Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Suspension (5 jours) - Insubordination - le fonctionnaire s'estimant lésé s'est fait imposer une suspension de cinq jours pour avoir prétendument fait un geste menaçant en direction de deux gestionnaires - plus particulièrement, l'employeur a prétendu que le fonctionnaire s'estimant lésé avait levé les bras en faisant semblant de pointer une carabine dans la direction des gestionnaires - l'enquête a révélé qu'il y avait eu un autre incident où l'on avait allégué que le fonctionnaire s'estimant lésé avait manié un couteau de façon menaçante lors d'une discussion avec les mêmes gestionnaires - le fonctionnaire s'estimant lésé a nié les allégations - les témoignages étaient contradictoires - l'arbitre a conclu que l'employeur n'avait pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, que le fonctionnaire s'estimant lésé avait commis les actes qu'on lui reprochait. Grief admis.

Contenu de la décision

Dossier: 166-2-27016 Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE ROGER STANLEY fonctionnaire s’estimant lésé et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Héritage Canada)

employeur Devant: Muriel Korngold Wexler, président suppléant Pour le fonctionnaire s’estimant lésé: Barry Done, Alliance de la Fonction publique du Canada Pour l’employeur: Peter Hajecek, avocat Affaire entendue à Toronto (Ontario), les 27 et 28 janvier 1997.

Decision Page 1 DÉCISION La présente décision porte sur le grief déposé par M. Roger Stanley le 23 janvier 1995. Il conteste une suspension de cinq jours qui lui a été imposée par l’employeur le 17 janvier 1995 pour les motifs suivants :

[traduction] Le 21 avril 1994, en traversant le stationnement du Otonabee Inn-Best Western, à Peterborough, vous vous êtes retourné, avez regardé d’un air furieux Ivan Smith et Bruce Kidd, deux (2) gestionnaires de la voie navigable qui enquêtaient sur la prétendue mauvaise conduite d’un membre de l’équipe de préposés à l’entretien que vous supervisez, et avez levé les bras en faisant semblant de pointer une carabine dans leur direction. M. Smith s’est senti suffisamment menacé par ce geste pour porter des accusations de harcèlement contre vous.

Un enquêteur indépendant, M e Maurice Cantin, c.r., a fait enquête sur cet incident ainsi que sur plusieurs autres incidents mentionnés par M. Smith, et il vous a reconnu coupable de harcèlement relativement à l’incident du 21 avril. Il vous a aussi reconnu coupable d’avoir manié un couteau de plongée de façon menaçante lors d’une discussion le 16 mars 1994 à laquelle M. Smith participait de nouveau.

Vous avez reçu une copie du rapport de l’enquêteur et avez eu l’occasion de réfuter ses conclusions et de relever toute erreur ou omission avant qu’il soit signé. Ni vous ni votre avocat, M e Frank Johnson, n’avez jugé bon de présenter des observations ou de produire d’autre preuve. Par conséquent, en l’absence d’informations à l’effet contraire, je n’ai d’autre choix que d’accepter les conclusions de M e Cantin selon lesquelles vous avez eu un comportement offensant, intimidant et menaçant considéré comme du harcèlement à l’endroit de M. Smith.

[...]

Le présent grief a été dûment renvoyé à l’arbitrage et a été instruit les 27 et 28 janvier 1997.

La preuve Le présent grief soulève une question de crédibilité. Le fonctionnaire s'estimant lésé nie les allégations. L’employeur a cité MM. Ivan Smith et Bruce Kidd comme

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(Pièce 1)

Decision Page 2 témoins, tandis que M. Barry Done, représentant du fonctionnaire s'estimant lésé, a cité ce dernier à comparaître en son propre nom ainsi que MM. Douglas Neals, Roy Spears et Arnie Hockaday. De plus, les parties ont déposé sept pièces et j’ai acquiescé à une demande d’exclusion des témoins.

Les personnes en cause dans les prétendus incidents M. Ivan Smith travaille pour Parcs Canada (Patrimoine canadien) depuis 1977. En 1992, il est devenu le gestionnaire de secteur ou le surintendant de la voie navigable Trent-Severn, Région du Centre. M. Roger Stanley relevait de M. Bob Kerr, le superviseur de l’équipe d’entretien, lequel relevait de M. Smith. M. Stanley travaille pour Parcs Canada depuis mai 1984. En 1988, il est devenu chef de l’équipe d’entretien (GLT-MAN-8-B2) au chantier d’entretien de Lakefield (au nord de Peterborough). Il a d’abord été embauché pour une période déterminée et, depuis le printemps de 1987, il occupe un emploi à temps plein pour une durée indéterminée. Il supervise MM. Roy Spears et Al Hoy ainsi que d’autres manoeuvres. C’est également un ami intime de MM. Spears et Hoy.

M. Bruce Kidd travaille pour Parcs Canada depuis 1971. Il a commencé sa carrière comme stagiaire en administration et, en 1987, il a été muté au bureau de Peterborough il occupe maintenant le poste de chef des finances. En 1994, M. Douglas Neals était le vice-président de la section locale 00056 de l’Union canadienne des employés de transports (UCET) un Élément de l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC). M. Roy Spears occupe un poste de réparateur au sein de l’équipe d’entretien (GLT-MAN-6) et il est le délégué syndical en chef de la même section locale. Lors de l’arbitrage du présent grief, M. Spears était le président de la section locale. M. Arnie Hockaday était le président de la section locale en 1994 ainsi qu’au moment des incidents en cause et de l’enquête.

La version de l’employeur concernant les prétendus incidents M. Ivan Smith, le gestionnaire de secteur ou le surintendant du secteur au bureau de Lakefield en 1993-1994, a déclaré qu’il entretenait des relations de travail normales avec M. Stanley lorsqu’il a été nommé surintendant en septembre 1992. En décembre 1993, il a toutefois fait partie d’un comité chargé de faire enquête sur la présence de « poutrelles d’arrêt » bois d’oeuvre équarri qui sert à maintenir le niveau

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Decision Page 3 d’eau d’un barrage sur la propriété privée de M. Al Hoy. M. Bob Kerr a été le premier à remarquer les poutrelles sur la propriété de M. Hoy. Il l’a signalé à M. Smith qui, accompagné de M. Kerr, s’est rendu au domicile de M. Hoy où, de la route, il a remarqué qu’on construisait une cabane avec ce qui lui a semblé être des « poutrelles d’arrêt ». M. Smith en a informé M. John Lewis, son superviseur immédiat. Par la suite, M Lewis, M. Smith et d’autres gestionnaires ont discuté ensemble et ont décidé de faire intervenir la Police provinciale de l’Ontario (PPO). Aucune procédure judiciaire n’a été engagée contre M. Hoy. Toutefois, l’employeur a décidé d’effectuer une enquête interne pour déterminer s’il y avait eu mauvaise conduite. Le comité mis sur pied pour mener l’enquête était composé de M. Smith, M. Bruce Kidd et M. Andrew Gadd, directeur du personnel, Région de l’Ontario, Parcs Canada. Il avait pour mandat de déterminer pourquoi les « poutrelles d’arrêt » se trouvaient sur la propriété de M. Hoy. Le comité a interviewé diverses personnes, et l’entrevue avec M. Stanley devait avoir lieu (d’abord le 20 avril, mais la date a été changée par la suite) à 11 heures le 21 avril 1994 au Otonabee Inn de Peterborough. L’entrevue a toutefois été reportée. Selon M. Smith, cette entrevue a eu lieu plus tard au cours de l’avant-midi. (La preuve a toutefois démontré qu’elle avait eu lieu à 13 h 30 ce jour-là.)

M. Smith a déclaré que les entrevues devaient se dérouler dans la pièce 203. Cette pièce est située au deuxième étage entre deux escaliers. M. Stanley, M. Garrette Mahood et M. Roy Spears devaient être interviewés à 11 heures. Ils sont arrivés à 11 h 15 accompagnés de MM. Arnie Hockaday et Douglas Neals. MM. Kidd et Smith attendaient près de la pièce. Toutefois, M. Gadd était absent parce qu’il était en téléconférence ailleurs. MM. Smith et Kidd ont décidé de demander au groupe de cinq personnes de revenir dans cinq minutes. M. Smith a déclaré qu’il avait dit à M. Hockaday, en présence des quatre autres personnes, soit MM. Spears, Neals, Mahood et Stanley, de revenir dans quinze minutes parce que M. Gadd était retenu ailleurs. M. Smith s’est montré inflexible quant au souvenir qu’il avait des événements; il a déclaré que M. Spears avait lancé : « Ils ne sont même pas foutus d’organiser une cr...... de réunion », et que le fonctionnaire s'estimant lésé avait dit qu’il avait mieux à faire, et avait lancé un juron. Les cinq hommes sont ensuite sortis, ont descendu l’escalier et ont traversé le stationnement pour se rendre à leurs véhicules. Selon M. Smith, M. Stanley marchait seul derrière les quatre autres hommes. À un moment donné, il s’est retourné pour regarder MM. Smith et Kidd qui se trouvaient sur le balcon du deuxième étage en face de la pièce 203. M. Smith était Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 4 en train de fumer. Les quatre autres hommes, eux, poursuivaient leur route. M. Stanley a dévisagé MM. Smith et Kidd pendant quelque trente à soixante secondes, puis il a fait quelques pas vers le stationnement, en tournant le dos à MM. Smith et Kidd avant de s’arrêter une seconde fois pour se retourner. Il a levé les deux bras comme s’il pointait une arme vers MM. Smith et Kidd. M. Smith a interprété le geste de M. Stanley comme étant celui de quelqu’un qui faisait semblant de viser avec une carabine et de tirer; un bras tenait la « carabine », l’autre était plié comme s’il appuyait sur la « détente ».

M. Stanley a gardé cette position pendant une dizaine de secondes, selon M. Smith. Il a ensuite abaissé les deux bras, s’est retourné et s’est dirigé vers les voitures dans le stationnement. M. Smith n’a vu personne d’autre à côté ou près de M. Stanley lorsque celui-ci a fait le prétendu geste. Sa réaction a été de regarder M. Kidd, qui se trouvait à côté de lui, et de lui demander ce que voulait dire ce geste. Il avait bien compris le geste, mais, sous l’effet de la surprise, il a posé la question. Il n’en croyait pas ses yeux. M. Kidd a répondu que M. Stanley avait fait le geste de pointer une carabine dans leur direction. M. Smith a déclaré que, plus il y pensait, plus il se sentait menacé et éprouvait de la crainte et de la colère. Si M. Stanley était capable de les menacer ainsi en public, pensait-il, que ferait-il s’il se retrouvait seul avec lui à un moment donné.

M. Smith a déclaré qu’il ne se souvenait pas s’il était en train de parler avec M. Kidd à ce moment-là, mais il a ajouté que s’il était en train de parler c’était certainement avec M. Kidd; il ne se serait pas adressé à M. Stanley et il n’aurait pas parlé de lui.

M. Smith ne se souvenait à quelle distance M. Stanley se trouvait derrière les quatre autres hommes lorsqu’il s’est arrêté deux fois et qu’il a fait le geste. D’après lui, M. Stanley s’est arrêté tandis que les autres ont continué de marcher et ils n’étaient plus à portée de vue lorsque M. Stanley a fait le geste. Celui-ci était seul lorsqu’il a pointé l’arme imaginaire; M. Spears avait poursuivi sa route. M. Smith était sûr que M. Spears n’était pas à côté de M. Stanley ou avec lui à ce moment-là. Il a ajouté que M. Stanley a fait le prétendu geste et qu’il ne faisait pas que les pointer du doigt. Il pointait une arme imaginaire d’un bras et de l’autre, qui était replié sur sa poitrine, il faisait semblant d’appuyer sur la « détente ». MM. Smith et Kidd se

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Decision Page 5 trouvaient l’un à côté de l’autre. D’après M. Smith, le geste les visait tous les deux. Il s’est senti intimidé par le geste parce que M. Stanley lui avait jeté un regard furieux.

Selon M. Smith, l’incident a durer au moins une dizaine de secondes parce que M. Stanley a tenu la pose pendant un long moment; il se trouvait à une distance d’environ 180 à 210 pieds de MM. Smith et Kidd; il a ensuite abaissé les bras et a poursuivi sa route. M. Smith ne l’a pas rappelé et il n’a pas pu expliquer pourquoi il ne l’avait pas fait. Il aurait pu crier et M. Stanley l’aurait entendu. Il a déclaré qu’il ne voulait pas provoquer de confrontation, mais qu’il était en colère et qu’il se sentait menacé. Au fil des heures ce jour-là et les jours suivants, il s’est mis à craindre de plus en plus pour sa sécurité. Le geste l’avait tellement étonné qu’il ne s’était pas immédiatement rendu compte de sa gravité. Il n’a toutefois pas communiqué avec le service de police local. Il croyait qu’il serait préférable de régler le problème par la voie disciplinaire ou des relations du travail. Malgré ses craintes, M. Smith a continué son enquête et a interviewé M. Stanley. Il a précisé qu’il ne craignait rien durant l’entrevue parce qu’il n’était pas seul avec M. Stanley. D’après lui, M. Stanley était capable de s’en prendre à lui physiquement. À cause du geste, il entrevoyait cette possibilité et il croyait qu’il y avait de fortes chances que cela se produise.

De l’avis de M. Smith, le geste visait lui-même et M. Kidd parce que M. Stanley leur en voulait à tous les deux d’avoir annulé son congé. Il a déclaré que M. Stanley avait été interviewé deux fois le 21 avril 1994. Il a toutefois insisté sur le fait que le comité avait interviewé M. Stanley durant la matinée et non à 13 h 30. En autant qu’il se souvienne, lors de l’entrevue tenue durant la matinée du 21 avril1994, MM. Stanley, Hockaday et Neals étaient présents ainsi que M m e Donna Perry qui a pris des notes. (M me Perry était la secrétaire du directeur des ressources humaines, M. Doug Johnstone.) M. Stanley a commencé par refuser de répondre aux questions du comité. Les membres du comité lui ont expliqué le but de l’entrevue et se sont mis à lui poser des questions. M. Stanley est resté debout même s’il avait été invité à s’asseoir. Il a répondu aux questions en posant une question sur un autre sujet. Il voulait savoir qui avait autorisé l’annulation du congé qu’il avait demandé pour cet avant-midi-là. M. Kidd a répondu qu’il en assumait la responsabilité. À l’époque. M. Smith ne travaillait plus pour la voie navigable Trent-Severn; il avait été muté au Parc national Tobarmory. M. Kidd a expliqué à M. Stanley qu’il avait discuté de la demande de congé avec M. Kerr. M. Stanley a demandé aux trois membres du comité s’ils avaient déjà

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Decision Page 6 entendu parler de la première communion. Il paraissait très en colère. Les membres ayant répondu par la négative, M. Stanley a déclaré qu’un « de ses enfants était en train de pleurer à la maison parce que son père ne pouvait pas l’accompagner à l’église ». Pendant tout ce temps, M. Stanley se tenait debout devant les membres du comité. Il a ajouté qu’il était très important pour lui et sa famille qu’ils soient ensemble, puis a déclaré en se penchant au-dessus de la table et en pointant le doigt vers chacun des membres : « Ne nuisez pas à ma famille ». Une des membres du comité a offert ses excuses. M. Kidd a répondu que lui-même et M. Kerr n’avaient pas été prévenus que le congé en question était si important. M. Stanley a rétorqué que le motif de son congé ne les regardait pas. Il a aussi demandé aux membres s’ils se prenaient pour la Gestapo. Ces derniers ont essayé de passer à une autre question concernant une certaine déclaration écrite de M. Stanley. Le fait qu’ils aient eu ce document en leur possession (qui avait été remis sous le sceau de la confidence à M. John Bonser, le directeur exécutif régional intérimaire à ce moment-là) n’a fait qu’exacerber la colère de M. Stanley. M. Gadd lui a demandé de sortir afin qu’il puisse consulter ses représentants syndicaux. Il a été décidé de reporter l’entrevue de M. Stanley à un autre moment de la journée. Cette « première » entrevue avait duré entre cinq et huit minutes. Les membres du comité ont ensuite interviewé M. Spears puis ce fut de nouveau le tour de M. Stanley. Selon M. Smith, M. Stanley s’était calmé et a répondu à certaines questions. Il a déclaré qu’il ne savait pas que M. Stanley avait demandé congé le 20 ou le 21 avril 1994.

Par suite du geste posé le 21 avril 1994 qu’il a interprété comme une menace, M. Smith a rédigé une plainte officielle le lendemain 22 avril dans laquelle il a décrit l’incident (pièce 4). Il disait qu’il avait été victime de harcèlement et que M. Stanley devait répondre de son geste. Il connaissait la politique du Conseil du Trésor relative au harcèlement en milieu de travail (pièce 3) qu’il avait portée à l’attention de tout le personnel. La plainte a fait l’objet d’une enquête par M e Jean-Maurice Cantin, c.r. en juillet et août 1994. Lorsque M e Cantin lui a demandé s’il s’était déjà senti menacé par M. Stanley, M. Smith a déclaré que l’incident du 21 avril 1994 n’était pas le premier et il a décrit un autre incident qui s’était produit le 16 mars 1994. Il ne l’avait pas porté à l’attention de son superviseur, ne s’en était pas plaint et ne l’avait mentionné à personne auparavant « parce que l’incident du 16 mars 1994 ne l’avait pas inquiété à ce moment-là ».

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Decision Page 7 En ce qui concerne l’incident du 16 mars 1994, la preuve a révélé que le jour en question M. Hoy avait reçu une lettre l’informant qu’il était suspendu sans salaire en attendant la confirmation d’une recommandation de congédiement. La suspension pour une période indéterminée découlait du fait que MM. Smith et Kerr avaient conclu que les « poutrelles d’arrêt » qui se trouvaient sur la propriété de M. Hoy appartenaient à l’employeur. M. Hoy avait été congédié par la suite, puis réintégré en 1995. La journée du 16 mars 1994 avait donc été une journée difficile pour MM. Smith, Stanley, Spears et Neals. MM. Hoy, Spears et Stanley étaient de bons amis. De plus, M. Spears disposait de renseignements selon lesquels M. Hoy avait obtenu la permission de ses supérieurs avant d’utiliser les poutrelles en question. M. Spears l’avait mentionné à M. Gadd. L’atmosphère était donc tendue et difficile le 16 mars 1994. MM. Smith et Kidd ont demandé à M. Stanley de faire le tri du matériel de M. Hoy en vue de séparer ses effets personnels de ceux appartenant à l’employeur. Il s’agissait de matériel de plongée. L’employeur avait identifié son matériel au moyen d’un numéro et la tâche de M. Stanley consistait à récupérer ce matériel et à le remettre à M. Smith.

La journée du 16 mars 1994 a commencé par une réunion avec M. Hoy au cours de laquelle il s’est fait remettre une lettre l’avisant de sa suspension sans salaire pour une période indéterminée. Après la réunion, MM. Smith, Kidd, Stanley et Neals, qui était présent à titre d’observateur, se sont rendus au casier de M. Hoy qui se trouvait dans un autre immeuble. Au cours de l’audience en arbitrage, ce casier, construit par le fonctionnaire s’estimant lésé, a été désigné de différentes façons : casier de plongée, casier de plongeur, cabane, hangar de plongée ou remise fermant à clef. La remise mesure 4 pi sur 8 pi (pièce 5A). Près de la cloison du fond, celle qui mesure huit pieds, il y a deux caisses (l’une grise, l’autre plus foncée) qui servent au transport du matériel. Les caisses se trouvent à 18 pouces de la cloison du fond, ce qui laisse suffisamment d’espace pour circuler entre la cloison et les caisses. Le vendredi 24 janvier 1997, le fonctionnaire s’estimant lésé a pris trois photos Polaroïd de la remise. Les photos ont été présentées en preuve lors de l’audition du présent grief (pièces 5A, 5B et 5C). La remise est fermée à clef et seuls M. Hoy et le fonctionnaire ont les clefs. Elle sert à l’entreposage du matériel de plongée. Le fonctionnaire et M. Hoy sont des plongeurs qui font des travaux d’entretien pour l’employeur. Tous les deux gardaient leur matériel de plongée dans cette remise. M. Hoy déposait le sien dans la caisse grise. Le 16 mars 1994, M. Smith a demandé au fonctionnaire de faire le Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 8 tri du matériel de plongée et d’identifier celui que l’employeur avait prêté à M. Hoy. Le fonctionnaire s’estimant lésé avait demandé à M. Neals d’être présent comme témoin pour s’assurer que tous les articles appartenant à l’État qui avaient été prêtés à M. Hoy allaient être retournés à M. Smith. Le 16 mars 1994, le matériel comprenait des combinaisons isothermiques, deux bouteilles de plongée, des palmes de plongée, des régulateurs et trois couteaux. La combinaison de M. Hoy était plus petite que celle du fonctionnaire.

M. Smith a déclaré que pendant l’examen du matériel de plongée le 16 mars 1994, il a remarqué que M. Stanley tenait un couteau dans une gaine pendant que MM. Kidd et Neals passaient le matériel en revue. M. Smith a vu M. Stanley tenir le couteau de façon menaçante. Le fonctionnaire s’estimant lésé regardait M. Smith pendant qu’il transférait le couteau d’une main à l’autre et qu’il le dégainait et le rengainait (toujours en regardant M. Smith). M. Smith a expliqué qu’il aurait été raisonnable que le fonctionnaire le sorte de la gaine une fois pour le regarder, mais qu’il n’était pas nécessaire qu’il répète le geste plusieurs fois. Il a affirmé que le geste l’avait quelque peu intimidé, mais qu’il ne s’était pas plaint de cet incident parce que MM. Kidd et Neals étaient présents et parce qu’il y avait une caisse entre lui et M. Kidd et entre le fonctionnaire et M. Neals. Il a toutefois pensé que le plaignant y allait un peu fort.

En repensant à cet incident plus tard, M. Smith s’est effectivement senti menacé parce qu’il savait que MM. Stanley et Hoy étaient de bons amis (depuis sept ans). M. Smith trouvait qu’il n’aurait servi à rien de discuter de cet incident ou de celui du 21 avril 1994 avec le fonctionnaire parce que ce dernier pouvait facilement tout nier. De plus, depuis le 21 avril 1994, le fonctionnaire ne relevait plus de lui. M. Smith a déclaré qu’il avait grandi dans une ferme de l’Île-du-Prince-Édouard et que le mot « cultivateur » n’a pas de connotation désobligeante et qu’il n’utiliserait pas ce mot de façon péjorative.

Au cours du contre-interrogatoire, M. Smith a déclaré qu’il n’avait pas demandé à M. Hoy d’expliquer la présence des poutrelles sur sa propriété avant de s’y rendre. Plus tard cette même journée, M. Hoy s’est présenté au bureau de M. Smith pour lui demander s’il avait quelque chose à lui dire. M. Smith lui a répondu en lui demandant si lui-même avait quelque chose à lui dire. M. Hoy lui a dit que s’il se trouvait chez lui

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Decision Page 9 avec un véhicule appartenant à l’employeur lors de la visite de M. Smith c’était pour ramasser une table en prévision d’un party de Noël organisé par l’employeur. M. Smith estime qu’il a offert à M. Hoy l’occasion d’expliquer la présence des « poutrelles d’arrêt » sur sa propriété, mais ce dernier n’a rien dit. Aux yeux de M. Smith, il était crucial qu’il dise quelque chose. M. Smith et M. Hoy ont assisté au party de Noël où, encore une fois, aucune mention n’a été faite des poutrelles. M. Smith a expliqué qu’il n’en avait pas parlé sur les conseils du « procureur de la Couronne » qui a suggéré de mener une enquête interne d’abord parce que M. Hoy avait dit à la direction que M. Kerr lui avait donné la permission d’apporter les « poutrelles d’arrêt » chez lui.

M. Bruce Kidd a été embauché par Parcs Canada à titre de stagiaire en administration en 1971. Il a été muté au bureau de Peterborough en 1987 et est devenu chef des finances. Il a été informé de l’affaire des « poutrelles d’arrêt » le 20 décembre 1993 lorsque M. Bob Kerr (le gestionnaire du bureau de Lakefield) et M. Smith sont venus le voir, lui ainsi que M. John Lewis (qui était le superviseur de M. Smith et le surintendant) et M. Fred Alyea (directeur des opérations du canal) pour en discuter. MM. Kerr et Smith leur ont expliqué que des « poutrelles d’arrêt » avaient disparu et qu’ils avaient découvert une cabane en bois rond sur la propriété de M. Hoy. À l’issue de la discussion, il a été décidé d’informer la PPO. Un agent du corps policier les a rencontrés et on a obtenu un mandat de perquisition. Le samedi suivant, MM. Kerr et Kidd, accompagnés de l’agent de la police provinciale, ont perquisitionné la propriété de M. Hoy. Ils ont vu une cabane en bois rond en chantier mesurant 20 pieds carrés sur 24 pieds carrés, d’une hauteur de six à dix pieds. Ils ont constaté que le bois provenait des barrages de la voie navigable Trent-Severn. Une des responsabilités de M. Kidd était celle de chef de la sécurité pour la voie navigable Trent-Severn. On a donc constitué une équipe d’enquêteurs formée de MM. Kidd, Smith et Gadd. L’enquête a commencé vers le 4 janvier 1994. M. Hoy a continué de travailler pendant l’enquête jusqu’au 16 mars 1994, date à laquelle il a été suspendu en attendant d’être congédié. La lettre de suspension a été remise à M. Hoy pendant qu’il se trouvait dans les « ateliers de Lakefield » et on lui a demandé de prendre ses effets personnels. M. Douglas Neals était son représentant syndical. MM. Stanley, Smith, Neals et Kidd se sont donc rendus à la remise pour répertorier le matériel de plongée. M. Kidd a confirmé que MM. Hoy et Stanley étaient et demeurent de bons amis.

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Decision Page 10 M. Kidd a déclaré que lui-même et M. Neals sont restés près de l’entrée pendant l’examen du matériel de plongée. M. Smith était à côté de M. Kidd pendant que M. Stanley faisait le tri entre les effets personnels de M. Hoy et le matériel de l’employeur. M. Stanley entrait et sortait de la remise. Il était le seul à connaître les effets personnels de M. Hoy. M. Kidd n’est jamais entré dans la remise. Il n’a prêté aucune attention au nombre de couteaux que M. Stanley a pris et vérifiés. Celui-ci a toutefois dit quelque chose en reconnaissant le couteau de M. Hoy. M. Kidd a ajouté qu’un des articles ramassés par M. Stanley était un couteau de six à huit pouces de long appartenant à M. Hoy. M. Kidd a vu M. Stanley jouer avec le couteau; il le dégainait et le rengainait en le tenant de manière suggestive. M. Kidd a ressenti une certaine inquiétude, car il voyait à quel point il serait facile pour M. Stanley de se servir du couteau. D’après lui, M. Stanley ne regardait personne en particulier pendant qu’il « dégainait et rengainait » le couteau. M. Kidd a précisé que M. Stanley s’était approché de l’entrée de la remise pendant qu’il jouait avec le couteau. Il l’a vu manier un seul couteau. M. Stanley ne l’a pas pointé vers qui que ce soit et ne l’a pas dégainé complètement. M. Kidd s’est senti soulagé lorsque le groupe est sorti de la remise. À la fin de la journée, MM. Smith et Kidd ont discuté entre eux de l’incident du couteau, mais n’en ont rien dit officiellement. M. Kidd ne l’a pas mentionné à son superviseur et n’a pas rédigé de plainte parce qu’il « voulait surtout en finir avec l’enquête ».

M. Kidd était également présent le 21 avril 1994. Ses souvenirs des événements de la journée sont décrits ci-après. Les entrevues avec MM. Stanley, Spears et Mahood devaient avoir lieu à 11 heures. Ils étaient représentés par MM. Neals et Hockaday. Les cinq hommes (MM. Stanley, Spears, Mahood, Neals et Hockaday) sont arrivés à 11 h 15. M. Gadd avait toutefois été retardé. M. Kidd a vu les membres du groupe stationner leurs voitures et se diriger vers le « lieu de l’entrevue ». Après avoir été informé par M. Smith que M. Gadd avait été retardé, le groupe est reparti. M. Kidd a confirmé le récit de M. Smith selon qui M. Spears, à une dizaine ou une quinzaine de pieds plus loin, aurait dit : « Ils ne sont même pas foutus d’organiser une cr.... de réunion. » M. Kidd a regardé le groupe traverser le stationnement. À mi-chemin environ, M. Stanley a ralenti le pas pendant que les quatre autres ont continué de marcher. Il s’est arrêté et a dévisagé MM. Kidd et Smith pendant une trentaine de secondes. M. Kidd a indiqué qu’il était très évident qu’il les regardait d’un air furieux. Il n’y avait rien dans le champ de vision de M. Kidd qui l’empêchait de voir M. Stanley.

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Decision Page 11 Puis, M. Stanley a fait quelques pas de plus, s’est arrêté une deuxième fois et s’est retourné. À ce moment-là, il se trouvait à quelque 180 ou 210 pieds du balcon se tenaient MM. Smith et Kidd. Il a alors fait semblant de pointer une carabine. M. Kidd a déclaré que le geste était manifestement celui de quelqu’un qui fait semblant de pointer une carabine. M. Stanley s’est servi de ses deux mains. Il était seul. M. Kidd ne pouvait se souvenir lequel des bras de M. Stanley avait étendu, mais il se souvient clairement l’avoir vu lever les deux bras, l’un étendu, l’autre comme s’il s’apprêtait à « appuyer sur une détente ». D’après M. Kidd, M. Stanley est resté dans cette position pendant environ cinq secondes.

M. Kidd a affirmé que le geste n’avait pas été provoqué par lui ou par M. Smith puisque ni l’un ni l’autre n’avait adressé la parole à M. Stanley ou l’avait interpelé. Ils étaient debout l’un à côté de l’autre et regardaient M. Stanley. S’ils se parlaient, c’était à voix très basse. De plus, M. Kidd n’a vu personne à côté ou près de M. Stanley au moment celui-ci a fait le geste en question. Les quatre autres membres du groupe se trouvaient quelque 30 ou 40 pieds plus loin et se dirigeaient vers leurs véhicules. Après avoir été témoins du geste, MM. Smith et Kidd n’ont rien dit à M. Stanley. Ils ne lui ont pas parlé et ne l’ont pas interpellé. Toutefois, M. Smith a effectivement demandé à M. Kidd s’il avait vu le geste : « As-tu vu ça, regarde-moi ça ». Lorsque M. Stanley a fait le geste, M. Kidd s’est senti gagné un tant soit peu par l’inquiétude et la colère.

Selon M. Kidd, M. Gadd est arrivé au Otonabee Inn à 11 h 30. Au début de l’après-midi, MM. Kidd, Smith et Gadd ont rencontré les deux représentants syndicaux (M. Doug Neals et M. Arnie Hockaday) et, vu que l’agent négociateur insistait pour qu’il y ait un compte rendu des entrevues, on a demandé à M me Donna Perry d’agir comme secrétaire. D’après M. Kidd, les entrevues devaient commencer vers 13 heures ce jour-là. Le porte-parole du comité d’enquête était M. Gadd ou M. Smith. M. Stanley devait être interviewé en premier. Il était contrarié et en colère parce que sa demande de congé avait été annulée. Il lançait des regards furieux aux trois membres du comité. Ceux-ci l’ont invité à quelques reprises à s’asseoir mais il a refusé. M. Stanley a demandé qui avait annulé son congé. M. Kidd a répondu que c’était lui. M. Stanley s’est lancé dans un long « sermon fielleux ». Celui-ci a mentionné qu’il croyait avoir « fait une déclaration à M. Gadd » sous le sceau de la confidence. Il a aussi accusé le comité de se prendre pour la Gestapo et a traité M. Kerr de menteur. Pendant cet accès

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Decision Page 12 de colère, les trois membres du comité étaient assis à la table en face de M. Stanley qui est resté debout et qui les regardait d’un air furieux.

M. Kidd a déclaré qu’avant cette rencontre, les membres du comité avaient eu de la difficulté à organiser les entrevues et les rencontres parce que M. Gadd venait de Cornwall. Le mardi précédent, soit le 19 avril 1994, M. Kerr avait téléphoné à M. Kidd pour lui dire que M. Stanley avait demandé congé les 21 et 22 avril 1994. Le lendemain, soit le mercredi 20 avril, M. Kidd a voulu discuter de la demande de congé avec M. Stanley. Il lui a demandé pourquoi il voulait prendre congé. Vu que celui-ci ne répondait pas, il lui a demandé s’il allait rencontrer le comité le lendemain, soit le jeudi 21 avril 1994. Encore une fois, M. Stanley n’a pas répondu. M. Kidd a déclaré qu’il n’avait pas approuvé le congé parce que M. Stanley ne lui avait pas dit pourquoi il l’avait demandé. De plus, le comité avait tenu des entrevues en janvier 1994 et les personnes qui avaient été convoquées avaient demandé que les questions soient par écrit et avaient « refusé de répondre à des questions orales sur les conseils de leurs avocats ».

Le 21 avril 1994, M. Stanley a dit à MM. Kidd, Smith et Gadd qu’il voulait prendre congé pour « assister à la célébration eucharistique de sa fille ». M. Stanley a indiqué qu’il était très important pour lui et sa famille d’assister à cette célébration. Pendant qu’il parlait, il pointait du doigt chacun des membres du comité. Lorsqu’il s’est trouvé à six pouces du visage de M. Kidd, il a dit : « Ne nuisez pas à ma famille ». C’est à ce moment-là que M. Gadd a demandé à MM. Hockaday et Neals d’emmener M. Stanley hors de la pièce. M. Kidd a ajouté que le comité voulait terminer l’enquête et, comme M. Stanley était contrarié, quelqu’un a suggéré qu’on le fasse sortir. Le comité a discuté de la façon dont il devrait procéder pour poursuivre les entrevues. On a décidé d’interviewer M. Spears et de rappeler ensuite M. Stanley.

L’entrevue avec M. Spears a duré deux bonnes heures et lorsque M. Stanley est revenu dans la pièce, il a répondu aux questions du comité. Il est toutefois resté debout pendant toute la durée de l’entrevue. Il n’a pas été fait mention du geste posé plus tôt (avoir fait semblant de pointer une carabine). M. Kidd a expliqué que personne n’a posé de question au sujet de ce geste parce que « lui-même et M. Smith voulaient maintenir le calme ».

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Decision Page 13 En mai 1994, le comité a rédigé un rapport à l’issue de son enquête. De plus, M e Jean-Maurice Cantin a interrogé M. Kidd le 18 août 1994 et a remis son rapport le 5 octobre 1994.

La preuve du fonctionnaire s’estimant lésé concernant les prétendus incidents M. Douglas Neals a déclaré qu’il était le vice-président de la section locale 00056 en 1994 et qu’il connaissait M. Stanley depuis huit ans au moment se sont produits les incidents en mars et avril 1994.

En mars et avril 1994, M. Neals a représenté M. Stanley durant l’enquête de l’affaire Hoy. Il était présent le 16 mars 1994 lorsque M. Hoy a reçu sa lettre de suspension et qu’il a remis ses clés à l’employeur. MM. Smith et Kidd ont ensuite demandé à M. Stanley, à titre de superviseur de M. Hoy, de vider la remise des plongeurs après que M. Hoy eut vidé son casier personnel en présence de M. Neals. Puis MM. Smith, Kidd, Neals et Stanley sont allés prendre le matériel de plongée de l’employeur qui avait été prêté à M. Hoy. Ce matériel était entreposé dans la remise, qui mesure 4 pi sur 8 pi. M. Stanley a fait le tri du matériel. Il était seul à l’intérieur de la remise. Une partie du matériel de plongée était accroché aux murs et les bouteilles étaient sur le plancher tandis que le harnais, les palmes, les régulateurs, les couteaux, etc. étaient dans des caisses. Ces caisses servent au transport du matériel par camion jusqu’au lieu de plongée. M. Stanley a travaillé dans la remise ou le casier il a fait le tri du matériel selon le numéro d’identification inscrit sur chaque article. Il se trouvait à cinq pieds de l’entrée de la remise, sur la droite l’on gardait les caisses. M. Neals se tenait dans l’encadrement de la porte, une partie du corps à l’intérieur et l’autre à l’extérieur. L’encadrement de la porte mesure de 30 à 36 pouces de largeur. L’identification du matériel a duré de huit à dix minutes. Les « couteaux de plongée » faisaient partie du matériel.

Selon M. Neals, M. Stanley a manié trois couteaux. Il a vu ce dernier les tenir à l’horizontale, les dégainer jusqu’à mi-lame, lire le numéro d’identification inscrit sur la lame, examiner celle-ci puis les rengainer complètement. M. Stanley a replacé deux des couteaux dans la caisse et a remis le troisième à M. Neals parce que c’était celui que l’employeur avait prêté à M. Hoy. M. Neals l’a ensuite remis à M. Smith. Il s’agissait de trois couteaux semblables, de style identique, qui étaient gardés dans des gaines en caoutchouc noir.

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Decision Page 14 M. Neals a fait remarquer que la situation était tendue, passablement grave et empreinte de sérieux. M. Hoy venait d’être suspendu en attendant d’être congédié. M. Stanley n’a pas remis le matériel directement à MM. Smith ou Kidd. Tout le matériel est d’abord remis à M. Neals. On parlait peu. M. Neals a reconnu qu’il ne pouvait prêter attention à 100 p. 100 à ce que faisait M. Stanley puisqu’il lui arrivait d’avoir à lui tourner le dos. Il a ajouté qu’il est possible que MM. Kidd et Smith aient vu M. Stanley faire un geste menaçant avec un des couteaux à son insu. M. Neals a ajouté que rien dans le comportement de M. Stanley ce jour-là ne l’avait mis mal à l’aise. De plus, MM. Kidd et Smith n’ont rien dit au sujet du comportement de M. Stanley et n’ont pas mentionné que « quelque chose les avait inquiétés ». Très peu de paroles ont été échangées durant le tri du matériel de plongée.

La première fois que M. Neals a entendu parler d’un incident qui se serait produit le 16 mars 1994 fut lorsque M e Cantin a interviewé M. Smith. Après l’entrevue, M e Cantin a écrit à M. Stanley pour lui faire part des allégations de M. Smith concernant l’incident du couteau et le geste de tirer à la carabine. M e Cantin a demandé à M. Stanley de lui donner sa version des faits et de répondre aux allégations de harcèlement.

En ce qui concerne les événements du 21 avril 1994, M. Neals a fait les déclarations suivantes. MM. Stanley, Spears et Mahood devaient être interviewés à 11 heures ou 11 h 30 ce jour-là dans une pièce du Otonabee Inn. M. Neals et M. Hockaday étaient présents à titre de représentants syndicaux. Ils se sont rendus au Otonabee Inn dans leur voiture respective. MM. Stanley, Spears et Mahood sont arrivés ensemble dans un véhicule appartenant à l’employeur. L’ordre des entrevues n’était pas encore connu lorsque les cinq hommes sont arrivés à l’hôtel. Ces derniers ont traversé le stationnement et ont emprunté les escaliers menant au deuxième étage les entrevues devaient avoir lieu. MM. Smith et Kidd les ont accueillis en haut de l’escalier près de la porte d’entrée non loin de la pièce ils étaient attendus. Le groupe s’est fait dire que M. Gadd n’était pas là, et M. Spears a lancé « ils ne seraient même pas capables d’organiser un pique-nique sans nourriture ». M. Neals n’a pas entendu de jurons. De plus, M. Stanley n’a rien dit à ce moment-là. M. Spears n’a pas dit « cr.... » ni « cr... de réunion ». D’après M. Neals, M. Spears a un très bon sens de l’humour. Il a ajouté qu’il se souvenait très bien de sa boutade. MM. Smith et Kidd ont dit à M. Hockaday de retourner travailler l’atelier des mécaniciens de la rue Ahsburn

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Decision Page 15 à Peterborough) et aux trois autres (MM. Stanley, Spears et Mahood) de se rendre à leur lieu de travail habituel. Ils ont indiqué à M. Hockaday qu’ils lui téléphoneraient pour lui dire à quelle heure se tiendraient les entrevues et pour lui demander d’informer les trois autres. M. Neals était en congé et il a décidé de rester et d’attendre avec M. Hockaday.

M. Neals a déclaré que MM. Smith et Kidd ne leur ont jamais dit de revenir dans 15 minutes. Les instructions étaient de retourner travailler et d’attendre d’autres instructions. Dès que MM. Spears, Mahood et Stanley ont entendu MM. Smith et Kidd dire qu’il n’y avait pas de réunion, ils ont descendu l’escalier et ont attendu MM. Neals et Hockaday. Ceux-ci ont continué de discuter avec MM. Smith et Kidd puis sont descendus. Les cinq hommes ont commencé à traverser le stationnement pour se rendre à leur véhicule respectif. Ils bavardaient normalement. MM. Neals, Hockaday et Mahood marchaient quelque dix pieds devant MM. Spears et Stanley. Il leur a fallu de quarante à cinquante secondes pour se rendre à leur véhicule. Pendant qu’il marchait, M. Neals n’a pas regardé M. Spears ou M. Stanley. Il a déclaré que, lorsqu’il est arrivé à son véhicule, MM. Spears et Stanley étaient juste derrière lui toujours à une dizaine de pieds. Il n’a pas été obligé de les attendre. Il a ajouté qu’il était impossible que M. Mahood ait été obligé d’attendre MM. Stanley et Spears pendant 30 secondes puisqu’il ne fallait que 40 à 50 secondes pour traverser le stationnement. M. Neals a chronométré le trajet durant la soirée du 27 janvier 1997.

Après le déjeuner, M. Hockaday a informé M. Neals que les entrevues allaient avoir lieu à 13 h 30 et tous les deux sont allés le dire aux trois autres. La question du compte rendu des entrevues n’avait pas été soulevée ce matin-là, mais elle l’a été à 13 h30, lorsque les cinq hommes sont retournés au Otonabee Inn. On a rejoint M m e Perry qui travaillait à deux milles de l’hôtel. M. Neals a déclaré qu’il avait été déçu en apprenant à 11 heures que M. Gadd était absent et que les entrevues avaient été annulées ce matin-là. Toutefois, il n’a pas remarqué l’état d’esprit de M. Stanley. Celui-ci n’a passé aucun commentaire selon lui. Il n’est pas du genre à perdre son sang-froid bien qu’il s’anime lorsqu’il parle. Il gesticule des bras et des mains et se penche vers son interlocuteur pour bien se faire comprendre.

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Decision Page 16 M. Roy Spears a déclaré qu’il travaillait en qualité de réparateur au sein de l’équipe d’entretien (MAN-6) et qu’il relevait de M. Stanley. Il était également le délégué syndical en chef de la section locale 00056. Il en était le président au moment de l’audition du présent grief. MM. Stanley et Spears sont bons amis depuis six ou sept ans. M. Spears a déclaré qu’il est un ami loyal. MM. Stanley et Hoy sont également de bons amis. M. Spears a confirmé le témoignage de M. Neals au sujet des événements du 21 avril 1994. Il a expliqué qu’il est malentendant et que certains sons lui échappent. Il s’est souvenu que M. Smith avait expliqué aux cinq hommes que le comité n’était pas prêt à commencer la réunion prévue pour 11 heures parce que M. Gadd n’était pas disponible et qu’« ils » communiqueraient avec M. Hockaday pour leur (le groupe des cinq) laisser savoir l’heure de la réunion. M. Smith a dit aux hommes de retourner travailler. M. Spears est donc retourné à l’écluse-ascenseur de Peterborough avec MM. Stanley et Mahood et ils ont repris leur travail. M. Spears est arrivé à l’hôtel dans le même véhicule que MM. Stanley et Mahood. C’est M. Stanley qui conduisait.

Lorsque M. Smith a dit au groupe que la réunion était reportée et que M. Hockaday informerait les autres de l’heure à laquelle elle aurait lieu, M. Spears a déclaré qu’il avait dit en passant : « Ils ne seraient même pas capables d’organiser un pique-nique sans nourriture », et que personne n’avait réagi à son commentaire. Il a soutenu avec vigueur qu’il n’avait pas blasphémé et qu’il ne visait personne en particulier par son commentaire. Ensuite, lui-même et MM. Stanley et Mahood ont descendu l’escalier et ont attendu MM. Hockaday et Neals en bas.

En ce qui concerne le prétendu geste, le témoignage de M. Spears a été le suivant. Une fois réunis au pied de l’escalier, les cinq hommes sont sortis de l’hôtel. MM. Stanley et Spears fermaient la marche. M. Stanley marchait à droite de M. Spears. Les trois autres hommes les précédaient de deux ou trois pas. M. Spears a entendu M. Smith parler. Il a eu l’« impression » que celui-ci parlait de lui et du groupe. Il était fermement convaincu d’avoir entendu M. Smith dont la voix est très particulière. M. Smith se trouvait de neuf à dix pieds environ au-dessus de M. Spears. Il était sur le balcon avec M. Kidd, à une quinzaine ou une vingtaine de pieds du groupe.

M. Spears ne comprenait pas ce que disait M. Smith mais il entendait des voix. Il avait « la nette impression » qu’il disait quelque chose de « négatif ». Son

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Decision Page 17 « intuition » le lui disait. Il a ajouté qu’il se « savait » fixé du regard et que M. Smith avait les yeux rivés sur le groupe. M. Smith a un timbre de voix plus grave que M. Kidd. M. Spears était sûr d’avoir entendu M. Smith et que celui-ci n’utilisait pas son ton de « gentleman »; ce n’était pas sur un ton amical. Il a perçu du sarcasme et a eu l’« impression » que M. Smith le provoquait à cause de sa remarque antérieure. Lui et M. Stanley ont toutefois continué de marcher l’un à côté de l’autre. M. Spears a ajouté qu’ils ne s’étaient pas arrêtés en entendant les « voix ». Selon M. Spears, M. Stanley, sans s’arrêter, s’est retourné vers M. Smith en faisant un geste général et en déclarant : « As-tu entendu ce qu’il vient de dire », et M. Spears avait répondu : « Ouais, c’est ça le problème ici ».

M. Spears a soutenu avec vigueur que M. Stanley avait peut-être ralenti sa marche, mais qu’il ne s’était jamais arrêté. Il l’a vu utiliser sa main gauche lorsqu’il a montré le balcon. M. Stanley a simplement levé le bras gauche et n’a levé qu’un bras tout le temps qu’ils ont marché. M. Spears pouvait voir le visage de M. Stanley lorsque celui-ci a pointé vers le balcon. Il a ajouté qu’il pouvait voir ses deux mains lorsqu’il a fait le prétendu geste. (Toutefois, d’après une démonstration faite par le fonctionnaire s’estimant lésé, il était impossible que M. Spears puisse voir la main et le bras droit de M. Stanley.) M. Spears a regardé en direction du balcon que M. Stanley montrait de la main gauche. Selon M. Spears, la main droite de M. Stanley est demeurée le long de son corps. Il était certain que M. Stanley n’avait pas fait le geste de « pointer une carabine ». MM. Spears et Stanley sont toujours restés deux ou trois pas derrière MM. Neals, Hockaday et Mahood. La distance entre eux n’a jamais augmenté. Toutefois, M. Mahood, qui marche vite, précédait MM. Neals et Hockaday et il s’est dirigé directement vers le véhicule dans lequel il était arrivé. Lorsque MM. Spears et Stanley sont arrivés, M. Mahood était avait déjà pris place dans le camion.

M. Spears a confirmé le fait que le groupe était retourné travailler. MM. Spears, Stanley et Mahood travaillaient au pied des écluses-ascenseurs et n’avaient pas de téléphone de telle sorte que M. Hockaday est allé leur dire que la réunion reprendrait à 13 h 30.

À 13 h30, MM. Spears, Stanley et Mahood sont retournés au Otonabee Inn. MM. Hockaday et Neals s’y trouvaient déjà; ils ont rencontré le comité pendant que les trois autres hommes attendaient dans le camion. Quelques minutes plus tard,

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Decision Page 18 MM. Neals et Hockaday sont revenus leur expliquer qu’ils avaient demandé la présence d’une secrétaire pour prendre le compte rendu de l’entrevue. Peu après, M m e Perry est arrivée dans son propre véhicule. M. Stanley est ensuite entré quelques minutes dans la pièce le comité était réuni. Il a été suivi de M. Spears qui a été interviewé pendant assez longtemps. M. Spears a quitté l’hôtel à la fin de son entrevue. Il a déclaré qu’il « savait » que M. Hoy avait obtenu la permission de prendre les « poutrelles d’arrêt » et que M. Stanley ne l’avait pas aidé à prendre ces poutrelles.

M e Peter Hajecek, avocat de l’employeur, a remis en question le témoignage de M. Spears. Il a invoqué la déclaration qu’il avait faite à M e Jean-Maurice Cantin et qu’il avait signée le 18 août 1994 (pièce 6). Dans cette déclaration, M. Spears avait affirmé que c’était M. Stanley qui avait dit : « c’est ça le problème ici » alors que dans son témoignage en l’espèce il a déclaré que c’était lui. De plus, annexé à sa déclaration signée (pièce 6) se trouve un croquis sur lequel est indiqué l’endroit M. Stanley avait fait le geste de « pointer ». Ce n’était pas l’endroit exact. Lors de son témoignage à l’audience du présent grief, M. Spears a corrigé son erreur et a indiqué l’endroit exact le geste avait été fait, soit le même endroit indiqué par tous les témoins. M. Spears a précisé que s’il avait fait une déclaration erronée et avait mal indiqué l’endroit le geste de « pointer » avait été fait, c’est parce qu’il agissait sous la contrainte et qu’il était contrarié lorsque M e Cantin l’avait interviewé. L’entrevue du 18 août 1994 avait été stressante à cause d’un désaccord entre M. Spears et M e Cantin au sujet du droit de M. Spears d’exiger la présence de son représentant syndical à cette entrevue. M e Cantin ne voulait pas que le représentant syndical de M. Spears soit présent. L’entrevue a eu lieu et M e Cantin a demandé à M. Spears de signer une déclaration (pièce 6). Celui-ci a déclaré qu’il s’était trompé ce jour-là au sujet de l’emplacement des fleurs sur le croquis et sur qui avait dit quoi au moment le geste avait été fait. Il a expliqué qu’il avait assisté à quantité de réunions à l’époque concernant l’affaire Hoy et qu’il avait l’impression que « personne n’écoutait ».

M. Spears a ajouté qu’il avait effectivement refusé de rencontrer M faire une déclaration, mais que M. Rick Szabunia, le surintendant, l’avait menacé d’une sanction disciplinaire s’il ne le faisait pas. M déclaration en lui laissant croire qu’il s’agissait d’une simple formalité. M parlé de coopération de sorte que dans son désarroi, il a signé la déclaration. M. Spears a déclaré qu’il s’était senti intimidé et que M Commission des relations de travail dans la fonction publique

e Cantin et de e Cantin lui a ordonné de signer la e Cantin lui a e Cantin ne lui avait pas laissé le choix.

Decision M. Arnie Hockaday a déclaré qu’il connaissait M directeur des ressources humaines, M. Doug Johnstone. M membre de la section locale 00056 dont M. Hockaday était le président. Elle agissait aussi en guise de secrétaire aux réunions syndicales-patronales. M. Hockaday avait demandé qu’elle assiste aux entrevues du 21 avril 1994 à cause d’écarts survenus par le passé entre ce qui avait été dit aux réunions et aux entrevues. Il avait présenté sa demande le 7 avril 1994 ou aux environs de cette date à M. John Bonser qui, à l’époque, était le directeur exécutif régional par intérim.

L’agent négociateur ne voulait pas avoir de problèmes au sujet des déclarations qui seraient faites durant les entrevues vu l’importance des questions en cause. M. Hockaday avait été informé que M me Perry serait présente le 21 avril 1994, mais lorsque le groupe est arrivé à 11 heures, ce n’était pas le cas. Il n’a pas été question d’elle à 11 heures à cause de l’absence de M. Gadd, mais la question a été soulevée à 13 h 30.

M. Hockaday a corroboré les témoignages de MM. Neals et Spears en ce qui concerne la présence de M m e Perry le 21 avril 1994 et la convocation de la réunion pour 13 h 30. Il a déclaré qu’il était celui qui avait dit à MM. Smith et Kidd à 11 heures que M. Stanley avait une équipe à l’écluse-ascenseur, que les déjeuners se trouvaient dans son camion et que M. Stanley devait aller les leur porter. Il a demandé à MM. Smith et Kidd de l’appeler à l’atelier pour l’informer de l’heure des entrevues pour qu’il puisse en informer MM. Stanley, Spears et Mahood à l’écluse-ascenseur.

Vers l’heure du déjeuner, M. Hockaday a reçu un appel. Lui et M. Neals se sont rendus à l’écluse pour informer les trois autres. M. Hockaday s’est rendu seul au Otonabee Inn il est arrivé à 13 h 20. Il a remarqué que M me Perry n’était pas là, puis il a vu M. Neals arriver. Lui et M. Neals sont montés à la salle de réunion et ont demandé à M. Gadd était la secrétaire. Celui-ci a répondu que les services de cette dernière n’étaient pas nécessaires. M. Hockaday a toutefois insisté. Il a dit à M. Gadd qu’« ils » (le groupe de cinq hommes) étaient à la réunion parce qu’ils étaient payés pour y être mais qu’ils n’avaient rien à dire. M. Gadd leur a demandé de sortir, et MM. Hockaday et Neals se sont pliés à cette requête et ont attendu à l’extérieur. M. Gadd les a ensuite rappelés et leur a dit que M me Perry serait sous peu. Celle-ci est Commission des relations de travail dans la fonction publique

Page 19 me Donna Perry, la secrétaire du m e Perry était également

Decision Page 20 arrivée et à pris des notes comme prévu. Ce jour-là, M. Hockaday était le représentant syndical de M. Mahood tandis que M. Stanley était représenté par M. Neals.

En ce qui concerne le geste de M. Stanley, M. Hockaday a déclaré que lorsque le groupe s’est fait dire à 11 h 30 que la réunion était annulée, M. Spears a passé un commentaire il était question de « pique-nique » et de « nourriture ». À ce qu’il sache, M. Spears n’a pas lancé de jurons. Ensuite, MM. Stanley, Spears et Mahood sont partis et ont descendu l’escalier. MM. Hockaday et Neals les ont rejoints en bas et les cinq se sont dirigés vers leur véhicule respectif. MM. Stanley et Spears marchaient à environ une longueur de bras derrière MM. Hockaday et Neals. D’après M. Hockaday, les cinq hommes se suivaient tous de près. MM. Hockaday, Neals et Mahood parlaient entre eux tout comme MM. Stanley et Spears. À un moment donné, M. Hockaday a entendu des voix et quelqu’un a passé un commentaire derrière lui; il s’est retourné et a aperçu MM. Smith et Kidd sur le balcon. Il n’a fait que les entrevoir à cause des arbres qui lui obstruaient la vue. Il ne s’est pas arrêté pour les regarder. Pendant ce temps M. Mahood marchait un peu derrière lui à sa gauche. Lorsque M. Mahood est arrivé à proximité des véhicules, « il précédait quelque peu MM. Hockaday et Neals ». Le premier véhicule était celui de M. Neals. Lorsque M. Hockaday est arrivé au véhicule de M. Neals, M. Mahood le précédait d’une dizaine de pieds et était rendu au véhicule dans lequel il était venu, tandis que MM. Spears et Stanley se trouvaient dix pieds derrière. Les cinq hommes étaient toutefois à une distance leur permettant de se parler. M. Hockaday a déclaré que M. Stanley ne s’était pas arrêté, à sa connaissance, pendant que le groupe traversait le stationnement.

L’après-midi du 21 avril, après avoir passé une vingtaine de minutes dans la pièce, M. Stanley et M. Neals sont sortis et ont rejoint M. Hockaday qui les attendait dans son véhicule en compagnie de M. Mahood. M. Neals a dit à M. Hockaday que M. Gadd voulait le voir. MM. Hockaday et Neals sont donc retournés dans la pièce. M. Gadd leur a dit que « M. Stanley ne voulait pas coopérer et que le comité s’était senti menacé par son comportement, plus particulièrement par sa façon de pointer du doigt et ses paroles ». M. Gadd a enjoint M. Hockaday de « parler à M. Stanley et de lui expliquer que s’il se calmait et voulait aider son copain aucune mesure disciplinaire ne serait prise contre lui, mais qu’il s’en fallait de peu ».

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Decision Page 21 Dans l’esprit de M. Hockaday, cette promesse valait pour la réunion de 13 h 30. Il savait que M. Stanley avait lui aussi été déçu par l’annulation de son congé. À son avis, M. Stanley avait été contrarié toute la journée. L’employeur a communiqué avec M. Hockaday pour la première fois au sujet du prétendu incident du 21 avril beaucoup plus tard; plusieurs mois s’étaient écoulés et l’agent négociateur ne s’attendait pas à ce que l’incident en question donne lieu à une mesure disciplinaire compte tenu de la promesse de M. Gadd.

M. Roger Stanley, le fonctionnaire s’estimant lésé, a décrit ses souvenirs des événements des 16 mars et 21 avril 1994 de la façon suivante. Il a indiqué qu’il avait d’abord été embauché par Parcs Canada pour une période déterminée pour faire du travail d’entretien en 1986. En 1987, il avait accepté un poste d’une durée indéterminée et, depuis 1988, il occupait le poste de chef de l’équipe d’entretien (GLT MAN-8-B-2) du chantier de Lakefield (situé au nord de Peterborough). Il relevait de M. Bob Kerr jusqu’en décembre 1995. Son rendement était coté supérieur pour ce qui est de ses relations interpersonnelles avec ses collègues et ses supérieurs. De plus, avant janvier 1995, il avait un dossier disciplinaire vierge.

M. Stanley a déclaré que lui et M. Hoy s’étaient liés d’amitié sept ans auparavant et qu’ils étaient de bons amis. Il est un ami loyal. Il a ajouté que M. Hoy avait obtenu la permission de prendre les « poutrelles d’arrêt ». Il croit également que M. Hoy est totalement innocent. D’après lui, l’enquête au sujet de M. Hoy a été une perte de temps total.

Par conséquent, l’atmosphère était tendue le 16 mars 1994. M. Stanley avait demandé que M. Neals soit présent parce qu’il voulait avoir un témoin. Il se sentait inquiet parce que MM. Smith et Kidd n’avaient pas de liste détaillée du matériel. Il était contrarié, mais il n’était pas en colère. Son sentiment de contrariété provenait du fait que M. Hoy avait reçu sa lettre de suspension dix minutes avant le tri du matériel. Il ne pouvait pas croire que MM. Smith et Kidd avaient suspendu M. Hoy compte tenu de la preuve que lui-même et d’autres avaient fournie. Il a nié avoir fait quoi que ce soit de mal en ce qui concerne les deux prétendus incidents.

M. Stanley a déclaré qu’il n’avait fallu que dix minutes le 16 mars 1994 pour remettre le matériel à M. Smith. Il était seul à l’intérieur de la remise (la cabane ou le hangar). En aucun moment, n’est-il sorti pendant qu’il effectuait le tri. Il y avait trois

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Decision Page 22 couteaux de plongée. Ceux-ci étaient accrochés au mur juste au-dessus des caisses servant au transport du matériel. Les couteaux qui étaient dans leur gaine, mesurent une dizaine de pouces. M. Stanley s’est souvenu que les couteaux avaient été l’avant-dernière chose à être retirée de la remise le 16 mars 1994 (le dernier article avait été la combinaison de M. Hoy). D’après M. Stanley, il a manié les couteaux pendant environ 40 secondes chacun (en tout cas moins d’une minute). Il a nié avoir transféré le couteau (ou les couteaux) d’une main à l’autre. Il a toutefois sorti partiellement deux des coûteaux de leur gaine pour voir le numéro d’identification. Ayant constaté que l’un d’eux appartenait à M. Hoy et que l’autre lui appartenait, il n’a pas eu à examiner le troisième qui appartenait à l’employeur et il l’a remis à M. Neals. Il a déclaré qu’il n’avait fait aucun geste vers M. Smith. Il était occupé à trier le matériel. Il n’a prêté aucune attention à MM. Smith et Kidd et il n’a rien fait pour les mettre mal à l’aise. De plus, il n’a rien remarqué qui aurait pu l’amener à croire que MM. Stanley et Kidd étaient mal à l’aise. Il a ajouté que les couteaux de plongée ne sont pas aiguisés; en réalité ce sont des outils à bout plat.

Le prétendu incident du couteau a été porté à l’attention de M. Stanley en août 1994. De plus, même en mai ou en juin 1994, quand M. Kerr a remis à M. Stanley une copie de la plainte de M. Smith, datée du 22 avril 1994 (pièce 4), aucune mention n’a été faite du prétendu incident du couteau remontant au 16 mars.

M. Stanley a fait le récit d’un incident survenu entre lui et M. Smith le 31 mars 1994 au cours duquel il n’a pas été question du « prétendu » incident du 16 mars ou des craintes et de l’intimidation ressenties par M. Smith. Le 31 mars 1994 était le dernier jour de travail de M. Smith comme superviseur. M. Stanley l’a rencontré dans le stationnement au travail et lui a dit qu’il n’avait pas aimé la façon dont il s’était occupé de l’affaire Hoy et qu’il avait des preuves irréfutables de l’innocence de M. Hoy. Il lui a dit qu’il (M. Smith) pouvait encore rectifier la situation et que s’il était l’homme de la situation il ferait quelque chose. M. Smith lui a répondu qu’il ne pouvait plus rien faire, qu’il avait les mains liées. Il s’est mis à pleurer, M. Stanley est alors remonté dans son camion et s’est rendu à l’écluse-ascenseur. Il a expliqué qu’il est du genre à dire ce qu’il pense et à confronter les gens lorsqu’il le faut et que c’est de cette façon qu’il avait agi avec M. Smith. En route vers l’écluse, il s’est arrêté à mi-chemin pour s’acheter un Pepsi-Cola chez un dépanneur. À sa sortie du dépanneur, il a aperçu M. Smith qui l’attendait dans un camion arrêté devant le sien. M. Smith lui a dit qu’il

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Decision Page 23 était extrêmement désolé pour tout ce qui s’était passé et qu’il trouvait très dommage que leurs rapports en soient rendus là. M. Stanley a répété qu’il (M. Smith) pouvait réparer le tort causé à M. Hoy. M. Smith lui a offert de lui serrer la main (ce qu’ils ont fait) et lui a souhaité bonne chance. Au cours de cette conversation, aucune mention n’a été faite du prétendu incident du 16 mars ou de l’intimidation et des craintes qu’aurait ressenties M. Smith. M. Stanley a déclaré qu’il n’avait pas essayé d’influencer ou d’intimider M. Smith. M. Stanley n’a pas revu M. Smith avant le 21 avril 1994.

M. Stanley a affirmé ce qui suit au sujet du prétendu incident du 21 avril. M. Kerr a indiqué à M. Stanley qu’il allait devoir se présenter devant le comité. Initialement, la rencontre devait avoir lieu le 20 avril 1994. Toutefois, M. Stanley avait déjà demandé un congé ce jour-là et M. Kerr le lui avait accordé. M. Stanley avait demandé un congé annuel pour des raisons personnelles. Son fils aîné, âgé de sept ans, devait recevoir sa première communion. Par conséquent, M. Stanley avait projeté de l’emmener à l’église de la paroisse pour discuter avec lui du sens de la première communion. Il voulait faire avec son fils ce que sa mère avait fait avec lui. Le 20 avril 1994 tombait un mercredi. Toutefois, à la fin de la journée de travail le lundi 18 avril 1994, M. Kerr lui a dit que le comité voulait l’interviewer le 20 avril et que c’est le motif pour lequel son congé avait été annulé. Il a donc demandé de reporter le congé au 21 avril 1994. Puis, à 16 h 15 le mardi 19 avril 1994, M. Kerr l’a informé qu’étant donné que l’entrevue du 20 avril avait été reportée au 21, son congé pour ce jour-là avait été annulé. M. Stanley s’en est plaint. Il a demandé à M. Kerr qui avait annulé son congé. Celui-ci a répondu que c’était « Peterborough » sans toutefois préciser qui avait pris la décision. M. Kerr a offert de téléphoner. Cinq minutes plus tard, soit vers 16 h 30, M. Kerr est revenu et a dit à M. Stanley qu’il pourrait être interviewé dans la matinée du 21 et prendre l’après-midi de congé. M. Kerr a ajouté que l’entrevue aurait lieu à 11 heures. (L’heure n’a été changée que le jeudi.) M. Stanley a accepté ce compromis. Il comptait donc pouvoir prendre congé l’après-midi du 21 avril pour retrouver son fils. Il voulait l’aider à se préparer en vue de sa première communion. Il avait projeté de l’emmener déjeuner et de rencontrer le prêtre. Il a toutefois reconnu qu’il n’était pas indispensable que cela se fasse cette semaine-là en particulier. Il n’a pas demandé de congé le 20 avril bien qu’il eût pu le faire le mardi 19 avril 1994. L’employeur n’a pas communiqué avec lui entre le 19 avril et 11 h 15 le matin du 21 avril 1994 pour discuter du congé.

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Decision Page 24 À 11 h 15 le 21 avril 1994, les cinq hommes sont arrivés en haut de l’escalier. M. Stanley se tenait à l’arrière du groupe, mais il pouvait suivre le gros de la conversation. Il n’a pas été impressionné par MM. Kidd et Smith. Il avait le pressentiment qu’ils annuleraient son congé prévu de l’après-midi. Il savait que cela allait se produire, mais il n’était pas encore en colère. Il a expliqué qu’il portait ses bleus de travail et ses bottes Kodiak.

Constatant que la réunion avait été annulée, les trois « témoins » sont repartis. Quelques instants plus tard, MM. Hockaday et Neals les ont rejoints et leur ont dit de retourner travailler, et que M. Hockaday communiquerait avec eux pour leur dire quand la réunion allait avoir lieu. Ils ont commencé à traverser le stationnement. À ce moment-là, M. Stanley a entendu M. Smith dire quelque chose. Il était sûr d’avoir reconnu sa voix. Il croyait que les paroles lui étaient adressées parce qu’il avait entendu le mot « gros » et que M. Smith avait dit : « Gros, cr.... de cultivateur ». Il s’est donc arrêté brièvement, s’est retourné pour regarder dans la direction du balcon, puis a fait demi-tour et a poursuivi sa route, M. Spears à sa gauche. Il a précisé qu’il s’était à arrêté à peine deux secondes. S’il s’était arrêté pendant une trentaine ou une soixantaine de secondes, a-t-il dit, comme l’avait prétendu M. Smith, les autres auraient eu le temps de partir bien avant lui.

M. Stanley a indiqué que lorsqu’il s’est retourné pour regarder dans la direction du balcon, M. Spears se trouvait à sa gauche, « le devançant d’un pas, mais marchant à côté de lui » parce qu’il a de plus longues jambes. M. Stanley a ajouté qu’il n’avait pas eu à presser le pas pour rester aux côtés de M. Spears. Pendant qu’ils marchaient, M. Stanley disait à M. Spears qu’il craignait fort que son congé soit annulé. (Durant cette partie du témoignage de M. Stanley, M. Barry Done, son représentant, a fait remarquer à l’arbitre soussigné à quel point le témoin gesticulait.)

M. Stanley a poursuivi sa description des événements du 21 avril en précisant qu’après avoir fait quelques pas de plus, il avait de nouveau entendu la voix de M. Smith. Il croyait avoir entendu les mêmes paroles. Il s’est donc arrêté, puis il s’est retourné en pointant dans la direction du balcon et en demandant à M. Spears : « As-tu entendu ce qu’il m’a dit? » Il croyait avoir entendu M. Smith dire « gros cultivateur ». M. Spears a répondu : « Non, mais c’est ça le problème avec ces gars-là (ou ici). Viens, partons. » M. Stanley a reconnu que lorsqu’il s’est retourné, M. Spears ne pouvait pas

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Decision Page 25 voir sa main gauche mais que MM. Smith et Kidd, eux, pouvaient voir ses bras et ses mains.

M. Stanley a déclaré qu’il n’avait pas pointer pendant cinq ou dix secondes, car ce n’est pas son style. De plus, il a nié avoir fait semblant « de pointer une carabine ». Il a seulement levé le bras; il en était sûr.

M. Stanley a aussi raconté qu’il était retourné au Otonabee Inn à 13 h 30 le même jour, directement du travail, vêtu de ses vêtements de travail sales. Il ne s’était pas changé parce que rien ne lui laissait croire que la rencontre aurait lieu. En apprenant qu’il n’y avait pas de secrétaire, il a pensé : « Bon, ça recommence! » Il n’a pas demandé qu’on lui accorde deux minutes pour se changer et il s’est présenté devant le comité tel quel. Il était en colère, mais ce n’était pas pour cette raison qu’il avait refusé de s’asseoir, mais parce que ses vêtements étaient souillés. Il était couvert de boue et de graisse. Il portait des bottes-pantalon par-dessus ses bleus de travail qu’il portait par-dessus ses jeans. Il portait aussi un casque protecteur et un gros manteau d’hiver.

Lorsque M. Stanley est entré dans la pièce, MM. Smith, Kidd et Gadd étaient assis à une table, dos à la porte-fenêtre. M m e Perry était assise de l’autre côté. M. Stanley avait de la difficulté à les voir à cause du soleil. La salle était sombre et le soleil était éblouissant. M. Stanley s’est souvenu qu’« ils » lui ont adressé la parole en lui expliquant le motif de l’entrevue et les questions qu’ils allaient lui poser. Il les a cependant interrompus en disant : « Avant de commencer, je veux savoir qui a annulé mon congé. » Comme personne ne répondait, il a reposé sa question, mais « ils » ont de nouveau expliqué le motif de l’entrevue. M. Stanley a toutefois redemandé qui avait annulé son congé. Il est devenu agité parce que personne ne lui répondait. Enfin, M. Kidd a déclaré que c’était lui. M. Stanley a alors répliqué qu’il n’avait pas l’autorité nécessaire pour annuler son congé. (M. Stanley a déclaré que M. Kidd n’était pas son supérieur.) M. Gadd est intervenu en disant : « Voyons, M. Stanley, nous voulons vous parler de cette déclaration écrite... », et il a produit une déclaration écrite que M. Stanley avait remise à M. Hockaday pour qu’il l’envoie sous le sceau de la confidence à M. John Bonser. Dans la déclaration en question, M. Stanley accusait M. Kerr, son superviseur immédiat. M. Stanley avait voulu éviter toutes représailles de la part de M. Kerr et voilà que sa déclaration se trouvait sur la table au vu et au su de

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Decision Page 26 tous. La déclaration ne devait pas aboutir entre les mains du comité. Le but de la déclaration était de prouver l’innocence de M. Hoy à M. Bonser avant la constitution du comité. M. Stanley est alors sorti de la pièce et MM. Hockaday et Neals sont allés le voir. Ils lui ont dit que M. Gadd avait indiqué qu’« il était sur le point de se faire imposer une sanction disciplinaire et que s’il se calmait, qu’il retournait devant le comité et qu’il aidait son copain, aucune mesure disciplinaire ne serait prise contre lui. » M. Stanley a déclaré que MM. Smith et Kidd n’avaient rien dit au sujet du « geste de la carabine » et n’avaient posé aucune question à ce sujet.

M. Stanley a déclaré qu’il s’en tient au témoignage qu’il a donné devant l’arbitre soussignée. Il a vigoureusement maintenu qu’il n’avait pas menacé M. Smith. M e Cantin l’a interviewé le 26 août 1994 (pièce 7) et il a été informé des conclusions de l’enquête en octobre ou novembre 1994.

Arguments M e Peter Hajecek, l’avocat de l’employeur, a fait valoir les arguments suivants. L’affaire doit être tranchée suivant la prépondérance des probabilités. M e Hajecek a également traité de la question du retard et de l’impartialité de la procédure que M. Barry Done, le représentant du fonctionnaire s'estimant lésé avait soulevé. M e Hajecek a soutenu que la question ne se posait pas. M. Smith s’est plaint le 22 avril 1994 de l’incident survenu le 21 avril 1994, et M. Stanley en a été informé dans un délai raisonnable. M e Cantin a mené une enquête et a interviewé le fonctionnaire s'estimant lésé le 26 août 1994 (pièce 7). M. Stanley a été informé des conclusions de l’enquête de M e Cantin en octobre ou novembre 1994 et la lettre l’informant de la mesure disciplinaire a été envoyée le 17 janvier 1995. M. Stanley a reçu une copie du rapport et a eu l’occasion de le réfuter (pièce 1). Par conséquent, il n’y a pas eu de retard ou de manque d’impartialité. M e Hajecek a fait remarquer que la question principale en l’espèce était une question de crédibilité. Il a mentionné que les témoins avaient été exclus et que M. Stanley, qui était présent durant l’audience en arbitrage, avait témoigné le dernier.

M e Hajecek a passé la preuve en revue et a déclaré que le témoignage de M. Spears était crucial pour le fonctionnaire s'estimant lésé. MM. Smith et Kidd ont déclaré que, le 16 mars 1994, ils l’ont vu faire le geste avec le couteau. Toutefois, M. Neals, qui à ce moment-là tournait le dos à M. Stanley, a pu ne pas le voir.

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Decision Page 27 M e Hajecek s’est demandé pourquoi MM. Smith et Kidd inventerait qu’ils s’étaient sentis menacés. En ce qui concerne l’incident du 21 avril, de nouveau MM. Smith et Kidd ont vu M. Stanley faire semblant de pointer une carabine dans leur direction. Le fonctionnaire s'estimant lésé a déclaré qu’il avait simplement lever le bras en direction du balcon, et M. Spears ne pouvait pas voir son autre bras. Par conséquent, il est probable que M. Stanley ait fait le geste. Il a fait semblant de pointer une carabine vers MM. Smith et Kidd. M e Hajecek a invoqué la définition de harcèlement contenue dans la politique du Conseil du Trésor sur le harcèlement au travail (pièce 3) et il a conclu que les deux gestes constituaient du harcèlement et de l’intimidation à l’endroit de M. Smith. À cet égard, M e Hajecek a cité les affaires suivantes : Lefebvre (dossiers de la Commission : 166-2-19990 et 19991); Schigol (dossier de la Commission : 166-2-21774) et Simoneau (dossier de la Commission : 166-2-23462).

L’employeur a imposé une suspension de cinq jours à M. Stanley parce que la société ne tolère plus ce genre de comportement. Par conséquent, la peine est appropriée en l’espèce.

M. Barry Done, le représentant du fonctionnaire s'estimant lésé, a soutenu que l’employeur avait le fardeau de la preuve. Il y a deux points à éclaircir seulement. Est- ce que les incidents des 16 mars et 21 avril 1994 se sont produits comme l’a prétendu l’employeur? En ce qui concerne l’incident du 16 mars l’employeur devait démontrer que le fonctionnaire s'estimant lésé avait sciemment et volontairement menacé M. Smith et qu’il avait fait le geste le 21 avril.

D’après M. Done, l’incident du 16 mars ne peut pas être invoqué puisque M. Smith a lui-même déclaré qu’« il n’y avait pas de raison de donner suite à l’incident parce qu’il lui était paru sans importance à ce moment-là. » M. Smith n’a fait que le mentionner à M. Kidd, et de façon fortuite de surcroît. M. Smith a déclaré qu’il ne s’était pas immédiatement senti menacé par le geste. Par conséquent, l’incident du 16 mars n’était pas grave. De plus, l’employeur a attendu cinq mois avant d’en parler à M. Stanley. Il n’avait donc jamais été prévu que MM. Smith et Kidd donnent suite à ce prétendu incident. M. Smith ne craignait pas le fonctionnaire s'estimant lésé. Il aurait pu téléphoner à la police ou porter l’incident à l’attention de ses supérieurs. Il n’a rien fait parce qu’il n’est rien arrivé ce jour-là. Comme on avait demandé à M. Stanley de faire le tri du matériel de plongée, celui-ci avait examiner les

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Decision Page 28 couteaux de plongée. Il y en avait trois. M. Stanley avait en dégainer au moins deux pour voir le numéro d’identification. Il les a tenus moins de 30 secondes. M. Neals a dit vrai lorsqu’il a déclaré qu’il ne s’était rien passé. De plus, MM. Smith et Kidd se sont contredits. M. Smith a déclaré que M. Stanley avait les yeux rivés sur lui tandis que M. Kidd a affirmé qu’il ne regardait personne en particulier.

M. Done a fait valoir que M. Smith semble être une personne très émotive. Il a pleuré dans le stationnement le 31 mars 1994. Peut-être accordait-il aux incidents des 16 mars et 21 avril 1994 un autre sens que celui qu’ils avaient réellement. Il est peut-être porté à réagir de façon excessive. Il a visité la propriété de M. Hoy mais n’a pas interrogé ce dernier au sujet des « poutrelles d’arrêt ». Il a réagi de façon exagérée ensuite lorsqu’il est allé voir M. Lewis et la PPO au lieu de parler d’abord de l’affaire avec M. Hoy. M. Done a conclu que l’employeur n’avait pas réussi à établir le bien-fondé de ses arguments concernant l’incident du 16 mars 1994.

En ce qui concerne l’incident du 21 avril, M. Done a soutenu que la meilleure preuve réside dans le témoignage de M. Spears. Celui-ci a vu M. Stanley lever le bras. Par ailleurs, MM. Kidd et Smith se sont trompés de beaucoup quant à la durée du geste de M. Stanley puisqu’il ne faut que 40 à 50 secondes pour traverser le stationnement. De plus, si M. Stanley avait levé les deux bras, M. Spears l’aurait vu. Il était celui qui était le plus près de M. Stanley.

M. Done a fait remarquer que des cinq témoins qui étaient présents lorsque M. Spears a fait son commentaire à 11 h 30, à la suite de l’annulation de la réunion, trois l’ont entendu prononcer les mots « pique-nique » et « nourriture ». En outre, trois ont déclaré que M. Smith (ou « ils ») leur a dit de retourner travailler. M. Smith est le seul qui a affirmé avoir dit au groupe de revenir dans 15 minutes. Or, ce n’est pas le cas puisque la réunion a eu lieu à 13 h 30. Par conséquent, le témoignage de M. Smith n’est pas digne de foi. Il s’est trompé quant à ce qui a été dit et à l’heure de la réunion. Il s’est également trompé au sujet de l’endroit se trouvait M. Spears pendant que le groupe traversait le stationnement. Le fonctionnaire s'estimant lésé et MM. Neals, Spears et Hockaday ont dit que M. Spears se trouvait à côté de M. Stanley. MM. Smith et Kidd ont été les seuls à avoir « vu » le fonctionnaire s'estimant lésé marcher seul. Ce n’était tout simplement pas le cas.

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Decision Page 29 M. Smith n’a pas rappelé M. Stanley lorsqu’il l’a vu faire le geste. Il aurait pu le rappeler cependant. M. Done s’est demandé de quoi il avait peur. MM. Smith et Kidd n’ont jamais mentionné le geste au cours de la réunion tenue ce jour-là; ils ont préféré n’en rien dire. Cela n’est pas conséquent et logique avec la déclaration de M. Smith selon lequel il s’était senti harcelé et menacé et qu’il avait éprouvé de la crainte. M. Done a fait remarquer que M. Stanley « parle avec ses mains ». Par conséquent, il est possible que c’est ce qu’il a fait le 21 avril vu que l’annulation de son congé l’avait contrarié. M. Done a ajouté que le rendement de M. Stanley avait été coté supérieur dans ses appréciations. De plus, M. Stanley a déclaré qu’il est du genre à confronter les gens et à dire ce qu’il pense. Ce n’est pas de l’intimidation et cela ne concorde pas avec les allégations de l’employeur. M. Stanley compte 11 années de service; il n’a jamais fait l’objet de sanctions disciplinaires et il a perdu cinq jours de salaire à cause de la réaction exagérée de M. Smith. L’employeur n’avait aucun motif valable de lui imposer une mesure disciplinaire.

L’argument au sujet du retard en matière de procédure concerne la période écoulée entre avril 1994 et janvier 1995. Ce retard est injustifié et il n’a rien arrangé. M. Done a passé les dates en revue. M. Smith s’est plaint le 22 avril 1994. L’enquête dans l’affaire Hoy a pris fin en mai 1994, et à la fin de juillet 1994, on a demandé à M e Cantin de faire enquête sur le comportement de M. Stanley le 21 avril. M e Cantin a tenu des entrevues en août 1994 et il a remis son rapport le 5 octobre 1994. Par conséquent, l’employeur n’a rien fait entre le 22 avril et la fin de juillet 1994. Puis, le 17 janvier 1995, il a décidé d’imposer une mesure disciplinaire.

M. Done a soutenu subsidiairement que même si je concluais que la mesure disciplinaire était justifiée, vu que l’employeur avait attendu neuf mois avant de l’imposer, la suspension ne réglait rien. L’employeur aurait pu réprimander le fonctionnaire s'estimant lésé par écrit pour faire passer le message. Celui-ci a été traité injustement et il n’y a pas eu de comportement répréhensible.

M e Hajecek a répondu que nous nous retrouvons avec deux versions des faits en l’espèce. De plus, le retard était raisonnable dans les circonstances. M e Hajecek a ajouté que je devais tenir compte de l’état d’esprit de M. Stanley le matin du 21 avril 1994. Celui-ci a témoigné qu’il n’était pas surpris que la réunion soit annulée et qu’il avait eu le pressentiment que son congé serait annulé cet après-midi-là. De plus, il

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Decision Page 30 avait entendu le mot « gros ». Puis, à 13 h 30, il était très en colère parce qu’on avait refusé le congé. Par conséquent, qu’il ait fait semblant de pointer une carabine cadre avec sa colère et son état d’esprit ce matin-là.

Décision L’employeur a imposé une suspension de cinq jours à M. Stanley pour deux motifs : le fait qu’il ait manier un couteau de plongée de façon menaçante le 16 mars 1994 et son geste du 21 avril 1994. Il a prétendu que le fonctionnaire avait fait semblant de pointer une carabine dans la direction de MM. Smith et Kidd.

L’affaire repose sur une question de faits et de crédibilité. Je dois déterminer ce qui s’est passé le 16 mars et le 21 avril 1994 et si, selon la prépondérance des probabilités, l’employeur s’est déchargé du fardeau de la preuve et a réussi à prouver les prétendus incidents.

M. Stanley a nié les allégations, et son témoignage est corroboré par MM. Neals et Spears. Je dois donc examiner la preuve attentivement pour déterminer si l’employeur a réussi à démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que M. Stanley a commis les prétendus délits.

En ce qui concerne le prétendu incident du 16 mars 1994, l’atmosphère au travail ce jour-là était tendue et difficile. M. Hoy, qui était et qui est toujours l’ami de M. Stanley, a reçu une lettre de suspension en attendant son congédiement. M. Stanley, le superviseur de M. Hoy, a été appelé à identifier parmi le matériel gardé dans la remise des plongeurs celui qui appartenait à l’employeur. Il a demandé que M. Neals soit présent. Il était seul à l’intérieur de la remise à manier le matériel et à identifier les articles. Il a remis les articles à M. Neals qui, lui, les a remis à M. Smith. Cela a pris dix minutes en tout. M. Stanley a manié trois couteaux et a en dégainer au moins deux pour savoir si c’était ceux de M. Hoy. M. Smith a déclaré qu’il l’a vu manier un couteau (pas trois) de façon menaçante; il le dégainait et rengainait, et le transférait d’une main à l’autre, tout en le regardant d’un air furieux. M. Kidd a vu M. Stanley manier un couteau sans regarder personne en particulier. M. Stanley a déclaré qu’il n’avait eu aucun geste menaçant en les maniant, et M. Neals l’a simplement vu dégainer partiellement les trois couteaux pour voir le numéro d’identification.

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Decision Page 31 Je préfère la version de MM. Neals et Stanley au sujet de ce que ce dernier a fait avec les couteaux ce jour-là. Je trouve étrange que MM. Kidd et Smith n’aient rien dit à M. Stanley et à leurs supérieurs au sujet du prétendu incident. Une menace au couteau est un geste grave. Toutefois, les faits indiquent que M. Smith n’a pas jugé que M. Stanley avait eu un comportement dangereux. Ce n’est que lorsqu’il s’est mis à y penser plus tard qu’il s’était senti menacé. De plus, ce n’est que lorsqu’il a été interviewé par M e Cantin en août 1994 qu’il a mentionné l’« incident ». M. Kidd a déclaré qu’il s’était senti « mal à l’aise » en voyant M. Stanley manier les couteaux. Il n’a pas dit qu’il s’était senti menacé. De plus, MM. Kidd et Stanley n’ont discuté du « geste » que de façon fortuite.

Par conséquent, je conclus que l’employeur n’a pas réussi à me convaincre que, le 16 mars 1994, M. Stanley a manié un couteau de plongée de façon menaçante. Je préfère la version de MM. Stanley et Neals relativement au prétendu incident. Je suis enclin à donner raison à M. Done lorsqu’il affirme que M. Smith a réagi de façon exagérée lorsqu’il a mentionné l’« incident » à M e Cantin et qu’il l’a décrit comme une menace.

En ce qui concerne l’incident du 21 avril, je conclus que M. Stanley était contrarié et en colère ce jour-là. Son congé avait été annulé deux fois et la réunion qui devait avoir lieu ce matin-là avait été reportée. Par conséquent, selon toute apparence son congé allait être annulé une troisième fois. Il s’était entendu avec M. Kerr pour prendre congé l’après-midi du 21 avril et tout indiquait que ce ne serait pas possible. Je dois aussi tenir compte du fait que la réunion du 21 avril concernait M. Hoy, un bon ami de M. Stanley. Celui-ci croyait son ami innocent et il avait remis à M. Bonser un document mentionnant M. Kerr. C’est en tenant compte de cette atmosphère tendue et difficile que je dois déterminer si M. Stanley a fait semblant de pointer une carabine vers M. Smith.

MM. Neals, Spears et Hockaday ont confirmé la déclaration de M. Stanley selon laquelle M. Spears était à côté du fonctionnaire s’estimant lésé pendant qu’ils traversaient le stationnement. Le trajet à pris de 40 à 50 secondes et les cinq hommes sont arrivés presque tous en même temps. La déclaration de M. Smith selon laquelle M. Stanley se serait arrêté deux fois, la première fois pendant 30 à 60 secondes et la deuxième pendant 10 secondes pour faire le geste semble exagérée vu le temps qu’il

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Decision Page 32 faut pour traverser le stationnement. MM. Spears et Stanley ont entendu des voix ce qui a poussé M. Stanley à se retourner une fois pour regarder vers le balcon et une autre fois pour « viser » ou « pointer », suivant la version que j’accepte. M. Hockaday a également entendu des voix mais sa vue du balcon était partiellement obstruée par les arbres.

MM. Smith et Kidd n’ont pas vu M. Spears marcher à côté de M. Stanley. Toutefois, ils voyaient parfaitement le bras de M. Stanley. Par ailleurs, M. Spears ne pouvait voir qu’un bras lorsque M. Stanley a pris la pose.

Je dois rendre une décision sur la foi de cette preuve contradictoire. Je conclus que M. Stanley était en colère et que M. Smith a passé un commentaire pendant qu’il se trouvait sur le balcon avec M. Kidd. M. Stanley a entendu la voix de M. Smith et a cru qu’il l’insultait. Cela l’a poussé à se retourner et il a pris une pose. Il a maintenu qu’il n’avait fait que pointer en direction de MM. Kidd et Smith. Ceux-ci ont prétendu qu’ils l’avaient vu faire semblant de les viser avec une carabine. M. Spears ne pouvait pas voir clairement la pose qu’avait prise M. Stanley. Je dois tenir compte du fait que MM. Kidd et Smith n’ont pas vu M. Spears à côté de M. Stanley, et du fait que personne n’a mentionné le geste lorsque le groupe s’est réuni à 13 h 30. De plus, j’estime que faire semblant de pointer une carabine et pointer un doigt pouvaient facilement être confondus particulièrement à une distance de 200 pieds. Ayant examiné l’ensemble de la preuve, je ne suis pas convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que le fonctionnaire s’estimant lésé a fait un geste menaçant en faisant semblant de pointer une carabine vers MM. Kidd et Smith pour les menacer, mais qu’il a simplement pointé dans leur direction.

Par conséquent, je fais droit au grief déposé par M. Stanley. Il a droit au remboursement du salaire et des avantages perdus relativement à la suspension de cinq jours qui a déjà eu lieu. En outre, toute mention de cette mesure disciplinaire doit être radiée de son dossier.

Muriel Korngold Wexler, président suppléant OTTAWA, le 7 avril 1997.

Traduction certifiée conforme Serge Lareau

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