Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Licenciement (motif disciplinaire) - Suspension indéfinie - Retrait de bois d'animal du Parc national - Condamnations aux termes de la Saskatchewan Wildlife Act - Crédibilité - Réintégration - le fonctionnaire, un employé saisonnier, a été suspendu indéfiniment, puis congédié pour avoir retiré des bois d'animal du Parc national où il travaillait et avoir utilisé les véhicules et le matériel appartenant à l'État pour le faire - le fonctionnaire avait été reconnu coupable de cinq accusations de commerce illicite d'animaux de la faune, de deux accusations de chasse sans permis et d'une accusation de possession illégale d'animaux de la faune en vertu de la Wildlife Act et de son règlement d'application - l'arbitre a accepté les certificats de condamnation à titre de preuve prima facie que le fonctionnaire avait commis les actes reprochés, mais il a indiqué qu'ils pouvaient faire l'objet d'une réfutation - la preuve a démontré que, à deux occasions, le fonctionnaire avait vendu des bois d'animal à un agent d'infiltration en lui disant qu'il les avait ramassés dans le Parc national - en ce qui a trait à la deuxième occasion, le fonctionnaire a dit à l'agent d'infiltration qu'il avait utilisé les véhicules et le matériel appartenant à l'État pour transporter les bois d'animal jusqu'à son véhicule - il est illégal de ramasser les bois d'animal dans le parc - il est illégal de retirer les bois d'animal du parc car ils font partie du processus naturel de régénération - le fonctionnaire a prétendu qu'il avait inventé l'histoire à propos des bois qu'il aurait retirés du parc et qu'il les avait plutôt recueillis sur un territoire de chasse visité et qui ne se trouvait dans le parc national - le fait que le fonctionnaire avait raconté des histoires à l'agent d'infiltration a été corroboré par un autre témoin qui était présent durant les transactions entre le fonctionnaire et l'agent d'infiltration et qui avait pris part au récit invraisemblable - même si le fonctionnaire avait fait le commerce de bois d'animal sans permis, ce qui était illégal, l'arbitre a conclu que, en l'absence de preuve corroborante, l'employeur n'avait pas réussi à démontrer selon la prépondérance des probabilités que le fonctionnaire les avait retirés du parc - néanmoins, le fonctionnaire avait été reconnu coupable de nombreuses infractions - notamment d'avoir chassé des animaux de la faune même si son travail était la protection de ces animaux - assurément, une mesure disciplinaire était justifiée, mais l'arbitre a conclu que le congédiement était une sanction trop sévère dans les circonstances - toutefois, le fonctionnaire avait expliqué pour la première fois à l'audience l'origine des bois d'animal - par conséquent, l'arbitre a ordonné à l'employeur de réintégrer le fonctionnaire à compter du début de la saison de 1999, sans lui verser aucune indemnisation rétroactive ni d'autres avantages à compter de la date de sa suspension pour une période indéfinie jusqu'à la date de sa réintégration. Grief contre la suspension indéfinie rejeté. Grief contre le congédiement admis en partie. Décisions citées :Re Canada Safeway Ltd and United Food and Commercial Workers International Union, Locals 206 and 486 (1982), 8 L.A.C. (3d) 378; Chong (166-2-16249).

Contenu de la décision

Dossiers : 166-2-27845 166-2-28240

Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE DANIEL C. MCLEOD fonctionnaire s’estimant lésé et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Patrimoine Canada)

employeur

Devant : Joseph W. Potter, président suppléant Pour le fonctionnaire s’estimant lésé : David Landry, Alliance de la Fonction publique du Canada Pour l’employeur : Richard Fader, étudiant stagiaire Affaire entendue à Saskatoon (Saskatchewan), du 19 au 21 août 1998, et à Prince-Albert (Saskatchewan), du 19 au 21 janvier 1999.

DÉCISION Le présent renvoi à l’arbitrage concerne deux griefs déposés par M. Daniel McLeod, un membre de l’unité de négociation du groupe Manoeuvres et hommes de métier à Parc Canada. En avril 1996, à la suite d’une opération d’infiltration, le fonctionnaire s’estimant lésé a été accusé de 12 infractions à la Wildlife Act de la Saskatchewan et à deux infractions à la Loi sur les parcs nationaux. Le 13 mai 1996, l’employeur a informé le fonctionnaire qu’il était suspendu pour une période indéfinie en attendant qu’une enquête soit menée concernant l’affaire. Cette suspension est l’objet du premier grief (dossier de la Commission 166-2-27845).

Le 14 avril 1997, le fonctionnaire a été déclaré coupable de huit des accusations portées contre lui; toutefois, il a interjeté appel de cette décision. La Cour d’appel a confirmé la condamnation pour quatre des accusations, et le fonctionnaire avait lui-même plaidé coupable à une autre accusation. Il s’agissait dans tous les cas d’infractions à la Wildlife Act de la Saskatchewan.

Le 22 avril 1997, le fonctionnaire a été congédié, ce qui est l’objet du second grief (dossier de la Commission 166-2-28240). La lettre de congédiement est ainsi rédigée (pièce E-12) :

[Traduction] La présente fait suite à une recommandation de licenciement découlant de l’enquête qui a été menée concernant des accusations portées contre vous et le jugement qui a été rendu à votre endroit à la suite de plusieurs accusations portées en vertu de la Wildlife Act et de son règlement d’application. Parmi les huit verdicts de culpabilité se trouvaient cinq chefs pour le commerce illicite d’animaux de la faune, deux pour avoir chassé sans permis et un pour possession illégale d’animaux de la faune.

Les preuves recueillies par nos enquêteurs ont amené la direction à croire qu’un grand nombre des pièces d’animaux en question provenaient du parc national de Prince-Albert et avaient été recueillies en utilisant les véhicules et le matériel appartenant à l’État. Ces infractions sont extrêmement graves étant donné les fonctions que vous exercez à titre d’employé du parc national de Prince-Albert; par conséquent, le lien de confiance entre l’employeur et l’employé a été rompu.

Pour les motifs ci-dessus et conformément aux pouvoirs et fonctions qui me sont délégués en vertu de l’article 11 de la

Public Service Staff Relations Board

Décision Page 2 Loi sur la gestion des finances publiques, je vous informe de ma décision de vous licencier pour un motif justifié de la fonction publique du Canada. La cessation de votre emploi prend effet à la date de la présente lettre.

Conformément à l’article 91 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, vous avez le droit de présenter un grief concernant ma décision.

La suspension pour une période indéfinie (dossier 166-2-27845) a été renvoyée à l’arbitrage le 16 mai 1997 et le grief concernant le congédiement (dossier 166-2-28240) a été renvoyé le 12 décembre 1997. Les deux affaires devaient initialement être entendues du 24 au 27 mars 1998, mais elles ont été reportées à la demande de l’employeur. Elles ont finalement été entendues comme prévu en août 1998.

Question préliminaire Par une lettre datée du 10 août 1998, M. Richard Fader, le représentant de l’employeur, a informé la Commission des relations de travail de la fonction publique (CRTFP) que l’employeur soulèverait une exception déclinatoire de compétence fondée sur le principe de l’abus de procédure.

M. Fader a souligné que la cour d’appel (Cour du Banc de la Reine de la Saskatchewan) avait confirmé quatre des sept condamnations. (De plus, le fonctionnaire avait plaidé coupable à une accusation additionnelle.) À la page 2 de sa lettre, M. Fader soutient ce qui suit :

[Traduction] Ce serait un abus de procédure que d’entendre ces griefs à l’arbitrage, puisqu’il s’agit uniquement de contestations parallèles aux condamnations susmentionnées [...]

Plus loin, il écrit : [...] Il est maintenant un principe élémentaire du droit d’affirmer qu’une condamnation constitue une preuve prima facie des faits sous-jacents à une accusation particulière [...]

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Décision Page 3 Il a cité, à l’appui de cette affirmation, une jurisprudence qui incluait l’affaire Demeter v. British Pacific Life Insurance Co. and two other actions (1983), 43 O.R. (2d) 33.

Une copie de la lettre de M. Fader a été envoyée à M. David Landry, le représentant du fonctionnaire s’estimant lésé, à titre d’information. Les deux parties ont reçu instruction de soulever toute question de compétence auprès de l’arbitre au début de l’audience.

Par conséquent, lorsque l’audience a débuté, M. Fader a déclaré qu’un arbitre nommé en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) était lié en droit d’accepter, comme un fait, les conclusions de la cour criminelle relativement aux accusations portées contre M. McLeod. Il n’est pas loisible au représentant du fonctionnaire de tenter de plaider de nouveau ces causes, dit-il. Le certificat de condamnation doit constituer une preuve prima facie suffisante que les actes reprochés au fonctionnaire ont effectivement eu lieu. De plus, toute conclusion de fait à laquelle la Cour est arrivée concernant les accusations criminelles ne peut maintenant faire l’objet d’une nouvelle action.

En réplique, M. Landry convient que ce serait un abus de procédure que d’intenter une nouvelle action concernant une condamnation au criminel. Cependant, le représentant du fonctionnaire signale que la question en litige ici n’est pas de savoir si le fonctionnaire a été reconnu coupable, mais plutôt si ses actes justifiaient le congédiement. Or cette question, soutient-il, fait certainement partie du champ de compétence d’un arbitre. M. Landry affirme que le fonctionnaire n’a pas retiré des bois d’animal du Parc, comme le prétend l’employeur; de plus, cette action ne faisait pas partie de la condamnation. En outre, le congédiement était une sanction trop sévère pour l’infraction dont le fonctionnaire a été reconnu coupable.

M. Fader répond que la Cour provinciale de la Saskatchewan, dans le jugement qu’elle a rendu dans cette affaire criminelle, à la page 2 de sa décision (pièce E-2), considère comme avéré le fait que des bois d’animal ou cornes ont été retirés du Parc. On peut lire ce qui suit dans la décision :

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Décision Page 4 [Traduction] […] L’accusé a avoué à l’agent d’infiltration qu’il avait ramassé les cornes caduques dans le Parc. [...]

Cette question, de soutenir M. Fader, ne peut maintenant être plaidée de nouveau. Cela constitue un abus de procédure que de plaider de nouveau les questions qui ont été tranchées par la Cour. Bien que le fonctionnaire ait le droit de tenter de justifier ses actes, il ne peut maintenant affirmé qu’il n’a pas retiré des cornes caduques du Parc, puisqu’il s’agit d’une conclusion de fait.

Après avoir étudié la question et examiné les arguments des deux parties, j’ai rendu la décision suivante : Le certificat de condamnation et l’appel correspondant constitueront une preuve prima facie de la déclaration de culpabilité concernant les accusations portées. S’il existe des transcriptions qui apportent des précisions au sujet des déclarations de culpabilité, elles pourront être produites. L’employeur ne sera pas tenu de prouver de nouveau ces accusations.

Le fonctionnaire s’estimant lésé peut soulever tout ou partie des accusations et avancer toute explication qu’il souhaite apporter afin d’atténuer la peine. Le certificat et les transcriptions peuvent faire l’objet de réfutation.

En dépit des déclarations de culpabilité, il est toujours loisible au représentant du fonctionnaire de plaider l’atténuation de la peine.

À la suite de cette décision, le représentant de l’employeur a produit la pièce E-3, le jugement rendu par la Cour du Banc de la Reine de la Saskatchewan concernant l’appel; les pièces E-4 à E-8 inclusivement sont des copies des certificats de condamnation pour chacune des accusations dont le fonctionnaire a été reconnu coupable; la pièce E-9 est une transcription des procédures de la Cour provinciale; et la pièce E-10 est une copie de la Wildlife Act.

J’ai acquiescé à la demande d’exclusion des témoins qui a été présentée.

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Décision Page 5 Éléments de preuve Le fonctionnaire s’estimant lésé est entré au service de Parcs Canada en 1984 à titre d’employé saisonnier membre du groupe Manoeuvres et hommes de métier (GL-ELE-03). Il travaillait dans le parc national de Prince-Albert à l’entretien des sentiers en forêt, des routes de canot, des terrains de camping, et il transportait du bois de chauffage et combattait les incendies. La saison s’échelonnait normalement de mai à octobre, et il y avait également du travail à accomplir en février et mars. Le fonctionnaire avait un dossier disciplinaire vierge avant la date de sa suspension.

M. McLeod a témoigné qu’il faisait partie d’une équipe de quatre personnes et que la plupart du temps il travaillait avec un, deux ou trois membres de l’équipe. Il lui arrivait, à quelques rares occasions, de travailler seul. Ce témoignage a été corroboré par M. Jim Lambe, qui a signé la lettre de licenciement (pièce E-12).

Le superviseur du fonctionnaire, M. Kurt Smith, en revanche, a témoigné que le fonctionnaire était appelé à exécuter un nombre important de tâches de façon indépendante puisqu’il n’exerçait pas toutes ses fonctions sous surveillance.

La question de savoir si le fonctionnaire travaillait seul, ou en groupe, est importante pour les raisons que j’exposerai plus loin.

Le fonctionnaire a expliqué qu’il se rendait au travail avec son propre véhicule, qu’il stationnait dans un terrain étaient garés tous les autres véhicules des employés. Chacun utilisait ensuite un véhicule appartenant à l’État pour se rendre à son lieu de travail.

Tous les témoins ont convenu que M. McLeod était un bon employé et qu’il n’y avait rien, avant que l’on porte des accusations contre lui, qui indiquait qu’il ne respectait pas les aspects écologiques du parc national de Prince-Albert.

Les événements qui ont entraîné le congédiement ont commencé en juillet 1995, lorsqu’un agent de conservation d’infiltration s’est vu confier ce qu’il est convenu d’appeler l’« opération Grey Owl ». L’agent d’infiltration, M. Mel Koehler, a témoigné qu’il avait été désigné pour aller faire enquête dans la région de Prince- Albert concernant des plaintes d’infractions à la Wildlife Act de la Saskatchewan et à la Loi sur les parcs nationaux. M. Koehler a témoigné que le fonctionnaire n’était pas visé Commission des relations de travail dans la fonction publique 5

Décision Page 6 par l’enquête au départ, mais les événements qui se sont déroulés pendant celle-ci, tels qu’ils sont décrits ci-dessous, ont entraîné sa mise en accusation. L’enquête concernant le fonctionnaire s’est échelonnée du mois d’août 1995 au mois de mars 1996 environ. Les accusations ont été portées une fois l’enquête terminée.

M. Koehler a témoigné en se remémorant ses souvenirs et à l’aide de notes qu’il a prises à l’époque les événements ont eu lieu. M. Landry a accepté que le témoin se réfère à ses notes, bien que celles-ci n’aient pas été produites en preuve.

Le premier contact que M. Koehler a eu avec M. McLeod, bien qu’indirect, a eu lieu le 26 août 1995 lorsque l’agent d’infiltration se trouvait au domicile de M. Robert Goertzen, un ami de M. McLeod. M. Koehler avait laissé savoir qu’il cherchait à acheter des bois d’animal. De plus, il a dit à M. Goertzen (et plus tard à M. McLeod) qu’il achetait des cornes à 5 $ la livre et qu’il pouvait les vendre à Winnipeg à 7 $ la livre. Le témoin a déclaré qu’il s’est présenté à la fois comme un commerçant légal et illégal de bois d’animal. Le 26 août, M. Goertzen a fait savoir qu’il savait l’on pouvait trouver des cornes d’orignal que M. Koehler serait peut-être intéressé à acheter. Les deux hommes se sont rendus au domicile de M. McLeod; toutefois, le fonctionnaire n’était pas chez lui à ce moment-là. Néanmoins, M. Goertzen a montré à M. Koehler des cornes d’orignal que le fonctionnaire s’estimant lésé gardait dans un hangar et, selon le témoignage de M. Koehler, les deux hommes se sont mis d’accord sur un prix d’achat de 300 $. Les deux hommes sont retournés au domicile de M. Goertzen et, toujours selon M. Koehler, M. Goertzen a dit qu’il communiquerait avec M. McLeod pour voir s’il acceptait ce prix. Il lui a téléphoné et l’on s’est entendu sur le prix convenu, soit 300 $.

M. Goertzen a témoigné que les cornes d’orignal n’avaient jamais été vendues et qu’il n’avait jamais reçu de M. Koehler les 300 $ en question. M. McLeod a témoigné qu’il n’avait reçu aucune somme d’argent de M. Goertzen concernant cette vente.

Quoi qu’il en soit, la première fois M. Koehler a effectivement rencontré le fonctionnaire a été le 18 octobre 1995 lorsque M. Koehler est passé voir M. Goertzen. Ce dernier avait dit à M. Koehler que le fonctionnaire avait d’autres cornes qu’il voulait lui montrer, et M. McLeod est venu chez M. Goertzen ce soir-là pour rencontrer M. Koehler.

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Décision Page 7 M. Koehler a expliqué que, peu de temps après que M. McLeod est arrivé au domicile de M. Goertzen, M. McLeod a parlé des cornes d’orignal que M. Koehler avait récemment achetées au prix de 300 $ et a dit qu’elles provenaient du Parc. Bien qu’il n’ait pas précisé quel parc, la Cour provinciale de la Saskatchewan a déclaré, dans la pièce E-2, ce qui suit au paragraphe 2 :

[Traduction] [...] Il est clair d’après la preuve qu’il parlait du parc national de Prince-Albert [...]

Il est illégal de retirer les cornes caduques du Parc, puisqu’elles font partie du processus naturel de régénération.

Le fonctionnaire a témoigné qu’il a très bien pu dire à M. Koehler lors de cette rencontre que les cornes provenaient du Parc. Toutefois, le fonctionnaire a déclaré que cette affirmation était fausse puisqu’il n’avait jamais retiré de bois d’animal du Parc.

À la même rencontre du 18 octobre entre MM. Koehler et McLeod, M. Koehler a témoigné que le fonctionnaire a dit avoir trouvé dans le Parc d’autres cornes d’animal qu’il avait vendues à quelqu’un au prix de 80 $. Il a dit à M. Koehler qu’il avait un emploi formidable puisqu’il pouvait utiliser le matériel de l’État, se faire rémunérer et faire 80 $ en plus. Il a également dit à M. Koehler que tous les printemps il allait faire une excursion de trois jours et qu’il recueillait des bois d’animal, et qu’il ne pourrait jamais être congédié à moins d’être pris à voler.

Le fonctionnaire s’estimant lésé a en fait témoigné deux fois. La première fois, M. Fader, le représentant de l’employeur, l’a cité comme témoin. La seconde fois, c’est son propre représentant, M. Landry, qui l’a cité.

Dans son témoignage initial, le fonctionnaire a affirmé qu’il avait recueilli des bois d’animal sur une période d’une quinzaine d’années et qu’il ne voulait pas révéler à M. Koehler l’endroit exact il trouvait ses cornes. Il a inventé l’histoire à propos des bois qu’il aurait retirés du Parc, tout cela était de la « boulshit », a-t-il ajouté. Dans son témoignage ultérieur, il a affirmé qu’il avait recueilli les cornes dans divers territoires de chasse qu’il avait visités, et qu’aucun ne se trouvait dans le Parc.

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Décision Page 8 Il a témoigné avoir dit cela parce que M. Koehler leur racontait des histoires de chasse qu’il considérait, quant à lui, comme de la « boulshit ». En fait, le fonctionnaire a témoigné que lui et M. Goertzen jouaient un jeu consistant à faire une gageure pour voir qui réussirait à raconter à M. Koehler une histoire à dormir debout sans que celui-ci dise « boulshit », et c’était simplement une de ces histoires invraisemblables qu’il avait racontée lorsqu’il avait dit avoir retiré des cornes du Parc. Le fonctionnaire a déclaré avoir raconté d’autres histoires invraisemblables à M. Koehler, par exemple avoir chassé le chevreuil hors saison et avoir fendu le crâne d’un chevreuil avec un seul tir.

Lorsque M. Goertzen a témoigné, il a confirmé que lui et M. McLeod avaient fait une gageure pour voir qui pourrait raconter l’histoire la plus invraisemblable à M. Koehler sans que ce dernier ne dise « boulshit ». Cependant, selon M. Goertzen, cette gageure aurait eu lieu après la première rencontre entre MM. Koehler et McLeod. M. Goertzen a témoigné qu’il n’aurait pas fait la gageure en la présence de M. Koehler, mais qu’ils auraient plutôt fait la gageure après avoir écouté quelques histoires.

Lors de son second témoignage, le fonctionnaire a déclaré avoir commencé à raconter des histoires invraisemblables dès qu’il a rencontré M. Koehler, bien que la gageure comme telle ait été faite au cours de la semaine suivant la rencontre avec M. Koehler.

Quoi qu’il en soit, à la rencontre du 18 octobre, M. Koehler a dit au fonctionnaire qu’il achetait et vendait des bois d’animal et M. McLeod pensait que M. Koehler était un commerçant légal de bois d’animal. En fait, M. McLeod a témoigné que puisque M. Koehler avait dit détenir un permis pour vendre des bois d’animal, il ne pensait pas que le fait de vendre des cornes à M. Koehler serait illégal. En contre-interrogatoire, le fonctionnaire a déclaré que, bien qu’il fût un chasseur expérimenté, il ignorait qu’il était illégal de faire le commerce d’animaux de la faune sans permis. Il a admis n’avoir jamais eu de permis pour vendre les bois d’animal à M. Koehler.

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Décision Page 9 La rencontre suivante entre M. Koehler et le fonctionnaire a eu lieu le 16 novembre, une fois de plus au domicile de M. Goertzen. Ils planifiaient une expédition de chasse pour le lendemain et M. McLeod a parlé d’un ours qu’il avait tiré sur sa propriété et que des corbeaux avaient nettoyé. M. Koehler a confirmé cette histoire le 18 novembre lorsqu’il a photographié la carcasse de l’ours.

MM. Koehler et McLeod sont allés à la chasse le 17 novembre en compagnie de M. et M m e Goertzen. Les Goertzen ont pris leur propre véhicule et M. McLeod a accompagné M. Koehler dans son camion. Pendant le trajet, le fonctionnaire a raconté à M. Koehler avoir tiré un chevreuil et en avoir peut-être blessé un deuxième, qu’il n’avait jamais trouvé. Lorsqu’ils ont passé près du lieu le fonctionnaire a dit que cela avait eu lieu, ils ont vu des corbeaux autour des restes d’un chevreuil. Le fonctionnaire a dit que c’était peut-être le chevreuil qu’il n’avait jamais trouvé.

Le fonctionnaire a en outre raconté avoir vendu des cornes de chevreuil au prix de 60 $ à un chasseur américain. M. Koehler a témoigné que des accusations avaient subséquemment été portées contre le chasseur américain, qui avait plaidé coupable à l’accusation d’avoir acheté des bois d’animal.

M. Koehler a témoigné que M. McLeod a parlé d’un orignal qu’il avait « braconné » près d’un immeuble situé non loin de sa propriété, mais à l’extérieur des limites du Parc, connu comme le bureau du MRN. L’importance de ces affirmations deviendra évidente plus tard.

Les deux hommes ont chassé toute la journée sans succès, puis ils ont pris le chemin du retour. M. Koehler a déclaré avoir vu un chevreuil et avoir arrêté le camion, et M. McLeod a tiré dessus. Ils ont attendu un bref moment avant que les Goertzen arrivent; puis les quatre sont allés dans le champ chercher le chevreuil. Une fois revenus au camion, M. McLeod, se rendant compte qu’il n’avait pas l’étiquette requise en sa possession, a demandé à M m e Goertzen de lui donner la sienne, qu’il a placée sur le chevreuil. Puis ils sont retournés au domicile de M. McLeod.

Une fois sur place, M. Koehler a demandé à voir les cornes que M. McLeod avait. Dans un bâtiment il y avait les cornes de deux orignaux, et dans un autre se trouvaient un certain nombre de cornes caduques (c’est-à-dire les cornes que perd

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Décision Page 10 naturellement l’animal) ainsi que les cornes d’un orignal que M. McLeod a raconté avoir « braconné » près du bureau du MRN.

M. Koehler a demandé si les cornes que M. McLeod avait provenaient du Parc et le fonctionnaire a répondu que oui, puisqu’il les avait ramassées au cours des deux années antérieures. M. Koehler a témoigné avoir fait part au fonctionnaire de sa préoccupation à savoir que les cornes avaient pu être marquées d’une façon ou d’une autre par les dirigeants du Parc afin de pouvoir les identifier plus tard, mais le fonctionnaire a assuré M. Koehler qu’elles n’étaient pas marquées puisqu’il était loin dans l’arrière pays lorsqu’il les a ramassées.

En ce qui concerne les incidents du 17 novembre, M. McLeod a finalement été accusé et reconnu coupable d’avoir illégalement chassé sans permis, en contravention de l’alinéa 28(1)b) de la Wildlife Act (voir le certificat de condamnation, pièce E-4). La Cour du Banc de la Reine de la Saskatchewan a confirmé cette condamnation en appel (pièce E-3, page 6).

M. McLeod a en outre été accusé et déclaré coupable d’avoir illégalement utilisé ou porté le permis ou l’estampille de quelqu’un d’autre pendant qu’il chassait, en contravention de l’alinéa 15b) de la Wildlife Act (pièce E-5). M. McLeod a plaidé coupable à l’accusation.

M. McLeod a également été accusé et reconnu coupable d’avoir eu en sa possession des animaux de la faune, à savoir des cornes d’orignal, pris en contravention de la Wildlife Act, ce qui est une infraction à l’article 31 de la Wildlife Act, ch. W13.1 (pièce E-6). En appel, cette condamnation a été confirmée (voir la pièce E-3, page 7).

La fois suivante M. Koehler et le fonctionnaire se sont rencontrés et qui a donné lieu à des accusations a eu lieu le 16 décembre 1995. M. Koehler s’est rendu au domicile de M. McLeod et a acheté des cornes de deux cerfs de Virginie au prix de 60 $. M. McLeod a dit à M. Koehler qu’elles provenaient du Parc. M. McLeod n’avait pas le permis requis pour effectuer cette vente.

Le fonctionnaire s’estimant lésé a été accusé d’avoir fait le commerce des animaux de la faune, à savoir des cornes de cerf de Virginie, en contravention de

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Décision Page 11 l’article 41 de la Wildlife Act, ch. w.13.1 (pièce E-7). En appel, les condamnations ont été confirmées (voir la pièce E-3, page 8).

Le 31 mars 1996, M. Koehler a de nouveau rendu visite à M. McLeod à sa résidence et ce dernier a montré à M. Koehler les bois de trois cerfs de Virginie. M. McLeod a affirmé avoir ramassé les cornes ce printemps-là dans le Parc, en les plaçant d’abord dans un camion appartenant à l’État sous une toile, et en les transférant par la suite dans son propre véhicule. Le fonctionnaire a vendu les bois à M. Koehler au prix de 20 $.

Le fonctionnaire a été reconnu coupable de la même infraction qu’il avait commise en décembre 1995, à savoir d’avoir fait le commerce des animaux de la faune (voir la pièce E-8). En appel, la condamnation a également été confirmée (voir la pièce E-3, page 8).

M. Koehler a témoigné que M. McLeod avait raconté avoir volé une veste de gardien dans le magasin du Parc en revêtant un chandail par dessus; une fois chez lui, il a enlevé les bandes réfléchissantes.

Le fonctionnaire a nié avoir dit à M. Koehler qu’il avait volé une veste de gardien. Il a plutôt raconté à M. Koehler qu’il avait chez lui une veste qu’un gardien ivre avait laissée après un party. Il a avoué avoir raconté cet incident en plaisantant, mais il a dit l’avoir acquise après que quelqu’un l’eut laissé chez lui lors d’un party sans jamais venir la chercher.

En mars 1996, deux membres du service des enquêtes spéciales ont mis au courant le gestionnaire du Service des gardes de parc, M. John Fau, du travail d’infiltration récent effectué par M. Koehler. M. Fau a témoigné qu’on lui a dit que M. McLeod avait enfreint la Wildlife Act et qu’il retirait des bois d’animal du Parc afin de les revendre, et ce, en utilisant du matériel appartenant à l’État. Finalement un mandat de perquisition a été exécuté à la résidence de M. McLeod le 4 avril 1996, et deux agents des Parcs nationaux étaient présents. Parmi les articles saisis se trouvaient des bois d’orignal et une veste de gardien du Parc. M. McLeod a témoigné qu’on a porté contre lui des accusations le jour le mandat de perquisition a été exécuté.

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Décision Page 12 M. Fau a affirmé qu’aucun gardien du Parc n’avait déclaré la perte d’une veste, mais qu’aucune action n’avait été intentée contre M. McLeod concernant la veste. M. Fau a fait état des accusations portées contre le fonctionnaire à M. Lambe, le gestionnaire des biens du parc national de Prince-Albert en Saskatchewan.

Il s’est agi du dernier contact que M. Koehler a eu avec le fonctionnaire s’estimant lésé. À la question de savoir s’il avait cru aux histoires racontées par le fonctionnaire, M. Koehler a répondu par l’affirmative puisque, en général, elles pouvaient toutes être contrôlées. La perquisition exécutée au domicile du fonctionnaire avait permis de découvrir une veste de gardien sans bandes réfléchissantes, les histoires de chasse ont pu être vérifiées d’une façon ou d’une autre, et l’Américain a été reconnu coupable d’avoir acheté les bois d’animal que M. McLeod avait dit lui avoir vendus. Par conséquent, selon M. Koehler, M. McLeod ne racontait pas des histoires à dormir debout, mais disait plutôt la vérité lorsqu’il a dit avoir retiré les cornes caduques du Parc.

En contre-interrogatoire, M. Koehler a affirmé qu’il avait lui aussi raconté des histoires de chasse pendant qu’il était en compagnie de MM. McLeod et Goertzen, histoires ayant trait à des incidents qui ne lui étaient pas nécessairement arrivées à lui personnellement, contrairement à ce qu’il leur avait dit.

Le témoin a en outre admis en contre-interrogatoire qu’il n’était jamais allé dans le parc national de Prince-Albert avec M. McLeod pour chasser; de plus, M. McLeod semblait lui aussi respecter les territoires il était interdit de pénétrer.

Au cours de son témoignage, tant au début qu’à la fin de la présente audience, le fonctionnaire s’estimant lésé n’a jamais nié avoir dit à M. Koehler que les cornes qu’il vendait provenaient du Parc. Il a constamment nié la véracité de cette affirmation, toutefois. En fait, il a témoigné n’avoir jamais retiré des bois d’animal du Parc. Il a expliqué avoir raconté l’histoire parce que, comme il travaillait au Parc, il estimait que c’était croyable et il ne voulait pas révéler l’emplacement véritable de sa source de cornes. Il a embelli l’histoire en affirmant qu’il utilisait un véhicule appartenant à l’État pour retirer les bois d’animal du Parc. Le fonctionnaire a admis qu’il savait qu’il était illégal de retirer des bois d’animal du Parc.

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Décision Page 13 M. Kurt Smith, le superviseur du fonctionnaire, a déclaré qu’il n’avait aucune connaissance personnelle du fait que le fonctionnaire aurait retiré des cornes du Parc, pas plus qu’il n’avait entendu de rumeurs d’autres membres du personnel comme quoi cela s’était produit.

M. Fau a témoigné qu’il ne savait pas personnellement que M. McLeod retirait des bois d’animal du Parc. La seule preuve qui existait était la parole de M. Koehler. En fait, le Ministère a interrogé environ six autres employés pour voir si quelqu’un avait de l’information à propos de M. McLeod, et rien de pertinent n’a été trouvé. M. Fau a déclaré qu’aucun employé du parc national de Prince-Albert lui avait jamais dit avoir entendu parler que M. McLeod retirait des bois d’animal du Parc.

La saison devait commencer le 2 mai 1996 et le fonctionnaire s’est présenté au travail ce jour-là. On lui a dit de se présenter à M. Lambe, et il a reçu instruction de rentrer chez lui.

Le 6 mai, une rencontre a eu lieu entre le fonctionnaire s’estimant lésé, le représentant de son agent négociateur et la direction, et on a demandé au fonctionnaire s’il avait quelque chose à dire à propos des accusations. Le fonctionnaire a affirmé aux personnes présentes qu’il avait reçu instruction de son avocat de ne rien dire.

Le 13 mai 1996, le fonctionnaire a reçu une lettre le suspendant pour une période indéfinie en attendant que soit menée l’enquête au sujet du commerce illicite de parties d’animaux de la faune (voir la pièce E-11). Le fonctionnaire a déposé un grief et s’est fait dire, dans la réponse qu’il a reçue à son grief au premier palier le 10 juin, que la suspension était imposée afin que l’on puisse mener une enquête interne. L’enquête achevait et les résultats devaient lui en être communiqués « dans un proche avenir » (voir la pièce G-2).

M. McLeod a témoigné qu’il n’avait jamais vu les résultats de l’enquête interne. M. Lambe a témoigné qu’il avait décidé de suspendre le fonctionnaire initialement et qu’il espérait que M. McLeod fournirait des renseignements au sujet des accusations. Ces renseignements ne sont jamais venus. De plus, M. Lambe a

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Décision Page 14 déclaré que le Ministère voulait mener une enquête interne et attendre l’issue de l’affaire devant la Cour.

La cause de M. McLeod a été entendue en cour le 14 avril 1997 et au départ le fonctionnaire a été accusé de 12 infractions (voir la pièce E-3, page 1). À l’issue du procès, le fonctionnaire a été déclaré coupable sur sept chefs d’accusation et a plaidé coupable à un autre chef.

Le 22 avril 1997, le fonctionnaire a reçu la lettre de licenciement (pièce E-12), et il a présenté un grief à ce sujet également.

M. Lambe a déclaré que la recommandation de licenciement avait été faite uniquement après qu’on eut tenu compte de tous les facteurs atténuants, par exemple un dossier disciplinaire vierge pendant 13 ans et un bon rendement au travail. Toutefois, il estimait que la gravité de l’infraction faisait ombrage à ces éléments et le congédiement était approprié, a-t-il dit, même à la lumière des accusations qui sont demeurées après que l’appel eut confirmé quatre des accusations.

Arguments Argumentation de l’employeur M. Fader commence en examinant les décisions judiciaires, qui ont trait au commerce illicite d’animaux de la faune. La Cour a accepté le témoignage de M. Koehler, à savoir que les affirmations ont effectivement été faites par le fonctionnaire s’estimant lésé et elle a accordé un certain poids à ces affirmations. Dans la pièce E-1, paragraphe 2, la Cour, de signaler M. Fader, a jugé qu’il y avait des preuves montrant que les bois d’animal provenaient effectivement du Parc. Dans la pièce E-2, à la page 2, la Cour a accepté le fait que certaines affirmations avaient été faites par M. McLeod et qu’elles étaient vraies; par conséquent, selon M. Fader on peut conclure que toutes les affirmations faites par M. McLeod étaient vraies.

Le fonctionnaire était un employé qui comptait 13 années de service, mais la nature de l’affaire et les faits, de soutenir M. Fader, étayaient les sanctions imposées. Essentiellement, soutient M. Fader, cela tient aux trois principes qui s’appliquent en l’espèce, à savoir l’aspect commercial en cause; l’absence de remords; et le préjudice causé à l’image de la fonction publique. Commission des relations de travail dans la fonction publique 14

Décision Page 15 Selon M. Fader, il s’agit ici d’une affaire de crédibilité. Le fonctionnaire a été déclaré coupable d’infractions à la Wildlife Act, mais il prétend ne pas avoir retiré de bois d’animal du Parc. M. Fader maintient que le témoignage du fonctionnaire n’est pas crédible, et les aveux qui ont été faits à un agent d’infiltration montrent que ces affirmations sont véridiques. Ces déclarations ont été faites sur une période de cinq mois et demi pendant que l’agent d’infiltration menait son enquête.

M. Fader fait remarquer que le témoignage initial du fonctionnaire voudrait faire croire que ce dernier et M. Goertzen jouaient un jeu en raison d’une gageure qu’ils avaient faite. Selon les témoignages, cela ce serait produit dans les cinq ou dix minutes après que le fonctionnaire eut rencontré pour la première fois M. Koehler. Maintenant le fonctionnaire a modifié son histoire pour dire qu’il n’y avait pas eu de jeu au cours de sa première rencontre avec M. Koehler, mais il a quand même menti. M. Fader soutient qu’il est invraisemblable qu’un employé du Parc eût fait des affirmations aussi risquées à quelqu’un qu’il venait de rencontrer à moins que, en fait, elles aient été vraies.

Les autres histoires que le fonctionnaire a racontées à l’agent d’infiltration étaient vraies. Il a dit avoir pris une veste du magasin et l’on a trouvé une veste chez lui. Il a affirmé avoir vendu des bois d’animal à un Américain, et cela s’est révélé être vrai. La même chose s’applique à ses histoires de chasse. Le représentant me demande de croire l’aveu du fonctionnaire comme étant vrai à propos des bois d’animal que celui-ci a dit avoir retirés du Parc.

Lorsque le fonctionnaire a été suspendu, pourquoi n’est-il pas simplement allé trouver l’employeur pour lui dire qu’il n’avait pas retiré les bois d’animal du Parc? Il savait qu’il était illégal de retirer des cornes du Parc, alors pourquoi ne pas avoir dit à l’employeur qu’il n’avait jamais retirer de bois d’animal du Parc?

La suspension pour une période indéfinie est justifiée puisque des accusations avaient été portées et que des articles avaient été saisis en vertu d’un mandat de perquisition. Les présumées infractions étaient incompatibles avec la relation employeur-employé et il était donc raisonnable pour le Ministère de conclure qu’il n’était pas possible de maintenir l’employé dans son emploi.

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Décision Page 16 Le fonctionnaire a été reconnu coupable d’infractions graves. Il travaille sans supervision et il n’est pas possible de le réintégrer. Ces infractions contreviennent à la Loi sur les parcs nationaux, article 4, ainsi qu’à la politique des parcs nationaux, page 1, paragraphe 2.

En résumé, M. Fader fait valoir sept motifs pour lesquels la sanction disciplinaire devrait être maintenue, à savoir : la période pendant laquelle le fonctionnaire a recueilli des bois d’animal; l’aspect commercial en cause, y compris le fait qu’une vente a été effectuée même avant la vente qui a été faite à l’agent d’infiltration; l’absence de remords; le fonctionnaire savait qu’il était illégal de retirer des cornes du Parc; il l’a fait durant les heures de travail; il a utilisé du matériel appartenant à l’État pour le faire; et il s’est vanté de ne pas avoir été pris.

M. Fader cite la jurisprudence suivante : Rose (dossiers de la Commission 166-2-27307 et 27308); Lynch (dossier de la Commission 166-2-27803); Re Canadian Airlines International and Transportation Communications Union (1989), 2 L.A.C. (4 th ) 362; MacKenzie (dossiers de la Commission 166-2-26614 et 26615); Thomson (dossier de la Commission 166-2-27846); et Scott (dossiers de la Commission 166-2-26268 et 26269).

Argumentation du fonctionnaire s’estimant lésé M. Landry affirme que la raison pour laquelle le fonctionnaire ne s’est jamais expliqué à la direction était que, après le 6 mai 1996, il n’a jamais été interrogé. À la réunion du 6 mai, on ne lui a pas demandé s’il avait retiré quoi que ce soit du Parc, et il avait reçu instruction de son avocat de ne commenter aucune question.

M. Landry soutient que les documents judiciaires n’établissent pas comme tel que le fonctionnaire a pris les bois d’animal du Parc. La pièce E-1, paragraphe 2, ne contient pas de conclusions de fait, il s’agit plutôt d’une affirmation indiquant qu’il existe des éléments de preuve. Or ces éléments n’ont pas mené à la preuve montrant que le fonctionnaire avait retiré les cornes du Parc. Il n’y a pas eu de tentatives d’examiner la preuve en Cour puisque cela n’était pas nécessaire à la lumière de la motion de non-lieu, qui a été accueillie. M. Landry se réfère au paragraphe 3 de la pièce E-2, le juge Goliath de la Cour provinciale écrit :

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Décision Page 17 [Traduction] […] Je ne tire aucune conclusion à l’égard de la légalité de la possession des cornes caduques.

M. Landry fait valoir que le fonctionnaire a toujours dit la même chose depuis le début de son témoignage, en ce sens qu’il a admis avoir fait les déclarations contre intérêt en question, mais qu’il nie la véracité de celle concernant le fait de retirer des bois d’animal du Parc.

Pour ce qui est de la conclusion relative à la veste du gardien trouvée au domicile du fonctionnaire, bien que ce dernier ait été malavisé d’affirmer que la veste provenait d’un gardien ivre, cela ne fait pas partie des motifs pour lesquels l’employeur a congédié le fonctionnaire et l’on ne devrait pas s’y arrêter.

Selon M. Landry, il n’y avait aucune incompatibilité avec la relation employeur-employé. Le fonctionnaire travaillait à l’entretien des sentiers, la plupart du temps avec une équipe d’autres employés, et il n’y avait aucune preuve montrant qu’il ne pouvait pas continuer. Le fonctionnaire avait un dossier disciplinaire vierge et il était un bon employé. De plus, aucun membre de son équipe n’a affirmé qu’il n’aurait pu travailler avec le fonctionnaire si celui-ci avait été maintenu dans son emploi.

Il n’y a eu aucune condamnation concernant quelque activité que ce soit ayant eu lieu dans le Parc. Les cinq condamnations avaient trait à des activités qui ont eu lieu à l’extérieur du Parc.

En l’espèce, M. Landry signale que la charge de la preuve incombait à l’employeur, et que celui-ci ne s’en est pas acquitté. Aucune preuve n’a été produite afin d’établir que le fonctionnaire avait retiré les bois d’animal du Parc. Ni le fonctionnaire ni M. Koehler n’ont jamais chassé à l’intérieur du Parc et personne n’a jamais vu le fonctionnaire prendre quoi que ce soit du Parc. Personne ne l’a jamais vu dans un véhicule au mauvais endroit dans le Parc et le fonctionnaire n’a fait l’objet d’aucun soupçon avant que M. Koehler n’entre en jeu.

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Décision Page 18 Le fonctionnaire a été suspendu pour une période indéfinie en mai 1996 en attendant l’issue de ce qui, lui a t-on dit, devait être une enquête interne. Or le fonctionnaire n’a jamais été informé des résultats d’une enquête interne quelconque.

Toute la situation a surgi en raison de certaines histoires que M. Koehler racontait, et que le fonctionnaire s’estimant lésé ne croyait pas; par conséquent, le fonctionnaire a répliqué avec des histoires de son cru. Toutefois, certaines des histoires racontées par le fonctionnaire n’étaient pas vraies.

La preuve se résume au témoignage de M. Koehler. Bien que celui-ci pensât que le fonctionnaire disait la vérité, l’enquête interne n’a rien révélé de pertinent. De plus, aucun employé du parc national de Prince-Albert n’a pu affirmer avoir vu M. McLeod retirer des bois d’animal du Parc. Ce fait, combiné au fait que le fonctionnaire n’a jamais été déclaré coupable d’avoir retiré des bois d’animal du Parc, est important, d’affirmer M. Landry. Est-il raisonnable de penser que ce genre d’activité aurait pu se produire lorsque le fonctionnaire travaillait avec trois ou quatre autres membres de son équipe? Pour y parvenir, le fonctionnaire aurait eu à découvrir d’abord les cornes, à les recouvrir pour le reste de la journée, à les placer dans un véhicule appartenant à l’État, et, enfin, à les transférer dans son camion garé le long de tous les véhicules des autres employés. Toute cette activité afin de lui permettre d’entreposer les cornes dans son hangar? Ce n’est pas plausible, selon M. Landry.

M. Landry cite la jurisprudence suivante de la Commission : Lawrence (dossier 166-2-21341); Bastie (dossier 166-2-23228); Caterer (dossier 166-2-23750); Thomas (dossier 166-2-18952); et Bocchicchio (dossier 166-2-9237).

Réplique M. Fader affirme que l’employeur s’appuyait sur les aveux du fonctionnaire. L’employeur soutient que ces affirmations, lorsqu’elles ont été faites, étaient crédibles et que la nouvelle défense n’est pas crédible.

En ce qui a trait à l’enquête provisoire, le fonctionnaire connaissait les accusations qui pesaient contre lui et il aurait pu aller s’expliquer à la direction à tout moment. Il n’y a eu aucune injustice.

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Décision Page 19 Le fonctionnaire a déclaré qu’il exécutait effectivement certaines tâches de façon indépendante. Il ne fallait pas beaucoup de temps pour ramasser les cornes dans le Parc et les retirer.

Motifs de la décision Il s’agit ici d’une affaire de congédiement et en pareil cas la charge de la preuve incombe à l’employeur. Tel qu’il avait été conclu dans Rose (supra), il ne s’agit pas de prouver au-delà de tout doute raisonnable que les faits allégués ont eu lieu, mais plutôt d’établir d’après la prépondérance des probabilités que le fonctionnaire a retiré des bois d’animal du Parc et que, pour le faire, il a utilisé un véhicule appartenant à l’État.

Je dois déterminer si l’employeur s’est acquitté de cette tâche et, si tel est le cas, si le congédiement est justifié.

En bref, l’employeur soutient que les affirmations que le fonctionnaire a faites à un agent d’infiltration au cours d’une période d’environ cinq mois et demi constituent des aveux que l’on devrait croire. Plus précisément, le fonctionnaire a toujours dit à l’agent d’infiltration que les bois d’animal qu’il avait en sa possession provenaient du Parc (qui, d’après les tribunaux, serait le parc national de Prince-Albert). En outre, le fonctionnaire a prétendu avoir acquis ces cornes en utilisant un véhicule appartenant à l’État.

L’employeur s’appuie également sur les décisions de la Cour pour montrer que les tribunaux ont conclu que ces affirmations étaient véridiques. En tant que telle, l’affaire a été tranchée et ne peut maintenant faire l’objet d’une nouvelle action.

Le représentant du fonctionnaire ne nie pas que celui-ci a fait certains aveux à l’agent d’infiltration, mais le fonctionnaire a témoigné que ces affirmations n’étaient tout simplement pas vraies. De plus, aucun tribunal n’a trouvé de preuve du fait que le fonctionnaire aurait retiré les bois d’animal du Parc.

Dans l’ouvrage The Law of Evidence in Civil Cases, MM. Sopinka et Lederman examinent la question du ouï-dire ainsi que les aveux. À la page 140 ils écrivent ce qui suit :

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Décision Page 20 [Traduction] […] il est toujours loisible à cette partie de venir témoigner pour dire qu’elle n’a pas fait cet aveu ou pour le qualifier d’une façon ou d’une autre [...]

C’est la situation sur laquelle nous devons nous pencher ici. M. McLeod a témoigné qu’il avait effectivement fait divers aveux à l’agent d’infiltration, mais que ces aveux n’étaient pas vrais.

Le fonctionnaire a admis qu’il savait qu’il était illégal de retirer des bois d’animal du Parc et en tant qu’employé du Parc j’estime qu’il avait une plus grande responsabilité à l’égard de la protection de l’intégrité naturelle du Parc que, par exemple, un membre du public. En fait, le représentant du fonctionnaire a reconnu devant moi que, en l’espèce, si je décidais que le fonctionnaire avait effectivement retiré les bois d’animal du Parc, le congédiement serait une sanction appropriée.

M. Koehler, en sa capacité d’agent d’infiltration, a témoigné qu’il avait continuellement à juger si les gens avec lesquels il était en contact disaient la vérité. Il a déclaré que s’il y avait des gens qu’il ne croyait pas, il y en avait d’autres qu’il croyait. Le fonctionnaire faisait partie de cette dernière catégorie, principalement parce que les autres histoires qu’il a racontées ont pu être confirmées d’une façon ou d’une autre. M. Koehler a affirmé que puisque les autres histoires s’étaient avérées fondées, l’affirmation comme quoi les bois d’animal provenaient du Parc était, à son avis, véridique. Puis que M. Koehler n’a jamais vu le fonctionnaire retirer comme tel les bois d’animal du Parc, c’est sur l’aveu du fonctionnaire qu’il s’appuie.

Le fonctionnaire prétend qu’il ne disait pas la vérité lorsqu’il a fait ces affirmations à M. Koehler, et l’employeur n’a pu citer de témoins pour dire qu’ils avaient vu le fonctionnaire retirer comme tel les bois d’animal du Parc. En bout de ligne, le fonctionnaire est seul à savoir avec une certitude absolue s’il a retiré ou non les cornes du Parc, mais existe-t-il, néanmoins, un motif suffisant pour justifier le congédiement?

Si les tribunaux avaient conclu que ces aveux de M. McLeod étaient véridiques, alors l’affaire serait quelque peu simplifiée. Cependant, le fonctionnaire s’estimant lésé aurait toujours la possibilité d’avancer, à titre de facteur atténuant, une

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Décision Page 21 explication concernant le verdict de culpabilité (voir, par exemple, Re Canada Safeway Ltd. and United Foods and Commercial Workers International Union, Locals 206 and 486 (1982), 8 L.A.C. (3d) 378).

À mon avis, les tribunaux n’ont pas tiré de telle conclusion. Dans la pièce E-1, la Cour provinciale de la Saskatchewan écrit, au paragraphe 2 :

[Traduction] Il existe des éléments de preuve montant que l’accusé était en possession de cornes d’orignal aux environs des dates en question, et que les cornes provenaient du parc national de Prince-Albert.

Selon M. Landry, il s’agit uniquement d’une affirmation faite par la Cour selon laquelle il y avait des éléments de preuve, lesquels éléments n’ont toutefois jamais été examinés puisque les accusations pertinentes ont été rejetées. Je suis d’accord.

En l’occurrence, la Cour a déclaré qu’il y avait des éléments de preuve montrant que M. McLeod avait en sa possession des bois d’animal qui provenaient du Parc, mais les accusations accompagnant cette déclaration ont été rejetées. La preuve n’a jamais par conséquent été examinée, pour ainsi dire, puisque les accusations ont été rejetées à cause d’une question de forme.

Cependant, d’autres accusations ont été maintenues et ont été instruites de nouveau par la Cour provinciale de la Saskatchewan (pièce E-2). M. Fader m’a renvoyé au paragraphe 2 de cette pièce, l’on peut lire ce qui suit :

[Traduction] […] L’accusé a avoué à l’agent d’infiltration qu’il avait recueilli les cornes caduques dans le parc. Il est clair d’après la preuve qu’il parlait du parc national de Prince-Albert [...]

Est-ce une conclusion de fait que M. McLeod a recueillie des bois d’animal dans le parc national de Prince-Albert? Je ne le crois pas. Dans sa décision, la Cour admet comme un fait établi, à mon avis, que lorsque M. McLeod a mentionné le mot « Parc »

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Décision Page 22 il voulait dire le parc national de Prince-Albert. Toutefois, la première phrase de la citation ci-dessus, à mon avis, est une simple affirmation que M. McLeod a faite à l’agent d’infiltration, à savoir que les bois d’animal provenaient du Parc. Ce n’est pas, en soi, une preuve que l’affirmation est véridique, et cette affirmation n’a pas été acceptée comme telle non plus.

Cette interprétation est étayée à la page 3 de la décision de la Cour, paragraphe 3, le juge Goliath écrit de nouveau (voir la pièce E-2) :

[Traduction] […] Je ne tire aucune conclusion en ce qui a trait à la légalité de la possession des cornes caduques.

Ainsi il y a eu verdict de culpabilité à l’égard d’un certain nombre d’infractions liées à la faune (voir la page 7 de la pièce E-2), mais il n’y a eu aucune déclaration quant au fait d’avoir retiré les bois d’animal du Parc.

Il a été interjeté appel de ces verdicts de culpabilité devant la Cour du Banc de la Reine de la Saskatchewan et nulle part dans la décision du juge Matheson je ne trouve de conclusion établissant que les cornes provenaient du parc national de Prince-Albert. Il y a une affirmation que le juge Matheson fait que je trouve particulièrement pertinente en l’espèce. Il écrit, au paragraphe 13 (pièce E-3) :

[Traduction] Si chaque personne qui affirme s’être livrée à une activité illégale pouvait être déclarée coupable uniquement sur la foi de cette affirmation, un bon nombre de vantards regretteraient amèrement leur tendance naturelle à exagérer.

Cela s’appliquerait particulièrement au fonctionnaire s’estimant lésé. Les certificats de condamnation, soit les pièces E-4 à E-8 inclusivement, ne sont pas des déclarations de culpabilité concernant l’allégation selon laquelle M. McLeod aurait retiré les bois d’animal du Parc. Les pièces E-4 à E-6 inclusivement ont trait aux incidents du 17 novembre, à savoir le fait d’avoir attaché l’estampille d’une autre personne au chevreuil qu’il avait tiré, ainsi que la possession de cornes d’orignal. Les pièces E-7 et E-8 ont trait à la vente des cornes à M. Koehler sans le permis requis.

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Décision Page 23 Je constate qu’aucun tribunal n’a conclu que le fonctionnaire avait en sa possession des cornes qui provenaient du parc national de Prince-Albert.

Par conséquent, il nous reste la déclaration contre intérêt du fonctionnaire comme unique fondement du congédiement.

Lorsque l’employeur a appris que des accusations étaient portées contre M. McLeod, il a dit au fonctionnaire que les allégations faisaient l’objet d’une enquête qui était en cours et qu’il serait suspendu sans traitement en attendant l’issue de celle-ci (pièce E-11). J’estime qu’il est raisonnable de conclure qu’une telle enquête donnerait lieu à l’une ou l’autre de deux conclusions, à savoir qu’il existait des preuves additionnelles établissant la véracité des affirmations faites par M. McLeod, ou au contraire qu’il n’existait aucune preuve concernant la véracité de ces affirmations.

En l’occurrence, aucune preuve autre que le témoignage de M. Koehler ne m’a été présentée. Aucun employé n’avait jamais vu le fonctionnaire retirer des bois d’animal du Parc au cours de ses 13 années de service. Aucun employé n’avait entendu de rumeurs comme quoi le fonctionnaire avait retiré des cornes du Parc. Puisque M. McLeod n’était même pas visé initialement par l’opération d’infiltration, il n’existait aucune révélation initiale indiquant une faute de conduite quelconque de sa part. Le fonctionnaire a admis avoir vendu des bois d’animal à un chasseur américain, et on m’a informé que ce chasseur avait plus tard été reconnu coupable d’une infraction. Si le fonctionnaire avait fait à ce chasseur américain des déclarations contre intérêts, cela aurait pu étayer la preuve de l’employeur, mais aucune preuve en ce sens ne m’a été présentée.

Je ne crois pas par ailleurs que l’employeur a suffisamment prouvé la véracité des affirmations du fonctionnaire comme quoi il aurait retiré les bois d’animal du Parc en utilisant un véhicule appartenant à l’État. S’il l’avait fait, quelqu’un quelque part l’aurait sûrement vu le faire pendant sa journée de travail (et l’employeur prétend que cette action a eu lieu durant la journée de travail du fonctionnaire) ou aurait même entendu des rumeurs à cet effet.

Il ne fait aucun doute que les déclarations de culpabilité concernant les accusations portées contre lui représentent de graves problèmes pour le fonctionnaire.

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Décision Page 24 Il a été déclaré coupable d’avoir chassé illégalement des animaux de la faune; or son emploi consiste à protéger la faune.

Le fonctionnaire s’est livré au commerce de bois d’animal, sans permis, ce qui est illégal. Sa transaction du 16 décembre lui a rapporté 60 $ et celle du 31 mars, 20 $.

Ici encore, pour quelqu’un qui travaille à Parcs Canada, il s’agit d’accusations plus graves, à mon avis, que si elles avaient été portées contre un membre du public.

Toutefois, s’agit-il d’accusations graves au point de justifier le congédiement? Je ne crois pas que la relation employeur-employé soit rompue irrévocablement par un verdict de culpabilité au point ces accusations particulières justifient de licenciement.

Il s’agit d’une situation difficile à résoudre, et, tel que je l’ai affirmé plus tôt, le fonctionnaire est le seul à savoir avec certitude absolue s’il a retiré des bois d’animal du Parc. S’il l’a effectivement fait, il a très certainement mis en péril son emploi pour gagner quelques dollars. Ses affirmations étaient, à tout le moins, imprudentes et malavisées et, au plus, elles mettaient en péril le maintien de son emploi.

Cependant, je ne crois pas que l’employeur a présenté une preuve suffisante pour justifier la peine ultime du congédiement. De toute évidence les actes commis par le fonctionnaire méritent une sanction disciplinaire, et le représentant du fonctionnaire, dans son argumentation, l’a reconnu. La lettre de congédiement (pièce E-12) mentionne le fait que le fonctionnaire a été déclaré coupable d’un certain nombre d’accusations ayant trait à la faune. À la lumière de sa position, j’estime que ces actes méritent une sanction disciplinaire, et je suis renforcé dans cette croyance par le fait que le représentant du fonctionnaire a reconnu qu’une sanction disciplinaire était effectivement justifiée.

Je suis par ailleurs très conscient du fait que l’employeur a rencontré le fonctionnaire peu de temps après que les accusations ont été portées et qu’il lui a demandé de s’expliquer à ce sujet. Or aucune explication n’est venue. Le fonctionnaire aurait pu à tout moment durant la procédure affirmer à l’employeur qu’il avait fait des déclaration contre intérêt à M. Koehler, mais que ces déclarations

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Décision Page 25 n’étaient tout simplement pas vraies. Il a choisi de ne pas le faire, même après que la Cour eut rendu ses conclusions en appel. En fait, la preuve qui m’a été présentée indique que le fonctionnaire a pour la première fois déclaré à l’audience que l’aveu qu’il avait fait était faux. Il a certes manqué de franchise avec l’employeur en l’espèce.

Dans Chong (dossier de la Commission 166-2-16249), le président suppléant W.L. Nisbet devait se prononcer sur une situation le fonctionnaire avait lui aussi manqué de franchise en expliquant son comportement. Il a écrit, à la page 85 : Je conclus en outre que le fait que l’employé s’estimant lésé n’ait pas fourni, lorsqu’il en a eu l’occasion, une explication franche et complète de ses séjours dans un logement particulier à Toronto constitue un manquement à ses obligations envers l’employeur et que ce manquement m’interdit de le réintégrer avec rappel de traitement complet. J’ai décidé que le rappel de traitement auquel il aurait autrement eu droit doit être réduit de moitié

En l’occurrence, je conclus que M. McLeod devrait être réintégré, mais au début de la saison de 1999. Toutefois, il n’y aura aucune indemnisation rétroactive ni versement d’autres avantages à compter de la date de sa suspension pour une période indéfinie jusqu’à la date de sa réintégration.

Cette décision ne doit pas être interprétée comme signifiant que j’estime que M. McLeod racontait une histoire à dormir debout lorsqu’il a dit qu’il avait retiré les bois d’animal du Parc. Je ne le sais tout simplement pas dans les circonstances. En effet, lorsqu’un employeur se voit présenter l’aveu d’un employé comme c’est le cas ici, et lorsque l’individu en question réfute plus tard l’aveu qu’il a fait, d’autres éléments de preuve corroborants peuvent être nécessaires. Si de telles preuves avaient été présentées ici, ma décision aurait très bien pu être très différente.

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Décision Page 26 Par conséquent, le grief concernant la suspension indéfinie de M. McLeod est rejeté et le grief concernant le licenciement est accueilli dans la mesure indiquée.

Joseph W. Potter, président suppléant.

OTTAWA, le 4 mars 1999. Traduction certifiée conforme

Serge Lareau

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