Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé était le président de la section locale de son agent négociateur – il a déposé un grief contre une suspension d’une journée pour des commentaires qu’il avait formulés à l’égard d’un gestionnaire et de l’épouse de ce dernier, qui travaillait au même endroit – on a renoncé au premier pallier de la procédure de règlement des griefs et le grief a été rejeté au deuxième pallier – aucune décision n’a été rendue au troisième et dernier pallier dans le délai prescrit, et le fonctionnaire s’estimant lésé a renvoyé son grief à l’arbitrage – une semaine avant l’audience, l’administrateur général a remplacé la suspension d’une journée par une réprimande écrite et s’est opposé à la compétence de la Commission pour entendre le grief – la Commission a conclu que l’administrateur général ne pouvait se soustraire à l’arbitrage en remplaçant la mesure disciplinaire par une qui ne relevait pas de la compétence de la Commission après le renvoi du grief à l’arbitrage – elle a conclu que toute irrégularité dans l’enquête menée par l’administrateur général sur la conduite du fonctionnaire s’estimant lésé avait été corrigée par l’audience – elle a aussi conclu que l’administrateur général n’avait pas prouvé que les commentaires formulés par le fonctionnaire s’estimant lésé à propos du gestionnaire dépassaient la portée adéquate de ses fonctions en tant que représentant de l’agent négociateur – la Commission a toutefois conclu que le fonctionnaire s’estimant lésé savait ou aurait dû savoir que ses commentaires formulés à répétition sur l’épouse du gestionnaire constituaient du harcèlement, parce qu’il savait que deux enquêtes distinctes avaient conclu que ses commentaires n’étaient pas fondés – la Commission a conclu que la suspension d’une journée aurait été justifiée dans les circonstances si l’administrateur général ne l’avait pas substituée par une réprimande écrite.   Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  20160923
  • Dossier:  566-02-9244
  • Référence:  2016 CRTEFP 95

Devant un arbitre de grief


ENTRE

GAELAN JOE

fonctionnaire s'estimant lésé

et

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL
(Service correctionnel du Canada)

défendeur

Répertorié
Joe c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada)


Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage


Devant:
Margaret T.A. Shannon, arbitre de grief
Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Corinne Blanchette, Union of Canadian Correctional Officers - Syndicat des agents correctionnels du Canada - CSN
Pour le défendeur:
Allison Sephton, avocate
Affaire entendue à Abbotsford, en Colombie-Britannique,
du 5 au 7 novembre 2014, du 12 au 15 mai 2015 et du 3 au 5 novembre 2015.
(Traduction de la CRTEFP)

MOTIFS DE DÉCISION

I. Grief individuel renvoyé à l’arbitrage

1        Gaelan Joe, le fonctionnaire s’estimant lésé (le « fonctionnaire »), allègue que les mesures disciplinaires imposées à son endroit le 14 juin 2013 par le directeur adjoint de l’établissement Matsqui (l’« employeur ») étaient non justifiées, excessives et non fondées dans les faits et en droit. Il a allégué que les mesures disciplinaires que l’employeur a prises à son égard se fondaient sur une enquête entachée de partialité, incomplète et peu fiable.

2        Le fonctionnaire a déposé son grief le 16 juillet 2013. On a refusé le premier palier de la procédure applicable aux griefs et le grief a été refusé au deuxième palier le 2 août 2013. Le grief a été transmis au troisième et dernier palier le 20 août 2013. L’employeur n’a rendu aucune décision au dernier palier et le grief a été renvoyé à l’arbitrage le 8 novembre 2013.

3        Le 28 octobre 2014, l’employeur a remplacé la suspension d’une journée sans salaire par une réprimande écrite. Le 29 octobre 2014, l’employeur s’est opposé à la compétence de l’arbitre pour entendre le grief. Le 31 octobre 2014, les parties ont été informées que la question de la compétence pourrait être soulevée au début de l’audience prévue le 5 novembre 2014.

4        Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique, qui remplace la Commission des relations de travail dans la fonction publique et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l’article 396 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013, un arbitre de grief saisi d’un grief avant le 1er novembre 2014 continue d’exercer les pouvoirs prévus à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; LRTFP) dans sa version antérieure à cette date.

II. Résumé de la preuve

5        L’employeur a soulevé la question de la compétence de l’arbitre pour entendre cette question, puisque la mesure disciplinaire prise au départ, à laquelle le grief fait référence (une suspension d’une journée sans salaire) a été remplacée par une lettre de réprimande dans les jours précédant la présente audience.

6        L’employeur a imposé une suspension d’une journée sans salaire au fonctionnaire à la suite de commentaires déplacés que ce dernier a faits à propos d’Andrew Marshall, gestionnaire correctionnel, horaire et déploiement, et de sa femme, Janelle Marshall, une agente correctionnelle de niveau 2 (CX-02), qui, tous deux (les « Marshall »), travaillent à l’établissement Matsqui (l’« établissement »), où le fonctionnaire est aussi un CX-02.

7        La preuve dans cette affaire a exigé 10 jours d’audience et a compris les témoignages de huit témoins pour l’employeur et de cinq pour le fonctionnaire, y compris lui-même. Aucun des témoignages présentés n’avait une pertinence telle, pour les questions qui m’étaient présentées, qu’il justifiait d’être résumé séparément. Ils ont été inclus dans la mesure où ils étaient essentiels à la détermination qu’il m’appartenait de faire. Dans certains cas, ils n’ont pas été résumés en raison de la participation secondaire des témoins dans les questions qui m’étaient présentées. Il en est surtout ainsi parce que, de 2010 à 2012, l’établissement avait trois directeurs qui organisaient des enquêtes, recevaient des rapports d’enquête ou imposaient des mesures disciplinaires. Tout au long de cette période, la constance était Mark Bussey, qui, à tous les moments importants, était le directeur adjoint, Opérations (DAO). Sa preuve est présentée en détail plus loin dans la présente décision.

8        L’employeur a lancé une enquête sur la conduite du fonctionnaire après une période de deux ans pendant laquelle il avait formulé des allégations à l’endroit des Marshall. Le fonctionnaire a allégué que M. Marshall manipulait le système d’établissement de l’horaire au profit de sa femme. Ses commentaires étaient blessants, dévalorisants et offensants, parce qu’ils n’étaient pas vrais. L’employeur a mené deux enquêtes sur ces allégations, qui ont exonéré M. Marshall.

9        Même s’il savait qu’elles étaient fausses, le fonctionnaire a continué de faire les mêmes allégations, en affirmant qu’il avait le droit de le faire en raison de son rôle de président du syndicat local. Du point de vue de l’employeur, il a franchi la ligne d’une activité syndicale légitime au point de harceler les Marshall. Selon les témoins de l’employeur, sa conduite justifiait de prendre des mesures disciplinaires, à l’extrémité la moins élevée de l’éventail des mesures disciplinaires pour sa violation des « Règles de conduite professionnelles » (pièce 3, onglet 2) de l’employeur. L’employeur a conclu qu’une suspension d’une journée sans salaire était appropriée. Le 28 octobre 2014, la mesure disciplinaire prise à l’égard du fonctionnaire a été modifiée et remplacée par une lettre de réprimande (pièce 18).

10        À tous les moments pertinents pour son grief, M. Marshall était le gestionnaire correctionnel responsable d’établir l’horaire des agents correctionnels à l’établissement. Il effectuait le suivi des congés des employés, mettait à jour les tableaux de service, gérait les heures supplémentaires, saisissait les congés des agents correctionnels dans le Système des horaires de travail et du déploiement (SHD) et était généralement responsable de s’assurer que l’établissement disposait du bon nombre d’agents correctionnels. Le fonctionnaire était le président du syndicat local et il était souvent en désaccord avec la façon dont M. Marshall établissait l’horaire des agents correctionnels et, particulièrement, dont il établissait l’horaire de sa femme. Le fonctionnaire a formulé des commentaires à la direction à de nombreuses occasions, ce qui a mené l’employeur à mener une enquête sur M. Marshall à deux reprises pour favoritisme allégué et irrégularités dans son approche à l’égard de l’établissement de l’horaire.

11        Le 31 juillet 2012, M. Marshall a déposé une plainte de harcèlement à l’égard du fonctionnaire (pièce 3, onglet 6), dans laquelle il alléguait qu’à la lumière des événements survenus pendant la période commençant en mars 2010, le fonctionnaire a lancé une campagne d’attaques personnelles à son égard en raison de son approche liée à l’établissement de l’horaire. M. Marshall a déposé une première plainte de harcèlement en 2010, mais il l’a retirée après que M. Bussey lui a dit qu’il ne s’agissait pas d’une bonne idée et qu’elle aurait de graves conséquences sur sa carrière. Greg Larocque a enquêté sur la plainte et a conclu que deux des allégations formulées par M. Marshall étaient fondées.

12        En dépit du fait que les allégations du fonctionnaire à l’égard de M. Marshall ont fait l’objet d’une enquête à deux reprises par Brenda Lamm en 2011 (qui a donné lieu au « rapport Lamm », pièce 16) et par Kevin Morgan en 2012 (qui a donné lieu au « rapport Morgan »), dans laquelle on a conclu que M. Marshall n’avait pas mal agi, le fonctionnaire a continué de faire des commentaires offensants pendant les réunions syndicales-patronales à l’établissement et dans le cadre de réunions régionales où des représentants de l’ensemble des établissements de la région étaient présents. M. Marshall a été mis au courant des commentaires formulés par le fonctionnaire par des personnes qui assistaient à ces réunions, y compris Mike Boileau, qui était le directeur de l’établissement, et M. Bussey.

13        M. Marshall a affirmé qu’il trouvait que les commentaires du fonctionnaire étaient offensants pour lui, parce qu’ils étaient faux et qu’ils mettaient en doute sa crédibilité et son intégrité. Lorsqu’il établissait l’horaire pour les jours fériés, M. Marshall s’assoyait avec un représentant syndical. Ils distribuaient ensuite les quarts de travail pour les jours fériés à ceux qui avaient travaillé le moins de quarts de travail pendant des jours fériés, selon le nombre d’heures total travaillé par tous. Il a affirmé qu’il n’avait pas favorisé sa femme lorsqu’il établissait l’horaire pour les jours fériés afin de s’assurer qu’elle recevait un paiement d’heures supplémentaires, comme l’alléguait le fonctionnaire. M. Marshall a aussi affirmé qu’il veillait à répartir les heures de jour férié le plus équitablement possible en fonction du nombre d’heures que les agents avaient faites auparavant et conformément à la convention collective.

14        En décembre 2010, M. Marshall a été retiré de l’établissement afin de permettre à l’employeur d’enquêter sur les allégations continues que le fonctionnaire avait formulées à son égard. Le rapport Lamm en a été le résultat et a conclu que les allégations du fonctionnaire étaient non fondées. En fait, l’enquêteur a indiqué que M. Marshall avait bien répondu aux demandes de mesures d’adaptation et d’échange de quarts des employés, ce qui profitait à l’ensemble du personnel. En outre, il arrivait aussi à répondre aux demandes de congés du dirigeant syndical local.

15        On a exigé de M. Marshall qu’il ne traite pas les demandes de congé de sa femme dans le SHD et qu’il demande à un autre gestionnaire correctionnel de s’en charger. Il a respecté cette exigence au départ. Le fait de demander à un autre gestionnaire de traiter les demandes de congé de sa femme semblait prendre du temps et cela semblait ridicule aux yeux de M. Marshall, c’est pourquoi, après quelques semaines, il a décidé de traiter ses demandes de congé comme celles de tout autre agent correctionnel. Selon Mme Lamm, qui a enquêté sur les allégations, il ne s’agissait pas de favoritisme.

16        Lorsque Mme Marshall est allée voir son mari et lui a indiqué qu’elle se sentait aussi harcelée par le fonctionnaire, M. Marshall a modifié sa ligne dans l’horaire à une « ligne de rechange » afin qu’elle ne soit pas obligée de travailler avec le fonctionnaire. Le rapport Lamm a conclu qu’il ne s’agissait pas de favoritisme. Ce changement a été fait de façon ouverte et transparente, conformément à la politique. M. Marshall a consulté le conseiller en ressources humaines affecté afin de trouver une façon d’équilibrer les heures de travail de sa femme, ce qu’il n’aurait pas fait, selon son témoignage, s’il avait tenté de cacher quelque chose.

17        Après que la direction de l’établissement a accepté les conclusions de Mme Lamm, M. Marshall est retourné à l’établissement comme gestionnaire correctionnel d’une unité résiduelle. Il a éventuellement repris son poste à l’horaire et au déploiement, lorsque la direction lui a demandé de faire le ménage dans ces processus, même s’il était réticent à le faire. Il était mécontent et contrarié par le fait que la direction ne lui avait pas accordé le bénéfice du doute.

18        Le 26 août 2010, un autre gestionnaire correctionnel de l’établissement a mis M. Marshall au courant d’allégations formulées par le fonctionnaire, selon lesquelles il aurait retiré des employés du tableau de congé pour répondre aux demandes de Mme Marshall. Le personnel de l’établissement pouvait consulter un calendrier électronique afin de vérifier s’il y avait des possibilités de congé; il n’avait aucune répercussion sur le tableau de service. M. Marshall a affirmé qu’il s’agissait d’une autre allégation du fonctionnaire pour brouiller les cartes.

19        Au début de l’année 2012, le directeur a dit à M. Marshall que le fonctionnaire avait répété ses allégations, cette fois à la réunion du Comité régional de consultation patronale-syndicale. M. Marshall n’arrivait pas à comprendre pourquoi le fonctionnaire avait soulevé ces questions de nouveau, puisque Mme Lamm avait enquêté récemment à leur sujet. Le fonctionnaire avait commencé à formuler ses allégations auprès des représentants des administrations centrales et régionales. Une deuxième enquête a été demandée et, cette fois, c’est M. Morgan qui était l’enquêteur. Il a enquêté sur les mêmes allégations d’enquête et a conclu qu’elles n’étaient pas fondées.

20        Selon M. Marshall, en vérité, il accédait aux demandes d’un certain nombre de personnes, pas seulement à celles de sa femme. Lorsqu’un agent correctionnel voulait que son horaire soit modifié pour répondre à des besoins personnels, il s’efforçait de le faire de son mieux, dans le respect des règles. Personne ne s’est plaint lorsqu’il assumait son rôle à l’horaire et au déploiement à l’établissement Mountain. Selon M. Marshall, le fonctionnaire n’essayait que de le faire paraître sous un mauvais jour.

21        Le fonctionnaire a allégué que M. Marshall faisait preuve de favoritisme en permettant à des agents correctionnels d’échanger leurs quarts de travail. Ces allégations, comme les autres, ont été réputées être non fondées selon les rapports Lamm et Morgan. En dépit du fait que les allégations formulées par le fonctionnaire sur les pratiques liées à l’établissement de l’horaire ont fait l’objet d’une enquête et ont été jugées non fondées, il a continué de les répéter. Il savait que ses allégations étaient fausses et qu’elles ne constituaient pas des préoccupations syndicales légitimes. M. Marshall a estimé qu’il s’agissait de harcèlement. Lorsqu’il en a eu assez, en mai 2012, il est parti en congé de maladie.

22        Mme Marshall a affirmé qu’elle a déposé une plainte de harcèlement à l’endroit du fonctionnaire en juillet 2012, après avoir eu le sentiment d’être harcelée pendant plus de deux ans. Il a formulé à répétition des allégations à propos de son mari et a allégué qu’elle avait reçu un traitement particulier de la part de son mari pour l’établissement de son horaire. À compter du mois de mars 2010, le fonctionnaire a répété ses allégations selon lesquelles Mme Marshall recevait un traitement préférentiel de la part de son mari, qu’elle ne travaillait pas tous les quarts de travail qu’elle devait faire, qu’elle prenait des congés auxquels elle n’avait pas droit et que son mari manipulait l’horaire des agents correctionnels pour la faire travailler les jours fériés et lui faire faire des heures supplémentaires.

23        Son mari lui a dit que le fonctionnaire avait déposé des plaintes à l’égard de ses pratiques d’établissement d’horaire pendant une réunion du comité patronal-syndical de l’établissement à laquelle participait le directeur. Mme Marshall était extrêmement contrariée par ces commentaires, parce qu’ils étaient faux selon elle; le fonctionnaire ne les a jamais formulés à son égard. Elle a parlé à d’autres agents correctionnels de l’établissement et a constaté que les rumeurs étaient répandues et qu’elles étaient le sujet de discussions fréquentes parmi les membres syndicaux.

24        Après avoir fait cette découverte, Mme Marshall a envoyé un courriel (pièce 4) au dirigeant du syndicat local et aux personnes à qui elle avait parlé des rumeurs. Elle s’est dite préoccupée par ces discussions et par le colportage de rumeurs. Elle avait l’intention de se défendre contre les allégations et de prouver qu’elles étaient non fondées.

25        Le 27 mars 2010, Mme Marshall était en congé de maladie. À son retour le lendemain, on lui a dit que le fonctionnaire avait rencontré d’autres membres de son équipe afin d’expliquer pourquoi elle avait envoyé le courriel et pourquoi les allégations de favoritisme étaient formulées. Après cette réunion, elle a eu le sentiment que son environnement de travail a changé de façon radicale. On la repoussait. Elle n’était plus incluse dans les conversations qui se déroulaient dans le bureau du fonctionnaire avec les autres membres de l’équipe. Étant donné qu’elle avait le sentiment que l’environnement de travail était malsain et parce qu’elle et le fonctionnaire travaillaient dans la même équipe, Mme Marshall a envoyé un courriel au président du syndicat régional afin de demander l’aide du syndicat pour mettre fin aux rumeurs. Étant donné qu’aucune aide ne venait, elle a été transférée dans une équipe différente afin d’éviter de travailler avec le fonctionnaire.

26        Mme Marshall a effectivement modifié son horaire habituel prévu pour faire des quarts de travail de soir afin de s’occuper de ses enfants, tandis que d’autres le faisaient pour d’autres motifs personnels. Elle prenait un poste vacant certaines nuits ou trouvait quelqu’un avec qui échanger un quart de travail. Le syndicat s’était porté à la défense d’autres employés dans des situations semblables afin qu’ils puissent avoir des arrangements particuliers, mais Mme Marshall n’a reçu aucune aide du syndicat, même si elle était membre du groupe de négociation.

27        Mme Marshall a décrit les commentaires du fonctionnaire comme une atteinte à sa crédibilité, ce qui lui a causé un stress immense. Elle a commencé à utiliser des congés de maladie pour éviter de travailler. Le 3 décembre 2010, elle a posé sa candidature dans le cadre d’un concours interne et externe pour être admissible à un poste de gestionnaire correctionnel. Lorsqu’elle a été retenue et nommée à un poste de gestionnaire correctionnel intérimaire, M. Bussey, le DAO, l’a informée que le fonctionnaire lui avait dit que le syndicat n’appuyait pas son perfectionnement en tant que gestionnaire correctionnel. Il a également dit au DAO que le personnel n’aimait pas Mme Marshall et qu’il ne travaillerait pas avec elle. Elle a été extrêmement contrariée par ces commentaires. Elle croyait qu’elle méritait cette possibilité en raison de son rendement. Si les membres du personnel ne l’aimaient pas, selon elle, ce n’était pas en raison d’un geste qu’elle aurait commis, plutôt des rumeurs répandues par le fonctionnaire.

28        Mme Marshall s’inquiétait du fait que ces commentaires pouvaient entraver son avancement professionnel, c’est pourquoi elle a eu une confrontation avec le fonctionnaire. Il n’a présenté aucune excuse. Il lui a dit qu’elle était un « dommage collatéral » en raison de sa relation avec M. Marshall, qui était la véritable cible du syndicat. Elle a déposé une plainte pour harcèlement à l’égard du fonctionnaire, sur laquelle M. Larocque a enquêté.

29        Lorsque Mme Lamm a conclu, à la suite de son enquête sur les pratiques liées à l’établissement de l’horaire de M. Marshall, que Mme Marshall n’avait pas reçu un traitement exceptionnel que d’autres agents n’avaient pas reçu, Mme Marshall a témoigné en disant que le fonctionnaire a commencé à dire aux employés que l’enquête avait tort. Rien n’a changé après l’enquête et le fonctionnaire a continué à formuler ses commentaires non fondés.

30        En 2012, un nouveau directeur, Vince LeBlanc, a pris la relève à l’établissement. Il a rencontré Mme Marshall après que le fonctionnaire a formulé une plainte à son égard dans le cadre d’une réunion du comité patronal-syndical régional. Il lui a dit qu’il avait étudié de nombreuses plaintes sur ce qui se passait à l’établissement, y compris les allégations liées à l’établissement de l’horaire et les commentaires du fonctionnaire. M. LeBlanc a dit à Mme Marshall qu’il demandait à ce qu’une nouvelle enquête soit menée à propos des allégations, afin que tous passent à autre chose.

31        Le 29 juin 2012, Mme Marshall a rencontré le deuxième enquêteur, M. Morgan, qui voulait obtenir sa version des plaintes liées à l’horaire à l’établissement. Elle lui a dit que tout avait déjà fait l’objet d’une enquête et qu’elle n’avait rien de nouveau à ajouter. On lui a présenté une version expurgée du deuxième rapport d’enquête, dans lequel M. Morgan n’était arrivé à aucune conclusion importante. Son enquête était beaucoup plus vaste que les questions touchant l’établissement de l’horaire. Il a toutefois conclu, dans ses constatations, qu’il n’avait aucun élément nouveau lié à l’établissement de l’horaire sur lequel enquêter depuis le dernier rapport. Selon Mme Marshall, les rumeurs que le fonctionnaire avait répandues étaient non fondées.

32        Mme Marshall a ensuite rencontré le fonctionnaire afin de lui faire part de ses préoccupations, dont la plupart étaient indiquées dans son courriel de 2010 (pièce 4). Elle était préoccupée par le syndicat, puisqu’elle s’attendait à ce qu’il fasse preuve de courtoisie et qu’elle reçoive le même traitement que les autres membres du syndicat recevaient. Le fonctionnaire a convenu qu’il agirait différemment à l’avenir, mais rien n’a changé. Après la fin de l’enquête menée par M. Morgan, les plaintes et les rumeurs se sont poursuivies. Elles ont cessé uniquement lorsque Mme Marshall a déposé la plainte de harcèlement à l’endroit du fonctionnaire.

33        Mme Marshall savait que les plaintes avaient continué d’être soulevées aux réunions du comité patronal-syndical. Les choses n’ont pas pris fin, selon Mme Marshall, en dépit de deux enquêtes. Les rumeurs l’ont suivie même après avoir été exclue de l’agent de négociation. Entre mars 2010 et juillet 2012, son mari était gestionnaire correctionnel des horaires de travail et du déploiement (hormis pendant la période où il a été retiré de l’établissement). Lorsqu’elle était gestionnaire correctionnelle intérimaire, son horaire était établi principalement par le DAO, ce qui n’a pas mis fin aux rumeurs et aux plaintes du fonctionnaire. Cette situation ne prenait pas fin, ce qui explique pourquoi elle a déposé la plainte de harcèlement. Le fonctionnaire a déposé une plainte de pratique déloyale de travail à son égard lorsqu’elle était gestionnaire correctionnelle intérimaire.

34        Le comportement du fonctionnaire a eu des répercussions importantes sur la vie de Mme Marshall. Elle redoutait d’aller au travail et s’est exclue des aspects sociaux du lieu de travail. Elle a épuisé ses crédits de congé de maladie et de congé annuel pour éviter d’aller travailler. Les rumeurs se sont fait sentir sur sa famille tous les jours; elle n’est pas devenue le genre de parent qu’elle voulait être. Elle s’est fait prescrire des médicaments pour l’insomnie et l’anxiété afin de gérer la situation, qui continuait à l’ennuyer. Le fonctionnaire a mis en doute son intégrité et sa crédibilité à un moment où elle tentait de faire avancer sa carrière. Mme Marshall a tenté de se défendre, mais elle estimait que c’était inutile; ses collègues croyaient le fonctionnaire.

35        M. Larocque a enquêté sur la plainte de harcèlement déposée par Mme Marshall et a conclu que deux de ses allégations étaient fondées, soit l’interférence à sa carrière et l’allégation selon laquelle le fonctionnaire l’avait décrite en tant que dommage collatéral dans sa guerre contre son mari.

36        M. Bussey est devenu DAO à l’établissement en janvier 2010. À son arrivée, M. Boileau, le directeur de l’établissement à ce moment, a confié à M. Bussey le mandat de contrôler les dépenses liées aux heures supplémentaires. De nouvelles procédures ont été élaborées pour l’établissement de l’horaire et la substitution de quarts de travail afin de réduire les coûts liés aux heures supplémentaires. M. Marshall a reçu le mandat de mettre en œuvre ces changements et de gérer les tableaux de service. En conséquence, les coûts liés aux heures supplémentaires ont été réduits de façon importante.

37        Le fonctionnaire est allé voir M. Bussey afin de discuter de la façon dont M. Marshall gérait les horaires pour les jours fériés, les heures supplémentaires, les heures dues, la substitution de postes et le retrait d’employé du tableau de service pour un jour férié lorsqu’ils auraient dû travailler selon leur ligne d’horaire. Ces sujets étaient des sources de discussions constantes entre eux. Au départ, le fonctionnaire cherchait à obtenir de l’information sur la raison pour laquelle les changements avaient été mis en œuvre. La nature de ces conversations s’est rapidement transformée en plaintes sur la façon dont M. Marshall mettait en œuvre les directives du DAO.

38        Au départ, M. Bussey n’était pas préoccupé par le ton avec lequel le fonctionnaire formulait ses commentaires. La fréquence et la constance de ses plaintes ont mené M. Bussey à croire qu’il se passait autre chose. M. Bussey a confirmé auprès de M. Marshall qu’il respectait les instructions qu’il lui avait données, ce qu’il a ensuite indiqué au fonctionnaire.

39        Les plaintes du fonctionnaire sont devenues des commentaires sur l’horaire de Mme Marshall et des questions sur son intégrité. Selon M. Bussey, le fonctionnaire dépassait les limites du comportement professionnel. Son comportement montrait qu’il était inquiet, en colère et qu’il était contrarié lorsqu’il abordait des questions sur les heures supplémentaires et la substitution de quarts. M. Marshall est devenu le point de mire des préoccupations du fonctionnaire. Ses commentaires sont devenus plus forts et plus fréquents, et ils portaient souvent sur les horaires de Mme Marshall.

40        Dans une tentative visant à ce que la situation reste professionnelle, M. Bussey a rencontré le fonctionnaire et M. Marshall afin de déterminer la source du conflit. Après cette réunion, M. Bussey est arrivé à la conclusion que M. Marshall établissait l’horaire des agents correctionnels pour répondre à son propre horaire, en dépit du fait que les vérifications d’établissement de l’horaire des agents correctionnels à l’établissement n’avaient relevé aucun méfait. M. Bussey a néanmoins indiqué au fonctionnaire que rien n’indiquait que les processus d’établissement d’horaires de M. Marshall étaient inappropriés.

41        M. Bussey pensait que les choses s’étaient calmées peu de temps après ce rapport, mais, quelques mois plus tard, les rumeurs ont repris. Le fonctionnaire s’est plaint du fait que M. Marshall perturbait les employés en déplaçant les personnes dans l’horaire sans motif. Il avait formulé des commentaires semblables au cours de réunion du comité de consultation patronale-syndicale.

42        Lorsque l’utilisation des heures supplémentaires a baissé, le fonctionnaire a suggéré à l’employeur de relâcher son contrôle des heures supplémentaires. Il a affirmé que M. Marshall était excessivement zélé dans son application des normes de déploiement. M. Bussey a indiqué au fonctionnaire que l’employeur n’était pas prêt à relâcher son approche à l’égard des heures supplémentaires et que M. Marshall avait suivi les directives du DAO.

43        En tant que DAO, M. Bussey assistait aux réunions du comité patronale-syndical local, pendant lesquelles les commentaires formulés par le fonctionnaire reflétaient ceux qu’il lui avait formulés. Le fonctionnaire a répété ses allégations de favoritisme à l’égard de Mme Marshall. Il a également formulé des énoncés indirects à cet égard et remis en question la façon dont M. Marshall gérait l’établissement de l’horaire pour les jours fériés et les heures supplémentaires, et la façon dont il substituait les quarts de travail. Le fonctionnaire exprimait ses commentaires avec détermination, ce que M. Bussey a considéré comme la défense des membres du syndicat que le fonctionnaire représentait.

44        Lorsque les commentaires du fonctionnaire à propos de M. Marshall sont devenus plus personnels et qu’ils ont commencé à inclure des commentaires sur Mme Marshall, le directeur Boileau a dit au fonctionnaire qu’il dépassait les bornes et qu’il devait être respectueux. Les commentaires se sont poursuivis pendant les réunions et entre ces dernières et ils portaient également sur Mme Marshall. M. Bussey a commencé à filtrer ce qu’il disait à M. Marshall, qui devenait inquiet et contrarié par les commentaires. M. Bussey pensait que les commentaires étaient devenus si offensants qu’ils avaient outrepassé le rôle syndical du fonctionnaire.

45        Le fonctionnaire a formulé d’autres commentaires à propos de Mme Marshall à M. Bussey, particulièrement lorsqu’ils ont discuté des affectations des gestionnaires correctionnels intérimaires. Le fonctionnaire a dit à M. Bussey qu’il ne soutiendrait aucune possibilité en tant que gestionnaire correctionnel intérimaire pour Mme Marshall, puisqu’il était évident qu’elle n’avait pas le respect des employés. Les possibilités de perfectionnement pour les agents correctionnels sont données en vertu du pouvoir discrétionnaire du directeur, M. Bussey n’a pas donc tenu compte de l’opinion du fonctionnaire au moment de prendre ses décisions de nomination intérimaire. M. Bussey a rencontré Mme Marshall et l’a informée des obstacles avec lesquels elle serait aux prises au moment de gérer la perception des employés à son égard.

46        Les commentaires sur la nomination intérimaire de Mme Marshall n’ont été soulevés qu’une seule fois. Le fonctionnaire n’a pas soulevé l’absence de soutien du personnel à l’égard de Mme Marshall par la suite. Il a toutefois continué de formuler des commentaires sur le fait qu’elle avait obtenu un traitement préférentiel. Lorsque M. Bussey a dit à M. Marshall que le nom de sa femme avait commencé à faire surface dans les commentaires formulés par le fonctionnaire, M. Marshall a dit à M. Bussey qu’il était victime de harcèlement et qu’il s’agissait d’une autre attaque à son endroit; sa femme était utilisée comme pion contre lui.

47        Pas moins de 95 % des plaintes que M. Bussey a reçues sur la dotation et le déploiement à l’établissement provenaient du fonctionnaire ou d’une personne qu’il accompagnait. M. Bussey a lancé l’enquête menée par Mme Lamm à la fin de l’année 2010 à la suite d’une réunion avec le fonctionnaire, au cours de laquelle il a été déclaré que M. Marshall approuvait les demandes de congé de Mme Marshall. M. Bussey avait exigé de M. Marshall qu’il ne joue aucun rôle dans l’approbation des congés de Mme Marshall ou qu’il ne prenne aucune décision sur l’établissement de l’horaire pour les heures supplémentaires.

48        Dans ce cas, il semblait que le fonctionnaire avait raison selon M. Bussey. M. Marshall approuvait effectivement les congés de sa femme. M. Bussey était sans cesse préoccupé par les défauts de M. Marshall de se conformer à ses directives et les plaintes continues sur la façon dont il accomplissait ses fonctions liées à l’établissement de l’horaire. En consultation avec le directeur adjoint, il a été convenu de lancer l’enquête menée par Mme Lamm. M. Marshall a été affecté à l’administration centrale régionale pendant l’enquête.

49        En 2010, Mme Lamm s’est vue confier le mandat de se pencher sur toutes les questions liées aux heures supplémentaires, aux substitutions, ainsi qu’à l’horaire et au déploiement en général. L’employeur voulait s’assurer que rien d’autre ne se cachait dans le placard. Mme Lamm s’est employée à déterminer si M. Marshall manipulait le SHD, si les heures supplémentaires étaient distribuées de façon équitable, si M. Marshall avait un parti pris lorsqu’il approuvait les échanges de quarts de travail et s’il y avait un traitement préférentiel, du favoritisme, du népotisme ou tout autre méfait dans la création de l’horaire des agents correctionnels à l’établissement. L’employeur voulait être précis lorsqu’il affirmait qu’il ne se passait rien de douteux. On a demandé au fonctionnaire de présenter des renseignements précis sur ses allégations, et pas une preuve anecdotique, ce qu’il a éventuellement fait.

50        M. Bussey n’a jamais lu le rapport Lamm, mais le directeur l’a mis au courant de ses résultats. Mme Lamm a conclu que seules les allégations liées à l’approbation des congés de Mme Marshall étaient fondées. Elle a aussi conclu que M. Marshal avait exercé son pouvoir discrétionnaire à la limite de celui-ci plus souvent qu’il ne l’aurait dû. Le fonctionnaire a été mis au courant des conclusions et on l’a informé que M. Marshall reviendrait à l’établissement en février 2011 en tant que gestionnaire correctionnel d’unité. Un autre gestionnaire correctionnel était affecté aux fonctions liées à l’horaire et au déploiement afin de mettre fin aux critiques du fonctionnaire et de protéger M. Marshall d’autres plaintes.

51        M. Bussey était préoccupé par la détérioration de l’environnement des relations de travail avec M. Marshall dans le rôle de création de l’horaire et du déploiement. Un autre gestionnaire correctionnel a assumé ce rôle; il ne possédait toutefois pas les habiletés de M. Marshall pour contrôler et attribuer des heures supplémentaires. Les commentaires sur le népotisme ont pris fin, mais le coût des heures supplémentaires a augmenté de façon drastique. Le sous-commissaire adjoint, Opérations en établissement, Michael Hanly, a demandé à ce qu’ils reviennent sous contrôle, M. Marshall a donc repris son rôle lié à l’horaire et au déploiement. Les heures supplémentaires ont ensuite baissé.

52        M. Bussey a affirmé que le fonctionnaire n’était pas content du retour de M. Marshall; il a soulevé des préoccupations sur le comportement de M. Marshall dans son rôle lié à l’horaire et au déploiement et rien n’avait changé, selon lui. Il a commencé à déposer des plaintes sur les remplaçants prévus six semaines à l’avance, sur les heures supplémentaires et sur la dotation pendant les jours fériés, et il a demandé pourquoi les mêmes personnes étaient toujours substituées au quart de nuit. Le fonctionnaire a commencé à déposer ses plaintes à M. Bussey, et aux directeurs, M. Boileau et M. LeBlanc. Les plaintes se sont poursuivies jusqu’à ce que M. Leblanc dise au fonctionnaire qu’il ne recevrait aucune autre plainte sur des affaires ayant déjà fait l’objet d’une enquête. Le fonctionnaire a ensuite commencé à présenter les plaintes anciennes pendant les réunions bilatérales entre M. Bussey et lui-même, les réunions du comité patronal-syndical et d’autres réunions spéciales.

53        En 2012, M. Bussey a indiqué à M. Marshall que M. Hanly en avait assez que des problèmes liés à l’horaire à l’établissement soient soulevés pendant les réunions syndicales régionales. On a dit à M. Marshall qu’il devait améliorer sa relation avec le syndicat et avec M. Joe. Peu de temps après, M. Marshall a déposé une plainte de harcèlement à l’égard du fonctionnaire.

54        Shelley Boyer était gestionnaire correctionnelle intérimaire à l’établissement en octobre 2009. Elle y occupait un poste d’attache de niveau CX-02. Elle était présente dans le bureau du CX-02 en avril 2010, lorsque le fonctionnaire a formulé des commentaires selon lesquels M. Marshall avait fait preuve de favoritisme à l’égard de sa femme et qu’il approuvait ses demandes d’échange de quart de travail et d’heures supplémentaires. La salle était remplie d’agents et il est venu à l’esprit de Mme Boyer que le fonctionnaire tentait de rallier les troupes à sa cause dans sa bataille contre les Marshall. Mme Boyer en a informé M. Marshall, ce qui l’a contrarié, car il estimait que ces commentaires étaient des mensonges. Mme Boyer avait entendu à de nombreuses reprises le fonctionnaire formuler des commentaires vagues et, aux dires de Mme Boyer, non fondés sur M. Marshall. Elle les avait entendus pendant qu’elle assistait aux réunions du comité patronal-syndical en 2010.

55        M. Larocque a enquêté sur les plaintes de harcèlement que les Marshall ont déposées à l’égard du fonctionnaire. Dans le cadre de son enquête, il a utilisé les rapports Lamm et Morgan comme références. Il a aussi mis en application la décision rendue dans King c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2008 CRTFP 64, au moment de déterminer les droits du fonctionnaire comme représentant syndical. Si les déclarations du fonctionnaire étaient malveillantes ou délibérément fausses, elles n’étaient pas protégées. Étant donné que le rapport Lamm avait prouvé que les préoccupations que le fonctionnaire a soulevées dans le cadre de son rôle syndical étaient non fondées, ce que le rapport Morgan a prouvé plus tard, M. Larocque a conclu qu’elles étaient délibérément fausses et malveillantes.

56        Qui plus est, le rapport Morgan a déterminé que le fonctionnaire n’avait soulevé aucun nouvel enjeu qui n’avait pas été abordé précédemment dans le rapport Lamm. M. Larocque a conclu qu’il était adéquat pour le fonctionnaire de faire part de ses préoccupations quant à la façon dont M. Marshall s’acquittait de son rôle lié à l’horaire et au déploiement, mais que, lorsqu’il savait que le rapport Lamm n’avait relevé aucun méfait dans la conduite de M. Marshall, les commentaires et les allégations formulés sans relâche par le fonctionnaire sont devenus déplacés. Qui plus est, ses commentaires répétés constituaient un abus de pouvoir, selon M. Larocque.

57        Les allégations formulées par le fonctionnaire à l’égard de M. Marshall selon les témoins de l’employeur étaient rétrospectives. Ils ont témoigné qu’il n’avait rien soulevé de nouveau après les rapports Lamm et Morgan. Ils ont aussi témoigné qu’il n’y avait aucune preuve selon laquelle Mme Marshall obtenait un traitement différent de celui de tout autre agent correctionnel. Le fonctionnaire était au courant des rapports Lamm et Morgan, puisqu’il en avait discuté avec le directeur, M. Boileau, et M. Bussey lorsqu’ils ont été terminés. Si M. Marshall avait déposé sa plainte en 2011 plutôt qu’en 2012, M. Larocque serait peut-être arrivé à des conclusions différentes, parce que l’enquête Lamm n’avait pas encore été menée.

58        Lorsque l’on a remis au fonctionnaire des copies des rapports d’enquête sur le harcèlement, on lui a indiqué de ne les présenter à personne d’autre que son conseiller. Malgré ce fait, il a envoyé le rapport à Corinne Blanchette, une conseillère en relation de travail avec le syndicat, qui n’était pas sa conseillère à ce moment. Le fonctionnaire a aussi présenté les résultats à Gord Robertson, le président régional du Pacifique du syndicat, qui a ensuite envoyé un courriel au commissaire du Service correctionnel du Canada (SCC). M. Robertson n’avait pas le droit de savoir ce que contenait la plainte ou le rapport.

59        M. Larocque a conclu que la description faite par le fonctionnaire de Mme Marshall comme un dommage collatéral était destinée à attaquer M. Marshall. Le fonctionnaire a simplement supposé que M. Marshall échangeait des renseignements confidentiels avec sa femme. Il était clair, selon M. Larocque, que les intentions du fonctionnaire étaient de tenir M. Marshall hors de son rôle à l’horaire et au déploiement. Selon M. Larocque, le fonctionnaire n’a jamais nié avoir formulé des commentaires à propos de Mme Marshall, y compris sur ses possibilités d’affectation intérimaire et il n’a jamais nié avoir tenté d’influencer le processus de sélection pour un gestionnaire correctionnel intérimaire.

60        M. Hanly assistait à toutes les réunions du Comité patronal-syndical régional afin d’aborder des enjeux opérationnels. Des représentants du syndicat et de la direction de chacun des établissements de la région y assistaient. Le fonctionnaire y assistait et se plaignait souvent de la façon dont le gestionnaire correctionnel de l’horaire et du déploiement gérait les tableaux de service. Même si le fonctionnaire n’utilisait pas le nom de M. Marshall, il n’était pas requis; la référence au poste était suffisante, puisqu’il n’y a qu’un gestionnaire de l’horaire et du déploiement à l’établissement du fonctionnaire. Il a affirmé que les lignes de substitution étaient gérées avec tant d’inefficience que c’en était ridicule, que les lignes des agents étaient modifiées dans 66 % des cas et que M. Marshall ne gérait pas la substitution et les heures supplémentaires efficacement. La réponse de M. Marshall aux préoccupations des agents était supposément abusive.

61        M. Hanly a ramené ces préoccupations à l’équipe de direction de l’établissement, qui l’a informé que l’établissement de l’horaire était effectué conformément à la convention collective. Il était possible que M. Marshall ait modifié des agents dans la rotation à plus d’une reprise, mais il l’a fait afin de réduire les heures supplémentaires et il s’est conformé à la convention collective. M. Hanly l’a signalé au comité patronal-syndical régional, mais les représentants syndicaux n’étaient pas satisfaits. M. Robertson, le président syndical régional, a continué à porter directement les enjeux à l’attention de M. Hanly. Selon M. Robertson, M. Marshall était la cause des problèmes syndicaux à l’établissement.

62        M. Joe a continué de déposer des plaintes, qui sont devenues plus personnelles au printemps 2012. À la fin de l’automne ou au début de l’hiver 2012, M. Robertson, le fonctionnaire et M. LeBlanc se sont rencontrés dans le bureau de M. Hanly pour arbitrer les préoccupations du syndicat. Il était évident pour M. Hanly que le problème résidait dans le fait que les employés allaient directement voir M. Marshall afin de demander des changements d’horaire pour répondre à leurs besoins. M. Marshall transférait un substitut dans le quart de travail de soir et répondait aux demandes de changements pour les quarts de travail de jour. Le substitut devait ensuite remplacer une personne en congé de maladie ou en congé annuel, ce qui signifiait que quelqu’un d’autre devait être déplacé pour assurer le changement apporté afin de répondre à la première demande. M. Hanly a clairement indiqué à la réunion que M. Marshall recevrait l’ordre de cesser de déplacer les personnes de cette façon. Les échanges de quarts de travail étaient permis, mais les substituts n’allaient plus être gérés de cette façon.

63        Le syndicat s’y opposait, puisque la capacité de déplacer des quarts de la sorte constituait un avantage pour ses membres. Ils ont axé leur insatisfaction sur M. Marshall. Ils affirmaient qu’il utilisait le tableau de service à son avantage et à celui de sa femme. M. Hanly a entendu cette allégation à plus de six reprises dans le cadre de discussions de groupe et des réunions du comité patronal-syndical régional. Ils ont fait part de leur insatisfaction à l’égard du fait qu’ils avaient soulevé leurs préoccupations quant à la façon dont M. Marshall établissait l’horaire des agents avant, mais qu’il était de retour dans son emploi, même s’il avait été retiré. Les commentaires se sont poursuivis jusqu’à la moitié de l’année 2013.

64        Le fonctionnaire a formulé des commentaires sur le fait que M. Hanly devait être un imbécile pour ne pas voir le favoritisme flagrant que M. Marshall affichait à l’égard de sa femme. M. Hanly pensait que le fonctionnaire était frustré par le fait qu’il était permis à M. Marshall de modifier l’horaire de sa femme. M. Hanly a examiné les dossiers du SHD personnellement afin de relever des anomalies. Il a constaté qu’il y avait eu un plus grand nombre de déplacements, y compris pour Mme Marshall, en raison de la substitution à l’établissement qu’aux autres, mais cela n’était pas alarmant. M. Hanly en a déclaré autant à M. Robertson.

65        En 2012, les relations de travail à l’établissement étaient problématiques selon M. Hanly. Même s’il n’était pas normal pour lui d’être aussi engagé dans un enjeu de l’établissement, le fonctionnaire a formulé les mêmes plaintes encore et encore, qui ne seraient pas résolues, selon M. Hanly, s’il ne se penchait pas personnellement sur celles-ci.

66        Bobbi Sandhu est devenue la directrice intérimaire de l’établissement en novembre 2012. Lorsqu’elle est arrivée, l’enquête menée par Mme Lamm était terminée (voir le rapport à la pièce 16) et l’enquête menée par M. Morgan était en cours (voir le rapport à la pièce 20), tout comme l’état de l’enquête sur les plaintes de harcèlement déposées par M. et Mme Marshall à l’égard du fonctionnaire. M. Hanly a informé Mme Sandhu des conclusions des rapports Lamm et Morgan et lui a transféré la responsabilité de gérer le résultat.

67        M. Marshall avait avoué avoir établi l’horaire des agents correctionnels en dehors de la convention collective pour garder les employés heureux. Il était d’avis que, tant que les employés travaillaient les heures requises, tout était acceptable. Il a assumé le risque de ne pas appliquer correctement la convention collective parce qu’il jugeait qu’il était raisonnable de le faire. Mme Sandhu a parlé avec lui afin de résoudre ces enjeux.

68        Elle a aussi eu à traiter avec le fonctionnaire à la suite des conclusions des rapports de M. Larocque (pièce 3, onglets 5 et 14). Les allégations de M. Marshall selon lesquelles le fonctionnaire avait formulé des allégations répétées, malveillantes et dangereusement fausses à son égard dans le cadre de réunions régionales et à l’établissement, ainsi qu’en juillet 2012, pendant un processus d’enquête mené à l’établissement, étaient fondées, selon M. Larocque. De même, les allégations de Mme Marshall selon lesquelles le fonctionnaire s’était mêlé de sa carrière et qu’il avait formulé de fausses plaintes à répétition à son égard dans le cadre de réunions du Comité patronal-syndical régional étaient fondées. En outre, le fonctionnaire a échangé des informations sur Mme Marshall avec M. Robertson, alors qu’on lui avait ordonné de ne pas le faire, que M. Robertson a présentées au commissaire du SCC.

69        Mme Sandhu a invité le fonctionnaire à une audience disciplinaire le 5 juin 2013. Pendant cette audience, on lui a demandé quelle était sa position sur les allégations fondées. Il a indiqué qu’il n’avait pas harcelé les Marshall et qu’il avait en tout temps agi dans le cadre de son rôle syndical. Il n’a jamais assumé la responsabilité de ses transgressions, ce qui a constitué un facteur important pour Mme Sandhu au moment de déterminer si elle devait prendre des mesures disciplinaires ou non disciplinaires. Elle a aussi tenu compte de son dossier disciplinaire et de la durée de son service. Il avait violé la norme 3 des Règles de conduite professionnelles (pièce 3, onglet 2) de l’employeur et les éléments 10a) et 10e) du « Code de discipline de l’employeur (DC-060) » (pièce 3, onglet 1). Le 14 juin 2013, Mme Sandhu a imposé une suspension d’une journée sans salaire, mais, le 28 octobre 2014, elle l’a remplacée par une réprimande écrite, selon la recommandation de son conseiller en relations de travail, même si elle estimait que la suspension aurait été justifiée.

70        Rebecca Wight était une employée de niveau CX-01 à l’établissement qui a rencontré le fonctionnaire et M. Bussey le 2 décembre 2010 afin de l’informer qu’elle se sentait harcelée par M. Marshall, parce qu’elle avait été traitée différemment, qu’elle avait été rétrogradée, qu’elle faisait l’objet d’un examen indu et qu’elle avait fait l’objet de mesures disciplinaires parce qu’elle n’avait pas effectué ses rondes adéquatement, même si elle les menait de la même façon que d’autres agents correctionnels. Elle a dit à M. Bussey que c’était son travail de contrôler M. Marshall et de mettre fin à son abus de pouvoir. Elle a soulevé la question du favoritisme qu’il avait montré à l’égard de Mme Marshall, surtout lorsqu’il était question des échanges de quarts de travail et des congés. M. Bussey a menacé Mme Wight des conséquences liées au dépôt d’une plainte de harcèlement non fondée.

71        Mme Wight a tenté d’agir à titre d’arbitre entre le fonctionnaire et Mme Marshall, puisqu’elle était une amie personnelle des Marshall. Elle a affirmé qu’elle se souvient que le fonctionnaire avait expliqué son rôle dans le syndicat et que son but consistait à s’assurer que l’horaire et le déploiement étaient effectués de façon transparente. Selon elle, il n’avait aucunement l’intention d’attaquer Mme Marshall.

72        Troy Foseth a passé six ans en tant que membre du Comité des horaires de l’établissement à concevoir des horaires qui fonctionnaient pour l’employeur et pour les membres du syndicat. Le comité s’est penché sur l’utilisation excessive de la substitution à l’établissement. Certains agents correctionnels avaient été substitués à tant de reprises au cours d’un mois que leur horaire de travail était complètement différent de celui qu’ils avaient reçu au départ, ce qui violait la convention collective. M. Foseth était inondé de plaintes liées à la substitution provenant d’agents correctionnels. Les autres préoccupations portaient sur la création de l’horaire pour les jours fériés. En 2010, selon lui, il y avait une tendance claire de répondre à certaines préférences de quarts de travail, ce qui forçait d’autres à substituer leurs rotations prévues.

73        Tatiana Clarke était membre du dirigeant syndical à l’échelle locale et régionale. En 2012, elle est devenue la vice-présidente nationale du syndicat. Elle participait à une réunion le 24 mars 2010, pendant laquelle les sujets du recours, par M. Marshall, à son pouvoir discrétionnaire dans le processus de création des horaires et du favoritisme qu’il témoignait à l’égard de sa femme ont été abordés. Le fonctionnaire tournait autour du pot et Mme Clarke ne comprenait pas pourquoi il n’abordait pas les préoccupations liées au favoritisme; elle a donc demandé une explication.

74        M. Robertson assistait aux réunions du comité patronal-syndical à l’échelle locale, régionale et nationale. Une discussion en table ronde est organisée à la fin de ces réunions afin de permettre aux représentants locaux de présenter un résumé de l’état des relations de travail à leur emplacement, y compris tout enjeu en suspens ou à venir. Pendant ces réunions et ces mises à jour en table ronde, seuls les enjeux sont abordés; aucun nom n’est mentionné. Il est possible de désigner les postes.

75        Il a témoigné qu’en 2012, les relations de travail à Matsqui étaient très mauvaises, surtout avec l’arrivée de M. LeBlanc comme directeur. Les enjeux n’étaient pas réglés à l’échelle locale. Le syndicat avait tenté de trouver des solutions pour améliorer la situation et essayé d’organiser une réunion d’intervenants à l’établissement en vue de résoudre les conflits. Plusieurs enjeux portaient sur la création des horaires, la substitution et le favoritisme. Toute l’information que M. Robertson possédait, qui est devenue le sujet de discussions, provenait du fonctionnaire. Malgré le fait que les mêmes allégations ont fait l’objet d’une enquête à deux reprises, par Mme Lamm et par M. Morgan, et malgré leurs conclusions selon lesquelles les choses allaient mal, le syndicat n’acceptait pas leurs conclusions. Il y avait des enjeux importants liés au favoritisme, pas uniquement dans le cas de Mme Marshall, et des enjeux demeuraient en suspens relativement à la substitution, à l’échange de quarts et aux jours fériés. Il y avait aussi des problèmes de communication avec M. Marshall.

76        Qui plus est, selon M. Robertson, au cours des six premiers mois de l’année 2012, cinq réunions du comité patronal-syndical régional ont eu lieu sur la situation des relations de travail à l’établissement, en plus de deux réunions avec le directeur de l’établissement et deux téléconférences avec l’administration centrale nationale de l’employeur. M. Robertson a envoyé un courriel au directeur LeBlanc (pièce 40) afin de lui demander d’agir pour régler les enjeux directement liés à la façon dont M. Marshall appliquait les politiques de l’employeur, l’addenda « Entente globale » à la convention collective et la convention collective. M. LeBlanc n’a pas répondu. Même si les enjeux ont été soulevés plusieurs fois, dans plusieurs tribunes, rien n’a été réglé, malgré les deux enquêtes.

77        Le fonctionnaire a dit à M. Robertson qu’il faisait l’objet d’une enquête pour harcèlement. Le syndicat voulait qu’elle prenne fin et, selon lui, les Marshall se cherchaient une tribune. Selon le fonctionnaire, l’intention sous-jacente au dépôt de ces plaintes était de l’empêcher d’exprimer ses préoccupations liées à l’horaire; aucune n’était personnelle. Afin d’aider le fonctionnaire, M. Robertson a fait pression sur le commissaire du SCC pour refuser les plaintes. Le commissaire a envoyé le chef de la résolution de conflits du SCC afin d’aider à résoudre le conflit; les tentatives de cette personne ont aussi échoué.

78        Le fonctionnaire a témoigné en disant que Mme Marshall et lui travaillaient dans la même équipe en 2009. Après le 1er octobre 2009, lorsque M. Marshall a commencé à assumer le rôle lié à l’horaire et au déploiement, le fonctionnaire sentait que les quarts de Mme Marshall étaient toujours substitués afin que son horaire coïncide avec celui de M. Marshall pour répondre aux besoins du couple liés à la garde de leurs enfants. Avant le 1er octobre 2009, le fonctionnaire croyait que les besoins des Marshall liés à la garde de leurs enfants étaient satisfaits par l’affectation de Mme Marshall à un poste à rotation lente. Mme Marshall était la première à se voir offrir l’option d’échanger des quarts de travail pour répondre à ses besoins de garde de ses enfants. D’autres membres de l’équipe étaient mécontents, parce qu’ils auraient préféré profiter d’une telle option. En substance, Mme Marshall pouvait avoir l’horaire qu’elle voulait en recourant à la substitution, selon le fonctionnaire.La seule option de rechange offerte aux autres, après que M. Bussey a mis fin aux échanges de quarts de travail, était de demander à avoir un horaire de jour du lundi au vendredi.

79        Le fonctionnaire a assisté à une réunion du comité patronal-syndical de l’établissement le 24 mars 2010, même s’il devait être en congé de maladie ce jour-là. M. Marshall a exigé de lui qu’il présente un certificat du médecin pour ce jour, sans quoi il ne serait pas payé. Le fonctionnaire a soulevé ce point à la réunion. Mme Clarke a soulevé la question sur le traitement différent accordé à Mme Marshall et a demandé pourquoi elle n’était pas visée par les mêmes règles sur les congés de maladie que les autres. Elle s’est dite préoccupée par le fait qu’un gestionnaire correctionnel entretienne une relation avec un agent correctionnel qui relève de lui.

80        Lors d’une réunion avec M. Bussey, le 2 décembre 2010, le fonctionnaire a accompagné Mme Wight afin de discuter de la façon dont elle estimait que M. Marshall la traitait différemment. Mme Wight a soulevé la question des échanges de quarts de travail ouverts – où les agents correctionnels échangeaient des quarts entre eux. Elle a affirmé que Mme Marshall avait le mot de passe de l’ordinateur de M. Marshall et que ce dernier gérait encore les congés de Mme Marshall. M. Bussey a indiqué que Mme Marshall allait se voir offrir une affectation de gestionnaire correctionnel intérimaire. Le fonctionnaire a demandé à M. Bussey comment, selon lui, les agents correctionnels réagiraient, étant donné le nombre d’enjeux liés à l’horaire et au déploiement en cours. M. Bussey n’a jamais dit au fonctionnaire que sa question était inappropriée. À la fin de la réunion, le fonctionnaire a fait référence à Mme Marshall en tant que dommage collatéral dans la lutte contre son mari.

81        Lorsque M. Bussey a dit à Mme Marshall qu’elle avait été le sujet de la discussion du 2 décembre 2010, elle est devenue contrariée. Elle a remis en question le fonctionnaire, qui s’est excusé de l’avoir mentionnée pendant qu’ils discutaient de son mari. Il a indiqué qu’il n’aurait jamais dû faire référence à elle en tant que dommage collatéral.

82        En 2012, Mme Marshall avait allégué à répétition que le fonctionnaire avait mentionné son nom dans les réunions du comité patronal-syndical. Il a examiné les procès-verbaux de ces réunions afin de trouver des références à elle, mais n’en a trouvé aucune. En mars 2012, Mme Marshall a déposé des allégations à l’égard du fonctionnaire, en indiquant qu’il avait appelé deux agents correctionnels dans le cadre d’une tentative visant à les inciter à se retourner contre un gestionnaire correctionnel. Elle a produit un rapport d’observation ou déclaration d’un agent (RODA) à cet effet.

83        Le fonctionnaire a obtenu les dossiers téléphoniques pour son téléphone pendant la période où les appels ont été supposément faits, et qui prouvent selon lui qu’il n’a fait aucun appel de ce genre. En avril 2012, M. LeBlanc lui a dit qu’il n’était pas un chasseur de fantômes. Le RODA de Mme Marshall a ensuite été retiré.

84        La preuve résidait dans le fait qu’à la fin du printemps et au début de l’été 2012, le sujet préoccupant était l’ampleur de l’insatisfaction causée par la substitution à l’établissement. Elle touchait tous les membres du syndicat là-bas et ils étaient fâchés. Le fonctionnaire était las de soulever ce problème aux réunions du comité syndical de l’établissement et de la région. La direction avait le droit de substituer des agents correctionnels au besoin, lorsque leur nom était indiqué dans la « ligne de substitution ». Le problème résidait dans le fait que les personnes qui étaient substituées ne se trouvaient pas toujours dans la « liste de substitution », ce qui causait un effet d’entraînement et exigeait des autres qu’ils soient substitués ailleurs aussi. Éventuellement, le directeur LeBlanc a mis fin à la substitution et les heures supplémentaires ont baissé. Il a envoyé une note de service aux gestionnaires correctionnels afin qu’ils mettent fin à la substitution le 31 juillet 2012 (pièce 12).

85        Qui plus est, selon la preuve, à compter de 2001, si l’horaire d’un agent correctionnel indique qu’il a été affecté à un poste pendant un jour férié, il doit travailler ce jour-là. Si un agent était affecté à une ligne de substitution, il n’était pas tenu de travailler ce jour-là et était contraint de ne pas travailler pendant le jour férié. Tout a changé pendant la période de Noël de 2009. Aucun avis n’a été envoyé au syndicat sur le changement de la pratique. Les membres du syndicat local sont allés voir le fonctionnaire afin de lui demander pourquoi il en était ainsi et c’est seulement après que le fonctionnaire s’est penché sur ce cas qu’il a constaté qu’un changement avait été apporté.

86        Au même moment, une récupération de salaire a eu lieu, selon le fonctionnaire. Les agents qui ne travaillaient pas le jour férié et qui possédaient habituellement un quart de travail de 12,75 heures et qui étaient payés pour la totalité du quart étaient désormais payés pour 8,5 heures seulement pour un jour férié. Pour recevoir le salaire total des 12,75 heures du quart, les agents devaient travailler pendant 4,25 heures ou utiliser du temps accumulé ou un congé annuel. Pour les jours de jour férié, une journée correspondait à 8,5 heures et non à la durée d’un quart.

87        Tous les témoins ont convenu qu’il est très lucratif de travailler pendant un jour férié pour un agent correctionnel, mais l’avantage était réduit considérablement, puisque seulement 8,5 heures du quart des 12,75 heures étaient admissibles à la prime pour jour férié. La direction n’a pas présenté le changement au syndicat avant sa mise en œuvre. C’est M. Marshall qui l’a fait au moyen d’un changement d’horaire, et non la direction. Il avait parlé à Kelly Dillabough, membre du dirigeant syndical, à propos du changement de processus, mais jamais dans le cadre d’une réunion du comité patronal-syndical de l’établissement, comme il aurait dû le faire.

88        Ces changements et d’autres touchant les personnes qui seraient en congé pendant les jours fériés ont été mis en œuvre le 1er avril 2010, lorsque tous n’avaient aucune heure de temps accumulé. La détermination des personnes qui seraient en congé pendant la fin de semaine de Pâques (le premier jour férié de l’exercice) s’effectuait par ordre alphabétique. Ces changements préoccupaient grandement les agents correctionnels. Le fonctionnaire a fait part de ces préoccupations à la direction de l’établissement dans le cadre d’une réunion du comité patronal-syndical de l’établissement. Un protocole d’entente a été élaboré et il devait être utilisé à compter du 1er juillet cette année-là, qui revenait à l’ancien processus pour déterminer qui travaillerait et qui ne travaillerait pas pendant les jours fériés.

89        Les plaintes formulées par le fonctionnaire à l’égard des processus d’horaire et de déploiement en 2010 ont poussé la direction à lancer l’enquête menée par Mme Lamm. La direction de l’établissement n’a présenté aucune information au fonctionnaire sur l’enquête, outre le fait que le directeur Boileau lui avait indiqué que ses allégations s’étaient avérées non fondées. Deux jours après que le fonctionnaire a parlé à M. Boileau, M. Bussey lui a expliqué l’objet de l’enquête menée par Mme Lamm.

90        En mars 2011 environ, M. Marshall est retourné à l’établissement en tant que gestionnaire correctionnel de l’unité résiduelle du premier étage. Le fonctionnaire travaillait dans cette unité. Ils entretenaient une relation professionnelle. Le fonctionnaire appréciait M. Marshall en tant que gestionnaire correctionnel. Toutefois, à certains moments dans son rôle syndical, le fonctionnaire était en désaccord avec les décisions prises par M. Marshall dans son rôle de gestionnaire correctionnel.

91        Le fonctionnaire était présent le 2 décembre 2010, lorsque Mme Wight a rencontré M. Bussey au sujet de M. Marshall. Elle a affirmé à M. Bussey que M. Marshall avait permis à Mme Marshall de faire des échanges de quarts de travail fantômes (c’est-à-dire un échange de quart avec elle-même pour un quart qui sera déterminé à un moment futur). Cette pratique était précisément interdite en vertu du protocole d’entente sur les échanges de quarts en vigueur depuis 2009.

92        L’interaction du fonctionnaire avec Mme Marshall s’est détériorée à partir de ce moment. Ils se parlaient à peine et Mme Marshall a quitté son équipe en janvier 2011.

93        Selon le fonctionnaire, les types généraux d’enjeux syndicaux qu’il devait gérer portaient sur les changements des politiques, des protocoles d’entente ou de l’équipement de l’établissement. La substitution (l’échange d’agents correction d’une ligne de la rotation à une autre) est devenue l’enjeu le plus litigieux avec lequel le syndicat était aux prises, lorsqu’en juin 2011, la direction a commencé à substituer des agents de quarts de jour à des quarts de soir ou l’inverse sans une quantité de temps appropriée entre le changement. Il s’agissait des préoccupations principales du syndicat de juin 2011 à la fin de l’année 2012. Ces préoccupations ont été soulevées dans le cadre des réunions du comité patronal-syndical de l’établissement et des réunions avec la direction, avec M. Bussey et avec M. Marshall, lorsqu’il a repris son rôle à l’horaire et au déploiement.

94        Le fonctionnaire n’a jamais nié que la direction avait le droit de faire ce qu’elle faisait; la préoccupation résidait dans la quantité de substitution, surtout après des quarts de travail de 16 heures. Il a fait part de ses préoccupations et, le 23 janvier 2012, Mme Boyer l’a informé qu’il était visé par une enquête disciplinaire. Les allégations portaient au départ sur le fait que le fonctionnaire avait ligué les membres du syndicat dans une tentative visant à les retourner contre elle; elles ont ensuite porté sur le fait qu’il essayait de la discréditer. Le fonctionnaire a été retiré de l’établissement en attendant la fin de l’enquête disciplinaire. L’enquêteur a conclu que les allégations n’étaient pas fondées.

95        Le fonctionnaire a témoigné en disant qu’il a assisté aux réunions du comité patronal-syndical régional le 21 février, le 26 avril, le 24 mai, le 27 juin, ainsi qu’en septembre, en octobre, en novembre et en décembre 2012. Pendant la réunion du mois de mai, un élément lié à l’établissement devait être abordé. En juin, le fonctionnaire a soulevé des enjeux liés à la charge d’incendie, à la substitution et au leadership de l’établissement pendant la discussion en table ronde. Avant la discussion en table ronde de la réunion du mois de mai, il n’avait formulé aucun commentaire pendant les réunions.

96        Le 23 mai 2012, le fonctionnaire a rencontré Peter German, le sous-commissaire régional, M. Hanly, M. LeBlanc, M. Robertson, Mme Blanchette et Mme Dillabough. Les discussions portaient principalement sur la situation d’un agent correctionnel employé à l’établissement. Le fonctionnaire a indiqué qu’il se sentait ciblé par Mme Boyer en particulier, puisqu’elle avait lancé une enquête sur sa conduite en février 2012. Le groupe a aussi discuté de la substitution.

97        Le fonctionnaire a témoigné en disant qu’à aucun moment on ne l’a informé que son comportement pendant les réunions du comité patronal-syndical dépassait les bornes. De même, à aucun moment on ne l’a averti qu’il faisait du harcèlement à l’égard des Marshall par son comportement pendant ces réunions.

98        Il a décrit la réunion du 27 juin comme très litigieuse. Plus tôt ce mois-là, une cérémonie de passation des pouvoirs avait eu lieu et le personnel des agents correctionnel ne souhaitait pas y participer. Le directeur LeBlanc a accusé le fonctionnaire d’inciter au boycottage et l’a menacé de lancer une autre enquête. Il a affirmé que le fonctionnaire avait formulé des commentaires sur le fait qu’on avait exigé de lui qu’il y aille, ce que le fonctionnaire a prouvé comme étant le cas, en appelant un autre agent correctionnel, qui a confirmé l’ordonnance.

99        Le fonctionnaire a témoigné en donnant de nombreux exemples de mécontentement chez les membres du syndicat dont M. Marshall était responsable en raison des changements d’horaire qu’il avait apportés. Le fonctionnaire a joué un rôle direct ou secondaire dans la résolution de ces préoccupations, tout comme M. Foseth, Denis Cork, Justin Ott, Mme Dillabough et d’autres, qui étaient tous des représentants syndicaux.

100        Le 20 avril 2012, dans le cadre d’une audience disciplinaire pour un membre, le directeur LeBlanc a dit au fonctionnaire qu’il allait lancer une autre enquête sur son comportement, en réponse à une liste de points de discussion dans le cadre d’une réunion du comité patronal-syndical à venir que le fonctionnaire lui avait envoyée. Il s’agissait de points de discussion, et non d’allégations, et c’est ce qui préoccupait M. LeBlanc, d’après ce qu’il a dit. Le fonctionnaire s’inquiétait du fait que le directeur avait décidé d’enquêter sur ces préoccupations plutôt que de s’asseoir et d’en discuter. Après cette situation, la relation du fonctionnaire avec M. LeBlanc est devenue très tendue. Le fonctionnaire a dit à M. LeBlanc qu’il ne voulait pas avoir de problèmes parce qu’il portait des enjeux à son attention.

101        En septembre 2012, selon la preuve, le fonctionnaire a reçu une copie du rapport Morgan et on lui a dit que ce dernier ferait l’objet d’une discussion à la réunion du comité patronal-syndical de l’établissement du mois d’octobre 2012. Il n’était pas d’accord, puisqu’il n’avait pas suffisamment de temps pour l’examiner. Huit nouveaux points à l’ordre du jour devaient être abordés pendant cette réunion, ce qui n’a pas permis de discuter du rapport Morgan. Le fonctionnaire voulait que les nouveaux points soient abordés pendant la réunion avant de discuter du rapport Morgan.

102        M. Morgan a interrogé le fonctionnaire et lui a demandé de fournir des exemples précis pour chacune des préoccupations qu’il a soulevées. Il a présenté des exemples de favoritisme (pièce 17, pages 13 et 14). Il a aussi soulevé des enjeux qui n’étaient pas fondés, d’après ce qu’on lui avait dit, qui avaient été présentés par courriel au directeur LeBlanc dans un courriel envoyé le 4 mai 2012. Le ton du courriel était une réponse donnée sous le coup de l’émotion à une demande de présenter des allégations à 9 h, alors qu’il avait été convenu qu’elles seraient soumises à la fermeture des bureaux ce jour-là. Bon nombre de ces exemples étaient liés à M. Marshall.

103        Le fonctionnaire a témoigné en disant qu’il a aussi présenté des renseignements au président régional à propos des activités à l’échelle locale. Il avait pour rôle de tenir le président régional au courant des préoccupations entourant les opérations à l’établissement. La plupart de ces renseignements étaient inclus dans un courriel que M. Robertson a envoyé au commissaire du SCC, Don Head. Le fonctionnaire ignorait que M. Robertson l’avait envoyé.

104        Le fonctionnaire a dit à M. Robertson qu’il sentait qu’on le ciblait. Il s’inquiétait du fait que la direction de l’établissement le retire de l’établissement. M. Robertson lui a indiqué que, selon lui, les plaintes de harcèlement étaient futiles. Le fait de soulever des enjeux qui touchaient les membres du syndicat à l’établissement faisait partie du rôle du fonctionnaire en tant que président local. Il n’y avait rien de personnel dans ses actes. M. Robertson voulait améliorer les choses et régler les problèmes. Il se concentrait sur l’optique de la situation, tandis que le fonctionnaire se concentrait sur des incidents particuliers.

III. Résumé de l’argumentation

A. Pour l’employeur

105        Lorsque cette affaire a été renvoyée à l’arbitrage, le fonctionnaire a fait l’objet d’une journée de suspension sans salaire. Au moment de l’audience, la mesure disciplinaire a été remplacée par une réprimande écrite. L’arbitre a perdu sa compétence lorsque la mesure disciplinaire a été modifiée. Lorsqu’il est question de compétence, ce n’est pas la mesure disciplinaire prise au moment où l’affaire a été renvoyée à l’arbitrage qui importe, mais plutôt ce qu’elle était au moment de l’audience (voir Canada (Procureur général) c. Robitaille, 2011 CF 1218, aux paragraphes 26 à 30; et Rogers c. Agence du revenu du Canada, 2009 CF 1093 et CAF 116). Le fait de rendre une décision relativement à une pénalité qui n’existe pas donnerait lieu à une augmentation de cette pénalité. Cela ne serait pas logique. Il n’y a aucun enjeu en cours entre les parties.

106        Les décisions rendues par la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale sont claires. Le moment où la réprimande écrite a été transmise n’est pas pertinent dans la décision de l’arbitre de grief. Qui plus est, l’employeur a le droit de changer d’idée pour régler un grief. Si la pénalité est fixée au moment du renvoi à l’arbitrage, l’employeur se retrouve pieds et poings liés, ce qui correspondrait à de piètres relations de travail.

107        En ce qui concerne le bien-fondé de cette affaire, il faut répondre aux trois questions qui suivent : Le fonctionnaire a-t-il harcelé les Marshall? Agissait-il dans les limites de son rôle de représentant syndical? La mesure disciplinaire imposée était-elle appropriée?

108        On définit le harcèlement dans la politique de prévention du harcèlement de l’employeur (pièce 3, onglet 3, à la page 5). Le harcèlement comprend des remarques grossières dégradantes ou offensantes, graves ou répétées. L’employeur a veillé à ce que les allégations de harcèlement fassent l’objet d’une enquête. M. Larocque s’est penché sur toutes les allégations, même si certaines semblaient se trouver en dehors de la période de 12 mois indiquée dans la politique, parce qu’il croyait qu’elles prouvaient une tendance constante et continue de comportement qui établissait que le fonctionnaire était coupable de harcèlement à l’égard des Marshall.

109        Les enjeux liés à l’horaire et au déploiement ont été soulevés une première fois en 2010 auprès de M. Boileau et de M. Bussey. Le fonctionnaire a soulevé 95 % de ces allégations. Par conséquent, l’employeur a confié à Mme Lamm la responsabilité d’enquêter sur les allégations de favoritisme, de modification de l’horaire pour répondre aux besoins de Mme Marshall ou de lui donner plus de quarts de travail pendant les jours fériés et d’autres avantages que cette dernière tire du rôle de M. Marshall comme gestionnaire correctionnel, horaire et déploiement.

110        Il était très grave d’alléguer que M. Marshall a utilisé son poste pour favoriser son épouse. Il s’agissait d’une menace grave à sa réputation, en plus de remettre en question sa capacité à accomplir son travail de façon équitable. Les commentaires formulés par le fonctionnaire étaient blessants et il savait ou aurait dû savoir qu’ils étaient offensants pour M. Marshall. Mme Lamm n’a rien trouvé pour étayer les allégations du fonctionnaire, qui se fondaient uniquement sur des spéculations, des ouï-dire et une opinion.

111        On a mentionné au fonctionnaire que les enjeux qu’il a soulevés n’étaient pas fondés. Il aurait dû lâcher prise, à moins de disposer de preuves concrètes pour soutenir ses allégations. Il n’avait pas le droit de continuer à dire que M. Marshall était coupable de favoritisme, alors que cela s’était révélé faux. Même après l’enquête menée par Mme Lamm, le fonctionnaire a continué de formuler la même allégation, selon laquelle Mme Marshall avait profité du rôle de son mari en tant que gestionnaire correctionnel, horaire et déploiement. Cette allégation a été formulée pendant des réunions bilatérales privées, mais aussi dans le cadre de réunions du comité patronal-syndical de l’établissement et régional.

112        Au printemps 2012, les plaintes soulevées par le fonctionnaire dans le cadre des réunions du comité de consultation patronale-syndicale régional sont devenues personnelles et étaient principalement dirigées vers les Marshall. Il a continué de la sorte pendant toute l’année 2013, jusqu’à ce qu’il cesse d’assister aux réunions régionales. Les réunions du comité patronal-syndical régional étaient un lieu très public, et bon nombre des collègues de M. Marshall y assistaient. En plus d’être dommageable pour la réputation de M. Marshall, le fait que le fonctionnaire formule ces commentaires à ce moment ne permettait pas à M. Marshall de se défendre, parce qu’il n’assistait pas à ces réunions.

113        M. Hanly a effectué un suivi auprès de la direction de l’établissement et on lui a indiqué qu’il n’y avait aucune preuve de favoritisme ou de mauvaise gestion de la liste de substitution. Les allégations non fondées formulées par le fonctionnaire sont allées jusqu’au commissaire, par l’intermédiaire de M. Robertson. Le fonctionnaire n’aurait pas dû répandre les rumeurs, sachant que les allégations avaient fait l’objet d’une enquête et qu’elles s’étaient avérées non fondées. Il avait pour fonction, en tant que membre du dirigeant syndical, de faire savoir aux membres de son établissement que l’enquête sur les allégations avait pris fin et que les résultats indiquaient qu’elles étaient non fondées. Il a plutôt continué à poursuivre les Marshall, ce qui a donné lieu à la deuxième enquête, menée par M. Morgan.

114        Les allégations sur lesquelles M. Morgan a enquêté répétaient essentiellement celles qui avaient donné lieu à l’enquête menée par Mme Lamm en 2010. Même après avoir reçu les résultats de l’enquête menée par M. Morgan, le fonctionnaire a continué de formuler les mêmes allégations et de s’assurer que M. Robertson les poursuive. Après deux enquêtes, le fait de répéter les mêmes allégations sans nouvelle preuve correspond à du harcèlement. Le fonctionnaire avait le droit d’être en désaccord avec le rapport Morgan, mais il n’avait pas le droit de continuer à poursuivre les Marshall comme il l’a fait. Il aurait dû cesser de faire ces commentaires.

115        Le fonctionnaire s’est mêlé de l’avancement de carrière de Mme Marshall en formulant des commentaires à M. Bussey. Il a aussi formulé des commentaires pendant les réunions du comité patronal-syndical de l’établissement. Le rôle d’un président local ne comprend pas celui d’intervenir dans les décisions de la direction sur les employés à promouvoir. Le fonctionnaire n’agissait pas dans son rôle syndical lorsqu’il a formulé ces commentaires. Mme Marshall était contrariée par l’absence de représentation de la part du syndicat et cette tentative de mettre en péril sa carrière et de ternir sa réputation. Lorsque M. Marshall a entendu les commentaires à propos de sa femme, il les a pris comme une attaque personnelle. Pour les Marshall, ces commentaires étaient profondément personnels.

116        En outre, après avoir reçu les rapports d’enquête sur le harcèlement confidentiels de M. Larocque, le fonctionnaire les a distribués à d’autres personnes que celles qui étaient autorisées à les recevoir. Il a enfreint l’exigence de maintenir la confidentialité tout au long du processus d’enquête sur le harcèlement. Un courriel rédigé par M. Robertson contenait des détails sur la plainte de harcèlement que le fonctionnaire lui avait soumis. Le fonctionnaire a formulé à sa manière les plaintes avant même qu’elles fassent l’objet d’une enquête dans une tentative visant à les éliminer.

117        La décision rendue dans Joss c. Conseil du Trésor (Agriculture et Agroalimentaire Canada), 2001 CRTFP 27, donne un bon aperçu de ce qu’il faut déterminer pour établir un cas de harcèlement. Pour qu’un harcèlement général soit établi, il doit y avoir une conduite répréhensible à l’égard du plaignant. La conduite doit être fâcheuse. L’auteur devait savoir ou aurait dû savoir que la conduite était fâcheuse. La conduite doit être dévalorisante, rabaissante ou donner lieu à une humiliation personnelle ou à un embarras personnel pour le plaignant. La conduite comprend des actes, des commentaires ou des affichages effectués de façon ponctuelle ou continue (voir le paragr. 59 de Joss). Il était évident que les commentaires non fondés formulés continuellement par le fonctionnaire dans la présente affaire étaient destinés à blesser une personne. La norme de la preuve dans les cas de harcèlement est la suivante : selon la prépondérance des probabilités, la conduite correspondait à du harcèlement en droit, y compris le droit des contrats (voir le paragr. 78).

118        Les déclarations faites à répétition par le fonctionnaire, si elles étaient fausses, causaient préjudice à la réputation de M. Marshall. Les allégations de favoritisme sont très graves et le fait de continuer à formuler ces commentaires alors qu’il savait qu’ils étaient non fondés témoigne d’une tendance de comportement négligent qui ne relève pas du rôle du fonctionnaire en tant que représentant syndical. Les déclarations fondées sur un mensonge ne sont pas protégées par son rôle syndical. Cela importe peu de savoir si les commentaires ont été formulés à l’endroit d’un employé ou d’un gestionnaire. (Voir Nowen c. Conseil du Trésor (Solliciteur général - Service correctionnel du Canada), 2001 CRTFP 47; King, 2008 CRTFP 64, au paragr. 192; Toronto (Ville) c. Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 79 (1998), 70 L.A.C (4e) 110, au paragr. 16; Burns Meats Ltd. c. Travailleurs canadiens de l’alimentation et de l’industrie, section locale P139 (1980), 26 L.A.C (2e) 379; Brampton (City) v. Amalgamated Transit Union, Local 1573 (1989), 7 L.A.C. (4e) 294, aux paragraphes 56 et 58; Sun-Rype Products Ltd. v. Teamsters, Local 213 (2010), 191 L.A.C.(4e) 129 aux paragraphes 159, 160, 161 et 163).

B. Pour le fonctionnaire s’estimant lésé

119        Il incombait à l’employeur de prouver, selon une preuve claire et convaincante, que le comportement du fonctionnaire justifiait une mesure disciplinaire. Il a montré au cours de la période en question que la relation entre le syndicat et la direction à l’établissement était tendue. Les relations de travail étaient difficiles. Il a avoué que les membres de l’unité de négociation soulevaient fréquemment leurs préoccupations par rapport à M. et Mme Marshall lorsqu’ils lui présentaient leurs enjeux liés à l’horaire en tant que leur représentant syndical. En retour, il parlait de M. et Mme Marshall lorsqu’il discutait des préoccupations du syndicat quant à la façon dont le gestionnaire correctionnel, horaire et déploiement, établissait l’horaire des agents correctionnels, y compris celui de Mme Marshall.

120        L’employeur n’a pas réussi à montrer que les allégations étaient fausses et les documents présentés comme pièce montrent clairement qu’elles étaient fondées. Le fait que le fonctionnaire soulevait continuellement ces enjeux est un témoignage de son engagement à l’égard des relations de travail. La substitution était problématique; les agents correctionnels étaient contraints de travailler pendant les quarts d’autres agents à courts préavis. L’employeur n’a tout simplement pas compris l’incidence d’un court préavis entre les quarts sur la santé des membres et il appartenait au fonctionnaire de soulever cet enjeu jusqu’à ce que l’employeur comprenne.

121        De façon réaliste, si le fonctionnaire avait harcelé M. et Mme Marshall pendant deux ans, M. Bussey ou M. Boileau l’auraient-ils toléré? La première fois où le fonctionnaire a appris que M. Marshall avait l’intention de déposer une plainte de harcèlement plus tôt, mais que la direction lui a dit que cela ne lui profiterait pas, est au cours de la présente audience. On ne peut l’utiliser pour établir une tendance de harcèlement de 2010 à 2012. En mai 2012, le nom de M. Marshall a été mentionné dans le cadre d’une réunion du comité de consultation patronale-syndicale régional. Il a été mentionné en vertu d’une référence à son poste. Le fonctionnaire est autorisé à soulever des enjeux qui touchent ses membres à ces réunions.

122        Le rapport Lamm n’était pas indépendant ou rigoureux. Mme Lamm n’a pas analysé les changements que M. Marshall a apportés aux horaires; elle n’a pas analysé non plus la crédibilité de ceux qu’elle a interrogés. Elle n’a jamais mentionné le fait que Mme Marshall accédait au SHD au moyen du code d’utilisateur de son mari. M. Marshall a avoué avoir effectué des échanges de quarts fantômes à trois personnes, contrairement à la politique nationale, mais aucune conclusion de culpabilité n’a été présentée. Seule Mme Marshall était autorisée à faire des échanges de quarts de travail ouverts, qui sont contraires à la politique nationale. M. Marshall a violé la convention collective et le fonctionnaire était en droit de demander à l’employeur de gérer ses pratiques liées à l’horaire et de veiller au respect de la convention collective. Mme Lamm a conclu que M. Marshall aurait dû être exonéré parce que les anomalies liées à l’horaire étaient attribuables au fait qu’il répondait trop aux besoins des employés.

123        M. Boileau n’a pas géré les résultats du rapport Lamm et les aveux de M. Marshall. Il l’a laissé entre les mains de M. Bussey, qui ne l’a même pas lu. Si l’employeur croyait que le fonctionnaire harcelait M. Marshall, pourquoi, après la publication du rapport Lamm, a-t-il réaffecté M. Marshall en tant que gestionnaire correctionnel de l’unité résiduelle où travaillait le fonctionnaire? C’est parce que rien ne permettait de conclure que le fonctionnaire harcelait M. Marshall.

124        M. Marshall a témoigné en disant qu’il a déposé une plainte de harcèlement à l’égard du fonctionnaire en 2010. Il a aussi témoigné en disant que la direction l’a ignoré. En vérité, il l’a retirée. Il était évident qu’il n’était pas un témoin crédible. Il a transmis les mêmes renseignements à M. Larocque et ne s’est aucunement efforcé de les rectifier. Mis à part le fait qu’il a été contraint de préciser cette allégation en contre-interrogatoire pendant la présente audience, il n’aurait jamais mentionné qu’il avait retiré sa plainte.

125        Le fonctionnaire avait le droit de soulever des préoccupations relatives aux relations de travail et tous ses commentaires étaient liés à ce sujet. Ils n’ont pas été formulés en présence de M. Marshall ou de Mme Marshall, donc ils n’ont pu être dirigés contre eux. L’employeur ne lui a jamais dit que les commentaires étaient inappropriés ou non professionnels. La seule personne qui a conclu qu’ils étaient inappropriés est M. Larocque, qui comprenait mal les relations de travail, les conventions collectives et le rôle du syndicat. Il ignorait le type d’enjeux qu’un représentant syndical pouvait soulever, mis à part le moment et l’endroit. M. Larocque est allé jusqu’au point de formuler des commentaires selon lesquels le fonctionnaire s’immisçait dans des affaires qui appartenaient à la direction, alors qu’en réalité, il s’agissait d’enjeux liés à l’application de la convention collective.

126        Les réunions du comité patronal-syndical ne sont pas une tribune publique. La convention collective établit qui a le droit d’y assister. Ils doivent y assister en vertu de la LRTFP. Des réunions bilatérales ont lieu entre le dirigeant syndical et les membres locaux du dirigeant syndical et différents niveaux de direction à l’échelle de l’établissement, de la région et du pays. Tout objet de préoccupation pour le syndicat peut être soulevé, selon M. Boileau. Les enjeux liés à la création de l’horaire des agents correctionnels auraient tout aussi bien pu faire l’objet de discussions pendant ces réunions, mais l’employeur n’a rien indiqué de précis quant aux heures et aux lieux où le fonctionnaire a formulé les commentaires supposément offensants. C’est M. Bussey lui-même qui était la source de bon nombre des commentaires. Il n’a assisté à aucune réunion du comité patronal-syndical ou à aucune réunion bilatérale, il n’aurait donc que répété de l’information transmise de troisième ou de quatrième main. Le seul commentaire que le fonctionnaire a formulé et dont il a réalisé qu’il était offensant a été formulé sur le coup, lorsque M. Bussey lui a parlé de l’affectation intérimaire à venir de Mme Marshall. Il s’en est excusé.

127        Le fait d’être un représentant syndical n’impose pas une norme de perfection. Le fonctionnaire a avoué qu’il a formulé le commentaire sur le dommage collatéral, mais Mme Marshall était d’accord. Dans les courriels qu’elle a envoyés à son équipe, elle a affirmé que ce qui touchait M. Marshall la touchait aussi. Lorsqu’elle a envoyé ces courriels, elle s’est fondée sur des ouï-dire; M. Marshall lui a dit ce que M. Bussey lui avait mentionné. Mme Marshall aurait pu en parler au fonctionnaire, mais elle a choisi de ne pas le faire et de croire l’histoire racontée par M. Bussey et son mari.

128        Il n’y a aucune preuve selon laquelle le fonctionnaire a tenté de se mêler de la carrière de Mme Marshall. Elle a témoigné en disant qu’il ne s’est pas mêlé de sa carrière, mais qu’il a tenté de le faire. M. Bussey a affirmé que les commentaires formulés par le fonctionnaire quant au fait qu’il n’appuyait pas la nomination intérimaire de Mme Marshall n’ont eu aucune incidence sur sa décision. Seul M. Larocque croyait que le fonctionnaire s’était mêlé de la carrière de Mme Marshall. M. Marshall a supposé que le fonctionnaire était responsable des enquêtes de Mme Lamm et de M. Morgan sur ses pratiques de création d’horaires. C’est la direction qui a lancé ses deux enquêtes; le fonctionnaire n’a cherché qu’à s’asseoir et à discuter des préoccupations du syndicat, ce qui témoigne de son désir de régler lasituation.

129        L’enquête menée par M. Larocque était sans fondement, puisqu’elle se fondait sur une politique qui n’était pas en vigueur. En vertu de la politique adéquate, une plainte doit être déposée dans les 12 mois qui suivent la violation alléguée. Il n’aurait pas dû supposer des circonstances atténuantes, qui ont empêché M. et Mme Marshall de déposer leurs plaintes dans les délais prévus par la politique. La plainte déposée par Mme Marshall se fondait sur des allégations qui remontaient à 2010. Elle n’aurait jamais dû faire l’objet d’une enquête. Les plaintes correspondaient à des représailles à l’endroit du fonctionnaire, qui avait soulevé des enjeux de favoritisme et d’avantages inadéquats liés à l’horaire. Qui plus est, M. Larocque est arrivé à des conclusions qu’il ne lui appartenait pas d’examiner, comme la violation de la confidentialité par le fonctionnaire lorsqu’il a acheminé le rapport provisoire à l’attention de Mme Blanchette. Le fonctionnaire avait droit au représentant de son choix. Il ne s’agissait pas d’une violation de la confidentialité Le fait de changer de représentant ou, en réalité, d’ajouter un représentant n’était pas une violation de la confidentialité.

130        Il faut établir une distinction entre des déclarations faites à l’interne et celles faites à l’externe. Un représentant syndical doit avoir plus de latitude lorsqu’il parle à l’interne. Dans la présente affaire, le fonctionnaire a tenté de résoudre les enjeux que les membres portaient à son attention par l’intermédiaire des comités de consultation patronale-syndicale. Les courriels envoyés par les Marshall, particulièrement par Mme Marshall, étoffaient les préoccupations d’une façon beaucoup plus large que tout ce que le fonctionnaire a fait.

131        En ce qui concerne la question de la compétence, le fonctionnaire est en désaccord avec l’argument présenté par l’employeur selon lequel l’arbitre de grief n’a pas compétence, puisque la pénalité imposée était une réprimande écrite. Mme Sandhu a décidé de changer la pénalité. Elle a témoigné en disant qu’elle ne pensait pas qu’il était approprié de changer la pénalité et qu’une suspension d’une journée sans salaire, comme ce qui était imposé au départ, demeurait appropriée dans la situation. Le changement est survenu au deuxième palier de la procédure applicable aux griefs et à la dernière minute. Le seul motif qu’avait l’employeur d’apporter ce changement était d’éviter une audience complète sur les actes accomplis par M. Marshall. La compétence d’un arbitre de grief est fixée au moment du renvoi à l’arbitrage. Un fonctionnaire ne devrait pas se voir refuser le droit de faire entendre son grief en évinçant la compétence de l’arbitre de grief par la substitution d’une réprimande écrite, qui n’est pas admissible à l’arbitrage, pour une suspension sans salaire, qui est admissible à l’arbitrage. La question qui consiste à déterminer si la mesure disciplinaire était justifiée demeure en cours.

132        Le principe établi dans Parkolub et Hu c. Agence du revenu du Canada, 2007 CRTFP 64, a été respecté à répétition. On y indique qu’un arbitre de grief a compétence si, au moment où le grief a été renvoyé à l’arbitrage, le fonctionnaire avait le droit à l’arbitrage. Il n’y a aucun motif à changer cette approche. La situation de fait dans Robitaille est différente de celle de la présente affaire et ne devrait pas être appliquée pour infirmer la jurisprudence établie par Parkolub et Hu. Contrairement à Robitaille, il n’y a eu aucune réponse au dernier palier de la procédure applicable aux griefs dans la présente affaire. Mme Sandhu a pris la décision au deuxième palier et le fonctionnaire n’aurait pas le droit de demander un contrôle judiciaire de la décision de l’employeur sans une réponse au dernier palier. L’arbitrage est son seul recours. (Voir aussi Reasner c. Conseil du Trésor (Transport Canada), dossier de la CRTFP 166-02-26260 (19950607), [1995] C.R.T.F.P.C. no 51 (QL); Rajakaruna c. Conseil du Trésor (Revenu Canada, Impôt), dossier de la CRTFP 166-02-23135 (19930414), [1993] C.R.T.F.P.C. no 59 (QL)).

133        Dans Rogers, la pénalité imposée au fonctionnaire a été réduite à une lettre de réprimande lorsque les parties ont convenu du changement pendant le processus de grief, ce qui n’est pas le cas dans la présente affaire. Les parties dans la présente affaire n’ont pas convenu d’imposer une nouvelle pénalité. Mme Sandhu a décidé de façon unilatérale de faire une substitution pour la réprimande écrite et, dans son témoignage, elle a affirmé qu’elle croyait que la pénalité financière imposée au départ était la mesure disciplinaire adéquate.

134        Ce qui constitue du harcèlement dépend de la façon dont une personne raisonnable jugerait le comportement attaqué. Le harcèlement est un comportement social inacceptable, qui tire son origine dans un moment et un lieu en particulier, qu’il est impossible d’évaluer à moins d’étudier la situation dans son ensemble. Il faut établir une différence entre des désaccords légitimes et le harcèlement. Dans un conflit, il faut examiner la conduite des deux parties. Pour qu’une personne en harcèle une autre, la conduite de l’une doit être axée sur l’autre de façon répétitive et hostile, qui a des répercussions négatives sur sa dignité ou son intégrité (voir Centre hospitalier régional de Trois Rivières (Pavillon St-Joseph) c. Syndicat professionnel des infirmières et infirmiers de Trois-Rivières (Syndicat des infirmières et infirmiers Mauricie–Coeur-du-Québec), [2006] R.J.D.T. 397 (« Trois Rivières »).

135        Les commentaires formulés par le fonctionnaire n’étaient pas malveillants ou dangereusement faux. Il agissait de bonne foi, dans la défense des intérêts des membres du syndicat. Même si les déclarations étaient inappropriées, il demeurait à l’abri de répercussions disciplinaires, puisqu’il agissait dans son rôle syndical. Il n’y a aucune norme de perfection que le fonctionnaire aurait dû respecter pendant qu’il défendait les intérêts du syndicat. Il a fait référence à M. Marshall uniquement en discutant de son poste dans une tribune limitée. Les commentaires formulés à l’interne dans une tribune limitée sont différents de ceux formulés dans une tribune publique. Tant que les commentaires n’étaient pas malveillants ou sciemment dangereux ou faux, le fonctionnaire était protégé (voir Burns Meats Ltd.; Interforest Ltd. c. International Woodworkers, Local 1-500 (1990), 12 L.A.C. (4e) 257; Toronto (Metropolitan); Saskatoon (City) v. Canadian Union of Public Employees, Local No. 47, 2012 CanLII 55909 (SK LA); Scruby c. Staub, dossier de la CRTFP 161-02-420 (19870616), [1987] C.R.T.F.P.C. no 166 (QL); Administrateur général (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences), et al., 2006 CRTFP 125; Canada (Procureur général) c. Demers, 2008 CF 873; King, 2008 CRTFP 64).

C. Contre-preuve de l’employeur

136        La question consiste à déterminer si les commentaires que le fonctionnaire a continué de formuler sur le fait que M. Marshall faisait du favoritisme à l’égard de Mme Marshall en ne lui établissant pas son horaire comme les autres et en lui permettant de substituer ses quarts de travail, contrairement à la politique, étaient offensants. Le fonctionnaire n’a aucunement montré qu’il reconnaissait les répercussions de ses commentaires répétés sur les Marshall. Le fonctionnaire a fondé ses commentaires sur la perception d’un conflit d’intérêts, et non sur les faits.

IV. Motifs

137        Il y a possiblement trois questions qu’il m’appartient de trancher dans la présente affaire :

  1. L’arbitre de grief a-t-il la compétence pour entendre un grief disciplinaire lorsque la pénalité était une lettre de réprimande? Si la réponse est « non », il m’est inutile d’aller plus loin. Si la réponse est « oui », je dois donc répondre à la deuxième question.
  2. Le fonctionnaire a-t-il harcelé M. et Mme Marshall, comme c’est allégué? Si la réponse est « non », je n’ai qu’à accueillir le grief. Si la réponse est « oui », en tout ou en partie, je dois répondre à la troisième question.
  3. La pénalité imposée par l’employeur était-elle appropriée dans la situation?

138        L’employeur a affirmé qu’étant donné que la suspension imposée au départ à l’endroit du fonctionnaire a été remplacée par une lettre de réprimande avant l’audience, il n’y avait aucune question réelle et l’arbitre de grief n’a pas la compétence, puisque les lettres de réprimande ne peuvent pas être renvoyées à l’arbitrage. La LRTFP impose des limites sur les griefs qui sont admissibles à l’arbitrage, que voici :

[…]

Renvoi à l’arbitrage

209 (1) Après l’avoir porté jusqu’au dernier palier de la procédure applicable sans avoir obtenu satisfaction, le fonctionnaire peut renvoyer à l’arbitrage tout grief individuel portant sur :

a) soit l’interprétation ou l’application, à son égard, de toute disposition d’une convention collective ou d’une décision arbitrale;

b) soit une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire;

c) soit, s’il est un fonctionnaire de l’administration publique centrale :

(i) la rétrogradation ou le licenciement imposé sous le régime soit de l’alinéa 12(1)d) de la Loi sur la gestion des finances publiques pour rendement insuffisant, soit de l’alinéa 12(1)e) de cette loi pour toute raison autre que l’insuffisance du rendement, un manquement à la discipline ou une inconduite,

(ii) la mutation sous le régime de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique sans son consentement alors que celui-ci était nécessaire;

d) soit la rétrogradation ou le licenciement imposé pour toute raison autre qu’un manquement à la discipline ou une inconduite, s’il est un fonctionnaire d’un organisme distinct désigné au titre du paragraphe (3).

[…]

139        La Cour fédérale a conclu, dans l’affaire Robitaille, que le Parlement avait décidé que seuls les griefs qui contestent les mesures disciplinaires les plus graves peuvent être renvoyés à l’arbitrage. Seuls les griefs liés à un licenciement, une rétrogradation, une suspension ou une sanction pécuniaire peuvent être renvoyés à l’arbitrage. Une réprimande écrite, même s’il s’agit d’une mesure disciplinaire, n’entraîne pas l’une des conséquences indiquées à l’alinéa 209(1)b) de la LRTFP.

140        L’affaire Robitaille diffère toutefois sur les faits de l’affaire devant moi. Dans cette affaire, le fonctionnaire avait déposé un grief précis par rapport à une lettre de réprimande qui avait remplacé une suspension de 15 jours. Ce grief a été renvoyé à l’arbitrage. Dans l’affaire présentée devant moi, le grief renvoyé à l’arbitrage est lié à la suspension d’une journée sans salaire. Le fonctionnaire n’a pas présenté de grief sur la lettre de réprimande qui a été substituée supposément au deuxième palier de la procédure applicable aux griefs. Il demeure une question réelle à trancher, qui implique de déterminer si la mesure disciplinaire était justifiée et, le cas échéant, si la pénalité imposée était raisonnable dans les circonstances.

141        Le représentant du fonctionnaire a affirmé que le principe établi dans Parkolub et Hu devrait être suivi, c’est-à-dire que l’arbitre de grief a compétence si, au moment où le grief lui a été renvoyé, le fonctionnaire avait le droit à l’arbitrage.Il n’y a aucun motif à changer cette approche. Contrairement à Robitaille, il n’y a eu aucune réponse au dernier palier de la procédure applicable aux griefs dans la présente affaire. Mme Sandhu a pris la décision au deuxième palier et a témoigné en disant que, selon elle, la suspension imposée au départ était justifiée. Elle a accepté de substituer la suspension pour la lettre de réprimande dans l’espoir d’empêcher la nécessité d’aller en arbitrage. Je mets en doute le pouvoir de Mme Sandhu de modifier la pénalité après avoir rendu sa décision au deuxième palier et après que le grief avait été renvoyé au dernier palier. À ce stade, la décision appartient à la personne indiquée au dernier palier de la procédure applicable aux griefs, qui a l’autorité de modifier la décision de Mme Sandhu. Étant donné que Mme Sandhu n’avait peut-être pas le pouvoir de changer la pénalité après que le grief a été renvoyé à l’arbitrage au dernier palier et, selon la décision rendue dans McWilliams et al. c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2007 CRTFP 58, que le défaut de présenter une réponse au dernier palier de la procédure applicable aux griefs constitue un refus de facto du grief, le renvoi à l’arbitrage de la suspension d’une journée est le seul recours du fonctionnaire.

142        Le fonctionnaire a affirmé que la situation de fait dans l’affaire Robitaille est différente de celle de la présente affaire et qu’elle ne devrait pas être appliquée pour infirmer la jurisprudence établie par Parkolub et Hu, et je suis d’accord. Je suis convaincue que le législateur et la Cour fédérale n’imaginaient pas d’utiliser l’interdiction du renvoi d’une lettre de réprimande à l’arbitrage pour que l’employeur s’en serve afin d’évincer la compétence de l’arbitre de grief à l’aube d’une audience en substituant une lettre de réprimande. La politique publique exige que, dans l’intérêt de relations de travail efficaces, les décisions prises par l’employeur soient soumises à un examen rigoureux. L’employeur ne devrait pas avoir le droit de se soustraire à cet examen rigoureux en substituant la mesure disciplinaire originale par une lettre de réprimande sur les marches du palais de justice.

143        Pour ces motifs, j’ai conclu qu’un arbitre de grief a la compétence pour entendre cette affaire. La question devient ensuite une question visant à déterminer si la mesure disciplinaire était justifiée. Le fonctionnaire a mis en doute la qualité des enquêtes sur les plaintes de harcèlement déposées par M. et Mme Marshall. Les audiences devant un arbitre de grief sont des audiences de novo et tout préjudice ou iniquité causé par un problème de procédure est corrigé par l’audition du grief (voir Maas c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2010 CRTFP 123, au paragr. 118; Pajic c. Opérations des enquêtes statistiques, 2012 CRTFP 70 et Tipple c. Canada (Conseil du Trésor),[1985] A.C.F. no 818 (CF) (QL), à 2). Cela étant dit, toute irrégularité dans l’enquête menée par M. Larocque a des conséquences minimes sur les circonstances entourant l’affaire. Pour ce qui est de déterminer s’il fallait tenir compte de la tendance du fonctionnaire à faire des commentaires jusqu’en 2010, il est clair selon moi qu’une telle tendance existe, particulièrement étant donné que l’environnement des relations de travail à l’établissement entre 2010 et 2013 était au cœur de bon nombre des commentaires effectués par le fonctionnaire.

144        Le fonctionnaire a avoué avoir formulé des allégations dans différentes tribunes de relations de travail selon lesquelles le gestionnaire correctionnel, horaire et déploiement, à l’établissement abusait de son pouvoir et qu’il n’établissait pas les horaires des agents correctionnels selon la convention collective et la politique. Il n’a pas nié avoir discuté de ces allégations avec plusieurs membres syndicaux avec qui il travaillait. Il est impossible qu’une personne qui connaissait l’établissement ignore de qui le fonctionnaire parlait. Il n’a pas nié également qu’à la suite de ses commentaires, Mme Marshall a été victime de dommages collatéraux. Ses commentaires n’étaient pas dirigés particulièrement à son endroit, mais elle était touchée par l’examen continu de son horaire et par ses commentaires, qui étaient destinés à l’empêcher de recevoir une nomination intérimaire en tant que gestionnaire correctionnel. Le fait que l’employeur a choisi de ne pas tenir compte des commentaires formulés par le fonctionnaire au moment de procéder à la nomination n’est pas pertinent. L’intention était d’influencer la décision de l’employeur.

145        Le fonctionnaire a affirmé que ses commentaires étaient innocents, qu’il les avait formulés dans le cadre de ses activités syndicales et qu’il était donc exonéré de mesures disciplinaires à cet égard. La preuve a clairement montré qu’au cours de la période en question, un environnement très turbulent de relations de travail était présent à l’établissement, ce qu’une série de directeurs ont tenté de résoudre. L’employeur n’a pas ignoré les commentaires formulés par le fonctionnaire; il a mené deux enquêtes, par Mme Lamm et M. Morgan, qui ont tous deux conclu que, mis à part le défaut de M. Marshall de se conformer aux directives sur la consignation des congés de sa femme, ses pratiques d’établissement de l’horaire n’avaient rien de fâcheux.

146        Le fonctionnaire aurait dû savoir que le fait de répéter continuellement les allégations selon lesquelles M. Marshall avait abusé de son rôle de gestionnaire correctionnel, horaire et déploiement, aurait pu aggraver la situation et contribuer à l’agitation de l’environnement des relations de travail à l’établissement. Qui plus est, les nombreux documents liés aux horaires présentés comme pièces (pièces 21, 22, 23, 30, 56, 67 et 58) ne soutiennent pas les allégations du fonctionnaire. En particulier, je remarque que ses allégations selon lesquelles l’horaire de Mme Marshall a été modifié afin de s’assurer qu’elle travaillait pendant un plus grand nombre de jours fériés sont contredites par son rapport de congé, qui indique qu’elle utilisait ses crédits de congé annuel pour remplacer ces quarts plutôt que de travailler. Ce fait, combiné au témoignage du fonctionnaire selon lequel il préférait travailler tous les jours fériés, à l’exception du Vendredi saint, me porte à mettre en doute son motif réel lorsqu’il a formulé ces allégations au sujet de Mme Marshall.

147        Le fonctionnaire a affirmé que ses commentaires à propos des enjeux liés à l’horaire à l’établissement étaient protégés, puisqu’il agissait en tout temps dans son rôle syndical. Je n’accepte pas cette affirmation en ce qui concerne ses commentaires à l’égard de Mme Marshall, dont l’horaire semblait constituer le point de mire de ses préoccupations. Après deux enquêtes qui lui ont donné tort jusqu’à présent, en ce qui concerne les formulaires qu’il a formulés à son égard, le fonctionnaire savait ou aurait dû savoir que sa conduite était inadmissible. Pour ces motifs et sa reconnaissance, dans son témoignage, du fait qu’il aurait dû s’abstenir de formuler des commentaires sur Mme Marshall, je suis d’accord avec les conclusions de M. Larocque selon lesquelles le fonctionnaire l’a harcelée.

148        En tant que représentant syndical, le fonctionnaire avait le droit de remettre en question les mesures prises par l’employeur au moment d’établir l’horaire de ses employés. Il avait également le droit de soulever ses préoccupations auprès des différentes fonctions des relations de travail comme il l’a fait. L’établissement de l’horaire des employés ne constituait pas la seule préoccupation du syndicat à ce moment, qui était, selon tous ceux qui ont témoigné, une période très tumultueuse pour les relations de travail à l’établissement. Les membres du syndicat étaient insatisfaits de bon nombre d’éléments à l’établissement et le fonctionnaire avait le rôle, en tant que président local, de les présenter en vue de les résoudre. Il aurait été impossible pour lui de soulever les enjeux avec lesquels les membres du syndicat étaient aux prises à l’établissement sans faire référence aux personnes en cause. Il aurait été impossible de remettre en question les enjeux liés à l’établissement de l’horaire sans faire référence aux gestionnaires correctionnel, horaire et déploiement, étant donné que ce poste était uniquement chargé d’établir les horaires des agents correctionnels. Étant donné que M. Marshall était le seul et unique employé responsable de l’établissement de l’horaire à tous les moments pertinents, hormis la période pendant laquelle il a été retiré pour que l’enquête soit menée, le fait de faire référence à ce poste ou à la personne aurait été la même chose.

149        Le discours syndical n’est pas illimité. Les représentants syndicaux ont le droit d’exprimer leurs critiques, qui ont le potentiel de toucher l’employeur, tant que ces critiques ne sont pas malveillantes et qu’ils ne font pas des déclarations qui sont sciemment ou dangereusement fausses. Le fait d’être animé ou émotif au moment d’exprimer des opinions ne donne pas lieu à une mesure disciplinaire justifiable. Selon la Cour fédérale, dans King c. Canada (Procureur général), 2012 CF 488, c’est l’employeur qui avait le fardeau de la preuve afin d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que le fonctionnaire avait agi en dehors de la portée de ses fonctions syndicales, ce qu’il n’a pas fait au sujet des commentaires du fonctionnaire sur l’horaire et le déploiement des agents correctionnels à l’établissement.

150        Tout au long de ce processus, y compris au cours de l’arbitrage, le fonctionnaire était très animé lorsqu’il exprimait ses opinions selon lesquelles les choses allaient mal concernant l’établissement de l’horaire et dans l’environnement des relations de travail à l’établissement. J’accepte sa preuve selon laquelle son unique intention était de protéger les droits des membres de la section locale de son syndicat et de veiller à l’application appropriée de la convention collective et des politiques. Le fait qu’il entretenait une relation relativement tumultueuse avec M. Marshall ne rendait pas pour autant son expression de ces préoccupations moins légitime. Un examen des mêmes documents liés à l’établissement de l’horaire prouve clairement que de multiples changements ont été apportés aux horaires, ce qui perturbait les membres syndicaux, même s’ils ne violaient pas la convention collective.

151        Il faut tenir compte des commentaires formulés par des représentants syndicaux à la lumière du contexte dans lequel ils ont été formulés. Comme le représentant du fonctionnaire l’a indiqué, tant que les commentaires n’étaient pas malveillants ou sciemment dangereux ou faux, il était protégé (voir Burns Meats Ltd.; Interforest Ltd.; Toronto (Ville); Saskatoon (City); Scruby; Wagon d’acier national limitée; Shaw; Demers; King, 2012 CF 488). Les déclarations du fonctionnaire sur l’établissement de l’horaire représentent les préoccupations légitimes de ses membres et n’étaient pas sciemment fausses ou dangereuses.

152        Le fait de continuer obstinément à formuler ces allégations, même à la lumière des enquêtes de Mme Lamm et de M. Morgan, étant donné l’environnement des relations de travail à ce moment, n’était pas malveillant et ces déclarations n’étaient pas totalement fausses. Il y avait des incohérences apparentes dans les pratiques d’établissement de l’horaire à l’établissement, dont certaines visaient à réduire les heures supplémentaires, tandis que d’autres visaient à répondre aux demandes des membres qui approchaient individuellement le gestionnaire correctionnel, horaire et déploiement. Toutefois, cela ne répond pas à la définition de harcèlement énoncée dans Trois Rivières et Joss.

153        Étant donné que j’ai conclu que le fonctionnaire a effectivement harcelé Mme Marshall, une mesure disciplinaire était justifiée. Comme je l’ai indiqué dans Cooper c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2013 CRTFP 119, un arbitre de grief devrait réduire une pénalité disciplinaire imposée par la direction uniquement si elle est clairement déraisonnable ou erronée. Si l’employeur n’avait pas déjà réduit la pénalité à une réprimande écrite, j’aurais maintenu la suspension d’une journée imposée au départ, puisqu’elle n’était ni déraisonnable ni erronée, étant donné ma conclusion selon laquelle le fonctionnaire a réellement harcelé Mme Marshall. J’ai consulté avec intérêt les nombreuses décisions invoquées à l’appui des arguments des deux parties. Même si je ne les ai pas citées ni traitées chacune individuellement, j’en ai tenu compte pour parvenir à ma conclusion.

154        Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

155        Le grief est rejeté.

Le 23 septembre 2016.

Traduction de la CRTEFP

Margaret T.A. Shannon,
arbitre de grief

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