Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

L’intimé a fait une nomination indéterminée non annoncée à un poste classifié au groupe et au niveau EX 02 – la personne nommée occupait le poste de façon intérimaire avant sa nomination – le plaignant a déposé une plainte alléguant que l’intimé avait abusé de son pouvoir dans le choix du processus et dans l’application du critère de mérite – la Commission a conclu que la décision de choisir un processus non annoncé n’était pas déraisonnable – elle a été bien justifiée et documentée – le titulaire précédent avait quitté le poste et celui-ci devait être pourvu rapidement – l’intimé a décidé de choisir quelqu’un à partir d’un bassin de candidats qualifiés découlant d’un récent processus annoncé – la personne nommée a été évaluée par rapport à l’énoncé des critères de mérite pour le poste et elle a été jugée qualifiée – sa nomination prenait également compte de la représentation aux termes de l’équité en matière d’emploi aux plus hauts niveaux de la haute direction régionale – le plaignant n’a pas établi que l’intimé a choisi des méthodes inappropriées pour évaluer la personne nommée ou qu’il y a eu abus de pouvoir dans l’évaluation de ses qualifications – la relation de la personne nommée avec le gestionnaire responsable de l’embauche était strictement professionnelle et rien dans la preuve n’indiquait que la nomination était entachée de favoritisme personnel – la Commission a conclu que l’intimé avait induit le plaignant en erreur en omettant de l’aviser en temps opportun qu’un répertoire EX-02 pour lequel il avait été jugé qualifié avait expiré – par conséquent, il n’a pas posé sa candidature au processus qui a mené à la création du répertoire à partir duquel la personne nommée a été sélectionnée – on lui a aussi demandé de se retirer d’un programme de perfectionnement en leadership sans tenir compte de l’impact qu’aurait cette décision sur sa disponibilité pour des nominations futures – cependant, ces questions sont distinctes de la décision de dotation de nommer la personne nommée dans le cadre du processus en litige dans cette plainte – il n’y a aucune preuve que ces questions ont eu un impact.

Plainte rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral et Loi sur l’emploi dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  20180208
  • Dossier:  EMP-2015-9800
  • Référence:  2018 CRTESPF 12

Devant une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral


ENTRE

GHALIB DHALLA

plaignant

et

COMMISSAIRE DU SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA

intimé

et

AUTRES PARTIES

Répertorié
Dhalla c. Commissaire du Service correctionnel du Canada


Affaire concernant une plainte d’abus de pouvoir aux termes des alinéas 77(1)a) et b) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique


Devant:
Nathalie Daigle, une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral
Pour le plaignant :
Daniel Sorensen
Pour l’intimé :
Andréanne Laurin
Pour la Commission de la fonction publique :
Claude Zaor (arguments écrits)
Affaire entendue à Abbotsford (Colombie-Britannique),
les 29 et 30 août 2017.
(Traduction de la CRTESPF)

MOTIFS DE DÉCISION

I. Introduction

1        Ghalib Dhalla, le plaignant, a déposé une plainte d’abus de pouvoir relativement à la nomination de Cari Turi au poste de sous-commissaire adjoint, Services intégrés (SCASI), de classification EX-02 (le « poste de SCASI »), au Service correctionnel du Canada (SCC) à Abbotsford, en Colombie-Britannique.

2        Le plaignant allègue que le commissaire du SCC (l’« intimé ») a abusé de son pouvoir en choisissant un processus non annoncé et dans l’application du mérite pour la nomination. Il affirme qu’il y a eu favoritisme envers Mme Turi et que l’intimé l’a induit en erreur avant de procéder à la nomination, ce qui a fait qu’il n’a pas été considéré pour le poste.

3        En outre, le plaignant avait originalement allégué qu’il n’avait pas été nommé en raison de sa race et que, par conséquent, il y avait eu discrimination. Il a cependant retiré cette allégation lors de l’audience.

4        L’intimé nie qu’il y a eu abus de pouvoir. Il affirme que le choix d’un processus non annoncé était conforme aux valeurs de base en dotation, y compris le mérite, et que la personne nommée avait fait l’objet d’une évaluation complète et qu’il avait été déterminé qu’elle satisfaisait aux qualifications du poste. Il maintient aussi qu’il n’y a pas eu de favoritisme et que le plaignant n’a pas été induit en erreur.

5        La Commission de la fonction publique (CFP) n’a pas comparu à l’audience, mais a présenté des arguments écrits dans lesquels elle a traité des politiques et lignes directrices pertinentes. Elle ne s’est pas prononcée sur le bien-fondé de la plainte.

6        Pour les motifs qui suivent, la plainte est rejetée. Le plaignant n’a pas démontré que l’intimé avait abusé de son pouvoir dans le cadre du processus de nomination en cause. Cependant, je note qu’il a démontré que l’intimé l’avait induit en erreur en omettant de l’aviser en temps opportun qu’un répertoire EX-02 pour lequel il avait été jugé qualifié avait expiré. Par conséquent, il n’a pas présenté de demande dans le cadre d’un processus EX-02 subséquent qui lui aurait permis d’être nommé à ce poste ou à un poste semblable. On lui a aussi demandé de se retirer d’un programme de perfectionnement en leadership sans tenir compte de l’impact qu’aurait cette décision sur sa disponibilité pour nomination à un poste EX-01 à l’avenir. Cependant, ces questions sont distinctes de la décision de nommer Mme Turi.

II. Contexte

7        L’intimé a lancé un processus de nomination interne non annoncé dans le but de doter le poste de SCASI dans la région du Pacifique du SCC lorsqu’il est devenu vacant en novembre 2014.

8        Une « notification de candidature retenue » a été publiée le 8 janvier 2015, indiquant que la candidature de Mme Turi était retenue pour le poste de SCASI.

9        Un deuxième avis a été affiché le 29 mai 2015 pour annoncer la nomination indéterminée de Mme Turi.

10        Le 15 juin 2015, le plaignant a déposé une plainte d’abus de pouvoir auprès de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique en vertu de l’article 77 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (L.C. 2003, ch. 22, articles 12 et 13; LEFP).

11        Le 19 juin 2017, la Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et d’autres lois et comportant d’autres mesures (L.C. 2017, ch. 9) a reçu la sanction royale et a modifié le nom de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique et le titre de la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans la fonction publique pour qu’ils deviennent respectivement la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la « Commission ») et la Loi sur la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral.

III. Questions en litige

12        Je dois trancher les questions suivantes :

  1. Y a-t-il eu abus de pouvoir dans le choix d’un processus non annoncé?
  2. Y a-t-il eu abus de pouvoir dans l’évaluation de Mme Turi?
  3. Y a-t-il eu abus de pouvoir pour motif de favoritisme personnel?
  4. Y a-t-il eu abus de pouvoir parce que l’intimé a induit le plaignant en erreur?

IV. Discussion

13        Le paragraphe 77(1) de la LEFP prévoit qu’une personne dans la zone de recours peut formuler une plainte auprès de la Commission selon laquelle il ou elle n’a pas été nommé ou fait l’objet d’une proposition de nomination en raison d’un abus de pouvoir. La LEFP ne prévoit aucune définition de l’expression « abus de pouvoir », mais elle indique ce qui suit au paragraphe 2(4) : « Il est entendu que, pour l’application de la présente loi, on entend notamment par abus de pouvoir la mauvaise foi et le favoritisme personnel. »

14        Lorsqu’il s’agit d’une plainte d’abus de pouvoir, le fardeau de la preuve repose sur le plaignant. Voir Tibbs c. Sous-ministre de la Défense nationale, 2006 TDFP 8, aux paragraphes 48 à 55.

A. Y a-t-il eu abus de pouvoir dans le choix d’un processus non annoncé?

15        Le plaignant a témoigné en son propre nom à l’audience. Il est employé du SCC depuis 1984. Depuis 2009, il est classifié au groupe et au niveau AS-07 et son titre est celui de gestionnaire régional, Planification de politique, pharmacie et amélioration de la qualité, région du Pacifique. Il a expliqué qu’il a gagné plusieurs prix et il a été reconnu à plusieurs reprises au fil des ans pour ses contributions au SCC. Il est aussi membre d’une minorité visible. Il a témoigné qu’il est né en Tanzanie et qu’il est d’origine sud-asiatique. Ses ancêtres sont venus ici d’Inde avant sa naissance.

16        En 2011, le plaignant a participé au programme Leadership pour les cadres de direction. Cela lui a permis de conserver son poste d’attache et d’accepter des affectations au groupe EX.

17        En avril 2012, le plaignant a été inscrit à un répertoire de candidats qualifiés pour de nombreux postes EX-02.

18        Lorsque le directeur régional, Services de santé, a pris sa retraite en 2012, le plaignant a été nommé au poste de directeur régional intérimaire, Services de santé, au groupe et au niveau EX-02, de septembre 2012 à mars 2014.

19        Le plaignant s’est informé, à l’été 2012, s’il pouvait être nommé en permanence à son poste intérimaire, puisque le titulaire prenait sa retraite. On l’a cependant avisé que comme une période intense de réaménagement des effectifs était en cours, d’autres personnes de classification EX avaient priorité sur lui. Il a témoigné qu’on lui avait toutefois dit que ce n’était qu’une question de temps avant qu’il soit nommé à un poste EX-02.

20        De mars à décembre 2014, le plaignant a été invité à assumer de façon intérimaire le poste de directeur général de la santé, un autre poste EX-02, à Ottawa, en Ontario. Il a reçu une indemnité de subsistance, car il était en déplacement deux semaines par mois pour la durée de cette affectation intérimaire. Il a expliqué que comme il avait de bons antécédents de rendement, cet arrangement pouvait être justifié. Il a ajouté qu’en 2014, on l’a aussi approché pour d’autres affectations intéressantes, mais qu’il ne pouvait pas les accepter, car il s’était engagé au poste intérimaire qu’il occupait.

21        Le plaignant a aussi déclaré lors de son témoignage qu’il avait rencontré Don Head, commissaire du SCC, en 2014. À l’époque, le plaignant occupait un poste EX-02 depuis presque deux ans. Il a expliqué que M. Head lui avait demandé quels étaient ses plans pour l’avenir. Il a répondu que les deux postes suivants l’intéressaient : 1) le poste de directeur régional (région du Pacifique), Services de santé; 2) le poste de SCASI.

22        Le plaignant est d’avis qu’il aurait dû être pris en considération dans le cadre du processus non annoncé en question. Il allègue aussi qu’il était injuste pour l’intimé de prendre en considération une seule personne pour le poste de SCASI.

23        Le plaignant a appelé deux témoins lors de l’audience, Carol-Ann Reynen qui, au moment où la plainte avait été déposée, était la directrice de l’Établissement de Matsqui. Lors de son témoignage, elle était directrice de l’Établissement du Pacifique. Il a aussi appelé Bobbi Sandhu qui, au moment de la plainte, était la directrice de l’Établissement de Kent. Lors de son témoignage, elle était la directrice de l’Établissement de Matsqui.

24        L’intimé s’est opposé au fait que le plaignant appelle ces personnes à témoigner, car il considérait qu’elles n’avaient pas participé au processus de nomination et que leur témoignage ne serait pas pertinent aux questions en l’espèce. Le plaignant a répondu que l’intimé avait adopté une politique inflexible de ne prendre en considération qu’une seule personne pour cette nomination et que Mme Reyen et Mme Sandhu n’avaient pas, comme lui, été prises en considération pour le poste de SCASI. À son avis, leur confirmation de ce fait était pertinente aux questions en litige.

25        J’ai permis au plaignant d’appeler ces deux témoins et rejeté l’objection de l’intimé compte tenu du fait que le fardeau de la preuve de l’abus de pouvoir allégué est celui du plaignant. J’ai toutefois avisé les parties que je déciderais plus tard si leur preuve était ultimement pertinente et, dans l’affirmative, l’importance à y accorder.

26        Mme Reyen a témoigné qu’elle a travaillé avec le plaignant dans le passé et qu’il est une personne qui fait preuve d’un haut niveau de professionnalisme et qui est plaisante et compétente. Elle avait participé au récent processus national EX-02 pour directeurs avant d’être nommée directrice. On lui a ensuite demandé si le poste de SCASI l’aurait intéressée, question à laquelle elle a répondu par la négative. Elle a également affirmé qu’elle n’avait ni été approchée ni été prise en considération pour ce poste.

27        Mme Sandhu a témoigné qu’elle connaît le plaignant depuis le début de sa carrière au SCC. Elle a ajouté qu’il fait preuve d’un haut niveau de professionnalisme et qu’il est très éloquent. Elle avait aussi participé au récent processus pour les directeurs. Quant au poste de SCASI, elle a reconnu avoir exprimé un certain intérêt pour le poste. Elle a confirmé être convaincue qu’elle aurait été qualifiée pour le poste. Cependant, on ne l’a pas approchée. Elle a plutôt obtenu un poste de directrice. Tout comme le plaignant, Mme Sandhu est membre d’une minorité visible.

28        Le plaignant a présenté en preuve, lors de l’audience, le « Bulletin sur les critères pour les processus des nominations non annoncées » (le « Bulletin ») du SCC qui stipule qu’un processus de nomination non annoncé doit 1) être conforme aux plans du SCC en matière de ressources humaines, sauf si le poste est vacant pour des circonstances imprévues; 2) respecter toutes les exigences et procédures relatives aux droits de priorité; 3) être conforme aux valeurs d’équité, d’accès, de transparence et de représentativité de la CFP en matière de nomination.

29        Le Bulletin précise aussi qu’outre les valeurs de nomination, les gestionnaires doivent prendre en considération les éléments suivants avant de choisir un processus de nomination non annoncé :

[Traduction]

[…]

  • flexibilité, abordabilité et efficience;
  • la nature du travail, l’urgence et la durée de la nomination;
  • les critères de mérite (qualifications essentielles et constituant un atout, exigences opérationnelles et besoins organisationnels);
  • le marché du travail, y compris les sources actuelles de candidats, l’équité en matière d’emploi et les langues officielles;
  • l’accès à des possibilités de perfectionnement et les aspirations professionnelles des employés;

[…]

30        Le plaignant indique que le SCC a adopté un programme national de vérification des activités de dotation pour assurer la conformité à la LEFP et toute autre exigence réglementaire et politique concernant l’intégrité des nominations. Il a déposé en preuve deux vérifications de la période de 2009 à 2011. Il affirme qu’elles démontrent que dans certains cas, l’intimé éprouvait des problèmes systémiques. Je note cependant que ces documents portent sur une période précédant le processus de nomination en question.

31        Le plaignant indique aussi que le SCC a adopté un « Programme et plan d’action d’équité en matière d’emploi » pour 2013-2015. Le rôle du [traduction] « Plan d’action portant sur les minorités visibles et les Autochtones » était de faciliter l’implantation d’un milieu de travail inclusif. Des consultations avec des membres de minorités visibles ont eu lieu en 2011. La solution du plan était d’engager et d’inclure, de façon efficace et efficiente, les employés membres des minorités visibles dans le cadre de la vision du SCC pour la fonction publique. Le plaignant allègue qu’en omettant de le prendre en considération ou de prendre en considération d’autres membres de minorités visibles pour le poste de SCASI, l’intimé n’a pas respecté sa promesse d’engager et d’inclure les employés membres de minorités visibles dans le SCC. Il affirme que le fait de ne pas respecter ces principes constitue une preuve d’abus de pouvoir.

32        L’intimé a appelé Peter German à témoigner. Au moment du processus de nomination, il était sous-commissaire régional de la région du Pacifique.

33        M. German a expliqué qu’il avait été avisé, en novembre 2014, que le poste de SCASI deviendrait vacant en décembre 2014. Une lettre en date du 17 novembre 2017 a été déposée en preuve. Dans cette lettre, la personne occupant le poste de SCASI dans la région du Pacifique à l’époque a signifié à l’intimé son avis de retraite, qui entrerait en vigueur le 19 décembre 2014.

34        Comme le titulaire du poste de SCASI devait bientôt prendre sa retraite, M. German a immédiatement pris des mesures pour trouver un nouveau SCASI. Pendant ce temps, une affectation intérimaire de moins de quatre mois a été offerte à Mme Turi pour la période du 1er décembre 2014 au 31 mars 2015.

35        M. German a expliqué qu’il était essentiel de doter le poste de SCASI, qu’il s’agissait d’une priorité pour plusieurs raisons, dont la sécurité.

36        M. German a consulté la personne responsable des ressources humaines à Ottawa, le sous-commissaire des ressources humaines. Ensemble, ils ont examiné les options de dotation qui permettraient de doter rapidement ce poste clé, tout en respectant les valeurs et les principes en matière de dotation et en répondant aux besoins organisationnels et opérationnels. Il a expliqué qu’il devait aussi aborder la question de la représentation des groupes de l’équité en matière d’emploi aux plus hauts niveaux de l’équipe de la direction régionale.

37        M. German a précisé qu’il y a seulement cinq postes supérieurs de SCASI au pays. À ce moment, les autres postes de SCASI étaient occupés et il n’y avait pas de répertoire de candidats qualifiés. Comme tous les autres postes étaient dotés, le sous-commissaire des ressources humaines et lui n’ont pas vu le besoin de mener un processus de sélection annoncé. Ils ont plutôt choisi de mener un processus non annoncé pour doter le poste de façon indéterminée. M. German a mentionné qu’ils auraient aussi pu nommer une personne à un autre poste EX-02 pour ensuite déployer cette personne au poste de SCASI. Il était cependant d’avis que cette façon de faire aurait été moins transparente. Il a donc choisi de mener un processus non annoncé.

38        M. German a aussi expliqué qu’un [traduction] « Plan de ressources humaines de la région du Pacifique » (le « Plan de RH de la région du Pacifique ») pour 2013 à 2015 avait été mis en œuvre et comprenait des engagements d’équité en matière d’emploi et des stratégies de recrutement. En particulier, il comprenait des objectifs pour le recrutement, la promotion et le maintien en poste de membres de groupes désignés dans des secteurs où l’analyse de l’effectif indiquait qu’il y avait sous-représentation. Un de ces groupes désignés était celui des femmes. Comme l’indiquait le rapport, à l’époque, seulement 21,4 % des postes EX étaient occupés par des femmes, alors que l’objectif en fonction de la disponibilité au sein de la population active était de 47,7 % de ce groupe désigné. Un autre groupe désigné était celui des minorités visibles. Cependant, 14,3 % des postes EX étaient alors occupés par des membres de minorités visibles, alors que l’objectif en fonction de la disponibilité au sein de la population active était de 11,3 %. Par conséquent, M. German a déterminé qu’il serait mieux de promouvoir une femme plutôt qu’un membre d’un autre groupe désigné.

39        M. German a expliqué qu’un récent processus national EX-02 pour direction d’établissement venait d’avoir lieu et que des candidats qualifiés étaient disponibles. On a donc envisagé la possibilité de choisir quelqu’un de ce répertoire. En outre, le Plan de RH de la région du Pacifique précisait que la région du Pacifique s’était engagée dans quatre domaines stratégiques, y compris le renouvellement et l’engagement de l’effectif et la préparation des leaders pour l’avenir. La possibilité de promouvoir un de ses cadres supérieurs était considérée comme un pas dans cette direction. Une des candidates issues du processus de direction d’établissement était une femme de la région du Pacifique – Mme Turi.

40        M. German a expliqué qu’il avait décidé de recommander Mme Turi en fonction de ses connaissances, de ses compétences et de ses habiletés. Il connaissait son travail et était impressionné par son degré d’engagement, ses connaissances et le dynamisme dont elle faisait preuve. Il avait aussi siégé comme membre du jury d’évaluation pour le récent processus national EX-02 pour direction d’établissement et Mme Turi s’était classée parmi les meilleurs candidats au pays. Il a ajouté que les qualifications essentielles évaluées dans le cadre de ce processus de sélection étaient semblables à celles devant être évaluées pour le poste de SCASI.

41        L’intimé maintient qu’il n’y a pas eu d’abus de pouvoir dans le cadre de sa décision de procéder avec un processus de nomination non annoncé. Il indique que conformément au paragraphe 30(4) de la LEFP, l’employeur n’est pas tenu de prendre en compte plus d’une personne pour faire une nomination fondée sur le mérite. De plus, les gestionnaires ne sont pas tenus de faire de nominations à partir des répertoires. En vertu de l’article 33 de la LEFP, et comme l’indique Clout c. le Sous-ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, 2008 TDFP 22, les gestionnaires ont la discrétion de choisir entre un processus annoncé et non annoncé. L’intimé maintient que même si le plaignant est d’avis que l’utilisation d’un processus non annoncé était injuste et inéquitable, car il ne lui offrait pas la possibilité de participer, le choix de l’un ou l’autre relevait de l’autorité de la direction.

42        La politique de la CFP intitulée Choix du processus de nomination stipule que le choix entre des processus de nomination annoncés ou non annoncés, internes ou externes, est conforme au plan de ressources humaines et aux valeurs fondamentales et directrices de l’organisation. La politique exige que les administrateurs généraux établissent et communiquent les critères régissant l’utilisation de processus non annoncés. Elle exige aussi des administrateurs généraux qu’ils veillent à ce qu’une justification écrite démontre comment un processus non annoncé respecte les critères établis et les valeurs en matière de nomination.

43        L’alinéa 77(1)b) de la LEFP prévoit qu’on peut porter plainte relativement au fait que l’intimé a abusé de son pouvoir du fait qu’il a choisi un processus de nomination annoncé ou non annoncé.

44        L’article 33 de la LEFP indique clairement que la CFP ou son délégué, conformément au paragraphe 15(1), peut choisir un processus annoncé ou un processus non annoncé en vue d’une nomination. Son libellé est le suivant : « La Commission peut, en vue d’une nomination, avoir recours à un processus de nomination annoncé ou à un processus de nomination non annoncé. »

45        Dans les circonstances de l’affaire, le plaignant ne peut alléguer qu’il y a eu abus de pouvoir pour le simple motif qu’on a choisi un processus non annoncé. Il doit prouver que la décision de choisir un processus non annoncé constitue un abus de pouvoir.

46        Le plaignant allègue que le processus non annoncé lui a nié, à lui et d’autres membres de minorités visibles, comme M. Sandhu, la possibilité d’être pris en considération pour le poste. D’autre part, l’intimé affirme qu’il peut justifier sa décision. Il a déposé en preuve les justifications écrites pour la nomination de Mme Turi. La « Liste de vérification relative aux processus de nomination non annoncés » a aussi été déposée, ainsi qu’un « Guide d’évaluation » confirmant que Mme Turi a fait l’objet d’une évaluation qui a conclu qu’elle était qualifiée pour le poste.

47        La justification écrite préparée pour le processus non annoncé indique essentiellement que pour doter le poste vacant EX-02, le sous-commissaire régional de la région du Pacifique a pris en considération différentes options de dotation. L’objectif était d’en trouver une qui lui permettrait de doter rapidement ce poste clé de l’organisation tout en respectant les valeurs et principes en matière de dotation et en répondant aux besoins organisationnels et opérationnels. Le sous-commissaire régional souhaitait aussi aborder la question de la représentation des groupes de l’équité en matière d’emploi aux plus hauts niveaux de l’équipe de la direction.

48        Je conclus que la décision de choisir un processus non annoncé a bien été explicitée et documentée. M. German a clairement expliqué que l’intimé devait agir rapidement. Il a décidé de choisir un candidat du répertoire de candidats qualifiés découlant du récent processus national EX-02 pour direction d’établissement et d’évaluer cette personne, Mme Turi, en fonction de « l’Énoncé des critères de mérite » du poste de SCASI. Mme Turi a été jugée qualifiée. M. German a aussi tenu compte du fait que sa nomination abordait la représentation des groupes de l’équité en matière d’emploi aux plus hauts niveaux de l’équipe de la direction de la région du Pacifique du SCC. L’intimé considérait ce choix comme étant le plus approprié et a préparé une documentation suffisante pour justifier cette décision.

49        Le plaignant n’a pas établi qu’il était déraisonnable de procéder de la sorte. Le choix de processus tombe dans les paramètres des exigences législatives et politiques.

50        De plus, l’article 30 de la LEFP prévoit qu’il n’est pas nécessaire de mener un processus de sélection et de passer plusieurs personnes en entrevue pour procéder à une nomination :

30(4) La Commission n’est pas tenue de prendre en compte plus d’une personne pour faire une nomination fondée sur le mérite.

51        Par conséquent, je conclus que le plaignant n’a pas prouvé, selon la prépondérance des probabilités, que l’intimé a abusé de son pouvoir en choisissant un processus non annoncé.

B. Y a-t-il eu abus de pouvoir dans l’évaluation de Mme Turi?

52        Le plaignant maintient qu’il y a eu abus de pouvoir dans l’évaluation de Mme Turi. Il n’a cependant pas soulevé de faits pour appuyer son allégation.

53        M. German a expliqué que Mme Turi avait été évaluée de façon exhaustive pour le poste et qu’un « Guide d’évaluation » avait été préparé et finalisé le 23 décembre 2014. Ce guide comprenait les qualifications évaluées, dont les qualifications essentielles, comprenant cinq qualifications liées aux connaissances et sept compétences clés en leadership. Le Guide d’évaluation décrit les méthodes ayant servi aux évaluations.

54        M. German a expliqué que les outils d’évaluation ayant servi à évaluer les qualifications liées aux connaissances K1, K2 et K3 et les compétences LC1 à LC3 étaient les questions d’examen 1 et 2 dans le cadre du récent processus national EX-02 pour direction d’établissement. La note obtenue par Mme Turi dépassait la note de passage pour toutes les qualifications. Pour les deux qualifications essentielles que ne couvrait pas l’examen et qui étaient nécessaires pour le poste de SCASI, un deuxième examen écrit a été administré. Ces questions d’évaluation ne pouvaient donner qu’une note « réussi » ou « échoué ». Mme Turi a obtenu une note « réussi » pour ces questions et ces qualifications, en l’occurrence K4 et K5. Deux autres qualifications, identifiées comme LC1b et LC4, ont été évaluées à l’aide d’une vérification des références. Mme Turi a obtenu des cotes de quatre sur cinq pour ces deux qualifications, alors que la note de passage était de trois.

55        Un numéro de processus différent figure sur le Guide d’évaluation déposé en preuve. M. German a noté qu’il semble que quelqu’un ait écrit le mauvais numéro de processus, soit 2014-PEN-IA-NAT-88537, ce qui est peut-être le numéro du processus national EX-02 pour direction d’établissement. Cependant, le numéro du processus de sélection pour le processus non annoncé était le 14-PEN-INA-PAC-95334. Pourtant, le Guide d’évaluation a clairement été préparé pour le poste de SCASI de la région du Pacifique du SCC et non pour un poste de direction. Tous les critères inclus dans l’« Énoncé des critères de mérite et conditions d’emploi » du poste de SCASI ont été évalués, en plus de deux autres critères portant sur les priorités ministérielles et gouvernementales et les partenaires communautaires. Pour ce qui est des critères d’expérience, la personne nommée y répond, car elle était déjà cadre supérieure du SCC.

56        Par conséquent, la notification de candidature retenue indiquant que Mme Turi était retenue pour le poste de SCASI a été publiée.

57        Une personne bénéficiaire de priorité a alors présenté elle-même sa candidature. Cette personne, qui venait de Toronto, en Ontario, a été évaluée pour le poste. L’affectation intérimaire de Mme Turi a alors été prolongée du 31 mars au 31 juillet 2015. « L’Avis de nomination intérimaire » a été publié le 22 avril 2015.

58        Lorsque l’évaluation de la personne bénéficiaire de priorité a pris fin, la personne a été déclarée non qualifiée et « l’Avis de nomination ou de proposition de nomination » a été publié le 29 mai 2015, annonçant la nomination de Mme Turi pour une période indéterminée.

59        La « justification pour un processus non annoncé » pour le poste de SCASI signée en juin 2015 par M. Head, M. German et le gestionnaire des ressources humaines offre la justification complète pour la décision de nommer Mme Turi.

60        L’intimé maintient qu’il n’y a pas eu d’abus de pouvoir dans la décision de nommer Mme Turi. Elle a été évaluée et il a été déterminé qu’elle répondait à toutes les qualifications essentielles du poste, qui avaient été établies de façon objective et en fonction des tâches du poste.

61        La CFP affirme qu’au moment de procéder à une nomination, l’article 36 de la LEFP permet à la CFP ou à son délégué, en l’occurrence l’intimé, d’utiliser les méthodes d’évaluation « […] qu’elle estime indiquée[s] pour décider si une personne possède les qualifications […] ».

62        L’article 36 de la LEFP accorde le pouvoir discrétionnaire nécessaire pour choisir la méthode pour évaluer un candidat pour nomination de la façon suivante :

36 La Commission peut avoir recours à toute méthode d’évaluation — notamment prise en compte des réalisations et du rendement antérieur, examens ou entrevues — qu’elle estime indiquée pour décider si une personne
possède les qualifications visées à l’alinéa 30(2)a) et au sous-alinéa 30(2)b)(i).

Dans le cas en question, tous les critères de mérite pour le poste de SCASI, y compris les critères liés aux connaissances, ont été évalués. La méthode utilisée pour évaluer les cinq qualifications liées aux connaissances et les sept compétences clés en leadership était raisonnable. Il a été démontré que Mme Turi répond aux qualifications essentielles établies.

63        Tant et aussi longtemps que le candidat retenu répond aux qualifications essentielles et que l’intimé peut justifier sa décision, le fait que celui-ci ait décidé de choisir quelqu’un dans un répertoire de candidats qualifiés découlant du récent processus national EX-02 pour direction d’établissement pour motifs d’opportunité et de commodité est non pertinent. Cela est conforme à l’article 36 et à l’extrait suivant du préambule de la LEFP :

[…]

[…] que le pouvoir de dotation devrait être délégué à l’échelon le plus bas possible dans la fonction publique pour que les gestionnaires disposent de la marge de manœuvre dont ils ont besoin pour effectuer la dotation, et pour gérer et diriger leur personnel de manière à obtenir des résultats pour les Canadiens […]

[…]

[Je souligne]

64        Par conséquent, je conclus qu’il n’a pas été établi que l’intimé a choisi des méthodes inappropriées pour évaluer Mme Turi ou qu’il y a eu abus de pouvoir dans son évaluation.

C. Y a-t-il eu abus de pouvoir pour motif de favoritisme personnel?

65        Le plaignant affirme que l’intimé a favorisé personnellement Mme Turi dans le cadre de ce processus de nomination.

66        Comme il a été mentionné plus tôt, la LEFP ne prévoit aucune définition de l’expression « abus de pouvoir », mais elle indique ce qui suit au paragraphe 2(4) : « Il est entendu que, pour l’application de la présente loi, on entend notamment par abus de pouvoir la mauvaise foi et le favoritisme personnel. »

67        Dans Glasgow c. Sous-ministre de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, 2008 TDFP 7, le Tribunal de la dotation de la fonction publique (TDFP) a énoncé ce qui suit au paragraphe 41 :

[…] La sélection ne doit jamais être teintée de favoritisme personnel. Des intérêts personnels indus, comme une relation personnelle entre la personne chargée de la sélection et la personne nommée, ne devraient jamais constituer le motif d’une nomination. De la même façon, la sélection d’une personne à titre de faveur personnelle ou pour obtenir la faveur de quelqu’un serait un autre exemple de favoritisme personnel.

68        Le TDFP a indiqué, au paragraphe 39, que c’est le favoritisme personnel, non pas tout autre type de favoritisme, qui constitue un abus de pouvoir.

69        Le plaignant soutient que M. German a fait preuve de favoritisme personnel envers Mme Turi parce qu’il l’a choisie sans prendre considération d’autres candidats. Il avait aussi travaillé avec elle auparavant et était impressionné par son niveau d’engagement, ses connaissances et le dynamisme dont elle faisait preuve.

70        M. German a témoigné que lui et Mme Turi avaient une relation strictement professionnelle. Il l’avait initialement rencontrée lors de réunions d’affaires. Ils n’avaient aucun contact à l’extérieur du bureau, sauf pour une occasion. Après qu’elle ait été embauchée, M. German et son épouse avaient organisé une fête de Noël pour ses cadres supérieurs. Mme Turi et son conjoint y étaient allés.

71        En réponse à l’allégation de favoritisme personnel, l’intimé affirme que la personne nommée avait été choisie d’une façon juste et transparente, selon le mérite, en fonction de ses connaissances, de ses habiletés, de son expérience et de ses qualités personnelles, ainsi que des besoins opérationnels. Comme on l’a indiqué dans la décision du TDFP dans Portree c. Administrateur général de Service Canada, 2006 TDFP 14, le fait que le plaignant n’est pas d’accord avec la décision du jury de sélection ne constitue pas, en soi, un abus de pouvoir.

72        Je conclus que le plaignant n’a pas déposé de preuve selon laquelle la nomination de Mme Turi est entachée de favoritisme personnel. Rien ne nous permet de conclure qu’elle et M. German avaient une relation personnelle qui aurait pu influer sur le processus de nomination. Je conclus donc que le plaignant n’a pas réussi à prouver que l’intimé a abusé de son pouvoir pour motif de favoritisme personnel.

D. Y a-t-il eu abus de pouvoir parce que l’intimé a induit le plaignant en erreur?

73        Le plaignant prétend aussi que l’intimé l’a induit en erreur avant de procéder à cette nomination, ce qui a fait qu’il n’a pas été pris en considération pour le poste. En particulier, il affirme que l’intimé a omis de l’aviser de l’annulation d’un répertoire EX-02 où il était candidat qualifié, ce qui a fait qu’il n’a pas présenté de demande dans le cadre du processus de nomination EX-02 pour direction d’établissement ayant mené à la nomination de Mme Turi. Mme Turi, qui s’était qualifiée pour ce processus EX-02, a éventuellement été nommée par l’entremise du processus non annoncé pour motif qu’elle satisfaisait aux qualifications essentielles du poste de SCASI.

74        Le plaignant affirme que l’intimé l’a aussi encouragé à se retirer du Programme de perfectionnement en leadership (PPL) EX-01 afin d’assumer une affectation intérimaire de niveau EX-02. Il a expliqué qu’en février 2013, Michele Brenning, sous-commissaire, Services de santé, l’a avisé de se retirer de ce programme. Cela était nécessaire, selon elle, pour qu’il puisse toucher la rémunération d’intérim au niveau EX-02.

75        Le plaignant a expliqué que sa préférence était de maintenir sa candidature dans les répertoires EX-01 et EX-02 dans lesquels il était candidat qualifié. Toutefois, comme on lui a dit qu’il serait nommé EX-02 prochainement, il s’est retiré du PPL et n’a pas fait la dernière entrevue de récapitulation nécessaire en vertu du programme. Il a témoigné que Mme Brenning l’a rassuré que le répertoire EX-02 n’avait pas de date d’expiration et qu’il servirait à doter des postes vacants.

76        Le plaignant a déposé en preuve un courriel daté du 18 février 2013, rédigé par Mme Brenning, pour prouver qu’on lui a demandé de se retirer du PPL, qu’on lui a dit que le répertoire EX-02, où il était candidat qualifié, n’avait pas de date d’expiration, et qu’il servirait à doter des postes vacants. Ce courriel a été envoyé au directeur des Services au groupe de la direction. Il se lit comme suit :

[Traduction]

Christine,

J’ai rencontré le commissionnaire [sic] et voici les prochaines étapes pour Ghalib :

1. Il se retirera du PPL à compter de septembre 2012, alors qu’il aura réussi 2 affectations.

2. Sa rémunération d’intérim débutera avec le prolongement de son temps dans le poste EX2 HS (salaire rétroactif à septembre 2012)

3. Je prolongerai aussi son affectation intérimaire pour une autre année, de sorte qu’il n’y aura pas d’interruption de leadership - si je ne m’abuse ce sera du 1er avril 2013 au 31 mars 2014.

4. Comme le mentionnait ta note de ce matin, le répertoire n’a pas de date d’expiration, donc les décisions peuvent être prises au besoin.

[…]

77        En septembre 2014, le répertoire EX-02 dans lequel le plaignant était candidat qualifié a expiré. Il n’en a cependant pas été avisé.

78        En octobre 2014, le nouveau processus national EX-02 a été amorcé pour doter des postes de direction d’établissement. Le plaignant n’a pas présenté de demande, car il ne savait pas que le répertoire dans lequel il était candidat qualifié avait expiré.

79        En novembre 2014, le plaignant a avisé M. German que le poste de SCASI, qui serait bientôt vacant, l’intéressait. Il a dit à M. German qu’il était candidat qualifié dans un répertoire EX-02. Le plaignant ne savait pas que ce répertoire avait expiré. Pour ce qui est de M. German, il a indiqué lors de l’audience qu’il ne se rappelait pas s’il savait que le répertoire avait expiré, car cela s’était passé plusieurs années auparavant. Mais selon ce qu’il savait, aucun répertoire EX-02 n’était disponible à ce moment. Le plaignant a aussi écrit au commissaire pour lui rappeler que le poste l’intéressait.

80        Le 1er décembre 2014, Mme Turi a commencé son affectation intérimaire dans le poste de SCASI.

81        Lorsque son affectation intérimaire de directeur général de la santé a pris fin en décembre 2014, le plaignant est retourné à son poste d’attache de niveau AS-07.

82        En mars 2015, le plaignant a encore une fois parlé à M. German. C’est alors qu’il a su qu’une personne avec droit de priorité faisait l’objet d’une évaluation en vue du poste de SCASI. Croyant que ce poste serait doté par cette personne, le plaignant a alors avisé Mme Brenning que le poste de directeur régional, Services de santé, l’intéressait. Ce poste aussi serait bientôt vacant. Elle lui a cependant dit qu’elle croyait que le répertoire EX-02 où il était candidat qualifié avait expiré. Elle lui a recommandé de vérifier auprès des Services au groupe de la direction.

83        En avril 2015, le plaignant a demandé aux Services au groupe de la direction de connaître l’état du répertoire EX-02, mais il n’a pas reçu de réponse.

84        En mai 2015, le plaignant a appris que Mme Turi avait été nommée au poste de SCASI et que le processus national EX-02 pour direction d’établissement avait servi à le doter.

85        En juin 2015, le plaignant a reçu confirmation des Services au groupe de la direction que le répertoire où il était candidat qualifié avait expiré en septembre 2014.

86        Le plaignant a aussi appris en août 2016 que le poste de directeur régional, Services de santé, avait été doté en permanence par quelqu’un d’autre.

87        Le plaignant avait présumé qu’il serait nommé à partir du répertoire EX-02 dans un poste EX-02, comme le poste de SCASI ou celui de directeur régional, Services de santé, lorsque les titulaires auraient pris leur retraite. Il a témoigné que les trois éléments suivants l’ont porté à croire qu’il obtiendrait un de ces postes : 1) son superviseur direct le lui avait dit; 2) le commissaire savait que ces postes l’intéressaient; 3) M. German savait aussi que ces postes l’intéressaient.

88        Un document déposé en preuve, soit un courriel daté du 10 juillet 2015 et préparé par un représentant de l’intimé, confirme que les candidats qui faisaient toujours partie du répertoire EX-02 11-PEN-IA-NAT-51717, où le plaignant était un candidat qualifié, n’avaient pas été avisés de son expiration.

89        L’intimé indique que même si le plaignant a soulevé des questions par rapport à son retrait du PPL, sa participation à d’autres processus EX-02, ses aspirations professionnelles et les autres nominations EX ayant eu lieu, ces éléments sont distincts de la décision de dotation en question et n’ont aucunement influé sur celle-ci.

90        Même si j’accepte que ces questions soient distinctes de la décision de nommer Mme Turi au poste de SCASI, je considère qu’il est regrettable qu’on ait omis d’aviser le plaignant que le répertoire EX-02 où il était candidat qualifié avait expiré en septembre 2014, malgré le fait qu’on lui ait dit en 2013 que le répertoire n’avait pas de date d’expiration. La preuve démontre que l’intimé a omis d’aviser les candidats de ce répertoire de son annulation. Le plaignant a dit qu’il n’a pas présenté de demande dans le cadre du processus de direction d’établissement ayant mené à la nomination de Mme Turi parce qu’il ne savait pas que le répertoire dont il faisait partie n’était plus valide. S’il avait su que le processus de direction d’établissement pouvait servir à doter des postes EX-02 comme le poste de SCASI, il y aurait participé.

91        La preuve démontre aussi que l’intimé a encouragé le plaignant à se retirer du PPL sans tenir compte de l’impact qu’aurait cette décision sur sa disponibilité pour nomination à un poste EX-01 à l’avenir. Il s’est retiré du programme sous l’impression qu’il obtiendrait sous peu un poste EX-02, mais cela ne s’est jamais produit.

92        Il n’y a cependant aucune preuve que ces questions ont eu un impact sur la décision de dotation en question. L’intimé avait la discrétion de choisir un processus de nomination qui tombait dans les paramètres des exigences législatives et politiques. La décision de nommer Mme Turi au poste de SCASI était distincte de ces autres questions.

93        Malgré cela, le plaignant maintient que depuis qu’il a dit avoir été induit en erreur et qu’il a déposé une plainte, on ne lui a offert aucune affectation de perfectionnement ou intérimaire. À son avis, il subit des représailles pour avoir divulgué ces faits. Il a expliqué que sa carrière progressait de façon régulière jusqu’au moment où il a déposé la plainte. Il a ajouté que tout au long de sa carrière, son rendement a toujours été qualifié de plus que satisfaisant. Pourtant, ses évaluations de rendement depuis qu’il a déposé la plainte sont passées d’entièrement satisfaisant à satisfaisant. Selon lui, l’intimé l’a laissé tomber.

94        Comme il l’a expliqué, il a reçu plusieurs prix et fait l’objet de plusieurs reconnaissances au fil des ans pour ses contributions au SCC. À un moment donné, on l’a honoré d’une Médaille pour services distingués des agents de la paix. En outre, en reconnaissance de ses années de service, il a reçu une année la Médaille du Jubilé de la reine.

95        Les représailles ont eu des incidences financières, émotionnelles et psychologiques sur lui, ce qui explique qu’il ait procédé avec sa plainte.

96        Je sympathise avec le plaignant et je sais que cette situation doit être très difficile pour lui. J’espère que l’intimé ne le punira pas en lui refusant des possibilités de perfectionnement et d’affectations intérimaires pour avoir signalé ces faits de bonne foi.

97        Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

98        La plainte est rejetée.

Le 8 février 2018.

Traduction de la CRTESPF

Nathalie Daigle,
une formation de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral

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