Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé a fait valoir que sa description de travail ne correspondait pas à un exposé complet et à jour de ses fonctions et de ses responsabilités – il a demandé à ce que plusieurs fonctions et responsabilités qu’il a accomplies sur une période de 10 ans soient ajoutées rétroactivement à sa description de travail – l’employeur a soutenu que le fonctionnaire s’estimant lésé avait obtenu un exposé complet et à jour du travail en réponse à son grief et qu’il aurait dû se limiter aux fonctions dans sa description de travail – lorsque la direction a appris qu’il accomplissait des fonctions non visées par sa description de travail, elle lui a ordonné de cesser de les accomplir – l’arbitre de grief a conclu que l’employeur savait qu’il accomplissait certaines fonctions ne figurant pas dans sa description de travail et qu’il l’obligeait même à les faire – sa description de travail, lorsqu’il a présenté son grief, ne lui fournissait pas un exposé complet et à jour de ses fonctions et de ses responsabilités – l’arbitre de grief a ordonné la modification de la description de travail du fonctionnaire s’estimant lésé en vigueur 25 jours avant la présentation de son grief, pour tenir compte des fonctions et des responsabilités qu’il était tenu d’accomplir.Grief accueilli.

Contenu de la décision



Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  20170726
  • Dossier:  566-02-8250
  • Référence:  2017 CRTESPF 15

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral


ENTRE

IAN MCKENZIE

fonctionnaire s'estimant lésé

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(Service correctionnel du Canada)

employeur

Répertorié
McKenzie c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada)


Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage


Devant:
Michael F. McNamara, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral
Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Tony Jones, Institut professionnel de la fonction publique du Canada
Pour l'employeur:
Lesa Brown, avocate
Affaire entendue à Kingston (Ontario),
du 14 au 16 juillet 2015 et les 24 et 25 février 2016.
(Traduction de la CRTEFP)

MOTIFS DE DÉCISION

I. Grief individuel renvoyé à l’arbitrage

1        Ian McKenzie, le fonctionnaire s’estimant lésé (le « fonctionnaire »), était employé par le Service correctionnel du Canada (SCC ou l’« employeur ») en tant que psychologue au groupe Services de santé, classifié au groupe et au niveau PS-03. Le 23 mars 2012, il a présenté un grief faisant valoir que sa description de travail ne correspondait pas à un exposé complet et à jour de ses fonctions et de ses responsabilités comme l’exige l’article 20 de la convention collective conclue entre le Conseil du Trésor et l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada, dont la date d’expiration est le 30 septembre 2014 (la « convention collective »).

2        Le 1er novembre 2014, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2013, ch. 40, art. 365) a été proclamée en vigueur (TR/2014-84) et a créé la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique, qui remplace la Commission des relations de travail dans la fonction publique et le Tribunal de la dotation de la fonction publique. Le même jour, les modifications corrélatives et transitoires édictées par les articles 366 à 466 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013 (L.C. 2013, ch. 40) sont aussi entrées en vigueur (TR/2014-84). En vertu de l’art. 393 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013, une instance engagée au titre de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, art. 2) avant le 1er novembre 2014 se poursuit sans autres formalités en conformité avec la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, dans sa forme modifiée par les articles 365 à 470 de la Loi no 2 sur le plan d’action économique de 2013.

3        Le 19 juin 2017, la Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et d’autres lois et comportant d’autres mesures (L.C. 2017, ch. 9) a reçu la sanction royale et a modifié le nom de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique, de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique pour qu’il devienne respectivement la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission »), la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral.

4        Pour les motifs qui suivent, je conclus que le fonctionnaire n’a pas reçu un exposé complet et à jour de ses fonctions et de ses responsabilités comme l’exige la convention collective et que sa description de travail devrait être modifiée pour tenir compte des fonctions et des responsabilités qu’il devait accomplir.

II. Résumé de la preuve

A. Description de travail originale

5        Le fonctionnaire a commencé à travailler à titre de psychologue à l’Établissement de Beaver Creek (BCI) de l’employeur à Gravenhurst, en Ontario, un établissement correctionnel à sécurité minimale en 2002. Sa description de travail originale, en date de 1988, énumérait les fonctions suivantes :

  • effectue une gamme complète d’évaluation psychologique des délinquants, au besoin;
  • effectue des thérapies individuelles et de groupe afin de satisfaire aux besoins déterminés des délinquants;
  • agit à titre de consultant pour la direction de l’établissement, les équipes de gestion des cas, le personnel de la Commission nationale des libérations conditionnelles, le suivi thérapeutique et les organismes communautaires;
  • facilite la planification, la mise en œuvre, le contrôle de la qualité et l’évaluation des programmes de traitement;
  • agit à titre de ressource et consultant au directeur ou au surintendant dans l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation de la formation des employés, de l’aide aux employés et des programmes de perfectionnement professionnel;
  • mène des projets de recherche, des sondages et des études sur des sujets pertinents à la psychologie correctionnelle;
  • accomplit d’autres fonctions, notamment :
    • représenter l’établissement à l’occasion de réunions et de conférences, au besoin;
    • participer au processus de dotation en siégeant à des jurys de sélection, selon les demandes;
    • fournir des renseignements pour des besoins de crédit budgétaire et préparer des soumissions en ce qui concerne le budget principal des dépenses et les prévisions de trésorerie;
    • se tenir au courant des développements actuels en matière de recherche correctionnelle en établissant une liaison avec les établissements professionnels et de recherche;
    • conserver une communication fonctionnelle et professionnelle continue avec les collègues en participant au groupe de psychologie de la région de l’Ontario,
    • aider à l’élaboration de politiques et de procédures liées à la prestation de services en santé mentale;
    • participer en tant que membre spécial de groupes de travail, de projets spéciaux et d’affectations spéciales, au besoin.

6        La description de travail originale précise que le fonctionnaire est [traduction] « […] sous la supervision administrative du surintendant ou du directeur […] ». Les deux organigrammes présentés pour l’EBC, en date de 2000 et de 2010 respectivement, indiquent tous les deux un poste relevant du psychologue : l’assistant pour l’administration des tests psychologiques.

7        Les deux descriptions de travail générales pour un assistant pour l’administration des tests psychologiques ont été présentées, l’une sans date d’entrée en vigueur, mais signée par le gestionnaire responsable en 2014 (la « description de travail de 2014 »), et l’autre dont la date d’entrée en vigueur est en octobre 2005 (la « description de travail de 2005 »). La description de travail de 2005 indique que l’assistant pour l’administration des tests est supervisé par [traduction] « diverses personnes », alors que la description de travail de 2014 indique que le superviseur est un psychologue en chef du groupe et niveau PS-04.

8        Les deux descriptions de travail contiennent un texte semblable sous [traduction] « Résultats du service à la clientèle ». La description de travail de 2005 indique [traduction] « Gestion du bureau, documentation de cas et administration des tests », alors que la description de travail de 2014 précise que l’assistant pour l’administration des tests [traduction] « prévoit, organise et coordonne l’exploitation administrative de l’Unité de psychologie de l’établissement, y compris l’administration des tests psychologiques aux délinquants ».

9        Pour ce qui est des connaissances, la description de travail de 2005 précise entre autres choses que le [traduction] « travail nécessite la connaissance de l’administration, de la surveillance et de la notation d’une gamme de tests psychologiques ». Pour ce critère précis des connaissances, la description de travail de 2014 indique que le travail d’un assistant pour l’administration des tests exige la connaissance de ce qui suit :

[Traduction]

Administration de tests, connaissances de base de lignes directrices sur l’administration de divers tests psychologiques normalisés afin de faire passer et de noter une gamme de tests psychologiques sous la supervision d’un psychologue agréé sur place.

10        Pendant le mandat du fonctionnaire, il n’y avait aucun psychologue en chef sur place et aucun n’était désigné dans l’organigramme présenté. Pour la majeure partie, en dehors de l’emploi d’un psychologue à contrat, le fonctionnaire était le seul psychologue agréé sur place à l’EBC jusqu’en 2012.

B. Antécédents professionnels

11        Le [traduction] « Rapport d’évaluation du rendement » du fonctionnaire pour 2002-2003 indique qu’il [traduction] « a démontré la capacité de gérer le service de psychologie de l’établissement d’une manière efficace et responsable ». Deux réalisations supplémentaires sont indiquées : sa direction de groupes complexes de séance d’aide après un stress causé par un incident critique et son programme de perfectionnement. Le rapport se poursuit en énumérant ses objectifs et affectations pour la prochaine année, y compris la coordination du service de psychologie à l’EBC.

12        Pour les années qui ont suivi, de 2003 à 2010, les rapports d’évaluation du rendement du fonctionnaire contenaient des commentaires et objectifs semblables. En 2003-2004, le rapport note ce qui suit : [traduction] « M. McKenzie a démontré la capacité d’organiser et d’exploiter un service de psychologie efficace » et [traduction] « il coordonne la charge de travail du service et en établit l’ordre de priorité, y compris l’activité d’un aide-commis assigné ».

13        En 2004-2005, le Rapport d’évaluation du rendement du fonctionnaire prévoit encore une fois que l’un de ses objectifs était de [traduction] « coordonner le service de psychologie et de jouer un rôle proactif dans le transfert des détenus appropriés à l’EBC ». Il ajoute que [traduction] « malgré la perte de ressources, M. McKenzie a maintenu un excellent service au service de psychologie au cours de la dernière année ».

14        Ce rapport comprend également une [traduction] « Annexe au Rapport d’évaluation du rendement de l’employé ». Il contient une section précise pour évaluer les [traduction] « responsabilités de supervision ». Sous le premier objectif de rendement de cette section, [traduction] « Contribuer à la gestion du secteur de programme », six critères sont évalués. Les cinq critères suivants portent la mention [traduction] « Aucun fondement pour la notation » :

[Traduction]

  • Objectifs opérationnels – gérer de façon à ce que les objectifs soient respectés par les subalternes;
  • Conception et évaluation de politiques et programmes – formuler des programmes stratégiques et de conception et évaluer l’efficience et l’efficacité des programmes;
  • Contrôle du programme – établir et négocier les priorités, obtenir, allouer et contrôler les ressources;
  • Contrôle financier – exercer un contrôle efficace de toutes les dépenses de ressources, directement et en favorisant un sentiment d’économie et de restriction;
  • Évaluations de rendement – qualité des évaluations de rendement, y compris la validité des renseignements et des jugements qui y figurent.

[…]

15        Le seul critère noté est la [traduction] « résolution de problèmes – aborder et régler les problèmes avec les employés ». Le fonctionnaire a obtenu la note de 3 pour ce critère, ce qui indique [traduction] « objectifs atteints la plupart du temps ».

16        Après l’évaluation de [traduction] « Contribuer à la gestion du secteur de programme », il y a un commentaire selon lequel [traduction] « M. McKenzie est une personne qui fait preuve de compassion et qui cherche à s’assurer qu’on respecte l’aide-commis et le psychologue à contrat avec lesquels il travaille et qu’on s’en préoccupe ». Les commentaires pour cet objectif se concluent ainsi : [traduction] « un grand nombre de secteurs de cette section ont une application limitée ».

17        Le deuxième objectif de rendement de la section des responsabilités de supervision est [traduction] « Contribuer à la qualité de la vie au travail ». Sept critères sont évalués et les cinq suivants portent la mention [traduction] « Aucun fondement pour la notation » :

[Traduction]

  • Attirer, perfectionner et déployer des employés et favoriser un milieu de travail positif et productif;
  • Relations de travail – créer et maintenir des relations constructives avec les agents négociateurs employés;
  • Langues officielles – être sensible quant au respect de l’objectif concernant les langues officielles au SCC et faire des efforts à cet égard;
  • Équité en matière d’emploi – prendre des mesures liées aux groupes désignés, c.-à-d. les femmes, les Autochtones, les personnes handicapées et les minorités visibles;
  • Communications – établir des communications internes de qualité élevée dans l’organisation dont le superviseur est responsable.

18        Les deux critères notés sont [traduction] « Faire preuve de considération sincère pour les intérêts personnels et le bien-être des employés supervisés » et [traduction] « Santé et sécurité au travail – assurer des conditions de travail sûres et saines ». Le fonctionnaire a obtenu la note de 3 pour ces deux critères, ce qui indique, comme il est mentionné, [traduction] « objectifs atteints la plupart du temps ».

19        En 2005-2006, le Rapport d’évaluation du rendement du fonctionnaire prévoit ce qui suit :

[Traduction]

M. McKenzie travaille main dans la main avec notre psychologue à contrat afin d’offrir une intervention d’urgence aux détenus qui en ont besoin et des évaluations du risque pour utilisation par les agents de libération conditionnelle dans les présentations à la [Commission nationale des libérations conditionnelles], remplit les [cadres de contrôles de gestion] pertinents à son domaine d’expertise et il supervise un nouvel employé de bureau à temps partiel.

20        Ses objectifs comprenaient le fait [traduction] « d’exercer un contrôle et de surveiller les activités opérationnelles pour assurer une prudence financière dans tous les domaines de supervision ». Le rapport de 2005-2006 indique également que [traduction] « le service de psychologie a été en mesure de gérer les ressources régionales réduites accordées. M. McKenzie a assuré l’efficacité élevée de son service grâce à la nouvelle personne, mais a réduit le nombre d’heures de l’employé de bureau disponible ».

21        De même, son Rapport d’évaluation du rendement de 2006-2007 indique que le fonctionnaire [traduction] « supervise l’employé de bureau et formule des commentaires sur la soumission de contrats dans son domaine ». Le rapport de 2006-2007 ajoute que [traduction] « Ian a bien géré les ressources humaines et financières de sa section ».

22        Le Rapport d’évaluation du rendement de 2007-2008 du fonctionnaire précisait de nouveau qu’il [traduction] « supervise l’employé de bureau et formule des commentaires sur la soumission de contrats dans son domaine ». De plus, il a [traduction] « coordonné les activités de placement étudiant et a collaboré à l’élaboration du programme papa 24/7 ». Les objectifs du fonctionnaire comprenaient la [traduction] « coordination des ressources humaines et financières du service de psychologie dans les limites du budget ». Le Rapport d’évaluation du rendement de 2007-2008 fait remarquer que le fonctionnaire [traduction] « a bien géré » les ressources humaines et financières.

23        Le Rapport d’évaluation du rendement de 2008-2009 précise que le fonctionnaire [traduction] « supervise au niveau fonctionnel une infirmière praticienne et un commis ». Il comprend également une [traduction] « Annexe au Rapport d’évaluation du rendement de l’employé ». Dans celle-ci, sous [traduction] « Flexibilité », se trouvent aussi les commentaires suivants : [traduction] « l’équipe de santé mentale est un nouvel ajout au service de psychologie qu’Ian gère bien ». Comparativement au critère évalué à l’annexe du Rapport d’évaluation du rendement de 2004-2005, quatre des six critères pour le premier objectif sous [traduction] « Responsabilités de supervision », [traduction] « Contribuer à la gestion du secteur de programme », sont évalués dans l’annexe de 2008-2009. Le fonctionnaire a obtenu une note de 4, [traduction] « Objectifs respectés ou dépassés en tout temps » pour les critères suivants :

[Traduction]

  • Objectifs opérationnels – gérer de façon à ce que les objectifs soient respectés par les subalternes;
  • Conception et évaluation de politiques et programmes – formuler des programmes stratégiques et de conception et évaluer l’efficience et l’efficacité des programmes;
  • Résolution de problèmes – aborder et régler les problèmes avec les employés;
  • Évaluations de rendement – qualité des évaluations de rendement, y compris la validité des renseignements et des jugements qui y figurent.

24        Les critères [traduction] « Contrôle du programme – établir et négocier les priorités, obtenir, allouer et contrôler les ressources » et [traduction] « Contrôle financier – exercer un contrôle efficace de toutes les dépenses de ressources, directement et en favorisant un sentiment d’économie et de restriction » ont continué d’avoir une évaluation [traduction] « Aucun fondement pour la notation ».

25        Les commentaires pour l’objectif [traduction] « Contribuer à la gestion du secteur de programme » de l’annexe 2008-2009 précisent que [traduction] « Ian gère le travail des employés de bureau ainsi que la supervision fonctionnelle de l’équipe de santé mentale […] Ian coordonne également les activités d’un psychologue à contrat ».

26        Encore une fois, comparativement aux deux critères évalués à l’annexe du Rapport d’évaluation du rendement de 2004-2005, quatre des sept critères pour le deuxième objectif sous [traduction] « Responsabilités de supervision », [traduction] « Contribuer à la qualité de la vie au travail », sont évalués dans l’annexe de 2008-2009. Le fonctionnaire a obtenu une note de 4, [traduction] « Objectifs respectés ou dépassés en tout temps » pour les critères suivants :

[Traduction]

  • Attirer, perfectionner et déployer des employés et favoriser un milieu de travail positif et productif;
  • Faire preuve de considération sincère pour les intérêts personnels et le bien-être des employés supervisés;
  • Relations de travail – créer et maintenir des relations constructives avec les agents négociateurs employés;
  • Communications – établir des communications internes de qualité élevée dans l’organisation dont le superviseur est responsable.

27        Les critères [traduction] « Santé et sécurité au travail – assurer des conditions de travail sûres et saines », [traduction] « Langues officielles – être sensible quant au respect de l’objectif concernant les langues officielles au SCC et faire des efforts à cet égard » et [traduction] « Équité en matière d’emploi – prendre des mesures liées aux groupes désignés, c.-à-d. les femmes, les Autochtones, les personnes handicapées et les minorités visibles » ont une évaluation [traduction] « Aucun fondement pour la notation ». Les commentaires pour l’objectif [traduction] « Contribuer à la qualité de la vie au travail » de l’annexe 2008-2009 précisent que [traduction] « Ian souhaite respecter les besoins des employés qui travaillent dans sa section ».

28        Enfin, le Rapport d’évaluation du rendement de 2009-2010 du fonctionnaire indique qu’il [traduction] « supervise l’employé de bureau et formule des commentaires sur la soumission de contrats dans son domaine. Ian gère l’initiative sur la santé mentale à l’EBC et a traité certaines questions difficiles en matière de relations de travail ».

C. Demande de modification de la description de travail

29        En août 2011, le fonctionnaire a demandé une copie de sa description de travail actuelle. Comme une nouvelle description de travail était en cours d’élaboration, on lui a dit qu’elle n’était toujours pas prête. On lui a plutôt remis sa description de travail originale, en date de 1988.

30        Le 21 novembre 2011, le fonctionnaire a présenté une demande par écrit au directeur adjoint pour modifier sa description de travail afin qu’elle tienne plus précisément compte des fonctions requises de son poste. Il a écrit ce qui suit :

[Traduction]

Même si la description de travail PS-03 actuelle (préparée en mars 1987) ne tient pas précisément compte d’un grand nombre de fonctions, elle est incomplète […] et elle ne tient pas compte précisément des domaines de « complexité technique » ou de « responsabilité professionnelle » et elle omet des activités importantes qui relèvent clairement du domaine de la « responsabilité de la direction ».

31        La demande du fonctionnaire continue en indiquant les fonctions et les responsabilités qu’il a accomplies et assumées et qui, selon lui, n’était pas comprises dans sa description de travail, y compris ce qui suit :

[Traduction]

  • Superviser et évaluer les fonctions cliniques de l’assistant pour l’administration des tests psychologiques, des conseillers en comportement, des autres fournisseurs non agréés de services de psychologie et du personnel de l’Initiative sur la santé mentale en établissement.
  • Planifier, coordonner et organiser le travail des membres du personnel du service de psychologie pour qu’ils respectent les exigences de l’établissement en ce qui concerne les services de psychologie.
  • Assurer le contrôle de la qualité des évaluations du risque et d’autres documents préparés par les entrepreneurs et veiller à ce que les services fournis par ces derniers respectent ou dépassent leurs obligations contractuelles.

32        Au bout du compte, même si le fonctionnaire et le directeur adjoint ont discuté de la demande de modification de la description de travail, la demande n’est pas allée plus loin. Par conséquent, il a présenté un grief.

D. Grief

33        Le 23 mars 2012, le fonctionnaire a soutenu que sa description de travail ne correspondait pas à un exposé complet et à jour de ses fonctions et de ses responsabilités, comme l’exige l’article 20 de la convention collective, qui prévoit ce qui suit :

20.01 Au moment de son embauche, ou à tout autre moment sur demande écrite, tout employé a droit à un exposé complet et à jour des fonctions et des responsabilités de son poste y compris le niveau de classification du poste et la formule de cote numérique de classification.

34        Le fonctionnaire a demandé dans son grief à recevoir un exposé complet et à jour de ses fonctions et de ses responsabilités, rétroactivement au 11 novembre 2001. Il a également demandé à [traduction] « […] être entièrement dédommagé ».

35        Au premier palier, le 18 avril 2012, le directeur adjoint a conclu que, dans deux domaines, les fonctions accomplies par le fonctionnaire n’étaient pas visées par sa description de travail. La première concernait la supervision du programme de l’Initiative sur la santé mentale en établissement (ISME). En particulier, le fonctionnaire supervisait l’infirmière en santé mentale de l’ISME. Le directeur adjoint a ordonné que cette fonction de supervision cesse immédiatement, puisque la supervision ne faisait pas partie des fonctions du fonctionnaire.

36        La deuxième fonction concernait le contrôle de la qualité des rapports d’évaluation du risque remplis par le psychologue à contrat de l’établissement. Encore une fois, le directeur adjoint a conclu que cette fonction n’était pas visée par la description de travail du fonctionnaire et il lui a demandé de cesser de l’accomplir.

37        Au bout du compte, le directeur adjoint a maintenu le grief en partie, puisque le fonctionnaire a obtenu une description de travail plus récente en date de 2010. Cependant, à l’audience, le directeur adjoint a déclaré que la description de travail de 2010 n’a jamais été mise en œuvre. Toutes les autres mesures correctives demandées ont été refusées.

38        Au deuxième palier, le 20 juin 2012, le directeur a maintenu la décision du directeur adjoint. Il a fait remarquer que le fonctionnaire était tenu d’accomplir uniquement les fonctions et les responsabilités indiquées dans sa description de travail et que toute responsabilité supplémentaire qui n’était pas visée par cette dernière devait cesser immédiatement.

39        Après la décision au deuxième palier, le fonctionnaire et le directeur adjoint ont discuté des tâches de psychologie que le fonctionnaire allait accomplir. Dans un courriel en date du 4 juillet 2012, le directeur adjoint a confirmé certains des changements discutés, y compris entre autres choses le fait que le directeur adjoint assumerait la supervision de l’assistant pour l’administration des tests psychologiques, que le fonctionnaire a accepté d’effectuer tous les tests requis pour les évaluations du risque, qu’il n’était pas nécessaire d’assujettir les évaluations du risque fournies par les entrepreneurs au contrôle de la qualité et que le directeur adjoint devrait traiter de questions liées à la surveillance contractuelle.

40        Le Rapport d’évaluation du rendement du fonctionnaire pour 2011-2012 a tenu compte des décisions relatives au grief aux premier et deuxième paliers. Sous [traduction] « Responsabilités de supervision » de l’annexe de son Rapport d’évaluation du rendement de 2011-2012, tous les critères identiques figurant dans ses rapports de 2004-2005 et de 2008-2009 étaient évalués selon [traduction] « Aucun fondement pour la notation ». Le rapport indique que [traduction] « le rôle d’Ian en tant que psychologue ne l’oblige pas à accomplir les fonctions associées à cette section. Par conséquent, il n’y a pas de fondement pour l’évaluer à ce moment-ci ».

41        Au dernier palier, le 15 janvier 2013, la commissaire adjointe, Gestion des ressources humaines, a confirmé les décisions des premier et deuxième paliers. Elle a reconnu que la direction locale n’avait pas demandé au fonctionnaire d’accomplir les fonctions en question et qu’elle lui avait ordonné de cesser d’accomplir les fonctions qui ne sont pas précisées dans sa description de travail.

E. Description de travail mise à jour

42        Une description de travail mise à jour de psychologue PS-03, comportant une date d’entrée en vigueur au 2 avril 2013, indique que le titulaire de ce poste relève d’un psychologue en chef PS-04 ou WP-05. Les activités principales du poste comprennent : [traduction] « diriger le personnel subalterne, y compris offrir une formation, et assurer une supervision clinique relativement aux stagiaires, aux employés en santé mentale et aux cliniciens en santé mentale ».

43        Les autres responsabilités comprennent le fait de conseiller le gestionnaire du budget sur les achats et les dépenses du service en santé mentale, l’administration et l’évaluation des contrats attribués aux professionnels et aux autres employés (sauf lorsque l’activité est accomplie par le superviseur) et la responsabilité professionnelle pour le travail des employés non agréés qui offrent des services en santé mentale sous leur supervision clinique.

III. Résumé de l’argumentation

A. Pour le fonctionnaire s’estimant lésé

44        Le fonctionnaire fait valoir que la description de travail qui lui a été remise, lorsqu’il en a demandé une en août 2011 et plus tard lorsqu’il a présenté son grief, ne correspondait pas aux fonctions que son employeur lui demande d’accomplir. En particulier, il précise que, de 2002 à 2012, il était tenu de superviser, de coordonner et de gérer le service de psychologie et de santé mentale à l’EBC ainsi que le personnel, de coordonner l’ISME à l’EBC et d’effectuer le contrôle de la qualité des évaluations du risque des psychologues à contrat.

45        Lorsqu’il a présenté son grief, le fonctionnaire a eu l’ordre de cesser d’accomplir ces fonctions. Il croit que cela avait un effet punitif et que son employeur reconnaissait ainsi qu’il accomplissait réellement ces fonctions.

46        Le fonctionnaire demande une déclaration selon laquelle l’article 20 de la convention collective a été violé et que les fonctions qu’il a accomplies de 2002 à 2012 soient ajoutées rétroactivement à sa description de travail pour cette période.

B. Pour l’employeur

47        À l’exception de sa supervision clinique de l’assistant pour l’administration des tests psychologiques et d’autres employés de l’ISME, l’employeur soutient que le fonctionnaire a obtenu un exposé complet et à jour du travail en réponse à son grief. Avant qu’il le présente, sa description de travail de 1988 était en vigueur et il aurait dû se limiter à ces fonctions. Lorsque la direction a appris qu’il accomplissait des fonctions non visées par sa description de travail, elle lui a ordonné de cesser de les accomplir.

48        Pour ce qui est de l’assistant pour l’administration des tests psychologiques et d’autres employés de l’ISME, l’employeur fait remarquer qu’il y a une distinction entre la supervision clinique et l’accomplissement d’attributions de gestion, c’est-à-dire qu’il n’est pas nécessaire d’être un gestionnaire pour assurer une supervision clinique. Sur ce point, l’employeur fait remarquer que le fonctionnaire n’a aucun pouvoir financier d’achat, d’établissement d'un budget ou d’attribution d’un contrat.

49        De même, l’employeur prétend que le fonctionnaire n’était pas tenu d’accomplir le contrôle de la qualité en profondeur des évaluations du risque du psychologue à contrat. Il ne possédait pas de responsabilité de supervision relativement à l’entrepreneur, qu’elles soient hiérarchiques ou cliniques. En tant que psychologue, l’entrepreneur était responsable du contenu de ses évaluations du risque.

50        L’employeur fait remarquer que la description de travail du fonctionnaire a été modifiée de façon à inclure la supervision clinique du personnel et des cliniciens en santé mentale. Si la Commission conclut que toute autre mesure corrective rétroactive était nécessaire, l’employeur fait valoir qu’elle devrait être limitée à la période de 25 jours précédant le moment où le fonctionnaire a présenté son grief, en vertu de la clause 34.12 de la convention collective et Canada (Office national du film) c. Coallier, [1983] A.C.F. no 813 (C.A.) (QL).

IV. Motifs

51        La question que je dois trancher en l’espèce est celle de savoir si, selon la preuve dont je suis saisi, la description de travail donnait au fonctionnaire un exposé complet et à jour des fonctions et des responsabilités de son poste. Pour parvenir à prouver que la convention collective a été violée, le fonctionnaire devait prouver, selon la prépondérance des probabilités, que sa description de travail ne comportait pas les éléments qu’il a indiqués. Une description de travail ne doit pas omettre de mentionner une fonction ou responsabilité particulière que le fonctionnaire doit remplir (voir Jennings c. Conseil du Trésor (ministère des Pêches et des Océans), 2011 CRTFP 20, au paragr. 52).

52        Compte tenu de la preuve documentaire et testimoniale présentée par les parties, je suis convaincu que la description de travail originale du fonctionnaire, qui était toujours en vigueur lorsqu’il a présenté son grief en 2012, ne lui fournissait pas un exposé complet et à jour de ses fonctions et de ses responsabilités.

53        Les rapports d’évaluation du rendement du fonctionnaire de 2002 à 2012 sont révélateurs. Bien que l’employeur soutienne que le fonctionnaire aurait dû s’en tenir aux fonctions de sa description de travail de 1988 et qu’il ne savait pas qu’il accomplissait des fonctions non visées par sa description de travail avant la présentation du grief, il ressort clairement des rapports d’évaluation du rendement que l’employeur savait qu’il accomplissait certaines fonctions ne figurant pas dans sa description de travail de 1988 et qu’il l’obligeait même à le faire.

54        De 2002 à 2012, le fonctionnaire coordonnait le service de psychologie et de santé mentale à l’EBC. Son témoignage, appuyé par les exposés de ses rapports d’évaluation du rendement, indique qu’il coordonnait la charge de travail et les ressources humaines et financières du service.

55        Il n’y a pas de fonction de « coordination » dans la description de travail originale du fonctionnaire; on ne peut pas dire non plus qu’elle est incluse dans l’une des autres fonctions qui y sont décrites. Il a joué un rôle actif dans l’organisation de la réalisation efficace de la charge de travail du service de psychologie et de santé mentale à l’EBC et l’établissement de son ordre de priorité.

56        En ce qui concerne les ressources humaines et financières, comme l’a fait remarquer l’employeur, même si le fonctionnaire peut ne pas avoir de pouvoir financier d’achat, d’établissement d’un budget ou d’attribution d’un contrat, je suis convaincu que son rôle allait au-delà du fait de [traduction] « fournir des renseignements pour des besoins de crédit budgétaire et préparer des soumissions en ce qui concerne le budget principal des dépenses et les prévisions de trésorerie », comme l’indiquait la description de travail originale. Dans le cadre de sa coordination du service de psychologie et de santé mentale à l’EBC, il a joué un rôle actif pour assurer la prudence financière du service. Cette fonction est incluse dans la description de travail mise à jour comme [traduction] « le fait de conseiller le gestionnaire du budget sur les achats et les dépenses du service en santé mentale ».

57        Je suis également convaincu que, de 2002 à 2012, le fonctionnaire a assuré la supervision clinique de l’assistant pour l’administration des tests psychologiques puis d’autres employés de l’ISME lorsque cette dernière a été mise en place. La supervision clinique n’est pas une fonction incluse dans sa description de travail originale, ce que l’employeur ne conteste pas. En outre, les organigrammes, la description de travail applicable de l’assistant pour l’administration des tests psychologiques puis les rapports d’évaluation du rendement appuient également l’exigence selon laquelle il effectue la supervision clinique. Cette fonction est incluse dans la description de travail mise à jour ainsi : [traduction] « diriger le personnel subalterne, y compris offrir une formation, et assurer une supervision clinique relativement aux stagiaires, aux employés en santé mentale et aux cliniciens en santé mentale » et [traduction] « la responsabilité professionnelle pour le travail des employés non agréés qui offrent des services en santé mentale sous leur supervision clinique ».

58        Enfin, en ce qui concerne la prétention du fonctionnaire selon laquelle il a effectué le contrôle de la qualité des évaluations du risque des psychologues à contrat, je ne suis pas convaincu qu’il s’agit d’une exigence de son poste. Comparativement aux autres fonctions contestées, le contrôle de la qualité ne figure pas dans ses rapports d’évaluation du rendement. Dans son rôle d’organisation du travail du service de psychologie et de santé mentale à l’EBC et d’établissement des priorités de ce travail, le fonctionnaire semble avoir coordonné le travail du psychologue à contrat et avoir collaboré avec lui pour accomplir le travail du service. Toutefois, rien n’indiquait que l’employeur l’obligeait à examiner la qualité de son travail.

59        Par conséquent, je suis convaincu selon l’ensemble de la preuve que la description de travail du fonctionnaire, au moment où il a présenté son grief, ne lui fournissait pas un exposé complet et à jour de ses fonctions et de ses responsabilités. Sa description de travaillent aurait dû être modifiée afin de tenir compte de ses fonctions et responsabilités en matière de coordination du service de psychologie et de santé mentale à l’EBC, y compris le fait de donner des conseils sur les questions budgétaires et d’assurer la supervision clinique ou la responsabilité professionnelle à l’égard des employés en santé mentale et des cliniciens en santé mentale.

60        En vertu de la clause 34.12 de la convention collective, l’employeur soutient que toute mesure corrective rétroactive devrait être limitée à la période de 25 jours précédant le moment où le fonctionnaire a présenté son grief. La clause prévoit ce qui suit :

34.12 L’auteur du grief peut présenter un grief au premier palier de la procédure de la manière prescrite au paragraphe 34.06, au plus tard le vingt-cinquième (25e) jour qui suit la date à laquelle l’auteur du grief est informé ou devient conscient de l’action ou des circonstances donnant lieu au grief. […]

61        Dans Coallier, la Cour d’appel fédérale devait interpréter une disposition semblable. L’employé avait présenté un grief parce qu’il n’avait pas été payé conformément à l’échelle salariale figurant dans sa convention collective. La Cour a conclu que la réclamation du salaire ne pouvait viser la période précédant la période prescrite pour présenter le grief (20 jours dans cette affaire). Compte tenu de la clause 34.12 de la convention collective et du raisonnement dans Coallier, la modification des fonctions et des responsabilités du fonctionnaire était en vigueur 25 jours avant la présentation de son grief, soit le 27 février 2012.

62        Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

63        Le grief est accueilli.

64        À compter du 27 février 2012, les fonctions suivantes doivent être décrites de façon appropriée et ajoutées à la description de travail du fonctionnaire :

  • Planifier, coordonner et organiser le travail des membres du personnel du service de psychologie et de santé mentale pour qu’ils respectent les exigences de l’établissement en ce qui concerne les services de psychologie.
  • Conseiller le gestionnaire du budget sur les achats et les dépenses du service en santé mentale.
  • Diriger le personnel subalterne, y compris offrir une formation, et assurer une supervision clinique relativement aux stagiaires, aux employés en santé mentale et aux cliniciens en santé mentale.
  • Assumer la responsabilité professionnelle pour le travail des employés non agréés qui offrent des services en santé mentale sous leur supervision clinique.

Le 26 juillet 2017.

Traduction de la CRTESPF

Michael F. McNamara,
une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.