Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé a travaillé au même groupe et au même niveau pendant neuf ans – il a allégué dans son grief que le défendeur avait retiré certaines de ses fonctions et considérablement modifié ses conditions de travail, ce qui lui a causé du stress et de l’anxiété – par conséquent, il est parti en congé de maladie prolongé – il n’est jamais retourné travailler et il a démissionné deux ans plus tard – il a affirmé que le défendeur lui avait imposé un congédiement déguisé ou, subsidiairement, qu’il l’avait licencié – l’intimé a fait valoir que la Commission n’avait pas compétence pour entendre le renvoi à l’arbitrage du grief – pour qu’elle puisse entendre l’affaire, le fonctionnaire s’estimant lésé devait établir que, selon la prépondérance des probabilités, les actions du défendeur constituaient un licenciement pour des motifs disciplinaires (alinéa 209(1)b) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique) ou pour un rendement insatisfaisant (sous alinéa 209(1)c)(i)) – la Commission a conclu qu’il n’y avait aucune preuve que le fonctionnaire s’estimant lésé avait été licencié ou que ses fonctions avaient été retirées de manière à ce qu’un congédiement déguisé se soit produit – par conséquent, elle n’a pas compétence pour entendre le grief – elle a ordonné que certaines pièces soient mises sous scellés, puisque leur divulgation publique pose un risque grave pour la protection de la vie privée de certaines personnes et que les renseignements qu’elles contiennent ne sont pas pertinents pour l’affaire devant la Commission.Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  20170410
  • Dossier:  566-02-9788
  • Référence:  2017 CRTEFP 31

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique


ENTRE

BRYAN NADEAU

fonctionnaire s'estimant lésé

et

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL
(Service correctionnel du Canada)

défendeur

Répertorié
Nadeau c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada)


Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage


Devant:
John G. Jaworski, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique
Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Lui-même et Gale Nadeau
Pour le défendeur:
Joel Stelpstra, avocat
Affaire entendue à Abbotsford (Colombie-Britannique),
du 13 au 15 décembre 2016.
(Traduction de la CRTEFP)

MOTIFS DE DÉCISION

I. Grief individuel renvoyé à l’arbitrage

1         Bryan Nadeau, le fonctionnaire s’estimant lésé (le « fonctionnaire »), était un psychologue classifié dans le groupe Psychologie, au niveau 2 (PS-02), auprès du Service correctionnel du Canada (le « SCC » ou l’« employeur ») à Abbotsford, en Colombie-Britannique.

2        Le 18 mai 2011, le fonctionnaire a présenté un grief auprès de l’employeur, faisant valoir ce qui suit :

[Traduction]

Je conteste la décision de l’employeur de retirer les fonctions que j’ai exercées au cours des neuf dernières années et de modifier de manière importante mes conditions de travail. Cela m’a causé un stress et une anxiété immenses. J’ai dû partir en congé de maladie pour prendre soin de ma santé. La modification de mes fonctions et de mes conditions de travail équivalent à un congédiement déguisé.

Mesure corrective demandée :

[Traduction]

  • Que mes fonctions soient rétablies et que mes conditions de travail redeviennent ce qu’elles étaient avant les modifications;
  • Que l’employeur rétablisse mes prestations de congé de maladie;
  • Que je sois indemnisé intégralement.

3        L’employeur a rejeté le grief aux premier, deuxième et dernier paliers de la procédure de règlement des griefs.

4        Le grief a été renvoyé à l’arbitrage le 21 mai 2014, en vertu de l’alinéa 2019(1)b) et du sous-alinéa 209(1)c)(ii) de la Loi. Dans son grief, le fonctionnaire a allégué qu’il avait fait l’objet d’une mesure disciplinaire ayant entraîné un licenciement, une rétrogradation, une suspension ou une sanction pécuniaire et qu’il y avait eu mutation d’un employé de l’administration publique centrale en vertu de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, par. 12, 13; la « LEFP ») sans le consentement de ce dernier, alors que son consentement était nécessaire.

5        Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur  (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (la « Commission »), qui remplace l’ancienne Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « CRTFP ») et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). Conformément à l’article 393 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013, une procédure amorcée dans le cadre de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2; la « Loi ») avant le 1er novembre 2014 doit être reprise et poursuivie en vertu de la Loi, dans sa version modifiée par les articles 366 à 470 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013.

II. Question relative à la communication de documents avant l’audience

6        Avant l’audience prévue, le fonctionnaire a présenté une demande concernant la production de certains documents. Le 10 novembre 2016, j’ai rendu une ordonnance afin que l’employeur indique au fonctionnaire tous les documents sur lesquels il comptait s’appuyer à l’audience de la présente affaire. De plus, j’ai ordonné à l’agent négociateur du fonctionnaire, qui ne le représentait plus, de lui délivrer immédiatement tous les documents en sa possession qui portait sur le grief.

7        Une conférence préalable à l’audience (CPA) a été organisée relativement à la présente affaire. Elle a eu lieu par téléconférence, le 29 novembre 2016. À ce moment, l’avocat de l’employeur a confirmé que le Dr Robert Roy devait participer à l’audience et que, pour cette raison, il n’était pas nécessaire de lui délivrer et de lui signifier une assignation à témoigner. Le fonctionnaire a demandé que le Dr Roy participe à la première journée d’audience, car il souhaitait l’appeler en qualité de premier témoin, et l’employeur a convenu qu’il prendrait des mesures pour que le Dr Roy soit présent le 13 décembre 2016.

8        Lors de la CPA, une question a été soulevée concernant les documents qui auraient été pertinents à un processus désigné comme l’« examen d’assurance de la qualité » (l’« EAQ ») du travail du fonctionnaire. J’ai ordonné à l’employeur de produire ces documents au fonctionnaire dès que possible. Le nombre exact de documents était inconnu. Il était anticipé que ces documents pourraient contenir des renseignements privés et personnels sur des détenus qui pourraient avoir été ou qui étaient toujours incarcérés. Ces renseignements personnels et privés n’étaient pas pertinents aux questions dont je suis saisi. 

9        Le 5 décembre 2016, l’avocat de l’employeur a informé le fonctionnaire et la Commission qu’il pourrait être difficile de présenter ces documents au fonctionnaire en raison de l’ampleur du caviardage de renseignements qui serait nécessaire. Le 6 décembre 2016, j’ai ordonné à l’employeur de mettre à la disposition du fonctionnaire, immédiatement, les documents non caviardés pertinents à l’EAQ et assujettis à mon ordonnance du 29 novembre 2016, et ce, à un emplacement du SCC convenable pour le fonctionnaire à Abbotsford, afin que ce dernier puisse examiner et identifier tous les documents nécessaires, selon lui, pour l’audience. En outre, j’ai ordonné à l’employeur d’apporter l’ensemble de ces documents à l’audience qui commençait le 13 décembre 2016.

10        L’employeur s’est conformé à l’ordonnance du 6 décembre 2016. Cependant, le fonctionnaire ne s’est pas prévalu de la possibilité d’examiner les documents liés à l’EAQ avant l’audience. L’employeur les a apportés à l’audience le 13 décembre 2016 et ils étaient disponibles pour le fonctionnaire aux fins d’examen.

11        Aucun des documents liés à l’EAQ n’a été présenté en preuve.

III. Résumé de la preuve

12        Le fonctionnaire est titulaire d’une maîtrise en psychologie expérimentale de l’Université Concordia (1992) et d’un doctorat, également en psychologie expérimentale, de la Simon Fraser University (la « SFU ») (1999). Il ne détient aucun permis pour pratiquer la psychologie du College of Psychologists of British Columbia (le « Collège »), soit l’organisation qui réglemente la profession dans cette province.

13        Le fonctionnaire a commencé son emploi d’une durée indéterminée à temps plein auprès de l’employeur en 1999 en tant que PS-02. Antérieurement, à partir de 1996, il a également travaillé pour l’employeur dans un cadre contractuel. Sa carrière auprès de l’employeur se trouvait dans sa région du Pacifique, principalement dans deux réserves institutionnelles correctionnelles, la réserve de Matsqui et la réserve de Mission. Les terrains de la réserve Matsqui comprennent l’établissement correctionnel à sécurité moyenne de Matsqui, l’établissement du Pacifique et le Centre régional de réception et d’évaluation (le « CRRE »). Les terrains de la réserve de Mission comprennent l’établissement correctionnel à sécurité moyenne de Mission (« Mission ») et l’établissement correctionnel à sécurité minimale de Ferndale (maintenant l’établissement de Mission Minimum) (« Ferndale »).

14        Plusieurs évaluations du rendement du fonctionnaire datant de 1999 à 2009 ont été présentées en preuve. Le fonctionnaire a fait valoir qu’il s’agissait de la seule rétroaction qu’il avait reçue pendant qu’il accomplissait son travail. À son avis, il était perçu comme accomplissant un travail hautement spécialisé d’une grande valeur. Un examen de ses évaluations du rendement indiquait que, parfois, il atteignait la plupart de ses objectifs et que, d’autres fois, il atteignait et dépassait l’ensemble de ses objectifs. Certaines évaluations indiquent que le superviseur responsable de mener l’évaluation du fonctionnaire ne pouvait pas le faire, en grande partie parce que, selon la preuve, les personnes qui auraient eu la responsabilité de superviser le fonctionnaire n’avaient pas occupé ce poste pendant la période de temps requise pour mener une évaluation de rendement.

15        Au moment de l’audience, le Dr Roy avait pris sa retraite de la fonction publique. Il a déclaré qu’il s’était joint au SCC en 1995, en tant que PS-02, et qu’il avait gravi les échelons des différents niveaux de psychologie pour atteindre le niveau PS-05, qui correspond au poste de psychologue régional. Lorsqu’il a quitté le SCC en janvier 2015, il occupait le poste de gestionnaire régional de la santé mentale institutionnelle et était responsable de la région du Pacifique du SCC, non seulement pour les psychologues qui travaillaient pour le SCC, mais aussi pour les infirmiers, les travailleurs sociaux et les psychiatres embauchés à titre contractuel.

16        Le Dr Roy a un doctorat en psychologie clinique de la SFU. Il est également un psychologue enregistré auprès du Collège.

17        La preuve a démontré que le Dr Roy et le fonctionnaire se connaissaient depuis longtemps et qu’ils avaient étudié ensemble à la SFU.

18        Le Dr Roy a fait valoir que, pendant les périodes pertinentes aux faits qui concernent le présent grief, il était le psychologue régional du SCC pour sa région du Pacifique. Il a toutefois déclaré que, pendant cette période, son rôle vis-à-vis de la supervision et la voie hiérarchique à l’égard du fonctionnaire avaient changé. Aux environs d’avril 2010, en raison de changements apportés à la structure organisationnelle, la voie hiérarchique à l’égard du fonctionnaire a été transférée de lui à l’établissement quelconque où le fonctionnaire a été affecté. En tant que psychologue régional, il a conservé un rôle fonctionnel en assurant la qualité du travail de psychologie exécuté dans la région.

19        Le Dr Roy a souligné qu’il existe une différence entre la psychologie clinique, soit la discipline qu’il a étudiée et dans laquelle il a œuvré, et la psychologie expérimentale, qui est la discipline que le fonctionnaire a étudiée et pour laquelle il a obtenu sa maîtrise et son doctorat. En termes simples, les psychologues cliniques suivent une formation différente, tant en ce qui concerne les travaux durant les cours que l’expérience pratique, à propos du traitement des patients. Les psychologues expérimentaux sont des chercheurs. De plus, pour être en mesure d’obtenir un permis du Collège et de traiter des patients, un psychologue clinique (parfois désigné comme un « clinicien ») est tenu de présenter une demande au Collège et de répondre à ses exigences.

20        Le Dr Roy a mentionné que les psychologues exercent un certain nombre de tâches différentes au SCC, dont divers types d’évaluations des détenus, des thérapies avec les détenus, ainsi que des interventions en cas de crise. Les évaluations sont menées à différentes fins, y compris pour placer les détenus dans des établissements ou déterminer s’ils devraient être libérés, et cerner les programmes et le traitement dont un détenu pourrait avoir besoin. Il est important que les évaluations soient menées de manière adéquate, conformément aux méthodes et aux normes reconnues, et de reconnaître que des erreurs pourraient entraîner le placement inadéquat d’un détenu dans un établissement ou un environnement institutionnel, le traitement inapproprié, la mise en liberté ou le maintien de l’incarcération alors que le contraire est justifié. Si rien n’est fait conformément aux normes et à la pratique reconnues, la responsabilité incomberait à l’employeur. Le Dr Roy a donné des exemples du risque associé à une évaluation menée incorrectement. Une telle évaluation pourrait mener à une recommandation selon laquelle un détenu qui ne devrait pas être remis en liberté serait remis en liberté dans la communauté et commette un crime, ou à ce qu’un détenu qui devrait être remis en liberté soit maintenu à l’établissement, alors qu’il pourrait ou devrait être remis en liberté.

21        Le Dr Roy a déclaré que les évaluations sont également importantes en ce qui a trait à la sécurité d’un établissement, puisqu’une évaluation menée d’une manière inadéquate pourrait entraîner un retard dans le traitement d’un détenu ou le traitement inutile d’un détenu.

22        Le Dr Roy a souligné que les PS-02 sont des psychologues employés par le SCC qui ne sont pas enregistrés auprès d’un ordre professionnel provincial (le Collège en Colombie-Britannique). Les PS-03 sont des psychologues qui sont généralement de même niveau que les PS-02, sauf qu’ils ont obtenu leur permis de pratiquer auprès d’un ordre professionnel provincial et qu’ils sont enregistrés auprès de celui-ci. La distinction à l’intérieur du SCC est que le travail d’un PS-02 doit être examiné et approuvé par un psychologue superviseur agréé classifié au niveau PS-03 ou PS-04, alors que les PS-03 approuvent leur propre travail puisqu’ils sont agréés.

23        Selon le témoignage du Dr Roy, les PS-02 ne sont habituellement pas titulaires d’un doctorat, même si certains le sont.

24        En date de janvier 2010, le fonctionnaire occupait un poste classifié au groupe et au niveau PS-02, à Ferndale. Il relevait alors du Dr Evan Lopes, qui n’a pas présenté de témoignage.

25        En février 2010, Pierre Ouellet est devenu le chef intérimaire de la psychologie aux établissements de Ferndale et de Mission. Il est titulaire d’une maîtrise en psychologie et il est également un psychologue agréé auprès du Collège. Il a commencé sa carrière au SCC à l’établissement de Dorchester, au Nouveau-Brunswick, aux environs de 1987. Il a passé cinq ou six ans au Nouveau-Brunswick avant de déménager en Colombie-Britannique, où il a travaillé à différents établissements ainsi qu’à la GRC. Il a occupé le poste de chef intérimaire de psychologie jusqu’en octobre 2010.

26        M. Ouellet a fait valoir que pendant qu’il était le chef intérimaire de la psychologie, il était responsable de l’ensemble des services de psychologie pour les deux établissements. Il a affirmé que, pendant une semaine de travail régulière, il tentait de répartir son temps en passant trois jours à Mission et deux à Ferndale. Au cours de cette période, deux psychologues travaillaient à Ferndale, dont le fonctionnaire.

27        Une longue chaîne de courriel a été présentée en preuve. Le dernier courriel de la chaîne était daté du 26 février 2010, et provenait de Jamile Amery, un conseiller en relations de travail à l’Administration centrale de la région du Pacifique du SCC. La chaîne de courriels comprenait des échanges de courriels entre le Dr Roy, le Dr Lopes et M. Ouellet à propos du rendement au travail du fonctionnaire. Voici les parties pertinentes des courriels :

[Courriel daté du 27 janvier 2010, à 13 h 14, du Dr Lopes à l’intention du Dr Roy, de Jamile Amery et de (nom omis) :]

[Traduction]

Tel qu’il a été demandé, voici un compte rendu de la rencontre que Jamile Amery et moi-même avons eu avec Bryan Nadeau. Comme nous en avions discuté, Bryan nous a rencontré tous les deux et Jamile a pris des notes de la rencontre. Nous avons approché Bryan en raison de préoccupations à l’égard de la rédaction des évaluations et nous lui avons présenté des options de rechange :

L’option 1 consistait à examiner les postes WP, dans lesquels il serait mieux rémunéré que dans son emploi actuel et qui n’exigeraient pas de lui qu’il rédige des évaluations. Il aurait à suivre le cours WP. Il a également été indiqué qu’un résultat possible serait un trajet plus court entre le travail et son domicile.

L’option 2 consistait à examiner la possibilité de mettre à niveau son travail universitaire afin d’être en mesure d’assurer la prestation de l’ISME. Nous avons discuté de la possibilité qu’il examine ce qui était requis sur le plan universitaire, ainsi que les calendriers universitaires afin de répondre à une demande liée au travail ou aux études. Il a été envisagé que le SCC examine la possibilité d’assumer le coût des cours et travaille avec lui en vue d’établir un calendrier raisonnable pour lui permettre de répondre aux exigences. Il a fait part de son intérêt à l’égard de cette possibilité. J’ai mentionné que, s’il était en mesure de me remettre une copie de ses transcriptions, je les présenterais à quelques universités et que je verrais ce qu’elles avaient à dire à propos d’une formation équivalente. Le Dr Nadeau était d’accord et a mentionné qu’à l’heure actuelle il devait répondre à quelques demandes urgentes concernant certaines questions personnelles finales et qu’il donnerait suite à l’offre universitaire.

Entre-temps, il continuera de rédiger des évaluations à Ferndale. Pour éviter des problèmes importants, il rédigera les évaluations pour les cas jugés moins controversés ainsi que des mises à jour. Il nous informera des évaluations qui, selon lui, ne répondent pas à ces critères et l’évaluation sera transférée à un autre psychologue. Qui plus est, je lirai les documents (dossiers) afin de contresigner ses évaluations.

[…]

Jamile, veuillez corriger, s’il y a lieu, les renseignements que j’ai présentés ici s’ils sont inexacts ou s’ils ne sont pas clairs.

[…]

[Courriel daté du 27 janvier 2010, à 17 h 46, de Jamile Amery au Dr Roy et au Dr Lopes :]

[Traduction]

Je crois que vous avez saisi les options présentées à M. Nadeau de manière succincte. J’ajouterais simplement qu’il n’était pas intéressé par le poste WP, car il n’occuperait plus un poste PS. Il n’était pas non plus intéressé à l’exécution du programme, mais il pourrait changer d’idée en cours de route.

Je crois qu’il est important de souligner qu’une partie de la discussion concernait l’appui continu de la direction à l’égard des psychologues et du travail qu’ils accomplissent, y compris le processus d’évaluation. Plus particulièrement, nous avons abordé les préoccupations soulevées quant à savoir si les évaluations achevées pouvaient être contestées au motif qu’elles présentaient un parti pris et Evan a réitéré qu’il renforcerait l’élément touchant l’examen de la supervision pour les évaluations de l’employé à court terme. J’ignorais qu’on devait faire la distinction quant à savoir si l’évaluation était controversée ou non, ou qu’il incombait à M. Nadeau de rendre cette détermination. Cela s’avère quelque peu problématique, car il ne s’agit pas d’une mesure d’adaptation que nous lui avons offerte pour qu’il retourne à son poste d’attache. Si cette distinction doit être faite, je recommanderais de la désigner comme une mesure d’adaptation pour une période déterminée jusqu’à ce que M. Nadeau ait repris confiance en ce qui concerne l’achèvement des évaluations qui lui auraient été affectées s’il n’avait pas été absent du travail. Agir autrement n’appuierait pas les renseignements présentés pendant la réunion au cours de laquelle nous avons confirmé pour M. Nadeau que tous les psychologues étaient susceptibles de faire l’objet d’une plainte de la part de détenus et que toutes les évaluations pouvaient être contestées dans le cadre d’une audience.

[…]

[Courriel daté du 26 février 2010, à 9 h 52, de Jamile Amery à M. Ouellet, avec une copie conforme au Dr Roy :]

[…]

[Traduction]

À la fin janvier, Evan Lopes et moi-même avons eu une réunion avec Bryan Nadeau afin de discuter d’un certain nombre de questions en ce qui concerne son retour au travail après une période de congé prolongée. Il n’a pas demandé à être représenté par son syndicat et la portée de la discussion n’était pas de nature disciplinaire.

Jusqu’à présent, les Relations de travail régionales ont participé en vue d’aider la direction au sujet du retour au travail et l’examen des préoccupations de M. Nadeau dans la mesure où elles étaient liées à sa sécurité en raison d’un incident qui était survenu à l’établissement de Mission à la fin de 2008. Dans l’éventualité où vous auriez besoin de renseignements à propos de cette question, Rob ou Evan seront en mesure de vous présenter un aperçu de l’affaire.

Je crois comprendre d’après Rob que vous occupez désormais le poste PS-04 intérimaire de superviseur de la psychologie aux établissements de Mission et de Ferndale. J’ai donc annexé les notes suivantes sur la réunion du 27 janvier 2010 avec M. Nadeau pour que vous puissiez les examiner et prendre connaissance des discussions précédentes.

[…]

[Sic pour l’ensemble de la citation]

28        Selon les déclarations de M. Ouellet, lorsqu’il est arrivé aux établissements de Mission et de Ferndale, il a rencontré le personnel et il a posé des questions afin d’apprendre à [traduction] « connaître les lieux, qui est qui et le fonctionnement des choses ». Il a déclaré qu’il avait rencontré le fonctionnaire et l’autre psychologue qui travaillait à Ferndale à l’époque, et qu’il avait appris qu’il y avait une entente de télétravail non documentée en place qui les autorisait à travailler à domicile deux jours par semaine. Il a déclaré qu’il en avait été surpris parce qu’il s’agissait d’une entente non documentée et non conforme à la politique sur le télétravail.

29        Le 2 mars 2010, M. Ouellet a envoyé un courriel au Dr Roy en ce qui concerne une rencontre qu’il a eue avec le fonctionnaire, au cours de laquelle ils ont discuté de la mise à niveau en matière d’études. Voici les parties pertinentes du courriel :

[Traduction]

J’ai eu une rencontre avec Bryan Nadeau ce matin afin de discuter de ses besoins en termes de mise à niveau en matière d’études, dans le but d’obtenir le permis en C.-B. Bryan est informé du soutien disponible et en est reconnaissant, mais à ce stade, il n’a pas été en mesure de donner suite à cette question. Nous avons discuté de la possibilité offerte par CPBC [le Collège] de passer en revue les demandes des employés du SCC et de leur offrir des conseils individuels quant à leurs besoins en vue d’atteindre divers niveaux de permis. Bryan prévoit tirer profit de cette possibilité et on l’a fortement encouragé à présenter une demande dès que possible. Autrement, Bryan a parlé en termes généraux à propos de ce qu’il a vécu ces derniers mois et il a déclaré qu’il éprouvait toujours certaines préoccupations relatives à sa sécurité personnelle et à celle de sa famille compte tenu des aspects inconnus de la situation. Il croit que la direction n’a pas fait preuve de diligence raisonnable lorsqu’elle a été informée de la relation entre son épouse et le détenu. Il a déclaré que son représentant syndical avait effectué un suivi à l’égard de ces questions, mais refusait de dire d’une manière ou d’une autre ce qui pouvait être fait pour soulager ses préoccupations. À la fin, Bryan était agréable et collaboratif. Il a indiqué son intention de continuer à occuper son poste actuel dans un avenir prévisible. Nous avons abordé les questions relatives à la supervision et les attentes d’une manière satisfaisante.

Je continuerai à effectuer un suivi mensuel auprès de lui à l’égard de sa demande au CPBC [Collège].

30        M. Ouellet a déclaré qu’il croyait comprendre que le fonctionnaire allait tirer profit de l’occasion d’obtenir son permis auprès du Collège. Il a déclaré qu’un certain nombre de psychologues du SCC qui occupaient ce poste étaient passés par ce processus.

31        M. Ouellet a fait valoir qu’il y avait un certain nombre de préoccupations relatives à la qualité du travail du fonctionnaire. Il a déclaré qu’en tant que PS-04, il était tenu d’assumer la responsabilité des évaluations du fonctionnaire. Il a approuvé ces évaluations puisqu’il était agréé. M. Ouellet a déclaré qu’au début de son mandat, il s’était rendu compte que le fonctionnaire avait recours à des normes désuètes en ce qui concerne les essais et qu’il utilisait des termes désuets dans la communication de ses résultats dans les évaluations. Il a déclaré que le fonctionnaire n’était pas au courant de la politique. Selon M. Ouellet, le travail que le fonctionnaire produisait représentait ce à quoi il se serait attendu il y a cinq à sept ans; le travail produit n’était pas à jour, comme il aurait dû l’être. Il a déclaré que l’analyse du fonctionnaire était problématique, ce que M. Ouellet a imputé au fait que le fonctionnaire n’avait pas suivi une formation clinique. 

32        M. Ouellet a déclaré qu’il avait passé un temps considérable à superviser le travail du fonctionnaire et il a ajouté que le fonctionnaire avait beaucoup de rattrapage à faire. Il a indiqué qu’il était difficile de superviser le fonctionnaire. Bien que le fait d’encourager les employés  et d’assurer leur réussite soit positif, il y a également des échéanciers et des pressions. Les détenus ont des droits, la société s’attend à être en sécurité et à ne pas être exposée au risque, et des normes doivent être respectées.

33        M. Ouellet a déclaré que le fonctionnaire éprouvait des difficultés à composer avec les attentes. Il a fait valoir qu’à une occasion, le fonctionnaire avait pris un congé de maladie en raison du stress peu de temps avant d’avoir à remettre une évaluation du risque, laissant l’employeur dans une situation difficile.

34        M. Ouellet a déclaré qu’en tant que PS-04 et psychologue agréé, lorsqu’il approuve une évaluation, il doit accepter que l’évaluation puisse être contestée devant les tribunaux et il doit répondre du contenu de l’évaluation. Si quelque chose se produit, le pire scénario étant qu’un détenu soit libéré et cause de graves lésions corporelles à une personne, il serait questionné à propos de l’évaluation dans le cadre de laquelle la mise en liberté du détenu a été recommandée. Il y a des procédures et des processus à suivre; s’ils ne sont pas suivis, il devra en assumer la responsabilité. 

35        Le 30 mars 2010, M. Ouellet a envoyé un autre courriel au Dr Roy, en résumant ses préoccupations à propos du fonctionnaire, comme suit :

[Traduction]

La présente vise à documenter mon implication auprès du Dr Nadeau, relativement à sa présentation d’un billet du médecin le déclarant incapable de travailler avant d’avoir fait l’objet d’une nouvelle évaluation le 30 avril. Le Dr Nadeau a appelé [nom omis] et a déclaré qu’il était absent en « congé en raison du stress », ce qui a été confirmé dans le courriel qu’elle m’a envoyé.

J’ai commencé à occuper de façon intérimaire le poste de psychologue principal pour les établissements de Mission et de Ferndale le 24 février 2010. Le Dr Nadeau était en congé de maladie entre le 23 et le 26 février, inclusivement. Le 2 mars, j’ai rencontré le personnel de l’établissement de Ferndale pour la première fois en qualité de superviseur. Les personnes présentes étaient le Dr Nadeau, [noms omis]. L’horaire de travail et le télétravail ont fait l’objet d’une discussion dans le cadre de cette réunion, puisque les deux psychologues effectuent du télétravail deux jours par semaine. Pendant cette discussion, je me suis rendu compte qu’ils n’avaient aucune entente de télétravail officielle. À l’époque, j’ai déclaré que des ententes devraient être rédigées et présentées aux fins d’approbation, par le Dr Roy ou le directeur Thompson, compte tenu des discussions à propos de la gouvernance de la psychologie. Les deux psychologues m’assurent que leur rendement justifierait amplement le maintien de leurs deux journées de télétravail par semaine et j’ai déclaré que j’appuierais leur demande en fonction de leur rendement. Malgré le changement de régime, les nouvelles attentes (par exemple, la participation des psychologues aux séances d’information des opérations) ainsi que l’examen et la question relative au télétravail, le Dr Nadeau s’est montré agréable et collaboratif.

[…]

Après cette rencontre, j’ai eu une discussion individuelle avec le Dr Nadeau à propos des plans en vue de mettre à niveau ses études afin de répondre aux critères en vue d’être agréé. Le Dr Nadeau était reconnaissant de l’appui offert par le groupe, mais il a indiqué que sa situation personnelle et à domicile ne lui avait pas donné l’occasion d’effectuer les recherches. Il s’est engagé à en faire le suivi et je lui ai recommandé de tirer profit de l’offre du CPBC d’observer les employés du CSC dans le but de déterminer ce dont ils auraient besoin pour satisfaire aux critères dans le but de devenir psychologue agréé.

[…]

Nous avons ensuite discuté de la question du télétravail. Le jour avant, j’ai demandé à [nom omis] d’extraire un rapport de demande concernant l’ensemble des documents entrés dans le SGD [Système de gestion des délinquants] par le psychologue Nadeau [noms omis] pour les trois à quatre dernières années. Ces rapports indiquaient que le Dr Nadeau avait établi en moyenne un rapport par mois au cours des trois dernières années, sans tenir compte du temps où il s’était absenté en raison d’un congé personnel. Cela tranchait singulièrement avec sa déclaration précédente selon laquelle [nom omis] et lui se compareraient très favorablement à tout autre psychologue du CSC en ce qui concerne le rendement. Il convient de mentionner ici que les psychologues de Ferndale ont consacré leur temps presque exclusivement à l’exécution d’évaluation des risques. Leur présence limitée auprès du personnel et des délinquants à Ferndale constituait une préoccupation soulevée par le directeur de Ferndale, le sous-directeur et la DAI.  On a discuté longuement des questions liées au rendement avec le Dr Nadeau. Le nombre de rapports produits par mois était le principal sujet de désaccord. Nous avons convenu, compte tenu de tous les facteurs (c’est-à-dire certains rapports prennent plus de temps alors que, dans d’autres cas, il existe de nombreux rapports d’évaluation antérieurs et ils nécessitent uniquement brèves mises à jour); la participation limitée du Dr Nadeau à d’autres fonctions comme l’intervention en cas de crise, le counseling, la consultation auprès des membres du personnel) qu’une moyenne de trois rapports et plus serait raisonnable, mais que, en fin de compte, il devrait rendre compte de l’utilisation de son temps d’une manière qui est raisonnable et défendable à l’employeur et aux contribuables. Il a convenu que, d’un point de vue opérationnel, il serait moins coûteux pour le SCC d’embaucher des employés contractuels si un employé nommé pour une période indéterminée ne produisait qu’un seul rapport par mois. Je l’ai informé que je ne serais pas en mesure de justifier deux journées de télétravail par semaine en fonction de son rendement précédent. J’ai indiqué que je recommanderais une journée par semaine pour une période de trois mois, sous réserve d’un examen de son rendement. J’ai déclaré que je ferais cette recommandation afin de lui permettre d’améliorer son rendement ou de renoncer à ses activités d’enseignement et/ou de pratique privée qui avaient lieu pendant ses journées de télétravail.  

[…]

[Sic pour l’ensemble de la citation]

36        M. Ouellet a souligné que le Système de gestion des délinquants (SGD) consigne toutes les requêtes et les entrées qu’on y fait. Le fonctionnaire n’effectuait que des évaluations. M. Ouellet a déclaré qu’il était revenu sur les trois dernières années et qu’il avait constaté que le fonctionnaire avait produit en moyenne une évaluation par mois, ce qui était clairement en deçà de la normale. Il a ajouté que les psychologues devraient mener de deux à quatre évaluations par mois, selon leurs autres tâches. M. Ouellet a déclaré que le fonctionnaire lui avait dit qu’il n’avait eu à faire que des évaluations, et que le directeur et les autres membres du personnel l’avaient informé que le fonctionnaire ne participait pas aux séances d’information ou aux conférences sur les cas. Il a signalé que Ferndale, en tant qu’établissement à sécurité minimale, n’exigeait pas beaucoup d’intervention en cas de crise ou de counseling. Il a déclaré que les psychologues travaillant dans des établissements de sécurité moyenne à maximale étaient tenus d’accomplir plus de travail lié à l’intervention en cas de crise et de counseling. Il a déclaré que le fonctionnaire n’accomplissait pas le travail qu’on attendait d’un psychologue au sein d’un établissement.

37        M. Ouellet a souligné que le fonctionnaire exerçait des activités de travail en dehors du SCC. Bien que permis, ce travail ne devait pas interférer avec le travail au SCC. M. Ouellet a confirmé dans sa preuve ce qui avait été présenté dans sa lettre du 30 mars 2010, à l’intention du Dr Roy. 

38        M. Ouellet a mentionné un courriel qu’il a envoyé le 21 septembre 2010, à Marie-France Lapierre, qui occupait à l’époque le poste de psychologue régionale intérimaire. Il a déclaré lui avoir envoyé le courriel parce qu’il était préoccupé par la compétence du fonctionnaire à propos des questions de responsabilité éventuelles. Le courriel est rédigé en partie comme suit :

[Traduction]

[…]

Bryan Nadeau a été embauché en tant que PS-02 il y a de nombreuses années afin d’accomplir des fonctions liées à la psychologie. Il est prétendument titulaire d’un baccalauréat en pharmacologie, mais je crois comprendre qu’il n’a suivi aucun cours ou effectué aucun stage dans le domaine de la psychologie et n’a jamais pu obtenir son auprès d’un collège de psychologie. Donc, essentiellement, cela équivaudrait à embaucher un avocat ou un ingénieur pour exercer des fonctions infirmières sous la supervision d’une infirmière autorisée, ce qui, selon moi, n’irait nulle part.

La LSCMLC [Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition] oblige le SCC à offrir des services qui se conforment à des normes professionnelles reconnues et la DC 840 reconnaît que tous les services psychologiques sont exercés conformément aux normes professionnelles dans la collectivité. Le Collège sanctionnerait-il un praticien privé dans la collectivité en ayant recours à des personnes non qualifiées ou n’ayant aucune formation universitaire afin d’exercer des fonctions relatives à la psychologie, dans la mesure où le psychologue accepte d’assumer la responsabilité professionnelle pour le travail accompli? Je peux voir la formation d’un commis aux tests, mais où se trouve la limite? À quel point le SCC serait-il responsable si un délinquant menait le Dr Nadeau devant les tribunaux? À quel point le SCC serait-il responsable si un délinquant devait se suicider et qu’une enquête révélait que le Dr Nadeau avait omis des facteurs cliniques essentiels (ce que le superviseur ne pourrait pas savoir sans un examen du dossier et une entrevue)? Comment nous assurons-nous du bien-être dans ces conditions?

Il y a un certain nombre d’articles dans notre code de conduite qui laissent entendre que la formation, la supervision et la fausse représentation de personnes en tant que psychologues alors qu’elles ne le sont pas constituent une violation du code de conduite. En conséquence, les psychologues agréés contreviennent-ils au code de conduite en supervisant le travail du Dr Nadeau?

Les lignes directrices concernant la supervision des psychologues de SCC renvoient aux « psychologues non agréés », aux « psychologues agréés aux fins de pratique supervisée », aux « psychologues agréés aux fins de pratique autonome, mais ne connaissant pas le travail judiciaire ou clinique » et aux « psychologues chevronnés et agréés aux fins de pratique autonome ». Le Dr Nadeau ne correspond à aucune de ces catégories.

Je suis très préoccupé par le bien-être des clients et la responsabilité pour l’employeur.

[…]

[Sic pour l’ensemble de la citation]

39        On a présenté en preuve un courriel daté du 9 avril 2010, de M. Ouellet au Dr Roy, avec une copie conforme à Jamile Amery, qui présente ses préoccupations. M. Ouellet a également présenté un  témoignage à propos du fonctionnaire. Le courriel indiquait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

La présente vise à vous informer que j’ai tranché en décidant que le rapport non corrigé du Dr Nadeau n’était pas d’une qualité acceptable et, en conséquence, j’ai effectué une mise à jour du rapport de Diana Mawson. Le Dr Nadeau est parti en congé en raison du stress le jour après notre rencontre sur la supervision et, afin de répondre aux échéanciers légaux, j’ai dû remplir le rapport moi-même. Au fur et à mesure que j’ai examiné le renvoi et les dossiers, j’ai constaté que seule une mise à jour rapide était nécessaire, puisque le rapport de Diana remontait à deux ans tout au plus et qu’il était très exhaustif. J’ai également découvert que le Dr Nadeau avait copié une grande partie du rapport sans désigner ce matériel au moyen de guillemets et, en conséquence, en laissant entendre qu’il s’agissait de son propre matériel. Il s’agit d’un problème que je devrai régler plus tard.

Je me suis également aperçu aujourd’hui que le cas de [nom omis] n’avait besoin que d’une brève mise à jour, mais le Dr Nadeau a rédigé un rapport complet qui n’était pas non plus sans présenter de problèmes.

J’ai parlé à Evan Lopes et il a indiqué que le rapport du Dr Nadeau était [sic] acceptable pour lui et il a essentiellement offert une aide à l’égard de son style de rédaction. Evan a affirmé que, selon son RAP, il s’attendait à recevoir 2,5 rapports par mois de la part de Bryan. Il semblait surpris lorsqu’on lui a indiqué qu’il n’avait produit qu’un seul rapport par mois au cours des trois dernières années.

[…]

40        M. Ouellet a déclaré qu’il avait passé beaucoup de temps avec le Dr Nadeau à examiner et réviser ses rapports d’évaluation. Il a qualifié ces séances de [traduction] « séances marathon ». Il s’est souvenu d’avoir indiqué à son superviseur que chaque pierre retournée l’avait été conformément à la politique. Il a déclaré qu’il avait discuté longuement et à de nombreuses reprises avec le fonctionnaire en ce qui concerne la qualité, la quantité, les qualifications professionnelles, les qualités personnelles, l’habillement, la ponctualité et le défaut de se conformer au protocole.

41        M. Ouellet a fait valoir que, pendant la durée de son mandat en tant que superviseur du fonctionnaire, ce dernier avait été en congé pendant une période de temps considérable. On ne m’a présenté aucun détail quant à la période durant laquelle le fonctionnaire était absent du travail. 

42        En mars 2011, Gregory Fortnum était le directeur intérimaire de Ferndale. Dans le cadre de ce rôle, il était responsable de toutes les opérations de l’établissement, y compris de l’ensemble des membres du personnel. Il a déclaré qu’à cette époque, le fonctionnaire relevait, indirectement (par l’entremise d’un PS-04), de Irv Hammond, le directeur adjoint des interventions, et M. Hammond relevait, indirectement, de lui par l’entremise du sous-directeur. M. Fortnum a mentionné qu’avant l’automne 2011, il n’avait eu aucune interaction interpersonnelle avec le fonctionnaire.

43        M. Fortnum a souligné que lorsqu’il est arrivé à Ferndale au cours de ce mois de mars, le fonctionnaire était en congé. D’après lui, la nature du congé n’était pas claire. Il a déclaré que M. Hammond et lui avaient tenté de recueillir des renseignements à jour sur les congés.

44        Le Dr Roy a fait valoir qu’en juin 2011, il a été informé d’une situation découlant d’une procédure judiciaire dans le cadre de laquelle la cour avait posé une question au SCC à propos d’un détenu particulier. Il a déclaré avoir été confus, ainsi que d’autres personnes, par la question, car il ne comprenait pas bien ce que la cour leur demandait. Il a indiqué avoir contacté le procureur de la Couronne responsable de l’affaire, qui l’a informé que la question découlait d’une évaluation que le fonctionnaire avait faite à l’égard du détenu. D’après les renseignements que le procureur de la Couronne a fournis au Dr Roy, un autre psychologue avait fourni une évaluation différente, et le tribunal cherchait à obtenir une autre évaluation du SCC. Le Dr Roy a déclaré qu’il avait examiné l’évaluation du fonctionnaire qui, selon son propre aveu, avait été approuvée par un autre psychologue. Il a déterminé que l’évaluation ne répondait pas aux normes auxquelles il aurait dû répondre, tant du SCC que pour un psychologue agréé par le Collège.

45        Le Dr Roy a déclaré que, par conséquent, l’avocat du détenu avait remis en question les compétences du fonctionnaire et s’était demandé si des erreurs avaient été commises dans d’autres évaluations. Par conséquent, à la demande de la haute direction, il avait entrepris l’EAQ des évaluations du fonctionnaire.

46        M. Fortnum a fait valoir qu’à l’été 2011, il avait été informé que des détenus avaient exprimé des préoccupations à propos des qualifications du fonctionnaire de formuler des recommandations à l’égard de leur libération. D’après M. Fortnum, cela a soulevé la question de la responsabilité du SCC si le fonctionnaire n’était pas suffisamment qualifié ou s’il ne faisait pas l’objet d’une supervision adéquate. M. Fortnum a déclaré qu’il avait participé à la consultation avec l’Administration nationale de SCC à l’égard de cette question, ce qui avait entraîné la tenue de l’EAQ. Il a déclaré n’avoir pas participé personnellement au processus d’EAQ, celui-ci ayant été délégué au Dr Roy et à M. Hammond.

47        Le Dr Roy a déclaré qu’il avait consulté une collègue, la Dre Diane Mawson, sur la façon de mener un examen du travail d’évaluation du fonctionnaire. Il n’y avait aucun précédent, ils ont donc mis sur pied un processus fondé sur leur examen du document intitulé [traduction] « Code de conduite du Collège des psychologues de la Colombie-Britannique ». Le Dr Roy, la Dre Mawson et trois autres psychologues ont mené l’EAQ.

48        Le Dr Roy a fait valoir que l’équipe d’examen de l’EAQ avait initialement recueilli 60 évaluations du fonctionnaire aux fins d’examen. Quinze évaluations ont immédiatement été exclues, car les détenus étaient décédés ou ne se trouvaient plus dans le système correctionnel fédéral, ce qui en laissait 45. Il a déclaré que toutes les évaluations examinées comprenaient plusieurs lacunes et que, par conséquent, elles ne satisfaisaient pas aux normes de l’industrie. Sur ces 45 évaluations, cinq n’avaient pas été approuvées par un psychologue agréé, conformément à la politique du SCC. Le Dr Roy a confirmé que, compte tenu de ces constatations, les 40 évaluations qui avaient été approuvées par un psychologue agréé n’auraient pas dû l’être.

49        Selon le Dr Roy, les problèmes soulevés par les évaluations découlaient du fait que le fonctionnaire, même s’il était titulaire d’un diplôme en psychologie, n’avait pas suivi les cours et la formation d’un psychologue clinique, qui correspondait au type de travail le plus pertinent effectué par les psychologues au SCC. Le Dr Roy a déclaré que, même si le fonctionnaire pouvait certainement continuer à mener des évaluations, il devait faire l’objet d’une supervision plus étroite et que certaines autres lacunes relevées pendant l’EAQ pouvaient être corrigées uniquement par la formation en matière de compétences et de connaissances (c’est-à-dire, en suivant une formation).

50        Le Dr Roy a déclaré qu’il avait examiné l’ensemble des 45 évaluations qui faisaient partie de l’EAQ. Il a expliqué qu’un grand nombre des problèmes ou des lacunes qui y figuraient ne menaient pas à d’autres problèmes, car des évaluations subséquentes menées par d’autres psychologues à l’égard des mêmes détenus avaient été menées, et que les lacunes avaient été décelées. Il a déclaré qu’à la fin, seulement trois évaluations avaient dû être refaites, car on les considérait toujours comme étant à l’intérieur de leur [traduction] « durée utile ».

51        Le 28 octobre 2011, le Dr Roy a écrit à M. Fortnum à l’égard des titres de compétence universitaires du Dr Nadeau. Il a mentionné en partie ce qui suit :

[Traduction]

En février, j’ai passé en revue les relevés de notes du Dr Nadeau. J’ai communiqué mes constatations à M. Irv Hammond et à Mme Mary Danel dans un courriel daté du 2011-02-08. À cet égard, j’ai signalé que les antécédents universitaires du Dr Nadeau ne correspondaient pas du tout à l’exigence du College of Psychologists de la C.-B. aux fins d’obtention d’un permis. En conséquence, si le Dr Nadeau avait présenté une demande au Collège à ce moment-là, sa demande aurait été rejetée. Je suis également arrivé à la conclusion que, pour satisfaire aux exigences du Collège en matière d’études, le Dr Nadeau devrait suivre un nombre considérable de cours. Il est également probable qu’il serait tenu de suivre un stage supervisé.

En dépit de ce qui précède, il convient de souligner que l’exigence en matière d’études de l’Énoncé des critères de mérite (ECM) générique national [actuel] pour les PS-02 est la suivante :

[Traduction]

Maîtrise d’une université reconnue avec spécialisation acceptable en psychologie clinique, judiciaire ou en counseling avec une exigence concernant la résidence universitaire (excluant les programmes enseignés principalement en ligne ou par d’autres moyens d’apprentissage à distance, sauf s’ils sont approuvés par la American Psychological Association (APA) – et/ou la Société canadienne de psychologie (SCP).

Cours précis au niveau des études supérieures dans un ou plusieurs des niveaux suivants : comportement anormal ou évaluation psychologique et/ou interventions psychologiques.

Selon les relevés de notes du Dr Nadeau, il semblerait qu’il ne répondait à aucun de ces critères. À cet égard, ses diplômes d’études supérieurs ne sont pas en psychologie clinique, judiciaire ou en counseling. Au lieu de cela, ils sont en psychologie expérimentale – par conséquent, son programme d’études supérieures ne comprenait pas de cours en comportement anormal, en psychopathologie ou en interventions psychologiques.

Au moment où le Dr Nadeau a été embauché, l’ECM actuel n’était pas en vigueur. S’il avait été en vigueur, il n’aurait pas été retenu dans le cadre du processus de sélection.

[…]

52        M. Fortnum a fait valoir qu’après avoir reçu et examiné cette lettre, le Dr Roy, M. Hammond et lui-même ont eu plusieurs discussions en ce qui concerne le fonctionnaire, la responsabilité éventuelle pour le SCC et un plan de retour au travail. M. Fortnum a déclaré qu’à cette date (à la fin octobre ou au début novembre 2011), la direction ignorait quel était l’état des congés du fonctionnaire. Il a déclaré qu’il avait reçu un bon nombre de pièces de correspondance au cours du printemps, de l’été et au début de l’automne à propos des différentes raisons pour lesquelles le fonctionnaire ne pourrait retourner au travail. Cependant, à compter de cette date, il était en congé non autorisé, car le SCC ne disposait d’aucun certificat de congé de maladie à jour. L’absence du fonctionnaire du milieu de travail a fait en sorte qu’il était difficile pour l’équipe de direction de déterminer un plan d’action approprié afin d’obtenir une description complète de ce que pourrait faire ou non le fonctionnaire. Le fait que le fonctionnaire travaillait ailleurs rendait les choses plus difficiles.

53        M. Fortnum a déclaré qu’en septembre 2011, il a reçu un courriel qui mentionnait que, pendant l’absence du fonctionnaire de son travail au SCC, il enseignait les cours suivants à la University of the Fraser Valley (la « UFV ») :

Du 6 septembre 2011 au 5 décembre 2011
Mardis De 10 h à 12 h 50
Mercredis De 13 h à 15 h 50
Vendredis De 13 h à 15 h 50

54        M. Fortnum a déclaré qu’il était curieux de savoir comment le fonctionnaire était en mesure de travailler à la UFV, sans toutefois venir travailler à Ferndale. Le fonctionnaire était en congé autorisé jusqu’au 11 septembre 2011, soit la date à laquelle le médecin du fonctionnaire avait déclaré que le fonctionnaire serait apte à retourner au travail.

55        Le Dr Roy a témoigné en disant qu’il avait signalé les constatations de l’EAQ dans un courriel daté du 10 novembre 2011, à l’intention de M. Hammond. Le courriel mentionnait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Chaque rapport a été évalué conformément aux 15 critères figurant dans la section Évaluation du Code de conduite du Collège des psychologues de la Colombie-Britannique. En outre, les examinateurs avaient la liberté de formuler des commentaires descriptifs sur des secteurs de préoccupation en dehors des critères déterminés. En résumé, les rapports du Dr Nadeau ont été évalués par un groupe d’experts avec une référence aux normes de l’industrie qui prévalent.

L’équipe d’examen était composée de quatre psychologues en chef (et moi-même). Nos résultats ont indiqué que presque tous les rapports du Dr Nadeau contenaient plusieurs lacunes. Dans de nombreux cas, les lacunes étaient d’une importance suffisante pour dire que l’on pouvait juger que le rapport dans son intégralité ne répondait pas aux normes de l’industrie. D’un point de vue relatif à la responsabilité, l’ensemble de ces rapports était signé par le superviseur du Dr Nadeau. Par conséquent, toute responsabilité relative à la qualité du travail incomberait au PS-04. Cela dit, un certain nombre de rapports en format papier ne contenaient aucune signature d’un PS-04. Cela remet en question la question de savoir si le PS-04 a réellement examiné ces rapports. Cette question devra faire l’objet d’une enquête approfondie.

L’équipe d’examen (à l’unanimité) est arrivée à la conclusion que, au cours des cinq dernières années, le travail du Dr Nadeau ne répondait pas aux normes de l’industrie. En dehors des questions relatives au rendement, l’équipe éprouvait des préoccupations importantes à propos des connaissances et de la compétence du Dr Nadeau. Comme vous le savez, le Dr Nadeau est titulaire d’un doctorat en psychologie expérimentale. En conséquence, il n’aurait suivi aucun cours en psychopathologie, en personnalité ou en évaluation (ce qui est une exigence de l’ECM d’aujourd’hui). Il n’aurait pas non plus eu l’occasion de recevoir une formation clinique ou de conseiller dans le cadre de stages. Un examen des relevés de notes d’études supérieures du Dr Nadeau l’a confirmé. Cela dit, il convient de reconnaître que le Dr Nadeau a été embauché en 1999, avant l’ECM d’aujourd’hui. C’était également avant le prédécesseur de l’ECM, l’Énoncé de qualités des PS. En consultation avec les RH à l’AR et l’AC, il semblerait qu’à l’époque où le Dr Nadeau a été embauché, il n’existait aucune norme nationale. En conséquence, on a supposé que le Dr Nadeau avait probablement été embauché conformément à la qualification générique du Conseil du Trésor : maîtrise en psychologie (de tout genre – expérimentale, clinique, counseling, etc.). Compte tenu de la politique sur la dotation consistant à éliminer toutes les données remontant à plus de cinq ans des  dossiers personnels, il semblerait que cela n’est pas possible dans le cas du Dr Nadeau. En conséquence, la seule conclusion raisonnable est que le Dr Nadeau a été embauché [légitimement] conformément aux normes du SCC au moment de son embauche.

En dépit de ce qui précède, le Dr Nadeau présente un certain nombre de graves lacunes en ce qui a trait à ses compétences. De l’avis de l’équipe d’examen, il est possible de remédier à un certain nombre de ces lacunes rapidement au moyen d’une supervision étroite et constante. D’autres lacunes exigeront une formation sur les compétences, alors que d’autres exigeront des cours universitaires. À cet égard, l’équipe d’examen a déterminé le plan suivant :

1) Supervision étroite et constante : Il n’est pas possible d’offrir cela à Ferndale, car le PS-04 n’est pas sur place. En outre, le poste PS-04 n’est pas doté par un titulaire du poste d’attache. En outre, l’ampleur et l’étendue des fonctions du PS-04 l’empêchent de fournir au Dr Nadeau le niveau de supervision dont il a besoin. À cet égard, le CRRE constituerait un placement optimal pour le Dr Nadeau. En consultation avec le CRRE, on a convenu d’y offrir un poste permanent au Dr Nadeau.

2) Formation sur les compétences : Le Dr Nadeau devra participer à des ateliers et à des séminaires sur l’évaluation des risques, l’administration et l’interprétation de tests, et la rédaction de rapports. Ces activités peuvent être financées au moyen du décalage du paiement du salaire et du fonds de perfectionnement professionnel sur le point d’être affecté en provenance de l’AC.

3) Cours : Même si une formation sur les compétences est essentielle, le Dr Nadeau devra acquérir les connaissances fondamentales pour comprendre comment les appliquer. Comme il est indiqué ci-dessus, le Dr Nadeau n’a pas suivi de cours en psychopathologie, en personnalité et en évaluation. Ces cours peuvent être obtenus auprès d’universités locales ou en ligne. Ils peuvent être financés au moyen du décalage du paiement du salaire et des fonds arrivant en provenance de l’AC.

De l’avis de l’équipe d’examen, ces mesures régleront probablement les lacunes soulevées dans les travaux du Dr Nadeau. Il convient toutefois de souligner qu’il s’agira d’un projet à long terme. De manière plus importante, ce plan exigera l’accord et la collaboration du Dr Nadeau. Il sera également nécessaire de mesurer son rendement afin de s’assurer qu’il applique les connaissances et compétences susmentionnées dans le cadre de ses activités de travail quotidiennes. À défaut de quoi, je suis d’avis que le Dr Nadeau ne devrait pas être autorisé à demeurer dans le groupe PS – et, si un autre emploi ne peut pas être trouvé, je recommande que la haute direction envisage de le licencier en raison d’un rendement insatisfaisant. 

À l’avenir, je recommande que le Dr Nadeau soit transféré au CRRE où ses fonctions seront limitées à l’exécution d’évaluations des risques. Son superviseur direct sera la Dre Diana Mawson. En ce qui concerne les préoccupations relatives aux relations hiérarchiques sur place, il rendra compte à Mme Ingrid Winkler, directrice adjointe des Interventions. Il est également recommandé que le Dr Nadeau me rencontre le jour de son retour au travail. Le but de cette rencontre consiste à l’informer sur l’importance et l’ampleur de nos préoccupations, et à insister sur la nécessité pour lui de participer à la solution proposée. Je suis prêt à me rendre au CRRE pour cette rencontre.

J’ai espoir que le présent message vous aidera dans vos interactions avec le Dr Nadeau. Si vous avez des questions ou des préoccupations, n’hésitez pas à communiquer avec moi.

[…]

56        Le 18 novembre 2011, M. Fortnum a écrit ce qui suit au fonctionnaire :

[Traduction]

[…]

La présente lettre vous ordonne de retourner au travail à  h, le lundi 28 novembre 2011. Vous vous présenterez désormais au Centre régional de réception et d’évaluation (CRRE). Un représentant du CRRE vous rencontrera à l’entrée principale. La justification pour votre réinstallation est qu’en tant que PS-02, vous êtes assujetti à une exigence relative à une supervision étroite et constante. Cela s’avère particulièrement pertinent à la lumière des préoccupations relatives à la qualité décelées récemment dans votre travail (voir ci-dessus). À cet égard, il a été déterminé que l’intensité de la supervision dont vous avez besoin ne peut pas vous être offerte à Ferndale. Le défaut de vous y présenter sera considéré comme une absence non autorisée. Veuillez vous assurer que vous ayez en votre possession votre identification du Service correctionnel du Canada.

Pendant votre absence, des préoccupations ont été soulevées à propos de la qualité de votre travail. En réponse, un examen d’assurance de la qualité (EAQ) a été mené à l’égard de plusieurs de vos rapports d’évaluation des risques. L’EAQ a déterminé que bon nombre de celles-ci présentaient des préoccupations relatives à la qualité. Cela a déclenché plusieurs examens de la gestion des cas afin de déterminer si vos évaluations avaient été utilisées à titre de document d’évaluation des risques principal pour accorder des absences temporaires ou des libérations conditionnelles. Compte tenu du mandat du SCC en matière de sécurité publique, on ne saurait sous-estimer l’importance des examens de la gestion des cas.

Dès l’arrivée au CRRE, vous devrez rencontrer le Dr Roy, psychologue régional, la Dre D. Mawson ainsi qu’un représentant de la haute direction de Ferndale afin de discuter des constatations de l’EAQ et d’élaborer un plan de supervision et d’apprentissage. Par la suite, vous rencontrerez la Dre Mawson afin de discuter de votre objectif de rendement et de vos attentes en matière d’emploi.

[…]

57        Des questions ont été posées à M. Fortnum à propos du fait que le lieu de travail du fonctionnaire était le CRRE par opposition à Ferndale. Il a déclaré qu’il y avait eu une discussion sur la façon de répondre aux préoccupations soulevées dans l’EAQ à l’égard des capacités du fonctionnaire et des questions relatives à la responsabilité éventuelle pour le SCC. Il comprenait que le fonctionnaire n’était pas qualifié en tant que psychologue agréé en raison de sa formation actuelle; cependant, il comprenait également que le fonctionnaire avait accepté de participer à la formation de sorte que ses compétences répondraient à la norme requise. Toutefois, sans les commentaires du fonctionnaire, la direction était limitée dans ce qu’elle pouvait faire, car elle ignorait s’il avait des limitations médicales ou en matière de santé mentale. Le meilleur plan qu’elle avait à ce stade consistait à le ramener au travail au CRRE, sous supervision, puis à discuter avec lui de la façon de suivre les études et la formation requise.

58        Le Dr Roy a fait valoir que chaque fois que le fonctionnaire travaillait, la supervision dont il faisait l’objet devait inclure l’approbation de son travail par un psychologue agréé, et ce, par qu’il n’était pas lui-même un psychologue agréé du Collège. Il était difficile de garder le fonctionnaire à Ferndale parce que le niveau de supervision nécessaire n’était pas disponible, alors que le CRRE offrait un niveau de supervision plus stable.

59        Le fonctionnaire ne s’est pas présenté au travail au CRRE le 28 novembre 2011, à 8 h, tel qu’il était indiqué dans la lettre du 18 novembre 2011.

60        Le 29 novembre 2011, M. Fortnum a écrit une fois de plus au fonctionnaire. Dans sa lettre, il faisait référence à un courriel envoyé au Dr Roy daté du vendredi 25 novembre 2011, dans lequel il a fait allusion au fait que le fonctionnaire avait informé le Dr Roy qu’il n’était pas en mesure de se présenter au travail comme on le lui avait ordonné. La lettre du 29 novembre 2011, indiquait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

J’accuse maintenant réception de votre courriel à l’intention du Dr Rob Roy, daté du vendredi 25 novembre, indiquant que vous n’êtes pas en mesure de vous présenter au travail comme on vous l’avait ordonné et que vous ne serez pas disponible pour au moins les trois prochaines semaines.

Même si vous n’avez présenté aucune raison pour votre indisponibilité, vous avez annexé un billet de médecin indiquant que « pour des raisons médicales, le Dr Nadeau ne sera pas en mesure de travailler dans les établissements correctionnels pour les trois prochaines semaines ».

Je suis au fait que vous êtes à l’emploi de la University of the Fraser Valley depuis le 6 septembre 2011, enseignant deux cours (c’est-à-dire Introduction à la psychologie I et II) chaque mercredi et vendredi après-midi et que vous classes actuelles se poursuivent au moins jusqu’au 5 décembre 2011 (voir ci-joint).

J’ai approuvé votre congé de maladie non payé jusqu’au 11 septembre 2011, ce qui correspond à la date à laquelle Sun Life a déterminé que vous étiez en mesure de retourner au travail. Il s’agit de la même date à laquelle votre médecin, M. Siu, a indiqué que vous étiez en mesure de retourner au travail. Étant donné que vous n’avez présenté aucune preuve médicale appuyant votre absence entre le 2 septembre et le 23 novembre 2011, cette période est considérée comme une absence non autorisée.

Veuillez prendre note que je n’approuverai aucun autre congé de maladie avant de recevoir de la part de votre médecin une explication quant à votre incapacité à travailler pour le SCC, tout en étant en mesure de travailler pour la UFV. Plus particulièrement, j’ai besoin d’une vérification qu’il existe un état de santé (pas de ce qu’est l’état de santé) qui vous empêche de retourner au SCC, mais qui vous permet toujours de travailler pour la UFV.

Je vous ordonne, une fois de plus, de vous présenter au travail au CRRE à 9 h, le jeudi 1er décembre 2011. Comme je vous l’ai indiqué dans ma lettre précédente, le but de la rencontre avec le Dr Roy consiste à discuter des constatations de l’examen d’assurance de la qualité et d’élaborer un plan de supervision et d’apprentissage. Même si cette réunion n’est pas de nature disciplinaire, si cela vous rend plus à l’aise, vous pouvez être accompagné d’un représentant.

Le défaut de vous présenter au travail de nouveau sera considéré comme une absence non autorisée et pourrait également entraîner des mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au  licenciement.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

[Sic pour l’ensemble de la citation]

61        Contrairement à ce qui lui a été ordonné, le fonctionnaire ne s’est pas présenté au travail le 1er décembre 2011.

62        Le 1er décembre 2011, M. Fortnum a écrit de nouveau au fonctionnaire. Cette lettre était identique à celle du 29 novembre, à l’exception du fait qu’au septième paragraphe de la lettre précédente, M. Fortnum lui avait ordonné de se présenter au travail au CRRE à 9 h, le jeudi 1er décembre 2011. Dans la lettre ultérieure, il ordonnait au fonctionnaire de se présenter au travail à cet endroit à 8 h 30, le mercredi 7 décembre 2011.

63        M. Fortnum a fait valoir que, le 2 décembre 2011, il a téléphoné au fonctionnaire et lui a laissé un message vocal à son domicile. Il a également indiqué à son assistante d’envoyer un courriel au fonctionnaire à son adresse courriel personnelle, en son nom, ce qu’elle a fait. Le courriel indiquait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

J’ai effectué deux tentatives cette semaine pour vous livrer des lettres à votre adresse domiciliaire et je ne suis pas en mesure de confirmer si vous avez reçu ou examiné l’une ou l’autre de ces lettres. Par conséquent, je vous envoie ce courriel et je vous demande de m’appeler dès que possible (c’est-à-dire, cellulaire [numéro omis]), de façon à ce que je puisse m’assurer que vous soyez au courant du contenu protégé et sensible au temps des lettres.

Je vous ai également laissé un MV à domicile il y a quelques minutes sur le même sujet et je suis impatient d’avoir de vos nouvelles. N’hésitez pas à m’appeler au cours de la fin de semaine.

[…]

64        M. Fortnum a confirmé que le fonctionnaire lui avait répondu par courriel le 3 décembre 2011, en  lui demandant de communiquer avec son avocat, ce que M. Fortnum a fait. Il a demandé à l’avocat du fonctionnaire de communiquer avec lui dès que possible afin de discuter des lettres qu’il avait envoyées au fonctionnaire.

65        Le 6 décembre 2011, l’avocat du fonctionnaire a écrit à M. Fortnum. Parmi les documents envoyés, il y avait un billet du médecin ainsi que du psychiatre traitant du fonctionnaire. Les deux billets indiquaient que le fonctionnaire devait s’absenter du travail pendant trois semaines. M. Fortnum a répondu le 12 décembre 2011. Il a indiqué que le SCC attendrait jusqu’à ce que les avocats du fonctionnaire l’informent en son nom qu’il était en mesure de les rencontrer et de discuter d’un plan de retour au travail.

66        M. Fortnum a souligné que les renseignements médicaux reçus avant la lettre de l’avocat du fonctionnaire indiquaient qu’il était apte à retourner au travail à compter du 12 septembre 2011. Il n’y avait aucun renseignement concernant une invalidité ou une demande de mesures d’adaptation. 

67        M. Fortnum a déclaré qu’il n’avait aucune autre interaction avec le fonctionnaire, ayant quitté son poste en janvier 2012.

68        Corinne Justason a commencé à occuper le poste de sous-directrice de Ferndale à compter de l’été 2012. À son arrivée en poste, le fonctionnaire était absent sans permission (« ASP »). Elle a déclaré qu’aucun billet ou certificat actuel de médecin ne figurait au dossier du fonctionnaire; il n’y avait rien non plus pour confirmer qu’il pouvait ou ne pouvait pas retourner au travail. Elle a indiqué que les étapes qu’elle a prises afin d’obtenir le retour au travail du fonctionnaire comprenaient une correspondance avec lui et avec son avocat ainsi qu’une discussion avec son psychiatre traitant.

69        Selon Mme Justason, le psychiatre du fonctionnaire avait demandé qu’une évaluation de Santé Canada (« SC ») soit menée avant le retour au travail du fonctionnaire. Mme Justason a déclaré que le SCC n’avait habituellement pas recours à SC pour les évaluations, préférant avoir recours à un médecin familial ou traitant, car ils sont mieux placés pour évaluer leurs patients, étant leurs principaux fournisseurs de soins. L’employeur souhaite savoir si l’employé donné est apte à retourner au travail, pas sa maladie. L’employeur devait fournir les renseignements sur le principal fournisseur de soins à propos du travail et du lieu de travail afin d’aider à l’évaluation.

70        Mme Justason a déclaré que le retour au travail du fonctionnaire était l’objectif, sauf s’il y avait une raison pour laquelle il n’était pas en mesure de le faire. Elle a correspondu avec lui au moyen d’une lettre datée du 27 août 2012, à laquelle le fonctionnaire a répondu par courriel le 4 septembre 2012. Dans ce courriel, il a confirmé qu’il souhaitait rencontrer l’employeur dès que possible afin de discuter de certaines questions concernant son emploi actuel et futur. À ce sujet, il lui a demandé de communiquer avec son avocat afin d’établir une heure et une date qui convenait à tous. Il a également demandé des précisions à propos de l’EAQ et il a déclaré que toute rencontre devait aborder le refus du SCC de fournir une évaluation de SC.

71        Mme Justason a envoyé un courriel au fonctionnaire le 5 septembre 2012, affirmant qu’une communication écrite avec son avocat n’était pas possible compte tenu des échéanciers serrés et du fait qu’elle avait tenté de communiquer avec son avocat en plusieurs occasions, le jour même et la veille, sans succès. Elle a déclaré qu’elle était heureuse de rencontrer le fonctionnaire cette semaine-là, mais puisqu’il était ASP, il devait se présenter au travail. Elle lui a dit de se présenter au travail le 10 septembre 2012. Elle a ensuite déclaré que l’EAQ était une question distincte de son absence qui pourrait faire l’objet d’une discussion dès son retour au travail.

72        Le 6 septembre 2012, le fonctionnaire a envoyé une réponse par courriel à Mme Justason, indiquant qu’il n’était pas au courant qu’il était ASP et qu’il verrait son médecin la semaine suivante. Le fonctionnaire a suggéré le report de la réunion pour lui permettre de voir son médecin. Dans le dernier paragraphe de son courriel, il a écrit ce qui suit : [traduction] « Si vous souhaitez déclarer, par écrit, que vous avez l’intention de me licencier si je ne suis pas en mesure de me présenter à la rencontre du lundi 10 septembre 2012, à 10 h, avec un billet de médecin en main en dépit de mes meilleurs efforts en vue de m’y conformer, alors toute autre communication doit être adressée à mon avocat ».

73        Mme Justason a répondu plus tard ce jour-là, en indiquant que, si elle n’avait pas été claire dans sa correspondance précédente, elle préciserait que deux questions distinctes n’étaient pas résolues, dont le fait que son état de travail était ASP. Elle lui a confirmé que le dernier congé de maladie demandé et autorisé était venu à échéance le 22 décembre 2011. Elle a déclaré qu’il avait néanmoins été placé en congé de maladie sans certificat jusqu’au 31 mars 2012, et qu’il avait été informé en juin et en juillet 2012 que son congé de maladie sans certificat était venu à échéance. Elle a poursuivi en ordonnant au fonctionnaire de se présenter au travail le lundi 10 septembre 2012. Elle a ensuite soulevé la deuxième question, soit le type de travail auquel il serait affecté à son retour. Pour ce faire, l’EAQ devait faire l’objet d’une discussion et un plan d’apprentissage et de supervision devait être élaboré, à l’aide de ses commentaires.

74        Le 9 septembre 2012, le fonctionnaire lui a fourni un billet de son psychiatre traitant, rédigé sur un carnet de prescriptions, qui indiquait ce qui suit :

[Traduction]

Le 20 juillet 2012

Objet : Bryan Nadeau

Madame,
Monsieur,

Je ne peux affirmer ou non si M. Nadeau était apte ou inapte au travail à compter du 1er avril 2012 avec le Service correctionnel du Canada, car je ne suis pas au courant des fonctions et des obligations de son poste, et c’est pourquoi il y a une demande relative à une évaluation par Santé Canada.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

75        Le 9 septembre 2012, dès la réception et l’examen de ce billet, Mme Justason a envoyé un courriel au fonctionnaire et l’a informé qu’elle avait reçu le billet et que son auteur était mal informé, car le fonctionnaire n’était pas en attente d’une évaluation de SC. Elle l’a ensuite informé que le billet n’accréditait aucun congé ou ne le libérait pas de l’obligation de respecter la date prévue de retour au travail, soit le 10 septembre 2012.

76        Après avoir répondu au fonctionnaire, Mme Justason a échangé des courriels avec son avocat. Le 14 septembre 2012, elle a envoyé une lettre à son avocat qui était en partie rédigée comme suit :

[Traduction]

[…]

Comme M. Nadeau en a été informé, il incombe à l’employé de demander un congé et de fournir tous les documents requis à l’appui d’une telle demande.  Nous avons reçu environ douze billets des principaux fournisseurs de soins de M. Nadeau depuis le 2010-12-14, où les auteurs ont déterminé que M. Nadeau n’était pas apte à retourner au travail. On souligne que les auteurs ont rendu leurs déterminations en l’absence d’une évaluation de Santé Canada ou de renseignements fournis par le SCC. Plus récemment, le 2012-07-20, le Dr [nom omis] a expliqué qu’il ne pouvait pas affirmer si M. Nadeau était apte ou inapte au travail et a recommandé un renvoi à Santé Canada, car il [traduction] « ignor[ait] les fonctions et obligations de son poste », malgré le fait qu’il avait été en mesure de déterminer son aptitude à un certain nombre d’occasions précédemment.

Même s’il y avait eu une demande de renvoyer M. Nadeau à Santé Canada aux fins d’une évaluation, nous sommes toujours persuadés que le principal fournisseur de soins de M. Nadeau demeure la personne la plus appropriée pour déterminer si M. Nadeau était apte au travail ou non. Les évaluateurs de Santé Canada dépendent des renseignements provenant du principal fournisseur de soins et des renseignements fournis par le SCC à propos des descriptions de travail, entre autres. Le SCC représente la source d’information appropriée que recherche le Dr [nom omis]. Comme il est indiqué dans ma lettre adressée à M. Nadeau datée du 2012-08-27, nous fournirons à son principal fournisseur de soins des renseignements concernant son emploi au SCC, si M. Nadeau donne son consentement approprié. En date d’aujourd’hui, M. Nadeau n’a pas donné son consentement.

En ce moment, M. Nadeau demeure absent sans permission et nous nous attendons à ce qu’il retourne au travail comme il lui a été demandé. Étant donné que vous avez indiqué que M. Nadeau avait un rendez-vous avec son psychiatre le 2012-09-11, nous avons besoin de la correspondance de son psychiatre au plus tard à la fin de la journée du 19 septembre 2012.

Tel qu’il a été  mentionné dans la correspondance précédente et dans un certain nombre de messages vocaux, je suis toujours disponible pour vous rencontrer ainsi que M. Nadeau.

77        Le 11 septembre 2012, un conseiller en rémunération du SCC a envoyé un courriel au fonctionnaire à propos de la nouvelle convention collective des Services de santé, qui traitait d’un changement à la disposition sur l’indemnité de départ. Ce changement donnait aux employés la possibilité d’encaisser leur indemnité de départ accumulée avant de quitter la fonction publique. Le courriel informait le fonctionnaire que les Services de rémunération avaient estimé le montant qu’il avait accumulé et voulaient savoir s’il souhaitait que l’estimation lui soit envoyée par courriel ou par la poste régulière.

78        Le 19 septembre 2012, l’avocat du fonctionnaire semble avoir envoyé un courriel à Mme Justason, comprenant en pièce-jointe une copie du courriel du 11 septembre 2012, et semble avoir affirmé que le fonctionnaire acceptait la répudiation du contrat de travail par le SCC, la répudiation étant prétendument apparente dans la décision de délivrer une indemnité de départ au fonctionnaire, tel qu’il est indiqué dans le courriel du 11 septembre 2012.

79        Le 20 septembre 2012, Mme Justason a répondu, en affirmant ce qui suit :

[Traduction]

Le courriel envoyé ci-dessous par le conseiller en rémunération de M. Nadeau est un courriel normalisé envoyé à tous les membres de la convention collective des Services de santé. Ce courriel est envoyé afin de s’assurer que la partie est informée d’un changement et de lui fournir des renseignements. Étant donné que M. Nadeau ne se trouve pas au travail, il était nécessaire de confirmer la manière dont il préférait recevoir les renseignements. Le courriel ne visait pas à être une répudiation du contrat et ne le laissait pas entendre.

Nous n’avons reçu aucune correspondance de la part du psychiatre de M. Nadeau comme il était requis au plus tard à la fin de la journée d’hier. M. Nadeau demeure en absence sans permission. Il a l’ordre de se présenter au Service correctionnel du Canada, comme suit :

Date : Le 25 septembre 2012

Heure : 10 h 30

Salle de conférence Chilliwack (troisième étage)

Administration régionale – Pacifique

Unité 100- 33991, avenue Gladys

80        Mme Justason et l’avocat du fonctionnaire ont tenté d’organiser une rencontre le 5 octobre 2012, mais celle-ci n’a pas eu lieu. Mme Justason a déclaré qu’elle avait finalement été en mesure de joindre l’avocat du fonctionnaire au téléphone et de lui parler; l’appel a eu lieu entre le 5 et le 19 octobre 2012. Elle a souligné qu’elle avait expliqué à son avocat que le fonctionnaire ne pouvait tout simplement pas cesser de venir travailler; il devait soit retourner au travail soit fournir des documents acceptables d’un médecin établissant la raison pour laquelle il n’était pas en mesure de le faire. Elle a déclaré qu’il avait été conclu que l’avocat du fonctionnaire devait tenter d’obtenir le consentement du fonctionnaire afin de permettre au SCC de parler avec son médecin. Elle a déclaré qu’elle avait effectivement obtenu ce consentement et qu’elle avait eu une conversation téléphonique avec le psychiatre du fonctionnaire. 

81        Mme Justason a fait valoir qu’elle avait expliqué au psychiatre ce dont avait besoin le SCC et le processus d’évaluation de SC. Elle a déclaré qu’à la fin de la conversation, le psychiatre lui avait dit qu’il n’avait pas besoin de plus de renseignements, que le fonctionnaire n’était pas malade et qu’il était apte à retourner au travail.

82        Mme Justason a ajouté que, par la suite, le 19 novembre 2012, elle a écrit au fonctionnaire pour résumer la situation à partir de juin 2012, et ce, du point de vue de l’employeur. Elle a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Étant donné que votre psychiatre a confirmé que vous êtes apte à travailler, on vous ordonne de vous présenter au Service correctionnel du Canada, comme suit :

Date : Le 29 novembre 2012

Heure : 10 h

Lieu : Bureau du psychiatre régional

Administration régionale – Pacifique

Unité 100- 3391 avenue Gladys

Abbotsford, C. ­B.

[…]

Vous demeurez en absence sans permission. Comme il a été noté précédemment, le défaut de se présenter au travail tel qu’il est décrit ci-dessus continuera d’être considéré comme une absence sans permission et pourrait également entraîner le licenciement.

83        Mme Justason a fait valoir que le fonctionnaire avait envoyé une lettre de démission. Une lettre de démission non datée a été annexée à une copie d’une lettre datée du 7 décembre 2012, que le directeur intérimaire de Ferndale a envoyée au fonctionnaire, acceptant sa lettre de démission, qui indique que celle-ci a été reçue à son bureau le 28 novembre 2012.

84        En contre-interrogatoire, le fonctionnaire a indiqué que son psychiatre traitant et lui étaient en désaccord quant à son aptitude à retourner au travail. Il a déclaré qu’à l’époque, il n’était pas sûr de pouvoir retourner au travail.

IV. Résumé de l’argumentation

A. Pour l’employeur

85        L’employeur a fait valoir que, tout au long de cette affaire, il a agi de manière raisonnable. Son argumentation a été présentée en trois parties, comme suit :

  1. Il incombait au fonctionnaire de démontrer qu’un congédiement déguisé était survenu; il ne s’est pas acquitté de ce fardeau.
  2. L’allégation selon laquelle les fonctions du fonctionnaire ont été modifiées relève des droits de direction prévus à la Loi sur la gestion des finances publiques (L.R.C., 1985, ch. F-11; la « LGFP »).
  3. La Commission n’a pas compétence.

i. Il incombait au fonctionnaire de démontrer qu’un congédiement déguisé était survenu; il ne s’est pas acquitté de ce fardeau

86        Potter c. Commission des services d’aide juridique du Nouveau-Brunswick, 2015 CSC 10, établit le critère relatif au congédiement déguisé, qui comporte deux volets :

  1. S’il y a eu violation d’une condition expresse ou tacite du contrat;
  2. Si la violation de la condition était suffisamment grave pour constituer un congédiement déguisé.

87        L’article 12 de la LGFP fait partie des conditions du contrat de travail. Les alinéas 12(1)a) et b) confèrent aux administrateurs généraux le pouvoir de déterminer les besoins en matière d’apprentissage, de formation et de perfectionnement des personnes employées dans la fonction publique et de fixer les conditions de mise en œuvre de cet apprentissage, de cette formation et de ce perfectionnement.

88        Au paragraphe 37, Potter prévoit que la première étape de l’analyse concernant la détermination du congédiement déguisé exige du tribunal qu’il examine objectivement si une violation de contrat a eu lieu. Il indique également que, pour ce faire, ce qui suit est nécessaire :

[37] [] Il lui faut alors examiner si l’employeur a modifié unilatéralement le contrat. Lorsqu’une stipulation expresse ou tacite autorise l’employeur à apporter la modification, ou que le salarié consent à celle-ci, il ne s’agit pas d’un acte unilatéral, de sorte qu’il n’y a pas de violation ni, par conséquent, de congédiement déguisé. En outre, pour constituer une violation, la modification doit être préjudiciable au salarié.

89        Il ne peut y avoir violation de contrat si une condition du contrat autorisait l’employeur à faire ce qu’il a fait. L’employeur a fait valoir que les mesures consistant à modifier certaines fonctions à l’égard des tâches du fonctionnaire relevaient de l’art. 12 de la LGFP. À ce titre, il n’aurait pas pu y avoir une violation, comme la Cour suprême du Canada l’a établi dans Potter.

90        L’employeur m’a renvoyé à Hassard c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2014 CRTFP 32, dans laquelle la CRTFP a remis en question la place du concept du congédiement déguisé dans le secteur public. Il a déclaré que le congédiement déguisé découlait des contrats d’emploi entre les employés individuels et les employeurs, sous le régime de la common law, qui comprend habituellement des modalités expresses et tacites. Au paragraphe 176, l’arbitre de grief signale que les contrats d’emploi dans le secteur public sont très différents puisqu’ils sont essentiellement régis par des lois, des règlements et des conventions collectives qui établissent les conditions d’emploi d’une manière très détaillée et qui régissent ou limitent les droits et obligations des employeurs et des employés. Au paragraphe 177, cette décision prévoit que le droit d’un employeur de rétrograder un employé fait effectivement partie du contrat de travail. Par conséquent, une rétrogradation ne peut pas constituer une violation fondamentale du contrat.À ce sujet, l’employeur m’a également renvoyé à Cameron c. Administrateur général (Bureau du directeur des poursuites pénales), 2015 CRTEFP 98, et à Wercberger c. Agence du revenu du Canada, 2016 CRTEFP 41.

91        Alexander c. Administrateur général (Agence de la santé publique du Canada), 2015 CRTEFP 64, confirmé dans 2016 CAF 132, établit le principe selon lequel, dans le cas d’une allégation de congédiement déguisé, il est essentiel que les faits, tels qu’ils sont établis à la base, établissent qu’il y a eu un licenciement découlant d’une violation fondamentale du contrat d’emploi. L’employeur a fait valoir que, lorsque le fonctionnaire a présenté son grief dans la présente affaire, il était en congé. L’employeur a indiqué clairement au fonctionnaire qu’il était tenu de retourner au travail et il lui a présenté plusieurs options pour ce faire, bien que certaines des fonctions pourraient avoir été différentes.

92        L’employeur a fait valoir que, d’après la jurisprudence, aucun changement unilatéral n’avait été apporté aux conditions du contrat de travail, et que toute action s’inscrivait dans la portée de ses droits en vertu de l’art. 12 de la LGFP.

ii. L’allégation selon laquelle les fonctions du fonctionnaire ont été modifiées relève des droits de la direction en vertu de la LGFP

93        La direction a le droit d’attribuer des fonctions. L’employeur a fait valoir que la direction a exercé ce droit et qu’elle l’a fait de manière équitable et raisonnable.

94        Synowski c. Conseil du Trésor (ministère de la Santé), 2007 CRTFP 6, souligne que l’employeur a le pouvoir d’attribuer des fonctions. Cette attribution ne confère pas une quelconque compétence à la Commission dans des situations où, autrement, elle n’en a pas. Le libellé de l’article 7 de la Loi est similaire au libellé de l’article 7 de la loi antérieure, la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.R.C., 1985, ch. P-35) et reconnaît le droit et l’autorité de l’employeur, « […]  quant à l’organisation de tout secteur de l’administration publique fédérale à l’égard duquel il représente […] à titre d’employeur, à l’attribution des fonctions aux postes et aux personnes employées dans un tel secteur et à la classification de ces postes et personnes ». À cet égard, l’employeur m’a également renvoyé à Tuckett-Reddy c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2011 CRTFP 125.

95        L’employeur a fait valoir que certains faits contradictoires avaient été présentés à l’égard de la qualité du travail du fonctionnaire. Warman c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2012 CRTFP 103, traite des situations où il pourrait y avoir des rapports contradictoires quant au rendement. Parfois, le rendement est perçu comme étant positif et d’autres fois, négatif. Les opinions quant au rendement d’une personne pour une même tâche peuvent varier. Cependant, cela ne signifie pas qu’il faut ignorer ou ne pas corriger les lacunes relevées en ce qui concerne le travail d’un employé dont le rendement est autrement satisfaisant. Le fait qu’aucun problème de rendement ne soit relevé dans le cadre d’une évaluation du rendement ne signifie pas qu’il n’existe pas.

96        Une preuve a été présentée selon laquelle le fonctionnaire était en congé de maladie pendant certaines périodes pertinentes au grief. Theaker c. Administrateur général (ministère de la Justice), 2013 CRTFP 163, appuie la proposition selon laquelle   l’employeur a le droit de demander des renseignements médicaux et de les utiliser à l’égard d’un plan de réintégration au travail pour un employé.

97        Au moyen de sa preuve, le fonctionnaire a fait valoir que des questions d’équité procédurales avaient été soulevées en ce qui concerne l’EAQ de son travail. À ce sujet, l’employeur m’a renvoyé à Baker c. ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration,[1999] 2 RCS 25823, qui établit le critère relatif à l’équité procédurale qui comprend, à tout le moins, cinq éléments qui sont pondérés en fonction d’une échelle mobile. En appliquant ce critère à la situation du fonctionnaire au SCC, l’employeur a fait valoir que le niveau d’équité procédurale auquel il avait droit vis-à-vis de l’EAQ de son travail se trouvait à l’extrémité inférieure du spectre. L’EAQ était un examen de la qualité du travail et menait à un plan de formation et ne constituait pas un plan de rendement qui conduisait à son licenciement.

iii. La Commission n’a pas compétence

98        Wray c. Conseil du Trésor (ministère des Transports), 2012 CRTFP 64, établit ce qui est requis pour que la Commission ait compétence. Le paragraphe 22 précise que les arbitres de grief tirent leur compétence uniquement de la Loi. Lorsqu’elle est appliquée à des griefs individuels, la Loi limite la compétence à l’interprétation de toute disposition d’une convention collective (al. 209(1)a)), à une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire (art. 209(1)b)), ou, s’il est un fonctionnaire l’administration publique centrale, à la rétrogradation ou au licenciement pour rendement insatisfaisant ou pour toute raison non disciplinaire non visés par toute autre loi ou pour une mutation sans son consentement (al. 209(1)c)).

99        Le renvoi à l’arbitrage (formulaire 21) que le fonctionnaire a présenté précise qu’il a renvoyé son grief à la Commission aux termes de l’al. 209(1)b) et du sous-alinéa c)(ii) de la Loi. L’alinéa 209(1)a) fait référence à une mesure disciplinaire, alors que le sous-al. 209(1)c)(ii) renvoie à une mutation sans son consentement.

100        Dans Cameron, il est question d’allégations de mesures disciplinaires déguisées. Dans de tels cas, il doit y avoir une intention de punir ou de corriger un comportement fautif. Lorsque l’on examine les faits entourant le fonctionnaire et la preuve entourant l’intention de l’employeur, il n’y a aucun comportement fautif à corriger ni d’intention punitive; l’intention déclarée de l’employeur était d’améliorer le rendement du fonctionnaire. Lorsqu’une allégation de mesure disciplinaire est soulevée, il incombe au fonctionnaire de le démontrer selon la prépondérance des probabilités. En l’espèce, le fonctionnaire ne s’est pas acquitté de ce fardeau. À ce sujet, l’employeur m’a également renvoyé à Browne c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Douanes, Accise et Impôts), dossiers de la CRTFP 166-02-27650 à 27661 (19971201), [1997] C.R.T.F.P.C. no 133 (QL), et à Chamberlain c. Conseil du Trésor (ministères des Ressources humaines et Développement des compétences Canada), 2010 CRTFP 130.

101        Rogers c. Agence du revenu du Canada, 2010 CAF 116, appuie la proposition selon laquelle une perte pécuniaire n’équivaut pas à une sanction pécuniaire. Le congé de maladie du fonctionnaire n’équivalait pas à une sanction pécuniaire.

102        Bahniuk c. Agence du revenu du Canada, 2005 CRTFP 177, porte sur des allégations selon lesquelles les mesures prises par l’employeur étaient de mauvaise foi. La mauvaise foi elle-même ne confère pas compétence à un arbitre de grief. 

103        Il est également bien établi que l’art. 209 n’accorde aucune compétence à l’égard des questions relatives aux cotes d’évaluation du rendement. Sur ce point, l’employeur m’a renvoyé à Tudor Price c. Administrateur général (ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire), 2013 CRTFP 57, à Spacek c. Agence du revenu du Canada, 2007 CRTFP 115, et à Veilleux c. Conseil du Trésor (Commission de la fonction publique), dossiers de la CRTFP 166-02-11370 (19820729),[1982] C.R.T.F.P.C. no 126 (QL).

104        Stevenson c. Conseil du Trésor (ministère de l’Emploi et du Développement social Canada), 2016 CRTEFP 17, et Mutart c. Administrateur général (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2013 CRTFP 90 (confirmé dans 2014 CF 540), appuient la proposition voulant que la démission volontaire d’un employé relève de la LEFP et non de la Loi.

105        Au cours de l’affaire du fonctionnaire, on a fait allusion à la discrimination. Burchill c. Procureur général du Canada, [1981] C.F. 109 (C.A.), soutient que le fonctionnaire n’avait pas le droit de modifier son grief et de soulever à l’arbitrage une question qui n’avait pas été soulevée plus tôt dans la procédure de règlement des griefs. Aucune discrimination n’est alléguée dans le grief et aucune preuve n’a démontré qu’il avait été question de discrimination à une étape quelconque de la procédure de règlement des griefs.

106         Dans une certaine mesure, dans le cas du fonctionnaire, son rendement au travail a été remis en question et, par conséquent, la direction a soulevé des préoccupations. Ses interventions cliniques, fondées sur ses antécédents en matière d’études, ont soulevé des préoccupations de bonne foi de la direction à propos de la responsabilité et l’ont menée à procéder à un EAQ. L’EAQ avait pour but d’être clair et transparent et, selon ce qui a été démontré dans l’argumentation de l’employeur, il l’était. L’EAQ a été conçu afin de déterminer si le travail du fonctionnaire répondait aux normes du Collège pour les psychologues en exercice. Même s’il est possible que le fonctionnaire n’ait pas été régi par le Collège, son travail l’était, car les personnes qui l’ont examiné étaient régies par le Collège, de même que l’employeur.

107        L’employeur a élaboré un plan afin d’aborder les lacunes relatives à la compétence du fonctionnaire et de faire en sorte que son niveau de compétence réponde à une norme acceptable. Le plan ne correspondait pas aux plans du fonctionnaire, ce qui ne signifie toutefois pas qu’il n’était pas équitable envers lui. Son but était de traiter ses lacunes en matière de compétences.

108        Il n’y a aucune preuve que les mesures de l’employeur étaient, d’une manière quelconque, arbitraires à l’égard du fonctionnaire. L’employeur devait suivre son travail plus étroitement. Même s’il est possible que le fonctionnaire ait trouvé cela frustrant et méprisant, il n’a pas été démontré qu’il s’agissait d’une mesure disciplinaire ou d’une mutation. Aucune preuve relative à un changement de fonctions n’a été démontrée.

109        Le fonctionnaire a pris un congé de maladie. Ultimement, il a démissionné volontairement lorsqu’il a reçu la directive de retourner au travail, tout en étant représenté par un agent négociateur et un avocat.

110        L’employeur a fait valoir que, même si j’accepte la véracité des déclarations du fonctionnaire, ce dernier ne s’est pas acquitté du fardeau d’établir qu’il y a eu un congédiement déguisé ou que j’ai compétence aux termes de l’art. 209 de la Loi.

B. Pour le fonctionnaire

111        Le fonctionnaire m’a renvoyé à Potter.

112        Le fonctionnaire a fait valoir qu’il n’avait pas à démontrer que son emploi lui avait été retiré intégralement, seulement qu’il était retourné à la maison sans rémunération.

113        Le fonctionnaire a été dépouillé de ses fonctions, a été renvoyé à la maison et a dû poser sa candidature pour son emploi. Il n’a eu d’autre choix que de comprendre qu’il avait fait l’objet d’un congédiement déguisé.

114        Le fonctionnaire n’a jamais été informé qu’il pouvait revenir au travail. Il a été suspendu, mais pour que cette suspension soit valide, elle devait être fondée sur des raisons légitimes liées au travail.

115        Le fonctionnaire m’a renvoyé à Chan v. Dencan Restaurants Inc., 2011 BCSC 1439, dans laquelle la Cour suprême de la Colombie-Britannique a soutenu que l’employé, qui avait démissionné volontairement après avoir été critiqué en raison de son rendement, puis menacé de licenciement, avait été congédié injustement et qu’il avait droit à des dommages. Le fonctionnaire a soutenu qu’il avait démissionné sous l’effet de la contrainte. Il a reçu une lettre de Mme Justason qui indiquait que son travail pourrait ne pas être situé dans un établissement.

116        Le fonctionnaire m’a renvoyé aux paragraphes 106 et 107 de Potter, qui sont rédigés comme suit :

[106] J’estime que, dans la plupart des cas où la violation du contrat de travail résulte d’une suspension administrative non autorisée, force est de conclure à une modification de nature substantielle. Lorsqu’il n’est pas en mesure d’établir que la suspension est raisonnable et justifiée, l’employeur peut rarement, selon moi, changer son fusil d’épaule et prétendre qu’un employé raisonnable n’aurait pas considéré que ses actes déraisonnables et injustifiés étaient la manifestation de son intention de ne plus être lié par le contrat. Seule pourrait faire exception à la règle la suspension non autorisée dont la durée serait particulièrement courte.

B.       Répudiation du contrat par le salarié

[107] Vu ma conclusion selon laquelle M. Potter a été congédié de manière déguisée, la question de savoir si son action pour congédiement déguisé a entraîné sa démission ne se pose pas. Le contrat avait déjà été répudié par le conseil. Même si les tribunaux inférieurs se prononcent tous deux sur la question et que des observations sur ce point ont été présentées à la Cour, j’estime qu’il n’est pas opportun de tirer quelque conclusion à cet égard en l’absence de circonstances qui l’exigent.

117        Le fonctionnaire a fait valoir que le poste PS-02 lui avait été retiré. L’examen a été extrêmement long et on aurait dû conclure qu’il était qualifié. Son retrait n’aurait pas dû prendre autant de temps.

118        En ce qui concerne le paragraphe 107 de Potter, il est normal que le fonctionnaire ait supposé qu’un congédiement déguisé avait déjà eu lieu. Par conséquent, il n’y a pas eu répudiation, car son emploi ne lui était plus disponible.

119        Le fonctionnaire a fait valoir que la preuve avait démontré qu’il aurait été licencié s’il n’avait pas accepté d’être transféré au CRRE. L’employeur avait l’intention de le transférer ou de le licencier, comme l’ont établi les courriels du Dr Roy. L’employeur demandait au fonctionnaire d’accepter le changement à ses conditions de travail ou de partir.

120        L’employeur ne pouvait pas affirmer que cette question figurait dans la convention collective et qu’elle avait été négociée de bonne foi, et ensuite dire qu’elle ne relevait pas de la convention collective. En outre, il ne pouvait pas appliquer la convention collective de mauvaise foi.

121        Le fonctionnaire m’a renvoyé à un [traduction] « commentaire » non identifié dans une décision d’un arbitre de différends datée du 28 avril 2011, dans Greater Toronto Airport Authority v. Public Service Alliance of Canada, Local 0004 (2010), 191 L.A.C. (4th) 277). Au paragraphe 3, l’auteur inconnu stipule que l’arbitre a tranché comme suit :

[Traduction]

[…] une convention collective est l’un de ces contrats qui a pour but de fournir à l’employé un avantage psychologique et de la sécurité. Cette constatation signifie qu’un employeur qui traite durement des employés et qui est de mauvaise foi pourrait devoir débourser des dommages élevés pour la souffrance mentale, puisque la finalité même du contrat consiste à aider à protéger les employés contre un préjudice psychologique. […]

122        Le fonctionnaire a fait valoir que le document intitulé [traduction] « Code de conduite du Collège des psychologues de la Colombie-Britannique », prévoit une obligation de bonne foi, laquelle s’applique à l’EAQ entreprise à son égard.

123        Le fonctionnaire a fait valoir que le Dr Roy et la Dre Mawson n’étaient pas sans parti pris, car il avait déjà entretenu des relations hiérarchiques avec eux.

124        Le fonctionnaire a souligné que, parmi les 45 rapports (dont il n’existe aucune preuve à savoir comment ils ont été sélectionnés), seulement deux présentaient des lacunes qui devaient être corrigées. Néanmoins, son transfert à un poste pour lequel un niveau de supervision plus élevé était nécessaire a été recommandé.

125        L’employeur a fait valoir que l’EQV avait été entreprise à la suite d’une préoccupation à l’échelle du ministère. Cependant, sur l’ensemble des psychologues de l’employeur, seul le fonctionnaire a fait l’objet d’un tel examen.

126        Le fonctionnaire était le PS-02 principal et avait droit à son emploi. L’employeur n’avait aucun droit de le transférer.

127        Les conclusions de l’EQV n’étaient pas logiques, puisque seulement deux erreurs avaient été relevées dans un total de 45 rapports.

128        Le fonctionnaire m’a renvoyé au paragraphe 133 de Hassard. Il avait le droit de présenter un grief; Hassard n’écarte pas le droit de présenter un grief. Il a fait valoir qu’en vertu du paragraphe 179 de cette décision, la question de savoir si une mesure particulière de l’employeur équivalait à un licenciement ou à une rétrogradation en vertu de l’al. 209(1)b) de la Loi est une question de droit qui dépend à son tour des faits; il s’agit d’une question de substance, non de forme.

129        Le fonctionnaire m’a renvoyé aux paragraphes 83 et 85 de Potter. Il a déclaré que même une suspension administrative devait être justifiée. L’employeur l’a renvoyé à domicile pour de la paperasse et lui a ordonné de poser sa candidature pour le même poste, ce qui n’était ni raisonnable ni justifié.

130        En ce qui concerne Baker, le fonctionnaire m’a renvoyé aux mêmes sections qui traitent de l’équité procédurale et qui ont été présentées par l’employeur.

131        À titre de réparation, le fonctionnaire demande ce qui suit :

  1. des dommages équivalant à une perte de six années de salaire ainsi que tous les avantages qui auraient été cumulés, y compris les congés annuels;
  2. des dommages de 300 000 $ pour la perte d’avancement professionnel et d’augmentations salariales sur une période de six ans ou pour une perte de travail en tant que psychologue agréé;
  3. des dommages majorés pour ses soins psychiatriques s’élevant à 250 000 $;
  4. des dommages punitifs s’élevant à 500 000 $, qui tiennent compte d’un préjudice commis et d’une sanction pour une conduite malveillante continue;
  5. des intérêts antérieurs et postérieurs au jugement;
  6. ses frais d’arbitrage;
  7. des excuses;
  8. une référence.

C. La réponse de l’employeur

132        Le fonctionnaire a fait valoir qu’il avait été suspendu, ce qui n’est pas appuyé par la preuve. Dans l’ensemble, la preuve a démontré que le fonctionnaire avait été en congé de maladie ou ASP. Sa référence à son renvoi à la maison a eu lieu bien avant toute mesure prise par l’employeur faisant l’objet du présent grief. La suspension n’est mentionnée nulle part dans le présent grief et est hors de la portée du grief original, selon le principe énoncé dans Burchill.

133        L’observation selon laquelle le Dr Roy a suggéré qu’un licenciement était approprié n’est pas vraiment exacte. Il n’avait aucune autorité hiérarchique sur le fonctionnaire. Il s’agissait strictement d’une recommandation à l’égard d’une question qui devait être examinée.

134        Le fonctionnaire a fait valoir qu’on lui avait dit qu’il n’était pas compétent dans son poste; ce n’est pas exact. La preuve a divulgué que l’employeur était préoccupé par sa capacité à exécuter certaines tâches requises dans le cadre de son emploi; il n’allait pas le licencier.

135        En ce qui concerne les observations figurant au paragraphe 181 de Potter, qui portent sur une violation répudiatoire, ils ne s’appliquent pas aux faits en l’espèce et n’ont aucune place dans le régime réglementaire fédéral.

V. Motifs

A. Demande de sceller les documents

136        Le fonctionnaire a présenté en preuve des copies des courriels qu’il a échangés avec ses superviseurs qui ont examiné ses évaluations. Les copies des courriels ont été présentées en tant que pièce G-2, onglet C, et étaient numérotés C1 à C106. Ils concernaient des détenus et leur comportement, tel qu’ils ont été évalués par le fonctionnaire. Les détenus, leur comportement, leurs maladies ou leurs particularités ne constituent pas l’objet du présent grief et n’ont aucune incidence sur la présente audience ou son résultat. Les documents ont été fournis par le fonctionnaire, car il croyait qu’ils constituaient une preuve de sa compétence et de sa capacité.

137        Dans Basic c. Association canadienne des employés professionnels, 2012 CRTFP 120, aux par. 9 à 11, la CRTFP a affirmé ce qui suit :

[9] La mise sous scellés de documents ou de dossiers déposés en vue d’une audience judiciaire ou quasi judiciaire va à l’encontre du principe fondamental consacré dans notre système de justice selon lequel les audiences sont publiques et accessibles. La Cour suprême du Canada a statué que l’accès du public aux pièces et aux autres documents déposés dans le cadre d’une procédure judiciaire était un droit protégé par la Constitution en vertu des dispositions sur la « liberté d’expression » de la Charte canadienne des droits et libertés; voir Société Radio-Canada c. Nouveau-Brunswick (Procureur général), [1996] 3 R.C.S. 480; Dagenais c. Société Radio-Canada, [1994] 3 R.C.S. 835; R. c. Mentuck, 2001 CSC 76, Sierra Club du Canada c. Canada (Ministre des Finances), 2002 CSC 41 (CanLII).

[10] Cependant, la liberté d’expression et le principe de transparence et d’accessibilité publique des audiences judiciaires et quasi judiciaires doivent parfois être soupesés en fonction d’autres droits importants, dont le droit à une audience équitable. Bien que les cours de justice et les tribunaux administratifs aient le pouvoir discrétionnaire d’accorder des demandes d’ordonnance de confidentialité, de non-publication et de mise sous scellés de pièces, ce pouvoir discrétionnaire est limité par l’exigence de soupeser ces droits et intérêts concurrents. Dans Dagenais et Mentuck, la Cour suprême du Canada a énuméré les facteurs à prendre en considération pour déterminer s’il convient d’accepter une demande de restriction de l’accès aux procédures judiciaires ou aux documents déposés dans le cadre de ces procédures. Ces décisions ont mené à ce que nous connaissons aujourd’hui comme étant le critère Dagenais/Mentuck.

[11] Le critère Dagenais/Mentuck a été établi dans le cadre de demandes d’ordonnance de non-publication dans des instances criminelles. Dans Sierra Club of Canada, la Cour suprême du Canada a précisé le critère en réponse à une demande dordonnance de confidentialité dans le cadre dune procédure civile. Le critère adapté est le suivant :

[…]

a. elle est nécessaire pour écarter un risque sérieux pour un intérêt important, y compris un intérêt commercial, dans le contexte d’un litige, en l’absence d’autres options raisonnables pour écarter le risque.

b. ses effets bénéfiques, y compris ses effets sur le droit des justiciables civils à un procès équitable, l’emportent sur ses effets préjudiciables, y compris ses effets sur la liberté d’expression qui, dans ce contexte, comprend l’intérêt du public dans la publicité des débats judiciaires.

                   […]

138        L’objet de la présente audience consiste à déterminer si le fonctionnaire a fait l’objet d’un congédiement déguisé et, par conséquent, s’il a été licencié de son poste au SCC. L’information dans les documents concernant les détenus et leurs questions personnelles, leurs maladies et leur comportement n’était pas pertinente pour l’audience. Cependant, les documents ont été présentés par le fonctionnaire dans le cadre de l’audience à titre d’argument afin de trancher une question qu’il m’a soumise à propos du grief. 

139        Ces documents contiennent des renseignements qui ne devraient pas être du domaine public. Il existe un risque grave pour la sécurité des renseignements personnels des détenus nommés dans ceux-ci, qui ne sont pas une partie aux présentes procédures, et leurs situations personnelles ne sont pas pertinentes à l’affaire dont je suis saisi. Par conséquent, j’ordonne la mise sous scellés des documents présentés et consignés en tant que pièce G-2, onglet C, et en tant que documents C1 à C106.

B. Question liée à la compétence

140        L’employeur s’est opposé à ma compétence pour entendre la présente affaire. Il a soutenu qu’elle ne relevait pas de l’art. 209 de la Loi. Compte tenu de la nature du grief, qui est une allégation de congédiement déguisé, il n’était pas possible d’entendre la preuve relative à l’objection sans entendre celle sur le bien-fondé du grief. À ce titre, j’ai entendu l’ensemble de la preuve et j’ai réservé ma décision sur la question de la compétence.

141        Pour relever de la compétence de la Commission aux termes de l’art. 209 de la Loi, un grief doit respecter certains critères. L’agent négociateur du fonctionnaire, qui avait cessé de le représenter au moment de l’audience, a renvoyé le grief à l’arbitrage en vertu de l’al. 209(1)b) de la Loi, en faisant valoir qu’il découlait d’une mesure disciplinaire ayant entraîné le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire, et en vertu du sous-al. 209(1)c)(ii) de la Loi, en faisant valoir qu’il était assujetti à une mutation dans l’administration publique centrale en vertu de la LEFP sans son consentement alors que celui-ci était requis.  Même s’il ne l’a pas fait, le grief aurait pu être renvoyé à l’arbitrage en vertu du sous-alinéa 209(1)c)(i) de la Loi, qui traite d’un licenciement ou d’une rétrogradation aux termes de l’al. 12(1)d) de la Loi sur la gestion des finances publiques, pour rendement insatisfaisant. 

142        Le paragraphe 241(1) de la Loi précise que les procédures prévues par la Loi ne sont pas susceptibles d’invalidation pour vice de forme ou de procédure.  Lorsque vous lisez le grief, il est possible que l’agent négociateur du fonctionnaire ait également eu l’intention de renvoyer le grief aux termes du sous-al. 209(1)c)(i) de la Loi. À ce titre, je trancherai la question relative à la compétence comme si l’on avait eu l’intention d’utiliser cette disposition.  

143        Pour les motifs qui suivent, l’objection de l’employeur à l’égard de la compétence est accueillie, et le grief est rejeté.

144        Le grief a été présenté le 18 mai 2011. Dans celui-ci, le fonctionnaire a allégué avoir fait l’objet d’un congédiement déguisé de son poste PS-02, au SCC. Le grief indiquait ce qui suit :

[Traduction]

Je conteste la décision de l’employeur de retirer les fonctions que j’ai exercées au cours des neuf dernières années et de modifier de manière importante mes conditions de travail. Cela m’a causé un stress et une anxiété immenses. J’ai dû partir en congé de maladie pour prendre soin de ma santé. La modification de mes fonctions et de mes conditions de travail équivalent à un congédiement déguisé.

[…]

145        Je trancherai d’abord le renvoi à l’arbitrage en vertu du sous-al. 209(1)c)(ii) de la Loi. Cette section traite des mutations qui exigent le consentement. Rien dans le présent grief ne laisse entendre qu’une mutation avec ou sans consentement n’a eu lieu. Selon l’allégation, le fonctionnaire a fait l’objet d’un congédiement déguisé, ce qui laisse entendre que la relation d’emploi a été rompue. Pour ce seul motif, le grief ne pouvait pas être renvoyé à l’arbitrage aux termes du sous-al. 209(1)c)(ii).

C. L’alinéa 209(1)b) et le sous-alinéa c)(i)

146        Pour que le grief relève de l’al. 209(1)b) de la Loi, le fonctionnaire doit établir qu’il a fait l’objet d’un licenciement, d’une rétrogradation, d’une suspension ou d’une sanction pécuniaire et que l’acte de le licencier, de le rétrograder, de le suspendre ou de lui imposer une sanction pécuniaire découlait d’une mesure disciplinaire de l’employeur. Il ne suffit pas de démontrer qu’il a été licencié, rétrogradé, suspendu ou qu’il a subi une sanction pécuniaire, à moins que le fonctionnaire établisse que cette mesure était de nature disciplinaire. Pour que le grief relève du sous-al. 209(1)c)(i) de la Loi, le fonctionnaire doit établir qu’il a fait l’objet d’un licenciement ou d’une rétrogradation pour rendement insatisfaisant.

147        Le fonctionnaire a allégué un congédiement déguisé. La Cour suprême du Canada a abordé cette question dans Potter, aux par. 30 à 33. Ces paragraphes sont libellés comme suit :

[30] Lorsque, par sa conduite, l’employeur manifeste l’intention de ne plus être lié par le contrat de travail, le salarié peut soit acquiescer à la conduite de l’employeur ou à la modification qu’il apporte au contrat, soit y voir la répudiation du contrat et intenter contre l’employeur une poursuite pour congédiement injustifié. […]

[31] Puisque, contrairement au contrat commercial, le contrat de travail revêt un caractère dynamique, les tribunaux ont à juste titre adopté une approche souple pour décider si, par sa conduite, l’employeur avait manifesté ou non l’intention de ne plus être lié par le contrat. Deux volets ont vu le jour pour l’application du critère. […]

[32] […] Deux volets ont vu le jour pour l’application du critère. Dans la plupart des cas, il faut d’abord établir la violation d’une condition expresse ou tacite du contrat, puis décider si elle est suffisamment grave pour constituer un congédiement déguisé. […]

[33] Or, la conduite de l’employeur constitue également un congédiement déguisé lorsqu’elle traduit généralement son intention de ne plus être lié par le contrat. […]

148        Pour que j’aie compétence, le fonctionnaire devait établir que, selon la prépondérance des probabilités, l’action de l’employeur constituait un licenciement (puisqu’il a allégué avoir fait l’objet d’un congédiement déguisé) et que cette décision a été prise pour des motifs disciplinaires (l’al. 209(1)b) de la Loi), ou pour un rendement insatisfaisant allégué (sous-al. 209(1)c)(i) de la Loi).

149        Plus précisément, selon l’allégation formulée par le fonctionnaire, le retrait de certaines fonctions qu’il avait exercées pendant neuf ans et la modification considérable de ses conditions de travail équivalent à un congédiement déguisé. Par conséquent, selon la prépondérance des probabilités, il devait démontrer que c’est ce qui s’est produit, ce qui correspond à la première partie du critère énoncé dans Potter à propos de la modalité expresse ou tacite du contrat qui a été violée. 

150        Pour le moment, je mettrai de côté la question de savoir si les conditions de travail et les fonctions du fonctionnaire équivalaient à des modalités expresses ou tacites de son contrat d’emploi. J’agis ainsi, car je ne suis saisi d’absolument aucune preuve que l’employeur a retiré certaines fonctions ou qu’il a modifié ses considérations de travail de manière importante.

151        La seule preuve concernant les fonctions et les conditions de travail du fonctionnaire dont je suis saisie concernent le fait qu’il était un psychologue classifié PS-02 qui travaillait à l’intérieur d’un établissement du SCC et qu’il rédigeait des évaluations. On ne m’a présenté absolument aucune preuve de ses fonctions particulières. De plus, je n’ai été saisi d’aucune description de travail ou de toute preuve quant à la façon dont il exerçait ses fonctions, avant ou après le moment où il a allégué que ses fonctions avaient été retirées et modifiées de manière importante, ou des fonctions qui ont été modifiées ou retirées.

152        J’ai entendu une grande quantité d’éléments de preuve à propos de la qualité du travail du fonctionnaire, qui a été décrit, à certains égards, comme étant en deçà de la norme d’un psychologue agréé par le Collège. La qualité du travail du fonctionnaire était largement imputable au fait que le parcours d’études achevé par ce dernier pour ses études universitaires de deuxième et troisième cycles était dans le domaine de la psychologie expérimentale par opposition à la psychologie clinique, laquelle prévaut en ce qui concerne l’évaluation et le traitement des patients.

153        La preuve que j’ai entendue à l’égard du rendement du fonctionnaire avant la présentation du grief (le 18 mai 2011) provient presque exclusivement de M. Ouellet, qui a supervisé le fonctionnaire de février à octobre 2010, environ. D’après sa preuve, les connaissances et la formation du fonctionnaire contenaient des lacunes qui, à son avis, posaient un problème et auraient pu entraîner des questions relatives à la responsabilité de l’employeur.

154        Pendant la période au cours de laquelle il était assujetti à la supervision de M. Ouellet, ses préoccupations concernant la qualité du travail du fonctionnaire ont fait l’objet d’une discussion avec le fonctionnaire ainsi qu’avec ses gestionnaires fonctionnels et hiérarchiques. Un plan a été élaboré et a fait l’objet d’une discussion avec le fonctionnaire et ses gestionnaires fonctionnels et hiérarchiques. Selon ce plan, le fonctionnaire aurait mis à niveau ses connaissances et sa formation. D’après la preuve dont je suis saisi, il semble que le fonctionnaire ait accepté ce plan.

155        Au mieux, les détails concernant les antécédents professionnels du fonctionnaire étaient incomplets. Selon ma compréhension, il avait passé l’essentiel de sa carrière en tant que PS-02 au SCC à Ferndale; cependant, il a également travaillé au CRRE. Son travail de PS-02 à Ferndale comportait des évaluations des détenus, ce qui correspondait également au travail qu’il accomplissait au CRRE. Toutes les évaluations qu’il a menées devaient être examinées et approuvées par son superviseur, étant donné qu’il n’était pas un psychologue agréé, et ce,  que ce soit à Ferndale ou au CRRE, et avant ou après le grief.

156        Le fonctionnaire a été en congé pendant une longue période à partir de 2010. Aucun détail sur ce congé ne m’a été présenté. Les détails quant à la durée totale de la période pendant laquelle il a été présent et absent du travail étaient limités. D’après ce que j’ai pu comprendre de la preuve, à un certain moment au cours du printemps de 2011, il est parti en congé de maladie et est demeuré en congé de maladie avec certificat, en congé de maladie sans certificat ou était ASP jusqu’à ce qu’il démissionne du SCC en novembre 2012. 

157        J’ai entendu quantité d’éléments de preuve à propos de l’EAQ. L’EAQ a eu lieu après la présentation du grief et après le départ du fonctionnaire en congé de maladie en 2011, après quoi il n’est pas retourné au travail. Ses résultats ont été présentés à la direction et au fonctionnaire à l’automne 2011.

158        Étant donné que le processus et la présentation des résultats de l’EAQ ont eu lieu bien après le grief (1 an à 18 mois par la suite), je n’arrive pas à voir la pertinence de l’EAQ, de son processus ou de ses résultats par rapport au grief, car le fonctionnaire avait, bien avant cela, déjà allégué qu’il avait fait l’objet d’un congédiement déguisé. De toute façon, les résultats de l’EAQ ont confirmé ce qui avait déjà été déterminé en 2010 par M. Ouellet et d’autres, puis accepté par le fonctionnaire et la direction, soit qu’une mise à niveau des études et des compétences du fonctionnaire était requise pour lui permettre d’être en mesure de satisfaire aux normes nécessaires pour un poste PS-02.

159        Le fonctionnaire a fait valoir qu’il n’avait pas à démontrer que son emploi lui avait été retiré, seulement qu’il était à la maison sans rémunération. C’est inexact. Il devait démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il avait fait l’objet d’un congédiement déguisé et que, s’il le prouvait, le congédiement déguisé relevait du par. 209(1) de la Loi. Il n’a pas réussi à le faire.

160        Le fonctionnaire a fait valoir qu’il avait été dépouillé de ses fonctions et qu’il avait été renvoyé à domicile et qu’il avait dû présenter sa candidature pour son poste. Il n’y a absolument aucune preuve que cela s’est produit. La preuve dont je suis saisi divulguait qu’il était volontairement parti en congé de maladie pendant que des représentants de la direction et lui discutaient d’un plan en vue de mettre à niveau sa formation et ses études pour qu’il se conforme aux exigences du Collège et du SCC.

161         Le fonctionnaire a fait valoir qu’il avait été renvoyé à domicile et qu’on ne lui avait jamais dit qu’il pouvait revenir au travail; c’est faux. Plusieurs lettres qui ont été envoyées au cours d’une période de temps prolongée lui ont expressément ordonné de retourner au travail, ce qu’il n’a pas fait.

162        Le fonctionnaire a fait valoir qu’il avait été suspendu. Une fois de plus, il n’y a absolument aucune preuve d’une suspension. La preuve dont je suis saisi divulguait qu’il était volontairement parti en congé de maladie pendant que des représentants de la direction et lui discutaient d’un plan en vue de mettre à niveau sa formation et ses études pour qu’il se conforme aux exigences du Collège et du SCC.

163        Le fonctionnaire a fait valoir qu’il était un PS-02 principal, qu’il avait un droit à l’égard de l’emploi et que l’employeur n’avait aucun droit de le transférer. La preuve n’a pas divulgué que l’employeur l’avait rétrogradé ou qu’il l’avait effectivement transféré. Les conditions de son emploi étaient établies dans la convention collective pertinente ainsi que dans les lois et règlements pertinents. La LGFP prévoit que l’employeur a le droit d’attribuer des fonctions. L’article 7 de la Loi ainsi que la loi précédente régissant les prédécesseurs de la Commission (la CRTFP et la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « CRTFP »)) établissent que l’attribution de fonctions ne donne pas d’une manière quelconque compétence à la Commission alors qu’autrement elle n’en a aucune (voir Synowski et Tuckett-Reddy).

164        Le fonctionnaire a fait valoir que, d’après Hassard, il avait le droit de présenter un grief. Même s’il est possible qu’il ait eu le droit de présenter un grief en vertu de l’art. 208 de la Loi, cela ne conférait pas compétence à la Commission pour entendre le renvoi à l’arbitrage du grief en vertu de l’art. 209. Un ensemble considérable de précédents de la présente Commission, de la CRTFP et de l’ancienne CRTFP soutient que, même si de nombreuses mesures de l’employeur peuvent être assujetties à des griefs, toutes ne sont pas assujetties à l’arbitrage.

165        Étant donné qu’il n’y a aucune preuve que le fonctionnaire a été licencié et que, en réalité, la preuve a établi le contraire, et qu’il n’a pas non plus été établi que ses fonctions avaient été retirées de façon à ce qu’un congédiement déguisé (en supposant que cela existe dans la fonction publique) puisse être établi, le grief ne relève pas de l’al. 209(1)b) ou du sous-al. c)(i) et, par conséquent, je n’ai pas compétence.

D. Processus

166        Comme le fonctionnaire agissait en son nom, je lui ai expliqué le processus d’audience. Je l’ai fait pendant la CPA et au début de l’audience. 

167        J’ai expliqué que, puisque le fonctionnaire alléguait qu’un congédiement déguisé avait eu lieu, il serait tenu de présenter sa preuve en premier en convoquant des témoins et en présentant tout document par leur entremise. J’ai expliqué qu’il serait tenu d’interroger ses témoins et que, après avoir terminé, l’avocat de l’employeur aurait la possibilité de le faire. Je lui ai expliqué le concept du contre-interrogatoire. J’ai expliqué qu’une fois que tous ses témoins avaient terminé de présenter leur témoignage, l’employeur aurait la possibilité de convoquer ses propres témoins, selon le même processus de questionnement. J’ai également expliqué au fonctionnaire que, pour que des documents soient présentés en preuve, ils devaient être introduits par l’entremise d’un témoin ou être acceptés par l’employeur. Je lui ai également expliqué qu’il serait autorisé à formuler un exposé introductif ainsi qu’un exposé définitif, une fois que la preuve serait présentée dans son intégralité.

168        En plus de mes commentaires lors de la CPA et au début de l’audience, le site Web de la Commission comprend une section pour les parties non représentées qui agissent en leur propre nom. 

169        Au début de l’audience, l’employeur m’a présenté un recueil de documents et le fonctionnaire m’a présenté deux recueils de documents. J’ai accepté les deux recueils avec la condition habituelle que seuls les documents qui ont été identifiés dans le cadre habituel de l’audience par un témoin seraient conservés comme éléments de preuve et que, à la fin de la partie de l’audience portant sur la preuve, tous les documents contenus dans les recueils seraient retirés et retournés aux parties, sauf si elles acceptaient que les documents soient conservés. À la clôture de la preuve, plusieurs documents ont été retirés des recueils de preuve puisqu’ils n’avaient pas été identifiés par des témoins et que les parties n’avaient pas accepté de les présenter.

170        Le fonctionnaire a choisi de citer le Dr Roy et M. Fortnum comme témoin. Comme il a été établi dans la présente décision, le Dr Roy avait une responsabilité fonctionnelle à l’égard du fonctionnaire en tant que psychologue régional en chef et M. Fortnum, en tant que directeur de Ferndale. Le fonctionnaire a choisi de les convoquer et de les questionner. Leur preuve, pour l’essentiel, ne lui a pas été utile et appuyait la position de l’employeur. 

171        Durant la CPA et au début de l’audience, le fonctionnaire a indiqué qu’il ne présenterait pas de témoignage. Après quelques incitations de son épouse, qui l’assistait à l’audience, et après que je les aie informés (une fois de plus) que tout document figurant dans les recueils qui n’avaient pas été identifiés par un témoin ou acceptés par l’employeur ne pouvaient pas figurer dans la preuve, le fonctionnaire s’est présenté à la barre des témoins et a présenté une preuve. 

172        Le fonctionnaire a présenté un très court témoignage et a essentiellement déposé des documents, dont ses évaluations du rendement et certains autres documents liés aux soins de santé datés de 2012. Il n’a présenté aucun témoignage quant aux événements allégués mentionnés dans son grief. En l’absence d’une preuve quelconque relative aux allégations contenues dans le grief, le fonctionnaire n’a pas réussi à établir les fondements de son affaire qui auraient pu faire en sorte de me conférer compétence, c’est-à-dire qu’il n’a pas réussi à établir qu’il avait fait l’objet d’un congédiement déguisé et, essentiellement, qu’il avait été licencié.

173        Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

VI. Ordonnance

174        Je n’ai pas compétence.

175        Le grief est rejeté.

Le 10 avril 2017.

Traduction de la CRTEFP

John G. Jaworski,
une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique

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