Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Compétence - Situation d'employé - Commissaire au recensement - Licenciement (non disciplinaire) - Rendement insatisfaisant - Prolongation du délai - le fonctionnaire s'estimant lésé a été embauché par le ministre aux termes du paragraphe 5(1) de la Loi sur la statistique (LS) en qualité de commissaire au recensement pour une période de quatre mois - il a été licencié au bout d'un mois et demi pour rendement insatisfaisant - le fonctionnaire avait été nommé par le ministre aux termes de la LS plutôt que par la Commission de la fonction publique aux termes de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique (LEFP) - par conséquent, l'employeur, s'appuyant sur l'arrêt Canada (Attorney-General) v. Public Service Alliance of Canada (1991), 80 D.L.R. (4th) 520 (Econosult) de la Cour suprême, a soutenu que l'arbitre n'avait pas compétence pour entendre le grief vu que le fonctionnaire s'estimant lésé n'était pas un employé au sens de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) - vu que l'employeur a également fait valoir que le grief était hors délai, le fonctionnaire a demandé une prolongation du délai imparti - l'arbitre a fait remarquer que, bien que les observations faites dans l'arrêt Econosult s'appliquent à la majorité des employés de la fonction publique, l'article 8 de la LEFP envisage expressément la possibilité que des employés soient nommés aux termes d'autres dispositions législatives - l'arbitre a mentionné que, par le DORS 87-644, les Opérations des enquêtes statistiques ont été ajoutées à la liste des employeurs distincts figurant à la partie II de l'annexe I de la LRTFP en vue de régulariser « le statut d'emploi de quelque 1400 recenseurs employés à travers le pays » - l'arbitre a conclu qu'il devait trancher deux questions - en premier lieu, le fonctionnaire était-il un employé en common law par opposition à un entrepreneur indépendant - l'arbitre a conclu qu'il ne disposait pas de suffisamment d'éléments de preuve pour trancher cette question - en second lieu, qui était l'employeur : le Conseil du Trésor ou les Opérations des enquêtes statistiques - l'arbitre a conclu que les commissaires au recensement étaient visés par la définition du terme recenseur que donne le dictionnaire et que le fonctionnaire avait présenté son grief au mauvais employeur - par conséquent, l'arbitre n'avait pas compétence pour l'entendre - ayant rendu cette décision, l'arbitre a jugé qu'il n'avait pas à se prononcer sur la demande de prolongation de délai. Grief rejeté. Décision citée : Canada (Attorney-General) v. Public Service Alliance of Canada (1991), 80 D.L.R. (4th) 520.

Contenu de la décision

Dossiers : 166-2-27473 149-2-162

Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE BRIAN A. CATLOS fonctionnaire s'estimant lésé et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Statistique Canada)

employeur

Devant : J. Barry Turner, commissaire Pour le fonctionnaire s'estimant lésé : Darren Hogan, stagiaire en droit Pour l'employeur : Robert Jaworski, avocat Affaire entendue à Toronto (Ontario), le 20 janvier 1998.

DÉCISION M. Brian Catlos, ancien commissaire au recensement, Statistique Canada, Toronto (Ontario), conteste son licenciement. Son grief, daté du 14 juillet 1996, est rédigé dans les termes suivants : [Traduction] EN RÉSUMÉ : J'AI ÉTÉ RENVOYÉ DE MON POSTE DE COMMISSAIRE AU RECENSEMENT LE 16 AVRIL 1996 SANS MOTIF VALABLE, SANS PRÉAVIS ÉCRIT D’INFRACTION ET EN DÉPIT DE L’ENGAGEMENT PRIS DE REMPLIR MES FONCTIONS COMME ME LE DEMANDAIENT MES SUPERVISEURS.

VOIR LE DOCUMENT EN ANNEXE POUR PLUS DE DÉTAILS.

La lettre de licenciement signée par M. Douglas Newson, directeur, Statistique Canada - Recensement, région de l'Ontario, datée du 16 avril 1996, est reproduite ci-dessous : [Traduction] Statistique Canada exige que les commissaires au recensement travaillent à temps plein afin de s’acquitter de leurs tâches avec exactitude selon le calendrier établi par leur superviseur. Ces exigences vous ont été expliquées lorsque vous avez été embauché. Vous les avez acceptées en signant le document relatif aux conditions d'emploi le 29 février 1996.

Du fait de votre comportement inapproprié, de votre manque de jugement et des difficultés que vous avez à suivre les instructions de votre superviseur, vous n'avez pas respecté vos conditions d'emploi. Par conséquent, j'ai approuvé votre renvoi à compter d’aujourd'hui le 16 avril 1996.

Vous devez remettre immédiatement les cartes géographiques, les manuels, les documents de formation, votre carte d'identité et les fournitures qui vous avaient été distribuées. Toute somme qui vous est due vous sera remise aussitôt que vous aurez rendu tout le matériel.

Nous vous remercions de votre collaboration.

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Décision Page 2 M. Catlos demande le redressement suivant : [Traduction] JE DEMANDE QUE ME SOIENT PAYÉES LE RESTE DES SOMMES DUES AUX TERMES DE MON CONTRAT (Y COMPRIS LE LOYER DE MON BUREAU), SOIT 5 893,75 $. JE DEMANDE ÉGALEMENT QUE L'ON ME REMETTE UNE LETTRE INDIQUANT QUE J'AI ÉTÉ RENVOYÉ SANS MOTIF VALABLE ET SANS POSSIBILITÉ DE RECOURS, ET QUE CELA SOIT INDIQUÉ DANS MON DOSSIER PERSONNEL.

M. Catlos demande également que la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) prolonge le délai prévu pour déposer un grief comme le permet l'article 63 des Règlement et règles de procédures de la CRTFP, 1993. L'article 63 est ainsi libellé : 63. Par dérogation à toute autre disposition de la présente partie, les délais prévus aux termes de la présente partie, d'une procédure applicable aux griefs énoncée dans une convention collective ou d'une décision arbitrale, pour l'accomplissement d'un acte, la présentation d'un grief à un palier ou la remise ou le dépôt d'un avis, d'une réponse ou d'un document peuvent être prorogés avant ou après leur expiration :

a) soit par une entente entre les parties; b) soit par la Commission, à la demande de l'employeur, du fonctionnaire ou de l'agent négociateur, selon les modalités que la Commission juge indiquées.

On me demande de trancher trois questions : ai-je compétence pour instruire le grief sur le fond? Le grief a-t-il été déposé dans le délai prescrit? Enfin, compte tenu du fond du grief, devrais-je accorder au fonctionnaire s'estimant lésé le redressement qu'il demande? J'ai accepté d'entendre d'abord les arguments des parties sur ma compétence et sur le respect du délai prescrit.

L'audience a duré une demi-journée. Aucun témoin n'est comparu, et quatre pièces ont été déposées en preuve sur consentement des parties.

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Décision Page 3 Argument de l'employeur relatif à la compétence M e Jaworski soutient que le fonctionnaire a été embauché par le ministre responsable de Statistique Canada pour travailler durant le Recensement du Canada de 1996, en qualité de commissaire au recensement aux termes de la Loi sur la statistique et de certaines conditions d'emploi (pièce E-2) que le fonctionnaire a signées. Voici les extraits pertinents de ce dernier document : [Traduction] APPLICATION Vous avez été embauché par le ministre responsable de Statistique Canada en prévision du Recensement du Canada de 1996 aux termes du paragraphe 5(1) de la Loi sur la statistique, L.R.C. 1985, c. S19. Aux fins des présentes conditions d'emploi, le terme « employé » désigne une personne embauchée en vertu des dispositions du paragraphe 5(1) de la Loi sur la statistique.

[. . .] RESPONSABILITÉS DE LA GESTION Les présentes conditions d'emploi n’empêchent en rien les superviseurs et les gestionnaires de Statistique Canada de contrôler la qualité et la quantité du travail à effectuer pour Statistique Canada durant le Recensement du Canada de 1996.

DISPONIBILITÉ Un employé est tenu d'effectuer les heures de travail nécessaires pour effectuer la tâche assignée avec exactitude selon le calendrier établi par le superviseur. Il est fréquemment nécessaire de travailler en soirée et les samedis.

[. . .] ACTIVITÉS SUPPLÉMENTAIRES Un employé ne s'adonnera pas à des activités supplémentaires telles que la vente ou la sollicitation pendant qu'il travaille pour Statistique Canada, à moins d'en avoir été expressément autorisé par Statistique Canada.

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Décision Page 4 Un employé ne doit pas discuter de politique ou d'autres sujets controversés avec les répondants/membres du public, ou participer à des débats avec les médias au sujet de leur travail.

DÉMISSIONS Lorsqu'un employé démissionne avant d'avoir terminé son affectation, ledit employé sera rémunéré pour le travail effectué et aura droit au remboursement des frais approuvés qu'il aura engagés en date de sa démission.

RENVOIS Après avoir consulté son gestionnaire, un superviseur peut renvoyer un employé qui n'exécute pas ses tâches ou qui a un comportement répréhensible durant l'exécution de ses tâches. L'employé sera rémunéré pour le travail effectué et aura droit au remboursement des frais approuvés qu'il aura engagés en date de sa démission.

[. . .] TAUX DE RÉMUNÉRATION Les commissaires au recensement toucheront la somme de 8 000 $, moins les retenues applicables, pour l'exécution des tâches durant le Recensement du Canada de 1996, sous réserve de l'approbation du Conseil du Trésor.

[. . .] PÉRIODE D'EMPLOI ET DISPONIBILITÉ Les commissaires au recensement doivent : commencer à travailler à temps plein au Recensement du Canada de 1996 immédiatement après avoir terminé leur première séance de formation, et doivent continuer de travailler jusqu'à ce qu'ils aient terminé leurs tâches, le 28 juin 1996, ou aux environs de cette date; travailler en soirée et les samedis au besoin. TÂCHES ET EXIGENCES Le Ministre a établi que les tâches et exigences d’un commissaire au recensement sont les suivantes : assister aux séances de formation des commissaires au recensement données par Statistique Canada; acquérir une connaissance approfondie du district de commissaire au recensement, y compris des limites de chaque région de dénombrement en examinant les cartes

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Décision Page 5 géographiques fournies et en se rendant dans les villes et villages pour se familiariser avec ces endroits; recevoir, vérifier et distribuer les fournitures; prendre un soin raisonnable de l’ensemble des documents, des cartes géographiques et des fournitures remis par Statistique Canada et les retourner immédiatement sur demande; distribuer du matériel publicitaire localement en vue d'encourager la participation et la coopération de la population; recruter des candidats pour le recensement, vérifier leurs capacités et recommander les plus compétents comme représentants du recensement conformément aux lignes directrices fournies; donner la formation prévue pour apprendre aux représentants du recensement à exécuter leurs tâches; vérifier si les modalités relatives au registre d'adresse ont été respectées; recruter un adjoint administratif, lui faire subir les examens nécessaires et le former; établir des contacts avec les hôtels, motels et institutions ainsi qu'avec l'administration de certains immeubles d'habitation dans le cadre des préparatifs du recensement; superviser chaque représentant au recensement pour s'assurer que la totalité du travail est effectué correctement; faire le suivi pour vérifier la cause des retards de courrier (aucun questionnaire reçu) et du manque de collaboration (refus) de la part de la population; faire le suivi lorsque le répondant ne veut pas envoyer le questionnaire à l'adresse indiquée sur l'enveloppe de retour; présenter des rapports au gestionnaire du territoire de recensement aux dates prévues; vérifier le travail retourné par chaque représentant au recensement pour s'assurer qu'il est complet et exact; veiller à ce que le travail qui est rejeté à l'issue d'une vérification ou du contrôle de la qualité par le commissaire au recensement fasse l'objet d'un suivi complet et précis; envoyer les documents dûment autorisés au bureau régional du recensement de Statistique Canada; disposer à temps plein d’une voiture et détenir un permis de conduire valide; avoir atteint l'âge de la majorité dans la province ou le territoire avant la signature des conditions d'emploi - Commissaire au recensement (formule 24B) et le début des tâches;

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Décision Page 6 remplir les exigences de l'emploi jusqu'à la fin; exécuter d'autres tâches connexes. En outre, M. Catlos a signé un serment d'office et de discrétion en conformité avec la Loi sur la statistique le 29 février 1996 (pièce E-1). Il a accepté un poste de commissaire au recensement dans la circonscription électorale de Rosedale le 5 mars 1996 (pièce E-3), même s'il a réellement commencé à travailler le 4 mars 1996.

M e Jaworski soutient qu'aucun des documents devant moi ne mentionne la Commission de la fonction publique (CFP), la Loi sur l'emploi dans la fonction publique (LEFP), la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) ou un niveau de classification dans la fonction publique; M. Catlos n'était tout simplement pas un employé de la fonction publique et, par définition, il n'a droit à aucun recours devant la CRTFP aux termes de la loi.

M e Jaworski conclut que le fonctionnaire a été embauché par le ministre responsable de Statistique Canada aux termes de la Loi sur la statistique en vue d'effectuer un travail particulier pendant une courte période, soit environ quatre mois, mais qu'il a été licencié environ un mois et demi plus tard.

M e Jaworski me renvoie aux définitions suivantes données à l'article 2 de la LRTFP : « fonctionnaire » Personne employée dans la fonction publique, même si elle a cessé d'y travailler par suite d'une grève ou par suite d'un licenciement contraire à la présente loi ou à une autre loi fédérale, mais à l'exclusion des personnes :

a) nommées par le gouverneur en conseil, en vertu d'une loi fédérale, à un poste prévu par cette loi;

b) recrutées sur place à l'étranger; c) dont la rétribution pour l'exercice des fonctions normales de leur poste ou de leur charge consiste en honoraires ou dépend des recettes du bureau elles sont employées;

d) qui ne sont pas ordinairement astreintes à travailler plus du tiers du temps normalement exigé des personnes exécutant des tâches semblables;

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Décision Page 7 e) qui sont membres, ou gendarmes auxiliaires, de la Gendarmerie royale du Canada, ou y sont employées sensiblement aux mêmes conditions que les membres de la Gendarmerie;

f) employées par le Service canadien du renseignement de sécurité et n'exerçant pas des fonctions de commis ou de secrétaire;

g) employées à titre occasionnel; h) employées pour une durée déterminée de moins de trois mois ou ayant travaillé à ce titre pendant moins de trois mois;

i) employées par la Commission ou relevant de son autorité;

j) occupant un poste de direction ou de confiance; k) employées dans un secteur de l'administration publique fédérale spécifié à la partie I de l'annexe I en vertu d'un programme désigné par le Conseil du Trésor comme un programme d'embauche des étudiants.

«fonction publique» Ensemble des postes qui sont compris dans les ministères ou autres secteurs de l'administration publique fédérale spécifiés à l'annexe I, ou qui en relèvent.

«grief» Plainte écrite déposée conformément à la présente loi par un fonctionnaire, soit pour son propre compte, soit pour son compte et celui de un ou plusieurs autres fonctionnaires. Les dispositions de la présente loi relatives aux griefs s'appliquent par ailleurs :

a) aux personnes visées aux alinéas f) ou j) de la définition de « fonctionnaire »;

b) en ce qui concerne les licenciements visés aux alinéas 11(2)f) ou g) de la Loi sur la gestion des finances publiques ou les mesures disciplinaires portant suspension, aux anciens fonctionnaires, ainsi qu'aux personnes qui auraient eu le statut de fonctionnaires si, au moment de leur licenciement ou suspension, elles n'avaient pas fait partie des personnes visées aux alinéas f) ou j) de la définition de « fonctionnaire ».

Statistique Canada figure à l'annexe I de la partie I de la LRTFP à titre de ministère dont Sa Majesté du chef du Canada, représentée par le Conseil du Trésor, est l'employeur.

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Décision Page 8 À l'appui de son argument, M e Jaworski me renvoie à l'arrêt Canada (Attorney-General) v. Public Service Alliance of Canada (1991), 80 D.L.R. (4th) 520 Econosult ») de la Cour suprême du Canada le juge Sopinka, pour la majorité, a déclaré ce qui suit à la page 530 : [...] j'arrive à la conclusion que le Parlement n'a pas eu l'intention d'attribuer à la Commission la compétence sur les relations de travail des employés qui ne sont pas membres de la fonction publique.

M e Jaworski fait remarquer que le juge Sopinka a précisé ce qui suit à la page 532 : [...] Les postes dans la Fonction publique sont établis par le Conseil du Trésor et le droit de nommer à la Fonction publique appartient exclusivement à la Commission de la Fonction publique. Les exceptions sont soigneusement exposées dans la Loi sur l'emploi.

[...] Dans le régime des relations de travail que j'ai exposé plus haut, il n'y a tout bonnement pas de place pour une espèce de fonctionnaire de fait qui ne serait ni chair ni poisson. La création d'une telle catégorie spéciale de fonctionnaires susciterait un certain nombre de problèmes qui amènent à conclure que la création de cette troisième catégorie est incompatible avec l'objet des dispositions législatives considérées sous l'angle d'une analyse pragmatique et fonctionnelle.

L'avocat conclut en citant de nouveau le juge Sopinka à la page 533 : [...] Bref, le juge Marceau résume bien la situation lorsqu'il affirme, au nom de la Cour d'appel à la majorité la page 643):

Il n'y a tout simplement pas de place dans cette construction juridique pour un fonctionnaire (i.e. un employé de la Reine, membre de la fonction publique) sans poste créé par le Conseil du Trésor, et sans nomination faite par la Commission de la fonction publique.

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Décision Page 9 M e Jaworski soutient que M. Catlos n'a pas été nommé par la Commission de la fonction publique; il a plutôt été nommé aux termes du paragraphe 5(1) de la Loi sur la statistique qui prévoit ce qui suit : 5. (1) Le ministre peut employer, de la manière autorisée par la loi, les commissaires, recenseurs, agents ou autres personnes qui sont nécessaires à la collecte, pour Statistique Canada, des statistiques et des renseignements qu'il estime utiles et d'intérêt public, concernant les activités commerciales, industrielles, financières, sociales, économiques et autres, qu'il peut déterminer. Leurs fonctions sont celles qu'il prescrit.

(2) Le ministre peut, pour les périodes qu'il détermine, faire usage des services de tout employé de l'administration publique fédérale pour l'exercice de toute fonction de Statistique Canada ou d'un fonctionnaire de celui-ci en vertu de la présente loi ou de toute autre loi. Toute personne dont les services sont ainsi utilisés est, pour l'application de la présente loi, réputée être une personne employée en vertu de la présente loi.

(3) Les personnes engagées à contrat pour des services spéciaux au ministre en application de la présente loi, de même que les employés et les agents de ces personnes, sont réputés être des personnes employées en vertu de la présente loi pendant qu'elles rendent ces services.

M e Jaworski affirme que le paragraphe 5 (2) constitue une autorisation de faire appel à des fonctionnaires pour effectuer du travail de statistique et fait donc une nette distinction entre les fonctionnaires et les personnes embauchées en vertu du paragraphe 5 (1), lesquelles ne sont pas membres de la fonction publique.

M e Jaworski conclut que M. Catlos n'est pas un fonctionnaire et que, par conséquent, il n'a pas le droit de se prévaloir de la procédure de règlement des griefs prévue aux termes de la LRTFP.

En ce qui concerne la décision de la CRTFP rendue le 1 er mai 1985 (dossiers de la Commission 144-2-240 et 144-2-241) concernant l'Alliance de la Fonction publique du Canada et le Conseil du Trésor relativement à une demande d'accréditation d'interviewers principaux et d'interviewers au ministère des Approvisionnements et Services, M e Jaworski soutient que, même si la Commission a conclu, à ce moment-là, que ces personnes étaient des « employées » fonctionnaires » au sens de la LRTFP)

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Décision Page 10 la Cour suprême, dans l'arrêt Econosult (précité) rendu en 1991, a conclu que la définition du mot « employé » est une disposition conférant compétence qui a été établie par le Parlement (page 530) : [...] La définition expresse du mot «employé» montre cependant que le Parlement a clairement eu l'intention de déterminer lui-même la catégorie d'employés sur lesquels la Commission aurait compétence. Cette catégorie se limite aux personnes employées dans la Fonction publique et qui ne sont pas assujetties au Code canadien du travail. D'après le texte même de l'art. 33, le rôle de la Commission consiste non pas à déterminer qui est employé, mais plutôt à déterminer si les employés qui répondent à cette définition appartiennent à une unité particulière de négociation.

M e Jaworski m'a rappelé que le pouvoir qui m'est conféré de trancher un grief aux termes du paragraphe 92 (1) de la LRTFP s'applique après qu'un employé « a porté jusqu'au dernier palier [...] tout grief portant [...] », et il soutient que, dans l'affaire dont je suis saisi, M. Catlos n'est pas un « employé » fonctionnaire ») et que je n'ai pas compétence pour instruire l’affaire.

Argument du fonctionnaire relatif à la compétence M. Hogan, par ailleurs, soutient que M. Catlos est un fonctionnaire aux termes de la LRTFP et que l'arrêt Econosult (précité) diffère du grief dont je suis saisi étant donné que l'arrêt en question sert de critère pour déterminer qui est un employé, non pas pour déterminer si la Commission a le pouvoir de décider qui est un employé. M. Hogan affirme que seulement les parties I, II et III de la LEFP ont été appliquées dans l'arrêt Econosult (précité) tandis que le cas de M. Catlos relève de la partie IV. Il précise que la mention faite par le juge Sopinka du « régime des relations de travail » n'est pas pertinente vu que Econosult est une entreprise du secteur privé qui embauchait des enseignants, tandis que M. Catlos a été embauché par un ministère du gouvernement, à savoir Statistique Canada. Il dépose en preuve un feuillet T4 du fonctionnaire pour l'année 1996 (pièce G-1) qui mentionne les termes « employé », soit M. Catlos, et « employeur », soit Statistique Canada.

M. Hogan soutient que, dans l'arrêt Econosult (précité), le juge Sopinka a déclaré à la page 524:

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Décision Page 11 La Commission a reconnu au départ que si elle devait se limiter à ce qu'elle considère comme une question de pure « forme », il n'y aurait aucun doute que les enseignants en cause étaient des employés d'Econosult. [...]

La Cour suprême du Canada a conclu que les enseignants ne répondaient pas à la définition d'« employé » et que la Commission avait commis une erreur étant donné qu'elle ne pouvait pas appliquer une définition générale du mot « employé ». M. Hogan affirme que M. Catlos n'est pas comme un employé, qu'il est un employé et qu'aucune définition juridique ne l'exclut (c'est moi qui souligne).

M. Hogan soutient que je dois examiner la définition du terme « employé » fonctionnaire ») aux termes de la LRTFP, puis la définition de « fonction publique », puis l'annexe I de la partie I, et tenir compte de tous ces éléments pour conclure que M. Catlos est effectivement un fonctionnaire.

M. Hogan renvoie à la page 1 de la pièce E-2, sous la rubrique « Application », apparaissent les termes « Statistique Canada », lesquels figurent à l'annexe 1 de la partie I de la LRTFP, et sous la rubrique « Taux de rémunération » à la page 3 de la pièce E-2, il est question du « Conseil du Trésor », terme qui figure également à l'annexe I de la partie I de la LRTFP. Il conclut que M. Catlos doit être considéré comme un fonctionnaire.

M. Hogan soutient que le paragraphe 5 (2) de la Loi sur la statistique indique clairement que le ministre peut, au besoin, faire appel à tout employé de la fonction publique fédérale. Il soutient que l'alinéa 17 (1) a) de la Loi sur la statistique ne fait pas de distinction entre un employé de l'administration fédérale (paragraphe 5 (2)) et un employé temporaire décrit au paragraphe 5 (1) de la Loi sur la statistique. L'alinéa 17(1)a) de la Loi sur la statistique est libellé ainsi : 17. (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article et sauf pour communiquer des renseignements conformément aux modalités des accords conclus en application des articles 11 ou 12 ou en cas de poursuites engagées en vertu de la présente loi :

a) nul, si ce n'est une personne employée ou réputée être employée en vertu de la présente loi et qui a été assermentée en vertu de l'article 6, ne peut être autorisé à prendre connaissance d'un relevé fait pour l'application de la présente loi;

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Décision Page 12 M. Hogan maintient que dans l'arrêt Econosult (précité), la Cour suprême a affirmé que la LRTFP, la LEFP et la Loi sur la gestion des finances publiques (LGFP) déterminent toutes qui est un fonctionnaire de l'administration fédérale. M. Hogan soutient que le paragraphe 2 (1) de la LEFP la définition de fonction publique [traduction] « a le même sens que dans la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique », comme c’est le cas du paragraphe 11 (1) de la LGFP, et que l'annexe 1.1 de la LGFP mentionne également Statistique Canada.

M. Hogan me renvoie à l'article 8 de la LEFP, qui est libellé ainsi : 8. Sauf disposition contraire de la présente loi, la Commission a compétence exclusive pour nommer à des postes de la fonction publique des personnes, en faisant partie ou non, dont la nomination n'est régie par aucune autre loi fédérale.

M. Hogan maintient que, dans l'arrêt Econosult (précité), la Cour s'est fondée sur l'article 8, mais, affirme-t-il, M. Catlos a en réalité été embauché en vertu d'une autre loi du Parlement, soit la Loi sur la statistique. Je dois donc examiner son embauche aux termes de cette loi et établir un lien avec la LRTFP, laquelle ne contient aucune disposition prévoyant l'exclusion de M. Catlos à titre de fonctionnaire.

M. Hogan poursuit en disant que même si on n’a pas donné suite à la demande d'accréditation des interviewers principaux et des interviewers embauchés par le ministre des Approvisionnements et Services (précité) qui, à l'époque, était responsable de Statistique Canada, la conclusion à laquelle la CRTFP est arrivée à ce moment-là, soit que les personnes mentionnées dans la décision sont en bout de ligne des employés de Sa Majesté du chef du Canada, représentée par le Conseil du Trésor, vaut toujours en dépit de l'arrêt Econosult (précité).

Quant à la référence à la décision Cowalchuk (dossier de la Commission 166-2-26780), M. Hogan soutient que même si M. Cowalchuk s'est expressément vu refuser le droit de déposer un grief aux termes de l'alinéa 2 (1) e) de la LRTFP, il était néanmoins inclus dans l'annexe I de la partie I de la LRTFP à titre de fonctionnaire, tout comme doit l'être M. Catlos.

L'alinéa 2 (1) e) de la LRTFP est libellé ainsi : « fonctionnaire » Personne employée dans la fonction publique, [...] mais à l'exclusion des personnes :

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Décision Page 13 [...] e) qui sont membres, ou gendarmes auxiliaires, de la Gendarmerie royale du Canada, ou y sont employées sensiblement aux mêmes conditions que les membres de la Gendarmerie;

Réfutation de l'employeur En réfutation, M e Jaworski soutient que, dans la pièce E-2, un fonctionnaire est défini différemment aux termes de la Loi sur la statistique étant donné que Statistique Canada recrute une personne autre qu'un fonctionnaire.

La Loi sur la statistique ne mentionne pas la LEFP ou la LRTFP étant donné qu’une personne embauchée conclut un contrat personnel avec le ministre plutôt qu’avec le Conseil du Trésor. L’avocat me rappelle que même le ministre ne peut nommer une personne à la fonction publique étant donné que c’est la CFP qui a la « compétence exclusive » en la matière aux termes de l'article 8 de la LEFP. Le juge Sopinka l'a clairement affirmé dans l'arrêt Econosult (précité), page 532: [...] Les postes dans la Fonction publique sont établis par le Conseil du Trésor et le droit de nommer à la Fonction publique appartient exclusivement à la Commission de la Fonction publique. Les exceptions sont soigneusement exposées dans la Loi sur l'emploi.

Le juge Sopinka a poursuivi en disant : [...] La conclusion, sans plus, qu'ils sont des employés du gouvernement du Canada excéderait clairement la compétence attribuée par l'art. 33 et contredirait directement l'art. 8 de la Loi sur l'emploi qui réserve expressément cette compétence à la Commission de la Fonction publique.

M e Jaworski soutient que M. Catlos a été recruté uniquement aux fins du recensement, qu'il n'a pas été nommé par la CFP et que le taux de rémunération indiqué à la pièce E-2 est uniquement donné à titre de référence. Il me rappelle que le serment d'office et de discrétion (pièce E-1) mentionne uniquement la Loi sur la statistique.

M e Jaworski conclut que M. Catlos n'a tout simplement pas été embauché dans la fonction publique et que, par conséquent, je n'ai pas compétence pour instruire le grief.

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Décision Page 14 Argument du fonctionnaire concernant le respect du délai prescrit - (dossier de la Commission 149-2-162)

M. Hogan convient que le grief officiel a été déposé en dehors du délai prescrit par le paragraphe 71 (3) des Règlement et règles de procédure de la CRTFP, 1993, libellé comme suit : (3) Le fonctionnaire présente son grief au plus tard 25 jours après le premier en date des jours suivants : le jour il a eu connaissance pour la première fois de l'action, de l'omission ou de la situation à l'origine du grief ou le jour il en a été avisé.

M. Hogan soutient toutefois que M. Catlos n'a été informé de cette possibilité par l'employeur que le 11 ou le 12 juin 1996 environ. Le licenciement de M. Catlos est survenu le 16 avril 1996 et le grief aurait être déposé au plus tard le 11 mai 1996. Le fonctionnaire s'estimant lésé a reçu le formulaire de grief le 9 juillet 1996 et l'a remis le 14 juillet 1996. L'employeur l'a reçu le 18 juillet 1996. Dans les circonstances, M. Hogan me demande d'exercer mon pouvoir discrétionnaire aux termes de l'article 63 des Règlement et règles de procédure et d'accorder une prolongation de délai.

M. Hogan me renvoie aux affaires Quigley (dossier de la Commission 166-2-27258), Wilson (dossiers de la Commission 166-2-27330 et 149-2-165) et Creamer (dossier de la Commission 166-2-27300).

Argument de l'employeur concernant le respect du délai prescrit M e Jaworski soutient qu'il est juste de dire que le retard s'est produit par inadvertance. Toutefois, je dois d'abord déterminer si M. Catlos est un fonctionnaire aux termes de la LRTFP étant donné que c’est parce que l'employeur ne croyait pas qu’il était un employé qu’il ne lui a pas parlé de la possibilité de déposer un grief. Il soutient en outre que je ne dois pas exercer mon pouvoir discrétionnaire à la légère étant donné que les Règlement et règles de procédure doivent être appliqués et respectés. Il m'informe que M. Catlos a entamé des poursuites contre Statistique Canada devant une cour de l'Ontario (Division générale - petites créances) et que l'affaire a été différée jusqu'à ce que je rende ma décision.

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Décision Page 15 En réfutation, M. Hogan soutient qu'il ne revient pas à l'employeur de décider si la loi s'applique et quand elle s’applique. Il aurait mentionner la procédure de règlement des griefs à M. Catlos lorsqu'il l’a licencié.

J'ai informé les parties que je rendrais ma décision concernant ma compétence et le respect des délais prescrits avant d'entendre leurs arguments sur le fond.

Par la suite, les faits suivants ont été portés à mon attention. Par décret DORS/87-644, daté du 6 novembre 1987, les Opérations des enquêtes statistiques ont été ajoutées à la partie II de l'annexe I de la LRTFP, créant ainsi un nouvel employeur distinct. Le Résumé de l'étude d'impact de la réglementation du DORS/87-644 précise ce qui suit sous la rubrique « Répercussions prévisibles » : La modification régularise le statut d'emploi de quelque 1400 recenseurs employés à travers le pays. Un processus de négociation aura lieu avec l'agent négociateur qui représentera les employés embauchés sous l'article 5(1) de la Loi sur la statistique. [...]

Le 27 juin 1988, la Commission a accrédité l'Alliance de la Fonction publique du Canada à titre d'agent négociateur d'une unité de négociation comprenant tous les employés des Opérations des enquêtes statistiques « menant des enquêtes sur les entreprises » : Fonction publique du Canada et Division des enquêtes et des données statistiques (décision de la Commission 144-24-282). Essentiellement, cette demande d'accréditation concernait les mêmes personnes au sujet desquelles, le 1 er mai 1985, la Commission avait conclu qu’elles étaient des employées du Conseil du Trésor aux termes des dispositions pertinentes de la LRTFP même si elles avaient été recrutées en vertu de l'article 5 de la Loi sur la statistique.

À ma demande, le secrétaire-adjoint de la Commission a envoyé la lettre suivante datée du 17 février 1998 à l'avocat de l'employeur : [Traduction] Au sujet de votre objection préliminaire concernant l'instruction par la Commission du grief de M. Catlos au motif que ce dernier n'était pas un employé (fonctionnaire) au sens de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) parce qu'il a été embauché en vertu du paragraphe 5(1) de la Loi sur la statistique, M. Turner m'a demandé de vous renvoyer au DORS/87-644 daté du

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Décision Page 16 6 novembre 1987, lequel a eu pour effet d'ajouter les Opérations des enquêtes statistiques à la liste des employeurs distincts figurant à la partie II de l'annexe I de la LRTFP. En particulier, M. Turner vous renvoie au Résumé de l'étude d'impact de la réglementation qui suit immédiatement la modification de l'annexe I. En outre, M. Turner attire votre attention sur la décision de la Commission dans l'affaire Alliance de la Fonction publique du Canada et Opérations des enquêtes statistiques rendue le 27 juin 1988 (dossier de la Commission 144-24-282).

M. Turner vous saurait gré de lui faire connaître votre opinion au sujet de l'incidence, le cas échéant, du DORS/87-644 et de la décision de la Commission rendue le 27 juin 1988 sur la décision qu'il doit rendre concernant votre objection préliminaire. Si vous avez l'intention de lui présenter des arguments au sujet de cette question, veuillez les faire parvenir à la Commission au plus tard le 3 mars 1998. Le fonctionnaire, il va de soi, aura aussi l'occasion de présenter ses arguments et vous pourrez les réfuter. Nous portons également l'affaire à l'attention de l'Alliance de la Fonction publique du Canada et des Opérations des enquêtes statistiques pour leur permettre de déterminer si la question les intéresse.

Une copie de la lettre a été envoyée au représentant du fonctionnaire s'estimant lésé, aux Opérations des enquêtes statistiques et à l'Alliance de la Fonction publique du Canada.

Les arguments écrits des parties sont reproduits intégralement ci-dessous : Arguments de l'avocat de l'employeur : [Traduction] Statistique Canada et le Conseil du Trésor maintiennent que les commissaires au recensement embauchés en vertu de la Loi sur la statistique ne sont pas des « fonctionnaires » employés ») aux termes de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. 1985, c. P-35, et que la CRTFP n'a pas compétence pour instruire le grief.

M. Brian Catlos a été embauché en vertu d'un contrat à court terme conclu avec Statistique Canada (le ministre de l'Industrie) à titre de commissaire au recensement, plus particulièrement pour le Recensement du Canada de 1996 (voir pièce E-1, page 1 - Clauses générales - Application; et page 3 - Clauses particulières - Taux de rémunération). Ce

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Décision Page 17 n'était pas un poste classifié au Ministère, mais simplement une nomination aux termes de la Loi sur la statistique.

Le DORS/87-644 et la décision relative à l'AFPC et aux OES (dossier de la Commission 144-24-282) concernent l'accréditation des interviewers/recenseurs aux fins de la négociation collective, qui menaient des enquêtes sur les entreprises pour Statistique Canada de manière continue. Contrairement à M. Catlos, les interviewers/recenseurs, m’a-t-on informé, étaient des employés classifiés qui entretenaient une relation de travail de longue durée avec Statistique Canada. Il s'agissait exclusivement de 1 400 interviewers/recenseurs et non pas des quelque 35 000 personnes embauchées à contrat pour le Recensement du Canada de 1996. Ces personnes, au nombre desquelles figure M. Catlos, sont embauchées tous les cinq ans pour des périodes allant de quelques semaines à quatre mois au plus.

Les interviewers/recenseurs avaient pour tâches de mener des enquêtes sur les entreprises, non pas de s'occuper du recensement. Leurs tâches sont décrites en détail dans la décision de la Commission 144-24-282 nulle part il n’est question de recensement. Contrairement à M. Catlos, les interviewers/recenseurs ont signé une convention collective et ont versé des cotisations syndicales. M. Catlos n'était pas visé par une telle convention collective et il ne payait pas de cotisations syndicales (voir la pièce E-1, page 3 - Clauses particulières - Retenues).

Veuillez prendre note que le préambule du DORS/87-644 précise « [...] Sur avis conforme [...] et du Conseil du Trésor [...] ». Il indique en outre que la modification de la partie II de l'annexe I de la LRTFP a été discutée et a fait l'objet d'une entente entre Statistique Canada et le Secrétariat du Conseil du Trésor. En l'espèce, c'est Statistique Canada et le Conseil du Trésor qui font opposition.

Par conséquent, nous soutenons que ni le décret ni la décision antérieure de la Commission n'ont quoi que ce soit à voir avec la question en l'espèce.

Pour ces motifs additionnels, le grief doit être rejeté. LE TOUT RESPECTUEUSEMENT SOUMIS. Fait à Toronto, le 2 mars 1998. Arguments du représentant du fonctionnaire s'estimant lésé : [Traduction] Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 18 M. Brian Catlos maintient que les commissaires au recensement embauchés en vertu de la Loi sur la statistique sont des « fonctionnaires » au sens de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. 1985, c. P-35 et que, par conséquent, la CRTFP a compétence pour instruire le grief.

Le fonctionnaire s'estimant lésé convient que le DORS/87-644 et la décision de la Commission dans l'affaire Alliance de la Fonction publique du Canada et Opérations des enquêtes statistiques (décision de la Commission 144-24-282) traitent essentiellement de l'accréditation des interviewers/recenseurs aux fins de la négociation collective. Il soutient toutefois que la modification législative et ladite décision de la CRTFP font la lumière sur certaines questions soulevées lors de l'audience relative à la compétence de la CRTFP d'instruire le grief.

Le défendeur a soutenu (et il semble qu'il le soutient toujours) que les personnes embauchées en vertu du paragraphe 5(1) de la Loi sur la statistique ne peuvent être considérées comme des « fonctionnaires » selon la définition de ce terme dans la LRTFP. Pour réfuter cet argument, le fonctionnaire se fonde en partie sur la décision de la Commission dans l'affaire Alliance de la Fonction publique du Canada et le Conseil du Trésor (décision de la Commission 144-2-240 et 241). Cette affaire est essentiellement un prélude à la décision concernant l'AFPC et les OES la Commission a conclu que les interviewers et les recenseurs embauchés en vertu du paragraphe 5(1) de la Loi sur la statistique étaient des « employés » fonctionnaires ») au sens ce terme est défini dans la LRTFP et, par conséquent, qu’ils étaient admissibles au régime de la négociation collective décrit dans la LRTFP.

À l'audience relative à la compétence de la CRTFP pour instruire le présent grief, M. Turner a fait remarquer aux deux parties que l'AFPC avait abandonné ses démarches d'accréditation à la suite de la décision rendue dans l'affaire concernant l'AFPC et le Conseil du Trésor. Le défendeur a soutenu que cela devait avoir une certaine incidence sur l'importance à accorder à la décision initiale (en plus de soutenir que la décision était erronée). Le fonctionnaire soutient que l'abandon subséquent des démarches par l'AFPC ne change rien au fond de la décision initiale.

Il semble, d'après l'exposé des faits dans l'affaire concernant l'AFPC et les OES, que l'abandon des démarches d'accréditation aux termes de la LRTFP fut le résultat de la modification législative qui a changé le défendeur des personnes en cause, et d'une décision de l'AFPC de demander l'accréditation d'une partie seulement de l'unité de Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 19 négociation initialement proposée, soit le Groupe des enquêtes sur les entreprises. La présente affaire se fonde clairement sur les conclusions de la Commission dans l'affaire concernant l'AFPC et le Conseil du Trésor, auxquelles elle souscrit, et le fonctionnaire s'estimant lésé soutient de nouveau que le raisonnement de la Commission dans cette affaire est juste et qu'il doit prévaloir en l'espèce.

En outre, il est clair que la modification législative décrite dans le décret DORS/87-644 s’appuie sur le point de vue que les personnes embauchées en vertu du paragraphe 5(1) de la Loi sur la statistique sont des employés (fonctionnaires) et qu'elles ont le droit de négocier collectivement. La modification reflète le changement survenu dans les relations de travail entre Statistique Canada et ses employés.

En vue d'établir une distinction avec l’affaire concernant l’AFPC et les OES, le défendeur insiste sur la différence entre le nombre d'interviewers/recenseurs et la durée de leur emploi. Le fonctionnaire soutient respectueusement que ni l'un ni l'autre de ces facteurs n'ont d'incidence sur l'issue de la présente affaire. La différence quant au nombre s'explique simplement par le fait que l'AFPC a choisi de demander l'accréditation de ce groupe particulier de personnes; elle n'a rien à voir avec le statut d'emploi de ces personnes ou d'autres personnes dans la même situation pour lesquelles l'AFPC n'était pas encore l'agent négociateur ou n'avait pas encore fait de démarches en vue d'être accréditée à titre d'agent négociateur. En outre, la durée d'emploi des commissaires au recensement n'est pas un facteur permettant de faire une distinction entre ces derniers et les autres personnes qui sont considérées comme des employés (fonctionnaires) dans les décisions concernant l'AFPC et le Conseil du Trésor ou l'AFPC et les OES. La LRTFP prévoit certaines exclusions à l'article 2, l'article interprétatif de la Loi. La définition de fonctionnaire exclut seulement les personnes dont la durée d'emploi est inférieure à trois mois. M. Brian Catlos devait travailler pendant quatre mois. Nous soutenons respectueusement que le défendeur ne peut pas établir lui-même les critères pour déterminer ce qui constitue une période d'emploi appropriée en vue de déterminer qui est un fonctionnaire; c'est la loi en cause, en l'occurrence la LRTFP, qui précise quelles sont les personnes exclues.

Le défendeur cherche également à établir une distinction concernant l'emploi de M. Catlos en faisant valoir que ce dernier n'était pas visé par une convention collective et qu'il ne payait pas de cotisations syndicales. Sauf le respect dû, cela équivaut à mettre la charrue devant les bœufs. Avant la décision de la Commission dans les affaires concernant l'AFPC et le Conseil du Trésor et l'AFPC et les OES,

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Décision Page 20 Statistique Canada ne considérait pas les personnes en cause dans ces affaires comme des employés, ce qui est exactement la situation dans laquelle se trouve M. Catlos en l'espèce. Ce sont les décisions de la Commission qui ont permis à ces employés de devenir admissibles à une convention collective, et ce n'est qu'à la suite de la conclusion d'une telle convention qu'ils ont été tenus de payer des cotisations syndicales. Selon l'argument du défendeur, il semblerait que M. Catlos doive d’abord devenir membre d'une unité de négociation et payer des cotisations syndicales (deux situations impossibles tant qu'il n'est pas considéré comme un fonctionnaire) pour que le défendeur l'accepte comme fonctionnaire. Le fonctionnaire soutient respectueusement que cet argument est sans fondement.

Enfin, le défendeur soutient que le fait que Statistique Canada et le Conseil du Trésor s'opposent à la thèse du fonctionnaire devrait avoir une incidence sur la décision de la Commission. À l'appui de cet argument, le défendeur se fonde sur le libellé du préambule du DORS/87-644 qui semble indiquer que la modification a été discutée et approuvée par Statistique Canada et le Conseil du Trésor. Sauf le respect dû, cette modification ne traite pas de la situation/classification juridique des fonctionnaires, mais de la création d'un nouveau défendeur pour s'occuper du groupe de fonctionnaires nouvellement constitué à la suite de la décision de la Commission dans l'affaire concernant l'AFPC et le Conseil du Trésor.

La décision de la Commission selon laquelle les personnes touchées par le DORS/87-644 étaient des fonctionnaires aux termes de la LRTFP était déjà, à ce moment-là, un fait accompli malgré l'opposition de Statistique Canada et du Conseil du Trésor. La modification a été adoptée en vue de régulariser le nouveau statut de ces fonctionnaires et, manifestement, Statistique Canada et le Conseil du Trésor ont été invités à faire connaître leurs vues pour déterminer la façon dont ces deux parties pourraient le mieux faire face à cette nouvelle situation. L'adoption de la thèse qui, selon le fonctionnaire s'estimant lésé, doit être retenue d'après la loi applicable, n'est pas assujettie à l’obtention du « consentement » du défendeur. Le régime législatif qui réglemente le défendeur et ses rapports avec ses employés n'est pas un régime qu’il peut choisir ou refuser de reconnaître ou qui nécessite son approbation.

Par conséquent, le fonctionnaire s'estimant lésé soutient que le décret et la décision antérieure de la Commission clarifient les arguments déjà exposés et les étayent aussi.

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Décision Page 21 Pour ces motifs additionnels, les objections du défendeur à la compétence de la Commission doivent être rejetées.

LE TOUT RESPECTUEUSEMENT SOUMIS. Fait à Toronto, le 18 mars 1998. Il y a lieu de faire remarquer que ni l'Alliance de la Fonction publique du Canada ni les Opérations des enquêtes statistiques n'ont répondu à la lettre de la Commission datée du 17 février 1998.

Décision M. Catlos a été embauché de façon temporaire comme commissaire au recensement dans le cadre du Recensement canadien de 1996. Il devait travailler pendant une période d'environ quatre mois et toucher 8 000 $ selon son taux de rémunération (pièce E-2). En fait, il a travaillé du 29 février au 16 avril 1996, soit moins de trois mois.

La Cour suprême du Canada faisait allusion, dans l'arrêt Econosult (précité), à la majorité de l’administration publique fédérale quand elle a affirmé qu'une personne ne pouvait pas être un « employé » aux termes de la LRTFP à moins d'avoir été nommée en vertu des dispositions de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique (LEFP). L'article 8 de cette Loi admet expressément la possibilité de nominations aux termes d'autres lois lorsqu'il est précisé que la Commission de la fonction publique « a compétence exclusive pour nommer à des postes de la fonction publique des personnes, en faisant partie ou non, dont la nomination n'est régie par aucune autre loi fédérale ». (c'est moi qui souligne)

Le pouvoir dévolu à de nombreux employeurs distincts de nommer des employés se trouve dans leur loi constitutive respective. Le Conseil national de recherches du Canada est un exemple d'employeur distinct.

Par conséquent, l'argument de l'avocat de l'employeur selon lequel le fonctionnaire ne peut pas être un « fonctionnaire » aux termes de la LRTFP parce qu'il n'a pas été nommé en vertu de la LEFP ne tient pas. Cela est particulièrement vrai à la lumière du décret DORS/87-644 qui a ajouté un nouvel employeur distinct à la partie II de l'annexe I de la LRTFP : Opérations des enquêtes statistiques. D'après le Résumé de l'étude d'impact de la réglementation du DORS/87-644, qui peut nous Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 22 servir pour faciliter l'interprétation étant donné que les termes « Opérations des enquêtes statistiques » ne précisent pas qui sont les employés visés, la modification du règlement devait régulariser « le statut d'emploi de quelque 1400 recenseurs employés à travers le pays ».

Je dois donc trancher deux questions : en premier lieu, le fonctionnaire s'estimant lésé est-il un employé en common law par opposition à un entrepreneur indépendant? Je ne dispose pas de suffisamment d'éléments de preuve pour trancher cette question. Contrairement aux employés appartenant à l'unité de négociation des enquêteurs sur les entreprises, M. Catlos était tenu de travailler à l'extérieur des locaux de l'employeur, et je n'ai pas beaucoup d'indication quant au contrôle que Statistique Canada exerçait sur lui. Toutefois, je ne crois pas qu'il soit nécessaire de me prononcer sur cette question vu ma conclusion au sujet la deuxième question.

En second lieu, si le fonctionnaire s'estimant lésé est un fonctionnaire aux termes de la LRTFP, qui est alors son employeur? C'est soit le Conseil du Trésor ou les Opérations des enquêtes statistiques. D'après le Résumé de l'étude d'impact de la réglementation du DORS/87-644, les Opérations des enquêtes statistiques ont été ajoutées à la partie II de l'annexe I de la LRTFP pour régulariser « le statut d'emploi de quelque 1400 recenseurs employés à travers le pays ». Selon le Concise Oxford Dictionary [traduction] « recenser » signifie : v., compter, spécifier, mentionner un à un, (articles) [...] recenseur n. (p. part. personne embauchée pour faire du recensement) ».

Manifestement, le fonctionnaire, à titre de commissaire au recensement, a effectué du recensement. Par conséquent, s'il est un employé, il a pour employeur les Opérations des enquêtes statistiques et non pas le Conseil du Trésor.

Par conséquent, le fonctionnaire s'estimant lésé a présenté son grief au mauvais employeur. À titre d'arbitre nommé en vertu de la LRTFP, je n'ai pas compétence pour instruire son grief.

Au sujet du respect du délai prescrit, même si cette question n'a plus à être tranchée, j'aurais sans doute accordé la prolongation du délai demandée.

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Décision Page 23 Pour tous ces motifs, le présent grief est rejeté.

J. Barry Turner, commissaire

OTTAWA, le 7 juillet 1998. Traduction certifiée conforme Serge Lareau

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