Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Suspension (9 jours) - Faute de conduite - Harcèlement - Compétence - Vétérinaire - le fonctionnaire s'estimant lésé avait précédemment été suspendu pour cinq jours pour avoir harcelé un subalterne, avait été muté à un autre lieu de travail et avait cessé d'exercer des fonctions de gestion - le fonctionnaire a présenté un grief concernant la suspension de cinq jours - le subalterne a déposé une autre plainte de harcèlement contre le fonctionnaire - à l'audience d'arbitrage, l'employeur et le fonctionnaire s'estimant lésé ont conclu un règlement qui avait pour effet de substituer une lettre de réprimande à la suspension de cinq jours, les modalités du règlement ayant été discutées avec le subalterne - le fonctionnaire a affiché au travail une copie du règlement conclu et le subalterne en a eu connaissance - le subalterne a déposé une nouvelle plainte de harcèlement contre le fonctionnaire à ce sujet - l'employeur a suspendu le fonctionnaire s'estimant lésé sans traitement en attendant l'issue d'une enquête concernant ce dernier incident - au bout de neuf jours, l'employeur a réintégré le fonctionnaire, bien que l'enquête ne fût pas terminée - le fonctionnaire a soutenu que l'affichage de l'entente était une façon neutre de répondre aux questions des collègues - l'employeur a fait valoir qu'il avait été placé dans une situation intenable, à la lumière des plaintes de harcèlement déposées par l'employé subalterne, le dernier incident s'étant produit quelques jours à peine après le règlement - l'arbitre a jugé que la suspension de neuf jours était disciplinaire et a assumé la compétence - l'arbitre a décidé que la suspension n'était pas nécessaire étant donné que le fonctionnaire et le subalterne travaillaient dans des lieux distincts et parce que la preuve n'avait pas montré que la présence du fonctionnaire au travail nuirait à l'enquête - l'arbitre a ajouté que, à son avis, l'affichage du règlement par le fonctionnaire était une façon neutre de clarifier la situation aux yeux des personnes en cause au travail. Grief admis.

Contenu de la décision

Dossier : 166-2-26841 Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE FLOYD D. JOSS fonctionnaire s’estimant lésé et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Agriculture et Agroalimentaire Canada)

employeur

Devant : Rosemary Vondette Simpson, commissaire Pour le fonctionnaire s'estimant lésé : Lui-même Pour l'employeur : Ronald Snyder, avocat

Affaire entendue à Lethbridge (Alberta) le 15 avril 1997

DÉCISION Le D r Floyd Joss occupe un poste classifié VM-2 au ministère de l'Agriculture à Lethbridge, en Alberta. Il détient des grades en médecine vétérinaire ainsi qu'une maîtrise en épidémiologie. Le 8 juin 1995, il a reçu de l'employeur une lettre de suspension dont voici la teneur (pièce E-19) : [Traduction] Comme suite à notre communication électronique d'aujourd'hui, vous trouverez ci-jointe une plainte de harcèlement déposée par M. Basil Simmons, qui allègue que vous l'avez harcelé. Comme je vous l'ai expliqué, il est de mon devoir d'assurer un milieu de travail exempt de harcèlement, et c'est pour cette raison que vous et M. Simmons avez été séparés au travail comme l'a expliqué le D r Kiley dans la lettre datée du 25 juillet 1994 qu'il vous a envoyée. Comme nous continuons de recevoir des plaintes de harcèlement en dépit de cette séparation, je prends d'autres mesures afin d'assurer un milieu de travail exempt de harcèlement en vous suspendant immédiatement avec traitement en attendant les résultats d'une enquête. Cette suspension n'est pas une mesure disciplinaire et vous continuerez de recevoir votre traitement et vos avantages sociaux habituels durant cette période.

Pendant votre suspension et en attendant l'issue de l'enquête, vous ne devez pas vous présenter dans les locaux du client ou du Ministère sans autorisation préalable de ma part. Si vous désirez communiquer avec le Ministère, vous pouvez le faire en me téléphonant directement au 403-292-5671. Vous ne devez avoir aucun contact avec M. Simmons.

Comme vous participerez à l'enquête, j'aurai besoin de communiquer directement avec vous à propos de cette affaire, et je vous demande donc d'être disponible durant les heures de travail normales pour que je puisse vous joindre. Je vous téléphonerai à la maison au besoin, et je vous donnerai un préavis raisonnable de toute réunion ou entrevue à laquelle vous pourriez être tenu d'assister.

Je tâcherai de mener l'enquête à terme le plus rapidement possible, afin de mettre un terme le plus tôt possible à votre période de suspension avec traitement. Toute demande de congé approuvée à ce jour est annulée, et toute demande de congé que vous voudriez présenter pendant votre suspension doit être approuvée par moi à l'avance.

Je communiquerai avec vous le plus tôt possible pour vous informer des détails de l'enquête.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 2 L'action que M. Basil Simmons considérait comme du harcèlement était l'affichage, par le D r Joss, du règlement à l'amiable concernant une audience d'arbitrage mettant en cause le D r Joss et l'employeur. L'audience résultait d'une mesure disciplinaire qui avait été imposée au D r Joss à la suite de la conclusion à laquelle était arrivé un certain M. Barlow comme quoi le D r Joss avait harcelé M. Basil Simmons à trois reprises.

Dans son grief, le D r Joss conteste sa suspension indéfinie avec traitement (pièce E-20) :

[Traduction] Je conteste la suspension qui m'a été infligée par la voie d'une lettre datée du 8 juin 1995 par M. W. Outhwaite. Cette suspension est disciplinaire, injustifiée, injuste, déraisonnable, embarrassante et nuisible à ma réputation et à ma santé.

De plus, je m'estime lésé par les instructions et restrictions injustes et déraisonnables que l'employeur m'a imposées pendant que j'étais suspendu.

Comme redressement, le fonctionnaire demande ce qui suit: [Traduction] Je demande qu'on retire de tous les dossiers la lettre de suspension et toute la correspondance qui y a trait et qu'on me remette le tout pour que je le détruise.

Qu'on me crédite tous les salaires et avantages sociaux dont j'ai été privé à cause de ce processus.

Qu'on me rembourse/me crédite tous les frais juridiques et autres dépenses que j'ai engagés à cause des mesures prises par l'employeur.

Que l'employeur me présente des excuses publiques. Résumé de la preuve Les parties ont présenté des preuves concernant le contexte du présent grief. Le 7 février 1994, M. Basil Simmons, un inspecteur des viandes à Agriculture Canada qui relevait du D r Joss, a déposé un grief au sujet du fait que Santé et Bien-être social Canada l'avait approché concernant une expertise médicale. Un mois plus tard,

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Décision Page 3 le 15 mars 1994, M. Simmons a déposé un grief de harcèlement dans lequel il portait six accusations de harcèlement contre le D r Joss. Une enquête a été menée par M. Vince Barlow, un conseiller en ressources humaines à Agriculture Canada, qui a conclu que trois des six accusations étaient fondées.

Dans son rapport, M. Barlow a conclu que le D r Joss : 1) avait fait des menaces à propos de la sécurité d'emploi de M. Simmons; 2) avait fait un commentaire déplacé, à savoir que son « lunch sentait la nourriture de chat »; et 3) avait tenté d'utiliser un magnétophone pendant qu'il parlait à M. Simmons, ce qui n'était pas convenable.

Les mesures disciplinaires qui ont été imposées au D conclusions ont fait l'objet d'un règlement juste avant l'audience d'arbitrage du grief concernant l'affaire qui était prévue en juin 1995.

Pour situer le présent grief dans son contexte, le D a totalement nié avoir harcelé M. Simmons et a expliqué comme suit les incidents faisant l'objet des plaintes.

(1) Le 8 septembre 1993, le témoin avait été consterné de trouver M. Basil Simmons dans le terrain de stationnement une demi-heure avant la fin de sa journée de travail le même jour il avait été autorisé à prendre deux heures de congé pour aller à un rendez-vous chez le médecin plus tôt dans la journée. Comme M. Simmons avait déjà pris sa douche et s'était changé, le D r Joss ignorait depuis combien de temps il avait en fait arrêté de travailler. Étant donné que, par ailleurs, en 1988 l'employeur avait imposé à M. Simmons un régime spécial l'obligeant à produire un certificat médical chaque fois qu'il s'absentait du travail, le fonctionnaire estimait qu'en sa qualité de vétérinaire responsable il devait commenter le fait que M. Simmons avait quitté le travail tôt. S'il s'était référé aux licenciements futurs, ce n'était pas pour menacer M. Simmons mais simplement pour lui signaler de quels faits on tiendrait compte lorsque viendrait le temps de prendre des décisions concernant les licenciements.

(2) Lorsque le fonctionnaire a fait le commentaire qu'on lui reproche au sujet de la nourriture en boîte qui se trouvait sur la table, c'était dans le but de plaisanter et d'être amical, et non d'offenser M. Simmons. Commission des relations de travail dans la fonction publique

r Joss à la suite de ces

r Joss, dans son témoignage,

Décision Page 4 (3) Le fonctionnaire avait une raison légitime d'utiliser le magnétophone en vue d'enregistrer exactement sa rencontre avec M. Simmons, mais il n'a jamais mis l'appareil en marche lorsque ce dernier s'y est opposé.

Après que M. Barlow, dans son rapport, eut conclu que les allégations de harcèlement portées contre le D r Joss étaient fondées, le Ministère a décidé de séparer le D r Joss et M. Simmons en mutant le premier à l'établissement Lilydale et en gardant le second à l'établissement Burns. Le D r Joss s'est en outre vu retirer ses fonctions concernant la répartition des tâches entre les employés.

Le 22 août 1994, le D r Joss a déposé deux griefs contestant les mesures prises à son endroit (pièces E-10 et E-11).

Le 18 avril 1995, l'avocat de M. Simmons a envoyé la lettre qui suit à M. Barlow (pièce E-13) :

[Traduction] Objet : Basil Simmons Comme vous vous en souvenez peut-être, M. Simmons avait déposé un grief concernant le harcèlement dont il faisait l'objet de la part du D r Floyd Joss. Le rapport d'enquête sur cette affaire, présentée vers le mois de juillet 1994, concluait que le D r Joss avait effectivement harcelé M. Simmons à trois occasions distinctes.

Nous vous avisons que M. Simmons a retenu nos services puisqu'il semble que le harcèlement de la part du D poursuit.

Plus précisément, M. Simmons nous signale les deux exemples suivants :

1) Le D r Joss a questionné deux employés de Lakeside Packers, à Brooks, pour savoir si, à leur connaissance, M. Simmons avait pu « abusé du système » en s'absentant du travail sans autorisation.

2) Le D r Joss a obtenu un rendez-vous avec le médecin de M. Simmons, le D r Simpson, sous prétexte qu'il voulait le consulter à propos d'un trouble de santé quelconque alors que, en réalité, il était simplement pour obtenir d'autres renseignements concernant M. Simmons. À cet égard, nous incluons avec la présente copie d'une lettre du D r Simpson au D r Joss. Commission des relations de travail dans la fonction publique

r Joss se

Décision Page 5 À notre avis, le D r Joss va continuer de harceler M. Simmons, et cela est tout simplement intolérable. M. Simmons a déposé un grief on lui a donné gain de cause et nous croyons savoir que, à la suite de ce grief, le D r Joss s'est vu imposer une sanction disciplinaire, ce qui ne semble toutefois avoir aucun effet sur le comportement du D r Joss. Nous espérons que des mesures plus sévères seront prises de façon à mettre un terme à ce harcèlement une fois pour toutes.

Le 26 avril 1995, M. Basil Simmons a déposé une autre plainte alléguant que le D r Joss, bien qu'il ne fût plus son surveillant et sans instruction de la direction, avait pris rendez-vous avec le médecin de M. Simmons pour le questionner sur le bien-fondé des absences de ce dernier. Il a aussi allégué que le D r Joss demandait aux pairs de M. Simmons si, à leur connaissance, ce dernier s'était absenté du travail sans autorisation. Lors du dépôt de cette deuxième plainte, en avril, une audience d'arbitrage avait déjà été fixée pour le 1 er juin 1995; la Commission devait y instruire le grief du D r Joss concernant la suspension de cinq jours qui lui avait été imposée après que M. Barlow eut conclu au bien-fondé des trois plaintes de harcèlement déposées par M. Simmons.

Le 1 er juin 1995, les parties ont conclu le règlement suivant (pièce E-17) : [Traduction] EN L'AFFAIRE DONT EST SAISIE LA COMMISSION DES RELATIONS DE TRAVAIL DANS LA FONCTION PUBLIQUE

AU SUJET DU GRIEF DE FLOYD D. JOSS PORTANT LES NUMÉROS DE DOSSIER 166-2-26277 ET 166-2-26372

IL EST PAR LES PRÉSENTES CONVENU DE CE QUI SUIT : L'employeur reconnaît que l'expression d'insatisfaction du D r Floyd Joss envers M. Basil Simmons découle d'un sens sincère du devoir et de la diligence et de l'inquiétude que suscitait chez le D r Joss le fait que M. Simmons utilisait des congés de maladie de façon excessive; les parties reconnaissent par ailleurs que le D r Floyd D. Joss a exprimé son inquiétude face à la partialité dont, à son avis, était teintée l'enquête menée par M. Vince Barlow.

Les parties reconnaissent en outre que le D D. Joss n'a pas exercé son droit légal à une audience d'arbitrage en bonne et due forme, ce qui lui aurait permis de

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r Floyd

Décision signaler à l'attention de atténuantes entourant ce grief.

Et en vue de régler l'affaire à l'amiable, les parties s'entendent pour que la sanction disciplinaire du D r Floyd D. Joss soit ramenée d'une suspension de cinq (5) jours à une lettre de réprimande à être versée à son dossier pour une période ne dépassant pas deux (2) ans à compter de la date de la décision initiale rendue concernant le grief, soit le 24 juillet 1994, après quoi la lettre sera retirée du dossier conformément à la convention collective.

Il est convenu que le présent document sera joint à titre d'addenda à la lettre de réprimande.

Les parties ont examiné la teneur du document et y ont consenti ce 1 er juin 1995. _________________________ Lyndsay Jeanes Avocat de la C.R.T.F.P. (sic)

ET _________________________ Peter J. Keebler Avocat de Floyd D. Joss

Le 7 juin 1995, M. Basil Simmons a signalé qu'il déposait un autre grief de harcèlement à la suite du fait que le D r Joss avait affiché le règlement amiable à l'établissement.

M. Vince Barlow, conseiller en ressources humaines à Agriculture Canada, a expliqué la nature des quatre établissements de traitement des viandes situés dans la région de Lethbridge : « Burns » et « Lilydale » traitent la viande rouge; « Tabor » traite la dinde; et « Fort McLeod » s'occupe de l'abattage de chevaux. Le D à l'établissement Burns, il s'acquittait des fonctions de base de sa description de travail ainsi que des fonctions d'« agent des répartitions » que l'employeur lui avait assignées en plus, ce qui signifiait que chaque jour le D inspecteurs des viandes entre les établissements. Le D Commission des relations de travail dans la fonction publique

Page 6 l'arbitre des circonstances

r Joss était un VM-2 r Joss répartissait les r Joss avait un certain nombre

Décision Page 7 d'inspecteurs des viandes qui relevaient de lui, et il relevait pour sa part du D r Sturm. Le D r Joss était devenu agent des répartitions en 1991 et il a continué d'exercer ces fonctions jusqu'à ce que l'employeur le réaffecte à l'établissement Lilydale afin de le séparer de l'un des employés, M. Basil Simmons, un inspecteur des viandes qui jusque-là avait relevé du D r Joss. M. Simmons avait déposé un grief alléguant qu'on lui avait demandé de se soumettre à une expertise de Santé et Bien-être social Canada qu'il estimait injustifiée, puisqu'il s'était toujours conformé aux instructions de l'employeur l'obligeant à produire un certificat médical pour chaque absence. Il a été conclu qu'il s'était toujours conformé à ces instructions et que rien ne justifiait donc qu'il ait à subir une expertise de la part de Santé et Bien-être social Canada.

M. Barlow a expliqué que, lorsqu'il a étudié le grief de M. Simmons, il a remarqué dans la documentation des comptes rendus de faits qui dépassaient la portée du grief que celui-ci présentait. Il n'a pas incité M. Simmons à déposer un grief de harcèlement, il lui a simplement signalé que les faits mentionnés à l'appui du grief pourraient mieux faire l'objet d'un grief de harcèlement séparé. M. Barlow a expliqué qu'il avait fait enquête au sujet des plaintes de harcèlement portées par M. Simmons contre le D r Joss, et qu'il avait conclu que les plaintes étaient fondées dans trois cas. Il a produit un rapport à cet effet (pièce E-8).

Le D r Joss avait voulu clarifier auprès du D r Simpson si, le 8 septembre 1993, M. Basil Simmons l'avait effectivement consulté; ce jour-là, M. Simmons avait perdu deux heures de travail à cause de rendez-vous chez le médecin. Dans le but d'obtenir ce renseignement, le D r Joss s'était notamment rendu au bureau du D r Simpson. Selon M. Barlow, à ce stade-là le D r Joss n'avait plus aucune raison de vouloir obtenir des renseignements du D r Simpson puisqu'il n'était plus responsable des congés de maladie de M. Simmons, qui ne relevait plus de lui.

M. Barlow a dit qu'il était présent avec M. Wayne Outhwaite lorsque ce dernier a parlé par téléphone haut-parleurs au D r Joss à propos de l'affichage du règlement juste avant que soit prise la décision de le suspendre. Le témoin a en outre précisé que c'était lui qui avait rédigé l'ébauche de la lettre de suspension pour M. Outhwaite (pièce E-19).

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Décision Page 8 M. Wayne Outhwaite, le directeur des Opérations et la personne dont le D r Joss relevait directement le 8 juin 1995, a témoigné qu'il n'avait nullement l'intention d'imposer une sanction disciplinaire au D r Joss lorsqu'il l'a suspendu après l'affichage du règlement. Il a décidé de retirer le fonctionnaire du lieu de travail pour les motifs suivants : 1) certaines des plaintes de harcèlement ont été jugées fondées; 2) il se sentait frustré de constater que la décision de séparer le D r Joss et M. Simmons en les affectant à deux établissements différents n'avait pas mis un terme aux plaintes; et 3) le D r Joss, lorsqu'il s'est entretenu par téléphone avec lui et que M. Barlow était présent dans la pièce, lui a dit qu'il estimait « n'avoir rien fait de mal » en affichant le règlement qui avait été conclu. En sa qualité de gestionnaire, M. Outhwaite avait comme devoir d'assurer un milieu de travail exempt de harcèlement. Il a témoigné qu'il avait été décidé de mettre fin à la suspension au bout de neuf jours sur l'avis des Relations de travail même si l'enquête n'était pas terminée parce que celle-ci risquait d'être longue.

Le D r Joss a expliqué qu'il y avait eu de l'animosité entre M. Vince Barlow et lui-même avant l'enquête initiale concernant les plaintes de harcèlement déposées par M. Simmons. M. Barlow avait été le conseiller technique dans un concours qui avait par la suite été déclaré vicié dans une décision d'appel. Le concours était pour le poste d'« agent des projets spéciaux » (VM-3). Le D r Joss avait participé au concours mais n'avait pas été sélectionné. La présidente du comité d'appel, dans son rapport datée du 29 octobre 1993, a conclu que les témoignages de deux des membres du jury de sélection, le D r Sturm et M. Hepburn, étaient contradictoires et que, s'il devait être tenu un autre jury de sélection, ces deux personnes ne devraient pas en faire partie. Elle a en outre conclu que le jury avait fixé des normes de sélection arbitraires et qu'il n'avait pas évalué comme il faut l'expérience des candidats. Voici le texte des deux dernières pages de la décision du comité d'appel (pièce G-14) :

[Traduction] Je suis incapable d'affirmer avec certitude que la partialité a joué un rôle dans la sélection du D r Bradley. Le D r Joss n'a présenté aucune preuve à l'appui de sa théorie selon laquelle le D r Anderson aurait exercé des pressions sur le D r Sturm et sur M. Hepburn afin qu'ils manipulent le processus de sélection de façon à assurer la nomination du D r Bradley, si ce n'est d'affirmer que ce dernier éprouvait des difficultés financières lorsqu'il a été nommé à un poste dans

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Décision Page 9 la fonction publique. Il n'est pas raisonnable de conclure, à partir de ce fait, que le D r Anderson s'était indûment immiscé dans le concours.

Les modifications apportées aux documents ne me préoccupent pas outre mesure. Compte tenu de mes conclusions dans la présente affaire, cela a peu d'importance quand le document de classification a été signé ou quand le document en question a été transmis par télécopieur. Autrement dit, ces questions n'ont pas d'importance par rapport à l'issue de l'appel. Les témoignages contradictoires du D r Sturm et de M. Hepburn me laissent perplexe. J'y reviendrai plus bas.

Il n'est pas nécessaire que je commente les délibérations du jury de sélection au sujet de l'expérience du D r Joss et l'affirmation voulant que ce dernier ait possédé l'expérience requise. J'ai déjà conclu que le jury avait fixé des critères de sélection arbitraires et n'avait pas évalué comme il faut l'expérience des candidats. Ce n'est pas mon rôle d'évaluer l'expérience du D r Joss. L'évaluation doit être effectuée par un jury de sélection ou de présélection qui étudie soigneusement les titres et qualités requises pour le poste ainsi que les fonctions de celui-ci.

J'examinerai maintenant la condition obligeant les candidats à posséder de l'expérience sur les chaînes d'inspection rapides. Le ministère avait le droit d'établir les qualités requises pour le poste. L'énoncé de qualités précise que les candidats doivent avoir [traduction] « une expérience importante de l'inspection (traditionnelle et accélérée) [...] des aliments ». N'ayant entendu aucune preuve ni argument contraires, je suppose qu'on parle de la même chose lorsqu'on dit d'une inspection qu'elle est rapide high linespeed » en anglais) ou accélérée streamlined » en anglais). Cela étant dit, le jury de sélection avait raison d'exiger des candidats qu'ils possèdent une telle expérience. Un comité d'appel n'est pas habilité à se prononcer sur l'établissement des qualités, et je ne tire donc aucune conclusion quant à savoir si cette condition constituait une exigence professionnelle normale ou justifiée.

En ce qui concerne l'évaluation de l'expérience et des autres qualités des candidats, je dois dire que je partage la préoccupation de l'appelant, à savoir qu'il sera difficile pour les personnes n'ayant pas eu l'avantage de remplir, comme le D r Bradley, les fonctions du poste à titre intérimaire pendant longtemps de postuler l'emploi. Bien que mes pouvoirs m'interdisent de prescrire des mesures correctives, je recommande au jury de sélection qui pourrait être constitué dans le but d'évaluer les qualités des candidats conformément

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Décision Page 10 à cette décision de procéder avec soin. Je recommande en outre à la Commission de la fonction publique, si jamais un nouveau jury de sélection était constitué, d'en exclure le D r Sturm et M. Hepburn, étant donné que les contradictions dans leur témoignage n'ont pas été élucidées à ma satisfaction. Je note que M. Sigvaldason, à propos de l'allégation mettant en doute la véracité de la déposition des témoins, a écrit ce qui suit : [traduction] « Il s'agit d'accusations graves et le Ministère est tout à fait capable de rendre compte de ses actions [...]. » Je ne sais pas si cela est un aveu de la part du ministère ou une simple reconnaissance du fait qu'il y a un problème concernant la preuve. Quoi qu'il en soit, la ligne de conduite la plus prudente à adopter dans les circonstances, à la lumière surtout du ton acrimonieux de cet appel, serait de constituer un nouveau jury pour évaluer les candidats.

En résumé, et pour les motifs qui précèdent, l'appel du D r Floyd Joss est accueilli. À la suite des appels, le concours a été annulé et le D terme à ses ambitions par rapport au poste. Le D dont ce concours avait été mené et il en attribuait en partie le blâme à M. Vince Barlow. Depuis l'époque du concours et en passant par les deux appels subséquents dont l'un a été accueilli et l'autre a donné en grande partie gain de cause au D et jusqu'à la présente audience, les relations entre M. Barlow et le D acrimonieuses. De plus, le D r Joss a témoigné avoir entendu M. Vince Barlow dire à M. Simmons qu'il devrait présenter un grief de harcèlement. Compte tenu de ces faits et de la relation qu'il avait avec M. Barlow, le D pas faire enquête sur la première plainte de harcèlement que M. Basil Simmons avait déposée contre lui.

Le D r Joss a témoigné que, lorsqu'il avait abordé la question des congés de maladie de M. Simmons avec le médecin de ce dernier, le D r Simpson, et qu'il avait posé des questions aux collègues de M. Simmons, ce n'était pas dans le but de harceler celui-ci mais de recueillir des informations pour se défendre à ses audiences d'arbitrage. Le D r Joss a affirmé que plusieurs de ses collègues de travail avaient été cités à comparaître à son audience d'arbitrage le 1 er juin 1995. L'audience n'a pas eu lieu. Il y a plutôt eu de nombreux pourparlers privés entre les avocats et entre l'avocat du Conseil du Trésor et M. Simmons. Pendant que se déroulaient ces pourparlers, les témoins assignés à comparaître n'étaient pas, bien entendu, parties aux procédures.

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r Joss a mettre un r Joss était mécontent de la façon r Joss –, r Joss ont été assez r Joss estimait que ce dernier n'aurait

Décision Page 11 De retour au travail, après que le règlement eut été conclu et signé, certains des collègues du D r Joss, spécialement ceux qui avaient reçu des assignations mais n'avaient pas été cités comme témoins, l'ont approché et voulaient savoir ce qui se passait. Le D r Joss a témoigné qu'il craignait d'aborder la question avec eux. Il a cru que la façon la plus prudente de procéder était d'afficher le règlement conclu et de laisser le document parler de lui-même sans intervention de sa part. Le document n'était pas confidentiel. Le fait de l'afficher n'était d'aucune façon intéressé ou exonérant. Au contraire, cela l'embarrassait puisque le document montrait clairement qu'il avait accepté une sanction disciplinaire, encore qu'elle fût moins sévère que celle imposée au départ.

Le D r Joss a témoigné que cela l'avait terrassé d'avoir dire à ses pairs au travail, à sa femme et à ses fils adolescents qu'on l'avait suspendu pour une période indéfinie et renvoyé chez lui. Il a eu énormément de difficulté à faire face à la situation. Ce fut un choc et un dur coup pour lui, et il en ressent encore aujourd'hui les effets émotionnels.

La dernière journée de l'audience, le D des produits primaires, à témoigner. M. Simmons a déclaré que, bien qu'il eût rencontré M e Jeanes, l'avocat du Conseil du Trésor, avant la signature du règlement, il n'avait jamais vu le document en question. Il a toutefois reconnu que M discuté avec lui des termes de l'entente.

Lorsqu'il a vu le texte du règlement affiché, M. Simmons était dans tous ses états et a subi un stress grave. Il a téléphoné au bureau régional et a parlé à M. Outhwaite. M. Barlow, pensait-il, se trouvait en la présence de M. Outhwaite. Il leur a dit qu'il n'avait jamais vu le document avant.

M. Simmons a en outre nié que M. Vince Barlow lui ait jamais dit de déposer un grief de harcèlement.

M e Peter Keebler, l'avocat du D r Joss, a déclaré que le règlement qu'il avait négocié au nom du D r Joss n'était pas de nature confidentielle. Après la signature du document, a-t-il ajouté, il avait tenté d'organiser une réunion entre le D r Joss et M. Simmons en vue de les calmer. Il n'y était cependant pas parvenu parce que M. Simmons ne se sentait pas prêt pour une telle rencontre à ce moment-là.

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r Joss a cité M. Basil Simmons, inspecteur e Jeanes avait

Décision Page 12 Argumentation du fonctionnaire Le D r Joss soutient que, selon les règles de la justice naturelle, il avait le droit de recueillir des preuves pour se défendre. Les demandes de renseignements qu'il a adressées au D r Simpson et à ses propres collègues au sujet de l'utilisation que faisait M. Simmons de ses congés de maladie ne visaient pas à harceler ce dernier, mais à l'aider à se préparer lui en vue de ses propres audiences d'arbitrage et de l'instruction de son affaire. Quant à l'affichage du règlement qui avait été conclu, c'était une façon neutre de répondre aux questions des collègues.

Argumentation de l'employeur L'avocat de l'employeur soutient que l'employeur a été placé dans une situation intenable lorsqu'il a été saisi de la plainte de M. Simmons. Il se devait de fournir un milieu de travail exempt de harcèlement et, en retirant le D avec traitement, il se donnait le temps nécessaire pour déterminer quelle était la meilleure ligne de conduite à adopter dans les circonstances. Le D au travail à peine quelques jours plus tard.

L'employeur avait reçu d'autres plaintes de M. Simmons en avril 1995 et, lors de la suspension le 7 juin, il ne s'était écoulé que quelques jours depuis que la direction avait réglé une affaire d'arbitrage avec le D r Joss. Motifs de la décision La première question que je dois trancher est de décider si j'ai compétence pour me prononcer sur la suspension indéfinie du D r Joss, laquelle a pris fin neuf jours après que le fonctionnaire avait été retiré du lieu de travail. Si la suspension était de nature disciplinaire, j'ai compétence.

J'ai conclu que, dans les circonstances, la suspension était de nature disciplinaire et j'assume la compétence. Le fonctionnaire avait déjà subi des mesures disciplinaires pour avoir harcelé M. Simmons. Lorsque l'employeur a par la suite suspendu le fonctionnaire de façon à pouvoir faire enquête sur une autre accusation de harcèlement portée par M. Simmons contre ce dernier, sa décision avait manifestement une composante disciplinaire.

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r Joss du lieu de travail r Joss a pu revenir

Décision Après avoir examiné les motifs avancés par l'employeur pour justifier le fait que, à son avis, il se devait de suspendre immédiatement le D connaissance de la plainte portée contre lui par M. Simmons, j'en arrive à la conclusion qu'une mesure aussi draconienne était inutile. M. Simmons ne subissait certes aucun préjudice irréparable. Lui et le D établissements différents. Il n'y a aucune preuve comme quoi la présence du D allait nuire à l'enquête. Une suspension, même avec traitement, n'était pas un simple congé payé pour le D r Joss. Ce fut pour lui un choc qui a engendré beaucoup d'anxiété et de craintes à propos de ce que penseraient ses pairs et ses subalternes au travail. À cause du poste de niveau supérieur que le D qualité de docteur en médecine vétérinaire, le fait d'être renvoyé chez lui était extrêmement déshonorant et humiliant. Il avait un poste à maintenir et toute perte de respect de la part des personnes avec qui il travaillait lui causerait du tort. Sa suspension indéfinie était d'autant plus éprouvante à cause de cela.

On a soutenu que le D r Joss avait agi de manière déplacée en affichant le texte du règlement que les parties avaient conclu. En revanche, le D r Joss a fait valoir qu'au travail de nombreux employés surtout ceux qui avaient reçu une assignation à comparaître mais qui finalement n'avaient pas témoigné interprétaient ou comprenaient mal ce qui s'était passé à l'audience d'arbitrage la semaine précédente et se posaient des questions. Au lieu de chercher à expliquer le contenu de l'entente, il a décidé que la chose la plus juste à faire était de simplement afficher le document, qui était explicite. Rien n'interdisait la publication du document. J'accepte le témoignage du D r Joss comme quoi il n'avait voulu harceler personne. Ce fut un acte neutre qui visait à clarifier la situation aux yeux des personnes inquiètes au travail. Le document ne présente pas M. Simmons sous un mauvais jour, pas plus d'ailleurs que le D r Joss. Il s'agit uniquement d'un règlement.

En m'appuyant sur la preuve que j'ai reçue à l'audience, j'estime que le fait d'afficher le texte du règlement conclu n'était d'aucune façon répréhensible. À ce moment-là, les esprits étaient encore échauffés après l'annulation de l'audience d'arbitrage, et M. Simmons a vu dans l'affichage du règlement un acte de harcèlement à son endroit alors qu'il n'aurait pas dû. À ce stade, il aurait été souhaitable que la direction intervienne en vue d'apaiser tout le monde, à la lumière surtout du fait que les parties n'avaient pas jugé nécessaire d'aller jusqu'à une audience en bonne et due

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Page 13 r Joss lorsqu'il a pris r Joss travaillaient déjà dans des r Joss r Joss occupe à l'établissement en sa

Décision forme la semaine précédente et qu'elles avaient conclu un règlement à l'amiable. Le moment était venu de faire fond sur ce règlement et de travailler résolument à l'établissement d'un meilleur climat de relations de travail entre la direction et le D r Joss ainsi qu'entre M. Basil Simmons et le D façon excessive et ordonné le retrait du D permettant de penser qu'elle a envisagé d'autres solutions.

Je dois donc conclure que l'employeur, en suspendant le D r Joss avec traitement pendant neuf jours (suspension qui, au départ, était pour une période indéfinie), a pris une décision injustifiée qui doit par conséquent être annulée. J'ordonne à l'employeur de retirer du dossier du fonctionnaire toute mention de la suspension indéfinie. Comme le fonctionnaire n'a pas établi qu'il avait subi des pertes au titre du traitement et des avantages sociaux à la suite de la suspension, je ne lui accorde aucune indemnité à ce titre. Enfin, je ne serais pas encline à accorder au D r Joss les autres redressements qu'il a demandés même si j'avais le pouvoir de le faire.

Par conséquent, pour tous ces motifs, il est fait droit au grief dans la mesure indiquée.

Bien que cela ne fasse pas partie de l'essentiel de ma décision, je tiens à ajouter qu'en examinant les faits qui ont mené à ce grief j'ai constaté que des erreurs avaient été commises par diverses personnes. Par exemple, le Dr Joss s'est estimé doublement lésé du fait que, après avoir perdu le concours et obtenu gain de cause dans l'appel qu'il a par la suite interjeté devant la Commission de la fonction publique, le concours a été tout simplement annulé. De même, le fonctionnaire a considéré comme un profond outrage à la justice le fait que M. Vince Barlow, qui avait été le conseiller technique dans le concours susmentionné et qui avait affirmé que certaines parties du grief initial de M. Simmons se prêtaient mieux à un grief distinct qui est finalement devenu le grief de harcèlement initial, soit la personne mandatée pour faire enquête sur le grief de harcèlement. Il me semble que le D r Joss n'avait pas tort de réprouver le choix de M. Barlow pour faire enquête sur le grief que M. Simmons avait déposé contre lui. Compte tenu des circonstances particulières de cette affaire, la relation acrimonieuse qui existait entre eux notamment, j'estime que le fait de demander à M. Barlow de déterminer le bien-fondé du grief de harcèlement de M. Simmons à l'endroit du D r Joss donnait clairement une impression de partialité. Cette décision Commission des relations de travail dans la fonction publique

Page 14 r Joss. La direction a plutôt réagi de r Joss du travail. Il y a peu d'indications

Décision Page 15 initiale dans laquelle il a été conclu que certaines allégations étaient fondées a amorcé une suite d'événements très graves. La ténacité dont le D r Joss a fait preuve dans le but d'obtenir réparation ainsi que son franc-parler, qui étaient évidents à l'audience, ont exacerbé les relations de travail difficiles avec nombre de personnes et ont provoqué des ressentiments. Je recommande aux parties de faire des efforts sérieux en vue de réduire le niveau d'aigreur qui existe entre elles et de trouver un moyen de régler leurs différends qui leur permettrait de repartir à zéro. Pour y parvenir, elles devront chacune mettre de l'eau dans leur vin.

Rosemary Vondette Simpson, commissaire

OTTAWA, le 22 septembre 1997. Traduction certifiée conforme Serge Lareau

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