Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Licenciement (motif disciplinaire) - Faute de conduite - le fonctionnaire s'estimant lésé, un vérificateur, a acheté une semi-roulotte de marque Signature qui a été livrée chez lui le 30 mars - afin d'éviter de payer la TPS, le fonctionnaire s'estimant lésé a fait enregistrer le véhicule au nom du neveu de sa femme (D.G., un Indien inscrit) - pris de remords le 6 mai, il est retourné chez le concessionnaire et a payé la TPS payable - le 16 mai, le fonctionnaire s'estimant lésé et sa femme ont reçu un appel téléphonique de la mère de D.G. qui menaçait d'aller voir le ministère du Revenu national à propos du non-paiement de la TPS - le 5 juin, le fonctionnaire s'estimant lésé a appris que le ministère faisait enquête au sujet de l'achat de la semi-roulotte - le 7 juin, il a assisté à une réunion avec des représentants de Revenu Canada au cours de laquelle il a admis avoir effectué l'achat de la semi-roulotte - il a subséquemment été congédié au motif que le public avait perdu confiance en son intégrité et que ses actes étaient incompatibles avec le niveau de confiance que doit inspirer un agent de Revenu Canada - l'arbitre a conclu que la famille du fonctionnaire s'estimant lésé avait exercé beaucoup de pressions sur lui pour qu'il enregistre la semi-roulotte au nom de D.G., mais que cela n'était pas une excuse - l'arbitre a tenu compte du fait que le fonctionnaire s'estimant lésé avait beaucoup souffert sur les plan émotionnel et financier, qu'il avait volontairement versé la TPS avant d'être pris en faute par le ministère, qu'il comptait de longues années de service et qu'il n'avait pas de dossier disciplinaire - dans les circonstances, l'arbitre ne croyait pas que le lien de confiance entre le fonctionnaire s'estimant lésé et son employeur avait été irrémédiablement rompu - le congédiement est une peine trop sévère - la peine a été réduite à une suspension de huit mois. Grief admis en partie.

Contenu de la décision

Dossier: 166-2-27610 Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE JOHN (JACK) W. SAMPLE fonctionnaire s'estimant lésé et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Revenu Canada)

employeur

Devant: Rosemary Vondette Simpson, commissaire Pour le fonctionnaire s'estimant lésé: David Landry, de l'Alliance de la Fonction publique du Canada

Pour l'employeur: Ronald Snyder, avocat

Affaire entendue à Edmonton (Alberta), du 25 au 27 mars 1997.

Decision Page 1 DÉCISION M. John (Jack) W. Sample, un vérificateur à Revenu Canada à Edmonton, a été congédié le 7 juin 1996. Voici le texte de la lettre de congédiement : [Traduction] À ma demande, vous m’avez rencontré aujourd’hui afin de m’expliquer vos actions concernant l’achat d’une semi-roulotte de marque Signature (modèle 1996). On vous avait avisé que vous pouviez être accompagné d’un représentant à la réunion, mais vous avez décliné l’offre.

Le 5 juin 1996, nous vous avons fourni un exposé des faits. L’exposé précisait, entre autres, que le 9 mars 1996 vous aviez conclu un marché avec Trail Blazer RV Centre Ltd. pour l’achat d’une semi-roulotte Signature 1996, modèle n o 33-RLRD-SL, au prix total de 35 800 $ sans TPS à payer. Le véhicule devait être enregistré au nom de Dustin Grandinetti, un Indien de plein droit au sens de la Loi sur les Indiens, ce qui évitait le paiement de la TPS. La commande a subséquemment été modifiée le 22 mars 1996 afin d’inclure un ensemble de réaménagement/protection qui a fait monter le prix total à 36 092,65 $. Des paiements de 32 800 $ et de 1 792,65 $ ont été faits le 22 mars 1996, lesquels, avec le dépôt de 3 000 $ qui avait été fait le 22 décembre 1995, constituaient le règlement intégral de la facture. La semi-roulotte a été livrée à votre domicile le 30 mars 1996.

À notre réunion, vous avez reconnu que l’exposé des faits qui vous avait été remis était exact. Vous avez admis que votre conduite avait été « stupide » et avait embarrassé le Ministère. Outre l’affirmation comme quoi vous aviez subi des pressions importantes de la part de membres de la famille pour conclure l’achat du véhicule sans payer la TPS, vous n’avez aucunement défendu votre conduite. Bien que vous ayez affirmé avoir tenté de « corriger » la situation en payant subséquemment la TPS, vous avez agi en demandant que le contrat soit réécrit et antidaté dans l’espoir d’éviter la détection. À aucun moment vous n’avez informé le Ministère de votre conduite répréhensible, même après avoir appris que votre conduite avait été signalée à notre attention. Vous avez déclaré que vous espériez ne pas être pris.

En tant qu’employé de Revenu Canada, votre conduite doit être exemplaire lorsque vous vous acquittez des obligations imposées par les lois qu’applique le Ministère. Il est également d’une importance primordiale que le public ait confiance en l’intégrité du Ministère et de ses employés. Votre conduite a compromis cette intégrité. Elle est par ailleurs incompatible avec le niveau de confiance que Revenu Canada place en ses agents.

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Decision Page 2 J’ai tenu compte du fait que, lorsque vous avez été confronté à votre conduite répréhensible, vous avez reconnu vos actes et présenté des excuses au Ministère pour l’avoir mis dans l’embarras. Nonobstant cela, la gravité de votre inconduite demeure.

En vertu du pouvoir qui m’est délégué par l’alinéa 11(2)f de la Loi sur la gestion des dépenses publiques, je vous informe de votre licenciement de Revenu Canada pour inconduite. Votre renvoi prend effet à la fermeture des bureaux le 7 juin 1996, à 17 h.

Vous avez le droit de contester cette décision en présentant un grief dans les 25 jours de la réception de la présente lettre. Vous devrez remettre tous les biens appartenant au Ministère aujourd’hui. Pour ce qui est du règlement des aspects de votre licenciement touchant la rémunération, veuillez communiquer avec Moureen Clunie au 495-3541.

Plusieurs personnes ont témoigné pour l’employeur et M. Sample a témoigné pour lui-même.

Résumé des faits À la suite d’un appel téléphonique d’une contribuable, M me Connie Grandinetti, M. Gerry Seaker, enquêteur à la Direction des enquêtes spéciales de Revenu Canada, est initialement intervenu dans l’affaire. Il a fixé une réunion initiale avec M me Grandinetti, son fils Dustin et son ami de coeur, M me Tracy Leighton. Il a aussi demandé à ce que M m e Kaye Finnebraaten, une fonctionnaire expérimentée dans les enquêtes et les questions relatives à la Taxe sur les produits et services (TPS), soit présente à la réunion.

À la réunion qu’avait organisée M. Seaker étaient présents M me Grandinetti, son fils Dustin et M m e Leighton, ainsi que M me Finnebraaten et M. Seaker lui-même. M m e Grandinetti a allégué que M. Sample, un vérificateur à Revenu Canada et son ancien beau-frère, avait utilisé la carte d’Indien inscrit de son fils Dustin pour acheter une semi-roulotte. Cela avait pour effet d’éviter le paiement de la TPS sur l’achat. Son fils avait 16 ans à l’époque et avait reçu sa carte d’Indien inscrit en janvier de cette année-là (1996). Ils ont traité avec un vendeur nommé « Rick ». Au cours de la réunion, qui a duré entre 30 et 45 minutes, M m e Grandinetti a produit certains documents. M. Seaker ne se souvenait pas de la nature exacte des documents. Un

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Decision Page 3 rapport a été rédigé à l’intention de M. David Poon, qui était à l’époque chef intérimaire des enquêtes spéciales.

À la suite de ces démarches, M. Terry Willisko, un enquêteur à l’Unité des enquêtes spéciales, a été nommé pour faire enquête sur l’affaire. On lui a remis certains documents et des notes manuscrites. Selon les allégations qui avaient été faites, le fonctionnaire s’estimant lésé aurait éludé la taxe sur la semi-roulotte mentionnée plus haut, ainsi que sur une Jeep Cherokee, un autre véhicule et de la clôture. L’enquête a révélé qu’aucune des allégations n’était fondée, exception faite de la semi-roulotte. Dans le cadre de son enquête, M. Willisko a rencontré M. Keith Graham, directeur général du concessionnaire « Trailblazer R.V. Centre », vers le milieu du mois de mai 1996. Après son entrevue, il a rédigé une déclaration que M. Graham a signée sous serment après qu’on lui eut apporté quelques modifications mineures. M. Willisko a ensuite exécuté la déclaration (pièce E-3).

M. Willisko a témoigné qu’au cours de son enquête il a appris que la semi-roulotte en question avait été volée du terrain de camping du fonctionnaire et qu’on soupçonnait M. Dustin Grandinetti d’être impliqué.

Si les accusations portées contre le fonctionnaire se révèlent fondées, cela constituerait de l’évasion fiscale en contravention de l’article 327 de la Loi sur la taxe d’accise.

Le témoin a reconnu que la pièce E-3 avait été préparée par lui-même après avoir parlé à M. Graham, directeur général du « Trailblazer R.V. Centre », le concessionnaire qui avait vendu la semi-roulotte à M. Sample. Il s’est entretenu avec lui pendant une heure à une heure et demie, a rédigé le document et a rapporté le document à M. Graham pour qu’il le signe.

M. Len Gorniuk, le superviseur de M. Sample, a présenté la description d’emploi de ce dernier (pièce E-4) et a décrit les fonctions qu’il exerçait pour assurer le respect de la Loi sur la taxe d’accise. En ce qui concerne la TPS, M. Gorniuk a expliqué qu’un vérificateur est normalement censé négocier le paiement de la TPS et prendre les mesures à cet effet si le versement n’avait pas été fait comme il faut.

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Decision Page 4 M. Gorniuk a en outre affirmé qu’il ne pourrait plus se fier à M. Sample à l’avenir à propos de questions telles que ses comptes de dépenses, notamment les indemnités de kilométrage. Il n’aurait pas l’esprit tranquille en supervisant ses diverses activités, notamment le temps consacré aux vérifications. Toutefois, en contre-interrogatoire le témoin a reconnu qu’il n’avait jamais eu maille à partir avec M. Sample par le passé au sujet d’aucune de ces questions.

M me Elaine Routledge, directrice du Bureau de services fiscaux d’Edmonton, Revenu Canada, a témoigné. Après avoir reçu le rapport de M. Willisko, elle a convoqué le fonctionnaire à une réunion. Ont également assisté à cette réunion, qui a eu lieu le 4 juin, M me Mona Berry, directrice adjointe des Ressources humaines, et un certain M. Gene Yorke du Ministère. À cette réunion, elle a interrogé le fonctionnaire sur l’affidavit de M. Graham (pièce E-3). Le fonctionnaire a reconnu que les affirmations contenues dans l’affidavit étaient vraies. Il s’est excusé, a admis qu’il avait mal agi, et a déclaré qu’il s’était laissé convaincre par d’autres de laisser son neveu assumer la propriété de la semi-roulotte afin de ne pas avoir à payer la TPS. Bien que M. Sample comptât 12 années de service entièrement satisfaisant et qu’il eût payé la taxe volontairement avant d’être découvert, la témoin a été influencée par le fait qu’il n’avait pas volontairement révélé toute l’affaire à son employeur avant d’être pris. Elle a également pris en considération le fait que s’il avait succombé à la pression comme il le prétend, la source de la pression demeurait et continuerait de faire partie de son environnement. Cela diminuerait le degré de confiance qu’elle pourrait avoir en lui à l’avenir. M me Routledge a mentionné les affirmations que M. Sample avaient faites comme quoi il avait d’abord tenté de balayer toute l’affaire sous le tapis et, bien qu’il eût plus tard essayé de rectifier la situation, il a tout de même été pris.

M me Mona Berry a témoigné qu’elle avait aussi entendu le fonctionnaire faire ces affirmations, ainsi que son aveu selon lequel la pièce E-3 était correcte. En contre-interrogatoire, M me Berry a reconnu qu’on n’avait pas revu la pièce E-3 en détail avec le fonctionnaire en lui posant des questions spécifiques.

M. Keith Graham, directeur général du concessionnaire « Trailblazer R.V. Centre », a été cité comme témoin. On l’a informé que M. Sample voulait faire dresser un contrat pour l’achat d’une semi-roulotte sous le nom de son neveu, M. Dustin Grandinetti, qui avait une carte d’Indien inscrit. La TPS au montant de 2 506 $ ne

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Decision Page 5 serait pas payable si la roulotte était livrée dans une réserve. Sur le contrat, le lieu de livraison a été indiqué comme étant la réserve Hobbema. En fait, on a livré la roulotte à la résidence du fonctionnaire, à Edmonton, parce qu’il manquait d’espace sur le terrain et qu’il avait « besoin de l’enlever de ». Le 6 mai, il a appris que le fonctionnaire voulait récrire le contrat, payer la TPS et faire inscrire la même date pour le paiement et le contrat. Il a dit au fonctionnaire que cette affaire commençait « à avoir l’air louche et qu’[ils] ne faisaient pas d’affaires louches ». Bien qu’il n’ait pas lui-même rédigé l’affidavit, il en approuvait le contenu.

M. Paul Stephanson, directeur des ventes au « Trailblazer R.V. Centre », a examiné les documents de la vente et a expliqué comment on avait dressé le contrat initial pour l’achat de la semi-roulotte et apporté les changements en question par la suite. Il s’est rappelé que M. Graham, M. Sample et lui-même s’étaient rencontrés et que M. Graham avait réprimandé M. Sample au sujet du genre d’affaire que cela était en train de devenir.

M. John (Jack) Sample, le fonctionnaire s’estimant lésé, a témoigné pour lui-même. M. Sample est entré au service de Revenu Canada en 1983. Son poste, vérificateur des retenues à la source, est classifié PM-2. Son superviseur est M. Len Gorniuk. Ses principales fonctions à titre de vérificateur avaient trait au non-versement et au versement tardif des retenues à la source. Il n’a jamais travaillé à la perception de la TPS.

Le fonctionnaire a expliqué que lui et sa femme ont négocié le prix d’achat d’une semi-roulotte au « Trailblazer R.V. Centre ». Après que la semi-roulotte a été commandée, et vers le milieu de février et le début de mars, le neveu de sa femme, M. Dustin Grandinetti, a approché sa femme et leur a offert de leur faire une faveur en mettant la roulotte à son nom. Puisqu’il avait une carte d’Indien inscrit, cela lui éviterait de payer la TPS.

Initialement, M. Sample a répondu qu’il n’en était « pas question ». Sa conscience lui interdisait d’éluder le versement de la TPS de cette façon. Cela a créé beaucoup de dissension dans la famille et sa femme a exercé beaucoup de pression sur lui pour qu’il aille de l’avant et achète la roulotte de cette façon. De son propre chef, sa femme a communiqué avec « Rick », un des vendeurs au « Trailblazer R.V.

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Decision Page 6 Centre », et l’a informé de ce qu’ils se proposaient de faire. Le 9 mars, M. et M m e Sample et leur neveu, M. Dustin Grandinetti, ont rempli la paperasse pour l’achat de la roulotte. M. Dustin Grandinetti a signé l’acte de vente. M. Sample a payé la roulotte le 22 mars et celle-ci a été livrée à son domicile à Edmonton le 30 mars par le « Trailblazer R.V. Centre ».

M. Sample a témoigné qu’après s’être débattue avec sa conscience pendant un certain temps, il est retourné chez le concessionnaire le 6 mai et a payé toute la TPS qui était due. Il n’a pas lui-même demandé à ce que la transaction soit prédatée. Il voulait simplement payer la TPS et a supposé que le concessionnaire voulait faire en sorte que toute la documentation soit en règle. M. Sample a nié que M. Graham lui ait fait des remontrances. En fait, il avait uniquement rencontré M. Stephanson et avait seulement retourné de brèves salutations à M. Graham. M. Sample a déclaré qu’il voulait éclaircir la question de la TPS parce qu’il ne pouvait plus vivre avec lui-même aussi longtemps que l’affaire restait en suspens. Il y avait des complications du fait que les documents initiaux avaient été dressés au nom de M. Dustin Grandinetti, alors que le véhicule avait été enregistré à son nom.

En mai, la semi-roulotte a été volée. Le 16 mai, M. Sample et sa femme ont reçu un appel téléphonique menaçant de M m e Connie Grandinetti. Cette dernière menaçait d’aller voir le ministère du Revenu national, l’employeur de M. Sample, à propos du non-paiement de la TPS.

Le 5 juin, M. Sample a appris que le Ministère faisait enquête au sujet de l’achat de la semi-roulotte. Le jour même, des représentants ministériels lui ont rendu visite à son domicile et lui ont présenté la déclaration de M. Graham et une lettre demandant une réunion avec des dirigeants du Ministère. Il a accepté d’assister à la réunion, qui a eu lieu le 7 juin. Il ne s’est pas fait accompagner d’un représentant syndical parce que, bien qu’il fût en sérieuse difficulté, il ne soupçonnait pas qu’il pouvait être congédié. Il n’a pas apporté de copie de la déclaration avec lui à la réunion, et on ne lui en a pas remis de copie à la réunion non plus. On lui a simplement demandé si ce que contenait la déclaration était vrai. M. Sample a expliqué que lorsqu’il avait affirmé que la déclaration était véridique, il reconnaissait, et reconnaît toujours, que les éléments essentiels sont vrais; toutefois, il n’est pas d’accord avec M. Graham au sujet de certains des faits. Le concessionnaire est loin de l’avoir réprimandé, au contraire il

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Decision Page 7 s’est montré très complice et a fait preuve de beaucoup de coopération en vue de trouver des moyens d’éviter de payer la TPS. L’idée d’inscrire dans le contrat la réserve Hobbema comme lieu de livraison était entièrement celle d’un des vendeurs; cela n’avait aucun lien avec le lieu de résidence de M. Dustin Grandinetti. Il n’habitait pas dans cette réserve. Selon M. Sample, cela n’avait aucune importance quelle réserve figurait sur le contrat puisque chacun savait que la semi-roulotte serait livrée à son domicile, et c’est exactement ce qui s’est produit. Ce n’est pas non plus à la demande de M. Sample que les documents ont été prédatés, mais bien du concessionnaire. M. Sample a supposé que ce dernier voulait sans doute que tous ses documents soient en règle. La direction du concessionnaire ne voudrait pas faire l’objet d’une vérification à ce sujet et à propos d’autres ventes de roulottes, alors il avait de très bonnes raisons d’adapter ses affirmations à ce qu’un enquêteur de Revenu Canada voudrait entendre. Pour autant que M. Sample fût concerné, le fait de prédater les documents était sans importance. Il était reconnaissant d’avoir la possibilité de refaire le contrat et de payer la TPS. Pour lui, la date n’avait aucune importance.

M. Sample voulait simplement être en règle. « J’étais prêt à faire face à la musique, à subir n’importe quelle sanction qu’on pourrait m’infliger, a-t-il dit. Mais je ne m’attendais pas à être congédié. » La réunion s’est terminé lorsque le directeur lui a demandé s’il avait compris la déclaration (pièce E-3). Il a répondu par l’affirmative. À ce moment-là, il n’a signalé aucun aspect du contenu de la déclaration sur lequel il n’était pas d’accord. Il était très bouleversé; il traversait les « deux pires journées de [sa] vie ». Sa conduite était indéfendable, a-t-il ajouté, et il voulait juste admettre son erreur sans excuses ni explications. M. Sample a déclaré qu’il n’avait pas songé à venir informer le Ministère de ce qui s’était passé parce que, après avoir payé la TPS, il estimait qu’il n’y avait plus rien à dire ou à faire.

Le fonctionnaire a signalé qu’il n’avait jamais subi de sanction disciplinaire par le passé et qu’en fait il n’avait jamais non plus déposé de grief. Il n’a pas réussi à trouver de travail stable et, en fait, du 7 juin à la date de l’audience il n’avait pu trouver que trois ou quatre emplois de très courte durée. On refuse de lui verser des prestations d’assurance-emploi.

Le fonctionnaire et son épouse ont tous les deux été dévastés par la perte de son emploi. Il a postulé de nombreux autres emplois sans résultats prometteurs.

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Decision Page 8 Jusqu’à présent, il a envoyé environ 45 copies de son curriculum vitæ. Lui et sa femme ont appris une très dure leçon de cette expérience et il n’y a aucun risque que M. Sample se conduise de nouveau ainsi.

Argumentation de l’employeur L’avocat de l’employeur signale la gravité de l’inconduite de M. Sample. Ce dernier a en fait enfreint l’alinéa 327.(1)c) de la Loi sur la taxe d’accise ainsi que l’alinéa 327.(1)e) de cette même loi en éludant volontairement le versement de la TPS sur l’achat de la semi-roulotte. Il s’agissait d’une inconduite hors travail flagrante.

L’avocat de l’employeur me renvoie à la jurisprudence suivante : Appel de R.R. Leclair fondé sur la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (dossier : 91-PEN-0268R); Air Canada and International Association of Machinists, Lodge 148 (1973), 5 L.A.C. (2d) 7; Flewwelling (dossier de la Commission 166-2-14236) et Skibicki (dossier de la Commission 166-2-20723).

Comme M. Sample a enfreint les lois mêmes qu’il est censé faire appliquer, il a irrémédiablement rompu le lien de confiance entre lui-même et l’employeur. L’avocat fait remarquer que le fonctionnaire avait initialement accepté le contenu de l’affidavit de M. Graham et il m’incite à ne pas retenir l’explication de M. Sample quant à la façon dont cela s’est produit. Il met en doute la crédibilité de M. Sample lorsque celui-ci affirme que la relation des événements que fait M. Graham dans l’affidavit est inexacte. Il met également en question la sincérité du remords manifesté par M. Sample.

Argumentation du fonctionnaire Le représentant du fonctionnaire fait valoir que M. Sample n’a jamais en 13 ans de service fait l’objet de mesures disciplinaires. Bien qu’au départ il n’ait pas payé la TPS sur l’achat de la semi-roulotte, la question l’a tourmenté pendant un certain temps et il est retourné payer la TPS le 6 mai. Le concessionnaire, selon M. Done, était au courant de ce qui se passait et y a été un complice actif.

La première occasion que M. Sample a eu d’avouer sa faute au Ministère, il l’a fait. Il s’est excusé et il a manifesté du remords. Il ne servait à rien à M. Sample de

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Decision Page 9 venir parler au Ministère après qu’il avait payé la TPS parce que, à ce moment-là, il estimait avoir réglé l’affaire.

Le représentant m’invite à me pencher sur les affaires suivantes de la Commission : Khanna (dossier 166-2-17117); Lodba (dossier 166-2-21819); da Cunha (dossier 166-2-24725); et Gourlie (dossier 166-2-18705).

Motifs de la décision En essayant d’éluder le paiement de la TPS sur l’achat de sa semi-roulotte, M. Sample a commis une très grave faute de conduite. À titre de vérificateur à Revenu Canada, il occupait un poste comportant un très haut degré de responsabilité et de confiance. J’accepte qu’à l’époque pertinente M. Sample subissait des pressions familiales énormes en vue de faire passer l’achat de la semi-roulotte au nom de son neveu. Ce n’est pas une excuse et M. Sample sait fort bien qu’au bout du compte c’est lui qui est responsable d’une telle décision.

Depuis lors, lui et sa famille ont beaucoup souffert sur les plans émotionnel et financier. Lui et son épouse ont également eu l’occasion de faire un profond examen de conscience à propos de cette affaire. J’ai en outre pris en considération le fait que M. Sample est volontairement retourné chez le concessionnaire et a versé la TPS avant d’être découvert par le Ministère. J’ai enfin tenu compte de ses longs états de service et de son dossier disciplinaire vierge.

À sa toute première réunion avec le Ministère le 7 juin, il a fait un aveu complet. Le fait qu’il n’a pris la peine de contester aucun des détails de la déclaration de M. Graham montre son désir d’avouer simplement toute l’affaire et d’en finir. Il était bouleversé et troublé. Il n’était pas représenté et on ne l’a pas interrogé sur les détails de la déclaration.

Étant donné ses antécédents disciplinaires vierges et son remords, il est très peu probable que M. Sample se retrouve dans des circonstances semblables à l’avenir.

Le superviseur de M. Sample et la directrice, M me Routledge, ont formulé des réserves à propos de la confiance qu’ils pourraient avoir en M. Sample à l’avenir. J’ai examiné ce point très attentivement et, après avoir tenu compte de toutes les circonstances et soupesé les intérêts tant de l’employeur que de M. Sample, je suis Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 10 persuadée que M. Sample réalise la gravité de sa faute et est résolu à faire en sorte qu’il n’y ait plus d’inconduite. Par conséquent, je ne crois pas que le lien de confiance soit irrémédiablement rompu.

Pour ces motifs, j’estime que le congédiement est une peine trop sévère. J’y substitue une suspension de huit mois et j’ordonne la réintégration de M. Sample.

Rosemary Vondette Simpson, commissaire

OTTAWA, le 4 juin 1997.

Traduction certifiée conforme

Serge Lareau

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