentés par les parties, pour l’employeur de juger que le rendement de l’employé en question était insuffisant? »

190        L’arbitre de grief dans Raymond a énoncé comme suit les critères appropriés afin d’apprécier si le jugement de l’administrateur général en ce qui concerne le rendement insuffisant du fonctionnaire était raisonnable :

[…]

131[…] Ainsi, je ne vois pas comment on pourrait conclure qu’il était raisonnable qu’un administrateur général estime le rendement de l’un de ses fonctionnaires insuffisant, si preuve est faite que :

· L’administrateur général ou les superviseurs qui ont apprécié le rendement du fonctionnaire se sont livrés à un exercice empreint de mauvaise foi;

· Le fonctionnaire n’était pas assujetti à des normes de rendement appropriées;

· L’employeur n’avait pas communiqué clairement au fonctionnaire les normes de rendement qu’il devait satisfaire; ou

· Le fonctionnaire n’avait pas reçu les outils, la formation et l’encadrement nécessaires pour atteindre les normes de rendement dans un délai jugé raisonnable.

[…]

191        Ces principes ont été repris dans Plamondon, Mazerolle et Reddy. À la lumière de la preuve, je propose donc d’apprécier le caractère raisonnable de l’évaluation du rendement du fonctionnaire par l’administrateur général en fonction de ces critères.

192        Tel qu’il a été mentionné, le fonctionnaire a reconnu que la direction lui avait fourni les outils, la formation et l’encadrement nécessaires pour atteindre les normes de rendement.

193        La prochaine question à trancher consiste à déterminer si le fonctionnaire a été assujetti à des normes de rendement appropriées et, le cas échéant, si elles lui ont été communiquées. Le fonctionnaire a plaidé, entre autres, que la direction n’avait pas fixé des normes quantitatives claires concernant le pourcentage de coquilles, et de fautes de grammaire, d’orthographe ou de terminologie acceptables. De plus, il a soutenu que le fait de ne pas avoir reçu une évaluation du rendement annuelle pour la période du 1er avril 2011 au 31 mars 2012 a fait en sorte que l’employeur n’a pas établi des normes de rendement et l’a privé de la possibilité de vérifier les attentes de la direction.

194        Mme Beaudoin a témoigné que les objectifs fixés dans les ententes de rendement venaient de la description de travail du fonctionnaire et qu’ils se trouvaient dans l’énoncé des critères pour le recrutement des effectifs. À titre d’exemple, le rapport d’évaluation du fonctionnaire pour la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2011 (pièce E-1, onglet 7) contient une partie intitulée « entente liée aux objectifs de travail … et résultats attendus ». Ce rapport contient aussi une page complète intitulée [traduction] « normes qualitatives de la Direction de la recherche en vertu duquel les objectifs doivent être atteints ».

195        Comme autre exemple, Mme Beaudoin a fait parvenir au fonctionnaire un courriel, le 15 juillet 2011, auquel était joint un tableau de ses objectifs de rendement et les mesures pour les atteindre (pièce E-1, onglet 8). Le courriel de Mme Beaudoin informait le fonctionnaire que les objectifs étaient basés sur ceux indiqués dans son rapport d’évaluation de 2010-2011, dont ils avaient discuté le 16 juin et le 14 juillet 2011.

196        La preuve a démontré que les rapports d’évaluation ou ententes de rendement du fonctionnaire contenaient tous des objectifs de rendement liés à la description de travail du fonctionnaire. De plus, ces documents contenaient une colonne intitulée « mesures particulières requises » ainsi qu’une colonne où la direction précisait les critères à utiliser pour mesurer le progrès du fonctionnaire par rapport aux objectifs.

197        Ayant lu attentivement ces documents, je constate que les objectifs et les normes y sont décrits de façon méticuleuse et détaillée. De plus, plusieurs documents déposés en preuve sont des courriels adressés au fonctionnaire qui fournissent un compte-rendu des discussions qu’il a eues avec Mmes Beaudoin et Constantin, et qui reprennent la rétroaction qu’il a reçue ainsi que les objectifs et les normes qu’il devait atteindre; à titre d’exemple, voir les courriels du 23 juillet 2012 (pièce E-1, onglet 13) et du 22 août 2012 (pièce E-1, onglet 14). Qui plus est, certains de ces courriels ont été reproduits dans les rapports d’évaluation ou les ententes de rendement. Par ailleurs, les évaluations contiennent des commentaires de la direction concernant des dossiers particuliers qui avaient été assignés au fonctionnaire. De plus, aucune preuve n’a démontré que le fonctionnaire a contesté les objectifs ou les normes, ou qu’il n’avait pas compris ces objectifs et ces normes.

198        Le fait que le fonctionnaire n’ait pas signé un ou des rapports d’évaluation ou ententes de rendement ne veut pas dire que les documents ne lui ont pas été communiqués. Il suffit que l’employeur puisse démontrer qu’il a remis le document au fonctionnaire ou que le contenu a été discuté avec lui. En ce qui a trait à l’évaluation de 2010-2011 (pièce E-1, onglet 7), bien qu’elle ne porte pas la signature du fonctionnaire, elle contient ses propres réponses aux commentaires de la direction. Il est donc clair qu’il a pris connaissance de ladite évaluation.

199        Je conclus que le fonctionnaire a été assujetti à des normes de rendement appropriées et que ces normes lui ont été clairement communiquées. Il reste maintenant à déterminer si l’appréciation du rendement du fonctionnaire était empreinte de mauvaise foi.

200        L’essentiel des arguments du fonctionnaire alléguant la mauvaise foi de la direction dans l’appréciation de son rendement se résume comme suit : le processus était biaisé, il reposait en grande partie sur un traitement différentiel et la conclusion était préétablie. Le fonctionnaire a cité quelques exemples à l’appui de ses allégations.

201        Selon le fonctionnaire, la note de service à M. Coakely (pièce S-1) souligne que l’évaluation faite par M. Dineen en mai 2010 était « passable », alors que ce terme ne se trouve pas dans ladite évaluation. Comme l’auteure de la note de service, Mme Wyant, n’a pas témoigné, il n’est pas possible d’affirmer si ledit mot était simplement une conclusion qu’elle a tirée. Toutefois, dans la prochaine phrase de la note de service, elle mentionne l’observation suivante de M. Dineen : « […] ses réponses devaient être mieux planifiées et structurées et qu’une évaluation plus appropriée de ses sources devait être entreprise ». À mon avis, l’utilisation du mot « passable » dans les circonstances et dans le contexte de la note de service n’établit pas qu’il y a eu une tentative délibérée d’influencer la décision de M. Coakely. D’ailleurs, en contre-interrogatoire, M. Coakely a témoigné que l’évaluation faite par M. Dineen contenait des éléments passables mais que le fonctionnaire ne faisait que débuter son travail et qu’il y avait déjà des éléments qui soulevaient des inquiétudes.

202        En ce qui a trait aux observations de Mme Zmund résumées dans la note de service, je conviens qu’elles n’incluent pas les améliorations notées par Mme Zmund, le 12 août 2010, concernant le fait que le fonctionnaire semblait devenir plus à l’aise à travailler sur plusieurs dossiers simultanément. Cependant, l’omission de ces notes n’en fait pas une preuve de mauvaise foi. La note de service semble constituer une vue d’ensemble de la situation du fonctionnaire et non pas un historique exhaustif. De plus, selon le témoignage de M. Coakely, il a pris la décision de licencier le fonctionnaire après avoir pris connaissance de la documentation, soit les évaluations du rendement du fonctionnaire, les courriels et les lettres. Il a aussi discuté avec les personnes impliquées et a tenu au moins une réunion en personne avec ces individus pour discuter de la documentation concernant le fonctionnaire.

203        Le fonctionnaire a plaidé qu’il n’avait pas reçu suffisamment d’avertissements en ce qui concerne un éventuel licenciement. Il a cité Morissette à l’appui de cette allégation. Il a fait référence aux Lignes directrices qui prévoient, entre autres, que « l’employé a reçu un nombre suffisant d’avertissements quant aux conséquences auxquelles il s’exposait en persistant à ne pas offrir le niveau de rendement exigé ».

204        En l’espèce, le fonctionnaire a été averti par écrit le 3 octobre 2012, et verbalement le lendemain, qu’à défaut d’une amélioration de son rendement, la direction pourrait mettre fin à son emploi. Le rendement du fonctionnaire a fait l’objet d’un suivi continu de juillet 2011 à décembre 2012. Malgré certaines améliorations notées par la direction entre janvier et mai 2012, son rendement a été jugé insuffisant de façon consistante. L’évaluation pour la période du 4 octobre au 5 novembre 2012, signée par le fonctionnaire le 6 novembre 2012, comprend les commentaires suivants de la direction : « L’employé Placide a été informé que son rendement est insatisfaisant et que nous allons communiquer avec les Ressources humaines pour la suite à donner, vu les évaluations précédentes et le rendement toujours insatisfaisant. » Je ne puis que conclure que le fonctionnaire était au courant qu’il risquait de perdre son emploi.

205        Il est vrai que l’employeur n’a pas officiellement averti le fonctionnaire avant le 3 octobre 2012, que son emploi était en jeu. Toutefois, l’employeur lui a accordé un mois de plus pour améliorer son rendement, ce qu’il n’a pas été en mesure de faire. Il n’y a pas de preuve voulant qu’une prolongation supplémentaire aurait amélioré son rendement.

206        De plus, avec tous les faits qui m’ont été présentés, le fonctionnaire n’a pas établi qu’il ne savait pas que son emploi était en péril. Les nombreux courriels, réunions, discussions et évaluations de son rendement, formels et informels, démontraient clairement l’insatisfaction de l’employeur.

207        Le fonctionnaire a souligné n’avoir été licencié que le 6 mars 2013. Il a ajouté que la direction n’avait pas tenu compte du travail qu’il avait accompli en janvier et février 2013 alors qu’il avait été affecté à l’attribution des mots-clés. Par conséquent, selon lui, on lui a laissé croire que son emploi continuerait.

208        L’employeur a admis que l’évaluation insuffisante du travail du fonctionnaire pour la période du 18 décembre 2012 au 29 janvier 2013 était invalide. Pendant cette période et jusqu’à son licenciement, le fonctionnaire travaillait sur le projet d’attribution de mots-clés, une tâche normalement accomplie par des employés classifiés EC-02. M. Coakely a témoigné que le fonctionnaire ne pouvait pas être évalué pour les tâches d’un poste classifié EC-02 puisqu’il occupait un poste classifié EC-03. De plus, le premier paragraphe de la lettre de licenciement renvoie à l’évaluation pour la période du 29 novembre au 18 décembre 2012, signée par le fonctionnaire le 20 décembre 2012. Afin de justifier le licenciement du fonctionnaire, l’employeur ne s’est appuyé que sur le rendement de ce dernier lorsqu’il exerçait les fonctions d’agent de recherche classifié EC-03. Je suis donc d’avis qu’en ne tenant pas compte du travail du fonctionnaire alors qu’il accomplissait les tâches d’attribution des mots-clés, l’employeur n’a pas agi de manière déraisonnable.

209        Bien qu’il me semble que la direction aurait pu mieux gérer le licenciement du fonctionnaire, je suis d’accord avec les propos suivants de l’arbitre de grief dans Mazerolle :

154 En dépit du malaise que je ressens quant à la manière que l’on a procédé au licenciement du fonctionnaire, je suis d’avis que cette question n’est pas de la compétence d’un arbitre de grief aux termes de l’article 230 de la LRTFP, car elle se rapporte uniquement à la décision de licencier le fonctionnaire et non à l’évaluation de son rendement. []

210        Afin de démontrer la mauvaise foi de l’employeur, le fonctionnaire a également allégué qu’il avait été victime d’un traitement différentiel. Il a soumis que l’employeur lui avait imposé des attentes et des comportements auxquels la plupart des agents de recherche n’étaient pas soumis, soit les rencontres quotidiennes et les rapports d’activités quotidiens. Mme Beaudoin a témoigné que bien qu’à une certaine époque tous les agents de recherche soumettaient des rapports d’activités quotidiens, cette exigence avait été abandonnée. Toutefois, la direction a continué de les exiger pour les employés dont ils voulaient suivre le progrès, soit deux ou trois agents. Le fonctionnaire a soumis que le temps requis pour se soumettre à ces exigences faisait en sorte qu’il disposait de moins de temps que les autres agents de recherche pour accomplir ses tâches et améliorer son rendement.

211        La preuve présentée a démontré que la direction avait imposé ces exigences au fonctionnaire de bonne foi pour l’aider à améliorer son rendement. Le fonctionnaire n’a pas démontré, au moyen de la prépondérance des probabilités, que ces exigences l’avaient désavantagé par rapport à ses collègues. Aucun de ses collègues n’a témoigné concernant leur charge de travail. De plus, la direction a éventuellement réduit la charge de travail du fonctionnaire de quatre à trois rapports par mois afin de l’aider à atteindre les objectifs de rendement.

212        Le fonctionnaire a fait valoir qu’il n’avait pas reçu une évaluation pour l’exercice financier 2011-2012 et que, par conséquent, il n’avait pas eu un aperçu d’ensemble de son rendement. Une telle évaluation n’a effectivement pas été déposée en preuve. Toutefois, il a été démontré que, pendant cette période, la direction a fait plusieurs évaluations du rendement du fonctionnaire, qu’elle a effectué des suivis avec lui et qu’elle lui a fourni de la rétroaction. J’estime donc qu’il était bien au courant des attentes de la direction.

213        Le fonctionnaire a soutenu que le comportement de Mme Beaudoin à son égard démontrait la mauvaise foi de l’employeur. Il a mentionné quatre incidents à cet égard. D’après le témoignage du fonctionnaire, l’incident le plus sérieux a eu lieu lors de la rencontre du 29 janvier 2013 pour discuter de son rendement pour la période du 18 décembre 2012 au 29 janvier 2013. Il a témoigné en détail au sujet de sa réaction à cette évaluation. Le 1er février 2013, le fonctionnaire a fait parvenir un courriel à Mme Constantin demandant une rencontre avec elle (pièce S-20) au sujet de l’incident du 29 janvier 2013. Il a témoigné que lors de leur rencontre le jour même, il lui a dit qu’il ne comprenait pas pourquoi on lui avait donné une telle évaluation. Selon le fonctionnaire, Mme Constantin n’a pas parlé beaucoup, car c’est lui qui prenait la parole. Il a dit à Mme Constantin qu’il envisageait d’aller voir les autorités compétentes. Mme Constantin a dit que « Céline ne devrait pas faire ça ». En contre-interrogatoire, Mme Constantin a témoigné qu’elle ne se souvenait pas d’avoir eu une rencontre avec le fonctionnaire le 1er février 2013. Toutefois, il faut évaluer l’incident du 29 janvier 2013 en tenant compte de l’admission de l’employeur, à l’audience, que l’évaluation était invalide et qu’il ne s’était pas appuyé sur ladite évaluation pour justifier le licenciement du fonctionnaire.

214        Quant aux autres incidents, il est possible que le fonctionnaire ait eu l’impression que sa relation avec Mme Beaudoin n’était pas parfaite. Cependant, en plus de Mme Beaudoin, le fonctionnaire a été évalué par plusieurs autres personnes pendant son emploi, soit M. Dineen, Mme Zmund, Mme Cameron et Mme Constantin. La preuve de part et d’autre est que le ton entre le fonctionnaire et Mmes Constantin et Beaudoin était généralement coopératif. Par ailleurs, l’incident du 29 janvier 2013 n’a pas eu lieu pendant que le fonctionnaire agissait comme agent de recherche, mais plutôt lorsqu’il a été affecté à l’attribution des mots-clés.

215        Mme Smith a témoigné avoir vu Mme Beaudoin crier contre le fonctionnaire. Toutefois, elle ne pouvait préciser la date de l’incident ni ce qui a été dit. Elle n’en a pas discuté avec le fonctionnaire. Vu l’absence de précisions, je ne retiens donc pas son témoignage concernant l’incident du 29 janvier 2013. De toute façon, même si Mme Beaudoin était fâchée, je ne crois pas que cela en soi fasse preuve de mauvaise foi.

216        Étant donné la preuve, je ne peux conclure que l’évaluation du rendement du fonctionnaire était empreinte de mauvaise foi. Rien dans la preuve ne laisse supposer que ses superviseurs entretenaient quelque préjugé à son égard ou que leurs évaluations du rendement aient été inéquitables ou déraisonnables. Je conclus qu’il était raisonnable que l’administrateur général estime le rendement du fonctionnaire insuffisant.

217        Le fonctionnaire a soutenu que l’employeur aurait dû envisager la possibilité de le rétrograder conformément au libellé suivant de la section 3 des Lignes directrices : « après avoir établi que l’employé est incapable de fournir le niveau de rendement exigé, on envisage de déployer suffisamment d’efforts pour lui trouver un autre emploi pour lequel il possède les compétences voulues. »

218        La note de service signée par Mme Wyant sur lequel s’est fié M. Coakely indique que la direction avait considéré la rétrogradation, mais qu’elle n’avait pas retenu cette option parce qu’il n’y avait pas de poste classifié EC-02 disponible et que le fonctionnaire nécessitait un niveau de supervision élevé. Aussi, M. Coakely a témoigné qu’à l’époque, une réorganisation faisait en sorte qu’il fallait placer les employés touchés. Face à un tel argument, je souscris aux commentaires suivants de l’arbitre de grief dans Plamondon :

59 M. Plamondon a argumenté que l’employeur n’avait pas fait d’efforts pour lui trouver un autre poste conformément à la politique du Conseil du Trésor. L’examen de cette question dépasse mon mandat qui est d’examiner s’il était raisonnable pour l’employeur de conclure que le rendement de M. Plamondon était insuffisant. []

219        En vertu de l’article 230 de la LRTFP, comme j’ai conclu qu’il était raisonnable que l’administrateur général estime le rendement du fonctionnaire insuffisant, je suis tenu de conclure que le licenciement du fonctionnaire était motivé. Comme l’a exprimé l’arbitre de grief au paragraphe 154 de Mazerolle, « Il n’y a aucun autre élément à ajouter à cette équation ». Je dois donc rejeter le grief du fonctionnaire.

220        Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

(L’ordonnance apparaît à la page suivante)

V. Ordonnance

221        Le grief est rejeté.

Le 6 avril 2016.

Steven B. Katkin,
arbitre de grief

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