Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Licenciement (motif disciplinaire) - Infraction à la sécurité - Réintégration - Agent des douanes - la fonctionnaire s'estimant lésée a retiré de l'un des centres de ressources de l'employeur, sans remplir les formalités d'emprunt, des documents à diffusion restreinte utilisés par les services douaniers américain et canadien pour appliquer les techniques ou procédures de détection de stupéfiants de contrebande ayant trait au transport aérien - elle avait gardé ces documents pendant cinq à six mois à l'arrière de la voiture de tourisme de son fiancé - son fiancé avait été arrêté à un poste frontalier américain pour avoir tenté de faire passer aux États-Unis un étranger en situation irrégulière - un agent de douane américain a retiré les documents, dont l'un avait été photocopié, de l'arrière de la voiture du fiancé - l'employeur a licencié la fonctionnaire pour ne pas avoir rempli les formalités d'emprunt et n'avoir pas conservé en lieu sûr les documents, ce qui a permis qu'on en photocopie un sans le consentement de l'employeur - au cours de l'enquête, la fonctionnaire a prétendu avoir emprunté les documents dans l'intention de les étudier, parce que son nom avait été porté sur une liste d'admissibilité pour un poste à un aéroport - l'employeur a soutenu qu'il avait des motifs raisonnables de considérer que le lien de confiance essentiel à la relation employeur-employé avait été irrémédiablement détruit - la fonctionnaire a répondu que le licenciement était une peine trop sévère dans les circonstances - elle a fait valoir que, bien qu'elle ait été négligente, il n'y avait pas de preuve de déni d'action - elle a soutenu que la décision de l'employeur reposait sur son association avec son fiancé, et que depuis l'incident elle avait rompu avec ce dernier - elle a maintenu que si elle avait été licenciée, c'était uniquement à la suite d'une perquisition et saisie effectuées par le service des douanes des États-Unis, qui soupçonnait son fiancé d'avoir commis un acte criminel dont elle n'était absolument pas au courant - l'arbitre a conclu qu'il avait été prouvé que la fonctionnaire n'avait pas signé la fiche d'emprunt et qu'elle n'avait pas protégé adéquatement les documents contenant des renseignements de nature délicate - toutefois, l'arbitre était convaincu que la fonctionnaire n'avait pas retiré les documents du centre de ressources pour un motif répréhensible - l'arbitre a également jugé qu'il n'y avait aucune preuve de la participation de la fonctionnaire à quelque activité illicite que ce soit - de plus, l'arbitre a trouvé qu'il n'y avait aucune preuve indiquant qu'elle ait comploté ou ait eu un comportement mensonger - l'arbitre a conclu que, bien que la fonctionnaire ait manqué de jugement, il n'y avait aucune preuve comme quoi on ne pouvait pas lui faire confiance - l'arbitre a ordonné que la fonctionnaire soit réintégrée deux semaines après la date de la décision. Grief admis en partie. Décisions citées : Belliveau (166-2-12955); McGoldrick (166-2-25796).

Contenu de la décision

Dossier : 166-2-27859 Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE MINDI NIEDERMEISER fonctionnaire s’estimant lésé et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Revenu Canada - Douanes et Accise)

employeur

Devant : Joseph W. Potter, commissaire Pour le fonctionnaire s’estimant lésé : Edith Bramwell, avocate, Alliance de la Fonction publique du Canada

Pour l’employeur : Ronald Snyder, avocat Affaire entendue à Vancouver (Colombie-Britannique), les 24 et 25 septembre 1997

DÉCISION La fonctionnaire s’estimant lésée, M me Mindi Niedermeiser, était un agent de douane (PM-1) à Revenu Canada, Douanes et Accise, au moment de son congédiement le 26 juin 1996. Elle travaillait au bureau des douanes de Pacific Highway. On me demande de déterminer si ses actions justifient son congédiement, comme le croit l’employeur, ou s’il n’y aurait pas lieu d’imposer une peine moins sévère, comme le croit la fonctionnaire s’estimant lésée.

La lettre de congédiement datée du 25 juin 1996, signée par M. Al Morancy, directeur intérimaire, Services frontaliers des douanes, se lit comme suit : [Traduction] Le 18 mai 1996, en effectuant la fouille d’une voiture de tourisme au poste frontalier du service douanier américain à Peace Arch, des agents spéciaux américains ont trouvé des documents à diffusion restreinte utilisés par les services douaniers américain et canadien pour appliquer les techniques ou procédures de détection de stupéfiants de contrebande. Le véhicule en question a subséquemment été saisi lorsqu’il a été déterminé qu’il était utilisé pour faire passer aux États-Unis un étranger en situation irrégulière. Le conducteur du véhicule a indiqué que vous aviez laissé les documents dans le véhicule. À la suite de cette révélation, vous avez été suspendue indéfiniment le 24 mai 1996 en attendant la fin de l’enquête.

D’après les conclusions de l’enquête et les aveux que vous avez faits à l’enquêteur de la Division des affaires internes lors d’une entrevue le 21 mai 1996, vous avez sorti les guides de renseignements en question du Centre de ressources du district de Pacific Highway au début de novembre 1995. La preuve démontre clairement que vous n’avez pas rempli les formalités d’emprunt pour sortir les documents protégés sur les techniques de détection des drogues, utilisés par les services douaniers américain et canadien, et que vous ne les avez pas gardés en lieu sûr de telle sorte que l’un d’eux a été reproduit sans l’autorisation de l’employeur.

Le fait de sortir des documents des locaux de l’employeur sans autorisation et, chose encore plus grave, de ne pas les avoir gardés en lieu sûr pendant qu’ils étaient en votre possession, sont des infractions très graves au Code de conduite et d’apparence du ministère. Par vos actions, vous avez irrémédiablement rompu le lien de confiance qui est essentiel à la relation d’emploi et à l’exécution de vos fonctions en tant que fonctionnaire du ministère. Vu cette situation, nous ne pouvons plus vous confier de taches courantes au ministère.

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Décision Page 2 Par conséquent, je conclus qu’il est nécessaire de mettre fin à votre emploi pour un motif valable à compter du 26 juin 1996. Cette décision est prise en vertu du paragraphe 11(4) de la Loi sur la gestion des finances publiques et de l’alinéa 11(2)f) de cette même Loi.

Les détails concernant les avantages auxquels vous pourriez avoir droit vous seront envoyés à une date ultérieure.

Veuillez accuser réception de la présente lettre en signant la copie ci-jointe et en la retournant au ministère.

Les parties ont déposé un énoncé conjoint des faits et y ont annexé les pièces 1 à 16. De plus, j’ai entendu trois témoins de l’employeur, lequel a déposé les pièces D-1 à 12. J’ai aussi entendu deux témoins au nom de la fonctionnaire s’estimant lésée, laquelle a déposé la pièce G1.

Dès le début de l’audience, l’avocate de la fonctionnaire s’estimant lésée a demandé l’exclusion des témoins. J’ai acquiescé à sa demande.

Résumé de la preuve Pour l’essentiel, les faits qui ont précédé la décision de licencier la fonctionnaire n’ont pas été contestés et ils peuvent être résumés assez succinctement. Ils sont extraits de l’énoncé conjoint des faits que les parties ont signé et qu’elles m’ont remis à l’audience, et de la déposition de certains témoins.

La fonctionnaire a été nommée CR-3 pour une période indéterminée dans la fonction publique fédérale le 6 février 1995. Par la suite, elle a travaillé quelque temps comme CR-4 intérimaire avant de devenir agent de douane intérimaire (PM-1) le 16 octobre 1995. Elle a été titularisée comme CR-4 pour une période indéterminée le 8 janvier 1996.

La fonctionnaire fréquentait un jeune homme du nom de Mohamed Hassan Ali, et le couple projetait de se marier. Tout en continuant d’habiter chez ses parents, la fonctionnaire passait une bonne partie de ses congés au domicile de M. Ali.

Le 18 mai 1996, M. Ali et un passager dans son véhicule ont été arrêtés à la frontière de la Colombie-Britannique et de l’État de Washington, au poste d’entrée de Peace Arch. Ils ont été arrêtés par un agent de douane américain, M me Jan Marie Peté. Cette dernière a déclaré avoir conclu, après un examen des pièces d’identité fournies Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 3 par le conducteur et le passager, que ce dernier essayait d’entrer illégalement aux États-Unis. Elle a ordonné au conducteur de retirer ses effets personnels du véhicule, et c’est pendant qu’il obtempérait à cet ordre qu’elle a aperçu quatre manuels dans la partie arrière du véhicule. Les titres de ces manuels étaient les suivants : (1) Guide de renseignements - Identification des marchandises. (Une publication de Revenu Canada, Douanes et Accise)

(2) Intelligence Study - Smuggling Using Suitcases, Flight and Garment Bags. (Une Publication du service des douanes des États-Unis)

(3) Intelligence Study - Ariline Tickets: A Tool for Identifying Potential Narcotics Smugglers. (Une Publication du service des douanes des États-Unis)

(4) Le quatrième manuel était une photocopie complète du manuel mentionné au point (3) ci-dessus.

Par suite de cette découverte, l’agent de douane a fait appel à M. Walt Heckla, un agent spécial de la U.S. Customs Office of Investigation. Après s’être fait expliquer la situation, l’agent Heckla a communiqué avec M. Rick Hunter, agent régional du renseignement, région du Pacifique, Service frontalier des douanes canadiennes, pour lui faire part de la découverte des manuels et aussi l’informer que le conducteur, M. Ali, avait indiqué que les manuels appartenaient à son amie, M me Mindi Niedermeiser, un agent de douane canadien. M. Hunter s’est ensuite rendu au poste frontalier de Pacific Highway pour rencontrer le surintendant M. Doug Gourlie, le superviseur de la fonctionnaire. Après leur discussion, M. Gourlie a rencontré M me Niedermeiser qui effectuait son quart normal à ce moment-là. La fonctionnaire savait que son ami était détenu car il venait juste de l’appeler pour l’en informer, mais elle ne savait pas que les documents mentionnés précédemment avaient été trouvés dans son véhicule.

Au cours de la rencontre qui a suivi entre la fonctionnaire et M. Gourlie, M me Niedermeiser a déclaré, une fois qu’on lui eut fait part de la découverte des documents, qu’elle se souvenait d’avoir signé la fiche d’emprunt du Centre de

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Décision Page 4 ressources quelques mois plus tôt et d’avoir laissé les documents dans la voiture de son ami par inadvertance.

Dans une note de service rédigée par le surintendant Gourlie à la suite de cette entrevue, ce dernier a déclaré notamment (pièce 9 de l’énoncé conjoint des faits) : [Traduction] Après avoir interviewé l’inspecteur Niedermeiser, je conclus qu’elle a sorti des documents du Centre de ressources après avoir signé la fiche d’emprunt et qu’elle les a oubliés dans le véhicule de son ami. Je ne crois pas qu’elle ait eu l’intention de jouer un rôle dans l’incident survenu aux douanes américaines. Je crois qu’elle a manqué de jugement en laissant ces documents dans le véhicule de son ami.

Malgré cette conclusion, M. Blake Delgaty, directeur, Services frontaliers des douanes, a écrit à la fonctionnaire le 24 mai 1996 pour l’informer qu’elle était suspendue pour une période indéterminée en attendant les conclusions d’une enquête officielle (pièce 10 de l’énoncé conjoint des faits).

L’enquête officielle a été menée par la Division des affaires internes et les conclusions de celle-ci ont été envoyées au sous-ministre adjoint intérimaire, région du Pacifique, le 11 juin 1996 (pièce 14 de l’énoncé conjoint des faits). La fonctionnaire était parmi les six personnes interviewées dans le cadre de l’enquête. Elle a affirmé avoir sorti les guides de renseignements du Centre de ressources au début de novembre 1995, mais ne pas avoir rempli la fiche d’emprunt même si elle savait devoir le faire. Elle n’a pu expliquer pourquoi elle n’avait pas signé la fiche ni pourquoi elle avait gardé les guides si longtemps. Elle ne se rappelait pas à quel moment elle les avait laissés dans la voiture de son ami et n’a pu expliquer pourquoi l’un d’eux avait été photocopié. Elle avait sorti les documents pour se familiariser avec certaines procédures de détection utilisées dans les aéroports vu qu’elle était sur une liste d’admissibilité pour un poste à l’aéroport international de Vancouver; elle a admis ne pas avoir lu les documents en question. L’enquête a aussi révélé que le service d’immigration et de naturalisation du ministère américain de la Justice a envoyé un avis à M. Ali dans lequel il est indiqué notamment (pièce D-7) :

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Décision Page 5 [Traduction] [...] vous êtes détenu en vertu des dispositions du paragraphe 235b) de la Immigration and Nationality Act (loi sur l’immigration et la naturalisation), version modifiée, en vue d’une audience devant un juge de l’immigration pour déterminer si vous avez le droit d’entrer aux États-Unis ou si vous devez être exclu et expulsé. [...]

M. Ali a reçu cet avis parce qu’il [traduction] « [...] était de connivence pour faire entrer illégalement aux États-Unis un citoyen somalien [...] qui n’était pas muni de documents valides » (pièce D-7).

Au cours de son témoignage en interrogatoire principal, la fonctionnaire a déclaré qu’il lui arrivait fréquemment d’utiliser la voiture de M. Ali. Elle s’est souvenue d’avoir déposé les documents dans la partie arrière du véhicule après les avoir empruntés au Centre de ressources en novembre 1995. Elle était au courant des formalités concernant l’emprunt des documents, a-t-elle avoué, mais elle ne les a pas respectées parce qu’elle n’avait pas l’intention de garder les documents longtemps et parce qu’elle n’avait pas trouvé les fiches qu’elle aurait remplir. Elle a en outre déclaré qu’il lui arrivait fréquemment d’utiliser le véhicule, notamment pour se rendre aux États-Unis. En ce qui concerne ses rapports actuels avec M. Ali, elle a déclaré qu’elle n’a plus rien à faire avec lui et qu’elle ne le fréquente plus du tout. Toutefois, elle a déclaré que, jusqu’au moment de l’incident, elle croyait qu’il avait un dossier vierge et qu’il n’avait jamais auparavant été mêlé à des activités criminelles. Au cours du contre-interrogatoire, elle a admis avoir vu les documents dans la voiture de temps à autre, mais avoir simplement oublié de les rendre à cause de tout ce qui se passait dans sa vie personnelle, comme l’obtention d’un nouvel emploi, la période de formation prévue et un mariage possible. Elle a admis que les documents étaient protégés et qu’elle ne les avait pas gardés en lieu sûr. Elle a déclaré qu’elle n’avait jamais fait l’objet d’une mesure disciplinaire avant cet incident et que son unique rapport de rendement (pièce G-1) contenait des observations favorables.

Nous avons entendu le témoignage de M me Kathy Closter, la responsable du Centre de ressources étaient gardés les documents. Elle a également été interviewée par les Affaires internes. Elle a affirmé que les documents du Centre de ressources ne sont pas accessibles au grand public, mais que tout agent de douanes peut, selon un

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Décision Page 6 régime de confiance, emprunter des documents en signant une simple fiche de sortie vu que le Centre n’a pas de personnel. M me Closter a déclaré qu’en octobre 1995 elle avait fait visiter le Centre de ressources a cinq employés dont la fonctionnaire s’estimant lésée. Elle leur avait expliqué la procédure à suivre pour emprunter des documents et avait insisté sur la nécessité de garder les documents protégés en lieu sûr.

M. Terry Langley a également témoigné. Au moment du congédiement de la fonctionnaire s’estimant lésée, il était directeur intérimaire au bureau du district de Pacific Highway, Douanes Canada; la fonctionnaire relevait de lui. Il a été informé de l’incident en mai 1996. Au début de juin, il a se rendre à Ottawa par affaires. Au cours de ce voyage, il a eu un entretien avec l’attaché des douanes américain qui lui a fait part de ses inquiétudes concernant le peu de contrôle exercé par Douanes Canada sur les publications américaines de nature délicate. L’attaché a expliqué à M. Langley que si un tel incident s’était produit aux États-Unis, l’employé aurait été congédié. M. Langley a répondu qu’une enquête était en cours.

Le rapport d’enquête a conclu que la fonctionnaire n’avait pas signé la fiche d’emprunt de documents protégés traitant de la détection de stupéfiants, et qu’elle n’avait pas gardé ces documents en lieu sûr.

M. Langley a déclaré qu’après la réception du rapport des Affaires internes, un certain nombre de facteurs avaient été pris en considération avant de prendre une décision finale dans cette affaire. Au nombre de ces facteurs, il y avait premièrement le fait que la fonctionnaire avait reconnu ne pas avoir respecté la procédure d’emprunt de documents protégés même si elle avait admis la connaître. Deuxièmement, elle avait trahi en partie la confiance accordée à un agent de douane dans l’exécution de ses tâches quotidiennes du fait qu’elle n’avait pas assuré la protection et le contrôle des documents. Troisièmement, la fonctionnaire avait indiqué qu’elle n’avait pas lu les documents, même si elle les avait empruntés en vue de se familiariser avec les procédures de détection utilisées dans les aéroports. Quatrièmement, il n’y avait pas de demande de mutation à l’aéroport de Vancouver dans son dossier. Cinquièmement, elle avait dit à l’origine à M. Gourlie qu’elle avait rempli la fiche d’emprunt, mais on a appris plus tard que ce n’était pas le cas. On avait également tenu compte du fait que personne n’aurait su que les documents manquaient s’ils n’avaient pas été trouvés par

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Décision Page 7 les douanes américaines en même temps qu’une photocopie d’un des documents. De plus, vu que le conducteur était son ami à l’époque et qu’ils avaient l’intention de se marier, M. Langley a déclaré qu’il ne pouvait être certain qu’elle ne lui transmettrait pas des renseignements confidentiels qui lui sont communiqués dans le cadre de ses fonctions.

Au cours du contre-interrogatoire, M. Langley a examiné la conclusion à laquelle était arrivé le superviseur de la fonctionnaire, M. Gourlie, qui estimait que les actions de celle-ci dénotaient simplement un manque de jugement. En réponse à la question de savoir s’il avait tenu compte de cette conclusion avant d’imposer la sanction définitive, M. Langley a déclaré que M. Gourlie était arrivé à cette conclusion avant l’enquête effectuée par les Affaires internes et sans connaître tous les faits. Il a nié que la décision de licencier la fonctionnaire était le résultat de pressions exercées par ses homologues américains. M. Langley a aussi admis qu’il n’avait pas examiné les rapports de rendement de la fonctionnaire s’estimant lésée et qu’il ne savait pas qu’au moment elle avait emprunté les documents elle figurait sur une liste d’admissibilité pour un poste à l’aéroport de Vancouver. Il a aussi déclaré qu’il n’avait pas interviewé d’autres agents de douane pour connaître leur opinion au sujet de leur collègue même si, d’après ses informations, il savait qu’elle était aimée des autres employés.

À la suite de l’examen du rapport d’enquête, la fonctionnaire a été convoquée, le 26 juin 1996, à une réunion au cours de laquelle on lui a remis la lettre de licenciement.

De l’avis de M. Langley, il était impossible de trouver un poste à la fonctionnaire ailleurs dans l’organisation, bien que cette possibilité eût été examinée. Cette option a été rejetée parce que tous les postes nécessitent l’accès à des renseignements confidentiels, et qu’on ne fait tout simplement plus assez confiance à la fonctionnaire s’estimant lésée.

Argument de l’employeur L’avocat de l’employeur fait valoir que ce n’est pas un cas complexe. Le témoignage et l’énoncé conjoint des faits signé indiquent que la fonctionnaire a omis d’assurer la protection de documents protégés, de telle sorte que l’un deux a été photocopié. Elle n’a pas d’explication quant à la raison pour laquelle un des documents

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Décision Page 8 avait été photocopié. La preuve a aussi révélé que la fonctionnaire a emprunté les documents sans respecter la procédure prévue et que, lorsque les Affaires internes lui ont demandé pourquoi elle n’avait pas respecté cette procédure, elle n’a pu fournir d’explications. Elle a dit à M. Gourlie qu’elle avait signé la fiche d’emprunt; elle a ensuite avoué aux Affaires internes qu’elle ne l’avait pas fait. Elle n’a pas dit pourquoi elle n’avait pas retourné les guides de renseignements. Elle a affirmé qu’elle les avait empruntés parce qu’elle croyait pouvoir décrocher un poste à l’aéroport de Vancouver; pourtant, elle a dit ne pas les avoir lus pendant tout le temps elle les a eus en sa possession. L’avocat fait valoir qu’il y a simplement trop de questions qui sont demeurées sans réponse au cours de l’enquête pour justifier le maintien en poste.

Outre les questions laissées sans réponse, de dire l’avocat, le fait que l’ami de la fonctionnaire avait été accusé d’être de connivence pour faire entrer une personne illégalement aux États-Unis et qu’elle-même, à l’époque, avait affirmé qu’elle et son ami avaient l’intention de se marier préoccupait aussi l’employeur. L’avocat soutient qu’il est raisonnable de conclure que l’employeur, encore une fois, au moment il a pris sa décision, avait des motifs raisonnables de s’inquiéter des risques qu’il courait en gardant la fonctionnaire à son emploi. À cet égard, il cite l’arrêt de la Cour suprême du Canada dans Cie Minière Québec Cartier c. Québec [1995] 2 R.C.S. 1905, il est dit que la preuve d’événements subséquents peut être invoquée seulement lorsqu’elle « [...] aide à clarifier si le congédiement était raisonnable et approprié au moment il a été ordonné ». L’avocat m’exhorte à ne tenir compte que de la preuve qui était connue de l’employeur lorsqu’il a pris sa décision de licencier la fonctionnaire.

La première option, déclare l’avocat, est de ne pas réintégrer la fonctionnaire s’estimant lésée, même si je conclus que le licenciement n’est pas justifié, et d’accorder plutôt une indemnisation. À cette fin, il invoque les décisions rendues dans McMorrow (dossier 166-2-23967) et Lutes (dossier 166-2-26706).

La deuxième option, si je décide de réintégrer la fonctionnaire, devrait être de la réintégrer uniquement après un certain temps.

Argument de la fonctionnaire s’estimant lésée L’avocate de la fonctionnaire soutient que le comportement de la fonctionnaire justifie certes l’imposition d’une sanction disciplinaire, mais que le licenciement est

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Décision Page 9 une peine trop sévère. La fonctionnaire a peut-être commis des erreurs de jugement, mais il n’y a pas de preuve de délit d’action. Les infractions prouvées sont les suivantes : la fonctionnaire a fait preuve de négligence en ne respectant pas les formalités concernant l’emprunt de documents, de même qu’en n’assurant pas la protection des documents et en ne les retournant pas. Ces infractions prouvées, d’après l’avocate, ne justifient pas un congédiement. L’employeur a fondé sa décision sur les liens qu’elle entretenait avec son ancien ami. Il n’existe aucune preuve qu’elle a fait un mauvais usage des documents ni n’a-t-il été suggéré qu’elle avait été mêlée de quelque façon que ce soit à un trafic d’étrangers. Toutefois, l’employeur voulait lui imposer une sanction disciplinaire parce qu’elle était incapable de prouver qu’elle n’était pas au courant des activités illégales de son ami et qu’elle n’avait pas utilisé les documents pour son propre bénéfice. Ces éléments, soutient l’avocate, étaient impossibles à prouver.

L’employeur n’a tenu compte d’aucun facteur d’atténuation avant de prendre sa décision finale alors qu’il aurait le faire. Par exemple, la fonctionnaire était extrêmement jeune et il est raisonnable de conclure qu’elle ne comprenait pas pleinement les conséquences de ses actes. De plus, l’examen de rendement figurant dans son dossier était positif. La lettre de M. Gourlie, qui concluait qu’il s’agissait simplement d’un manque de jugement, est un autre facteur.

L’avocate fait valoir que si M me Niedermeiser avait pris la voiture pour se rendre au travail et que si M. Langley ou quelqu’un d’autre avait vu les documents, qui n’étaient pas gardés en lieu sûr et qui auraient être retournés depuis longtemps, la fonctionnaire aurait probablement fait l’objet d’une sanction disciplinaire. Elle avait fait quelque chose qui créait un risque. Toutefois, la sanction disciplinaire n’aurait pas été le congédiement. On a décidé de la congédier uniquement parce qu’il y a eu fouille et saisie par les douanes américaines, à la suite de l’activité illégale de son ancien ami, une activité dont elle n’était absolument pas au courant.

En réponse à l’affirmation de l’employeur voulant qu’il y avait trop de questions sans réponse, l’avocate déclare que la version de la fonctionnaire est demeurée la même depuis son congédiement. Elle a emprunté des documents à la bibliothèque pour une fin précise; elle les a déposés à l’arrière de la voiture de son ami et les a oubliés là. Cela dénote un manque de jugement, mais ce n’est pas suffisant pour justifier un

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Décision Page 10 congédiement. La fonctionnaire sait qu’elle a commis une erreur; elle sait qu’elle a manqué de jugement; elle sait qu’elle mérite une sanction; elle sait qu’elle a sous-estimé l’importance du risque couru par le ministère, mais elle mérite une deuxième chance vu les circonstances.

L’avocate de la fonctionnaire s’estimant lésée cite les décisions suivantes : Gourdie (dossier 166-2-18705); Thomas (dossier 166-2-18952); McGoldrick (dossier 166-2-25796); Rajakaruna (dossier 166-2-23135); Loiselle (dossier 166-2-21818); Phillips (dossier 166-2-21694); et Labrie (dossier 166-26301).

Motifs de décision Nous sommes en présence d’une situation une jeune femme, ayant des états de service très limités, a avoué avoir commis une erreur et a reconnu que cette erreur était grave. Elle demande toutefois d’être réintégrée dans ses fonctions afin d’avoir ainsi l’occasion de montrer à l’employeur qu’elle a appris de son erreur et qu’il peut effectivement lui faire confiance.

Nous sommes également en présence d’une situation un employeur, selon moi, a été quelque peu embarrassé par le fait que des renseignements de nature délicate, fournis par un service de douanes étranger, n’avaient pas été gardés en lieu sûr et avaient été découverts par le même service de douanes étranger dans le contexte d’une activité illégale. La manière négligente dont les documents ont été traités a en partie incité l’employeur à déclarer qu’il ne pouvait plus faire confiance à la fonctionnaire s’estimant lésée et que le congédiement était la mesure appropriée.

Cette perte de confiance perçue est-elle justifiée selon la preuve? Dans l’affirmative, il pourrait fort bien s’agir d’un cas une seule action justifie la peine maximale qu’est le congédiement. Sinon, je dois décider si le congédiement est une mesure déraisonnable à la lumière de la preuve.

La preuve indique que l’employeur a été mis au courant très rapidement de la découverte des documents dans le véhicule de M. Ali. La fonctionnaire a été informée que son ami était détenu mais, au départ, elle ne savait pas que des documents protégés avaient été découverts dans la voiture. Lorsque son superviseur, le surintendant Gourlie, l’a confrontée à ce sujet, elle a avoué avoir sorti les documents

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Décision Page 11 du Centre des ressources et les avoir déposés dans la voiture de son ami. Elle a précisé qu’elle se souvenait d’avoir signé la fiche d’emprunt et d’avoir laissé les documents dans le véhicule par inadvertance. M. Gourlie a conclu que la fonctionnaire avait manqué de jugement, mais qu’elle [traduction] « n’avait nullement eu l’intention de prendre part à l’incident aux douanes américaines ». Toutefois, il ne faut pas oublier que le surintendant Gourlie a tiré cette conclusion en s’appuyant sur les renseignements qu’il possédait à l’époque.

L’employeur, non satisfait, semble-t-il, de cette première conclusion, a ordonné la tenue d’une enquête officielle. La fonctionnaire (entre autres) a de nouveau été interviewée dans le cadre de cette enquête trois jours environ après avoir rencontré son superviseur.

Compte tenu des conclusions de l’enquête officielle, il a été mis fin à l’emploi de la fonctionnaire s’estimant lésée. Par conséquent, je crois qu’il y a lieu d’examiner ces conclusions ainsi que le témoignage de M. Langley (puisque c’est lui qui a décidé de licencier la fonctionnaire, selon la pièce 15 de l’énoncé conjoint des faits) pour déterminer si la peine est justifiée. Le congédiement de la fonctionnaire s’estimant lésée a été fondé sur le fait qu’elle avait emprunté des documents sans respecter la procédure établie et sans assurer la protection des documents pendant qu’ils étaient en sa possession. L’employeur est d’avis que, par ses actes, la fonctionnaire a rompu le lien de confiance essentiel à la relation d’emploi (pièce 16 de l’énoncé conjoint des faits).

1. Omission de signer la fiche d’emprunt de renseignements protégés Les conclusions de l’enquête et les aveux de la fonctionnaire au cours tant de l’enquête que de l’audience en arbitrage indiquent que c’est ce qui s’est passé même si la fonctionnaire s’estimant lésée a commencé par le nier. Le système repose sur l’honneur et l’intégrité des employés et, en ne signant pas la fiche, la fonctionnaire a mis en doute son honneur et son intégrité.

Cette allégation de l’employeur a été prouvée. 2. Omission de protéger adéquatement lesdits renseignements Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 12 La fonctionnaire a également admis ce fait; par conséquent, cette allégation de l’employeur a été prouvée.

Vu que les allégations de mauvaise conduite ne sont pas contestées, je dois maintenant me pencher sur la question de la peine. Le congédiement était-il une mesure appropriée? La lettre de congédiement et le témoignage de M. Langley indiquent qu’il y a eu perte de confiance. M. Langley a déclaré que c’était en partie attribuable au fait que la fonctionnaire n’avait initialement pas besoin de sortir les documents et qu’elle ne les avait pas lus.

Lors de l’entrevue, la fonctionnaire a affirmé avoir emprunté les trois guides de renseignements parce qu’elle figurait sur une liste d’admissibilité pour un poste à l’aéroport de Vancouver et qu’elle voulait se familiariser avec les procédures de détection ou d’application des règlements relatifs aux voyages en avion. Pour une raison quelconque, M. Langley ne savait pas que la fonctionnaire figurait sur une liste d’admissibilité pour un poste à l’aéroport de Vancouver même si elle a précisé, lors de l’enquête officielle, qu’il était possible qu’elle soit affectée à l’aéroport. Le rapport d’enquête (pièce 14 de l’énoncé conjoint de faits) indique que ce fait a été confirmé à la suite d’une vérification auprès de M me Closter. Dans l’esprit de M. Langley, il n’y avait aucun motif valable de sortir les documents. Il n’est pas clair s’il a lu ou non le rapport d’enquête à ce sujet ou si le renseignement lui a simplement échappé. Quoi qu’il en soit, il a déclaré que c’est principalement à cause de la situation décrite ci-dessus qu’il est arrivé à la conclusion qu’il fallait licencier la fonctionnaire, car il y avait eu perte de confiance.

À cet égard, je conclus que les déclarations de la fonctionnaire lors de l’enquête officielle et au cours de la présente audience ont été confirmées par l’énoncé conjoint des faits et qu’elles expliquent clairement pourquoi elle a voulu emprunter ces documents en particulier. Absolument aucune preuve n’a été présentée pour démontrer qu’elle les a empruntés à des fins inavouables. En fait, si cela avait été son motif, je doute qu’elle aurait gardé les documents pendant cinq ou six mois à l’arrière de la voiture d’autres personnes pouvaient les voir. De même, l’employeur n’a pas affirmé qu’elle avait emprunté les documents pour faciliter une activité illégale. Par conséquent, sur la foi de la preuve, je conclus qu’un des facteurs dont a tenu compte

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Décision Page 13 M. Langley pour arriver à sa conclusion était vicié. Même si on peut s’interroger sur la mesure dans laquelle la fonctionnaire cherchait à améliorer ses connaissances, il n’en demeure pas moins qu’elle figurait sur une liste d’admissibilité et qu’elle avait donc une raison légitime d’emprunter les documents en question.

Un autre sujet de préoccupation mentionné dans le rapport d’enquête et repris par M. Langley, lors de son témoignage, est le fait qu’on n’a pas expliqué pourquoi un des documents avait été photocopié. La fonctionnaire n’a pu fournir d’explications à ce sujet; qui plus est, personne n’a affirmé qu’elle avait photocopié les documents. En effet, pourquoi l’aurait-elle fait? Si elle avait eu l’intention de s’approprier ces renseignements pour des motifs n’ayant rien à voir avec le travail, il lui aurait été très facile de sortir les documents la nuit sans signer de fiches, de les photocopier, puis de les ramener sans être vue. Par conséquent, si la fonctionnaire ne les a pas photocopiés, et personne, comme je l’ai dit, n’a affirmé qu’elle l’avait fait, il n’y a rien de surprenant dans le fait qu’elle a été incapable d’expliquer comment la photocopie avait aboutie dans le véhicule, comme l’a affirmé son avocate. Pourtant, cela a aussi joué dans la décision de mettre fin à son emploi. Compte tenu de la preuve, je ne retiens pas la proposition selon laquelle cela peut être utilisé pour justifier le congédiement.

L’employeur s’est dit également préoccupé de la relation personnelle de la fonctionnaire avec M. Ali. Les résultats de cet aspect de l’enquête ont amené la direction à croire, comme l’a déclaré M. Langley, qu’il n’y avait aucune garantie que les documents protégés, auxquels la fonctionnaire avait accès, demeureraient confidentiels. Vu que le conducteur-ami a été accusé de faire passer illégalement des étrangers, la divulgation de ce genre de renseignements pourrait avoir des conséquences graves. Toutefois, l’employeur n’a déposé aucune preuve selon laquelle la fonctionnaire avait divulgué des renseignements confidentiels à son ami par le passé. On a indiqué que vu que la fonctionnaire n’avait pas pris les moyens nécessaires pour protéger des renseignements de nature délicate, son ami avait pu s’en servir à des fins personnelles. Étant donné qu’il a été appréhendé, il faut conclure qu’il n’a pas su faire bon usage des renseignements, si effectivement il en a fait usage.

Les préoccupations de l’employeur découlent du fait que, le 18 mai 1996, l’ami de la fonctionnaire a voulu commettre un acte illégal relié au travail de la fonctionnaire. Jusqu’à ce moment-là, rien n’indique que M. Ali était mêlé à des activités

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Décision Page 14 illégales. Dans son témoignage non contredit, et comme il est indiqué dans l’énoncé conjoint des faits, M me Niedermeiser a affirmé qu’elle était convaincue que M. Ali n’avait jamais commis d’acte criminel et que rien dans leur relation n’indiquait le contraire. Lorsqu’elle s’est rendu à son travail le 18 mai, elle ne savait pas ce que M. Ali était sur le point de faire. L’employeur ne conteste pas le fait qu’elle n’a été mêlée à aucune activité illégale. De plus, depuis les incidents du 18 mai, la fonctionnaire a cessé de fréquenter M. Ali.

Peut-elle alors être jugée à ses fréquentations? Nous n’avons pas affaire à quelqu’un qui habite avec un passeur connu, par exemple, ou qui est associé à une personne du genre. Dans l’affaire Belliveau (dossier 166-2-12955), le commissaire Jean Galipeault a été appelé à se prononcer sur le cas d’une employée de la Commission nationale des libérations conditionnelles qui habitait avec un criminel reconnu et sur la découverte de preuves qu’un crime récent avait été commis à leur domicile. En ordonnant la réintégration de la fonctionnaire s’estimant lésée, il a écrit, à la page 20 : [...] aucune accusation n’a été portée ou retenue à l’endroit de l’employée s’estimant lésée. De plus, la preuve révèle que l’employée s’estimant lésée a toujours donné satisfaction à l’employeur depuis son entrée en fonction et qu’elle a même été promue une semaine avant sa suspension indéfinie. Enfin, on ne m’a présenté aucune preuve que l’employée s’estimant lésée a été la source de fuites d’informations durant toute la durée de son emploi à la Commission nationale des libérations conditionnelles.

En l’occurrence, le dossier d’avancement et le rapport de rendement satisfaisant (pièce G-1) de la fonctionnaire indiquent que l’employeur n’avait rien à lui reprocher. Dans l’affaire McGoldrick (supra), le commissaire Barry Turner s’est prononcé sur un cas de congédiement par suite de la violation du serment professionnel et de la divulgation de renseignements confidentiels à des personnes non autorisées. M. McGoldrick était un agent préposé à l’interprétation et aux services (PM-2), Division de l’accise, Revenu Canada. À la page 29 de la décision, le commissaire Turner écrit : M. McGoldrick a eu tort d’agir comme il l’a fait. Je crois qu’il le sait maintenant.

Il ajoute plus loin : Le fonctionnaire s’estimant lésé s’est comporté comme une personne naïve et inexpérimentée malgré la formation qu’il

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Décision Page 15 avait reçue, mais [...] il n’avait vraiment rien à gagner par ses actes.

À la page 25, il écrit : Je retiens l’argument [...] qui veut que le fonctionnaire s’estimant lésé ne se soit pas comporté en homme intriguant ou faux, que son rendement au travail ait été entièrement satisfaisant et qu’il ne se soit jamais auparavant vu imposer de mesure disciplinaire.

M. McGoldrick a été réintégré deux semaines après la date de la décision du commissaire Turner.

Il existe un certain nombre de ressemblances avec l’affaire en l’occurrence. L’on ne peut pas nier que des documents protégés ont été sortis sans autorisation du Centre de ressources et que la fonctionnaire a initialement déclaré avoir rempli la fiche d’emprunt alors qu’en réalité elle ne l’avait pas fait. On ne peut également nier le fait qu’elle n’avait pas protégé adéquatement les documents protégés et qu’en l’occurrence lesdits documents pouvaient contenir des renseignements encore plus délicats vu qu’il s’agissait de renseignements fournis par un autre pays. M me Niedermeiser a eu tort d’agir comme elle l’a fait et elle le sait. Toutefois, elle était trop inexpérimentée et trop naïve et elle n’avait rien à gagner à sortir des documents sans autorisation et à les laisser sans protection. De plus, je ne trouve aucune preuve indiquant qu’elle ait comploté ou ait eu un comportement mensonger.

Je suis conscient, qu’à titre d’agent de douane, la fonctionnaire doit respecter des normes élevées de conduite personnelle. Toutefois, vu la situation particulière en l’occurrence, je ne crois pas que congédier la fonctionnaire parce qu’elle n’a pas signé la fiche d’emprunt et qu’elle n’a pas protégé adéquatement les documents contenant des renseignements de nature délicate soit une mesure appropriée de la part de la direction. L’agent négociateur a reconnu qu’il s’agit d’une infraction grave justifiant l’imposition d’une sanction disciplinaire certes, mais pas un congédiement. Je suis d’accord. Je trouve qu’il n’existe pas suffisamment de preuve pour conclure qu’on ne peut pas faire confiance à M me Niedermeiser. Le surintendant Gourlie a trouvé qu’elle avait manqué de jugement et je suis d’accord. Un certain nombre d’événements se produisaient simultanément dans la vie de cette jeune femme, par exemple elle entamait une nouvelle carrière et envisageait de se marier, et j’ai trouvé son

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Décision Page 16 témoignage crédible lorsqu’elle a dit qu’elle avait simplement oublié de récupérer les documents même si elle les avait vus de temps à autre. Selon la prépondérance des probabilités, je ne peux pas conclure qu’il n’est plus possible de faire confiance à la fonctionnaire dans l’exécution de ses tâches quotidiennes au ministère.

Par conséquent, je conclus que la fonctionnaire devrait être réintégrée deux semaines après la date de la présente décision. Pour tous ces motifs, le grief est accueilli dans la mesure indiquée.

En terminant, je cite Henry Ford qui a dit : [traduction] « Même une erreur peut être l’élément déclencheur de grandes réalisations » (Great Quotes from Great Leaders, p. 114). La preuve indique que M me Niedermeiser a commis une erreur, qu’elle le reconnaît et qu’elle en assume la responsabilité. D’après ce que j’ai observé d’elle, je crois qu’elle saura tirer une leçon de son erreur et qu’elle deviendra un atout pour l’organisation. Le temps nous le dira.

Joseph W. Potter, commissaire

OTTAWA, le 22 octobre 1997. Traduction certifiée conforme

Ginette Côté

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