Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Licenciement (motif non disciplinaire) - Problème médical - Refus répété de travailler - Santé et sécurité au travail - Hypersensibilité allergique à l'environnement de travail - Obligation de composer avec la situation de la fonctionnaire - la fonctionnaire a commencé à travailler dans la fonction publique fédérale en 1971 - en 1985, elle a commencé à travailler dans l'immeuble Queen Square - en 1988, elle a découvert qu'elle avait des troubles de santé liés à l'environnement et elle a pris un congé d'invalidité de deux ans - à cause de son état de santé, la fonctionnaire a demandé d'occuper un travail saisonnier, les mois de décembre à mars constituant sa période hors saison - en 1995, la fonctionnaire a présenté de nombreuses plaintes liées à sa réaction allergique aux produits parfumés de soins personnels et de beauté utilisés par d'autres employés au travail - à la suggestion de l'employeur, la fonctionnaire a aidé à l'adoption d'une politique favorisant un lieu de travail exempt d'odeurs - à peu près à la même époque, on a commencé à rénover l'immeuble Queen Square - la fonctionnaire a donc été déplacée à divers étages de l'immeuble afin de l'aider à faire face à ses problèmes liés à l'environnement - même si chaque étage était muni d'un système de ventilation séparé, la fonctionnaire continuait d'éprouver des difficultés - à plusieurs occasions, la fonctionnaire a rejeté les propositions de l'employeur de la déplacer à un autre immeuble fédéral - à plusieurs occasions également, l'employeur a offert à la fonctionnaire de télétravailler, mais elle a rejeté la suggestion chaque fois - le 7 septembre 1995, le médecin de la fonctionnaire a écrit à l'employeur à propos de la détérioration de l'état de santé de la fonctionnaire - le 8 septembre, la fonctionnaire a pris un congé de maladie d'une durée indéterminée et elle n'est pas retournée au travail du reste de la saison - en prévision du retour au travail de la fonctionnaire au printemps de 1996, l'employeur a envoyé à tous les employés une note de service datée du 29 mars 1996 les invitant à s'abstenir d'utiliser des produits parfumés les jours de travail à cause des répercussions éventuelles que les produits parfumés pouvaient avoir sur leurs collègues - à la suggestion de la fonctionnaire, l'employeur lui a également acheté un purificateur d'air et un respirateur - le 31 juillet 1996, la fonctionnaire a informé l'employeur qu'elle retirait ses services aux termes de la partie II du Code canadien du travail - à la suite d'une enquête, l'agent de sécurité a conclu qu'il n'existait aucun danger - à la demande de la fonctionnaire, l'agent de sécurité a renvoyé sa décision à la Commission qui l'a confirmée [(160-2-52) (1998) 33 Décisions de la CRTFP 6] - la fonctionnaire est retournée au travail le 1er octobre et, après y être demeurée pendant une brève période, elle a de nouveau retiré ses services conformément aux dispositions du Code - la fonctionnaire a de nouveau rejeté la proposition de l'employeur de télétravailler - l'agent de sécurité a maintenu le refus de travailler de la fonctionnaire aux motifs qu'elle souffrait de troubles de santé qui faisaient que le lieu de travail était dangereux pour elle - toutefois, l'agent de sécurité régional a révoqué cette décision - sur les directives de l'employeur, la fonctionnaire est retournée au travail le 21 avril 1997 et est demeurée à son poste pendant l'avant-midi - toutefois, elle a de nouveau retiré ses services en vertu des dispositions du Code - l'employeur l'a immédiatement licenciée pour le motif que son état de santé l'empêchait d'exécuter les tâches de son poste et qu'il était peu probable qu'elle puisse reprendre ses fonctions dans un avenir prévisible - l'arbitre a mentionné que la fonctionnaire comptait quelque 25 années de service, qu'elle avait un dossier disciplinaire vierge et avait eu de bonnes évaluations de rendement - malheureusement, elle souffrait d'une très grave intolérance au milieu qui l'empêchait de travailler à l'immeuble Queen Square - les deux parties ont reconnu que de vains efforts avaient été faits pour trouver d'autres lieux de travail - même s'il incombe à l'employeur de composer avec la situation d'une employée, celle-ci a également l'obligation d'aider à en arriver à un compromis convenable - l'arbitre a conclu que la fonctionnaire avait manqué à cette obligation quand elle a refusé d'examiner la possibilité de télétravailler - puisque le télétravail ne pouvait lui être imposé, l'employeur n'avait eu d'autre choix que de licencier la fonctionnaire. Grief rejeté. Décision citée :Central Okanagan School District No. 23 c. Renaud, [1992] 2 R.C.S. 970.

Contenu de la décision

Dossier : 166-2-28535 Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE CHARLOTTE HUTCHINSON fonctionnaire s’estimant lésée et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Environnement Canada)

employeur Devant : Joseph W. Potter, président suppléant Pour la fonctionnaire s’estimant lésée : Mike Tynes, Alliance de la Fonction publique du Canada Pour l’employeur : Harvey A. Newman, avocat Affaire entendue à Dartmouth (Nouvelle-Écosse), du 2 au 4 février 1999.

DÉCISION On m’a demandé d’arbitrer le grief de M me Charlotte Hutchinson, une fonctionnaire d’Environnement Canada qui conteste son licenciement. La lettre de licenciement, datée du 21 avril 1997, est ainsi rédigée (pièce E-1, onglet 2) :

[Traduction] La présente fait suite à ma lettre du 17 avril dans laquelle je vous ai avisée que vous deviez retourner au travail à 8 h 00 le 21 avril.

Bien que vous soyez retournée au travail comme vous deviez le faire, pour la troisième fois vous avez retiré vos services en invoquant les dispositions du Code canadien du travail. Cela s’est produit vers 12 h 05, le 21 avril, soit environ quatre heures après être retournée au travail.

La nature de votre emploi nécessite que vous soyez présente à divers emplacements et types d’endroits notamment les bureaux de l’immeuble Queen Square, les installations d’entreprises, les entrepôts d’Environnement Canada, des motels et hôtels ainsi que d’autres logements pendant que vous voyagez, etc. Ces dernières années, vous avez maintes fois indiqué que vous ne pouviez pas travailler à Queen Square, voire à de nombreux autres endroits également, à cause de votre état de santé. Nous avons tenté de composer avec vos besoins personnels par divers moyens, toutefois, aucun de ces efforts ne s’est révélé fructueux.

Dans la lettre susmentionnée je vous ai également informée de la possibilité de votre licenciement en vertu des dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques, alinéa 11 (2)g). D’après les preuves que nous avons en main, il ne semble pas que vous soyez capable d’exercer les fonctions de votre poste, ni que vous pourrez reprendre ces fonctions dans un avenir prévisible.

Je regrette de devoir maintenant confirmer qu’en vertu du pouvoir qui m’est délégué et conformément aux dispositions susmentionnées de la Loi sur la gestion des finances publiques [copie d’extraits ci-jointe] je vous licencie par les présentes de votre emploi dans la fonction publique du Canada. Vous cesserez d’être une fonctionnaire à la fermeture des bureaux (c.-à-d. 16 h) le 22 avril 1997.

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Décision Page 2 Conformément à votre convention collective [convention cadre de l’AFPC, article M-38], vous avez le droit de présenter un grief concernant cette décision, auquel cas vous devez le faire au plus tard le 25 e jour après avoir reçu le présent avis. Veuillez agréer, Madame, l’expression de nos sentiments les meilleurs.

Garth Bangay Directeur général Région de l’Atlantique Environnement Canada

Avec l’assentiment des parties, un cahier de pièces (pièce E-1) renfermant quelque 125 onglets de documentation pertinente a été admis en preuve. Afin de faciliter le renvoi à ces pièces, chacune sera simplement désignée par « onglet » suivi de la lettre ou du nombre approprié.

Compétence Au début de l’audience, M. Tynes a soulevé une question de compétence. La lettre de licenciement, a-t-il signalé, est signée par le directeur général de la région, mais le document établissant la délégation des pouvoirs au Ministère (pièce G-1) ne précise pas que ce pouvoir a été délégué au niveau inférieur à celui de sous-ministre. Plus précisément, M. Tynes affirme qu’il s’agit ici d’un licenciement non disciplinaire et que la pièce G-1 ne délègue aucun pouvoir en matière de licenciement non disciplinaire. Il y a, à la page 8 de la pièce G-1, une rubrique intitulée « Discipline »; et il est prévu une délégation de pouvoir en cas de congédiement disciplinaire, mais comme il s’agit ici d’un licenciement non disciplinaire, le document de délégation des pouvoirs ne prévoit pas la délégation du pouvoir incombant au sous-ministre en pareil cas. Par conséquent, de conclure M. Tynes, je n’ai pas compétence pour instruire cette affaire.

M e Newman a présenté une réplique à trois volets. Premièrement, si je devais accepter cette proposition, la fonctionnaire n’aurait aucun autre recours que les tribunaux; la décision de son licenciement serait maintenue.

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Décision Page 3 Deuxièmement, le grief est passé par tous les paliers appropriés de la procédure de règlement des griefs, y compris le niveau de sous-ministre. Si la délégation nécessaire n’existait pas à l’époque, la situation a été rectifiée par la réponse du sous-ministre au dernier palier.

Enfin, le document de délégation proprement dit prévoit, en fait, la délégation du pouvoir nécessaire au directeur général de la région. À la page 9 de la pièce G-1, il est précisé que les licenciements ont été délégués. Or il s’agit ici d’un licenciement. Le fait qu’il soit mentionné sous la rubrique « Discipline » n’annule pas cette délégation.

M e Newman affirme par ailleurs qu’il croit savoir que le sous-ministre a autorisé verbalement le directeur général de la région à effectuer le licenciement et que, si nécessaire, il présenterait la preuve à cet effet à une date ultérieure.

À l’audience, j’ai fait savoir que je me prononcerais plus tard sur cette question et que j’entendrais d’abord la preuve. Voici maintenant ma décision sur la question de compétence.

La compétence d’un arbitre est fondée sur les dispositions de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP). Le sous-alinéa 92(1)b)(ii) est ainsi libellé : 92.(1) Après l’avoir porté jusqu’au dernier palier de la procédure applicable sans avoir obtenu satisfaction, un fonctionnaire peut renvoyer à l’arbitrage tout grief portant sur

a) [...] b) dans le cas d’un fonctionnaire d’un ministère ou secteur de l’administration publique fédérale spécifié à la partie I de l’annexe I ou désigné par décret pris au titre du paragraphe (4), [...] soit un licenciement ou une rétrogradation visé aux alinéas 11(2)f) ou g) de la Loi sur la gestion des finances publiques; [...]

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Décision Page 4 L’article 93 est ainsi formulé : 93. La Commission désigne, en tant que de besoin, les commissaires pour entendre et juger les griefs renvoyés à l’arbitrage en application de la présente loi.

Il est clair que l’objet du grief est visé par le sous-alinéa 92(1)b)(ii) et que le grief a été renvoyé à bon droit à l’arbitrage. En fait, ce n’est pas l’auteur de la lettre de licenciement qui détermine la compétence, ce sont plutôt les dispositions de la LRTFP.

Le document de délégation comme tel ne précise pas qu’on a délégué au directeur général de la région le pouvoir de licenciement. Le fait qu’il existe une rubrique « Discipline » ne modifie pas, à mon avis, le fait clair que, en matière de licenciement (ce qui est le cas ici), le sous-ministre a délégué son pouvoir au directeur général de la région.

Je conclus que j’ai compétence pour instruire ce grief et pour le trancher sur le fond.

Preuve La fonctionnaire s’estimant lésée est entrée dans la fonction publique fédérale en 1971 et elle est passée à Environnement Canada en 1985 à titre de directrice régionale du personnel (PE-3). Elle travaillait dans un immeuble appelé Queen Square. M me Hutchinson a affirmé qu’après avoir été en poste pendant un an elle s’est rendu compte qu’elle était atteinte de quelque chose de grave et, en 1987, elle a pris congé. En 1988, elle a découvert qu’elle était atteinte de troubles de santé liés à l’environnement et elle a été en congé d’invalidité pendant deux ans.

Sa demande de prestations d’invalidité (onglet 3) ne mentionne pas de troubles de santé liés à l’environnement, mais précise plutôt la nature de la maladie comme étant l’« épuisement professionnel ». M m e Hutchinson a affirmé que son propre médecin lui avait dit qu’elle réagissait à l’immeuble elle travaillait, et on l’a adressée à des spécialistes à Toronto et à Montréal. Sa demande de prestations d’invalidité de longue durée a été approuvée (onglet 5) et elle a été absente de 1988 à 1990.

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Décision Page 5 En préparation à son retour au travail, Santé Canada a fait évaluer son aptitude au travail. On peut lire ce qui suit dans l’expertise présentée (onglet 8) : [Traduction] […] Nous estimons qu’elle répond aux critères de la classe « A » apte à retourner au travail à titre d’essai en octobre 1990, mais il est conseillé qu’elle évite le conditionnement de l’air, la fumée de tabac et les odeurs chimiques dans la mesure du possible.

En vue de l’aider à réintégrer le travail, le Ministère a muté M me Hutchinson à un poste de technicienne en génie de l’environnement (EG-ESS-4), et a assuré son recyclage ainsi que sa protection salariale au niveau PE-3 (onglets 9, 10 et 11). Son bureau était situé dans l’immeuble Queen Square et ses fonctions comportaient des voyages à l’extérieur de la ville et des séjours dans les hôtels.

Entre le moment la fonctionnaire est retournée au travail en 1990 et le mois de mars 1993, celle-ci a obtenu des évaluations de rendement très positives (onglet T). Il n’y a aucune mention d’une maladie due à l’environnement, mais néanmoins en 1993 la fonctionnaire a demandé de passer d’un emploi à temps plein à du travail saisonnier. Elle a dit faire cette demande pour des raisons de santé. Les mois d’hiver, a-t-elle signalé, n’étaient pas particulièrement occupés; par conséquent, l’employeur a acquiescé à sa demande de travail saisonnier, les mois de décembre à mars constituant la période normale hors saison.

L’évaluation de rendement de 1993-1994 est également très positive, et il n’y est fait mention d’aucun trouble de santé lié à l’environnement.

La première mention écrite d’un trouble lié à l’environnement qui a été produite en preuve est une lettre datée du 25 mai 1995 (onglet 13) que la fonctionnaire a adressée à son superviseur. De plus, il y est fait mention dans le rapport d’évaluation du rendement de la fonctionnaire pour 1994-1995, rapport dans lequel, à la page 2 M me Hutchinson écrit ce qui suit (onglet T) : [Traduction] […] je suis très frustrée depuis 5 ½ semaines (sans compter que j’ai été malade à de nombreuses occasions) à cause du

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Décision Page 6 fait que la direction n’a pas su me fournir un milieu de travail sans danger [...]

Dans les commentaires du superviseur qui suivent, ont peut notamment lire ce qui suit : [Traduction] […] Charlotte a de graves allergies qui sont déclenchées par les produits parfumés, etc. [...]

On a demandé à la fonctionnaire d’aider à la promulgation d’une politique favorisant un lieu de travail exempt d’odeurs, et celle-ci a aidé à l’élaboration d’un sondage sur les odeurs au travail mené auprès des employés par l’entremise du comité de la santé et la sécurité au travail.

En juin 1995, le directeur général de la région, M. Garth Bangay, a été mis au courant de la question des odeurs au travail et du fait que cela causait des problèmes à M me Hutchinson. De plus, en mai et juin de cette année-là, la fonctionnaire a déposé de nombreux « Rapports d’enquête de situation comportant des risques » faisant état d’un milieu de travail « toxique » (onglet 14). Le 21 juin 1995, la fonctionnaire a écrit à son superviseur pour lui expliquer en détail les troubles qu’elle éprouvait au travail (onglet 16). Elle a écrit : [Traduction] […] Au travail, les irritants qui m’affectent le plus sont les produits parfumés de soins personnels et de beauté, p. ex. les parfums, les désodorisants parfumés, les adoucisseurs de tissus parfumés utilisés par d’autres personnes [...]

La fonctionnaire a témoigné que, à peu près à la même époque, on a commencé à rénover l’immeuble Queen Square. On l’a donc déplacée à divers étages de l’immeuble afin de l’aider à faire face à ses problèmes liés à l’environnement. En dépit du fait que chaque étage était muni d’un système de ventilation séparé, M m e Hutchinson éprouvait toujours des difficultés. Le 24 mai 1995, la direction lui a dit qu’on allait la déplacer à un autre immeuble fédéral (pièce G-2) afin d’aider à atténuer le problème, mais la fonctionnaire a rejeté cette proposition le 25 mai (voir l’onglet 13). La fonctionnaire a témoigné qu’elle s’était entendue à l’amiable avec son

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Décision Page 7 superviseur afin d’apporter son travail chez elle lorsqu’elle éprouvait des troubles de santé liés à l’environnement.

Cependant, en réponse aux rapports d’enquête de situation comportant des risques que M me Hutchinson avait déposés, le 11 juillet 1995 son superviseur lui a écrit une note de service (onglet 17) pour lui signaler que les bureaux situés dans un autre immeuble fédéral (Bedford Towers) : [Traduction] […] sont exempts d’odeurs et bénéficient du remplacement total de l’air par un air neuf d’appoint et que les gens qui y travaillent, dont certains sont très sensibles aux produits parfumés, n’ont éprouvé aucun problème.

On a demandé à la fonctionnaire d’aller travailler dans ces nouveaux locaux le 12 juillet 1995. Elle s’y est présentée et elle est demeurée sur place environ deux heures avant de se rendre compte que les tapis avaient récemment été posés et que cela entraînait chez elle une réaction négative. Elle est retournée à Queen Square.

Le 3 août, le superviseur de M me Hutchinson a écrit à celle-ci une note de service exposant les quatre options qui s’offraient en matière de locaux (onglet 19). Trois des options consistaient en des étages différents de l’immeuble Queen Square et la quatrième présentait une possibilité dans un autre immeuble. La direction concluait que la meilleure option était un étage dans l’immeuble Queen Square et la note de service précise que la fonctionnaire a trouvé cette option convenable.

La note de service soulevait en outre la question du télétravail et le superviseur de M me Hutchinson a fait remarquer que la direction était prête à examiner ce genre de formule, pourvu qu’elle satisfasse aux nécessité du service. Enfin, la note de service précise que la direction veut faire examiner la fonctionnaire par un médecin de Santé et Bien-être Canada.

Le 8 août (onglet 20), M me Hutchinson a écrit qu’elle n’envisageait pas le télétravail à long terme et que, pour être franche, elle n’aimait pas l’idée pour diverses raisons.

Le 23 août 1995, le Ministère a écrit à Santé et Bien-être Canada pour expliquer les difficultés qu’éprouvait M me Hutchinson et pour demander qu’elle subisse une Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 8 expertise médicale (onglet 22). La fonctionnaire a elle aussi écrit à son propre médecin afin de lui demander une expertise (onglet 21).

Le 7 septembre 1995 (onglet 23), le médecin de M m e Hutchinson, le D r J. Patricia Beresford, a écrit au Ministère à propos de l’état de santé de la fonctionnaire, qui se détériorait. Elle a écrit notamment ce qui suit : [Traduction] Depuis quelques mois, Charlotte m’a consultée à propos des symptômes de plus en plus graves qu’elle éprouvait. Les principaux éléments déclencheurs, semble-t-il, sont les forts parfums auxquels elle est exposée de façon récurrente, ainsi que le fait d’être exposée à des secteurs rénovés l’on a installé de nouveaux tapis et utilisé des peintures et colles. De plus, ses troubles ont été aggravés par ses séjours dans les hôtels les chambres contenaient des résidus de fumée de cigarette, de traitements à pesticide, etc. Comme Charlotte vous l’a expliqué dans ses lettres, elle est devenue de plus en plus malade et souffre notamment des symptômes suivants : rhinite, obstruction du nez et de la gorge, malaises à la poitrine, (essoufflement), esprit embrumé, incapacité de penser et fatigue croissante nécessitant le repos au lit.

Le directeur général de la région a témoigné que, lorsque cette lettre a été portée à sa connaissance, il s’est rendu compte qu’il s’agissait d’un problème différent, plus grave que celui qui avait été mentionné par le passé. Le fait pour la fonctionnaire d’avoir l’« esprit embrumé » pourrait l’amener à prendre des décisions contraires à ses propres intérêts et à ceux des autres, et la fonctionnaire pourrait donc présenter un danger pour elle-même et pour d’autres employés.

Le 8 septembre, la fonctionnaire a téléphoné à son superviseur pour lui dire qu’elle partait en congé de maladie pour une période indéfinie (onglet 24). Elle n’est pas retournée au travail pour le reste de la saison de 1995.

Le 17 novembre 1995, le D r Karen MacDonald, de Santé et Bien-être Canada, a écrit au superviseur de M me Hutchinson pour lui dire que la fonctionnaire serait apte à retourner au travail au printemps de 1996, mais avec certaines limitations. La lettre mentionnait entre autres que l’employeur voudrait peut-être songer à instaurer une politique favorisant la création d’un milieu de travail exempt d’odeurs (onglet 29).

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Décision Page 9 En préparation au retour au travail de la fonctionnaire, le 29 mars 1996 la direction a envoyé à tout le personnel une note de service (onglet 30) demandant à chacun et à chacune de faire particulièrement attention aux répercussions éventuelles que les produits parfumés pouvaient avoir sur leurs collègues et les invitant à songer sérieusement à ne pas utiliser de produits parfumés.

Avant son retour au travail, la fonctionnaire a rencontré son superviseur et il a été convenu que le Ministère achèterait un purificateur d’air et un respirateur pour M me Hutchinson (onglet 32). À la fin de sa première journée de travail (le 22 mai 1996), M me H utchinson a écrit à son superviseur pour lui dire comment la journée s’était passée (onglet 33). Elle s’est dite très heureuse de retrouver ses collègues de travail, mais elle a ajouté avoir souffert énormément de l’air à son étage. Elle a en outre indiqué que diverses odeurs personnelles lui avaient causé des ennuis au travail.

Le 4 juin 1996, M me Hutchinson a écrit une autre note de service à son superviseur et a suggéré que l’employeur pourrait lui aménager un bureau provisoire ne présentant pas de risques dans les locaux récemment laissés vacants par le personnel de laboratoire, et ce, pendant que la direction et les Ressources humaines continuaient de songer à ce qu’ils pourraient faire à son sujet et au sujet des autres personnes comme elle (onglet 35).

Le 11 juin 1996 (onglet 39), son superviseur a répondu en décrivant les efforts qui avaient été déployés jusque-là afin de trouver une solution aux troubles de santé liés à l’environnement qu’éprouvait M m e Hutchinson. La note de service disait en outre ce qui suit : [Traduction] […] vous nous avez informé que vous alliez travailler à la maison plutôt qu’à Queen Square. Selon le Ministère, cela constitue du télétravail. Il revient à la direction de décider quand et dans quelles circonstances le télétravail est autorisé. Jusqu’à présent, vous avez toujours indiqué que vous n’étiez pas intéressée à travailler à la maison. Si le télétravail vous intéresse maintenant, la direction est disposée à examiner votre demande. D’ici à ce que nous ayons reçu et approuvé votre demande, le télétravail n’est pas autorisé pour vous.

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Décision Page 10 M me Hutchinson a témoigné qu’elle n’a jamais présenté de demande de télétravail, et elle a écrit à son superviseur pour lui dire que cela ne l’intéressait pas (onglets 40 et 43). Son lieu de travail a continué d’être l’immeuble Queen Square, mais la fonctionnaire a dit que la direction examinait d’autres endroits provisoires.

Le 21 juin 1996, le superviseur de M m e Hutchinson a écrit à celle-ci pour lui dire qu’on lui avait trouvé un autre endroit (onglet 44). Le local en question se trouvait sur le chemin Rocky Lake et la fonctionnaire a dit qu’elle a essayé d’y travailler le 25 juin et qu’elle est repartie une heure plus tard. Elle a par la suite écrit que la qualité de l’air n’y était pas convenable (onglet 48). Dans cette même lettre, elle a en outre retiré toute offre qu’elle avait pu faire en vue de travailler de chez elle.

M. Bangay a témoigné qu’à la fin de juillet le Ministère était à court de locaux de travail à proposer à la fonctionnaire (voir l’onglet W pour un résumé des locaux qui ont été essayés). À la même époque, M m e Hutchinson a proposé un immeuble à bureaux situé au 12 de la rue Queen, de l’autre côté de la rue de Queen Square. Il ne s’agissait pas d’un immeuble appartenant à l’administration fédérale, mais selon M me Hutchinson il répondait à ses besoins, ce qui incluait la possibilité de pouvoir ouvrir une fenêtre.

M. Bangay a témoigné qu’à son avis il s’agissait d’une option terrible. Il n’avait aucun contrôle sur le gens qui y travaillaient et le local proposé par la fonctionnaire se trouvait au rez-de-chaussée et était exposé aux gaz d’échappement de voiture en raison de la proximité de sa fenêtre ouverte. Ce n’était pas un lieu de travail exempt d’odeurs et il était fort possible que des gens y fument. Il a rejeté cette suggestion.

Le 31 juillet 1996, l’employeur a écrit à M proposer les trois solutions suivantes : travailler à l’immeuble Queen Square; partir en congé de maladie; ou retirer ses services si elle estimait qu’il existait un danger. La lettre précisait en outre que la direction accueillerait favorablement une demande de télétravail.

La fonctionnaire a répondu le jour même (onglet 72) et informé son superviseur qu’elle exerçait son droit de retirer ses services. Elle a témoigné avoir choisi cette option parce qu’elle ne l’avait pas jusqu’alors explorée. Elle voulait savoir cela la mènerait. L’affaire a fait l’objet d’une enquête menée par Travail Canada et l’agent de

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m e Hutchinson (onglet 71) pour lui

Décision Page 11 sécurité l’a informée qu’il n’existait aucun danger (voir l’onglet 75). La fonctionnaire a demandé à l’agent de sécurité de renvoyer sa décision à la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) et l’affaire a été tranchée par le commissaire J. Barry Turner (dossier de la Commission 165-2-113). La décision, datée du 23 septembre 1996, a confirmé les conclusions de l’agent de sécurité. Le 27 septembre, la fonctionnaire a reçu instruction de se présenter à l’immeuble Queen Square le 1 er octobre 1996 afin d’y reprendre ses fonctions (onglet 85). Avant de retourner au travail, la fonctionnaire a écrit à M me Heather J. Hay-Scott, une agente des relations de travail du Ministère travaillant à l’administration centrale, afin de lui expliquer sa situation (onglet 86). À la dernière page de cette lettre, M me Hutchinson a écrit : [Traduction] […]

Et pourriez-vous également vous occuper du refus de la direction d’examiner ma demande récente de télétravail depuis le 12 de la rue Queen à mes frais[...]

Le 30 septembre 1996, on a répondu notamment ce qui suit à M me Hutchinson (onglet 87) : [Traduction] En ce qui concerne le télétravail, dans les circonstances actuelles la direction ne peut considérer cette option pour le moment [...]

[…] Toutefois, cela ne signifie pas que la direction n’est pas disposée à reconsidérer le télétravail à un autre moment dans l’avenir [...]

M. Bangay a témoigné que ce refus avait trait à la demande de M de télétravailler au 12 de la rue Queen, et qu’il considérait pour sa part le télétravail comme signifiant que l’employée travaillait depuis son domicile.

La fonctionnaire est retournée au travail le 1 faire, et après y être demeurée pendant une brève période, elle a de nouveau retiré ses

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me Hutchinson

er octobre, comme elle devait le

Décision Page 12 services conformément aux dispositions du Code canadien du travail. Elle a informé son superviseur par écrit qu’elle retirait ses services (onglet 88). Elle a témoigné avoir de nouveau choisi cette voie parce qu’elle avait appris un certain nombre de choses de son premier retrait et qu’elle pensait que cela l’aiderait à justifier ce nouveau retrait.

M me Hutchinson a témoigné que, avant qu’une autre enquête officielle ne soit menée par un agent de sécurité, elle a rencontré les responsables du Ministère pour voir s’il était possible de trouver une solution. Le 2 octobre 1996, l’agent de sécurité ministériel lui a écrit et dit (onglet 90) : [Traduction] […] la direction est disposée à examiner une proposition de télétravail si vous la lui soumettez [...]

Le 25 octobre 1996, la fonctionnaire a écrit à son superviseur pour lui demander de veiller à ce que, exception faite des urgences, on ne lui demande pas de travailler à la maison (onglet 92).

Comme ce second refus de travailler est survenu peu de temps avant la fin de la saison d’emploi normal de la fonctionnaire, celle-ci a témoigné s’être absentée du travail jusqu’en avril 1997.

Le 12 novembre 1996, l’agent de sécurité a rédigé une décision concernant le refus de travailler de M m e Hutchinson (onglet 94). Il a conclu ce qui suit : [Traduction] […] il existe au travail une situation qui constitue un danger pour Charlotte Hutchinson lorsqu’elle est au travail :

Charlotte Hutchinson souffre de troubles de santé qui font que le lieu de travail est dangereux pour elle.

[…] Le 18 novembre 1996, M. Bangay a écrit à l’agent de sécurité et demandé l’examen de la décision (onglet 95). La direction a avisé M me Hutchinson que, jusqu’à ce que la décision de l’agent de sécurité soit examinée, elle n’aurait pas à se présenter à son lieu de travail (onglet 96).

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Décision Page 13 Le 17 février 1997, la fonctionnaire a écrit au Ministère concernant son retour prévu au travail le 1 er avril à la suite du congé saisonnier (onglet 99). Elle a signalé que la décision de l’agent de sécurité était en cours d’examen, mais qu’elle ne pouvait pas travailler à l’immeuble Queen Square parce que ce dernier la rendait malade. Elle a en outre fait mention de nombreux ennuis liés à l’environnement qu’elle éprouvait dans son travail lorsqu’elle voyageait à d’autres emplacements.

M. Bangay a témoigné que cette lettre l’avait troublée parce qu’elle soulevait d’autres problèmes que la fonctionnaire disait avoir et dont il n’était pas au courant jusque-là. À son avis, la lettre indiquait que ses troubles de santé s’aggravaient. Il a en outre signalé que dans sa lettre la fonctionnaire se disait prête à accepter une retraite pour raisons médicales. M. Bangay a témoigné que, bien qu’il ne s’opposât pas à cette suggestion, il incombait à la fonctionnaire d’en faire la demande, et que c’est Santé Canada qui l’autoriserait. La fonctionnaire et M. Bangay ont tous les deux témoigné qu’aucune demande en ce sens n’avait été faite.

Le 27 mars 1997, l’employeur a envoyé à M que l’emploi saisonnier devait commencer le 1 décision de l’agent de sécurité n’avait pas encore été fait. Jusqu’à ce que la décision soit rendue, la fonctionnaire devait demeurer à son domicile (onglet B). La fonctionnaire a répondu en disant que le Ministère ne pouvait l’obliger à travailler depuis son domicile (onglet C).

Le 16 avril 1997, l’agent de sécurité régional a annulé la décision qu’avait rendue l’agent de sécurité (onglet D).

Le 17 avril 1997, M. Bangay a écrit à M de se présenter au travail à l’immeuble Queen Square le 21 avril (onglet E). Si elle ne s’y présentait pas, lui a-t-on dit, elle risquait d’être licenciée.

La fonctionnaire a témoigné s’être rendu au travail comme elle le devait le 21 avril et qu’elle est demeurée à son poste pendant l’avant-midi. Elle est devenue malade pour diverses raisons liées à l’environnement et elle a quitté les lieux après avoir rédigé une note à l’intention de son superviseur (onglet F). Elle a affirmé qu’elle retirait de nouveau ses services en vertu des dispositions du Code canadien du travail.

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me Hutchinson une lettre lui disant er avril, mais que l’examen de la

me Hutchinson et lui a donné instruction

Décision Page 14 La fonctionnaire a témoigné avoir pensé à la lettre de M. Bangay en date du 10 avril lorsqu’elle a retiré ses services, mais qu’elle estimait qu’elle ne s’appliquait pas à ces circonstances étant donné qu’elle s’était en fait présentée au travail, puis qu’elle avait retiré ses services par la suite. Elle a en outre affirmé qu’elle croyait que ce retrait produirait des résultats différents des autres deux retraits antérieurs puisqu’il était maintenant possible de faire venir un médecin sur place afin qu’il observe le développement des symptômes.

Quoi qu’il en soit, la fonctionnaire a déclaré qu’elle avait été licenciée à cause de ses actions par une lettre (onglet G) datée du 21 avril 1997. Elle a écrit à M. Bangay le lendemain (onglet H) pour lui demander d’annuler la décision, puisqu’elle était prête, désireuse et capable de travailler dans un bureau ne présentant pas de risques pour sa santé. M. Bangay a répondu (onglet I) en disant que la décision ne serait pas modifiée.

M m e Hutchinson a déposé une plainte auprès de la CRTFP en vertu de l’article 133 du Code canadien du travail (onglet N), alléguant que l’employeur avait pris à son endroit des représailles parce qu’elle avait retiré ses services, ce qu’elle avait le droit de faire. Sa plainte a été rejetée (dossier de la Commission 160-2-52).

M me Hutchinson a présenté un grief contestant son licenciement et c’est de ce grief dont il est question en l’espèce.

Arguments Argumentation de l’employeur M e Newman soutient que, si M m e Hutchinson comptait de nombreuses années de service, elle éprouvait toutefois des troubles de santé depuis nombre d’années. M e Newman signale que l’employeur ne conteste aucun des symptômes physiques de la fonctionnaire et précise en outre que la situation a en fait atteint un point critique à la fin de 1980 lorsque la fonctionnaire est partie en congé d’invalidité pour deux ans. En dépit du fait qu’il n’a pas été mentionné à l’époque que le motif de l’absence était une maladie due à l’environnement, M e Newman affirme ne pas contester que tel était le cas.

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Décision Page 15 L’employeur a composé avec les besoins de la fonctionnaire en la mutant à un emploi moins stressant et en maintenant son salaire. Les évaluations de celle-ci indiquent qu’elle a eu un bon rendement de 1990 à 1995. C’est en 1995 que les problèmes de la fonctionnaire se sont aggravés. Il y avait des rénovations en cours à l’immeuble Queen Square et la fonctionnaire a donc être déplacée à plusieurs reprises à des étages différents. De plus, elle a déposé de nombreux rapports signalant des situations présentant des risques et la direction a répondu en élaborant une politique créant un milieu de travail libre d’odeurs et en faisant faire des études de la qualité de l’air. La direction a offert d’autres lieux de travail, mais des problèmes ont surgi à chaque endroit. Comme M m e Hutchinson éprouvait de la difficulté à travailler dans un immeuble hermétique, M. Bangay n’était pas optimiste quant à l’éventualité de lui trouver un endroit satisfaisant.

Bien que la direction n’ait pas initialement été réceptive à l’idée du télétravail, elle a toutefois indiqué qu’elle était disposée à l’essayer. La fonctionnaire n’a jamais présenté de demande en ce sens et c’est elle qui semble avoir rejeté le principe de travailler à la maison.

En septembre 1995, la fonctionnaire est partie en congé de maladie pour une période indéfinie et un rapport sur son aptitude au travail a été rédigé à son sujet. Le rapport (onglet 29) disait que la fonctionnaire était apte à travailler, mais avec des limitations. Après avoir pris connaissance du rapport, M. Bangay a eu des préoccupations à propos de la sécurité de la fonctionnaire, ainsi que de celle des personnes avec qui elle travaillait, étant donné que le médecin disait que la fonctionnaire avait l’« esprit embrumé ». M me Hutchinson est retournée au travail en mai 1996 et il y a eu immédiatement des problèmes. D’autres lieux de travail ont de nouveau été mis à l’essai, mais sans succès.

Le 31 juillet, M m e Hutchinson a retiré ses services à cause de ses préoccupations concernant la sécurité du lieu de travail. Un agent de sécurité a fait enquête et a conclu qu’il n’y avait pas de danger, et sa décision a été corroborée par la CRTFP.

M me Hutchinson a reçu instruction de retourner au travail, ce qu’elle a fait le 1 er octobre; elle est restée au travail pendant environ une heure, puis elle a de nouveau retiré ses services pour des raisons qui, a-t-elle dit, étaient liées à sa sécurité. L’agent

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Décision Page 16 de sécurité de Travail Canada a conclu que, bien que le lieu de travail ne présentât aucun danger, M me Hutchinson ne pouvait y travailler parce qu’il présentait des risques pour elle. L’employeur a interjeté appel de cette décision, qui a finalement été annulée.

En septembre 1996, la fonctionnaire a écrit à l’administration centrale et a dit que l’employeur l’empêchait de télétravailler. M e Newman a précisé que cette décision avait trait à la proposition de la fonctionnaire de travailler au 12 de la rue Queen, un immeuble non gouvernemental. Puisque la réponse (onglet 87) rejetait cette option, M m e Hutchinson aurait savoir, à ce moment-là à tout le moins, que le fait de travailler au 12 de la rue Queen n’était pas jugé acceptable par l’employeur. Néanmoins, elle a continué de demander cette option. M. Bangay n’avait aucune raison de croire que la suggestion de la fonctionnaire de travailler au 12 de la rue Queen donnerait en fait les résultats escomptés. Il s’agissait d’un immeuble n’appartenant pas à l’État et présentant des dangers du point de vue de la sécurité et de la santé, sans compter les problèmes liés à l’assurance.

En 1997, on a demandé à la fonctionnaire d’exercer ses fonctions depuis son domicile, mais elle a refusé. M me Hutchinson a reçu instruction de se présenter au travail, et elle a été prévenue des conséquences auxquelles elle s’exposait en ne le faisant pas.

Elle s’est présentée au travail, tel que demandé, puis elle a retiré ses services de nouveau. Selon M e Newman, il n’y avait aucune raison de croire que cela allait prendre fin sur une note rationnelle à moins que la fonctionnaire ne soit licenciée.

Il n’y avait rien de plus que la direction pouvait raisonnablement faire et il fallait régler l’affaire une fois pour toutes. Selon toutes les indications présentes, la fonctionnaire ne pouvait pas fonctionner dans le lieu de travail, alors la direction n’avait plus d’autre choix que de la licencier.

M e Newman se réfère à la jurisprudence suivante : Michael Joseph McCormick et le Procureur général du Canada (dossier de la Cour fédérale T-371-96); et Scheuneman (dossier de la Commission 166-2-27847).

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Décision Page 17 Argumentation de la fonctionnaire M. Tynes fait valoir qu’il s’agit ici d’un licenciement pour incapacité de travail et qu’il n’y a aucune preuve médicale montrant que la fonctionnaire est inapte pour raisons de santé. Dans les cas tels que celui-ci il faut avoir en main des preuves médicales avant de prendre des mesures quelconques, et ici l’employeur n’en a aucune.

Dans ce genre de cas, M. Tynes affirme que l’employeur doit montrer que l’incapacité de l’employée de se présenter au travail repose sur des preuves médicales, et de plus que l’employée ne pourra s’acquitter de ses fonctions dans un avenir prévisible. Il n’y a en l’espèce aucune preuve de ce genre et la décision de l’employeur est fondée sur une opinion et non sur des faits.

Il s’agit ici d’une situation où, initialement, les parties entretenaient un dialogue raisonnable mais qui s’est détériorée par la suite. M me Hutchinson était devenue de plus en plus frustrée par les conditions qui existaient à l’immeuble Queen Square et son incapacité à y faire face. Son intolérance au milieu a présenté de nouveaux problèmes et tant la direction que la fonctionnaire cherchaient initialement à y trouver des solutions.

Bien que d’autres lieux de travail aient été essayés, à la fin aucun ne s’est révélé convenable pour diverses raisons. Toutefois, la fonctionnaire a continué de rechercher un autre lieu de travail, et elle estimait en fait en avoir trouvé un au 12 de la rue Queen. Elle était même prête à payer le loyer; or l’employeur n’a pas accepté cette option.

M. Tynes fait remarquer que la fonctionnaire n’a jamais en fait reçu de réponse de l’employeur rejetant le 12 de la rue Queen et il soutient que si tel avait été le cas peut-être qu’elle serait passée à d’autres options. Elle a continué de soulever cette possibilité jusqu’au jour de son licenciement.

En ce qui concerne le télétravail, la fonctionnaire le considérait comme une option de dernier recours. Bien qu’elle ne la repoussât pas à tout jamais, elle a déclaré qu’il ne s’agissait pas d’une option à considérer pour le moment. Cependant, la

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Décision Page 18 fonctionnaire aurait été disposée à télétravailler s’il avait été impossible de trouver un lieu de travail approprié.

M. Tynes fait valoir que la fonctionnaire pensait qu’elle se conformait à la lettre d’avertissement de M. Bangay en date du 17 avril 1997 lui enjoignant à se présenter au travail (onglet E). Elle ne croyait pas qu’elle serait licenciée pour avoir retiré ses services après s’être présentée au travail puisque la lettre d’avertissement ne soulevait pas cette éventualité particulière.

Enfin, M. Tynes soutient qu’on aurait pu faire davantage afin d’obtenir des expertises médicales.

Réplique M e Newman affirme que l’employeur ne s’appuyait pas sur des rapports médicaux pour dire que la fonctionnaire ne pouvait travailler. Les rapports médicaux (onglets 8, 23, 29 et 45) indiquent tous que la fonctionnaire, bien qu’elle soit atteinte de troubles de santé liés à l’environnement, peut travailler avec certaines limitations. Ce sont ces limitations qui ont fait problème, puisqu’il était impossible d’y satisfaire.

La fonctionnaire a su très tôt que le 12 de la rue Queen n’était pas une solution acceptable, mais elle a continué de la réclamer quand même. L’employeur n’avait d’autre choix que de prendre la décision qu’il a prise.

Motifs de la décision Au début de l’audience, les deux représentants ont affirmé qu’il s’agissait d’une affaire triste. Je suis d’accord. M me Hutchinson comptait quelque 25 années de service, avait un dossier disciplinaire vierge et avait eu de bonnes évaluations de rendement. Malheureusement, elle souffre d’une très grave intolérance au milieu qui l’empêchait de travailler à son poste de l’immeuble Queen Square.

Le sommaire de la preuve indique que d’autres lieux de travail ont été explorés, mais qu’à la fin aucun n’a été jugé acceptable pour diverses raisons. L’onglet W énumère les divers emplacements qui ont été proposés, et il n’est pas nécessaire que je les reprenne ici. Les deux parties reconnaissent que des efforts ont été déployés en vue de trouver d’autres lieux de travail acceptables, mais en vain.

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Décision Page 19 M. Tynes affirme que la fonctionnaire n’a jamais vraiment su que sa suggestion de travailler au 12 de la rue Queen n’était pas acceptable à l’employeur. Je ne suis pas de son avis. M m e Hutchinson a écrit à M me Heather J. Hay-Scott, une agente des relations de travail à l’administration centrale du Ministère, le 29 septembre 1996 (onglet 86). Dans cette lettre, elle demande qu’on s’occupe du refus de la direction d’examiner sa demande récente de télétravailler depuis le 12 de la rue Queen.

Il est clair à mes yeux que la fonctionnaire savait que la proposition de travailler au 12 de la rue Queen avait été rejetée.

Dans les cas de ce genre, il incombe à l’employeur de composer avec la situation de l’employée. Cependant, l’employée a elle aussi des obligations.

Comme l’a souligné le juge Sopinka dans l’affaire Central Okanagan School District No. 23 c. Renaud, [1992] 2 R.C.S. 970, à la page 994 : La recherche d’un compromis fait intervenir plusieurs parties. Outre l’employeur et le syndicat, le plaignant a également l’obligation d’aider à en arriver à un compromis convenable.

[...] Pour faciliter la recherche d’un compromis, le plaignant doit lui aussi faire sa part. À la recherche d’un compromis raisonnable s’ajoute l’obligation de faciliter la recherche d’un tel compromis. Ainsi, pour déterminer si l’obligation d’accommodement a été remplie, il faut examiner la conduite du plaignant.

Bien que des myriades d’options aient été envisagées, il me semble, à la lumière de tous les éléments de preuve, que le télétravail aurait été la meilleure option pour la fonctionnaire. Toutefois, même cette solution se serait peut-être révélée insatisfaisante à la longue étant donné le désir avoué de M me Hutchinson d’être près des ses collègues de travail et de rencontrer, de temps à autre, les gens à Queen Square. De plus, l’emploi de la fonctionnaire exigeait qu’elle travaille sur le terrain et ses intolérances à l’environnement rendaient ses séjours dans les hôtels et motels très difficiles. À tout le moins, le télétravail valait la peine d’être essayé. Il aurait fallu que M m e Hutchinson présente une demande en ce sens, mais elle ne l’a jamais fait. Personne ne peut lui imposer cette option, et je n’ai certes pas le pouvoir de le faire moi-même.

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Décision Page 20 Les faits ici montrent que M me Hutchinson ne pouvait travailler à son lieu de travail de l’immeuble Queen Square. De son propre aveu, lorsqu’elle se rendait travailler à Queen Square, elle devenait malade. Pour diverses raisons, aucun des autres lieux de travail proposés n’était acceptable.

La fonctionnaire a reçu instruction de retourner au travail le 21 avril, et on l’on informée des conséquences auxquelles elle s’exposait si elle ne le faisait pas. Je ne la crois pas lorsqu’elle affirme qu’elle ne pensait pas qu’il lui arriverait quelque chose puisqu’elle s’est présentée au travail, puis qu’elle a retiré ses services par la suite. Lorsqu’elle s’est présentée au travail le 21 avril, l’on ne discutait d’aucun autre lieu de travail possible; par conséquent, il n’y avait aucune autre option que M me Hutchinson aurait pu poursuivre, exception faite du télétravail. Or elle avait rejeté cette option dans diverses lettres mentionnées dans la preuve. Le télétravail ne pouvant lui être imposé, l’employeur n’avait d’autre choix que de la licencier.

Compte tenu de l’ensemble des circonstances de l’affaire, je conclus que l’employeur a agi raisonnablement. Il a démontré qu’il avait tenté de composer avec les besoins de santé de la fonctionnaire. Il ne m’a été présenté aucune autre option raisonnable que l’employeur aurait pu considérer.

Cela étant dit, je conclus que la décision de l’employeur de licencier M me Hutchinson, bien que malheureuse, était justifié. Le grief est donc rejeté. Joseph W. Potter, président suppléant

OTTAWA, le 10 mars 1999. Traduction certifiée conforme

Serge Lareau Commission des relations de travail dans la fonction publique

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