Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Heures supplémentaires - Attribution équitable - le fonctionnaire, un examinateur, a soutenu dans son grief qu'on ne lui avait pas offert d'heures supplémentaires de façon équitable pendant une période de six mois - au cours de cette période, le fonctionnaire a été suspendu pendant la tenue d'une enquête disciplinaire et a reçu une suspension de 20 jours - au cours de la même période, le fonctionnaire s'est absenté du travail pendant 70 heures à cause de maladie - le fonctionnaire a soutenu que, après son retour à la suite de sa suspension, et en dépit de ses demandes en ce sens, l'employeur ne lui a pas offert une part équitable des heures supplémentaires - le fonctionnaire a ajouté que, durant la procédure de règlement des griefs, l'employeur a admis qu'il y avait un problème concernant l'attribution des heures supplémentaires - l'employeur a répondu qu'il fallait tenir compte du nombre de jours pendant lesquels le fonctionnaire avait été suspendu, ainsi que du nombre d'heures pendant lesquelles il avait été malade - l'employeur a soutenu que le fonctionnaire avait reçu un montant équitable d'heures supplémentaires, si on prend en considération la totalité de l'année financière - l'arbitre, après avoir calculé le nombre d'heures supplémentaires que le fonctionnaire avait effectuées durant l'année financière, a conclu que celui-ci avait droit à plus d'heures supplémentaires que le nombre qu'il s'était vu attribuer après être revenu au travail à la suite de sa suspension - l'arbitre a déterminé que le fonctionnaire aurait eu droit à 36,75 heures de plus de temps supplémentaire pour cette période et il a ordonné qu'on lui verse une indemnisation financière équivalente. Grief admis.

Contenu de la décision

Dossier : 166-2-27738 Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE STEPHEN BOUJIKIAN fonctionnaire s’estimant lésé et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Citoyenneté et Immigration Canada)

employeur

Devant : J. Barry Turner, commissaire Pour le fonctionnaire s’estimant lésé : Barry Done, Alliance de la Fonction publique du Canada Pour l’employeur : Ann Margaret Oberst, avocate Affaire entendue à Toronto (Ontario), le 27 avril 1998.

Décision DÉCISION Page 1 M. Stephen Boujikian occupe un poste d’examinateur (PM-01) à Citoyenneté et Immigration Canada (CIC), à Mississauga, en Ontario. Il soutient dans son grief qu’on ne lui a pas offert d’heures supplémentaires de façon équitable pendant une période de six mois en 1995.

Son grief, daté du 6 octobre 1995, est ainsi formulé : [Traduction] Je conteste le fait qu’on ne m’ait pas offert de travail supplémentaire de façon équitable. J’ai demandé des heures supplémentaires par écrit. On ne m’a pas attribué d’heures supplémentaires depuis mars 1995 (sauf à une occasion).

Un agent travaillant du même côté que moi à l’aérogare un a reçu au moins 15 heures par semaine au cours des 6 derniers mois, de même que deux agents à l’aérogare deux.

Le grief ne mentionne pas la clause 19.02a) de la convention collective particulière du groupe PM, code 308/89, dont voici le libellé: ARTICLE 19 HEURES SUPPLÉMENTAIRES 19.02 Attribution du travail supplémentaire a) Sous réserve des nécessités du service, l’employeur fait tout effort raisonnable pour éviter de prescrire un nombre excessif d’heures supplémentaires et pour offrir le travail supplémentaire de façon équitable parmi les employé-e-s qualifiés facilement disponibles.

Le fonctionnaire demande la mesure corrective suivante : [Traduction] Que je reçoive, à compter de maintenant, des heures supplémentaires sur une base équitable. Qu’on m’indemnise pour les occasions d’heures supplémentaires perdues depuis mars 1995.

L’audience a duré une demi-journée; une personne a témoigné et trois pièces ont été admises en preuve sur consentement : la pièce E-1, une note de service datée du 20 avril 1998, concernant l’attribution d’heures supplémentaires durant l’exercice 1995-1996, envoyée à M e Ann Margaret Oberst, ministère de la Justice, Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 2 Toronto, par J. Hillis, chef des Services administratifs, Immigration Canada, Aéroport international L.B. Pearson (AIP); la pièce E-2, une note de service datée du 13 août 1997 adressée par R. Lavalle, Personnel, aérogare trois, AIP, à Bruce Tune, gestionnaire régional, AIP, au sujet des absences du travail du fonctionnaire s’estimant lésé pour la période de mars 1995 à octobre 1995 et les heures supplémentaires effectuées par le fonctionnaire entre le 1 er mars 1995 et le 31 mars 1996; la pièce E-3, un courriel daté du 11 octobre 1995 envoyé par H.E. Fiebig, AIP, Opérations, à D.O. Kellam, AIP, Opérations, à propos de l’application de la clause 19.02a) de la convention particulière du groupe PM au cas de M. Boujikian.

Les parties ont également produit un exposé conjoint des faits daté du 27 avril 1998. Nous le reproduisons ci-dessous : [Traduction] EXPOSÉ CONJOINT DES FAITS Les parties conviennent que le grief qui a été renvoyé à l’arbitrage sera entendu à partir des faits suivants :

Au cours de la période en question, le fonctionnaire s’estimant lésé était un examinateur nommé pour une période déterminée à l’Aéroport international Pearson.

Une enquête relative à une faute de conduite a été amorcée le 7 avril 1995. À ce moment-là, le fonctionnaire a été affecté à des fonctions restreintes, ce qui voulait dire qu’il était limité à des fonctions exercées au comptoir du traitement rapide et qu’un superviseur devait être dans son entourage en tout temps.

À la suite de l’enquête, le fonctionnaire a été suspendu sans traitement du 16 mai 1995 au 12 juin 1995.

On entendait par « fonctions restreintes » notamment les précautions mises en place afin d’assurer que lorsqu’il fallait prendre les empreintes digitales d’un client ou le photographier, un autre agent devait être disponible pour exécuter les fonctions ou accompagner le fonctionnaire s’estimant lésé. De plus, le fonctionnaire ne pouvait être affecté à la fonction escorte (accompagner des personnes à un avion afin de vérifier son départ) si le United State Immigration and Naturalization Services (USINS) était en cause. Un des agents de ce service avait signalé une faute d’inconduite de la part du fonctionnaire, dont la présence était inacceptable au USINS.

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Décision Page 3 On me demande de décider si le fonctionnaire s’est vu attribuer un nombre équitable d’heures supplémentaires pendant la période précisée par son agent négociateur du 7 avril au 6 octobre 1995, moins la période de suspension de 20 jours que le fonctionnaire a purgée entre le 16 mai et le 12 juin 1995. L’avocate de l’employeur a accepté la définition de la période en litige.

M. Done soutient que, durant la période en question, l’employeur ne disposait pas d’un système qui aurait permis l’attribution équitable des heures supplémentaires. Par conséquent, conclut-il, M. Boujikian a subi une perte de revenu. M. Done ajoute que, si j’accepte d’accorder une indemnisation au fonctionnaire, je devrai tenir compte du fait que M. Boujikian occupe maintenant un poste d’adjoint de programme (CR-05) d’une durée indéterminée, au Bureau central de Toronto, Centre d’Emploi et Immigration Canada, et qu’il ne travaille que le jour, du lundi au vendredi.

Les deux parties se sont en outre reportées aux trois réponses au grief qui sont au dossier : celle du niveau un, datée du 20 octobre 1995, signée par le gestionnaire, Opérations de l’immigration, AIP; celle du niveau deux, datée du 19 décembre 1995, signée par M.J. Molloy, directeur général, Citoyenneté et Immigration Canada (CIC), North York (Ontario); et celle du dernier palier, datée du 16 janvier 1997, signée par Raphaël Girard, sous-ministre adjoint, Opérations, CIC, Ottawa.

Les parties ont convenu, pour les besoins de la présente décision, de suivre la règle générale établie par l’ancien arbitre en chef de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, Edward Jolliffe, dans l’affaire Sumanik (dossier de la Commission 166-2-395), à savoir qu’une période d’un an est appropriée lorsqu’on examine la répartition des heures supplémentaires à des fins de comparaison. Les parties ont en outre convenu que la période d’un an que je devrais considérer en l’espèce est l’exercice 1995-1996, soit la période du 1 er avril 1995 au 31 mars 1996, tel qu’il est précisé dans la pièce E-2.

Résumé de la preuve 1. M. Stephen Boujikian a commencé à travailler à l’AIP en décembre 1993 à titre de fonctionnaire nommé pour une période déterminée; il était affecté à un poste de 11 heures et se voyait régulièrement attribuer des heures supplémentaires aux trois aérogares de l’AIP (T-1, T-2 et T-3). Le 7 avril 1995, le fonctionnaire a été affecté à des

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Décision Page 4 tâches restreintes en attendant l’issue d’une enquête qui a pris fin par sa suspension pour une période de 20 jours, soit du 16 mai au 12 juin 1995. Durant sa suspension, on ne lui a offert aucune heure supplémentaire.

M. Boujikian a témoigné que, au tout début de l’enquête, il a perdu cinq possibilités de faire des heures supplémentaires, mais il reçu 11,75 heures supplémentaires le 10 avril 1995, lesquelles avaient déjà été inscrites à l’horaire. Il a ajouté que les brèves périodes d’heures supplémentaires, allant de 0,25 heures (9 avril 1995) jusqu’à 4 heures (19 août 1995), figurant sur la pièce E-2 étaient des périodes obligatoires rattachées aux vols arrivés en retard. Le 28 juillet 1995, on l’a rappelé pour effectuer 5 heures supplémentaires, et toutes les heures supplémentaires qu’il a effectuées après sa suspension, du 13 juin au 6 octobre 1995, la date de son grief, étaient uniquement pour des vols arrivés en retard.

M. Boujikian a fait remarquer que les noms figurant sur la pièce E-1 représentaient tous les employés de niveau PM-01 travaillant à l’AIP pendant l’exercice 1995-1996; il était vingt-troisième sur cinquante-neuf pour ce qui est du nombre d’heures supplémentaires effectuées. Le fonctionnaire a ajouté que la plupart des vingt-deux premiers noms était des PM-01 de l’aérogare 2, et que cela montre clairement que les heures supplémentaires n’étaient pas réparties équitablement entre les employés des trois aérogares. Après le dépôt de son grief, M. Boujikian ne s’est pas vu offrir plus d’heures supplémentaires, sauf à l’été de 1997, juste avant qu’il quitte l’AIP pour aller travailler au Bureau central de Toronto.

Le fonctionnaire a en outre témoigné qu’il accomplissait le plein éventail de ses fonctions, sans limitations, lorsqu’il est revenu au travail après sa suspension en juin 1995. Le 13 juin 1995, il a assisté, à l’aérogare 3 à une réunion avec la direction et le représentant de l’agent négociateur, et on lui a dit ne plus faire de trouble. M. Boujikian a ajouté qu’après sa suspension il a envoyé des messages par ordinateur au superviseur des aérogares 2 et 3, une ou deux fois par mois, pour leur dire qu’il était maintenant prêt à faire des heures supplémentaires. L’employeur, a-t-il dit, n’a jamais essayé de faire un rattrapage d’heures supplémentaires pour lui avant qu’il quitte l’AIP pour aller travailler au Bureau central de Toronto, même si, dans sa réponse du 20 octobre 1995 à son grief au premier palier, l’employeur a souligné jusqu’à quel point la direction se préoccupait de la nécessité d’offrir du temps

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Décision Page 5 supplémentaire de façon équitable; dans sa réponse au deuxième palier, le 19 décembre 1995, l’employeur avait par ailleurs affirmé qu’il semblait toujours y avoir un problème concernant l’attribution des heures supplémentaires, et dans sa réponse au dernier palier, le 16 janvier 1997, l’employeur a reconnu qu’il y avait eu récemment des problèmes concernant l’attribution équitable des heures supplémentaires.

En contre-interrogatoire, lorsqu’on a signalé à son attention le fait que dans sa lettre du 11 octobre 1995 (pièce E-3), M. Fiebig a signalé qu’il y avait eu peu d’heures supplémentaires de portées à l’horaire récemment, M. Boujikian a répondu : [traduction] « C’était peut-être le cas à ce moment-là. » M e Oberst a ensuite signalé à l’attention du fonctionnaire la dernière phrase de la pièce E-3, M. Fiebig affirme qu’il [traduction] « prévoi[t] que si on porte attention à la clause pertinente de la convention, on réussira à atténuer les problèmes en ce domaine[...] », M. Boujikian a ajouté qu’il avait reçu plus d’heures supplémentaires au cours de l’été de 1997 parce que les heures supplémentaires étaient alors attribuées par un programme d’ordinateur qui rappelait les noms suivants figurant sur la liste de temps supplémentaire. Lorsqu’on lui a demandé s’il était possible qu’en 1997 il y avait un plus grand besoin d’heures supplémentaires, il a répondu : [traduction] « Non, mes collègues m’ont simplement dit qu’ils obtenaient plus d’heures supplémentaires. Les heures supplémentaires étaient maintenant mieux contrôlées. » Le fonctionnaire a reconnu que, s’il était demeuré plus longtemps à l’AIP, il aurait pu se voir offrir un nombre équitable d’heures supplémentaires en 1997.

Le fonctionnaire a en outre admis que, bien qu’il n’eût pas accès aux détails ou aux dossiers indiquant qui avait travaillé en 1995-1996, sa mémoire lui était assez fidèle pour qu’il puisse affirmer que la majorité des PM-01 figurant sur la pièce E-1 travaillaient à l’aérogare 2.

Le fonctionnaire a réitéré qu’il remplissait les mêmes fonctions après sa suspension qu’avant celle-ci, c’est-à-dire qu’il effectuait des escortes et qu’il prenait des empreintes digitales par lui-même, et qu’il travaillait en fait sans surveillance au USINS.

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Décision Page 6 Pendant le réinterrogatoire, le fonctionnaire a passé en revue les heures supplémentaires des vingt-deux PM-01 qui avaient effectué plus d’heures supplémentaires que lui (pièce E-1), indiquant au mieux de sa connaissance chacun avait travaillé au cours de 1995. Il a ajouté que le chiffre indiqué pour « Stat. Pay », sur la pièce E-2, correspond au nombre d’heures supplémentaires ajoutées aux calculs des heures supplémentaires pour tous les PM-01 figurant sur la pièce E-1.

Argumentation du fonctionnaire Selon M. Done, il est clair d’après les heures supplémentaires indiquées dans la pièce E-1 que la plupart des personnes en question travaillaient à l’aérogare 2 et que les heures supplémentaires n’ont donc pas été réparties également entre les trois aérogares. Il signale que M me Saini a reçu 681,25 heures supplémentaires, bien que M. Boujikian n’en ait reçu que 202. M. Done convient que la répartition équitable des heures supplémentaires ne signifie pas que chacun reçoit exactement le même nombre, mais que le nombre devrait être à peu près égal pour l’ensemble des employés admissibles. Il soutient que, même si l’on soustrait la période de suspension de vingt jours du fonctionnaire, au cours de laquelle il n’aurait pu se voir offrir d’heures supplémentaires, M. Boujikian aurait néanmoins été loin d’approcher le nombre d’heures supplémentaires effectuées par M me Saini. M. Done fait valoir que, même après l’aveu que l’employeur a fait en décembre 1995 dans sa réponse au grief au deuxième palier, l’attribution des heures supplémentaires a continué de poser un problème, semble-t-il, et durant les mois qui ont suivi l’employeur n’a pas rectifié la situation dans le cas du fonctionnaire s’estimant lésé. M. Done soutient que l’employeur est tenu d’attribuer les heures supplémentaires de façon équitable, conformément à la clause 19.02a) de la convention particulière du groupe PM; que M. Boujikian a souvent dit à l’employeur qu’il souhaitait effectuer des heures supplémentaires; et que l’employeur avait eu le temps d’effectuer un rattrapage pour le fonctionnaire en lui accordant plus d’heures supplémentaires, mais qu’il ne l’a pas fait avant l’été de 1997. Si l’employeur a mis du temps à amorcer le rattrapage, ce n’était pas par mauvaise foi, mais parce qu’il n’y avait pas en place de système pour offrir au fonctionnaire un nombre équitable d’heures supplémentaires.

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Décision Page 7 M. Done fait valoir que lorsque M. Boujikian est revenu au travail après sa suspension il a exécuté l’éventail complet de ses tâches et il aurait donc se voir offrir un nombre équitable d’heures supplémentaires. M. Done me renvoie à la décision rendue dans l’affaire Haufschild (dossiers de la Commission 166-2-20418 à 166-2-20444) et me demande d’accorder la rémunération d’heures supplémentaires en espèces, bien que cela risque d’être difficile puisque le fonctionnaire travaille maintenant de jour seulement, du lundi au vendredi, ou d’attribuer un montant d’argent forfaitaire.

Argumentation de l’employeur M e Oberst soutient qu’aucun fonctionnaire n’a un droit absolu aux heures supplémentaires; que l’attribution équitable d’heures supplémentaires ne signifie pas une attribution égale; et que la possibilité d’effectuer des heures supplémentaires ne survient pas d’une façon prévisible dans le cas d’un employé donné. Elle conclut, par conséquent, que je dois examiner les circonstances individuelles du fonctionnaire dans l’affaire dont je suis saisi.

Premièrement, de soutenir l’avocate, au cours de la suspension du fonctionnaire, qui a duré un mois, d’autres PM-01 pouvaient obtenir des heures supplémentaires; ce n’était pas le cas de M. Boujikian. Deuxièmement, selon l’avocate l’inconduite du fonctionnaire a eu pour effet de créer une méfiance à son endroit. Pendant l’enquête, du 7 avril au 16 mai 1995, l’employeur a affecté le fonctionnaire à des fonctions restreintes, tel qu’il est expliqué dans l’exposé conjoint des faits. Ses possibilités d’effectuer des heures supplémentaires durant cette période étaient restreintes du fait qu’un superviseur devait être disponible pour le surveiller. En fait, de signaler l’avocate, M. Boujikian s’est vu attribuer des heures supplémentaires le 10 avril 1995, même s’il était affecté à des tâches restreintes; de plus, après sa suspension M. Boujikian est retourné à des tâches limitées qui ont pu restreindre ses possibilités de se voir offrir des heures supplémentaires. L’avocate fait remarquer que le fonctionnaire a reçu des heures supplémentaires tous les mois d'avril 1995 à mars 1996, comme l’indique la pièce E-2, à l’exception des mois de mai et de juin 1995, et elle me rappelle que la convention collective ne précise pas quel genre d’heure supplémentaire l’employeur doit répartir équitablement, et que le nombre de possibilités d’heures supplémentaires n’équivaut pas forcément à des heures

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Décision Page 8 supplémentaires équitables. L’avocate conclut que, en dépit des fonctions limitées qu’il exerçait durant l’enquête, de sa suspension et des tâches limitées qu’il a accomplies après sa suspension, M. Boujikian a reçu 202 heures supplémentaires, ce qui le plaçait au vingt-troisième rang parmi les cinquante-neuf PM-01 ayant effectué des heures supplémentaires, tel que l’indique la pièce E-1. L’avocate maintient que, compte tenu des circonstances, il est injuste de comparer les heures supplémentaires du fonctionnaire à celles de M m e Saini, et elle conclut qu’il y a eu attribution équitable des heures supplémentaires. M e Oberst me rappelle qu’il n’y a aucune preuve comme quoi le fonctionnaire s’est vu refuser des heures supplémentaires qu’il a été mis de côté à cet égard, et que, en réalité, il a bénéficié de nombreuses possibilités d’heures supplémentaires.

L’avocate me rappelle que je dois tenir compte des périodes, figurant à la pièce E-2, pendant lesquelles le fonctionnaire était absent en congé de maladie et donc non disponible pour effectuer des heures supplémentaires.

L’avocate soutient par ailleurs que je dois examiner attentivement le libellé du grief, qui ne fait aucune mention de la convention collective. En dépit de la réponse que l’employeur a faite au grief au deuxième palier, il signale qu’il continue d’y avoir un problème concernant l’attribution des heures supplémentaires, M. Boujikian a néanmoins reçu 202 heures supplémentaires pendant l’exercice 1995-1996.

L’avocate conclut qu’il incombait au fonctionnaire de prouver qu’on lui avait refusé des heures supplémentaires, ce qu’il n’a pas fait. M e Oberst se demande par ailleurs si je peux effectivement accorder le redressement demandé, à savoir d’offrir des heures supplémentaires au fonctionnaire « à partir de maintenant ».

Réfutation présentée au nom du fonctionnaire En guise de réfutation, M. Done me rappelle que l’employeur a affirmé dans sa réponse au grief au deuxième palier : [traduction] « [...] les heures supplémentaires seront offertes à la personne ayant effectué le moins d’heures supplémentaires jusqu’à ce qu’il y ait une répartition équitable parmi les fonctionnaires affectés au poste[...] »; il conclut que les heures supplémentaires n’ont pas été attribuées de façon équitable à l’époque en question. Selon M. Done, il n’y a aucune preuve indiquant que l’employeur ait cherché à invoquer, dans sa réponse au grief, les nécessités du service,

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Décision Page 9 et l’employeur, dit-il, n’a fait aucun effort en vue d’attribuer les heures supplémentaires de façon plus équitable.

M. Done me rappelle le témoignage non contesté du fonctionnaire selon lequel il n’avait pas exécuté des tâches limitées après sa suspension, mais qu’il avait plutôt rempli l’éventail complet de ses fonctions. Il ajoute qu’il n’y a aucune preuve comme quoi le fonctionnaire ne pouvait pas effectuer d’heures supplémentaires en raison de la non-disponibilité d’un superviseur après son retour au travail à la suite de sa suspension. De plus, de soutenir M. Done, l’employeur ne peut exclure l’attribution d’un plus grand nombre d’heures supplémentaires durant la période d’enquête, soit du 7 avril au 16 mai 1995, puisque le fonctionnaire, en fait, s’est vu attribuer des heures supplémentaires au cours de cette période.

Décision Selon le représentant du fonctionnaire, la période visée par le redressement va du 7 avril au 6 octobre 1995, moins la période de vingt jours de la suspension purgée entre le 16 mai et le 12 juin 1995.

Bien que le grief ne mentionne pas spécifiquement la clause 19.02a) de la convention collective particulière du groupe PM, j’estime que les deux parties reconnaissent que ce que conteste le fonctionnaire, c’est le défaut de l’employeur de lui offrir un nombre équitable d’heures supplémentaires pendant la période du 7 avril au 6 octobre 1995, en contravention de la convention collective.

Les parties reconnaissent par ailleurs le principe général établi dans Sumanik (supra), à savoir que l’examen de l’attribution des heures supplémentaires devrait s’effectuer sur une période d’un an. Les parties conviennent que la période d’un an que je devrais prendre en considération en l’espèce s’étend du 1 er avril 1995 au 31 mars 1996. Les heures supplémentaires attribuées aux 59 PM-1 figurant dans la pièce E-1 s’échelonnent entre 681,25 heures et 12 heures durant cette période. Le fonctionnaire s’estimant lésé, qui travaillait à l’aérogare 1, se classe au 23 e rang, ce qui le place dans la moitié supérieure. Le fonctionnaire a manqué 20 jours ouvrables à cause d’une suspension, ce qui, à toutes fins utiles, correspond à un mois lorsqu’on soustrait les jours de congé. Il a en outre s’absenter pendant 70 heures à cause de maladie durant la période du 7 avril au 6 octobre 1995, ce qui représente environ

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Décision Page 10 six jours et demi de travail, selon un poste de onze heures. Il n’aurait pu effectuer d’heures supplémentaires pendant qu’il était suspendu ou qu’il était malade.

Les parties reconnaissent que, durant l’enquête, soit du 7 avril 1995 jusqu’à la date de suspension le 16 mai 1995, le fonctionnaire était affecté à des « fonctions restreintes ». Cela aurait limité les possibilités que le fonctionnaire puisse se voir offrir des heures supplémentaires dans la période précédent sa suspension. Le fonctionnaire a pu néanmoins effectuer les heures supplémentaires qui étaient déjà prévues à l’horaire le 10 avril 1995.

Selon la preuve qui a été produite à l’audience, M. Boujikian n’était plus affecté à des « fonctions restreintes » lorsqu’il est revenu au travail à la suite de sa suspension. Ces fonctions restreintes auraient pu également limiter ses possibilités d’heures supplémentaires. Le témoignage du fonctionnaire selon lequel il a rempli toutes ses fonctions normales après sa suspension n’a pas été contesté, pas plus que son affirmation voulant qu’il ait écrit aux superviseurs des aérogares afin de leur faire savoir qu’il était prêt à effectuer des heures supplémentaires. Je ne puis que conclure qu’on ne lui a pas attribué d’heures supplémentaires pendant les mois de juillet, d’août, de septembre et d’octobre 1995 pour des raisons inconnues. Au cours de ces quatre mois, M. Boujikian s’est vu attribuer des heures supplémentaires à l’occasion de vols arrivés en retard, ainsi que les heures supplémentaires inscrites sur la pièce E-2 (Stat. Pay).

Dans sa réponse au grief au deuxième palier, en décembre 1995, l’employeur a admis d’emblée qu’il semblait y avoir toujours un problème concernant l’attribution des heures supplémentaires. C’est à l’employeur et non au fonctionnaire s’estimant lésé qu’il incombait de rectifier la situation, puisque l’employeur est tenu par la clause 19.02a) de la convention collective particulière du groupe d’attribuer les heures supplémentaires de façon équitable. Il a fallu apparemment attendre jusqu’à l’été de 1997 avant que les heures supplémentaires soient attribuées de façon plus équitable, soit lorsqu’un problème d’ordinateur, d’une façon apparemment objective, a corrigé le problème de la répartition inéquitable des heures supplémentaires. Malheureusement pour M. Boujikian, cela arrivait un peu tard, puisqu’il a quitté l’AIP en vue d’aller travailler au Bureau central de Toronto à l’automne de 1997.

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Décision Page 11 Il me reste donc à décider si M. Boujikian devrait bénéficier d’un redressement pour la période du 7 avril au 6 octobre 1995.

J’estime que M. Boujikian devrait être indemnisé et, après un certain effort de créativité, j’ai déterminé ce qui suit. Puisque, en général, l’examen de l’attribution des heures supplémentaires s’effectue sur une période d’un an, M. Boujikian a reçu environ 17 heures supplémentaires par mois (202 divisé par 12 mois). De plus, le fonctionnaire a manqué 6,5 jours de travail à cause de maladie, ce qui représente une perte d’heures supplémentaires possibles équivalant à 5.5 heures (6,5 jours divisé par 20 jours ouvrables par mois, multiplié par 17 heures d’heures supplémentaires possibles par mois). Maintenant, lorsqu’on ajoute le nombre possible d’heures supplémentaires (17 heures), perdu à cause de la suspension d’un mois, aux 5,5 heures supplémentaires possibles dues à la maladie (total 22,5), plus les 202 heures supplémentaires qu’il avait acquises, on obtient un total de 224,5 heures. Cela aurait hypothétiquement placé le fonctionnaire au seizième rang parmi les 59 figurant sur la pièce E-1. S’il avait été en mesure de travailler pendant toute l’année financière, j’ai calculé qu’il aurait pu recevoir environ 224,5 heures supplémentaires, soit environ 18,5 heures par mois.

Pour les besoins de ma décision, j’ai exclu les mois d’avril, de mai et de juin 1995 ainsi que les périodes dites de « Stat. Pay ». Je ne tiens pas compte non plus de ce que l’on a qualifié de Stat. Pay, puisqu’on ne m’a pas expliqué de quoi il s’agissait. En juillet 1995, selon la pièce E-2, le fonctionnaire a effectué au total 9,75 heures supplémentaires découlant de vols arrivés en retard. En août 1995, il a reçu 7,5 heures supplémentaires en raison de vols arrivés en retard, et en septembre 1995, c’est 1,5 heure supplémentaire qu’il a effectuée pour les mêmes raisons, ce qui représente un total de 18,75 heures supplémentaires pour les mois de juillet, d’août et de septembre. En me basant sur mon premier calcul du nombre moyen d’heures supplémentaires que le fonctionnaires aurait pu effectuer par mois (18,5 ), je lui accorde la différence entre ce qu’il aurait pu effectuer pendant les mois de juillet, d’août et de septembre, soit 55,5 heures (18,5 x 3 mois), et ce qu’il a effectivement reçu, soit 18,75 heures, ce qui représente une différence de 36,75 heures supplémentaires. Ces 36,75 heures supplémentaires devront être rémunérées au taux prévu en 1995 par la convention collective pour le groupe PM-01. Ajouté à ce qu’il a déjà reçu, c’est-à-dire 202 heures supplémentaires, ce nombre Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 12 accordera au fonctionnaire 238,75 heures supplémentaires pour l’exercice 1995-1996 et le placera au seizième rang selon la pièce E-1.

Je n’ai pas le pouvoir d’indemniser M. Boujikian au-delà du 6 octobre 1995 et je ne l’ai pas fait.

Je demeurai saisi de la présente affaire dans l’éventualité les parties auraient de la difficulté à calculer ce que j’ai déterminé.

Dans la mesure indiquée ci-dessus, il est fait droit au grief.

J. Barry Turner, commissaire

OTTAWA, le 15 juin 1998. Traduction certifiée conforme Serge Lareau

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