Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Indemnité de congé de maternité - Fonctionnaires nommées pour une période déterminée - Emploi continu - les fonctionnaires s'estimant lésées avaient été engagées pour une période déterminée dans le cadre d'une série de contrats à terme et totalisaient plus de six mois d'emploi continu lorsqu'elles ont pris un congé de maternité - la disposition pertinente de la convention collective précisait que: « l'employée qui, comptant six (6) mois d'emploi continu, s'engage à retourner au travail pour une période d'au moins six (6) mois [...] recevra une indemnité liée au congé de maternité » - les fonctionnaires s'estimant lésées se sont engagées à retourner au travail pour une période d'au moins six mois lorsqu'elles ont obtenu leur indemnité de congé de maternité - peu après leur retour au travail, il y a eu une interruption entre leurs contrats d'emploi de moins de trois mois même si elles ont travaillé plus de six mois à la suite de leur retour de congé de maternité - l'employeur leur a demandé de rembourser l'indemnité de congé de maternité en faisant valoir qu'elles devaient travailler pendant au moins six mois continus après leur retour de congé de maternité - l'employeur a maintenu que la période d'interruption entre les contrats annulait leur droit à l'indemnité de congé de maternité - l'arbitre a conclu que la convention collective ne précisait pas que la période d'emploi de six mois devait être continue - toutefois, même si c'était précisé, l'arbitre a fait remarquer que la définition d'« emploi continu » dans la convention collective prévoyait qu'une interruption de moins de trois mois ne constituait pas une interruption de l'emploi continu - l'arbitre a ordonné à l'employeur de rembourser l'indemnité de congé de maternité aux fonctionnaires s'estimant lésées. Griefs admis.

Contenu de la décision

Dossiers: 166-2-27085, 27086, 27087 Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE ANNE-MARIE REID, PEGGY DIXON, DEBRA-LYNN DESMARAIS fonctionnaires s’estimant lésées et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Revenu Canada - Impôt

employeur

Devant: J. Barry Turner, commissaire Pour les fonctionnaires s’estimant lésées: David Landry, Alliance de la Fonction publique du Canada Pour l’employeur: Maureen Crocker, avocate Affaire entendue à Sudbury (Ontario) le 22 novembre 1996.

Decision Page 1 DÉCISION Les fonctionnaires s’estimant lésées, Anne-Marie Reid, Peggy Dixon et Debra- Lynn Desmarais, toutes employées de niveau CR-4 engagées pour une période déterminée, Service à la clientèle - Demandes de renseignements et redressements, Revenu Canada, Impôt, Sudbury (Ontario), contestent la décision de l’employeur qui exige le remboursement de l’indemnité liée au congé de maternité, ce qui va à l’encontre de la clause M-21.03(C) de la convention cadre conclue entre le Conseil du Trésor et l’Alliance de la Fonction publique du Canada. On m’a demandé d’entendre ces griefs ensemble et de rendre une seule décision à leur égard.

Leurs griefs sont ainsi libellés : traduction] Je conteste la décision de la direction qui exige que je rembourse l’indemnité liée au congé de maternité, ce qui va à l’encontre des dispositions de la convention conclue entre moi-même et l’employeur énoncées à la clause M-21-03 de la «convention collective législative».

La clause M-21.03(C) dit ce qui suit : (i) L’employée qui, comptant six (6) mois d’emploi continu, s’engage à retourner au travail pour une période d’au moins six (6) mois et qui fournit à l’employeur la preuve qu’elle a présenté une demande de prestations en vertu du régime d’assurance- chômage selon les dispositions de l’article 30 de la Loi sur l’assurance-chômage (1971) et qu’elle est admissible à de telles prestations, recevra une indemnité liée au congé de maternité conformément au Régime de prestations supplémentaires de chômage.

(ii) L’employée visée à la clause M-21.03(C)(i) signe une entente avec l’employeur dans laquelle elle s’engage :

(a) à retourner au travail et à travailler pour une période d’au moins six (6) mois, moins toute période à l’égard de laquelle il lui est accordé un congé payé;

(b) à retourner au travail à la date à laquelle son congé de maternité prend fin, à moins que l’employeur ne consente à ce que cette date soit modifiée.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision (iii) L’employée qui ne conformément aux M-21.03(C)(ii)(a) et (b), pour des motifs autres que le décès ou la mise en disponibilité, reconnaît qu’elle doit à l’employeur le montant total reçu à titre d’indemnités liées au congé de maternité.

Elles demandent la mesure corrective suivante : Que l’employeur respecte la convention et que je ne sois pas tenue de rembourser l’indemnité liée au congé de maternité.

On me demande de déterminer si la mesure prise par l’employeur, soit de recouvrer l’indemnité liée au congé de maternité, est justifiée.

J’ai reçu et accepté une demande d’exclusion des témoins. Au cours de l’audience d’une journée, trois témoins ont donné leur déposition et dix pièces ont été soumises en preuve.

Résumé de la preuve 1. Peggy Dixon travaille en vertu d’une série de contrats de durée déterminée pour Revenu Canada (pièce G-1) dans le domaine des renseignements et des redressements relatifs aux déclarations de revenu des particuliers. Elle a pris un congé de maternité du 30 avril au 26 octobre 1993. Son bébé est le 6 mai 1993. Elle a demandé vers le 10 décembre 1993 le supplément des prestations dites liées au congé de maternité et reçu ces prestations avant Noël 1996 sous forme d’un montant forfaitaire (pièce G2 plus les pièces jointes). On lui a dit en janvier 1994 qu’elle serait tenue de rembourser ce montant. Elle a contesté cette décision le 21 janvier 1994. L’employeur a commencé à recouvrer cet argent en janvier 1996. Elle a affirmé qu’en février 1994, elle accomplissait les mêmes fonctions qu’elle accomplit actuellement et qu’à compter du 8 mars 1993 et jusqu’au 4 février 1994, elle avait travaillé sans interruption (voir la pièce G-1).

Au cours du contre-interrogatoire, M indiquait qu’elle était effectivement en congé de maternité du 2 mai au 14 août 1993, puis en congé parental du 15 août jusqu’au 23 octobre 1993. Elle a reconnu, comme

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Page 2 retourne pas au travail dispositions de la clause

me Dixon a reconnu la pièce E-1 qui

Decision Page 3 l’indique la pièce G-1, qu’entre les contrats de durée déterminée du 20 janvier au 3 février 1993 et du 8 mars au 25 août 1993, il y a eu une interruption de service. De même façon, entre les contrats du 28 janvier au 4 février 1994 et du 18 avril au 26 août 1994, il y avait eu une interruption de service, de même qu’une autre interruption entre le 26 août et le 13 octobre 1994. Elle a affirmé qu’elle était au courant de la réponse de M. Moncion (pièce G-2) à sa note de service (pièce E-1) qui demandait le supplément de prestations. La pièce G-2 dit en partie au paragraphe 3 :

[traduction] Je vous rappelle simplement que si vous ne terminez pas six (6) mois de service continu compter de la date à laquelle vous êtes revenue de votre congé de maternité), vous serez tenue de rembourser le montant complet du supplément de prestations liées au congé de maternité.

Elle a demandé le supplément après son retour d’un congé parental en octobre 1993, sur les conseils de sa collègue Anne-Marie Reid.

2. Debra-Lynn Desmarais remplit les mêmes fonctions que la fonctionnaire s’estimant lésée Dixon et a travaillé en vertu de contrats de durée déterminée très semblables à ceux de M me Dixon (pièce G-1). Elle a pris un congé de maternité du 7 juin au 29 novembre 1993. Son bébé est le 11 juin 1993. Elle a fait une demande de supplément de prestations liées au congé de maternité en décembre 1993 comme la fonctionnaire s’estimant lésée Anne-Marie Reid le lui a conseillé. Lorsqu’elle a reçu le supplément sous forme de paiement forfaitaire, on lui a dit qu’elle aurait probablement à le rembourser. Elle a formulé un grief le 21 janvier 1994. Tout cet argent a depuis été recouvré. Elle a reconnu la pièce G-3, la réponse que M. Moncion a faite à sa demande de supplément, et reconnu qu’entre le 8 mars 1993 et le 4 février 1994, elle n’avait eu aucune interruption de service (pièce G-1), mais qu’entre le 4 février et le 21 mars 1994, elle en avait eue. Elle a ensuite travaillé du 21 mars 1994 jusqu’au 26 août 1996. Elle a maintenant un emploi de durée indéterminée fondé sur des services ininterrompus de plus de 62 jours au cours d’une période de cinq ans.

Au cours du contre-interrogatoire, elle a reconnu la note de service dans laquelle elle demandait le supplément de prestations (pièce E-2) et qui indique également qu’elle était en congé de maternité du 6 juin au 3 octobre 1993 et en congé parental du 3 octobre au 20 novembre 1993.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 4 L’employée a droit à 26 semaines de congé en vertu de la convention collective. Le supplément de prestations est versé seulement après que l’employée retourne au travail et produit des relevés de prestations d’assurance-chômage.

3. Anne-Marie Reid accomplit des fonctions semblables à celles des deux autres fonctionnaires s’estimant lésées. Elle a travaillé sans interruption en vertu d’une série de contrats de durée déterminée du 8 avril 1992 au 3 février 1993 (pièce G-1). Elle a aussi obtenu des contrats de durée déterminée du 8 mars 1993 au 4 février 1994 (pièce G-1). Elle a dit dans son témoignage qu’il n’y avait aucune raison de croire qu’elle et les deux autres fonctionnaires s’estimant lésées seraient remerciées de leurs services à la fin du contrat de durée déterminée allant du 28 janvier au 4 février 1994 puisqu’il restait encore beaucoup de travail à faire. Elle a ajouté que parfois elles sont informées des prolongations de contrats seulement la dernière journée et qu’elles sont même rappelées après avoir été renvoyées à la maison. Elle a ajouté qu’environ 80 employés engagés pour une durée déterminée ont quitté entre le 4 février et le 18 avril 1994. Elle est allée en congé de maternité du 19 avril jusqu’au 18 octobre 1993. Son bébé est le 27 avril 1993.

M me Reid a dit dans son témoignage que le service du personnel l’avait informée qu’elle aurait pu faire une demande de supplément de prestations liées au congé de maternité avant la fin de son congé de maternité. Elle a obtenu de M. Moncion la même réponse que M mes Dixon et Desmarais (pièce G-4) à sa demande de supplément. Elle est retournée au travail le 19 octobre 1993 et a reçu un supplément sous forme de paiement forfaitaire. Le 21 janvier 1994, elle a contesté la décision de l’employeur de recouvrer ce paiement parce qu’un contrat de durée déterminée devait prendre fin le 28 janvier 1994 et qu’elle voulait que son grief soit déposé pendant qu’elle était encore représentée par l’agent négociateur. Le recouvrement du supplément qu’elle a reçu a commencé au début de 1996.

Au cours du contre-interrogatoire, M me Reid a reconnu une copie de l’Annexe A de la pièce G4, soit la pièce E-4, qu’elle avait signée, de même qu’une copie de la note de service dans laquelle elle demandait le supplément de prestations, soit la pièce E-5. Elle a aussi reconnu la pièce G-1 selon laquelle les périodes du 28 janvier au 4 février 1994 et du 18 avril au 26 août 1994 avaient trait à des contrats de durée déterminée. Le 18 avril 1994, le témoin avait signé (pièce E-6) son contrat pour la période du 18 avril au 26 août 1994.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 5 Elle a convenu qu’il y avait eu une interruption de service entre le 4 février et le 18 avril 1994 et que, pour compter six mois continus de service avant le 4 février 1994, il aurait fallu qu’elle retourne au travail le 4 août 1993. Elle a ajouté que si on lui avait dit de retourner au travail le 4 août 1993 afin d’être admissible au supplément, elle y serait retournée. Elle a convenu que tout ceci était maintenant histoire du passé. Si elle était retournée au travail le 4 août 1993, elle aurait obtenu jusqu’à neuf jours de congé de maternité et un congé parental du 13 août au 18 octobre 1993.

Argumentation des fonctionnaires s’estimant lésées M. Landry a soutenu que la clause M-21.03(C)(i) dit bien qu’une employée doit consentir à retourner au travail pour une période d’au moins six mois à son retour d’un congé de maternité et ne dit pas six mois d’emploi continu. Il m’a rappelé que les trois fonctionnaires s’estimant lésées sont retournées au travail à la fin de leur congé de maternité comme le prévoit la clause M-21.03(C)(i)(b), et qu’elles ont toutes travaillé six mois à leur retour de leur congé de maternité (pièce G-1), de sorte qu’elles ont respecté les exigences de la convention collective. Il a ajouté que le libellé des lettres de l’employeur, pièces G-2, G-3 et G-4, fait erreur en disant au paragraphe 3 [traduction] «si vous ne terminez pas six (6) mois de service continu à compter de la date à laquelle vous êtes revenue de votre congé de maternité», puisque la convention collective ne parle pas de service continu. Il m’a rappelé qu’en dépit de ces trois lettres, les trois fonctionnaires s’estimant lésées ont effectivement reçu les prestations.

M. Landry a aussi soutenu que l’employeur est empêché de recouvrer les indemnités en question du fait que M m e Reid avait été informée par le service du personnel, et que par la suite, elle en a informé M mes Dixon et Desmarais, qu’elle pouvait de toute façon demander le supplément de prestations.

Il a ajouté que l’employeur avait effectivement obtenu six mois de services et bien davantage des fonctionnaires s’estimant lésées dont les contrats de durée déterminée ne doivent pas servir de ruse pour éviter de leur verser des avantages auxquels elles ont légitimement droit.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 6 M. Landry m’a renvoyé aux décisions arbitrales rendues dans Dionne (dossiers de la Commission 166-2-24975, 24976) et Sousa (dossier de la Commission 166-2- 17988).

Argumentation de l’employeur M me Crocker a soutenu que l’employeur avait respecté les exigences de la clause M-21.03 du fait que l’emploi des fonctionnaires s’estimant lésées avait pris fin à la fin de chacun des contrats de durée déterminée. Celles-ci n’avaient pas été mises en disponibilité. Elles avaient demandé les prestations et été informées par M. Moncion, pièces G-2, G-3 et G-4, qu’elles pourraient être tenues de rembourser les prestations et toutes ont signé la page 3 des pièces G-2, G-3 et G-4, acceptant ainsi l’exigence des six mois de travail après leur retour de leur congé de maternité. M me Crocker a conclu que la pièce G-1 est claire. Les fonctionnaires s’estimant lésées n’étaient pas retournées au travail pendant six mois puisqu’elles avaient toutes eu une interruption de service lorsque leur emploi avait pris fin le 4 février 1994, ce qui ne constituait pas une période d’au moins six mois après leur retour de leur congé de maternité. Elle a convenu que la convention collective ne dit pas six mois d’emploi continu, mais dit «d’au moins six (6) mois».

M me Crocker s’est reportée aux paragraphes M2.02(a) et (b) de la convention collective et a soutenu que puisqu’il n’y a aucune définition d’une période de six mois dans la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, c’est la Loi d’interprétation, paragraphes 28(a), (b) et (c), qu’il faut consulter pour obtenir une explication. Les paragraphes M-2.02(a) et (b) de la convention collective disent ce qui suit : M-2.02Sauf indication contraire dans la présente convention, les expressions qui y sont employées :

(a) si elles sont définies dans la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique ont le même sens que celui qui leur est donné dans ladite loi, et

(b) si elles sont définies dans la Loi d’interprétation, mais non dans la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, ont le même sens que celui qui leur est donné dans la Loi d’interprétation.

Les paragraphes 28(a), (b) et (c) de la Loi d’interprétation sont ainsi libellés : Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 7 Si le délai est exprimé en nombre de mois précédant ou suivant un jour déterminé, les règles suivantes s’appliquent :

(a) le nombre de mois se calcule, dans un sens ou dans l’autre, exclusion faite du mois tombe le jour déterminé;

(b) le jour déterminé ne compte pas; (c) le jour qui, dans le dernier mois obtenu selon l’alinéa (a), porte le même quantième que le jour déterminé compte; à défaut de quantième identique, c’est le dernier jour de ce mois qui compte.

L’avocate a soutenu que «le jour déterminé» est le jour du retour au travail des fonctionnaires s’estimant lésées qui doivent retourner au travail conformément aux dispositions de la convention collective pour être admissibles à l’indemnité. Elle a soutenu que ni la convention collective, ni la Loi d’interprétation n’autorisent une interruption de service à compter de la date de retour pour six mois. Elle m’a rappelé que M me Dixon, qui est retournée au travail le 26 octobre 1993, aurait eu à travailler jusqu’au 25 avril 1994 pour accomplir six mois de travail, mais que son emploi a été interrompu du 4 février au 18 avril 1994. La fin d’un contrat n’est pas une mise en disponibilité. L’avocate m’a renvoyé aux décisions de la Cour d’appel fédérale dans Mireille Dansereau c. Office national du film et Pierre-André Lachapelle, [1979] 1 C.F. 100 et La Reine c. Zinck, dossier de la Cour A-384-79.

Elle m’a aussi renvoyé à la clause M-21.03(C)(iii) qui précise que le décès et la mise en disponibilité sont les seuls deux autres motifs qui éviteraient aux fonctionnaires s’estimant lésées d’avoir clause M-21.03(C)(iii) est ainsi libellée :

(iii) L’employée qui ne conformément aux clause M-21.03(C)(ii)(a) et (b), pour des motifs autres que le décès ou la mise en disponibilité, reconnaît qu’elle doit à l’employeur le montant total reçu à titre d’indemnité liée au congé de maternité.

Elle a conclu, par conséquent, que je ne puis interpréter ces dispositions de façon à y voir d’autres motifs qui autoriseraient les employées à garder l’indemnité et

Commission des relations de travail dans la fonction publique

à rembourser l’indemnité. La

retourne pas au travail dispositions de la

Decision Page 8 que M. Landry y voit une exception qui n’est pas indiquée par les parties à la convention collective.

L’avocate a soutenu que les principes de la préclusion (estoppel) ne s’applique pas non plus dans l’affaire en instance, surtout que M. Moncion avait informé les fonctionnaires s’estimant lésées qu’elles auraient peut-être à rembourser les indemnités. Celles-ci savaient également que leur contrat devait prendre fin le 28 janvier 1994 sans garantie de renouvellement. Seules les fonctionnaires s’estimant lésées Dixon et Desmarais ont décidé de demander les indemnités lorsqu’elles sont revenues de congé et la fonctionnaire s’estimant lésée Reid n’avait reçu aucune promesse que son contrat serait prolongé au-delà du 25 août 1993. M me Crocker m’a renvoyé à La Reine du chef du Canada, représentée par le Conseil du Trésor, Transports Canada, J.P. Little et R.G. Bell c. Association canadienne du contrôle du trafic aérien, [1984] 1 C.F., 1081, et Andrée Ménard et Michel Ouellette c. Sa Majesté la Reine, [1992] 3 C.F., 521.

L’avocate a ajouté que dans l’affaire Sousa (précitée) la fonctionnaire s’estimant lésée n’était pas retournée au travail; elle m’a aussi renvoyé à Bourdon (dossier de la Commission 166-2-20098) et Tekmin Inc. c. Canada, Cour fédérale, Section de première instance, dossier de la Cour T-856-88 et Jorgensen (Re) [1990] M.J. n o 322, Cour provinciale du Manitoba, Division criminelle.

Dans sa réfutation, M. Landry a soutenu que dans l’affaire Tekmin (précitée) et dans l’affaire Jorgensen (précitée), la question est de savoir comment calculer une période d’un an et que le libellé est également clair dans le paragraphe 490 du Code criminel du Canada qui dit en partie : «Rien ne peut être détenu... au-delà (soit) d’une période de trois mois après la saisie...» Dans l’affaire dont je suis saisi, a-t-il soutenu, les mots de la clause M-21.03(C)(ii)(a) «... une période d’au moins six (6) mois...» ne prévoient pas de date limite. Dans Bourdon (précitée), de dire M. Landry, il est fait mention seulement d’une période minimum de six semaines. Il m’a rappelé que tout au long de la convention cadre, les parties ont utilisé le terme «consécutif» lorsqu’elles l’ont voulu, mais que c’est à dessein qu’elles ne l’ont pas utilisé dans la clause M- 21.03. Il a aussi soutenu que si une période de six mois est définie dans la convention collective, je puis utiliser cette définition, autrement la clause M-2.02 n’est pas

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 9 pertinente. À l’appui de ses arguments, il a fait l’analogie avec une joute de hockey une période est de 20 minutes, mais compte environ 35 minutes de jeu.

Il a convenu que l’article 28 dans la Loi d’interprétation explique comment calculer une période de temps, mais a insisté encore une fois sur le fait que dans la clause M-21.03(C)(ii)(a), il n’y a aucune mention d’un jour déterminé, seulement d’une période de six mois, bien que la clause M-21.03(C)(ii)(b) indique une date à laquelle l’employée doit retourner au travail, soit à la fin de son congé de maternité.

M. Landry a dit qu’il n’alléguait pas que les fonctionnaires s’estimant lésées avaient été mises en disponibilité et a ajouté que si l’employeur possédait toute l’information dont font foi les pièces G-2, G-3 et G-4, particulièrement la page 4 de ces trois pièces qui disent en partie, dans le paragraphe 3, [traduction] «... Autrement, le paiement devra être versé après le retour de l’employée au travail pour six mois», il lui était impossible de recouvrer les indemnités, surtout qu’en décembre 1993, aucune fonctionnaire ne savait vraiment que son contrat ne serait pas prolongé au-delà du 4 février 1994. Il restait encore beaucoup de travail à cette époque.

Décision Les faits dont je suis saisi ne sont pas contestés. Les trois fonctionnaires s’estimant lésées sont parties en congé de maternité, sont retournées au travail à la fin de leur congé, ont demandé le supplément de prestations liées au congé de maternité, ont obtenu ces prestations à la condition de répondre aux exigences de la convention collective, puis ont été sommées de rembourser les indemnités. La question en litige est l’interprétation à donner à la clause M-21.03(C)(ii)(a) qui est ainsi libellée :

(ii) L’employée visée à la clause M-21.03(C)(i) signe une entente avec l’employeur dans laquelle elle s’engage :

(a) à retourner au travail et à travailler pour une période d’au moins six mois, moins toute période à l’égard de laquelle il lui est accordé un congé payé;

Je dois déterminer si les fonctionnaires s’estimant lésées ont satisfait à l’obligation de retourner au travail «pour une période d’au moins six (6) mois» après

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 10 leur retour au travail d’un congé de maternité afin d’être dûment admissibles au supplément de l’indemnité. Je suis arrivé à la conclusion qu’elles ont rempli cette obligation.

La fonctionnaire s’estimant lésée Reid est retournée au travail le 19 octobre 1993, la fonctionnaire s’estimant lésée Dixon est retournée le 26 octobre 1993 et la fonctionnaire s’estimant lésée Desmarais est retournée le 28 novembre 1993. Toutes trois sont retournées au travail au cours des périodes de leur contrat de durée déterminée du 24 septembre 1993 au 28 janvier 1994 (pièce G-1). De nouveaux contrats de durée déterminée ont été accordés à toutes les trois fonctionnaires s’estimant lésées du 28 janvier au 4 février 1994 et suivis d’une interruption de service allant jusqu’au 18 avril 1994 dans le cas des fonctionnaires s’estimant lésées Dixon et Reid et jusqu’au 21 mars 1994 dans celui de la fonctionnaire s’estimant lésée Desmarais. Celles-ci n’ont pas été mises en disponibilité au cours d’aucune de ces périodes.

Afin de déterminer la signification de l’expression «pour une période d’au moins six (6) mois», je dois examiner l’article M-2, Interprétation et définitions, de la convention cadre signée en mai 1989. La clause M-2.01 dit :

Aux fins de l’application de la présente convention et des conventions particulières des groupes :

... (d) «emploi continu» s’entend dans le sens attribué à cette expression dans le Règlement sur les conditions d’emploi dans la Fonction publique de l’employeur à la date de la signature de la présente convention;

Le Règlement sur les conditions d’emploi dans la Fonction publique qui était en vigueur à la date de la signature de la convention cadre disait en partie, en ce qui concerne «l’emploi continu» :

Article 3 Aux fins du présent règlement, a) au cours d’une période pertinente, une personne, autre que celle qui remplit des fonctions de caractère occasionnel, a cessé d’être employée au service prévu à l’Annexe A pour une raison autre que la destitution, le congédiement, le renvoi ou une déclaration suivant laquelle elle a abandonné son poste, et est redevenue

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 11 employée à ce service dans les trois mois à compter du jour elle a ainsi cessé d’être employée, son emploi au poste qu’elle détenait avant de cesser ainsi d’être employée et au poste auquel elle est nommée constitue un service ininterrompu;

Or, les fonctionnaires s’estimant lésées n’étaient pas des employées occasionnelles.

La convention cadre prévoit donc une interruption de service à la condition que la personne redevienne employée «dans les trois mois à compter du jour elle a ainsi cessé d’être employée». Les trois fonctionnaires s’estimant lésées ont été réemployées dans le cadre de contrats de durée déterminée dans les trois mois à compter du 4 février 1994, ce qui leur permettait de compléter au moins six mois d’emploi après leur retour de leur congé de maternité.

La convention collective ne dit pas six mois de service ininterrompu, mais même si elle le mentionnait, aux termes du Règlement sur les conditions d’emploi dans la Fonction publique, les fonctionnaires s’estimant lésées seraient admissibles à l’indemnité parce qu’elles ont toutes travaillé de nouveau moins de trois mois après le 4 février 1994 et complété six mois d’emploi après leur retour de congé de maternité.

J’ordonne donc à l’employeur de rembourser l’indemnité liée au congé de maternité aux fonctionnaires s’estimant lésées Reid, Dixon et Desmarais. Je demeure saisi de l’affaire pour le cas les parties auraient de la difficulté à mettre ma décision en oeuvre.

Je fais donc droit à ces griefs. J. Barry Turner, commissaire

OTTAWA, le 3 janvier 1997. Traduction certifiée conforme Serge Lareau Commission des relations de travail dans la fonction publique

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.