Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Rémunération - Indemnité de formation - Infirmière - la fonctionnaire est une infirmière autorisée et une infirmière psychiatrique autorisée - la convention collective prévoit une indemnité de formation de 475 $ par année pour suivre, entre autres, un « cours reconnu de formation spécialisée, 7 à 12 mois », « [l]orsque les éléments [...] de formation en sciences infirmières ou d'instruction postscolaire en sciences infirmières sont utilisés dans l'exercice de leurs fonctions » - la preuve a démontré que la fonctionnaire s'est servie de sa formation en soins infirmiers psychiatriques de façon courante pour exécuter ses tâches, et que sa formation a duré plus de 12 mois - l'employeur a maintenu que c'était uniquement la formation ou l'instruction postscolaire en soins infirmiers qui ouvrait droit à une indemnité, et que la formation en soins infirmiers « psychiatriques » n'était pas de la formation « postscolaire » - l'arbitre a examiné la version française de la convention collective et a conclu que le terme « postscolaire » ne s'appliquait qu'à la formation en soins infirmiers et non pas à l'instruction. Grief admis. Décision citée : Bainbridge (166-2-16132).

Contenu de la décision

Dossier : 166-2-28207 Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE HOLLY GERVAIS fonctionnaire s’estimant lésée et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Solliciteur général - Service correctionnel)

employeur

Devant : Evelyne Henry, présidente suppléante Pour la fonctionnaire s’estimant lésée : Paul Reniers, Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Pour l’employeur : Harvey Newman, avocat Affaire entendue à Vancouver (Colombie-Britannique), le 18 août 1998.

DÉCISION Les parties conviennent qu’il ne se pose aucune question quant à la compétence de la Commission et que, s’il est fait droit au grief, la date d’application rétroactive serait le 1 er janvier 1994 par opposition à la date d’embauche; de plus, la question du respect des délais ne se poserait pas à compter de cette date.

Le grief porte sur l’interprétation et l’application de la convention cadre conclue entre l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada et le Conseil du Trésor expirant le 30 septembre 1993, plus précisément en ce qui concerne les notes sur la rémunération applicables aux indemnités, paragraphe (1), alinéa B, sous-alinéa b) (pièce 1). Pour en faciliter la consultation, nous reproduisons l’alinéa au complet : NOTES SUR LA RÉMUNÉRATION INDEMNITÉS (1) Aux fins de la rémunération, les taux annuels de rémunération des niveaux du groupe des sciences infirmières stipulés à l’Appendice « A » sont modifiés par l’addition des montants précisés ci-dessous dans la colonne II compte tenu des circonstances exposées dans la colonne I.

Colonne I Colonne II [...] B. Indemnités de formation Lorsque les éléments suivants de formation en sciences infirmières ou d’instruction post-scolaire en sciences infirmières sont utilisés dans l’exercice de leurs fonctions :

a) Cours reconnu de formation spécialisée, 3 à 6 mois. 300 $ b) Cours reconnu de formation spécialisée, 7 à 12 mois. 475 $ c) Cours universitaire d’une année en administration, hygiène publique, enseignement et surveillance, ou en psychiatrie. 850 $ d) Baccalauréat en sciences infirmières. 1 050 $ Public Service Staff Relations Board

Décision Page 2 e) Maîtrise en sciences infirmières 1 450 $ Conformément au paragraphe 1(B), une (1) seule indemnité est versée pour la plus haute qualification pertinente.

Les mêmes notes sur la rémunération se trouvent dans la convention collective du groupe Sciences infirmières, code 219/94, expirant le 30 septembre 1997, aux annexes A-28 et A-29.

La question à trancher est de savoir si M me Holly Gervais a droit à l’indemnité de formation prévue au sous-alinéa Bb) en raison de sa formation en sciences infirmières. La fonctionnaire détient à la fois le titre d’infirmière autorisée (R.N.) et le titre d’infirmière psychiatrique autorisée (R.P.N.). M me Gervais a obtenu son diplôme en soins infirmiers psychiatriques à Edmonton (Alberta) à la suite d’une formation de deux ans comportant des cours et une formation en cours d’emploi en août 1986. Afin d’obtenir le titre de R.N., plus tard, M me Gervais a suivre une formation supplémentaire de 16 mois au Vancouver Community College. La fonctionnaire a expliqué que les deux programmes R.N. et R.P.N. au Vancouver Community College consistent en 24 mois de formation, les 12 premiers consistant en une formation commune au deux certificats. Dans la deuxième année, la formation diffère en ceci que la formation en soins infirmiers psychiatriques porte principalement sur les maladies mentales, tandis que la formation de R.N. est concentrée sur les maladies physiques et générales. Dans le cours de R.N., d’expliquer la fonctionnaire, les infirmières suivent un module de six semaines en psychiatrie, tandis que dans le cours de R.P.N., les infirmières se concentrent sur la psychiatrie pendant 24 mois. La fonctionnaire s’est vu accorder les crédits pour ses cours en pharmacologie, psychiatrie et biologie, mais elle a suivre un programme spécial sur l’accouchement en obstétrique ainsi que sur les rotations chirurgicales.

M me Gervais a expliqué comment sa formation et les compétences qu’elle avait acquises lui servaient quotidiennement dans ses fonctions d’infirmière à l’établissement Mountain, puis à Kent et maintenant au Service de santé de Matsqui, elle travaille au niveau de classification NU-HOS-3. La fonctionnaire a fait remarquer que ses fonctions avaient été relativement semblables aux trois établissements. Elle a

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Décision Page 3 donné des exemples précis de fonctions elle avait utilisé sa formation d’infirmière psychiatrique. Elle a relaté un incident qui s’était produit à Mountain, un détenu lui avait remis une lettre d’amour qui s’adressait à elle. Elle a pu faire face à la situation avec confiance en expliquant de façon efficace au détenu le caractère déplacé de son comportement et en veillant à ce qu’il obtienne le counselling nécessaire du superviseur de service, à ce qu’on lui donne le soutien voulu et à ce qu’il ne se blesse pas lui-même ni personne d’autre, tout en s’assurant qu’il comprenait bien le caractère déplacé de ses actions. Elle a fait remarquer que ses pairs lui adressaient souvent des questions concernant les maladies mentales et les médicaments servant à les traiter. Elle a même reçu des appels à la maison lui demandant des instructions sur la façon de traiter des individus particuliers et lui demandant aussi de confirmer que la procédure qu’ils avaient suivie était correcte.

M me Gervais a donné un exemple de sa connaissance particulière des médicaments psychotropes dans le contexte d’un incident concernant le Heldol, un médicament injectable utilisé pour le traitement des psychotiques. Il s’agissait d’une situation d’urgencel’infirmière n’était pas au courant qu’un des effets secondaires de l’Heldol était la rigidité musculaire, d’où la nécessité d’administrer également le Cogentin. [Traduction] « Je commençais mon poste de travail et il y avait beaucoup d’activité au sujet d’un détenu aux prises avec des symptômes de rigidité musculaire à la suite de l’injection de l’Heldol. J’ai pu dire au groupe que le Cogentin était nécessaire et l’on a pu faire disparaître les effets secondaires de l’Heldol plus rapidement une fois ce renseignement connu », d’expliquer la fonctionnaire. À la pharmacie, le Heldol et le Cogentin étaient conservés dans des endroits séparés, alors qu’ils auraient se trouver près l’un de l’autre. Elle a proposé les changements nécessaires au personnel de la pharmacie.

M me Gervais s’est vu attribuer la tâche secondaire de traiter avec les détenus ayant des besoins spéciaux; elle devait mettre au point un plan de soins pour les détenus qui ne prenaient pas soin d’eux-mêmes physiquement ou émotionnellement, qui étaient incapables de déterminer les facteurs de stress dans leur vie, et qui étaient incapables de constater qu’ils avaient des besoins à satisfaire. On lui a assigné ce travail à la suite d’une recommandation précise de M me Nancy Janzen, en raison de sa formation de R.P.N. M me Gervais a donné d’autres exemples elle avait utilisé sa formation dans son poste actuel au Service de santé de Matsqui, qui est une unité Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 4 d’évaluation initiale pour les détenus provenant d’autres établissements et qui fournit des soins 24 heures sur 24.

M me Gervais a pu relever, dans sa description d’emploi (pièce 3), les fonctions sa formation en psychiatrie étaient particulièrement utile, à savoir :

[Traduction] assurer que le détenu subit un contrôle de la santé initiale à son admission à l’établissement, consistant en un examen physique pour déceler tout signe de traumatisme récent ou de maladie et en un examen de la santé mentale pour y déceler tout trouble psychiatrique évident ou tout état justifiant une observation suivie.

[...] fournir des soins de santé primaires en vue de mettre en œuvre des mesures préventives, diagnostiques et thérapeutiques conformément aux protocoles cliniques et aux politiques du Centre de santé.

[...] favoriser le bien-être individuel et collectif au moyen d’activités d’éducation à la santé, y compris le counselling et l’enseignement dans le contexte de programmes structurés.

[...] interroger les détenus afin d’évaluer leurs besoins sur le plan de la santé, les conseiller au besoin concernant le traitement, ou, le cas échéant, faire savoir que le traitement n’est pas indiqué.

[...] Évaluation des besoins, suivi d’une intervention lorsqu’elle est nécessaire, influe sur l’adaptation du détenu, sa motivation, sa participation au programme, sa qualité de vie et sa mise en liberté éventuelle.

Les services de santé fournis portent sur la santé tant physique que mentale; l’intervention en situation de crise prévient les actions qui peuvent entraîner des blessures sérieuses, voire la mort.

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Décision Page 5 Le témoignage de M me Gervais selon lequel elle utilisait la formation infirmière qu’elle avait acquise en psychiatrie a été confirmée par le témoin de l’employeur, M. Gerwyn I. Mills, directeur exécutif du Centre de santé régional (Pacifique). M me Gervais et M. Mills ont tous les deux affirmé que le certificat de R.P.N. (Registered Psychiatric Nurse) existait de la Colombie-Britannique au Manitoba, mais n’était pas reconnu de l’Ontario jusqu’aux provinces atlantiques; il n’était pas en mesure de fournir des détails sur les certificats en sciences infirmières qui existaient dans les provinces de l’Est.

M. Mills a produit en preuve (pièce 5) l’énoncé de qualité pour le poste NU-HOS-3 occupé par la fonctionnaire. Il est clair d’après ce document que l’employeur exige une expérience en soins infirmiers ou en traitement de malades psychiatriques, ainsi qu’une connaissance de la théorie et des pratiques courantes dans l’application des normes professionnelles de soins infirmiers en milieu clinique, plus précisément en psychiatrie et en hygiène mentale.

M. Mills a en outre produit l’énoncé de qualité d’une infirmière de soins généraux, NU-HOS-2 (pièce 4), qui exige du titulaire qu’il détienne le titre R.N. (Registered Nurse) ou R.P.N. (Registered Psychiatric Nurse) en Colombie-Britannique. Pour obtenir un poste d’infirmière de soins généraux dans un Centre de santé (NU-HOS-3), une infirmière doit détenir le titre de R.N. dans la province de la Colombie-Britannique. M. Mills a expliqué que tous les postes d’infirmière de soins généraux visés par la pièce 4 étaient situés au Centre de santé régional, qui est un hôpital psychiatrique pleinement agréé. M. Mills a confirmé le témoignage de la fonctionnaire selon lequel le programme R.P.N. était un programme de deux ans dont la première année était identique au programme R.N., tandis que la deuxième année portait sur les soins données aux malades mentaux; la formation de R.N. est davantage axée sur les soins nécessités par l’état physique, à savoir l’anatomie, la physiologie, la biologie mais en passant plus de temps sur la chirurgie, l’orthopédie, le travail, l’obstétrique, la gérontologie et l’éventail complet des soins infirmiers. La R.P.N. est formée pour traiter des malades mentaux et certaines de leurs maladies physiques, tandis que la R.N. est formée pour prodiguer les soins infirmiers nécessités par l’ensemble des maladies physiques et certaines maladies mentales.

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Décision Page 6 M. Mills a témoigné avoir décidé de refuser d’accorder l’indemnité de formation à la fonctionnaire après que sa recommandation voulant que les infirmières détenant les deux certificats se voient accorder une indemnité de 360 $ par année fut rejetée à partir d’une note de service distribuée en 1987 et portée à son attention en 1997. M. Mills ne se souvenait pas clairement pourquoi il avait choisi ce montant. Il pense qu’il a pu avoir consulté un tableau erroné qui était périmé ou qui n’était pas encore en vigueur. M. Mills a en outre témoigné que l’indemnité de formation qui avait toujours été versée à l’infirmière Nancy Janzen, le chef intérimaire du Service de santé, en raison du fait qu’elle détenait les deux certificats, a été discontinuée en septembre 1997. M me Janzen soutenait la fonctionnaire dans ses tentatives en vue d’obtenir l’indemnité depuis janvier 1994. Elle avait écrit au sous-directeur J. Boileau une note de service (pièce 2, onglet 4) indiquant que M me Holly Gervais détenait deux diplômes en sciences infirmières et que [Traduction] [p]our une raison ou pour une autre, lors du « traitement » de son dossier par le service de la paie et de la rémunération au début de son emploi, ce fait n’a pas été reconnu et elle n’a donc pas reçu l’indemnité de formation applicable.

(Pièce 2, onglet 5) Au départ, semble-t-il, l’employeur contestait le fait que les fonctions de M me Gervais permettaient l’utilisation de sa formation en soins infirmiers psychiatriques. Plus tard, après avoir examiné ses fonctions et à la lumière du soutien de son superviseur et du fait que M. Mills avait recommandé qu’une infirmière psychiatrique soit désignée dans chaque centre de santé afin d’aider à traiter avec les détenus ayant des troubles mentaux ou de personnalité, l’employeur a décidé que les titres R.N. et R.P.N. ne représentaient pas, l’un par rapport à l’autre, une formation supérieure ou spécialisée. Cette décision a été énoncée dans une note de service rédigée en 1987 par M.B. Bauder, agent des relations de travail à l’administration centrale à Ottawa, après qu’il eut consulté le négociateur du Conseil du Trésor (pièce 9).

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Décision Page 7 Argumentation de la fonctionnaire Selon M. Reniers, la question en litige est de savoir si la fonctionnaire utilise sa formation dans l’exercice de ses fonctions; si elle utilise les compétences et les connaissances acquises durant sa formation, alors l’employeur est tenu de payer l’indemnité. Ce qui importe, ce n’est pas de savoir si l’employeur exige cette formation; la clause reconnaît que les infirmières qui ont une formation supplémentaire ajoutent de la valeur à leur travail et sont donc rémunérées pour cette formation.

M. Reniers fait remarquer que M. Mills, dans son témoignage, a signalé que les soins infirmiers psychiatriques constituaient une spécialité, que les infirmières ayant une formation de R.P.N. ont des connaissances supplémentaires que n’a pas une R.N. Il a indiqué que M me Gervais avait fait la preuve qu’elle possédait des compétences, des techniques et des connaissances qu’elle avait utilisées par le passé et qu’elle utilisait dans son poste actuel. Plus particulièrement, il a mentionné l’incident concernant le « Heldol », la réponse au détenu qui languissait d’amour pour elle et le fait que M me Gervais conseillait ses collègues n’ayant pas une formation de R.P.N. lorsqu’ils avaient à traiter avec des malades atteints de troubles psychiques.

M. Reniers fait valoir que rien ne repose sur le fait que la fonctionnaire a obtenu le titre de R.P.N. avant celui de R.N., puisque les deux formations ont une année en commun et que la seconde année de formation est complètement différente et séparée. Il s’appuie sur la décision rendue dans Bainbridge (dossier de la Commission 166-2-16132) et sur une décision rendue par l’arbitre Maurice W. Wright, c.r., dans le grief de M me Rosaleen Rowe opposant l’Ottawa Civic Hospital et l’Ontario Nurses’ Association. Dans l’affaire Rowe, la question en litige était de savoir si les cours de sage-femme suivis avant le cour d’infirmière constituaient une formation postscolaire. L’arbitre a fait droit au grief, bien que la fonction de sage-femme ne fût pas reconnue en Ontario, et il a accepté la formation sans égard à l’ordre dans lequel elle avait été suivie.

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Décision Page 8 Argumentation de l’employeur L’employeur fait valoir que la formation en sciences infirmières englobe de nombreux domaines : l’obstétrique, la pharmacologie, la gériatrie, la psychiatrie; la question n’est pas de savoir si la formation de R.P.N. ajoute une valeur au travail de la fonctionnaire, mais de savoir si elle justifie une indemnité spéciale. Il existe plusieurs types de formation qui pourraient aider une infirmière à mieux s’acquitter de ses fonctions p. ex. en service social en milieu correctionnel. Or ce qui compte c’est ce que les parties avaient à l’esprit lorsqu’elles ont rédigé l’alinéa B.

En Colombie-Britannique, il y a deux types de formation de premier échelon en sciences infirmières : celle menant au titre de R.P.N. (Registered Psychiatric Nurse) pour les postes de niveau NU-2 et celle menant au titre de R.N. (Registered Nurse) pour les postes de niveau NU-2 ou NU-3. La formation de R.P.N. n’offre pas de possibilités additionnelles à une R.N., mais c’est le cas dans la situation inverse. Dans certains domaines la R.N. n’est pas aussi qualifiée qu’une R.P.N., mais il n’existe aucun domaine l’on fasse appel spécifiquement à une R.P.N. Comme chacun le sait, le titre de R.P.N. n’est reconnu que dans la moitié du pays, c’est-à-dire à l’ouest de l’Ontario.

M e Newman soutient que nous sommes ici en présence d’une situation il n’y a pas de formation postscolaire. Les deux types de formation constituent une formation de premier échelon. Le cours de R.P.N. ne vient pas s’ajouter à la formation de R.N. Il ne s’agit pas d’une spécialité qui vient s’ajouter à la formation de R.N., a-t-on entendu. Il s’agit d’une orientation distincte. Nous ignorons ce qui se passe en Ontario ou au Québec, le titre de R.P.N. n’existe pas. Selon M e Newman, la formation de R.P.N. est reconnue comme une formation professionnelle de base, et non comme une formation qui vient s’ajouter à la formation de base; or l’indemnité qui est prévue vise une formation qui vient s’ajouter à celle de R.N. Si la fonctionnaire peut utiliser sa formation, « c’est tant mieux », mais cette formation n’est ni requise, ni reconnue. Ce n’est pas ce qui était recherché; il ne s’agit pas d’un cours spécifique en sciences infirmières. De même, un doctorat en psychologie ajouterait également à la valeur du travail, mais il ne s’agit pas d’une formation en sciences infirmières, bien qu’elle soit de niveau postscolaire. M e Newman souligne le fait que la durée des cours indique bien qu’il ne s’agit pas de formation poussée ou spécialisée en sciences infirmières, mais d’une formation de base.

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Décision Page 9 Une R.P.N., qui est également assujettie aux notes sur la rémunération, peut avoir suivi un cours de trois mois sur la schizophrénie ou un cours spécialisé en psychiatrie offert aux R.N., formation qui viendrait s’ajouter à sa formation de base; cela lui donnerait droit à l’indemnité.

Selon M e Newman, il n’y a aucune preuve indiquant que le fait de détenir les deux titres ait jamais donné lieu au versement de l’indemnité, sauf dans le cas de M me Janzen. En 1987, une décision a été rendue, mais il est possible que certains cas aient échappé à la vigilance des administrateurs. M. Mills a pris des mesures à l’égard de M me Janzen, mais il est possible que quelqu’un d’autre reçoive toujours l’indemnité. Cependant, ce n’est pas ce qui était prévu à l’origine et l’indemnité n’a pas été versée [en pareille situation] dans la fonction publique depuis 1987. Peut-être qu’il devrait y avoir une indemnité, mais il faudrait que cela fasse l’objet de négociations.

M e Newman fait une comparaison avec les études en droit, comparant le grade LL.L. au grade LL.B.; on ne peut affirmer qu’il s’agit d’une formation spécialisée ou postscolaire l’une par rapport à l’autre.

M e Newman maintient que l’affaire Ottawa Civic Hospital n’est pas pertinente en l’espèce. Il ne convient pas d’examiner d’autres conventions collectives ayant un libellé différent. Il s’appuie sur les observations suivantes faites par l’arbitre Roger Young dans Bainbridge (supra), page 18, dernier paragraphe : Un quelconque cours universitaire d’une année en « administration » ou « enseignement et surveillance » ne suffit pas à ce titre; il doit s’agir d’une formation ou d’une instruction postscolaires en sciences infirmières, que l’employée doit ensuite utiliser dans l’exercice de ses fonctions d’infirmière, aux fins du droit à l’indemnité.

Selon M e Newman, c’est à la table de négociation qu’il convient de traiter de cette question. Ce qui est en cause, ce n’est pas le simple fait d’ajouter de la valeur.

Réplique de la fonctionnaire M. Reniers répond à l’argumentation de l’employeur en affirmant que M. Young, dans Bainbridge (supra), ne s’est pas penché sur la situation qui nous intéresse, et qu’il n’y a aucune preuve comme quoi des éléments de l’historique des négociations

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Décision Page 10 pouvant découler de cette décision ou dont le présent arbitre aurait été saisi pourraient soutenir l’argument de l’employeur.

M. Reniers ajoute que la version française, telle qu’il la comprend, détruit entièrement l’argument de M e Newman. On ne laisse nullement entendre en français que les études doivent être postscolaires par rapport à la formation de R.N. M. Reniers signale que, dans un exemple avancé par M e Newman, une R.N. pourrait suivre un cours de trois mois en même temps qu’une infirmière en soins infirmiers psychiatriques (l’ayant fait après avoir obtenu le titre R.N.) par opposition à une infirmière qui suivrait le cours dans le cadre de sa formation initiale, et que cela constituerait une formation spécialisée en psychiatrie donnant droit à l’indemnité au titre du sous-alinéa Ba); et pourtant une R.P.N. qui suivrait le même cours ou d’autres cours en psychiatrie n’aurait pas droit à une indemnité si elle obtenait son R.N. par la suite. Tout cela, dit-il, est une question d’ordre ou de séquence, et il n’y a rien de prévu à l’alinéa B qui impose une séquence à cet égard, le seul objet recherché étant de refuser l’indemnité. La version anglaise n’est pas aussi claire que la version française. On doit interpréter la clause dans son contexte général.

Décision Un fonctionnaire doit satisfaire à de nombreuses conditions avant d’avoir droit aux indemnités de formation prévues au sous-alinéa a) à e) de l’alinéa B. Premièrement, la nature de la formation est cruciale et, deuxièmement, celle-ci doit être utilisée dans l’exercice des fonctions du poste.

Il est clair que l’employeur ne conteste plus le fait que la fonctionnaire utilisait effectivement sa formation en soins infirmiers psychiatriques dans l’exercice de ses fonctions. En effet, l’employeur a produit l’énoncé des qualités pour le poste de la fonctionnaire, lequel montre clairement que l’expérience en soins infirmiers psychiatriques est une exigence de l’emploi. Personne n’a contesté le témoignage de la fonctionnaire, à savoir qu’elle utilisait sa formation presque quotidiennement dans l’exercice de ses fonctions.

La question est de savoir si la formation de R.P.N. de la fonctionnaire constitue une « formation en sciences infirmières » ou une « instruction post-scolaire en sciences infirmières » au sens de l’alinéa B. L’employeur soutient que la formation doit non

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Décision Page 11 seulement être en sciences infirmières, mais qu’elle doit également être postscolaire. La fonctionnaire maintient pour sa part qu’elle peut être l’un ou l’autre.

L’esprit dans lequel les parties ont rédigé l’alinéa B devient très clair lorsqu’on lit la version française : Lorsque les éléments suivants de formation en sciences infirmières ou d’instruction post-scolaire en sciences infirmières sont utilisés dans l’exercice de leurs fonctions.

Dans la version française, le terme « post-scolaire » ne qualifie pas toute la formation en sciences infirmières mais figure dans le libellé à titre d’élément qui doit être pris en considération. L’arbitre Young, dans Bainbridge (dossier de la Commission 166-2-16132), devait interpréter ce qui constituait une formation en sciences infirmières; la fonctionnaire s’estimant lésée demandait qu’on lui verse une indemnité pour le baccalauréat en éducation qu’elle utilisait dans l’enseignement de cours sur la santé aux élèves de la troisième à la huitième année, en plus des cours prénataux, de premiers soins et de nutrition et autres ateliers qu’elle donnait dans la communauté elle travaillait. L’arbitre a conclu ce qui suit : Le préambule du paragraphe « B » restreint la portée de la clause, qui n’est pas une disposition « déterminative », permettant d’y introduire un certain nombre de matières sans rapport avec les sciences infirmières et de les assimiler à ces dernières. L’indemnité est offerte aux infirmières qui ont acquis une formation spécifique en matière de sciences infirmières se rapportant à leur travail et qu’elles mettront ensuite à profit en accomplissant précisément ces tâches rattachées à certains postes.

L’arbitre Young n’avait pas à déterminer si la formation en sciences infirmières devait être postscolaire par rapport au titre de R.N. de base, et je ne considère pas que son observation suivante a pour effet de trancher la question en litige ici : Il doit s’agir d’une formation ou d’une instruction postscolaires en sciences infirmières, que l’employée doit ensuite utiliser dans l’exercice de ses fonctions d’infirmière, aux fins du droit à l’indemnité. Ce qu’il devait déterminer, c’était de savoir si le baccalauréat en éducation constituait une formation en sciences infirmières, et il a conclu par la négative. En l’occurrence, la preuve montre que le certificat de R.P.N. et celui de R.N. sanctionnent deux orientations en « sciences infirmières » qui sont reconnues de la Colombie-Britannique jusqu’au Manitoba. Nous n’avons aucune preuve de la façon dont les infirmières sont formées à l’est du Manitoba, ni sur la façon dont le Québec ou Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 12 l’Ontario reconnaissent la formation des infirmières de l’Ouest; nous savons uniquement que le certificat de R.P.N. en soi ne permet pas à une infirmière d’être autorisée dans ces provinces.

Selon la preuve qui concerne la Colombie-Britannique, la formation de base en sciences infirmières peut suivre l’une ou l’autre de deux orientations : l’orientation générale, qui porte principalement sur les maladies physiques, mais qui contient également un module sur les maladies mentales, et l’orientation psychiatrique, qui consiste en une première année identique à celle du programme général, mais dont la deuxième année porte principalement sur les maladies mentales. La formation de la fonctionnaire en soins infirmiers psychiatriques consistait en une formation de 16 mois qui n’était pas considérée comme remplissant les conditions du certificat R.N. Comme la fonctionnaire a produit une preuve du titre qu’elle détient en soins infirmiers psychiatriques, elle a prouvé par conséquent qu’elle possède ce que, en Colombie-Britannique, on considère comme une année de formation distincte en psychiatrie en sus du certificat de R.N. Elle a donc droit à l’indemnité de formation prévue au sous-alinéa Bb), qui est de 475 $.

Pour ce qui est de l’argument selon lequel l’interprétation de la clause avancée par l’agent des relations de travail doit prévaloir d’ici à ce que les parties renégocient la convention, je dois le rejeter. Le libellé de la convention est clair lorsqu’on le lit dans les deux langues. Aucune preuve probante n’a été produite pour montrer qu’on a toujours appliqué cette interprétation. Manifestement, l’exemple de M me Janzen que l’on a privée de son indemnité peu de temps après la réponse au dernier palier illustre que la note de service de 1987 n’était pas largement connue par la partie patronale; de plus, aucune preuve n’a été avancée pour montrer que l’agent négociateur était au courant de cette note de service avant le grief de M me Gervais. Pour les motifs ci-dessus, il est fait droit au grief. J’ordonne donc à l’employeur de verser à M me Gervais, rétroactivement au 1 er janvier 1994, l’indemnité de formation demandée.

Evelyne Henry, présidente suppléante

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Décision Page 13 OTTAWA, le 9 septembre 1998. Traduction certifiée conforme

Serge Lareau

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