Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a participé à un processus de nomination affiché à l’interne – il a une incapacité et il a demandé qu’on prenne des mesures d’adaptation pour lui permettre de subir un examen pour déterminer ses qualifications – l’intimé a mis en place les mesures d’adaptation recommandées par le professionnel de la santé du plaignant – lorsqu’il a échoué l’examen et a été éliminé du processus, il a allégué que l’intimé avait fait preuve de discrimination à son égard en omettant de faire d’autres efforts pour déterminer ses besoins et de l’accommoder davantage, ce qu’il prétend avoir été un abus de pouvoir – la Commission a conclu que le plaignant avait établi un cas prima facie de discrimination selon lequel l’examen, tel qu’il lui a été administré, le mettait en situation de désavantage compte tenu de son handicap – l’intimé a toutefois réfuté le cas prima facie en démontrant qu’il avait fait un effort raisonnable pour prendre des mesures d’adaptation en prenant les mesures d’adaptation qu’il avait demandées avant l’examen – lorsqu’un employé qui semble bien informé demande des mesures d’adaptation spécifiques, son employeur doit pouvoir se fier à cette demande lorsqu’elle est appuyée par une opinion professionnelle – compte tenu de la demande de mesures d’adaptation spécifiques de la part du plaignant appuyée par un rapport de son professionnel de la santé, l’employeur n’était pas tenu de commander un rapport du Centre de psychologie du personnel de la Commission de la fonction publique pour évaluer ses besoins particuliers en matière de mesures d’adaptation. Plainte rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et Loi sur l’emploi dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  20171228
  • Dossier:  EMP-2016-10169
  • Référence:  2017 CRTESPF 49

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral


ENTRE

JAMES ELLIOTT JONES

plaignant

et

LE SOUS-MINISTRE DE LA DÉFENSE NATIONALE

intimé

et

AUTRES PARTIES

Répertorié
Jones c. Sous-ministre de la Défense nationale


Affaire concernant une plainte d’abus de pouvoir déposée en vertu de l’alinéa 77(1)a) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique


Devant:
Bryan R. Gray, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral
Pour le plaignant:
Louis Bisson, représentant
Pour l'intimé:
Amita Chandra, avocate
Pour a Commission de la fonction publique;:
Lesa Brown, avocate
Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
les 8 et 9 novembre 2017.
(Traduction de la CRTESPF)

MOTIFS DE DÉCISION

Introduction

1        James Elliott Jones (le « plaignant ») a participé à un processus de nomination interne annoncé au ministère de la Défense nationale (l’« intimé ») pour le poste d’analyste principal du renseignement, classifié au groupe et au niveau AS-6. Il a une incapacité et a demandé que des mesures d’adaptation soient prises à son égard lors de l’examen visant à évaluer ses qualifications. L’intimé a accueilli la demande et a mis en place les mesures d’adaptation recommandées par le professionnel de la santé du plaignant.

2        Après avoir reçu la note d’échec relative à l’examen et avoir été éliminé du processus de nomination, le plaignant a allégué que l’intimé avait fait preuve de discrimination à son égard en omettant de faire des efforts supplémentaires dans le but de cerner ses besoins et de lui offrir d’autres mesures d’adaptation. Dans sa plainte, il a affirmé que l’intimé avait par conséquent abusé de son pouvoir.

3        Pour les motifs qui suivent, je conclus qu’en accordant la mesure d’adaptation demandée avant l’examen, l’intimé a  accommodé le plaignant de manière raisonnable. Compte tenu de cette conclusion, j’estime qu’il n’y a ni discrimination ni abus de pouvoir et, par conséquent, je rejette la plainte.

4        La plainte a été présentée à la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique le 3 février 2016. Le 19 juin 2017, la Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et d’autres lois et comportant d’autres mesures (L.C. 2017, ch. 9) a reçu la sanction royale et a modifié le nom de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et le titre de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique par, respectivement, la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission ») et la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (L.C. 2013, ch. 40, art. 365, la « LCRTESPF »).

Faits

5         Le plaignant a plus d’une décennie d’expérience comme militaire en uniforme et comme employé civil travaillant dans le renseignement militaire. Selon toutes les indications, il a eu une carrière réussie dans un environnement de travail très rapide et exigeant où le bien-être des autres dépend de ses efforts.

6        Le plaignant a présenté une demande dans le cadre d’un processus de nomination annoncé pour un poste AS-6 (numéro de processus 14-DND-IA-OTTWA-389838), intitulé Analyste principal du renseignement, Commandement du renseignement des Forces canadiennes. Le processus a pris fin le 13 mars 2015, et le plaignant a été invité à effectuer l’examen écrit afin d’évaluer plusieurs des qualifications essentielles du poste.

7        Le plaignant a été diagnostiqué avec un trouble d’apprentissage spécifique qui nécessite une mesure d’adaptation en milieu de travail. Après avoir été invité à passer l’examen, il a répondu par écrit et a demandé une mesure d’adaptation spécifique pour permettre sa participation. L’intimé a fourni la mesure d’adaptation demandée.

8        Le plaignant a effectué l’examen écrit et a depuis déposé sa plainte en vertu du paragraphe 77(1) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2003, chapitre 12, 13, la « Loi ») alléguant que l’intimé a abusé de son pouvoir dans le cadre de l’évaluation du mérite puisqu’il n’a pas pris de mesures d’adaptation à son égard et que, par conséquent, il a  fait preuve de discrimination à son endroit.

Questions en litige

9        L’intimé a-t-il fait preuve de discrimination envers le plaignant en ne lui fournissant que les mesures d’adaptation relatives à l’examen demandées dans sa lettre, en omettant de demander davantage de renseignements et en omettant de tenir compte d’une demande de mesures d’adaptation en milieu de travail déjà en cours d’examen?

Analyse

10        L’article 77 de la Loi prévoit que tout candidat non retenu de la zone de sélection d’un processus de nomination interne peut présenter une plainte à la Commission pour indiquer qu’il n’a pas été nommé en raison d’un abus de pouvoir. Tel que l’a fait valoir la Commission, la gravité et la nature de toute erreur ou omission, et la mesure dans laquelle une conduite est inappropriée, peuvent déterminer s’il y a eu abus de pouvoir.

11        Le plaignant devait s’acquitter du fardeau de la preuve qui lui incombe en présentant une preuve suffisante à la Commission pour établir que, selon la prépondérance des probabilités, une conclusion d’abus de pouvoir était justifiée (voir Tibbs c. le sous-ministre de la Défense nationale et al., 2006 TDFP 8, aux paragraphes 49, 50, 55, 65 et 66).

12        L’article 80 de la Loi prévoit que, pour déterminer si une plainte est fondée en vertu de l’article 77, la Commission peut interpréter et appliquer la Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R.C., 1985, ch. H-6, la « LCDP »). L’article 7 de la LCDP prévoit que, dans le cadre d’un emploi, il est discriminatoire de faire une distinction défavorable à l’égard d’un employé, pour un motif de distinction illicite. L’article 3 de la LCDP énumère les motifs de distinction illicite, y compris l’invalidité.

13        Afin de démontrer que l’intimé s’est livré à une pratique discriminatoire, le plaignant doit d’abord établir une preuve prima facie de discrimination. Comme l’a affirmée la Cour suprême du Canada dans Commission ontarienne des droits de la personne c. Simpsons-Sears, [1985] 2 RCS 536 : « Dans ce contexte, la preuve suffisante jusqu’à preuve contraire est celle qui porte sur les allégations qui ont été faites et qui, si on leur ajoute foi, est complète et suffisante pour justifier un verdict en faveur de la plaignante, en l’absence de réplique de l’employeur intimé ».

14        Dans des cas comme celui du plaignant, un employeur peut répondre à un cas de discrimination prima facie en démontrant qu’il a offert des mesures d’adaptation raisonnables à l’employé ou que le fait d’accommoder les besoins de l’employé lui causerait une contrainte excessive (paragraphe 15(2) de la LCDP; voir Boivin c. le président de l’Agence des services frontaliers du Canada et al., 2017 CRTEFP 8, au paragraphe 59 (« Boivin CRTEFP »)).

15        Selon le témoignage du plaignant, le 1er juin 2015, il a été invité, par courriel, à participer à un examen écrit. Il a répondu à l’intimé le 2 juin, par courriel, comme suit :

[Traduction]

[…]

Je vous remercie de m’informer que je passe au niveau suivant du processus AS-06. Conformément à vos instructions, je vous écris pour vous informer que j’ai un conflit d’horaire en ce qui concerne l’examen lié au processus 14-DND-IA-OTTWA-389838. Je suivrai un cours de savoir-faire donné par des instructeurs étrangers, du 15 au 18 juin. L’examen AS-06 est prévu le 18 juin, de 9 h à 12 h. Je propose les dates alternatives des 19, 24 ou 25 juin afin de ne pas retarder le processus trop longtemps.

Également, je vous écris pour demander davantage de temps pour effectuer l’examen. Mon objectif est de terminer l’évaluation dans le temps imparti. Cependant, comme indiqué dans mon rapport médical de 2013, j’ai besoin d’un endroit calme et de plus de temps pour lire, organiser et écrire des réponses complètes lors des évaluations. C’est la première fois que je demande une mesure d’adaptation liée à un processus de demande d’emploi. S’il n’y a pas de prolongation de délai normalisée pour les fonctionnaires handicapés, je suggère de 9 h à 14 h comme fenêtre de temps pour terminer l’examen. Cela équivaut à une fois et demie les heures données pour compléter l’examen et fournit le temps pour les pauses santé. Je ne suis pas certain des documents ou de la correspondance dont vous avez besoin pour vérifier mon statut d’invalidité. Si cela est utile, je fais actuellement l’objet de mesures d’adaptation en milieu de travail en vertu d’une entente de niveau de service entre le MDN et Services partagés Canada (SLA-ACT0000006121).

Je m’excuse de compliquer l’étape relative à l’examen de ce processus. Je suis impatient de vous entendre au sujet des autres comparutions que nous pouvons organisées pour que je puisse effectuer l’examen AS-06 et, je l’espère, occuper ce rôle au COMRENSFC.

Jim

16        En quelques minutes, l’intimé a répondu en déclarant ce qui suit : [traduction] « Je communiquerai votre demande au gestionnaire responsable de l’embauche pour qu’il prenne des mesures. Merci… » Le lendemain, soit le 3 juin 2015, l’intimé a de nouveau répondu en demandant une copie de la note du médecin ou de l’ANS (accord sur les niveaux de service) pour la demande de mesure d’adaptation du plaignant.

17        Le plaignant a répondu le jour même et a joint une copie du rapport de la psychologue. Il a ajouté ce qui suit : [traduction] « Voici une copie de l’évaluation qui souligne mon incapacité. En ce qui concerne ma demande, les renseignements précis dont vous avez besoin se trouvent à la dernière phrase de la page 7; le premier paragraphe de la page 8 et l’avant-dernier paragraphe de la page 8, sous Recommandations. »

18        Ces parties du rapport notées dans la dernière citation sont rédigées comme suit.

[Traduction]

[Page 7 :]

[…]

Alors que James est capable de comprendre ce qu’il lit à un niveau élevé, il lui faut plus de temps que la moyenne pour lire du nouveau matériel pour la signification en raison des faiblesses relatives dans les compétences de décodage.

[…]

[Page 8 :]

[…]

Le contenu du travail écrit de James est très sophistiqué et pertinent, mais l’organisation et les aspects mécaniques de l’écriture entravent l’efficacité et la précision. Les mathématiques sont un domaine de force pour James quand on lui donne le temps nécessaire pour effectuer le travail au mieux de ses capacités.

[…]

James a besoin d’un accès aux mesures d’adaptation fournies légalement aux fonctionnaires ayant des difficultés ou des troubles d’apprentissage.

[…]

[Le passage en évidence l’est dans l’original]

19        Je note également les recommandations suivantes  qui figurent dans le rapport, que le plaignant a choisi de ne pas souligner dans son courriel à l’intimé :

[Page 8 :]

[…]

La technologie d’assistance serait particulièrement utile pour aider James avec une efficacité accrue sur le lieu de travail. James a besoin d’un accès régulier à un consultant en technologie d’assistance qui peut l’aider à choisir les logiciels spécifiques qui compenseront son trouble d’apprentissage et luiapprendre à utiliser efficacement les solutions technologiques sur le lieu de travail.

[Page 9 :]

[…]

Pour la lecture, James exige l’utilisation d’un programme de synthèse vocale[…] afin qu’il puisse numériser et écouter du matériel de lecture lié au travail.

Pour écrire, James a besoin d’un programme de reconnaissance automatique de la parole[…] pour verbaliser des idées qui seront transcrites. Il a également besoin d’un logiciel de prédiction de mots […] qui aidera à minimiser les fautes d’orthographe et un programme d’organisation graphique […] qui l’aidera à organiser des idées par écrit de manière concise.

[…]

20        Le plaignant a envoyé un courriel à l’intimé le 9 juin 2015, pour lui demander ce qui suit :

[Traduction]

[…] pouvez-vous confirmer que vous avez reçu mon entente de confidentialité par télécopieur? Je l’ai envoyé la semaine dernière et l’imprimé du télécopieur indiquait « OK ». Compte tenu de mes demandes et de tous les efforts pris pour y répondre, je ne voudrais pas que l’absence d’une entente m’empêche d’effectuer l’examen.

Je vous remercie beaucoup!

Jim

21        L’intimé a confirmé quelques minutes plus tard qu’il avait reçu l’entente.

22        Puis, le 12 juin, le plaignant a envoyé un autre courriel à l’intimé, indiquant ce qui suit :

[Traduction]

Je sais que la demande d’adaptation prend du temps, mais je me demandais si vous aviez une idée du moment où je pourrai faire l’examen? Des personnes en autorité, ici, m’ont dit qu’il aurait lieu le 18, comme prévu. Cependant, j’ai également entendu que la trousse de prélecture avait été remise et je n’ai pas reçu ce courriel. Devrais-je me préparer à faire cet examen le 18? SI oui, est-ce qu’une personne peut m’envoyer le matériel de lecture aujourd’hui? Je serai en formation la semaine prochaine et je ne pourrai vérifier mes courriels ou ma boîte vocale une fois par jour seulement.

[…]

23        L’intimé a répondu l’après-midi même et a dit au plaignant que : « Nous examinons toujours les exigences dont nous aurons besoin pour vos mesures d’adaptation. Nous vous fournirons les mises à jour dès que nous les aurons […] ».

24        Par l’intermédiaire d’un membre des ressources humaines, Thavone Bounsouk, l’intimé a répondu le 17 juin et a souligné ce qui suit au plaignant :

Veuillez noter que je dois valider auprès de la psychologue (qui a fourni l’évaluation) le temps requis à vous accorder pour l’examen dans le cadre de la mesure d’adaptation.

Veuillez me le faire savoir.

Si vous avez des questions, n’hésitez pas à communiquer avec moi.

25        Le plaignant a répondu rapidement et a fourni l’autorisation nécessaire pour que l’intimé pose des questions à sa psychologue.

26        Le 22 juin 2015, l’intimé a envoyé au plaignant, par courriel, une invitation à l’examen. Entre autres choses, il a déclaré ce qui suit : [traduction] « À la suite de votre demande de mesures d’adaptation, vous avez reçu 2 heures de plus pour l’examen […]. Vous aurez un maximum de cinq (5) heures pour terminer l’examen. » L’invitation précisait en outre ce qui suit : [traduction] « Si vous avez des problèmes de santé ou physiques qui peuvent nuire à votre performance durant toute étape du processus de sélection, ou si vous avez d’autres besoins spéciaux, veuillez nous en informer à l’avance afin que nous puissions prendre les dispositions appropriées. »

27        Plus tard le même jour, le plaignant a répondu à l’intimé et lui a confirmé qu’il avait réservé un espace au travail afin de passer l’examen le 2 juillet, de 9 h à 14 h. Plus tard cet après-midi, après s’être renseigné quant aux documents pour la préparation à l’examen et avoir été informé qu’il les recevrait une semaine avant l’examen, il a de nouveau répondu à l’intimé, comme suit : [traduction] « Super! Merci. J’ai hâte au 25. À bientôt […] ».

28        En plus de la correspondance par courriel mentionnée précédemment, le plaignant a fait valoir que pendant qu’il attendait une réponse à sa demande de mesures d’adaptation, il a demandé à son commandant, le commandant Michael Barefoot, s’il savait si la demande de mesure d’adaptation et une date ultérieure pour la participation à l’examen seraient accordées. Le plaignant a témoigné que le Commandant Barefoot lui avait assuré de ne pas s’inquiéter et que ses mesures d’adaptation seraient accordées.

29        Le plaignant a également témoigné avoir reçu un appel de Mme Bounsouk, qui l’a informé qu’un rapport du Centre de psychologie du personnel ne serait pas commandé aux fins d’évaluation de ses besoins particuliers en matière de mesures d’adaptation.

30        Robert McScheffrey, directeur général du Centre de psychologie du personnel (CPP) à la Commission de la fonction publique (CFP), a témoigné à l’audience. Il a souligné que le CPP est un centre d’excellence en outils d’évaluation et qu’il est disponible pour les clients du ministère, comme l’intimé, qui voudraient faire évaluer les besoins d’adaptation pour s’assurer qu’un examen administré par le ministère soit exempt d’obstacles.

31        M. McSheffrey a fait valoir que lorsqu’un examen est délivré par le ministère plutôt que par la CFP, une évaluation de l’accommodement est effectuée seulement lorsque le ministère responsable de l’examen en fait la demande. Il a également souligné qu’un ministère n’est pas tenu de communiquer avec le CPP pour obtenir un avis ou un rapport lorsqu’il envisage de prendre des mesures d’adaptation pour l’administration de son propre examen. Il a également expliqué que si un examen ministériel est donné, alors le ministère est dans la meilleure position pour déterminer les mesures d’adaptation puisqu’il connaît le mieux son propre examen.

32        M. McSheffrey a également souligné que chaque demande de mesures d’adaptation et toute évaluation CPP connexe sont traitées comme uniques, puisque chaque examen peut être administré différemment et pourrait éventuellement être appliqué à différents ensembles de qualifications essentielles, même s’il s’agit d’une nomination pour la même position qu’un autre examen. Peut-être plus important encore, il a également déclaré que les besoins d’adaptation d’une personne peuvent changer au fil du temps et que l’employeur ne devrait pas faire d’hypothèses quant à la santé ou aux besoins de mesures d’adaptation d’une personne.

33        Le commandant Barefoot était le chef du Commandement du renseignement et le président du jury de sélection pour la nomination en question. Il a témoigné que, lorsqu’il a pris connaissance de la demande de mesures d’adaptation du plaignant, il a demandé à Mme Bounsouk de communiquer avec la psychologue qui a rédigé le rapport fourni par le plaignant pour obtenir son avis. Il a dit qu’il voulait que l’examen soit équitable pour le plaignant.

34        Le commandant Barefoot a fait valoir que Mme Bounsouk lui a dit que la psychologue du plaignant avait recommandé que le plaignant puisse bénéficier de 50 % de temps additionnels (1,5 heure) afin de répondre aux besoins spéciaux de ce dernier. Cependant, le commandant a décidé d’accorder au plaignant les deux heures supplémentaires demandées puisque, comme l’a mentionné le commandant, il voulait faire preuve de prudence pour répondre aux besoins du plaignant sans lui donner un avantage injuste par rapport aux autres personnes qui voulaient également être nommées.

35        À la question de savoir si le plaignant lui avait fait part de ses préoccupations ou de son mécontentement au sujet de la décision d’accorder la mesure d’adaptation, le commandant a déclaré qu’il n’avait rien entendu au sujet d’un quelconque problème ou préoccupation de la part du plaignant. Il a également déclaré qu’en accordant les mesures d’adaptation, il espérait que le plaignant serait satisfait et qu’il pourrait faire l’examen sans problème.

36        Mme Bounsouk a été appelée à témoigner. Elle a raconté sa conversation avec Jamie Brooks, la psychologue, qu’elle a appelée pour s’informer au sujet du rapport que cette dernière a rédigé à l’appui des demandes de mesures d’adaptation du plaignant (sur son lieu de travail et lors de l’examen). Mme Bounsouk a mentionné qu’elle avait demandé combien de temps devrait être accordé au plaignant pour effectuer l’examen. Mme Brooks a répondu que 50 % plus de temps devrait être accordé au plaignant. Selon Mme Bounsouk, Mme Brooks n’a pas demandé plus d’information ou quoi que ce soit d’autre pendant l’appel.

37        Mme Bounsouk s’est rappelé avoir reçu le courriel du plaignant daté du 25 juin 2015, dans lequel il a déclaré ce qui suit : [traduction] « Super! Merci. J’ai hâte au 25. [le jour où il devait recevoir le matériel de préparation pour l’examen] À bientôt […] ». Elle a ajouté qu’après avoir reçu l’invitation détaillée du 22 juin 2015 aux fins de l’examen, le plaignant n’a mentionné aucune préoccupation ou mesure d’adaptation supplémentaire préalable à l’examen.

38        Les témoins ont été interrogés et contre interrogés relativement aux réponses à l’examen du plaignant. Il a manqué de temps et n’a pas terminé une question. Il a écrit dans son carnet d’examen que la réponse précédente était suffisamment détaillée pour être également acceptée comme réponse complète à la question à laquelle il n’avait pas répondu. Au moment de noter l’examen, il a reçu une note d’échec pour la question sans réponse et une autre question. Il a été éliminé du processus de nomination.

39        Le Commandant Barefoot a fourni une justification convaincante et logique quant à la façon dont l’examen du plaignant a été noté, et je n’aborderai pas plus en détail la question de la correction de l’examen. Il est bien établi dans la jurisprudence de la Commission que son rôle n’est pas de réévaluer les notes d’examen pour déterminer s’il y a abus de pouvoir (voir Marcil c. le sous-ministre des Transports, de l’Infrastructure et des Collectivités, 2011 TDFP 31, au paragraphe 17). De plus, la note de l’examen n’est pas pertinente à l’affaire dont je suis saisi, qui consiste à déterminer si des mesures d’adaptation appropriées ont été mises en place à l’égard du plaignant dans ses efforts pour faire l’examen.

40        Le commandant Barefoot a également été interrogé au sujet d’une demande d’indemnité de subsistance et de mesures d’adaptation en milieu de travail que le plaignant avait déjà présenté. Il a confirmé qu’il était au courant qu’au moment du processus de nomination, une demande d’adaptation était envisagée pour fournir au plaignant un logiciel de technologie d’assistance à la lecture et l’écriture qu’il pourrait utiliser sur le lieu de travail. Il savait que cette demande d’adaptation était dans le système, mais qu’elle n’avait pas encore été approuvée.

41        Le commandant Barefoot a souligné que le commandement du renseignement militaire est un bureau hautement sécurisé où tous les systèmes de TI doivent fonctionner sous très haute sécurité afin de protéger l’information de nature très délicate. Il a expliqué que le logiciel demandé pour répondre aux besoins de mesure d’adaptation du plaignant au travail faisait l’objet d’un examen très approfondi afin de déterminer s’il était sécuritaire de l’installer sur le lieu de travail sans compromettre l’intégrité de l’environnement de travail extrêmement sécurisé. Le commandant Barefoot a souligné qu’aucun des logiciels demandés par le plaignant n’avait encore été installé sur le lieu de travail au moment de l’examen.

42        Lors du contre-interrogatoire sur la technologie d’assistance, le commandant a été interrogé à savoir s’il y avait un ordinateur sécurisé, qui n’était pas relié au réseau très sécurisé du commandement du renseignement militaire, que le plaignant aurait pu utiliser pour sa technologie d’assistance afin de répondre à ses besoins pour l’examen. Le commandant a répondu qu’il était possible qu’il y en ait eu un sur le lieu de travail, mais il a ajouté que, le cas échéant, l’ordinateur ne serait alors pas installé dans un endroit calme et privé tel que requis pour les besoins d’adaptation du plaignant. Le commandant Barefoot a également souligné en contre-interrogatoire qu’il avait compris que le coût d’un renvoi du CPP, pour le ministère, relativement à un rapport sur les mesures d’adaptation recommandées pour un examen était de 600 $.

43        À la fin de son témoignage, le Commandant Barefoot a réitéré qu’il voulait s’assurer que le processus de nomination se déroulait d’une manière tout à fait équitable et transparente pour tous les candidats et que les mesures d’adaptation demandées par le plaignant étaient fournies pour assurer sa participation équitable au processus.

44        Après avoir passé l’examen, le plaignant a écrit à l’intimé le 3 juillet 2015, en indiquant ce qui suit :

[Traduction]

L’examen est terminé! Merci pour votre aide sur ce projet. Comme je l’ai déjà mentionné, puis-je avoir une copie de l’évaluation de la psychologue relative à 14-DND-IA-OTTWA-389838, qui recommandait ou autorisait le temps additionnel que j’avais pour l’examen? Comme je postule à d’autres compétitions […] je devrai appuyer toute future demande de mesures d’adaptation. Ce rapport sera une bonne référence pour les autres et une bonne prise de conscience pour moi relativement à ce à quoi je dois m’attendre à l’avenir.

Merci beaucoup […]

45        Le 20 août 2015, plusieurs semaines après avoir fait l’examen et après avoir appris qu’il l’avait échoué, le plaignant a correspondu par courriel avec Mme Brooks. Dans son courriel en réponse ce même jour, elle a mentionné ce qui suit :

[Traduction]

[…] Je suis désolée d’entendre que le processus d’examen a été aussi stressant. La femme à qui j’ai parlé avait très peu d’informations et manifestement aucune compréhension ou expérience des différences d’apprentissage. La conversation a été brève puisqu’elle m’a seulement demandé combien de temps de plus vous donner et j’ai suggéré le maximum absolu. Aucune autre question n’a été abordée ou discutée. C’était bref. J’espère que cela vous aide.

46        Son courriel a été présenté à titre de preuve par le plaignant. Les avocates de la CFP et de l’intimé se sont opposées à ce que je l’accepte. L’avocate a soutenu à l’appui de son objection que le courriel n’était pas pertinent puisqu’il découlait de conversations qui avaient eu lieu des semaines après l’administration de l’examen et qu’il n’était pas fiable puisque son auteure n’était pas présente à l’audience pour être contre-interrogée.

47        J’ai accepté d’admettre le courriel comme élément de preuve, mais j’ai réservé ma décision sur le poids que je lui accorderais. En dernière analyse, je n’y attache aucune valeur probante.

48        Le courriel est préjudiciable au cas de l’intimé, puisqu’il laisse entendre que la conversation était brève et qu’il présente une image négative de la représentante de l’intimé en suggérant qu’elle ne comprenait pas les différences d’apprentissage. Cependant, les déclarations du courriel concernant la recommandation du délai maximal absolu contredisent clairement le témoignage des témoins à l’audience. Le plaignant a présenté le courriel de Mme Brooks à titre de preuve par ouï-dire sans l’appeler à témoigner et la contre-interroger à ce sujet. Rien n’indique qu’elle n’était pas disponible pour témoigner. Bien que la Commission puisse accepter des éléments de preuve, qu’ils soient admissibles ou non en justice (alinéa 20e) de la LCRTESPF), en l’absence de son témoignage, qui m’aurait permis d’évaluer plus précisément sa crédibilité et de faire des constatations de fait en ce qui concerne les détails des questions dans le courriel, j’estime que l’on ne devrait pas donner de poids au courriel.

49        Le plaignant a également présenté comme pièce une étude de ses besoins en mesures d’adaptation que l’intimé a commandée plusieurs mois après avoir passé l’examen. Après avoir abordé la question de son examen et de ce qu’il considérait par la suite comme un manque de mesures d’adaptation appropriées, le plaignant a persuadé ses cadres supérieurs de demander un rapport rétrospectif du CPP à [traduction] « Évaluation des mesures d’adaptation du candidat ».

50        Le rapport du CPP a été rendu disponible environ 10 mois après la tenue de l’examen. Entre autres choses, il recommande ce qui suit :

  • que l’examen soit divisé en deux parties et administré en deux séances, à raison d’une séance par jour sur deux jours;
  • qu’un temps additionnel de 50 % soit accordé, plus 30 minutes supplémentaires pour les pauses, totalisant cinq heures de temps d’écriture réparties sur deux jours;
  • que le candidat soit autorisé à utiliser des technologies d’assistance sur son ordinateur personnel ou de travail pour ses tâches de lecture et d’écriture;
  • que, pendant l’examen, le candidat ait accès à une personne qui peut fournir des instructions ou des précisions verbalement.

51        Une fois de plus, la CFP et l’avocate de la défenderesse se sont opposées à ce que j’accepte ce rapport comme élément de preuve. Elles ont fait valoir qu’il n’était pas pertinent, car il a été rédigé environ 10 mois après l’administration de l’examen. J’ai accepté le document à titre de preuve, mais j’ai réservé ma décision quant au poids que j’y accorderais, le cas échéant. Étant donné que le document a été rédigé des mois après l’examen, je ne lui attribue aucune valeur probante. Cette information n’était pas disponible lorsque le plaignant et son experte ont été consultés par l’intimé pour déterminer les mesures d’adaptation dont il avait besoin pour faire l’examen.

52        En contre-interrogatoire, le plaignant a déclaré qu’il avait supposé que les technologies adaptatives qui avaient été énumérées dans sa demande d’adaptation en milieu de travail seraient en place avant le début du processus de nomination. Il a ajouté qu’il s’attendait à ce qu’un dialogue sur les mesures d’adaptation en milieu de travail ait lieu, en lien avec sa candidature au processus de nomination.

53        Dans ses conclusions finales, l’avocat du plaignant a déclaré que l’employeur n’en avait pas assez fait pour évaluer les besoins du plaignant afin de pouvoir répondre pleinement et efficacement à ses besoins d’adaptation. Il a souligné que le courriel du plaignant visant une mesure d’adaptation pour l’examen indiquait qu’il s’agissait de la première fois qu’il demandait une mesure liée à un processus de demande d’emploi. On a également noté que l’intimé n’avait pas divulgué les détails de l’examen à la psychologue; il n’a pas non plus posé de questions sur d’autres affaires qui auraient pu nécessiter une mesure d’adaptation.

54        Le plaignant s’appuie sur la LCDP ainsi que sur les politiques de la CFP pour évaluer les personnes handicapées afin de s’assurer qu’elles bénéficient d’un accès égal et sans obstacle aux évaluations des occasions d’emploi. Le devoir des administrateurs généraux d’éliminer les obstacles systémiques et de fournir des mesures d’adaptation a été mentionné, de même que le fait que les employés devaient être consultés pour déterminer la nature des mesures d’adaptation dont ils ont besoin.

55        Le plaignant m’a renvoyé à une décision de la Commission (Song c. Sous-ministre de la Défense nationale, 2016 CRTEFP 73, aux paragraphes 23 et 25) dans laquelle il a été conclu qu’il y avait eu abus de pouvoir lorsqu’une candidate est devenue visiblement malade pendant une évaluation et qu’elle a, après une brève pause, repris l’examen, bien que l’employeur ait pensé appeler une ambulance en raison du malaise de la candidate. Les parties dans cette affaire contestaient la quantité d’information fournie par la plaignante à l’employeur au sujet de sa maladie. La Commission a conclu que l’employeur aurait dû demander des renseignements supplémentaires et qu’une réflexion approfondie et une discussion poussée concernant les mesures appropriées auraient été nécessaires. J’estime que les faits en l’espèce sont complètement différents et qu’il ne s’agit donc pas d’une jurisprudence utile. Aucun incident semblable à celui de Song n’a eu lieu pendant ou avant l’examen, qui aurait pu signaler à l’intimé la nécessité d’obtenir des renseignements supplémentaires ou des mesures à prendre.

56        Le plaignant s’appuie également sur une décision du prédécesseur de la Commission, le Tribunal de la dotation de la fonction publique, dans Rajotte c. le président de l’Agence des services frontaliers du Canada et al., 2009 TDFP 25, aux paragraphes 128, 131 et 166. Dans cette affaire, au moyen du contre-interrogatoire de ses gestionnaires, la candidate a été capable de présenter des éléments de preuves voulant qu’ils aient présumé qu’elle ne serait pas capable de travailler des heures supplémentaires de manière régulière en raison de ses responsabilités parentales bien connues et que cela ait pu avoir eu un effet sur la décision de procéder avec un processus de nomination non annoncé qui l’excluait. La Commission a jugé que, ce faisant, elle avait présenté une preuve prima facie de discrimination, que l’intimé n’a pas réfuté. Le Tribunal a conclu que la plaignante aurait dû bénéficier d’une évaluation individualisée de ses besoins afin de ne pas être privée de ses possibilités d’avancement par la présomption de l’intimé quant à sa disponibilité à travailler selon des horaires flexibles en raison de ses obligations familiales.

57        Ici encore, j’estime que les faits dans Rajotte se distinguent de ceux en l’espèce et que, par conséquent, cette décision n’est pas utile. Contrairement à la situation dans Rajotte, aucune présomption n’a été faite. Le plaignant devant moi a demandé une mesure d’adaptation précise soutenue par un rapport professionnel consignant ses besoins. Son employeur a accepté sa demande et il n’a fait part d’aucune préoccupation que ce soit.

58        Tout en ne faisant aucune observation sur le fond de l’affaire, la CFP a présenté des observations écrites, fondées sur la politique de la CFP selon laquelle il est attendu des personnes demandant une mesure d’adaptation qu’elles informent leur employeur de leurs besoins.

59        L’intimé a renvoyé à la décision de la Cour suprême du Canada dans Central Okanagan School District No. 23 c. Renaud, [1992] 2 RCS 970, à la page 994, où il est conclu qu’un demandeur en matière de droits de la personne avait l’obligation d’être un participant actif et qu’il avait l’obligation d’évaluer le processus pour trouver une mesure d’adaptation appropriée. La Cour s’est prononcée comme suit :

Pour faciliter la recherche d’un compromis, le plaignant doit lui aussi faire sa part. À la recherche d’un compromis raisonnable s’ajoute l’obligation de faciliter la recherche d’un tel compromis. Ainsi, pour déterminer si l’obligation d’accommodement a été remplie, il faut examiner la conduite du plaignant.

60        La Commission a examiné Renaud, dans le contexte d’une plainte présentée en vertu du paragraphe 77(1) de la Loi, ou il est question d’allégations de discrimination et d’omission de prendre des mesures d’adaptation dans Boivin c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada, 2010 TDFP 6, aux paragraphes 133 et 134 (« Boivin TDFP »). Dans cette décision, la commissaire Beattie s’est prononcée comme suit :

133Le processus d’accommodement exige donc un effort de communication et un engagement des deux parties. Les critères qui permettent d’établir que toutes les parties ont rempli leurs obligations dans un tel processus ne sont pas figés et ne peuvent pas être catégorisés de façon définitive. En effet, il faut parfois adapter la façon dont les mesures sont prises, et il faut également que l’intimé et l’employé participent tous deux au dialogue et soient prêts à collaborer. Les résultats de l’accommodement ne sont pas toujours parfaits, en particulier s’il est clair que la partie qui doit donner suite à la demande ne connaît pas l’existence du problème.

134 Les parties sont tenues d’agir de façon raisonnable et de collaborer en vue de trouver des solutions aux demandes d’accommodement. Il y a une faille dans le processus d’accommodement, il faut alors déterminer qui en est responsable. L’issue de la plainte dépendra de la réponse à cette question. En l’espèce, le Tribunal doit donc déterminer comment la faille s’est produite dans le processus, et à quel moment.

61        En appliquant les faits à la jurisprudence pertinente, je conclus que le plaignant a établi une preuve prima facie de discrimination. Il a un trouble d’apprentissage qui a été diagnostiqué et signalé à son employeur. Selon sa preuve, si on lui accorde crédibilité, l’examen tel qu’il lui a été administré l’a désavantagé en raison de son incapacité et l’a empêché de profiter d’une occasion équitable de démontrer qu’il était qualifié pour le poste. Cet obstacle a fait en sorte qu’il a été défavorisé dans le cadre de son emploi, ce qui équivaut à une preuve prima facie de discrimination.

62        Pour réfuter la preuve prima facie, l’intimé doit démontrer qu’il a raisonnablement accommodé le plaignant et, dans le cas contraire, que la mesure d’adaptation nécessaire constituait une contrainte excessive.

63        Comme l’a déclaré la Cour suprême du Canada dans Renaud et comme l’a indiqué la commission dans Boivin TDFP, le plaignant avait une obligation de participer et d’aider son employeur dans ses efforts pour déterminer ses besoins en matière de mesures d’adaptation. Les faits démontrent clairement qu’il a demandé un lieu tranquille et davantage de temps pour faire l’examen. L’intimé l’a confirmé auprès de la psychologue du plaignant et a accepté les deux mesures d’adaptation demandées.

64        Aucune preuve n’a été présentée à l’audience indiquant que la psychologue avait exprimé, avant l’examen, toute préoccupation à l’intimé ou au plaignant au sujet de la nécessité de prendre des mesures d’adaptation supplémentaires, au-delà de ce que l’intimé avait compris des besoins du plaignant.

65        Lorsqu’un employé apparemment bien informé formule une demande de mesures d’adaptations précise, son employeur devrait pouvoir se fier à cette demande lorsqu’elle est soutenue par un avis professionnel qui est confirmé avant la mise en œuvre de la mesure d’adaptation.

66        S’attendre à plus d’un employeur imposerait un fardeau déraisonnable aux employeurs qui n’ont pas de renseignements précis sur les besoins d’un employé. Des renseignements aussi précis doivent être fournis par l’employé ou son aidant professionnel.

67        Le plaignant avait déjà demandé une mesure d’adaptation en milieu de travail en ce qui concerne des technologies d’assistance. Il a bien plus tard indiqué que ces technologies auraient dû être mises à sa disposition dans le cadre de l’examen, mais il n’a présenté aucune demande à cet égard et n’a soulevé aucune préoccupation dans le cadre de son examen. Durant son témoignage, il a souligné qu’il présumait que ces technologies seraient disponibles au moment de son examen. Cependant, il n’a pas fait part de cette présomption à son employeur. Même lorsqu’il a commencé l’examen, il n’a exprimé aucune préoccupation quant à la nécessité de prendre des mesures d’adaptation supplémentaires au moyen de ces technologies. L’invitation à l’examen indiquait explicitement qu’il devait informer l’intimé s’il avait : [traduction] « d’autres besoins d’adaptation spéciaux ». Aucune demande de ce genre n’a été présentée.

68        Je conclus également que l’intimé n’a pas omis de prendre de mesures d’adaptation appropriées en décidant de ne pas renvoyer la demande de mesure d’adaptation au CPP pour obtenir un rapport. L’employeur n’a pas cette obligation et, compte tenu des circonstances en l’espèce, soit que le plaignant lui a présenté une demande de mesure d’adaptation précise soutenue par un rapport professionnel, je conclus qu’il a agi raisonnablement lorsqu’il a choisi de ne pas demander de rapport du CPP.

69        Compte tenu de ces constatations de fait et de mon analyse, je conclus qu’il n’y a pas eu discrimination, que les droits de la personne du plaignant n’ont pas été violés et qu’il n’y a pas eu abus de pouvoir.

70        Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

71        La plainte est rejetée.

Le 28 décembre 2017.

Traduction de la CRTESPF

Bryan R. Gray,

une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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