Décisions de la CRTESPF

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Résumé :

Compétence - Licenciement (motif non disciplinaire) - Renvoi en cours de stage - Contrôleur de la circulation aérienne - paragraphe 92(3) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique - le 10 juin 1994, le fonctionnaire, qui travaillait en qualité de contrôleur pour les Forces canadiennes (FC), a accepté de participer comme stagiaire au programme de formation en classe et en salle de simulation des contrôleurs en circulation aérienne en vue d'être admis comme contrôleur IFR (Règles de vol aux instruments) - il a été en stage pendant toute la durée du programme de formation - dans le cadre de sa formation, il devait d'abord être admis comme contrôleur VFR (Règles de vol à vue) - l'employeur, non satisfait des progrès du fonctionnaire s'estimant lésé durant la formation VFR, l'a renvoyé en cours de stage le 24 janvier 1996 - le fonctionnaire s'estimant lésé a déposé un grief pour contester son renvoi en cours de stage - l'employeur s'est opposé à la compétence de l'arbitre d'entendre le grief aux termes du paragraphe 92(3) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique - lors de l'audience, le fonctionnaire s'estimant lésé a prétendu que l'employeur avait fait preuve de mauvaise foi en le renvoyant en cours de stage et que, dans des circonstances, la jurisprudence établit qu'un arbitre a compétence pour entendre les griefs - l'employeur a fait valoir que le fonctionnaire s'estimant lésé tentait de renvoyer un nouveau grief à l'arbitrage vu qu'il n'avait pas auparavant soulevé la question de la mauvaise foi - l'arbitre a conclu que le grief, dans sa forme originale, ne faisait aucune référence à la mauvaise foi et que, par conséquent, le fonctionnaire s'estimant lésé ne pouvait pas soulever cette question pour la première fois à l'arbitrage - quoi qu'il en soit, la preuve n'a pas étayé les allégations du fonctionnaire s'estimant lésé concernant la mauvaise foi de l'employeur durant le programme de formation - absence de compétence - de plus, l'arbitre était convaincu, sur la foi de la preuve, que l'employeur avait des motifs d'être insatisfait des progrès du fonctionnaire s'estimant lésé durant le stage de formation. Grief rejeté. Décisions citées: Canada (Procureur général) v. Penner (1980), 99 N.R. 213 (C.A.F.); Burchill c. Le Procureur général du Canada, [1981] 1 C.F. 109, 37 N.R. 530 (C.A.F.); Sa Majesté la Reine (Conseil du Trésor) et Mario Rinaldi (Dossier de la Cour no T-761-96) (C.F. 1ère inst.).

Contenu de la décision

Dossier: 166-2-27346 Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE THOMAS EARLE fonctionnaire s'estimant lésé et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Transports Canada)

employeur Devant: J. Barry Turner, commissaire Pour le fonctionnaire s'estimant lésé: Stuart Rush, avocat Pour l'employeur: Harvey Newman, avocat Affaire entendue à Vancouver (Colombie-Britannique), les 26 et 27 mars 1997 et achevée par conférence téléphonique à Ottawa le 7 mai 1997.

Decision Page 1 DÉCISION Le 10 juin 1994, le fonctionnaire s'estimant lésé, M. Thomas Earle, qui travaillait alors pour les Forces canadiennes, a appris que sa candidature avait été retenue pour participer comme stagiaire au programme de formation en classe et en salle de simulation des contrôleurs en circulation aérienne, Règles de vol aux instruments (IFR) à l'Institut de formation de Transports Canada (IFTC), Cornwall (Ontario). Il a signé et accepté l'offre le 24 juin 1994 (pièce G-2) ainsi que l'Annexe A de la pièce G-2, laquelle se lit en partie comme suit : [traduction] 2. Périodes de stage : a) Vous serez en stage pendant la durée du programme de formation. Si vous ne réussissez pas à être admis comme contrôleur IFR, vous serez renvoyé en cours de stage à moins de satisfaire aux exigences décrites au paragraphe 2d).

[...] d) Les stagiaires qui terminent avec succès le cours régional IFR (théorie et simulation) et qui entreprennent la dernière étape de la formation IFR en milieu de travail décrite dans le programme de formation de l'unité (PFU) seront considérés comme des candidats possibles pour des postes IFR. Les stagiaires qui échouent à cette étape de leur formation IFR se verront offrir la possibilité de recevoir la formation voulue pour occuper des postes vacants à la tour de contrôle. Une fois admis comme contrôleur VFR, les stagiaires cessent de faire partie du Programme de formation des contrôleurs en circulation aérienne- IFR.

Le 24 janvier 1996, M. Earle a été avisé par A.S. Campbell, directeur régional intérimaire, Services de la circulation aérienne, Région du Pacifique, Vancouver, qu'il était renvoyé en cours de stage parce qu'il n’avait pas satisfait aux exigences du programme de formation (pièce G-7). Cet avis se lit comme suit : [traduction] La présente fait suite à votre discussion avec Linda Todd, gestionnaire, tour de Boundary Bay, au cours de laquelle vous avez été avisé qu'elle recommandait de mettre fin à votre formation pour devenir contrôleur de la circulation aérienne dans le cadre du cours régulier IFR. Un comité d’examen des progrès des stagiaires vient de terminer l'étude de votre

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Decision Page 2 dossier. Il a approuvé la recommandation de mettre fin à votre formation.

Comme vous n'avez pas réussi à satisfaire aux normes de ce programme de formation, je dois vous informer que vous êtes renvoyé pour le motif que vous ne répondez pas aux exigences du programme de formation des contrôleurs de la circulation aérienne - Règles de vol aux instruments. Votre emploi comme contrôleur stagiaire de la circulation aérienne prendra fin à la fermeture des bureaux le 7 février 1996.

Je profite de l'occasion pour vous souhaiter tout le succès possible dans ce que vous entreprendrez à l’avenir.

Il y a lieu de faire remarquer que la tour de Boundary Bay se trouve en périphérie de la région de Vancouver.

Le 14 février 1996, M. Earle a déposé le grief suivant qui a été renvoyé à l'arbitrage le 10 juin 1996 : [traduction] Le 22 juin 1995, j'ai commencé ma formation à la tour de contrôle de Boundary Bay. Lorsque je suis arrivé, j'ai été informé que mon instructeur ne voulait pas de stagiaire, mais que la direction l’avait obligé d'en accepter un. J'ai subséquemment été confié à un autre instructeur au sein de l'unité. J'ai été informé que ce nouvel instructeur n'avait pas bonne réputation auprès des stagiaires. J'ai commencé une formation conditionnelle et j'ai reçu cinq jours de formation pour corriger des lacunes sur le plan de la phraséologie. On a recommandé de mettre fin à ma formation après seulement jours de formation. Je crois que la formation que j'ai reçue était de qualité inférieure et qu'elle ne respectait pas les lignes directrices de Transports Canada.

Comme mesure de redressement, M. Earle demande ce qui suit : [traduction] Que je sois réintégré dans le cours régulier IFR en vue de recevoir de la formation à la tour de contrôle de la région ou du terminal du CCR et que je sois autrement indemnisé.

Par lettre datée du 12 mars 1997 adressée à la Commission des relations de travail dans la fonction publique, l'avocat de l'employeur a avisé la Commission qu’il contestait la compétence d’un arbitre d'entendre ce grief. La lettre se lit comme suit : Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 3 [traduction] Le présent renvoi à l'arbitrage a été mis au rôle en vue d’être entendu à Vancouver les 26 et 27 mars. Le grief est fondé sur un renvoi en cours de stage d'un contrôleur stagiaire de la circulation aérienne. Le fonctionnaire s'estimant lésé, dans son grief, se plaint de la mauvaise qualité de la formation qu'il a reçue à la tour de contrôle de Boundary Bay et, d'après le dossier, rien n’indique que le grief relève des dispositions de l'article 92 de la LRTFP.

La position de l'employeur est qu'un arbitre n'a pas compétence pour entendre le grief à l'arbitrage et que celui-ci devrait être rejeté.

L'article 92 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) se lit comme suit : 92.(1) Après l'avoir porté jusqu'au dernier palier de la procédure applicable sans avoir obtenu satisfaction, un fonctionnaire peut renvoyer à l'arbitrage tout grief portant sur :

a) l'interprétation ou l'application, à son endroit, d'une disposition d'une convention collective ou d'une décision arbitrale;

b) dans le cas d'un fonctionnaire d'un ministère ou secteur de l'administration publique fédérale spécifié à la partie I de l'Annexe I ou désigné par décret pris au titre du paragraphe (4), soit une mesure disciplinaire entraînant la suspension ou une sanction pécuniaire, soit un licenciement ou une rétrogradation visé aux alinéas 11(2)f) ou g) de la Loi sur la gestion des finances publiques;

c) dans les autres cas, une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la suspension ou une sanction pécuniaire.

(2) Pour pouvoir renvoyer à l'arbitrage un grief du type visé à l'alinéa (1)a), le fonctionnaire doit obtenir, dans les formes réglementaires, l'approbation de son agent négociateur et son acceptation de le représenter dans la procédure d'arbitrage.

(3) Le paragraphe (1) n'a pas pour effet de permettre le renvoi à l'arbitrage d'un grief portant sur le licenciement prévu sous le régime de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

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Decision Page 4 (4) Le gouverneur en conseil peut, par décret, désigner, pour l'application de l'alinéa (1)b), tout secteur de l'administration publique fédérale spécifié à la partie II de l'Annexe I.

Dès le début de l'audience, j'ai informé les parties que j'entendrais d'abord leurs arguments sur la question de la compétence.

Argument de l'employeur sur la compétence M e Newman a fait valoir que la question dont je suis saisi n'est manifestement pas visée par la convention collective; il s'agit purement et simplement d'un renvoi en cours de stage. Le fonctionnaire s'estimant lésé était stagiaire pendant toutes les périodes pertinentes de sa formation. M e Newman a soutenu qu'il n'est aucunement fait mention de mesure disciplinaire dans le libellé du grief. Il a conclu qu'il n'y a rien à première vue dans le grief qui m'autorise à exercer ma compétence.

M e Newman a fait référence à la réponse de l'employeur au premier palier de la procédure de règlement des griefs (pièce G-9), datée du 26 février 1996, qui se lit comme suit : [traduction] OBJET : RÉPONSE AU PREMIER PALIER DE LA PROCÉDURE DE RÈGLEMENT DES GRIEFS

J'ai examiné toutes les faits se rapportant à votre grief. Non seulement la qualité de la formation que vous avez reçue de votre ICE à Boundary Bay était conforme aux lignes directrices du TP1016E et du PFU à la tour de Boundary Bay mais, dans le cas de celle donnée par M. Le Noury, elle était de qualité supérieure quant au temps et aux efforts qu'il a fournis.

Votre incapacité à atteindre le niveau de compétence requis n’était pas attribuable à la formation que vous avez reçue, mais à votre incapacité à retenir et à appliquer ce qu'on vous montrait.

Étant donné que vous avez été incapable de satisfaire aux normes du programme de formation des contrôleurs de la circulation aérienne - IFR, vous avez été rejeté en cours de stage et il a été mis fin à votre emploi.

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Decision Page 5 Votre grief est donc rejeté. M e Newman a également cité la réponse de l'employeur au dernier palier de la procédure (pièce G-11), datée du 29 mai 1996, qui se lit comme suit : [traduction] DÉCISION DU REPRÉSENTANT AUTORISÉ DE L'EMPLOYEUR Votre grief au dernier palier de la procédure de règlement des griefs concernant votre renvoi en cours de stage pour un motif déterminé a été examiné attentivement et a été discuté avec votre représentant national de l'ACCTA.

La preuve concluante indique que vous avez eu toutes les chances de satisfaire aux exigences pour devenir contrôleur stagiaire de la circulation aérienne. En dépit des efforts considérables déployés pour vous aider à atteindre les résultats attendus, vous avez été incapable de satisfaire aux exigences de la troisième étape du programme de formation.

Vu ces conclusions, votre grief ne peut être accueilli. Il est donc rejeté par les présentes.

M e Newman a conclu que d'après la décision de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Burchill c. Le procureur général du Canada, [1981] 1 C.F. 109, 37 N.R. 530, le fonctionnaire s'estimant lésé ne peut aujourd'hui transformer son grief en vue de contester autre chose qu'un renvoi en cours de stage; il ne peut alléguer la mauvaise foi ou le caractère arbitraire de la décision de l’employeur pour la première fois à l'arbitrage.

M e Newman a aussi fait valoir que la décision rendue par l'ancien vice-président Tenace dans l'affaire Perreault (dossier de la Commission 166-2-26094), indique clairement que je n'ai pas compétence aux termes du paragraphe 92(3) de la LRTFP pour entendre l'affaire dont je suis saisi. La partie la plus importante de la décision Perreault (précitée) se lit comme suit à la page 22 : La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, par contre, a été modifiée par l'ajout d'un nouveau paragraphe 92(3) qui, de toute évidence, interdit expressément et sans équivoque le renvoi à l'arbitrage d'un grief portant sur le (c.-à-d. tout) licenciement prévu sous le régime de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

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Decision Page 6 Sans aucun doute, le Parlement avait un objectif en vue en ajoutant le paragraphe 92(3) à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Je ne m'explique pas pourquoi le gouvernement se serait donné tout le mal qu'il s'est donné, d'abord en procédant à l'exercice Fonction publique 2000, puis en franchissant toutes les étapes du long processus menant à l'adoption de la Loi sur la réforme de la fonction publique, s'il n'avait pas l'intention de modifier les modalités régissant le «renvoi en cours de stage».

Une interprétation franche du libellé du paragraphe 92(3) nous amène inexorablement à conclure qu'un grief portant sur le licenciement prévu sous le régime de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique ne peut être renvoyé à l'arbitrage. Or, le renvoi en cours de stage se fait en vertu de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. À mon avis, il s'agit en l'espèce d'un licenciement prévu sous le régime de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. S'il existe un recours, il est prévu par une autre disposition législative.

(c'est moi qui souligne.) M e Newman m’a renvoyé aux alinéas 11(2)f) et g) ainsi qu'au paragraphe 11(4) de la Loi sur la gestion des finances publiques qui se lisent comme suit : 11 (2) Sous réserve des seules dispositions de tout texte législatif concernant les pouvoirs et fonctions d'un employeur distinct, le Conseil du Trésor peut, dans l'exercice de ses attributions en matière de gestion du personnel, notamment de relations entre employeur et employés dans la fonction publique :

f) établir des normes de discipline dans la fonction publique et prescrire les sanctions pécuniaires et autres, y compris le licenciement et la suspension, susceptibles d'être appliquées pour manquement à la discipline ou pour inconduite et indiquer dans quelles circonstances, de quelle manière, par qui et en vertu de quels pouvoirs ces sanctions peuvent être appliquées, modifiées ou annulées, en tout ou en partie;

g) prévoir, pour des raisons autres qu'un manquement à la discipline ou une inconduite, le licenciement ou la rétrogradation à un poste situé dans une échelle de traitement comportant un plafond inférieur des personnes employées dans la fonction publique et indiquer dans quelles circonstances, de quelle manière, par qui et en vertu de quels pouvoirs ces mesures peuvent être appliquées, modifiées ou annulées, en tout ou en partie;

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Decision Page 7 (4) Les mesures disciplinaires, le licenciement ou la rétrogradation effectués en application des alinéas (2)f) ou g) doivent être motivés.

L'article 28 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, qui traite du stage, se lit comme suit :

Durée du stage 28. (1) À partir de la date de sa nomination à un poste pourvu par nomination externe, le fonctionnaire est considéré comme stagiaire durant la période fixée par règlement par la Commission pour lui ou la catégorie de fonctionnaires dont il fait partie.

(1.1) Une nouvelle nomination ou une mutation n'interrompt pas le stage.

(2) À tout moment au cours du stage, l'administrateur général peut aviser le fonctionnaire de son intention de le renvoyer, pour un motif déterminé, au terme du délai de préavis fixé par la Commission pour lui ou la catégorie de fonctionnaires dont il fait partie. Le fonctionnaire perd sa qualité de fonctionnaire au terme de cette période.

M e Newman a conclu qu'en vertu des dispositions législatives citées ci-dessus je n'ai pas compétence.

Il y a lieu de faire remarquer que les arguments des deux parties relatives à ma compétence ont commencé à Vancouver le 26 mars 1997 et se sont poursuivis au cours d'une conférence téléphonique à Ottawa le mercredi 7 mai 1997 après que les parties eurent reçu la traduction officielle de la décision de la Section de première instance de la Cour fédérale du Canada dans l’affaire Sa Majesté la Reine (Conseil du Trésor) et Mario Rinaldi, dossier de la Cour T-761-96.

M e Newman a aussi soutenu que la décision de la Section de première instance de la Cour fédérale du Canada, dans l'affaire Rinaldi, datée du 25 février 1997, est déterminante pour ce qui est de ma compétence même si le juge Noël n'est pas entièrement d'accord avec la décision Perreault (précitée).

M e Newman a soutenu que la note 15 du juge Noël au bas de la page 8 de la décision Rinaldi (précitée) confirme également que je n'ai pas compétence pour

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Decision Page 8 entendre l'affaire dont je suis saisi, que l'employeur ait pris sa décision de bonne ou de mauvaise foi.

Cette note se lit comme suit : J'insiste ici sur le fait que dans la mesure ou (sic) un licenciement a lieu en vertu de l'article 29, une simple démonstration de mauvaise foi ou d'intention malveillante de la part de l'employeur (tel par exemple la preuve d'un désir manifeste de se débarrasser de l'employé à la première occasion) n'aurait pas pour effet d'attribuer juridiction à l'arbitre puisque, mauvaise foi ou non, il s'agirait toujours d'un grief portant sur un licenciement prenant place sous le régime de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique lequel est exclu de la juridiction de l'arbitre par l'article 92(3) de la Loi sur les conditions de travail dans la fonction publique. La seule façon de démontrer que le licenciement n'a pas eu lieu en vertu de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique face à son invocation par l'employeur serait de démontrer que de fait les conditions requises pour sa mise en œuvre n'existaient pas au moment pertinent et que donc le licenciement ne peut avoir eu lieu sous le régime prévu par cette Loi.

M e Newman a soutenu qu'à son avis une «brèche avait été ouverte» pour me permettre d'exercer ma compétence s’il peut être démontré que le fonctionnaire s'estimant lésé n'était pas en stage durant la période pertinente. Il a également fait remarquer que le juge Noël n'est pas totalement en désaccord avec la décision Perreault (précitée) lorsqu'il dit dans l'affaire Rinaldi (précitée) à la page 10 : Dans l'affaire Perreault c. Conseil du Trésor (Transports Canada) l'employeur, se fondant sur l'arrêt Burchill, tenta d'écarter un grief au motif que l'allégation de mauvaise foi qui fut énoncée pour la première fois devant l'arbitre avait comme effet de transformer le grief original en un nouveau grief. L'arbitre Tenace disposa de cet argument comme suit :

... l'avocat de l'employeur a soutenu en outre que le fonctionnaire s'estimant lésé avait renvoyé à l'arbitrage un nouveau grief dans la mesure il alléguait la mauvaise foi de l'employeur pour la première fois à l'audience d'arbitrage. À mon avis, le sens des propos du fonctionnaire s'estimant lésé et son intention ont été relativement clairs tout au long de la procédure. À son avis, on ne lui a «pas vraiment donné une chance» au cours de sa

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Decision Page 9 période de formation et il avait l'impression que la direction voulait se défaire de lui. Cela devient tout à fait évident lorsqu'on lit le long document que le fonctionnaire s'estimant lésé a joint à son grief. À mon avis, les faits n'appuient pas le raisonnement exprimé dans l'arrêt Burchill (supra), qui n'est pas pertinent en l'espèce.

L'arbitre a donc conclu que l'allégation de mauvaise foi ne changeait pas la nature du grief. Selon lui, la position de l'employé avait été relativement claire tout au long des procédures. L'allégation de mauvaise foi même si elle ne fut formellement énoncée qu'une fois devant l'arbitre n'apportait rien de nouveau au grief et n'en changeait pas la nature.

M e Newman a fait référence à la décision de la Cour d'appel fédérale dans Canada (Procureur général) c. Penner, [1989] 3 C.F. 429, 99 N.R. 213 qui confirme clairement aussi que je dispose de peu de jeu pour assumer compétence en l'espèce. Il a précisé que la décision Penner (précitée) a été rendue avant la modification de l'article 92 de la LRTFP.

M e Newman a soutenu que je pourrais trancher l'affaire sur le fond seulement si le fonctionnaire s'estimant lésé peut démontrer que son renvoi en cours de stage a été fait de façon artificielle. Toutefois, a-t-il conclu, le renvoi en cours de stage a été fait en toute bonne foi pour un motif déterminé.

Argument du fonctionnaire s'estimant lésé sur la compétence M e Rush a soutenu que si le renvoi en cours de stage du fonctionnaire s'estimant lésé a été fait de mauvaise foi ou de façon arbitraire, alors je devrais assumer compétence et trancher le grief sur le fond.

M e Rush a invoqué l'arrêt de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Jacmain c. Canada (Le procureur général), [1978] 2 R.C.S. 15, qui a conclu qu'un renvoi en cours de stage ne peut être contesté à moins que le comportement de l'employeur soit teinté de mauvaise foi. Il a également fait référence à l’affaire Penner (précitée) le juge conclut que la décision de l'employeur de renvoyer quelqu'un en cours de stage doit être prise de bonne foi (pages 217 et 219). Il a convenu que l’affaire Perreault (précitée) ferme la porte à toute possibilité de contester un véritable renvoi en cours de stage, mais, a-t-il ajouté, l'arbitre Tenace a «fermé les yeux» sur la question de la

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Decision Page 10 mauvaise foi dans cette affaire. Il a soutenu que même en tenant compte du nouveau paragraphe 92(3) de la LRTFP, l'employeur est toujours tenu d'agir de bonne foi vu que les actes de mauvaise foi sont universellement interdits. Autrement, un employeur pourrait facilement éviter les conséquences d'actes illégaux, de manoeuvres rusées, de mauvaise volonté, de sentiment anti-syndical ou autre. Il a soutenu que si le licenciement de M. Earle était motivé par la mauvaise foi, alors le fait de l'appeler un renvoi en cours de stage n'est qu'un subterfuge utilisé par l'employeur et sa décision ne peut être maintenue.

Premièrement, M e Rush a soutenu qu'en ce qui concerne la décision du juge Noël dans l’affaire Rinaldi (précitée), soit que s'il est possible d'établir que les agissements de l'employeur n'étaient pas de la nature d’un véritable licenciement mais bien de la mauvaise foi, alors le paragraphe 92(3) de la LRTFP ne pose pas obstacle à la compétence. Il estime, par conséquent, que l'arbitre Galipeau ne s'est pas trompée en rendant sa décision dans l'affaire Rinaldi (dossier de la Commission 166-2-26927) du fait que le juge Noël écrit à la page 3 : [...] l'arbitre a décidé qu'elle avait compétence pour faire droit au grief dans l'hypothèse l'intimé réussissait à la convaincre que sa mise en disponibilité était un subterfuge pour mettre fin à son emploi. [...]

Le juge Noël renforce cette conclusion en disant à la page 7 : [...] Or l'hypothèse sur laquelle l'arbitre a fondé sa décision rejoint carrément la situation l'employeur camoufle un congédiement illégal sous l'égide de l'abolition d'un poste en invoquant de façon factice cette Loi. Il va de soi qu'il s'agirait d'une situation qui tombe dans le champs (sic) de compétence dévolu à l'arbitre en vertu de l'article 92(1)b) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.

Me Rush a ajouté que le juge Noël a précisé à la page 8 : Ceci demeure tout aussi vrai si l'intimé pouvait établir l'existence d'une relation de travail tourmentée. Il faudrait qu'il démontre au delà de ceci que l'invocation par l'employeur de l'article 29 est factice. 1 5 M e Rush a soutenu en outre, au sujet de la note 15 au bas de la page 7, que le principe évoqué par M e Newman n'est pas un principe véritable ou un principe sur lequel je puis me fonder en l’espèce étant donné qu'il estimait que la note en bas de

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Decision Page 11 page devait être considérée comme un propos accessoire. Lue dans ce contexte, estime M e Rush, cette note ne peut l'emporter sur le principe de bonne foi-mauvaise foi établi dans l’affaire Penner (précitée).

Deuxièmement, M e Rush a soutenu que le juge Noël se contredit en disant que la mauvaise foi ne peut servir de camouflage pour protéger quelqu'un de l'application d'une loi. Le juge Noël a dit que le renvoi d'une personne en cours de stage est fait de façon factice s'il s'agit d'un camouflage; par conséquent, il ne devrait pas non plus être possible d’exclure la mauvaise foi de l’argument. Selon M e Rush, le point de vue exprimé par le juge Noël au sujet de la mauvaise foi dans la note en bas de page numéro 15 est trop restrictif en ce sens qu'il contredit la jurisprudence plus générale qui devrait me lier. De plus, il estime que cette note contredit aussi l'arrêt de la Cour d'appel fédérale dans l’affaire Penner (précitée) et qu’elle ne peut l'emporter sur ce jugement. Il a soutenu que la bonne foi est l'exigence la plus fondamentale du droit et qu'il faut en tenir compte en l'espèce.

Il a cité un extrait de la décision Penner (précitée), paragraphe 11 : [11] Il est clair que cinq des neuf juges ayant rendu le jugement dans l'affaire Jacmain ont exprimé l'opinion qu'un arbitre saisi d'un grief déposé par un employé renvoyé en cours de stage a le droit d'examiner les circonstances de l'affaire pour s'assurer qu'elle soit réellement ce qu'elle semble être. Cet examen serait effectué en application du principe selon lequel la forme ne devrait pas l'emporter sur le fond. L'on ne peut tolérer que, par l'effet d'un camouflage, une personne soit privée de la protection que lui accorde une loi. En fait, la question qui entre alors en jeu est celle de la bonne foi, l'exigence légale qui est la plus fondamentale lorsqu'il s'agit de défendre la validité juridique de toute forme d'activité.

M e Rush a conclu que le juge Noël, dans l’affaire Rinaldi (précitée), ne considère pas l'affaire Perreault (précitée) et la mauvaise foi comme un facteur, et que je ne suis pas lié par la décision rendue dans l'affaire Perreault tout comme l'arbitre Galipeau ne l'était pas dans l’affaire Rinaldi (précitée). D'après lui, je ne suis pas non plus lié par l'affaire Rinaldi et je devrais exercer ma compétence en l'espèce.

En réfutation, M e Newman a soutenu que si la note en bas de page numéro 15 de la décision du juge Noël est un propos accessoire, c'est un propos accessoire motivé

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Decision et il ne peut être rejeté du revers de la main. Si l'on examine l'affaire Rinaldi (précitée) à la lumière de l'affaire Penner, le juge Noël ne contredit pas Penner. M ajouté que l'affaire dont je suis saisi relève désormais d’un autre régime de lois.

En ce qui concerne l'argument relatif au camouflage, M e Newman a affirmé qu'un arbitre ne peut perdre sa compétence qu'en vertu de la LEFP étant donné qu'il doit être convaincu qu'il y a eu licenciement aux termes de la LEFP, et, en l'espèce, le fonctionnaire devait être en stage. Il a soutenu que le juge Noël a raison dans l’affaire Rinaldi (précitée) lorsqu'il dit au début de la page 6 : [...] Par ailleurs, le sous-alinéa (3) de l'article 92 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique précise qu'un grief portant sur un licenciement effectué sous le régime de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique ne peut être renvoyé à l'arbitrage.

Le stage est visé par la LEFP de telle sorte qu’il constitue un empêchement au renvoi à l’arbitrage d’un cas comme celui-ci. M e Newman a soutenu que le fonctionnaire ne peut continuer d'invoquer la LRTFP étant donné qu'il doit véritablement y avoir abolition de poste pour que cet argument ait une chance de réussir. Il a ajouté qu'il n'y a pas de licenciement aux termes de la LEFP s’il y a abolition de poste. Pour étayer son argument, M e Newman m'a renvoyé à la dernière phrase de la note en bas de page numéro 15 de l’affaire Rinaldi (précitée) qui se lit comme suit :

[...] La seule façon de démontrer que le licenciement n'a pas eu lieu en vertu de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique face à son invocation par l'employeur serait de démontrer que de fait les conditions requises pour sa mise en oeuvre n'existaient pas au moment pertinent et que donc le licenciement ne peut avoir eu lieu sous le régime prévu par cette Loi.

Il a conclu sur ce point que pour réussir en l’espèce, le fonctionnaire s'estimant lésé devait prouver qu'il n'était pas en stage. Or, il a été convenu qu'il l'était. L'avocat a conclu qu'il importe peu, par conséquent, que son renvoi en cours de stage ait été fait de bonne ou de mauvaise foi. Le juge Noël a conclu dans l’affaire Rinaldi (précitée) que, si l'intimé pouvait démontrer qu’il n'y avait pas eu abolition de poste, alors l'employeur pouvait avoir camouflé son licenciement. Mais il n'y a pas eu abolition de poste en l’espèce.

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Page 12 e Newman a

Decision Page 13 M e Newman, tout en convenant que je n'étais pas lié par l’affaire Perreault (précitée), m'a rappelé que le juge Noël n'avait pas renversé la décision Perreault (précitée). Il s’agit donc d’une décision fort convaincante.

En ce qui concerne la référence de M e Rush à l’affaire Penner (précitée), M e Newman a cité l'observation du juge Marceau à la page 219, paragraphe 12, qui se lit comme suit : [12] La conclusion fondamentale de l'arrêt Jacmain est, à mon avis, qu'un arbitre nommé sous le régime de la L.R.T.F.P. est sans compétence à l'égard d'un renvoi en cours de stage lorsque la preuve présentée le convainc que les représentants de l'employeur ont agi de bonne foi au motif qu'ils ne considéraient pas que l'employé possédait les aptitudes requises pour occuper le poste visé. Et cette conclusion, selon moi, découle inexorablement des dispositions législatives actuellement en vigueur.

M e Newman m'a rappelé que je n'ai pas à déterminer si l'employeur a bien ou mal jugé les aptitudes de M. Earle à devenir contrôleur de la circulation aérienne, mais seulement si j'ai ou non compétence pour trancher l'affaire.

L’avocat a conclu en disant que je dois tenir compte de toutes les observations de la Cour fédérale dans l’affaire Rinaldi (précitée) et que cet arrêt dit en fait que le renvoi d'un employé en cours de stage n'est pas arbitrable. En concluant ses remarques au sujet de l’affaire Rinaldi (précitée), M e Rush a dit que je ne devrais pas tenir compte du propos accessoire du juge Noël; de plus, si le renvoi a été fait de mauvaise foi, il ne peut de fait s'agir d'un renvoi en cours de stage; la forme ne devrait pas avoir préséance sur le fond; en dernier lieu, si j'examine les termes employés dans la note en bas de page numéro 15 : «n'existait pas au moment pertinent», il s'agit du contexte même invoqué par M e Rush dans son argument concernant l'insuffisance de la formation IFR étant donné que la condition «n'existait pas» au moment pertinent comme l'a prétendu M. Earle dans son grief.

M e Rush m'a demandé de rejeter l'argument de l'employeur selon lequel je n'ai pas compétence puisqu'il croit que l'employeur a bien fait preuve de mauvaise foi en l'espèce.

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Decision Page 14 Arguments des deux parties en réfutation M e Newman a fait remarquer que M e Rush n'a rien dit au sujet du renvoi à l'affaire Burchill (précitée) parce que le grief dont je suis saisi ne fait pas état d'acte de mauvaise foi mais simplement de formation insuffisante. Il a ajouté que cela est fatal en ce qui a trait à la poursuite de l'audience étant donné que l'obstacle que constitue l'affaire Burchill (précitée) est énorme.

J'ai indiqué à M e Rush que j'étais moi-même préoccupé de la nouvelle orientation donnée au grief puisqu'il est maintenant question de mauvaise foi et non plus de formation insuffisante.

M e Rush a répondu que même l'employeur, dans sa lettre datée du 24 janvier 1996 (pièce G-7), ne fait pas spécifiquement référence au renvoi en cours de stage. Le fonctionnaire s'estimant lésé a déposé son grief dès le 14 février 1996 étant donné qu'il croyait, comme l'indique son grief, que la formation qu’il avait reçue : «était de qualité inférieure et qu'elle ne respectait pas les lignes directrices de Transports Canada Selon M e Rush, il s'agissait de mauvaise foi. M e Rush m'a également renvoyé à la réponse de l'employeur au premier palier de la procédure de règlement des griefs (pièce G-9), datée du 26 février 1996, il est dit en partie que le fonctionnaire s'estimant lésé a «été incapable de satisfaire aux normes du programme de formation des contrôleurs de la circulation aérienne - IFR.» M e Rush a soutenu que le fonctionnaire s'estimant lésé estimait qu’il ne recevait pas la formation IFR. Il a ajouté que c'est dans la lettre de licenciement de M. Slade, datée du 19 mars 1996 (pièce G-10) qu'il a été question pour la première fois d'un «renvoi pour un motif déterminé».

M e Newman a fait remarquer que cette affirmation n'était pas juste étant donné que l’employeur, dans sa première lettre datée du 24 janvier 1996 (pièce G-7), emploie exactement ces mots-là. Il a ajouté que le terme «renvoi» est le terme normalement employé dans le cas d’un employé en période de stage.

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Decision Page 15 M e Rush a déclaré qu'il semble que l'employeur a d'abord renvoyé le fonctionnaire en cours de stage puis pour un motif déterminé, ce qui dénote de la mauvaise foi.

M e Rush a conclu qu'il semble, en bout de ligne, que le fonctionnaire s'estimant lésé ait été renvoyé en cours de stage pour un motif autre que son incapacité à satisfaire aux exigences de l'Annexe A (pièce G-3), soit les Conditions du programme de formation des contrôleurs de la circulation aérienne, Règles de vol aux instruments, IFR.

Il a soutenu que le libellé du grief est suffisamment général pour laisser sous-entendre la mauvaise foi.

Pour étayer cet argument, il m'a renvoyé à l'affaire Tighe et le Conseil du Trésor (Environnement Canada) (1985), 22 L.A.C. (3d) 311, page 15, on peut lire en partie :

Dans l'affaire Burchill (supra), l'employé s'estimant lésé a d'abord formulé son grief en fonction de son statut d'employé nommé pour une période indéterminée. Il n'y faisait aucune allusion, ni explicite ni implicite, à une mesure disciplinaire. En conséquence, la Cour d'appel fédérale a jugé que l'arbitre n'avait pas compétence. Selon mon interprétation de la décision Burchill (supra), il n'est pas nécessaire, d'après le paragraphe 91(1) de la Loi, qu'un grief, dans sa forme originale, contienne une allégation formelle de mesure disciplinaire pour qu'il puisse être renvoyé à l'arbitrage, mais il faut que ce soit un grief «au sujet» d'une mesure disciplinaire. Dans la présente affaire, il est incontestable que le mot «discipline» n'apparaît pas dans l'exposé du grief, mais on peut soutenir que le grief en question concernait une mesure disciplinaire. Pour savoir si tel était bien le cas, il faut déterminer si le renvoi en cours de stage peut être considéré comme une mesure disciplinaire. En d'autres termes, le grief conteste une décision de la direction qui a entraîné la cessation de l'emploi de l'employé s'estimant lésé. Si cette décision peut à juste titre être qualifiée de mesure disciplinaire entraînant le congédiement, le grief, tel qu'il a été présenté à l'employeur, serait un grief «au sujet d'une mesure disciplinaire» et il pourrait alors être renvoyé à l'arbitrage, en dépit de la décision Burchill (supra).

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Decision Page 16 Il m'a également renvoyé aux affaires Liquid Carbonic Inc. and United Steelworkers (1992), 25 L.A.C. (4th) 144 et Canada Kitchens Ltd. and United Brotherhood of Carpenters and Joiners of America, Local 1072 (1996), 58 L.A.C. (4th) 222 en m’invitant à donner une interprétation large au libellé du grief de M. Earle. Il a soutenu que le «fonctionnaire s'estimant lésé ne devrait pas être empêché de recourir à la procédure parce qu'il n'a pas employé des termes juridiques ou astucieux».

M e Newman a soutenu que ce ne sont pas les termes techniques mal choisis qui font problème mais bien l'absence de toute mention de mauvaise foi. Il m'a rappelé qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'un congédiement disciplinaire et qu'il est trop tard pour demander l'ajournement de l'affaire en vue de changer la question qui m'est soumise en remplaçant un grief par un autre.

J'ai indiqué que je réservais ma décision relativement à ma compétence. J’ai aussi informé M e Rush que le fardeau de la preuve en l'espèce incombait au fonctionnaire s'estimant lésé.

M e Rush a demandé l'exclusion des témoins. M e Newman a demandé que le témoin Rick Le Noury soit autorisé à assister à l'audience à titre de conseiller technique. J'ai rejeté sa requête étant donné qu'un représentant des relations du travail du ministère était déjà présent. M e Newman a indiqué qu'il se sentait démuni sans la présence de M. Le Noury. La demande d'exclusion des témoins a été accordée. Résumé de la preuve

1. M. Thomas Earle, un diplômé du collège Seneca (Ontario) en technologie des ressources, est devenu membre des Forces canadiennes (FC) en 1982, puis contrôleur de la circulation aérienne (CCI) dans les FC en 1985. Il a exécuté des tâches de contrôle radar IFR de 1987 à 1994, date à laquelle il a demandé d'être libéré comme caporal aux termes du Programme de réduction des forces (PRF). Son emploi dans les FC consistait essentiellement à guider les avions à l'aéroport à titre de CCI. Il ne travaillait pas à la tour de contrôle parce qu'il n'avait pas reçu de formation à l'IFTC et qu'il n'avait pas le grade nécessaire d'adjudant. Il a reçu de bonnes évaluations de rendement. Il a posé sa candidature pour travailler à Transports Canada au printemps de 1994 et on lui a dit qu'il aurait sans doute besoin de suivre la formation de l'IFTC.

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Decision Page 17 D’après lui, «certains contrôleurs de la circulation aérienne dans les forces trouvent le cours très exigeant, mais j'étais décidé à l'essayer.» Il en a parlé à un certain M. Art Tully puis il a eu une entrevue à Vancouver avec Dave Campbell qui lui a demandé s'il savait dans quoi il s'embarquait, ce à quoi il avait répondu «Oui».

Le fonctionnaire s'estimant lésé a reçu, par télécopieur, une offre d'emploi datée du 10 juin 1994 (pièce G-2). Il l’a acceptée ainsi que l'Annexe A de l'offre il est question des conditions de la formation IFR. Les règles de vol à vue (VFR) signifient que le contrôleur est censé avoir un avion dans son champ de vision. Le 13 juin 1994, le fonctionnaire s'estimant lésé a présenté sa demande aux Forces canadiennes en vue de se prévaloir du PRF. La demande a été acceptée le 15 juin.

M. Earle croyait que l’Annexe A signifiait qu’il serait renvoyé en cours de stage s'il ne réussissait pas à être admis comme contrôleur IFR. Il a ajouté : «Je n'ai jamais reçu de formation IFR.»

M. Earle s'est rendu à Richmond (Colombie-Britannique) pour recevoir la formation préliminaire. Il a signé la pièce G-3, une autre Annexe A qui, selon lui, signifiait qu'il recevrait la formation IFR. Il a déclaré qu'il ne s’est pas rendu jusqu'au cours régional IFR mentionné au paragraphe 2.c) de l'Annexe A (pièce G-3). Ce paragraphe se lit comme suit :

[traduction] 2. Périodes de stage [...] c) Les stagiaires qui terminent avec succès le cours régional IFR (théorie et simulation) et qui entreprennent la dernière étape de la formation IFR en milieu de travail décrite dans le programme de formation de l'unité (PFU) seront considérés comme des candidats possibles pour des postes IFR. À la discrétion du directeur régional, SCA, ou de son représentant, les stagiaires qui échouent cette étape de leur formation IFR se verront offrir la possibilité de recevoir la formation voulue pour occuper des postes vacants à la tour

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Decision Page 18 de contrôle. Une fois admis comme contrôleur VFR, les stagiaires cessent de faire partie du Programme de formation des contrôleurs en circulation aérienne- IFR.

M. Earle a ajouté que M. Tully ne lui a jamais rien dit au sujet du travail à la tour comme contrôleur VFR. Il a reçu la formation préliminaire à Richmond puis a étudié à l'IFTC à Cornwall du 9 décembre 1994 au 13 juin 1995, date à laquelle il a obtenu son diplôme. En avril 1995, il a reçu une lettre l’informant du poste auquel il allait être nommé après l'obtention de son diplôme et précisant qu’il devait se présenter à la tour de contrôle de Boundary Bay (TCBB) pour recevoir une formation en cours d'emploi (FCE), et se présenter à Linda Todd, la gestionnaire intérimaire de l'unité à la TCBB. Il n'a pas signé cette lettre (pièce G-4) ni l'Annexe 2, laquelle, a-t-il dit, l'informait qu'il allait travailler à la tour de contrôle de la région/du terminal. Il s'est présenté à Boundary Bay après son cours à l'IFTC, pensant y demeurer quelque temps seulement avant d’être affecté au Centre de contrôle régional (CCR) pour recevoir la formation IFR. À Boundary Bay, il a été confié à l'instructeur en cours d’emploi (ICE) Tony Schollen, mais ce dernier ne voulait pas d'un stagiaire.

M. Earle a déclaré qu'il a été informé par le spécialiste des opérations de l'unité (SOU) qu'il lui fallait recevoir la formation VFR à la tour et répondre aux normes avant de suivre le cours IFR, que c’était la procédure normale dans la région du Pacifique et qu'il allait devoir faire comme les autres. Il a affirmé s’être plaint à une occasion au SOU qu'il ne recevait pas toute la formation à laquelle il avait droit de M. Schollen (le fonctionnaire était son premier stagiaire), mais qu'il s'était fait répondre que M. Schollen était un bon contrôleur. M. Earle est tombé malade. À son retour, M. Schollen était parti. Le fonctionnaire a été confié à Rick Le Noury.

M. Earle a affirmé que la formation à la tour de contrôle de Boundary Bay comportait cinq étapes de vingt jours, quinze jours, quinze jours, dix jours et dix jours respectivement. Elle peut durer quinze jours de plus sous réserve de l'approbation de la direction et être suivie d’une autre période de quinze jours sous réserve de l'approbation de l'administration régionale pour un grand total de cent jours maximum. Au bout des vingt premiers jours, l'ICE décide des jours qui seront désignés jours de formation.

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Decision Page 19 Le fonctionnaire s'estimant lésé a déclaré que M. Le Noury l'a surveillé pendant un cycle, puis lui a donné cinq jours de formation de plus parce qu’il n’était pas satisfait des progrès accomplis. M. Earle a terminé les phases un et deux et, après trois jours et demi dans la phase trois, M. Le Noury a de nouveau décidé de lui donner une formation continue jusqu’au 11 janvier 1996, soit jusqu’à ce qu’il soit mis fin à la formation au bout de trente-huit jours et demi de stage, non quarante-trois jours et demi comme il est indiqué à la page 4 de la pièce G-5. Il s'est fait dire qu'un comité d’examen des progrès des stagiaires (CEPS) serait constitué pour étudier ses progrès. M. Earle a comparu devant ce comité le 18 janvier 1996 et il a présenté un résumé de sa version de l'histoire (pièce G-6). Il a reçu le rapport (pièce G-5) du comité par courrier. Il n'était pas d'accord avec de nombreux éléments du rapport, en particulier le fait que son manque de progrès ne lui avait jamais été reproché par M. Schollen; qu'il n'avait jamais dit qu'il s'en foutait; qu'il ne savait pas ce que M. Le Noury entendait par son air suffisant; qu'il n'était pas déprimé à la fin, mais qu'il essayait de se concentrer sur les difficultés à surmonter; qu'il n'avait jamais argumenter quand la critique était constructive; qu'il avait «réussi tous les tests que M. Le Noury m'a fait subir». M. Earle a dit que personne à l'interne ne l'avait familiarisé avec la région géographique de Boundary Bay, qu'il n'était pas originaire de cette région et qu'il ne connaissait pas les routes locales, par exemple. Il a s'absenter pendant un certain temps à cause d'une bronchite et il n'a signé que les rapports d'évaluation qui lui ont été présentés. Il a convenu que M. Le Noury avait recommandé qu'il soit affecté à une autre tour. Faisant allusion à la pièce G-5, page 4, soit le Programme de formation de l’unité (PFU), M. Earle a dit qu'il ne l'a vue qu'une seule fois. Il a nié avoir dit que certains aspects du programme de formation lui posaient des problèmes. Il a déclaré qu'il est possible que la phraséologie lui ait posé certaines difficultés.

M. Earle n'a pas eu la possibilité de répondre au rapport du CEPS. M. Earle a déposé un grief le 14 février 1996 sur les conseils de son agent négociateur, l’Association canadienne du contrôle du trafic aérien (ACCTA). Il s'attendait à recevoir la formation IFR dès sa sortie de l'IFTC.

Quant à la réponse de l'employeur au premier palier de la procédure de règlement des griefs (pièce G-9), M. Earle n’avait jamais entendu parler d’un TP 1016E

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Decision Page 20 et il ne s’était jamais fait dire d'étudier le PFU pour Boundary Bay bien qu'il en ait eu vu une partie à un moment donné. En ce qui concerne la lettre de l'employeur datée du 19 mars 1996 (pièce G-10), M. Earle a dit que la formation à la tour de contrôle de Boundary Bay n'avait rien à voir avec le cours régulier IFR. Pour ce qui est de la réponse au dernier palier de la procédure (pièce G-10), M. Earle n'est pas d'accord avec le paragraphe 2 qui se lit comme suit : [traduction]

Il a clairement été démontré que vous avez eu toutes les occasions possibles de satisfaire aux exigences en matière de formation établies pour un contrôleur stagiaire en circulation aérienne. En dépit des efforts considérables déployés pour vous aider à atteindre les résultats attendus, vous avez échoué la troisième étape du programme de formation.

M. Earle n'avait pas les réponses aux deuxième et troisième paliers. Il a été avisé par l'ACCTA en octobre 1996 que l'agent négociateur n'allait pas le représenter à l'arbitrage.

Au cours du contre-interrogatoire, M. Earle a dit qu’à l’époque il était membre des Forces canadiennes, il détenait une licence de contrôleur de la circulation aérienne du ministère de la Défense nationale pour guider les avions dans un rayon de 40 milles d'une tour. M. Earle a déclaré qu'on ne lui a jamais dit qu'il n'avait pas à aller dans une tour pour recevoir la formation VFR. Il a ajouté qu'avant d'aller à Cornwall, on lui avait montré à Richmond ce qu'on lui enseignerait à l'IFTC. En ce qui concerne la pièce G-2, page 2, paragraphe 4, lorsqu'on lui a demandé s'il comprenait que l'unité dont il était question pouvait être une tour, M. Earle a répondu qu'il n'avait jamais demandé ce que cela signifiait, mais qu'il savait qu'il était en stage jusqu’à la fin de la formation. Il a précisé qu'on lui avait dit que sa formation prendrait fin quelque quatre mois après son départ de l'IFTC.

M. Earle comprenait ce que l’on entendait par stage au paragraphe 2. a) de l’Annexe 2, pièce G-2, mais qu'il ne s'était pas rendu à l’étape mentionnée au paragraphe 2. d).

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Decision Page 21 Il a également affirmé qu'il connaissait, en juin 1994, la condition énoncée au paragraphe 3. a) de l’Annexe A, qui se lit comme suit : [traduction] 3. Postes fonctionnels : a) Être admis comme contrôleur de la circulation aérienne dans un aéroport au cours du présent programme de formation IFR est considéré comme faisant partie du processus de formation et les participants sont considérés comme étant en stage jusqu'à ce qu'ils obtiennent un poste dans une unité IFR.

M e Newman a fait valoir que le paragraphe 3.a) signifiait exécuter des tâches VFR. M. Earle en a convenu. Interrogé à savoir s'il avait été sidéré d'apprendre qu'il allait être envoyé à la tour de contrôle de Boundary Bay, M. Earle a répondu : «il a toujours été question d'IFR, et on m'a dit que l'Annexe A n'était qu'une formule réglementaire.» Il a convenu toutefois que la formation à la tour faisait partie de la formation.

M. Earle a également convenu qu’il ne s’était pas rendu jusqu'à l'étape mentionnée au paragraphe 3. c) de l’Annexe A, pièce G-2, qui se lit comme suit : [traduction]

2. Périodes de stage [...] c) Le nom des employés renvoyés en cours de stage peut être inscrit sur une liste d'admissibilité de la CFP et ces personnes peuvent se voir offrir d'autres types de postes pour lesquels elles possèdent les qualités voulues.

À la question de savoir s'il croyait que le paragraphe 2. b) de l’Annexe A, pièce G-2, donnait d'office un emploi à la tour, M. Earle a répondu que la décision revenait à la direction et qu'il connaissait d'autres personnes dans la région du Pacifique qui avaient reçu moins de formation que lui mais qui était néanmoins passées à l’étape de la formation IFR.

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Decision Page 22 Le paragraphe 2. b) de l’Annexe A, pièce G-2, se lit comme suit : [traduction] 2. Périodes de stage : [...] b) Les stagiaires qui occupaient antérieurement un poste fonctionnel à la tour et qui sont renvoyés en cours de stage ne peuvent postuler les postes vacants à la tour puisqu'ils ne possèdent plus toutes les qualités requises pour occuper ces postes en raison de leur absence de la tour.

M. Earle a dit que même s'il n'avait pas signé la pièce G-4, la lettre l'envoyant à Boundary Bay et l’Annexe 2, il était lié par ces documents et il savait qu'il allait recevoir de la formation à la tour comme l'indique le paragraphe 2. b) de l’Annexe 2, pièce G-4, qui dit : 2. Périodes de stage : [...] b) Les stagiaires qui avaient antérieurement été admis comme contrôleur aérien et qui sont renvoyés en cours de stage ne pourront pas postuler les postes vacants à la tour puisqu'ils ne possèderont plus toutes les qualités requises pour occuper ces postes en raison de leur absence de la tour.

Il a convenu que le paragraphe 2, page 2, pièce G-4, s'appliquait dans son cas. Ce paragraphe se lit comme suit : [traduction] Toutes les déclarations contenues dans les «Conditions du programme de formation des contrôleurs de la circulation aérienne - Tour de contrôle d’une région/d’un terminal» sont applicables et vous devez signer l'Annexe «2» ci-joint. À l'exception de ce qui précède vous serez en stage durant tout le programme de formation jusqu'à ce que vous soyez nommé au poste AI-OPR-05.

Le fonctionnaire s'estimant lésé a reconnu un rapport spécial rédigé par R. Le Noury (pièce E-1) concernant son 14 octobre 1995. M. Earle n'a pas répondu par écrit au dernier paragraphe de la pièce E-1 qui se lit comme suit :

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évaluation de rendement jusqu'au

Decision Page 23 [traduction] À ce moment-ci, je recommande que Tom poursuive sa formation pendant encore cinq jours moyennant certaines conditions. Durant cette période, il devrait, si possible, recevoir de la formation théorique en classe et avoir du temps pour étudier le MANOPS, les lettres d'opération, les bulletins d'opération, les opérations de CLF et la géographie locale. Je ferai une évaluation par la suite, et si Tom atteint les normes prévues je recommanderai qu'il reprenne sa formation il l'avait laissée.

M. Earle n'a jamais dit à M. Le Noury qu'il n'était pas d'accord avec ce qui précède. M. Le Noury n'était pas hostile à son égard et il ne l’avait jamais rencontré avant d’arriver à Boundary Bay.

M. Earle a reconnu un deuxième rapport spécial daté du 31 octobre 1995 concernant ses progrès, rédigé par M. Le Noury (pièce E-2), et il a dit qu'il avait trouvé que c'était une critique constructive.

Il a reconnu un troisième rapport daté du 20 novembre 1995 (pièce E-3), également préparé par M. Le Noury ainsi qu'un quatrième rapport daté du 16 décembre 1995 (pièce E-4). Il avait reçu une copie des quatre rapports. M. Earle ne s'est pas opposé par écrit à ces rapports même s'il a convenu qu’aux yeux de M. Le Noury il éprouvait certaines difficultés.

En ce qui concerne les problèmes familiaux mentionnés à la pièce G-6, M. Earle a convenu qu'ils nuisaient à sa concentration.

M e Newman a lu à haute voix un autre rapport spécial préparé par M. Le Noury en date du 11 janvier 1996 (pièce E-5), et il a demandé au fonctionnaire s'il y décelait une certaine animosité à son égard de la part de M. Le Noury ou s’il pensait que ce dernier avait une dent contre lui, ce à quoi M. Earle a répondu : «Non».

À la question de savoir s'il s'était déjà plaint du fait qu'il n'était pas censé recevoir la formation VFR à Boundary Bay, le fonctionnaire s'estimant lésé a répondu : «Non, en tant qu'ancien militaire j’ai appris à ne pas me plaindre.» M. Earle a convenu

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Decision Page 24 que la direction a décidé de ne pas l’envoyer dans une autre unité. Il a ajouté n’avoir jamais parlé de sa situation à Linda Todd, seulement à Rick Le Noury et au nouveau SOU.

En ce qui concerne l'allusion à une discussion qu'il a eue avec Linda Todd, pièce G-7, M. Earle a dit qu'il ne lui a jamais parlé et qu’il n'a jamais dit au CEPS qu'il n'aurait pas être affecté à Boundary Bay. Il a ajouté qu'en ce qui le concernait, son unique difficulté était la phraséologie. Il croyait que les rapports de M. Le Noury étaient une façon d'utiliser la manière forte.

Au cours du réinterrogatoire, M. Earle a dit qu'il a effectué et réussi tout ce qu'on lui a demandé de faire pendant la formation conditionnelle mentionnée à la pièce E-1; qu’il a fait tout ce qui était exigé dans la pièce E-2; qu'à la fin la période prévue à la pièce E-3, il avait eu trente-cinq jours de formation, mais qu’on ne lui a jamais montré le chapitre 12 du PFU dont il a quand même lu une page concernant la phraséologie. Il a effectué avec succès ce qui lui a été demandé dans la pièce E-3 et, en date de la rédaction de la pièce E-4, il n'avait reçu que trente-huit jours et demi de formation et non pas trente-neuf jours et demi. Il a reçu cinq jours de formation conditionnelle et réussi trois examens. Durant la période séparant les pièces E-4 et E-5, on ne lui a pas parlé de ses lacunes sur le plan de la phraséologie, et la pièce E-5 aurait indiquer trois jours et demi de formation, non pas cinq.

Interrogé au sujet de la norme dont il était question à la pièce E-5, M. Earle a dit qu'une cote supérieure à B et une cote A indiquerait qu'il y a uniformité sur le plan de la phraséologie. Il a ajouté qu'au stade de la pièce E-5 de sa formation, il aurait avoir reçu onze jours et demi de plus de formation durant la phase 3, répartis sur une période de trois mois.

M. Earle a ajouté que le CEPS ne lui a jamais parlé de la possibilité d'une affectation dans une autre unité.

2. Rick Le Noury est contrôleur de la circulation aérienne (CCA) depuis 15 ans. Après une brève période de formation pour devenir contrôleur IFR, il a repris ses fonctions à titre de CCA. Il a travaillé aux tours de contrôle de Langley, Vancouver, et

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Decision Page 25 Boundary Bay pendant quatre ans, toutes ces tours étant situées en Colombie- Britannique. Il a dit qu'un contrôleur IFR travaille sur trois plans et planifie le mouvement des avions dans un vaste espace aérien suivant différentes procédures tandis qu'un contrôleur de la circulation aérienne dans un aéroport travaille sur deux plans réagissant plus qu'il ne planifie. Il a dit que les deux types de contrôleurs gèrent des espaces aériens distincts.

M. Le Noury avait formé deux autres contrôleurs avant d'être chargé de la formation de M. Earle. Un de ses premiers stagiaires a été admis comme contrôleur, l'autre pas. Le témoin a remplacé Tony Schollen qui n'avait pas l'expérience nécessaire pour donner de la formation. Il a déclaré qu'il avait discuté des rapports de stage (pièces E-1 à E-5) avec M. Earle avant de les remettre à Linda Todd. Il avait remis une copie des rapports au fonctionnaire.

D'après la pièce E-1, M. Le Noury a dit qu'étant donné que le fonctionnaire aurait avoir une meilleure connaissance de trois domaines particuliers à sa sortie de l'IFTC (Cornwall), il a suggéré un jour de formation en classe.

D'après la pièce E-2, M. Earle a réussi les examens qui ont été faits en classe. M. Le Noury a observé le fonctionnaire pendant une période de temps et a conclu qu'il était incapable d’atteindre certaines normes du PFU dans un délai donné, particulièrement pour ce qui est de l’emploi de la bonne phraséologie pour communiquer avec les pilotes d’avion de façon claire et concise. Il a dit : «Tom passait beaucoup de temps avec chaque avion, ce qui l'empêchait d'exécuter d'autres tâches.» Dans la pièce E-4, il a recommandé de la formation conditionnelle, et il a discuté en détail de ses préoccupations avec le fonctionnaire s'estimant lésé en lui faisant bien comprendre qu'il était possible qu’il ne réussisse pas sa formation. M. Le Noury a aussi fait part de ses inquiétudes à Linda Todd en lui disant qu’il y aurait peut-être lieu de «mettre fin» à la formation du fonctionnaire s'estimant lésé. M. Le Noury ne savait pas ce qui arrivait à une personne dans ce cas-là.

En ce qui concerne la pièce E-5, son cinquième rapport au sujet du fonctionnaire s'estimant lésé, M. Le Noury a dit, lorsqu'on lui a demandé ce qu'il

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Decision Page 26 entendait par «manque d’uniformité », qu'il ne pouvait pas en toute conscience recommander un stagiaire qui n'appliquait pas les règles de base de façon uniforme, ce qui ne veut pas dire de façon irréprochable. En janvier 1996, d’après lui, M. Earle n'avait pas atteint le niveau auquel il aurait être rendu à ce stade-là de sa formation à cause de son manque d'uniformité. Il ne croyait pas que M. Earle pouvait s’améliorer même en poursuivant sa formation à Boundary Bay. Il estimait avoir consacré suffisamment de temps au fonctionnaire s'estimant lésé, et il a ajouté : «Un employé doit faire preuve d’un peu d’initiative personnelle en vue de se familiariser avec les alentours d’un aéroport.» M. Le Noury a suggéré dans la pièce E-5, le rapport recommandant de mettre fin à la formation du fonctionnaire, qu’«il [le fonctionnaire] soit affecté à une unité moins complexe pour qu'il puisse avoir la chance d'accroître ses compétences à un rythme un peu moins trépidant.» Il a ajouté que le fonctionnaire ne s’est jamais plaint de ne pas avoir eu assez de temps et qu'il lui a dit qu'il pouvait se trouver un autre ICE s'il le voulait. M. Le Noury n'a jamais pris de mesure disciplinaire contre le fonctionnaire et il a affirmé qu'il avait entretenu de bonnes relations professionnelles avec lui.

M. Le Noury a reconnu un calendrier de formation (pièce E-6) préparé à l’intention de M. Earle et il a dit que la détermination des jours de formation est laissée à la discrétion de l'instructeur. Il a ajouté qu’un stagiaire qui prend du retard peut recevoir de la formation conditionnelle ou faire du rattrapage au besoin. Il a dit avoir fait de son mieux pour former M. Earle.

Au cours du contre-interrogatoire, M. Le Noury a dit qu'il avait formé une douzaine de contrôleurs en tout, quelques-uns à la tour de contrôle de Vancouver et deux à la tour de Boundary Bay. Un des stagiaires, dont il avait initialement recommandé l'interruption de la formation, est allé au Centre de contrôle régional pour recevoir une formation plus poussée et devenir contrôleur IFR à la suite d'une décision de la direction de lui laisser poursuivre sa formation. Il a fini par être admis comme contrôleur.

M. Le Noury a réitéré avoir remis au fonctionnaire s'estimant lésé une copie de tous les rapports de formation (pièces E-1 à E-5) le concernant.

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Decision Page 27 M e Rush a fait référence à la pièce E-3 indiquant que le fonctionnaire avait reçu, en date du 20 novembre 1995, 35 jours de formation tandis qu'une copie semblable de ce rapport (pièce G-12) indiquait qu'il n'en avait reçu que 30. M. Le Noury n’a pu expliquer cet écart.

Le témoin a ajouté que la pièce E-4, il avait inscrit 39,5 jours de formation en date du 16 décembre 1995, contredit également l’allégation du fonctionnaire, selon laquelle qu'à la date indiquée, il n'avait reçu que 38,5 jours de formation.

En ce qui concerne la pièce E-4 et la mention d’un examen écrit sur la phraséologie, M. Le Noury a déclaré que le fonctionnaire avait réussi cet examen selon des critères objectifs. Il a ajouté qu'il avait décrété cinq jours de formation conditionnelle en décembre, jours qui ne sont pas comptabilisés et qui étaient censés permettre au fonctionnaire de se concentrer sur ses faiblesses. En ce qui concerne la pièce G-5, page 4, les Observations du comité d’examen des progrès des stagiaires, M. Le Noury a déclaré que les dix jours de formation additionnels qui sont mentionnés devraient sans doute être remplacés par cinq jours, ce qui donnerait un total de 38,5 jours de formation normale et non pas de 43,5 jours. Il a convenu qu’à la fin de la phase 3, un stagiaire devait avoir accumulé jusqu'au 50 jours de formation selon la norme du PFU, mais que lui-même, à tire d’instructeur, n'était pas obligé de s'en tenir à 50 jours vu qu’il jouit d'un certain pouvoir discrétionnaire à cet égard.

En ce qui concerne la pièce E-5, le rapport spécial du 11 janvier 1996, M. Le Noury a convenu qu'il avait noté que M. Earle faisait de «bons progrès» sur le plan de la phraséologie, mais que son grand problème, qu'il a décrit comme un obstacle majeur, était son manque d'uniformité. Lorsque M e Rush lui a demandé s’il aurait quand même recommandé de «mettre fin au stage» si M. Earle avait réussi à surmonter cet obstacle majeur, M. Le Noury a répondu : «Non». De nouveau, en ce qui concerne la page 3 de la pièce G-5, soit les observations de M. Le Noury au comité d'examen des progrès des stagiaires selon lesquels M. Earle était déprimé, «non motivé » et peu intéressé, M. Le Noury, lorsque l’avocat lui a demandé s’il avait discuté avec le fonctionnaire du fait qu'il lui semblait déprimé, a répondu que les débats du comité n’étaient pas communiqués intégralement au fonctionnaire car une partie de ceux-ci se déroulent à huis clos. Interrogé au sujet de la mention sur la même page selon

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Decision Page 28 laquelle le fonctionnaire n'était pas motivé, qu'il n'utilisait pas toujours la même phraséologie, qu'il ne savait pas s'adapter et qu'il ne pouvait pas accepter la critique constructive, M. Le Noury a répondu que certaines de ces observations avaient également été faites à huis clos. Il a convenu que, dans son rapport spécial (pièce E-5), il n'avait pas tenu les même propos que dans le rapport au comité d'examen des progrès des stagiaires, mais qu'il avait indiqué avoir mis fin à la formation de M. Earle parce que celui-ci n'était pas uniforme sur le plan de la phraséologie. M. Le Noury n'était pas sûr exactement du nombre de fois le fonctionnaire avait manqué d'uniformité pendant ce qu'il a qualifié de situations «inhabituelles» parce qu'il ne les a pas toutes notées. Il a dit qu'il a pu y avoir environ 70 incidents au cours des cinq jours de la formation additionnelle. Il a ajouté qu'il ne tenait pas de registre de ce qui a été décrit comme des périodes de forte densité dans la pièce E-5.

Lorsqu'on lui a demandé si M. Earle avait réussi les examens objectifs, M. Le Noury a dit : «Oui». Il a nié que les autres tests aient été des «tests Le Noury». Il a ajouté qu'il avait recommandé que le fonctionnaire soit envoyé dans une unité moins complexe parce qu'il croyait qu'il pourrait s'améliorer ailleurs. M. Le Noury a dit que le fonctionnaire avait réussi la phase 2, c'est-à-dire les 35 jours de formation.

Au cours du réinterrogatoire, M. Le Noury a dit que le fonctionnaire n'avait pas donné suite aux recommandations qui lui avaient été faites pour améliorer ses communications avec les pilotes. M. Le Noury a ajouté qu'on ne lui a pas demandé de recommander que le fonctionnaire soit renvoyé en cours de stage, on voulait seulement obtenir son évaluation de la période de formation de M. Earle à Boundary Bay. Il a ajouté qu'à son avis, le nombre total de jours de formation n'était pas si important que cela et qu'il s’était servi des notes qu’il avait prises au sujet du fonctionnaire s'estimant lésé.

3. Linda Todd est une contrôleure de la circulation aérienne qui, à l'époque du stage de M. Earle, était gestionnaire intérimaire à la Tour de contrôle de Boundary Bay. M me Todd a été embauchée par Transports Canada en 1977 et a été contrôleure à Victoria, Prince George et Langley bien qu'elle ait échoué à la tour de Vancouver. En 1991, en sa qualité de spécialiste de la formation des contrôleurs de la circulation aérienne dans la région, elle s'occupait de tous les stagiaires affectés aux tours de

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Decision Page 29 contrôle après avoir terminé le cours de l'IFTC. Elle est aujourd'hui gestionnaire de la tour Langley située à environ 35 milles à l'est de Vancouver. Elle a déclaré que la tour de Boundary Bay est décrite comme une unité de niveau 2 dans une échelle de cinq niveaux, cinq étant le niveau le plus élevé. Elle a ajouté que le spécialiste des opérations de l'unité (SOU) est la personne qui supervise les opérations et qui est responsable de la formation dans une unité.

M me Todd a déclaré qu'elle avait été informée par le surintendant intérimaire des ressources humaines pour la région du Pacifique que le fonctionnaire s'estimant lésé irait à la tour de Boundary Bay pour se qualifier comme contrôleur de la circulation aérienne, après quoi il attendrait d’être accepté à l'école régionale pour suivre le cours régulier IFR. Elle a déclaré qu’elle avait discuté de diverses procédures administratives avec le fonctionnaire s'estimant lésé lorsque celui-ci est arrivé et qu’il ne lui avait pas dit qu'il ne s'attendait pas à passer toute sa période de formation à Boundary Bay. Elle a dit qu'aucun stagiaire dans la région du Pacifique n'était jamais passé directement de l'IFTC au Centre de contrôle régional (CCR) étant donné que les employés doivent se qualifier avant de passer à un niveau supérieur de formation. Elle a ajouté qu'il n’y avait eu qu’un cas une personne qui ne s'était pas qualifiée à la Tour de Boundary Bay, mais qui avait quand même été envoyée au CCR. Elle croit que cette personne avait un problème de santé.

M me Todd a confié M. Earle au contrôleur Tony Schollen qui n'avait jamais travaillé avec des stagiaires. Elle savait également que M. Earle avait été contrôleur pour les Forces canadiennes. M. Schollen était réticent à l'accepter comme stagiaire parce que lui-même avait déposé un grief concernant sa propre formation. Il l’a accepté malgré lui. M m e Todd a ajouté que M. Schollen était insatisfait de M. Earle et de son manque de progrès et qu'il était allé la voir pour en discuter. M. Schollen a convenu d'essayer de nouveau mais a finalement demandé d'être déchargé de ses responsabilités comme instructeur. M m e Todd a dit en avoir discuté avec M. Earle, mais il ne se souvenait pas si c'était avant que M. Le Noury soit chargé de la formation du fonctionnaire. Elle a observé M. Earle une fois «de l'arrière de la cabine» pour employer ses propres termes, et elle a ajouté qu'il n’utilisait pas le micro de la bonne façon et que sa phraséologie laissait à désirer. Elle n'en a jamais discuté avec lui.

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Decision Page 30 M me Todd a dit qu'elle avait choisi M. Le Noury parce qu'il s'intéressait aux stagiaires, qu'il se dépensait toujours beaucoup pour eux et qu'il avait déjà travaillé avec deux d’entre eux à Boundary Bay l’un d’eux avait réussi, l'autre non. Elle a ajouté qu'elle lui faisait entièrement confiance, qu'il s’acquittait de cette tâche volontiers et qu'il la tenait informée au moyen de rapports et de remarques sur le déroulement de la formation. Elle a ajouté qu'elle-même et M. Le Noury n'ont pas discuté du cas de M. Earle avant la recommandation de mettre fin au stage. Elle a dit qu'elle était au courant également de la formation conditionnelle qu'il avait reçue. Elle a déclaré qu'elle avait fait part à M. Earle de ses préoccupations au sujet de ses progrès; elle lui avait suggéré des façons de s'améliorer et l'avait informé de ce qui l’attendait s’il ne s’améliorait pas, c'est-à-dire qu'on pourrait «mettre fin au stage». Elle a ajouté que M. Earle lui avait également fait part de ses propres préoccupations et lui avait lui-même suggéré certaines améliorations. Lorsque M m e Todd a reçu de M. Le Noury la recommandation de mettre fin au stage de M. Earle, elle a téléphoné au surintendant intérimaire Tully, Formation et Ressources humaines, bureau régional de Vancouver, pour lui dire qu'elle était d'accord avec cette recommandation et lui demander de constituer un comité d'examen des progrès des stagiaires. M me Todd a déclaré qu'elle avait lu le rapport du comité et qu'elle avait ensuite appelé le fonctionnaire chez lui pour lui dire qu'elle lui en envoyait une copie par la poste.

En ce qui concerne la pièce G-7, la lettre de M. Campbell au fonctionnaire datée de janvier 1996 informant ce dernier qu'il était renvoyé pour un motif déterminé, M me Todd a déclaré avoir discuté de la recommandation de M. Le Noury de mettre fin au stage avec le fonctionnaire s'estimant lésé avant que se réunisse le comité d'examen des progrès des stagiaires. M me Todd a approuvé la recommandation de mettre fin au stage du fonctionnaire s'estimant lésé, mais elle n'en a pas discuté auparavant avec M. Tully. Elle a dit que M. Tully avait vu les rapports de progrès (pièces E-1 à E-5) et elle a ajouté que, même si M. Le Noury avait recommandé que le fonctionnaire s'estimant lésé soit affecté à une unité moins complexe, la décision finale de mettre fin ou non au stage ne lui revenait pas. M m e Todd savait à ce stade-là que M. Earle serait renvoyé en cours de stage étant donné que c'était ce que l'on faisait normalement dans la région.

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Decision Page 31 La témoin Todd a précisé qu'elle n'avait pas discuté avec M. Tully de la possibilité d’une affectation dans une unité moins complexe pour le fonctionnaire s'estimant lésé.

Au cours du contre-interrogatoire par l'avocat du fonctionnaire s'estimant lésé, M me Todd a déclaré qu'à la tour de contrôle de Boundary Bay il y a 175 000 mouvements d'avion par année comparativement à environ 60 000 en 1995 à l'aéroport de Langley. Elle a dit qu'elle n'était pas au courant des documents IFR que le fonctionnaire s'estimant lésé a pu avoir signés, mais qu'elle connaissait les conditions générales énoncées dans les documents en question, et que même s'ils peuvent avoir été modifiés légèrement au fil des années, l'objectif demeurait le même. Elle a ajouté qu'il existait diverses versions des documents ministériels destinés aux contrôleurs de la circulation aérienne individuels. M m e Todd a déclaré que lorsque le fonctionnaire s'estimant lésé est arrivé à la tour de contrôle de Boundary Bay, ils avaient discuté de questions purement administratives et non pas de la question de savoir s'il était censé se trouver à cet endroit en premier lieu. Elle a affirmé que la formation comporte diverses phases et que peut-être M. Earle avait vu ou n'avait pas vu le document TP 1016E mais, a-t-elle ajouté, il aurait toujours pu se le procurer. Elle a dit que toutes les unités utilisent le document du PFU à des fins de formation. Elle a dit qu'elle ne savait pas s’il était déjà arrivé à des stagiaires de passer directement de l'IFTC au IFR. Elle a déclaré qu'elle ne savait pas que le fonctionnaire n'avait pas d'expérience du travail VFR ou du travail à la tour lorsqu'il a été confié à Tully Schollen, mais qu'elle savait qu'il avait été contrôleur de la circulation aérienne dans les Forces canadiennes. Elle savait qu'un des stagiaires relevant de M. Le Noury était passé à la formation IFR mais qu’il ne s’était pas qualifié pendant son séjour à la tour de contrôle de Boundary Bay; il avait été mis fin au stage d'un deuxième stagiaire.

M me Todd a déclaré qu'elle-même et M. Le Noury ont discuté des rapports d'évaluation du fonctionnaire s'estimant lésé (pièces E-1 à E-5) et qu'elle s'était fié sur son évaluation des progrès du fonctionnaire s'estimant lésé. Elle a admis qu'elle croyait qu'il y avait une erreur dans le calcul du nombre de jours de formation reçus par M. Earle et que le rapport devait indiquer 38,5 jours de formation. Elle a dit que les jours de formation conditionnelle ne sont pas comptabilisés et que les cinq jours de formation reçue en décembre 1995 n'auraient pas être comptabilisés. M me Todd Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 32 a déclaré qu'elle avait reçu le rapport (pièce E-3), mais qu’elle ne se souvenait pas d'avoir vu la pièce G-12 il est question de 30 jours de formation plutôt que de 35 jours mentionnés dans la pièce E-3. À sa souvenance, elle n'a vu que les rapports signés par M. Le Noury. Elle a dit avoir vu la pièce E-4, un rapport de stage préparé par M. Le Noury mais non signé. Elle était d’avis qu'elle aurait recevoir la version signée.

M me Todd a déclaré avoir reçu la pièce E-5, soit le rapport de stage daté du 11 janvier 1996 recommandant de «mettre fin au stage» du fonctionnaire s'estimant lésé, et en avoir discuté avec M. Le Noury. Elle avait ensuite téléphoné à M. Tully pour lui demander de constituer un comité d'examen des progrès des stagiaires le plus tôt possible. M m e Todd a dit qu'elle avait fondé sa décision de mettre fin au stage sur les rapports, les commentaires et les comptes rendus de M. Le Noury, les commentaires du SOU et ses propres observations. Elle a réitéré qu'elle s'était entretenue avec M. Earle en présence de M. Le Noury concernant la recommandation de mettre fin au stage avant de téléphoner à M. Tully. Elle a dit avoir informé M. Earle qu'un CEPS serait constitué et qu'il se pourrait qu'il soit renvoyé. Elle a ajouté qu'elle avait discuté de ses propres observations avec le fonctionnaire s'estimant lésé, mais qu'elle ne se souvenait pas de tout ce dont il avait été question. Elle a dit qu'elle s'était formé sa propre opinion au sujet de la possibilité d'affecter le fonctionnaire à une unité moins complexe, mais qu'elle n'en avait pas fait part à M. Tully.

Au cours du réinterrogatoire, M me Todd a affirmé : «les stagiaires qui échouent blâment toujours les autres.»

M e Rush a rappelé le fonctionnaire à la barre et lui a demandé s'il avait reçu la pièce G-12, le rapport de stage daté du 20 novembre 1995 il est question de 30 jours de formation. Celui-ci a répondu : «Oui», qu'il l’avait reçu personnellement de M. Le Noury pendant un quart de soirée après que le rapport eut été dactylographié et qu'il n'avait pas reçu d'autre rapport semblable. En ce qui concerne la pièce E-5, le rapport de formation du 11 janvier 1996, à la question de savoir si c’était vrai que M me Todd avait discuté avec lui de la recommandation de M. Le Noury de mettre fin à son stage, M. Earle a répondu : «Non, ce n'est pas vrai». Il a ajouté que M m e Todd n'a jamais discuté avec lui de l’éventualité de «mettre fin au stage». Il a ajouté qu'en lui

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Decision Page 33 remettant la pièce E-5 on lui avait dit de rentrer chez lui, et il n'était retourné au travail que pour rencontrer le CEPS.

Au cours du contre-interrogatoire, M une lettre il est question d'une discussion entre M. Earle et M ajouté qu'il n'avait parlé à celle-ci qu'une seule fois, soit lorsqu'elle avait convoqué le CEPS et que le seul renseignement qu'il avait eu au sujet de l'interruption du stage se trouvait dans la pièce E-5 préparée par M. Le Noury.

Argument du fonctionnaire s'estimant lésé M e Rush a dit que son argument comportait deux volets : la mauvaise foi générale de l'employeur et la mauvaise qualité de la formation donnée à M. Earle, laquelle comporte également un élément de mauvaise foi.

M e Rush a soutenu que le fonctionnaire avait fait de l’IFR dans les Forces canadiennes, mais qu'il n'avait jamais travaillé dans une tour de contrôle, ce que savait M. Tully, et qu'il devait suivre le cours régulier IFR selon la pièce G-2 datée du 10 juin 1994. Il a affirmé que M. Earle avait quitter les Forces canadiennes pour suivre ce cours, et il avait signé l'Annexe A de la pièce G-2 le 24 juin 1994 avant de commencer la formation. Le fonctionnaire s'estimant lésé savait qu'il était en stage, mais M e Rush a ajouté que M. Earle ne pouvait satisfaire aux exigences du paragraphe 2. d) de l'Annexe A du fait qu'il n'a pu terminer sa période de stage. M e Rush a fait valoir que la partie 3 de l'Annexe A, Postes fonctionnels, ne traite même pas de la composante formation. M. Earle s’était présenté pour recevoir la formation IFR et avait signer une autre annexe, la pièce G-3, qui décrit les conditions du programme de formation IFR, mais dont la partie 3 n'a rien à voir avec la formation VFR ou la formation dans une tour de contrôle dont il est question à l'Annexe A de la pièce G-2. M. Earle a signé la pièce 3 le 24 novembre 1994. M e Rush a fait remarquer que ce document, soit l’annexe décrivant la formation IFR, a été mentionné dans la lettre de l'employeur datée du 19 mars 1996 (pièce G-10) informant le fonctionnaire qu’il était renvoyé pour motif déterminé. Il a aussi noté que l'employeur n'a rien dit au sujet de la pièce G-4, soit la lettre d’affectation de M. Earle à la tour de contrôle de Boundary Bay, parce que le fonctionnaire ne l'a pas signée. Il a soutenu qu'après que M. Earle

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e Newman a fait référence à la pièce G-7, me Todd. M. Earle a

Decision Page 34 eut réussi son cours à l'IFTC, l’affectation à Boundary Bay ne faisait pas partie des conditions d'emploi ni était-ce quelque chose que le fonctionnaire était tenu d'accepter. Il a précisé que la période de stage du fonctionnaire s'estimant lésé, soit la formation IFR, était prévue aux termes de la pièce G-3 et non pas aux termes de l'Annexe 2, pièce G-4, document que M. Earle n'a pas signé. Il a soutenu que M. Earle n’a pas accepté l’affectation à Boundary Bay aux termes des conditions énoncées dans la pièce G-4, et ces conditions ne constituent pas son contrat avec l'employeur. Selon M e Rush, ce n’est pas parce qu’il a accepté d’aller à Boundary Bay qu’on peut tenir pour acquis qu’il a accepté les conditions exposées à la pièce G-4 et à l'Annexe 2 de celle-ci comme le prétend aujourd'hui l'employeur. Par conséquent, la pièce G-3 n'a jamais été remplacée par un autre document puisque l'employeur lui-même y fait même allusion dans sa lettre de renvoi (pièce G-10).

M e Rush a donc soutenu que ce que j'ai devant moi n'est pas un renvoi décrété de bonne foi étant donné que M. Earle a accepté les conditions de la formation IFR et non pas celles de la formation VFR bien qu’il ait toutefois été obligé de réussir le stage de formation VFR. Je devrais, par conséquent, assumer compétence en l'espèce, selon lui, en dépit des dispositions du paragraphe 92(3) de la LRTFP, et il soutient que la décision de l'employeur peut également être révisée aux termes de l'article 28 de la LEFP s'il a agi de mauvaise foi. L'avocat m'a renvoyé à l'onglet 9 de son dossier de jurisprudence, l'affaire Algonquin College and Ontario Public Service Employees' Union (1986) 22 L.A.C. (3d), pages 104 à 141 comme étant la jurisprudence qui prévalait en l’espèce vu que M. Earle a été empêché de faire «de son mieux» relativement à la formation IFR puisqu’il qu'il n'a jamais consenti à suivre la formation VFR.

Quant à la question de la mauvaise foi, l'avocat m'a également renvoyé aux affaires: Fisher Scientific and United Food & Commercial Workers, Local 1000A (1990), 13 L.A.C. (4th) 350; Hawker Siddeley Canada Inc., Orenda Division and International Association of Machinists & Aerospace Workers, District Lodge 117 (1991), 21 L.A.C. (4th) 289; Regional Municipality of Waterloo and Canadian Union of Public Employees, Local 1883 (1987), 30 L.A.C. (3d) 344; Regional District of Nanaimo and Canadian Union of Public Employees, Local 401 (1980), 25 L.A.C. (2d) 34; Manitoba and M.G.E.U., [1995] M.G.A.D. No. 60; Alcan Wire & Cable and United Steelworkers (1992), 26 L.A.C.

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Decision Page 35 (4th) 93; Abex Industries Ltd. and United Food & Commercial Worker's Union, Local 173W (1995), 48 L.A.C. (4th) 353.

M e Rush a conclu que M. Earle s'attendait à recevoir une formation IFR, mais qu'il a été renvoyé durant la formation VFR. En effet, le fonctionnaire s'estimant lésé a signé un document en vue de recevoir la formation «a» non pas la formation «b», mais il a été renvoyé pour avoir échoué «b», ce qui constitue de la mauvaise foi.

Le deuxième volet de l’argument de M e Rush est fondé sur la prémisse que l'employeur doit donner au stagiaire une possibilité de formation équitable qui lui permet de démontrer sa capacité. À cet égard, M e Rush a invoqué les affaires St. Lawrence College and Ontario Public Service Employees' Union (1987), 32 L.A.C. (3d) 322 et Pacific Western Airlines Ltd. and Canadian Air Line Flight Attendants Association (1981), 30 L.A.C. (2d) 68. Il a soutenu que même si j'accepte le fait que M. Earle était tenu de recevoir la formation VFR, il n'a pas reçu de formation adéquate. M e Rush a soutenu que les normes auxquelles devait satisfaire M. Earle ont été établies par M. Le Noury. Il a invoqué la réponse au premier palier de la procédure de règlement des griefs (pièce G-9) il est question des lignes directrices TP 1016E que M. Earle n'a jamais vues et du PFU de Boundary Bay que M. Earle dit n'avoir pu consulter qu'une seule fois, brièvement, même si l'employeur prétend qu'il aurait lui-même faire les démarches pour le consulter plus souvent. M e Rush a fait remarquer que le CEPS lui-même dans son rapport (pièce G-5) précise que le PFU devrait être mis à la disposition du personnel et qu’il aurait être facilement accessible au stagiaire (M. Earle).

M e Rush a soutenu que l'unique preuve il est question des normes est la pièce G-5, le cinquième rapport spécial de M. Le Noury daté du 11 janvier 1996. M. Earle a atteint toutes les normes objectives mais il n’a pas atteint les normes subjectives établies par M. Le Noury qui a été incapable de fournir suffisamment d'exemples de normes subjectives pour me les rendre acceptables.

M e Rush a fait valoir que M. Earle s'est vu refuser la possibilité de bien se familiariser avec Boundary Bay et sa géographie locale. Il s'est également vu refuser la possibilité de suivre toute la phase trois de la formation étant donné qu'il a été mis

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Decision Page 36 fin au stage au bout de 3,5 jours. Les cinq jours conditionnels ne sont pas comptabilisés aux fins de la phase trois. Dans l'ensemble, M. Earle n'a reçu que 38,5 jours de formation et non pas 50 comme cela aurait été le cas s’il avait poursuivi sa formation jusqu’à la fin de la phase trois. M e Rush a fait valoir que M. Le Noury a fermé le robinet alors que le fonctionnaire s'estimant lésé faisait de bons progrès selon la pièce E-5 et qu'il lui restait 11,5 jours de formation à recevoir pour compléter la phase 3. Il m'a rappelé que le fonctionnaire s'estimant lésé n'a pas reçu autant de formation que le croyait M. Le Noury, c'est-à-dire 38,5 jours et non 43,5. De plus, en dépit des affirmations du témoin Todd, si M. Le Noury n’avait pas recommandé de mettre fin au stage au moment il l'a fait, aucun des autres problèmes concernant le fonctionnaire s'estimant lésé n’aurait fait surface. En réalité, la période de formation de M. Earle a été écourtée. L’erreur se trouve dans la différence entre la pièce E-3, faisant état de 35 jours de formation, et la pièce G-12, faisant état de 30 jours.

M e Rush a conclu que M. Earle n'a, par conséquent, pas eu l'occasion de démontrer ses aptitudes et que c'est de la mauvaise foi découlant du fait que M. Le Noury a cru à tort que le fonctionnaire avait eu plus de jours de formation que cela avait été le cas en réalité. M e Rush a dit que la recommandation de M. Le Noury d’affecter le fonctionnaire à une «unité moins complexe», selon la pièce E-5, est une concession critique visant à permettre à M. Earle de s'améliorer, et que je ne devrais pas oublier d’en tenir compte au moment d'évaluer la question de la mauvaise foi dans l'ensemble.

Argument de l'employeur M e Newman a soutenu que le paragraphe 92(3) de la LRTFP limite ma compétence étant donné que le grief de M. Earle est visiblement un renvoi en cours de stage aux termes de la LEFP. Il n'est pas allégué qu’il a été renvoyé aux termes de la Loi sur la gestion des finances publiques. M e Newman a soutenu que la décision Perreault (précitée) s'applique toujours même si elle a été examinée par l'arbitre Galipeau dans l’affaire Rinaldi (précitée) et par le juge Noël de la Section de première instance de la Cour fédérale du Canada dans l’affaire Rinaldi qui écrit que même si on arrive à la conclusion qu’il y a eu mauvaise foi, cela n'autorise pas le fonctionnaire à poursuivre l'affaire. M e Newman a soutenu que le juge Noël souscrit discrètement à la Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 37 décision Perreault (précitée) et qu’il incombe au fonctionnaire de démontrer que ses conditions d’emploi étaient différentes au moment l'employeur a décidé de le renvoyer.

Étant donné qu'il est convenu que le fonctionnaire était en stage lorsqu'il a été renvoyé, M e Newman a soutenu que l'affaire devrait s’arrêter là. Même si le fonctionnaire a fait les frais de la mauvaise foi de l’employeur, c'est à un autre tribunal de le déterminer, et non pas au soussigné. Il m'a rappelé que même l’affaire Penner (précitée) est la jurisprudence qui doit s’appliquer en l’espèce, et cette affaire a été tranchée avant la modification de la LRTFP en 1993. M e Newman a cité le juge Marceau dans Penner : [12] La conclusion fondamentale de l'arrêt Jacmain est, à mon avis, qu'un arbitre nommé sous le régime de la L.R.T.F.P. est sans compétence à l'égard d'un renvoi en cours de stage lorsque la preuve présentée le convainc que les représentants de l'employeur ont agi de bonne foi au motif qu'ils ne considéraient pas que l'employé possédait les aptitudes requises pour occuper le poste visé. Et cette conclusion, selon moi, découle inexorablement des dispositions législatives actuellement en vigueur.

[13] En fait, la législation dans son ensemble pourrait difficilement s'interpréter comme appuyant une autre façon de voir. Comme l'a dit le juge J. Heald [[1977] 1 C.F. 91 (C.A.), sous l'intitulé Procureur général du Canada c. Commission des relations de travail dans la Fonction publique, à la page 100], dont les propos ont été approuvés par le juge de Grandpré dans ses motifs de l'arrêt Jacmain la page 37), l'«article 28 vise entièrement à permettre à l'employeur d'apprécier l'aptitude d'un employé à occuper un emploi. Si l'employeur conclut durant cette période que l'employé ne présente pas les qualités requises, il peut alors le renvoyer sans que celui-ci ait la possibilité de recourir à l'arbitrage. Soutenir qu'un employé stagiaire est investi du droit à un arbitrage au cours de son stage équivaut à ignorer complètement le sens évident de l'expression utilisée à l'article 28 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique et à l'article 91 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique.»

[...] [15] Mon désaccord avec la décision rendue par l'arbitre dans les circonstances de l'espèce ressortira à présent de façon claire. Bien qu'il soit vrai que les incidents du 4 et du 5 mars

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Decision Page 38 ont déclenché la décision de l'administration de mettre fin à l'emploi de l'intimée, il ne fait aucun doute que cette décision a été prise de bonne foi et avait pour motif que l'employée ne semblait pas posséder les qualités requises pour occuper l'emploi visé, en partie en raison des carences constatées dans ses habiletés techniques, et principalement en raison des carences de sa personnalité. Dans ces circonstances, l'arbitre n'avait pas la compétence voulue pour juger l'affaire.

M e Newman a conclu qu'étant donné que la direction exerçait un contrôle sur la formation, si un stagiaire est jugé inapte à certains égards, il est tout simplement renvoyé et, d'après lui, je ne puis maintenant me faire ma propre idée des aptitudes de M. Earle en vérifiant les barres sur les «t» et les points sur les «i». Il a soutenu que l'évaluation des aptitudes de M. Earle par la direction n'était par irrationnelle. Il a fait valoir que même les lacunes perçues sur le plan personnel font partie du jugement de l'employeur et ne sont pas seulement le résultat de tests objectifs. D'après lui, la direction a conclu que le fonctionnaire ne répondait pas aux normes en vigueur à Boundary Bay et elle a décidé de ne pas lui accorder plus de temps ou de l'autoriser à se rendre au CCR pour recevoir la formation IFR.

M e Newman a soutenu que la direction a établi la norme de formation IFR selon laquelle il faut d'abord devenir contrôleur VFR à la tour. Il a dit qu'aucun élément de preuve n’a démontré que le fonctionnaire ne devait pas recevoir la formation VFR alors que cette formation est exigée dans la région du Pacifique, et que la formation VFR et la formation IFR ne s'excluent pas mutuellement. M e Newman a dit que même la formation à l'IFTC n'est pas de la formation IFR, et que le fonctionnaire n’entretenait aucune illusion quant à la possibilité de ne pas avoir à faire de stage à la tour. Il m'a renvoyé à la pièce G-2, l'offre d'emploi signée par le fonctionnaire s'estimant lésé, qui dit simplement : Classification : Contrôleur stagiaire en circulation aérienne, et il m'a rappelé que M. Earle n'avait pas reçu d’offre spéciale pour quitter les Forces canadiennes étant donné qu'il a se soumettre à la procédure habituelle dans le but ultime de devenir un contrôleur IFR. Il m'a rappelé que l’Annexe A de la pièce G-2 n'étant pas une loi, la direction n'est pas obligé de s’y limiter pour évaluer M. Earle.

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Decision Page 39 M e Newman m'a demandé de tenir compte du paragraphe 3.a) de l’Annexe A, pièce G-2, intitulé Postes fonctionnels, document que le fonctionnaire a signé et qui se lit comme suit :

3. Postes fonctionnels : a) Être admis comme contrôleur de la circulation aérienne dans un aéroport au cours du présent programme de formation IFR est considéré comme faisant partie du processus de formation et les participants sont considérés comme étant en stage jusqu'à ce qu'ils se qualifient dans une unité IFR.

Il m'a rappelé de nouveau que l'employeur n'a jamais dit à M. Earle qu'il allait être exempté de la formation VFR à Boundary Bay, que c’est la direction qui décide en quoi consistera la formation et que M. Earle n'a pas été victime, en l’occurrence, de ce qu’on pourrait appeler «un coup monté». Il a dit que la direction peut prendre autant de temps qu’elle le veut pour évaluer quelqu'un. Étant donné que l'employeur avait déjà investi beaucoup d'argent dans le fonctionnaire s'estimant lésé l'IFTC et durant le stage à Boundary Bay) sa décision de le renvoyer n'a pas été prise à la légère. Il y a eu des rapports de formation et une formation spéciale ainsi que des entrevues-conseil, tous des éléments qui indiquent que l'employeur avait à cœur la réussite de M. Earle avant de finalement décider de le renvoyer. M e Newman m'a rappelé que le fonctionnaire s'estimant lésé avait signé la pièce G-3, Annexe A, dont le paragraphe 2.a) se lit comme suit : 2. Périodes de stage : a) Vous serez en stage pendant la durée du programme de formation. Si vous ne réussissez pas à être admis comme contrôleur IFR, vous serez renvoyé en cours de stage pour un motif déterminé à moins de satisfaire aux exigences décrites au paragraphe 2 c).

M e Newman a conclu que l'employeur n'était pas obligé de justifier les motifs du renvoi même aux termes de la doctrine Penner (précitée), et que M. Earle savait, d'après le paragraphe 2.b) de l'Annexe A, pièce G-3, ce qu’on on attendait de lui. Ledit paragraphe dit :

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Decision Page 40 [traduction] 2. Périodes de stage : b) Les stagiaires qui avaient antérieurement été admis comme contrôleur de la circulation aérienne dans un aéroport pendant le cours régulier IFR et qui sont renvoyés en cours de stage ne pourront pas postuler les postes vacants à la tour puisqu'ils ne posséderont plus toutes les qualités nécessaires pour occuper ces postes en raison de leur absence de la tour.

M e Newman m'a rappelé que lorsqu'il a été affecté à Boundary Bay, M. Earle ne s'est jamais plaint ou n'a jamais dit que M. Tully lui avait indiqué qu'il n'était pas censé y aller. L'avocat a soutenu que le fonctionnaire s'estimant lésé savait pourquoi on l'y envoyait. Même si M. Earle n'a jamais signé la pièce G-4, soit la lettre l’affectant à Boundary Bay, il a reçu cette lettre et il travaillait pour Transports Canada. M e Newman a soutenu que M. Earle a même écrit dans son rapport au CEPS (pièce G-6), dernière phrase, qu'il pourrait montrer ce dont il était capable s’il était affecté à une autre tour.

M e Newman a soutenu, au sujet de l'erreur qui s’est glissée dans la pièce G-10 et de la confusion concernant le nombre de jours de formation dont a bénéficié le fonctionnaire s'estimant lésé, que cela n’a aucune importance étant donné que la direction a conclu honnêtement à partir d'un certain nombre de facteurs de mettre fin au stage de M. Earle parce qu'il n’avait pas les qualités requises. L'avocat a convenu que cette évaluation n'était pas parfaite et que le processus laissait à désirer, mais que ce n'est pas une question qu'il me revient de trancher étant donné qu'il s'agit quand même d'un renvoi en cours de stage.

M e Newman a fait valoir que M me Todd et M. Le Noury voulaient, semble-t-il, que M. Earle réussisse dans ce qui est considéré une profession très exigeante. M. Earle était un bon candidat et il a été bien accueilli par la direction, mais il ne possédait tout simplement pas les aptitudes voulues selon l'employeur.

M e Newman m’a demandé, si je décidais de me reconnaître compétence et de décréter un redressement, de réserver ma décision jusqu'à ce que l'affaire NavCan soit tranchée étant donné que l'employeur des contrôleurs de la circulation aérienne n'est plus le Conseil du Trésor.

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Decision Page 41 Dans sa réplique, M e Rush m’a demandé de ne pas attendre de connaître les conclusions d'une autre affaire avant de me prononcer en l’espèce. Il a également fait valoir que la décision Perreault (précitée) porte sur une offre d'emploi différente de celle faite à M. Earle et qu’elle est donc particulière. Il a également dit que le critère sur lequel je dois me pencher n’est pas abusif comme M e Newman l’a laissé entendre. Il s'agit simplement de déterminer si la formation à la tour était considérée comme une condition d'emploi. Il a fait valoir que si la direction peut déterminer ce que ça prend pour devenir contrôleur, alors pourquoi M. Earle a-t-il été obligé de signer les pièces G-2, G-3 et G-4? Il a conclu qu'il avait les signer parce que la direction n’a pas tous les pouvoirs. L'avocat a soutenu que M e Newman n'a pas discuté de ce que lui-même (M e Rush) avait dit au sujet de la pièce G-3 et du fait qu'elle obligeait l'employeur à donner la formation IFR comme il avait accepté de le faire dans la pièce G-6 en mentionnant la pièce G-3 dans la lettre de renvoi préparée par M. Slade. M e Rush a soutenu que l'employeur ne peut pas retenir seulement ce qui lui plaît dans la pièce G-10 étant donné qu'il a exposé ses motifs dans la pièce G-3.

En ce qui concerne le nombre de jours de formation autorisés, M soutenu que si M. Le Noury s’est trompé, le nombre total de jours de formation n’a donc aucune importance. Il m'a donc demandé d'accueillir le grief.

Décision M. Earle était en stage de probation. Il n'a pas été licencié et son poste n'a pas été aboli. Un renvoi en cours de stage n'est pas arbitrable particulièrement à la lumière du paragraphe 92(3) de la LRTFP. Ce paragraphe se lit comme suit : (3) Le paragraphe (1) n'a pas pour effet de permettre le renvoi à l'arbitrage d'un grief portant sur le licenciement prévu sous le régime de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

De même, si un renvoi en cours de stage se fait en toute bonne foi, l'affaire se termine comme le juge Marceau l'a écrit dans Penner (précitée) : [12] La conclusion fondamentale de l'arrêt Jacmain est, à mon avis, qu'un arbitre nommé sous le régime de la L.R.T.F.P. est sans compétence à l'égard d'un renvoi en cours de stage lorsque la preuve présentée le convainc que les représentants de l'employeur ont agi de bonne foi au motif

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e Rush a

Decision Page 42 qu'ils ne considéraient pas que l'employé possédait les aptitudes requises pour occuper le poste visé. Et cette conclusion, selon moi, découle inexorablement des dispositions législatives actuellement en vigueur.

La question à trancher n'est pas de savoir si le renvoi en cours de stage de M. Earle était attribuable à une formation «de qualité inférieure» comme l'a dit M e Rush en affirmant que cela correspondait à de la mauvaise foi de la part de l'employeur et que cela m'autorisait à exercer ma compétence en l'espèce. Comme l'a fait remarquer M e Newman, l'argument de la mauvaise foi avancé par le fonctionnaire étend considérablement le sens du libellé du grief dans lequel il n'est aucunement question de mauvaise foi, ce qui équivaudrait, par conséquent, à une modification du grief. Si tel est le cas, je ne suis pas autorisé à instruire le grief tel qu'il est libellé selon Burchill c. Procureur général du Canada (précitée).

M e Newman a raison étant donné que le grief de M. Earle est libellé comme suit : (Traduction) Le 22 juin 1995, j'ai commencé ma formation à la tour de contrôle de Boundary Bay. Lorsque je suis arrivé, j'ai été informé que mon instructeur ne voulait pas de stagiaire, mais que la direction l’avait obligé d'en accepter un. J'ai subséquemment été confié à un autre instructeur au sein de l'unité. J'ai été informé que ce nouvel instructeur n'avait pas bonne réputation auprès des stagiaires. J'ai commencé une formation conditionnelle et j'ai reçu cinq jours de formation pour corriger des lacunes sur le plan de la phraséologie. On a recommandé de mettre fin à ma formation après seulement jours de formation. Je crois que la formation que j'ai reçue était de qualité inférieure et qu’elle ne respectait pas les lignes directrices de Transports Canada..

De plus, je ne suis pas disposé à accepter l'argument de M prétendue formation de mauvaise qualité comportait un élément de mauvaise foi, et je ne crois pas, après avoir examiné l'affaire attentivement, que, dans l'ensemble, l'employeur a agi de mauvaise foi dans le cas de M. Earle. Par conséquent, je conclus ne pas avoir compétence en l'espèce, particulièrement à la lumière de la note en bas de page 15 de la décision du juge Noël dans Rinaldi (précitée). Même si M la note 15 qu’il s’agissait de propos accessoires, je crois qu'elle est motivée comme l'a

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e Rush selon lequel la e Rush a dit de

Decision Page 43 dit M e Newman et qu'elle constitue une explication de fond de la décision plutôt qu'un simple renvoi dans un texte.

Je désire quand même ajouter ce qui suit pour indiquer également pourquoi je n'aurais pas accueilli le grief de toute façon. On a énormément insisté sur le fait que la formation VFR à la tour de Boundary Bay n'avait rien à voir avec l’offre que le fonctionnaire avait initialement acceptée, c'est-à-dire recevoir la formation IFR à titre contrôleur stagiaire en circulation aérienne. Je n'accepte pas cet argument. Le fonctionnaire savait ou aurait savoir qu’être admis comme contrôleur de la circulation aérienne dans un aéroport faisait partie du processus de formation. Il a volontiers signé, après avoir quitté les Forces canadiennes, comme l'ayant accepté le 24 juin 1994, l’Annexe A de la pièce G-2, qui se lit en partie comme suit : 3. Postes fonctionnels : a) Être admis comme contrôleur de la circulation aérienne dans un aéroport au cours du présent programme de formation IFR est considéré comme faisant partie du processus de formation et les participants sont considérés comme étant en stage jusqu'à ce qu'ils se qualifient dans une unité IFR.

M me Todd l'a confirmé lorsqu'elle a dit qu'aucun stagiaire n'était passé directement de l'IFTC au CCR dans la région du Pacifique.

C'est une conclusion incontournable qu’être admis comme contrôleur de la circulation aérienne d'un aéroport fait, par conséquent, partie de la formation IFR. M. Earle savait en fait que la formation à la tour faisait partie du processus de formation et qu'il était lié par la pièce G-4, la lettre l'affectant à Boundary Bay, même s'il ne l'a pas signée. Il est également question des qualités d'un contrôleur de la circulation aérienne dans un aéroport à la pièce G-3, Annexe A, paragraphe 2 b), que le fonctionnaire a signée le 24 novembre 1994 : 2. Périodes de stage : b) Les stagiaires qui avaient antérieurement été admis comme contrôleurs de la circulation aérienne dans un aéroport pendant le cours régulier IFR et qui sont renvoyés en cours de stage ne pourront pas postuler les postes vacants à la tour puisqu'ils ne posséderont

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Decision Page 44 plus toutes les qualités nécessaires pour ces postes en raison de leur absence de la tour.

M. Earle n'a pas refusé de recevoir la formation à la tour de contrôle de Boundary Bay et il n'a pas déposé de grief à cet égard ni ne s'est-il plaint de son affectation.

Au cours de la période de stage, l'instructeur doit à un moment donné décider si le stagiaire va réussir ou non. Cette décision peut être prise durant la phase un du stage ou durant la phase cinq, mais c'est une décision qu’il ne m’appartient pas de modifier à moins qu'elle soit jugée comme étant entièrement sans fondement. Ce n'est pas le cas en l'espèce. Et la décision n’a pas été prise de façon artificielle. En fait, une période de formation est prévue dans le but précisément de permettre à l'employeur de déterminer si un stagiaire a les qualités requises pour occuper le poste pour lequel on lui donne de la formation.

En ce qui concerne l'argument de M e Rush selon lequel la formation de M. Earle comportait également un élément de mauvaise foi, voici ce que j'en dis. Le premier instructeur du fonctionnaire s'estimant lésé, M. Schollen, a été remplacé par M. Le Noury qui avait une expérience cumulative puisqu’il avait formé douze stagiaires au fil des années, deux à Boundary Bay, un qui a échoué et l'autre qui a réussi. Les cinq rapports de stage (pièces E-1 à E-5) ont tous été remis au fonctionnaire s'estimant lésé et ils indiquent les points sur lesquels il s’est amélioré et ceux qui posent des problèmes, particulièrement sa phraséologie et son manque d'uniformité. M. Earle aurait faire preuve de plus d'initiative en lisant davantage et en en apprenant le plus possible au sujet de sa formation surtout en ce qui concerne le MANOPS, les normes attendues, son nouveau milieu comme l'a indiqué M. Le Noury dans ses rapports spéciaux. Après tout, il était le stagiaire qui se préparait en vue d'une nouvelle carrière. En disant cela, je n'ai pas fait fi des préoccupations exprimées par M. Earle au comité, soit que le fonctionnaire a changé d'instructeur, qu’il a été malade, qu’il a déménagé sa famille et qu'il subissait le stress de problèmes personnels. Tous ces éléments ont avoir un effet cumulatif sur la capacité du fonctionnaire s'estimant lésé d'apprendre correctement cette profession très difficile et de répondre aux exigences de Transports Canada. Toutefois, M. Earle a été contrôleur des Forces canadiennes et compte plusieurs années d'expérience; il a suivi

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Decision Page 45 le cours de l'IFTC; il a reçu 38,5 jours de formation à Boundary Bay sous la gouverne d'un instructeur, contrôleur expérimenté. Dans ces circonstances, il aurait mieux réussir. Je crois que M. Le Noury a agi de bonne foi durant cette période; qu'il n'a jamais été hostile; qu'il n'a pas montré d'animosité envers M. Earle, d’autant plus qu'il a suggéré dans la pièce E-5 d’affecter le fonctionnaire «à une unité moins complexe pour qu'il puisse avoir la chance d'accroître ses compétences à un rythme un peu moins trépidant ». Cette suggestion n'a pas été retenue par les supérieurs de M. Le Noury.

Pour tous les motifs ci-dessus, le grief est rejeté.

J. Barry Turner, commissaire.

OTTAWA, le 30 juin 1997. Traduction certifiée conforme

Serge Lareau

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