Décisions de la CRTESPF

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Résumé :

Droits de l'employeur - Horaire de travail - Consultation de l'agent négociateur - Attribution des heures supplémentaires - Avis d'attribution d'heures supplémentaires - Nécessités du service - l'employeur a modifié l'horaire de travail pour que la moitié des employés travaillent du lundi au vendredi, et l'autre moitié, du mardi au samedi, avec rotation toutes les deux ou quatre semaines; de plus, toutes les demandes d'heures supplémentaires contiguës de l'industrie devaient être présentées avant 16 h le jour en question - 80 % de toutes les heures supplémentaires suivent immédiatement une journée de travail normale - l'employeur avait consulté les fonctionnaires s'estimant lésés avant d'appliquer les changements, mais il n'avait pas consulté l'agent négociateur, encore que ce dernier eût tenté d'amorcer des discussions - les fonctionnaires ont soutenu que l'employeur avait enfreint la convention collective en ce qui concerne : les heures de travail; l'obligation de consulter l'agent négociateur avant d'appliquer les changements; la répartition équitable des heures supplémentaires; et l'obligation de donner un préavis suffisant aux employés tenus d'effectuer des heures supplémentaires - les fonctionnaires ont allégué que l'employeur devait indemniser, en argent ou en congés compensatoires, ceux d'entre eux qui n'avaient pas reçu leur juste part d'heures supplémentaires depuis l'entrée en vigueur des changements - les fonctionnaires ont en outre fait valoir que 16 h c'était beaucoup trop tard pour un préavis des heures supplémentaires à effectuer le jour même - l'employeur a répondu qu'il avait le droit de modifier l'horaire de travail et qu'il en avait discuté avec les représentants de l'agent négociateur - l'employeur a soutenu que le travail supplémentaire ne constituait pas un droit - l'employeur a maintenu que la nécessité d'effectuer des heures supplémentaires contigües découlait des nécessités du service - l'employeur a soutenu que c'était également à cause des nécessités du service qu'il avait été décidé que les clients devaient signifier avant 16 h le jour en question s'ils avaient besoin que l'on effectue des heures supplémentaires - l'arbitre a décidé que l'employeur avait le droit de modifier l'horaire de travail - l'arbitre a conclu qu'aucune preuve ne démontrait que l'absence de discussions entre l'employeur et l'agent négociateur avait porté préjudice aux fonctionnaires, mais il a déclaré que l'employeur avait enfreint la convention collective à cet égard - l'arbitre était convaincu que les heures supplémentaires avaient été attribuées en fonction des nécessités du service, et il n'était pas persuadé qu'on aurait pu mieux le faire - l'arbitre a conclu que l'employeur avait arrêté son choix sur 16 h comme heure de tombée à cause des nécessités du service et qu'il avait pris là une décision raisonnable afin de satisfaire à la fois aux besoins de l'industrie et aux préoccupations des fonctionnaires s'estimant lésés. Griefs rejetés.

Contenu de la décision

Dossiers : 166-2-27186 166-2-27378 166-2-27379

Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE GARY L. PAYNTER ET AUTRES fonctionnaires s’estimant lésés et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Agriculture et Agroalimentaire Canada)

employeur

Devant : Jean Charles Cloutier, commissaire Pour les fonctionnaires s’estimant lésés : Mike Tynes, Alliance de la Fonction publique du Canada Pour l’employeur : Judith K. Begley, avocate Affaire entendue à Charlottetown (Î.-P.-É.), le 13 août 1997.

DÉCISION La présente décision fait suite à l'audition de trois griefs collectifs renvoyés à l'arbitrage. M. Gary L. Paynter et les autres fonctionnaires nommément désignés, dont les signatures sont annexées aux trois formules de grief présentées, sont membres du groupe Inspection des produits primaires et travaillent pour Agriculture Canada à l'Île-du-Prince-Édouard. Dans les trois griefs, les fonctionnaires allèguent que l'employeur a enfreint diverses dispositions de l'article 21 de la convention particulière du groupe (code 408/89) conclue entre le Conseil du Trésor et l'Alliance de la Fonction publique du Canada.

1 e r grief (166-2-27186) Dans le premier grief, les fonctionnaires contestent [traduction] « [...] la décision de la direction de modifier notre horaire de travail quotidien et hebdomadaire ». Le grief, daté du 20 novembre 1995, est formulé comme suit :

[Traduction] Détails du grief Les inspecteurs de produits primaires (voir liste ci-jointe) contestent la décision de la direction de modifier leur horaire de travail quotidien et hebdomadaire. La décision, qui nous a été communiquée dans une lettre datée du 23 octobre 1995, contrevient à l'article 21 (Durée du travail et heures supplémentaires) de la convention collective particulière du groupe IPP, et à toute autre disposition pertinente de cette convention et de la convention collective cadre de l'AFPC.

Redressement demandé Nous demandons que l'employeur cesse d'appliquer ce nouvel horaire immédiatement et qu'il en suspende la mise en œuvre d'ici le règlement final de ce grief. Nous demandons que la convention collective soit respectée. Enfin, nous demandons que les fonctionnaires touchés soient indemnisés intégralement et qu'on leur paie les heures supplémentaires et les avantages sociaux correspondants aux heures effectuées qui n’étaient pas comprises dans leur horaire habituel de travail cela, conformément à la convention collective.

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Décision Page 2 2 e grief (166-2-27378) Dans le deuxième grief, les fonctionnaires contestent le fait [traduction] « [...] que l'employeur ne répartit pas les heures supplémentaires de façon équitable [...] ». Le grief, daté du 20 novembre 1995, est formulé comme suit : [Traduction] Détails du grief Les inspecteurs des produits primaires (voir la liste ci-jointe) contestent le fait que l'employeur ne répartit pas les heures supplémentaire de façon équitable entre les employés qualifiés immédiatement disponibles. Cela contrevient à l'article 21 (Répartition des heures supplémentaires) de la convention collective particulière du groupe IPP et de tout autre article pertinent de la convention collective cadre de l'AFPC.

Redressement demandé Nous demandons que l'employeur répartisse les heures supplémentaires de façon équitable entre les employés qualifiés immédiatement disponibles. Nous demandons que la convention collective soit respectée et que les fonctionnaires s'estimant lésés soient indemnisés intégralement; qu'on leur verse les avantages sociaux et le traitement qu'ils ont perdus à cause des occasions de faire des heures supplémentaires qu'ils ont perdues.

3 e grief (166-2-27379) Dans le troisième grief, les fonctionnaires s'estimant lésés soutiennent que l'employeur ne donne pas aux fonctionnaires tenus de faire des heures supplémentaires un préavis suffisant. Le grief, daté du 20 novembre 1995, est ainsi formulé :

[Traduction] Détails du grief Les inspecteurs de produits primaires (voir la liste ci-jointe) contestent le fait que l'employeur ne donne pas aux employés tenus de faire des heures supplémentaires un préavis suffisant concernant cette exigence. Cela contrevient à l'article 21 de la convention collective particulière du groupe

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Décision Page 3 IPP et à tout autre article pertinent de la convention collective cadre de l'AFPC.

Redressement demandé Nous demandons que l'employeur donne aux employés tenus de faire des heures supplémentaires un préavis suffisant concernant cette exigence. Nous demandons que la convention collective soit respectée et que les fonctionnaires s'estimant lésés soient indemnisés intégralement.

Dans leur exposé introductif, les parties ont convenu que les trois griefs seraient entendus ensemble étant donné que leurs témoins pouvaient faire des dispositions sur les trois griefs que ceux-ci étaient interdépendants.

PREUVE M. Tynes, le représentant des fonctionnaires, a produit douze pièces. Il a cité comme premier témoin M. Gary Lee Paynter, qui est inspecteur à la Direction générale de la production et de l'inspection des aliments et également vice-président de la section locale 9004, soit l'élément de l'Île-du-Prince-Édouard du Syndicat de l'agriculture.

Les faits en ce qui a trait aux fonctionnaires s'estimant lésés sont simples. Le ministère de l'Agriculture a décidé qu'il devait recouvrer le coût des heures supplémentaires effectuées pour l’industrie. En l'occurrence, l'industrie les clients ») est constituée des producteurs et expéditeurs de pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard. Le 22 septembre 1995, le ministère a envoyé à l'industrie de la pomme de terre une note de service (pièce G-3) sur la politique régionale en matière d'heures supplémentaires. Avant cette politique, tous les inspecteurs travaillaient du lundi au vendredi. Les changements les plus importants que les témoins ont fait ressortir relativement à la modification de l'horaire quotidien et hebdomadaire sont les suivants :

A) À compter de septembre 1995, la moitié du personnel travaillerait du lundi au vendredi, et l'autre moitié, du mardi au samedi.

B) Toutes les heures supplémentaires contiguës devaient être payées par le client, qui devait en faire la demande avant 16 h le jour en question.

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Décision Page 4 M. Paynter a produit deux horaires de travail (pièces 4 et 5) préparés par les surveillants et prévoyant que les inspecteurs travailleraient du lundi au vendredi pendant quatre semaines, puis du mardi au samedi pendant les quatre semaines suivantes. Certains inspecteurs ont obtenu la permission d'effectuer la rotation toutes les deux semaines.

M. Paynter, en sa qualité de vice-président de la section locale du syndicat, a envoyé des notes de service à la direction (pièces 6 et 7) pour lui faire part de la réaction négative qu’avait suscitée cette nouvelle politique et aussi pour atténuer l'impact en tant que représentant syndical. La direction ne lui a pas répondu, pas plus qu’elle lui a offert de discuter de la situation. Les fonctionnaires estiment que les heures supplémentaires contiguës devraient être réparties par les surveillants plutôt que par les clients.

Pour ce qui est de la répartition équitable des heures supplémentaires, le témoin s'est reporté à la pièce G-12, qui a trait à une étude partielle de la question réalisée entre avril 1995 et février 1996. Cette étude montre qu'un inspecteur (Dingwall) avait effectué deux fois plus d'heures supplémentaires qu'un autre inspecteur (Docherty) durant cette période. Le témoin estimait qu'il devrait y avoir en place un mécanisme permettant à quiconque s’est fait refuser des heures supplémentaires de se rattraper plus tard.

En contre-interrogatoire, M. Paynter a reconnu que ce genre d'horaire avait été mis en place en 1990 pour un certain temps et qu'aucun grief n'avait été déposé à l'époque. Le témoin a convenu avec l'avocate de l'employeur que l'objectif principal était de fournir le meilleur service possible aux clients afin que l'industrie continue de prospérer sur les marchés intérieurs et internationaux. Le témoin a aussi reconnu que la charge de travail du samedi n'avait pas changé depuis l'entrée en vigueur du nouvel horaire. Il a confirmé que la moitié du personnel travaillait le samedi au taux ordinaire majoré de moitié avant la mise en œuvre de la nouvelle politique, tandis que la moitié du personnel travaille maintenant le samedi au taux ordinaire.

M. Paynter a reconnu que les heures de travail contiguës ont continué, à cette différence toutefois, que c'est le client et non Agriculture Canada qui paie maintenant ces heures.

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Décision Page 5 En ce qui concerne le préavis à donner aux employés tenus de faire des heures supplémentaires, le témoin a déclaré que les fonctionnaires préféraient que le préavis actuel (16 h) soit devancé à midi, comme c'est le cas pour les inspecteurs de la viande. M. Paynter a admis que le contexte était différent et que les producteurs et les expéditeurs recevaient souvent des commandes tard dans l'après-midi, ce qui est considéré comme une pratique normale dans l'industrie de la pomme de terre.

Le deuxième et dernier témoin qui a déposé en faveur des fonctionnaires a été M. Romeo Leblanc, le vice-président régional (AFPC) pour l'Île-du-Prince-Édouard et le Nouveau-Brunswick. Le témoin s'est dit préoccupé par le manque de consultation entre la direction et le syndicat avant la mise en œuvre de la politique. Bien qu'il se soit entretenu avec le directeur des Opérations et qu'il lui ait alors souligné les nombreux problèmes que causait cette politique, il estimait que leur conversation ne devrait pas tenir lieu de consultation auprès de l'agent négociateur. À son avis, la direction a contrevenu à la convention collective en ne consultant pas le syndicat.

Voici le résumé de la preuve présentée par l'employeur. Quatre pièces ont été produites (pièces E-1, E-2, E-3 et E-4). Le premier témoin a été M. Robert McDonel, un producteur qui cultive des pommes de terre de consommation pour les marchés intérieurs et d'exportation. Le témoin a affirmé que les acheteurs téléphonent souvent pour obtenir la livraison immédiate de pommes de terre. Il reçoit de tels appels habituellement vers la fin de la journée pour la livraison le jour ouvrable suivant. S'il ne répond pas à cette exigence, il risque de perdre la commande. Le samedi est considéré comme un jour d'expédition normal dans l'industrie. Dès qu'une telle commande est reçue, il faut immédiatement téléphoner pour obtenir les services d'un inspecteur. En réponse à une question que lui a posée le représentant des fonctionnaires, le témoin a précisé qu'il était directeur et vice-président de l'Office des pommes de terre et que l'employeur avait consulté l'Office au sujet des changements et de l'augmentation des frais.

Le deuxième témoin a été M. Paul M. Farrell, directeur des Opérations pour l'Île-du-Prince-Édouard à Agriculture et Agroalimentaire Canada. Le témoin a décrit l'organisation à l'Île-du-Prince-Édouard, qui consiste en sept sous-bureaux dont chacun est unique. Chaque bureau comprend un surveillant et un certain nombre

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Décision Page 6 d'inspecteurs (leur nombre varie entre trois et douze). Il y a divers types d'inspection : pommes de terre de consommation, semenceaux et exportations. Les inspecteurs travaillent sept heures et demie (7 1/2) par jour et effectuent des heures supplémentaires à la demande des clients. Le samedi est considéré comme un jour d'expédition normal et il y a toujours des inspections à faire ce jour-là. M. Farrell a expliqué qu'à cause de divers facteurs réduction des ressources, augmentation des frais d'inspection, recouvrement des heures supplémentaires auprès des clients, expansion du service à six jours, diminution des budgets pour les heures supplémentaires, etc. les consultations auprès de l'industrie avaient donné lieu à certaines décisions de la part de la direction. M. Farrell a demandé à tous les surveillants dans tous les bureaux de parler à chaque employé et d'expliquer les changements; pour sa part, il s'est entretenu avec M. Romeo Leblanc. De nombreux inspecteurs ont exprimé des craintes à propos des changements, comme l'a fait M. Leblanc. M. Farrell a mentionné au représentant des fonctionnaires que le budget des heures supplémentaires avait été réduit et que l'affectation d'années-personnes supplémentaires aurait pu être une solution, qu'on n'avait cependant pas envisagée. La planification et la mise en œuvre de l'horaire et des heures supplémentaires relèvent de chaque bureau. M. Farrell a admis qu'il n'avait pas consulté de représentant syndical, mais qu'il avait par contre parlé à M. Leblanc. La direction a déjà affiché les heures supplémentaires effectuées dans chaque bureau, mais elle a mis fin à cette pratique à la demande de nombreux inspecteurs (pièce E-4).

Le dernier témoin de l'employeur surveillant/inspecteur au bureau de Charlottetown. Le témoin a précisé qu'il y avait trois genres d'heures supplémentaires :

a) les heures supplémentaires contiguës, b) le rappel au travail, c) les jours fériés désignés, et que 80 % des heures supplémentaires étaient contiguës, ce qui était normal puisque cela n'avait pas de sens de remplacer un inspecteur qui était déjà sur place. Le coût était un facteur, mais un inspecteur pouvait sur demande se faire remplacer s'il avait déjà des engagements personnels. Les clients préfèrent avoir le même inspecteur pour

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a été M. Donald T. Brown,

Décision Page 7 de nombreuses raisons, notamment parce que celui-ci connaît la catégorie de produit, les points chauds, etc. M. Brown a déclaré que chaque matin, entre 8 h et 9 h, il téléphonait aux commerçants et aux expéditeurs pour connaître leur programme de la journée afin d'être en mesure de leur fournir le service dont ils avaient besoin. Cependant, toute demande additionnelle provenant des expéditeurs n'est connue qu’au moment on reçoit une autre demande de service. M. Brown a rencontré les employés individuellement pour leur expliquer la nouvelle politique régionale sur les heures supplémentaires (pièce G-3).

La plupart des employés sont habitués de travailler le samedi, et donc de faire des semaines de six jours. Avant l'entrée en vigueur de la nouvelle politique, on rémunérait le travail du samedi au taux des heures supplémentaires et de nombreux inspecteurs gagnaient jusqu'à 10 000 $ par année en temps supplémentaire.

Le représentant des fonctionnaires a demandé à M. Brown s'il avait consulté un représentant syndical avant la mise en œuvre de la politique. Il a répondu par l'affirmative, à savoir qu'il avait consulté tous les inspecteurs, mais qu'il n'avait d'aucune façon particulière ou spéciale consulté le syndicat. M. Brown a en outre affirmé qu’en vertu de l’ancienne politique les inspecteurs avaient le choix de se faire payer leurs heures supplémentaires en argent ou en congés compensatoires; le 30 septembre de chaque année, cependant, tout solde qui restait devait être payé en argent.

ARGUMENTS Voici le résumé des arguments qu'a fait valoir le représentant des fonctionnaires.

1 er grief (horaire de travail modifié) Avant le changement, les fonctionnaires étaient assujettis à la clause 21.01 de la convention collective du groupe Inspection des produits primaires, dont voici le libellé :

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Décision Page 8 ARTICLE 21 DURÉE DU TRAVAIL ET HEURES SUPPLÉMENTAIRES 21.01 Durée du travail Sous réserve de la clause 21.03, la semaine de travail normale est de trente-sept heures et demie (37 1/2), à l'exclusion des périodes de repas, réparties sur cinq (5) jours de sept heures et demie (7 1/2) chacun, du lundi au vendredi. La journée de travail doit être d'une durée de huit (8) heures lorsque la pause-repas est d'une demi-heure (1/2), et d'une durée de huit heures et demie (8 1/2) lorsque la pause-repas est de plus d'une demi-heure (1/2) et de moins d'une heure (1). Ces périodes de travail doivent être situées entre six (6) heures et dix-huit (18) heures, à moins que l'Alliance et l'Employeur n'en aient convenu autrement lors de consultations au niveau approprié.

Comme la semaine de travail normale des fonctionnaires était de 37 1/2 heures, la clause 21.03 ne peut s'appliquer puisque cette clause s'applique aux employés qui travaillent par postes, le jour ou la nuit. La clause 21.03 dit ce qui suit :

21.03 Dans le cas des employé-e-s qui travaillent par roulement ou de façon irrégulière

a) la durée normale du travail est portée à l'horaire de manière que les employé-e-s travaillent

(i) en moyenne trente-sept heures et demie (37 1/2) par semaine et en moyenne cinq (5) jours par semaine,

et soit (ii) sept heures et demie (7 1/2) par jour, ou (iii) une moyenne de sept heures et demie (7 1/2) par jour, lorsque l'employeur et la majorité des employé-e-s intéressés en conviennent,

(iv) sous réserve des nécessités du service, les jours de repos de l'employé-e sont consécutifs et leur nombre ne doit pas être inférieur à deux (2).

b) L'employeur fait tout effort raisonnable Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision (i) pour ne pas commencement de poste dans les douze (12) heures qui suivent la fin du poste précédent de l'employé-e;

(ii) pour éviter les fluctuations excessives de l'horaire de travail;

(iii) pour tenir compte des désirs de la majorité des employé-e-s touchés par la répartition des postes à l'intérieur d'un horaire de postes;

(iv) pour répartir les postes sur une période ne dépassant pas deux (2) mois et pour afficher les horaires au moins sept (7) jours avant la date de début du nouvel horaire.

Le représentant des fonctionnaires soutient par ailleurs que l'employeur, en discutant du changement individuellement avec chaque employé, n'a pas respecté la clause 21.06, qui prévoit ce qui suit :

21.06 L'employeur convient, avant de modifier l'horaire des heures de travail, de discuter des modifications avec le délégué approprié de l'Alliance si la modification touche la majorité des employé-e-s assujettis à cet horaire.

L'employeur n'a pas, comme il devait le faire, consulté l'agent négociateur avant de mettre le nouvel horaire en application.

2 e grief (répartition équitable des heures supplémentaires) Le représentant de l'Alliance se reporte à la pièce G-12, qui montre les variations dans les heures supplémentaires effectuées durant une certaine période du nouvel horaire. Il met l'accent sur le fait que l'on pourrait continuer de répondre aux besoins du client et que l'employeur devrait respecter la clause 21.14a), dont voici le libellé :

21.14 Répartition des heures supplémentaires Sous réserve des nécessités du service, l'employeur doit faire tout effort raisonnable

a) pour répartir les heures supplémentaires de façon équitable entre les employé-e-s qualifiés immédiatement disponibles, [...]

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Page 9 prévoir à l'horaire un

Décision Page 10 Il n'est pas raisonnable de chercher à faire du rattrapage maintenant, mais l'employeur devrait indemniser les employés soit en espèces ou en congés compensatoires.

3 e grief (préavis insuffisant) Le représentant se reporte à la clause 21.14b) que voici : 21.14 Répartition des heures supplémentaires Sous réserve des nécessités du service, l'employeur doit faire tout effort raisonnable

[...] b) pour donner aux employé-e-s tenus de faire des heures supplémentaires un préavis suffisant concernant cette exigence.

Selon le représentant des fonctionnaires, 16 h c'est beaucoup trop tard pour un préavis, et l'employeur devrait exiger des clients qu’ils le préviennent avant midi, à défaut de quoi il devrait rappeler ou mettre en attente d'autres inspecteurs.

Le représentant des fonctionnaires se réfère à la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans Procureur général du Canada c. R.S. Tucker, [1979] 1 C.F. 543.

Voici le résumé des arguments présentés par l'avocate de l'employeur. Selon l'avocate, le fardeau de la preuve incombe aux fonctionnaires puisqu'ils soutiennent que l'employeur n'a pas respecté la convention collective.

1 er grief (horaire de travail modifié) La direction a tous les droits auxquels elle n'a pas expressément renoncé (droits résiduels). L'avocate me renvoie à l'article 7 de la Loi sur la gestion des finances publiques et à l'article 7 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, ainsi qu'à l'article M-6 de la convention cadre de l'Alliance de la Fonction publique, qui prévoit ce qui suit :

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Décision Page 11 ARTICLE M-6 RESPONSABILITÉS DE LA DIRECTION M-6.01 sauf dans les limites indiquées, la présente convention ne restreint aucunement l'autorité des personnes chargées d'exercer des fonctions de direction dans la fonction publique.

La modification de l'horaire est devenue nécessaire à cause des nécessités du service et du fait que ce sont les besoins des clients qui dictent le fonctionnement de ce secteur d'activité. Les clients sont des producteurs de pommes de terre qui assurent un service du lundi au samedi. Les clauses 21.01 et 21.03 (supra) autorisent l'employeur à organiser le travail autour soit d'un horaire régulier soit d'un horaire par roulement ou irrégulier.

La mise en œuvre du nouvel horaire a été effectuée de la façon la plus équitable possible et les employés ont pu choisir entre un roulement toutes les deux ou toutes les quatre semaines. Pour ce qui est de la clause 21.06 (supra), des pourparlers ont eu lieu entre MM. Leblanc et Farrell, et M. Leblanc aurait pu à ce moment-là soulever toute préoccupation que lui ou l'agent négociateur pouvait avoir. Des discussions ont également eu lieu avec tous les employés individuellement, y compris avec M. Paynter, le vice-président de la section locale 90004.

L'opposition des fonctionnaires s'estimant lésés tient en réalité à la perte d'heures supplémentaires. Or les heures supplémentaires ne constituent pas un droit et les fonctionnaires ne peuvent soutenir qu'il y a eu infraction à la convention collective du fait qu'ils ont perdu des heures supplémentaires.

2 e grief (répartition équitable des heures supplémentaires) La clause 21.14a) (supra) dit clairement que la répartition équitable des heures supplémentaires est subordonnée aux nécessités du service. C'est à cause des exigences du service qu'on demande aux inspecteurs de demeurer sur place afin d'effectuer les heures supplémentaires contiguës, ce qui est la façon la plus pratique et la plus économique de procéder, et c'est le sous-bureau qui s'en charge. Il ne faut pas oublier que 80 % des heures supplémentaires sont contiguës; par conséquent, il est raisonnable de garder la personne sur les lieux plutôt que de faire venir un inspecteur d’ailleurs.

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Décision Page 12 3 e grief (préavis insuffisant) L'avocate me renvoie à la clause 21.14 (supra) qui prévoit que, sous réserve des nécessités du service, l'employeur doit faire tout effort raisonnable pour donner aux employés tenus de faire des heures supplémentaires un préavis suffisant concernant cette exigence. Parfois, les acheteurs ne donnent pas un long préavis de sorte que les producteurs/expéditeurs doivent réagir au marché ou risquer de perdre la vente. L'employeur a trouvé un juste équilibre avec l'industrie pour ce qui est des heures de service, et l'heure limite est 16 h. L'industrie/la clientèle fait les appels et l'employeur considère qu'il s'agit d'une nécessité du service. Toute l’opération repose sur les besoins du client et les inspecteurs doivent faire en sorte qu'on leur fournisse le service nécessaire.

L'avocate s'appuie sur la jurisprudence suivante de la Commission : R.A. Watier et J.R.J. Chartrand et le Conseil du Trésor (dossiers 166-2-321 et 166-2-322); M. Savard et H. Zirpdji et le Conseil du Trésor (dossiers 166-2-1768 et 166-2-1769); H. Zirpdji et M. Savard et le Conseil du Trésor (dossier 168-2-98); D. Freitag, M. Jorgenson, B. Souster, A. Waruk et D. Willis et le Conseil du Trésor (dossiers 166-2-28086 à 28090).

En guise de réfutation, le représentant des fonctionnaires fait valoir ce qui suit. Les changements ont été apportés pour des raisons financières, alors qu'il aurait fallu accroître les ressources parce que les clients avaient augmenté de façon importante. Il y a eu violation de la convention collective, qu'on aurait respecter. Un autre facteur clé est l'absence de discussion avec l'agent négociateur alors qu'on aurait obtenir son avis. Les changements apportés au cours des deux dernières années n'ont pas réglé les problèmes, et si les consultations avaient eu lieu, il aurait été possible d'envisager de nombreuses options et, par conséquent, de trouver des solutions à ces problèmes.

DÉCISION Il est clair à mes yeux que les fonctionnaires étaient tous visés par la clause 21.01 (supra) avant l'entrée en vigueur de la politique régionale sur les heures supplémentaires (pièce G-3) datée de septembre 1995. Après la mise en œuvre de la

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Décision Page 13 nouvelle politique, ils sont devenus des employés travaillant par roulement ou de façon irrégulière. Il est évident que l'employeur a adopté la nouvelle politique après avoir revu ses exigences opérationnelles à la lumière du coût de ses opérations et du service que l'industrie de la pomme de terre s'attendait à recevoir. Aussi injuste que le processus ait pu paraître aux yeux des fonctionnaires étant donné, notamment, qu'ils voyaient disparaître les heures supplémentaires effectuées régulièrement le samedi - je suis convaincu que, en vertu de l'article 7 de la Loi sur la gestion des finances publiques et de l'article 7 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, et aux termes aussi des diverses clauses de l'article 21 de la convention collective particulière du groupe, l'employeur avait le pouvoir de modifier les horaires de travail de façon à mieux gérer ses opérations à la lumière des demandes des clients. Les fonctionnaires n'ont nullement laissé entendre que l'employeur ne pouvait pas modifier l'horaire des postes; ce qu'ils soutiennent, c'est que l'employeur n'a pas discuté du changement comme la clause 21.06 l'obligeait à le faire.

En l'occurrence, M. Farrell a demandé à tous les surveillants d'expliquer les changements à chaque employé. Il a également parlé à M. Leblanc, le vice-président régional de l'Alliance, encore qu'il ait admis ne pas avoir discuté expressément avec lui des changements proposés, ni d'ailleurs avec aucun autre représentant syndical, avant leur mise en œuvre.

L'objet de l'obligation de consulter prévue à la clause 21.06 est de faire en sorte que l'agent négociateur soit mis au courant de tout changement qu'il est proposé d'apporter à l'horaire de travail et qu'il ait la possibilité de discuter avec la direction de toute préoccupation que les employés peuvent avoir à propos des changements proposés avant la mise en application de ces changements. Il s'agit d'une obligation envers l'agent négociateur que l'employeur doit respecter, et ce dernier ne se trouve pas à s'en acquitter en discutant individuellement des changements proposés avec les employés.

Je suis convaincu que l'employeur a modifié l'horaire de travail à cause des nécessités du service. Aucune preuve n'a été présentée comme quoi l'horaire de travail aurait été différent de ce qu'il est actuellement si les discussions voulues avaient eu lieu. En l'absence de preuves précises indiquant que l'absence de discussions a été

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Décision Page 14 préjudiciable aux fonctionnaires, je ne suis pas disposé à accorder le redressement demandé. Toutefois, je suis prêt à rendre une déclaration, et je déclare par conséquent que, en ce qui concerne la mise en œuvre du nouvel horaire de travail des fonctionnaires, l'employeur n'a pas respecté l'esprit de l’obligation de tenir des discussions que lui impose la clause 21.06 de la convention collective particulière du groupe. À cet égard, j'incite fortement l'employeur à prendre des mesures pour qu'il respecte intégralement cette obligation à l'avenir.

Pour ce qui est du deuxième grief, je suis convaincu que la méthode de répartition des heures supplémentaires est fondée sur les exigences du service. On ne m'a pas convaincu qu'il était possible de procéder autrement pour répartir équitablement ces heures. Il n'est ni pratique ni rentable de remplacer les inspecteurs sur place pour effectuer les heures supplémentaires contiguës, pas plus qu'il n'est possible de demander aux inspecteurs d'effectuer des heures supplémentaires à un autre emplacement (client) ou à un autre sous-bureau. Je rejette donc le deuxième grief.

Le troisième grief doit également être rejeté Dans l’industrie de la pomme de terre les producteurs, les courtiers, les clients et les inspecteurs entretiennent tous des relations entre eux. Comme il s’agit d’un marché compétitif, les producteurs doivent répondre aux demandes de leurs clients. Je suis convaincu que l'employeur a choisi 16 h comme heure limite à cause des nécessités du service et qu'il a pris une décision raisonnable afin de satisfaire aux besoins des producteurs et de tenir compte des préoccupations des employés. Je fais remarquer que, en ce qui concerne ces derniers, la direction respecte les engagements individuels des inspecteurs.

Jean Charles Cloutier, commissaire

OTTAWA, le 12 septembre 1997. Traduction certifiée conforme

Ginette Côté Commission des relations de travail dans la fonction publique

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