Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Licenciement (motif disciplinaire) - Vol - Détournement des fonds de la petite caisse et usage à des fins personnelles d'une carte de crédit du ministère - Abus de confiance - Prétendus problèmes de dépendance au jeu et de pharmacodépendance - Obligation de composer avec la situation de la fonctionnaire - l'employeur a licencié la fonctionnaire parce qu'elle s'est servie dans la petite caisse du bureau et qu'elle a utilisé une carte de crédit du bureau à des fins personnelles pendant plusieurs années - la fonctionnaire travaillait dans la fonction publique depuis 17 ans - elle a prétendu que ses actions étaient attribuables à des problèmes personnels et financiers - elle avait de graves problèmes financiers parce que l'entreprise de son mari était au bord de la faillite - elle essayait également de s'occuper de sa mère qui était atteinte de la maladie d'Alzheimer - en 1995, la fonctionnaire était devenue dépendante d'un médicament que le docteur lui avait prescrit initialement en 1992 pour l'aider à surmonter ses difficultés personnelles et le stress lié au travail - la fonctionnaire a prétendu qu'elle avait également commencé à jouer en 1995 et qu'elle était rapidement devenue accrochée - la fonctionnaire a fait valoir que l'employeur avait manqué à son obligation de composer avec sa dépendance au jeu et sa pharmacodépendance - la fonctionnaire a plaidé coupable aux accusations criminelles portées contre elle relativement au détournement de fonds publics et elle a obtenu une absolution sous condition, dont le remboursement des fonds à l'employeur - la preuve a démontré que, depuis la perte de son emploi, la fonctionnaire a fait de nombreux efforts en vue de régler ses problèmes, avec succès - l'arbitre a conclu que la décision de l'employeur de licencier la fonctionnaire était justifiée dans les circonstances - la mauvaise conduite de cette dernière n'était pas un incident isolé commis sous l'impulsion du moment - au contraire, au cours d'une période d'années elle s'était servie à répétition de la carte de crédit du bureau et de la petite caisse pour faire des achats personnels - elle avait consacré du temps pour planifier les détournements de fonds et dissimuler ses actions - l'arbitre n'a pas cru que sa mauvaise conduite découlait de sa dépendance au jeu et de sa pharmacodépendance - tout avait commencé bien avant - par conséquent, l'arbitre n'était pas prêt à accorder beaucoup de poids à la preuve de la réadaptation de la fonctionnaire produite après le congédiement - en réponse à l'allégation selon laquelle il y avait eu déni de justice naturelle de la part de l'employeur, l'arbitre a fait remarquer que l'audience en arbitrage annule toute injustice procédurale dans un processus disciplinaire. Grief rejeté. Décisions citées :Compagnie minière Québec Cartier c. Québec, [1995] 2 R.C.S. 1095; Clare v. Attorney General of Canada (1993), 93 C.L.L.C. 12,413 (C.A.F.); Tipple v. Canada (Conseil du Trésor) (non publié, Cour d'appel fédérale, dossier no A-66-85, daté du 26 septembre 1985); Funnell (166-2-25762); Duggan (166-18-16810); Herrit (166-2-27188); NewTel Communications and C.E.P.C., local 410 (1998), 71 L.A.C. (4th) 73 (Stockley).

Contenu de la décision

Dossier : 166-2-28540 Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE GENEVIEVE BATIOT fonctionnaire s'estimant lésée et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Justice Canada)

employeur

Devant : Donald MacLean, arbitre et commissaire Pour la fonctionnaire s'estimant lésée : Bernadette Maxwell et Nancy Elliott, avocates Pour l'employeur : Michael Ciavaglia et Ingrid Stack, avocats Affaire entendue à Halifax (Nouvelle-Écosse), du 2 au 4 novembre 1998.

Décision DÉCISION Page 1 M me Genevieve Batiot est la fonctionnaire s'estimant lésée en l'espèce. Elle affirme que l'employeur l'a suspendue pour une période indéterminée en avril 1997, puis qu'il l'a congédiée en février 1998. Elle prétend que l'employeur a agi sans motif valable.

Le grief comporte trois volets : (1) l'employeur n'a pas respecté les règles de la justice naturelle en licenciant la fonctionnaire parce qu'il ne lui a pas offert la possibilité de répondre aux allégations; (2) il savait ou aurait savoir qu'elle avait une incapacité, mais il ne lui a pas permis de se prévaloir du Programme d'aide aux employés; et (3) il ne s'est pas acquitté de son obligation de composer avec l'incapacité de la fonctionnaire. Cette dernière affirme que l'incapacité en question est liée à un problème de dépendance au jeu et de pharmacodépendance.

L'employeur affirme qu'il avait un motif raisonnable de licencier M maintient qu'elle a détourné des fonds publics en faisant un mauvais usage de la petite caisse du bureau et d'une carte de crédit du ministère. Selon l’employeur, elle a utilisé des fonds publics à des fins personnelles et a ainsi rompu le lien de confiance fondamental qui existait entre elle et l'employeur.

Selon l'employeur, le détournement des fonds de la petite caisse et l'utilisation de la carte de crédit à des fins personnelles constituaient des actes d’inconduite graves. Par ses actions, la fonctionnaire a trahi la confiance que l'employeur avait en elle quand il l'a nommée à son poste. L'employeur a réfuté l'affirmation de M m e Batiot selon laquelle la gestion ne lui a pas accordé le soutien nécessaire pour qu'elle puisse se prévaloir du PAE.

Avant son congédiement le 3 février 1998, M me Batiot occupait le poste d'agente administrative (et de gestionnaire des finances et de l'administration, niveau AS-2) au bureau régional du ministère de la Justice à Halifax. Elle faisait partie de l'équipe de gestion au bureau régional. Le 9 avril 1997, l’employeur l'a suspendue pour une période indéterminée en attendant de connaître les conclusions d'une enquête sur ses activités.

La décision de licencier M m e Batiot a été prise à la suite d'une série d'incidents qui se sont produits avant sa suspension, lesquels ont donné lieu à une enquête préliminaire en janvier 1997 au sujet de l'utilisation de la petite caisse du bureau et de la carte de crédit du ministère. Une enquête et une vérification subséquentes en

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m e Batiot. Il

Décision Page 2 avril 1997 ont révélé que M m e Batiot avait détourné les fonds de la petite caisse du bureau et utilisé la carte de crédit du ministère pour effectuer des achats personnels.

M m e Batiot était responsable du fonds de caisse de 500 $. Elle devait, entre autres, s'assurer de la légitimité des dépenses remboursées au moyen de la petite caisse. Elle était chargée de vérifier les demandes de fonds, de rapprocher les montants et de demander les chèques de remboursement des sorties de fonds.

En 1996, le ministère a également remis une carte de crédit à M me Batiot pour qu'elle puisse acheter des articles de bureau. Comme dans le cas de la petite caisse, elle devait s'assurer que tous les achats imputés sur la carte de crédit étaient des achats légitimes effectués pour les besoins du ministère. À tous les mois, elle devait comparer les montants indiqués sur le relevé mensuel avec les pièces justificatives des achats, puis demander un chèque correspondant au montant du relevé.

Selon les éléments de preuve produits par l'employeur, M petite caisse et la carte de crédit pour acheter des articles comme des billets de loterie 6/49, des billets à gratter de la loterie de l'Atlantique, de la nourriture et des cigarettes. Une vérification des codes des produits (essentiellement achetés à la pharmacie Lawton) a révélé la véritable nature des achats personnels. M fourni de faux renseignements pour justifier ces achats.

Au cours de la période visée par l'enquête interne, M me Batiot s'est servie de la petite caisse et de la carte de crédit pour effectuer des achats personnels totalisant 181,03 $ et 870,10 $ respectivement. En avril 1997, la petite caisse accusait un déficit supplémentaire de 210,43 $. Le déficit total se chiffrait à 1 261,56 $.

En juillet 1997, tous les renseignements pertinents ont été transmis à la police municipale de la région de Halifax. M m e Batiot a été accusée de fraude, de vol et d'abus de confiance relativement au détournement de fonds publics. Elle a initialement plaidé non coupable aux accusations criminelles, mais elle a changé ce plaidoyer en plaidoyer de culpabilité un an plus tard, soit en juillet 1998. À l'issue de l'audience de détermination de la peine tenue en septembre 1998, elle a obtenu une absolution sous condition. Le juge l'a condamnée, notamment, à rembourser au ministère dans les 12 mois suivants une somme se situant entre 750 $ et 1 200 $ et à effectuer 50 heures de travail communautaire.

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m e Batiot a utilisé la m e Batiot avait

Décision Au cours de l'audience en arbitrage, M de la petite caisse et avoir utilisé la carte de crédit du bureau à des fins personnelles. Elle a également reconnu qu'elle avait créé de fausses pièces justificatives pour dissimuler ses actions. Elle a affirmé que tout avait commencé vers la fin de 1995. Toutefois, d'après les éléments de preuve de l'employeur, elle se servait déjà dans la petite caisse au début de 1994.

Pour la première fois depuis le début de l'enquête, M m e Batiot a aussi admis avoir volé environ 500 $ à ses collègues à la mi-mars 1997. À l'époque, elle avait brouillé les pistes en prétendant avoir elle-même été victime du vol. Elle avait dit que quelqu'un avait volé 22 $ dans son sac à main. Elle a en outre reconnu qu'elle avait emprunté jusqu'à 500 $ à ses collègues du bureau. (En date de l'audience, elle n'avait remboursé ni cet argent ni celui qu'elle leur avait volé.)

M m e Batiot a été fonctionnaire pendant 17 ans, d'abord comme CR-1 à la Défense nationale à Halifax. Au fil des années, elle a occupé, aux ministères des Affaires extérieures et de l'Énergie, des Mines et des Ressources, des postes comportant de plus en plus de responsabilités jusqu'à sa nomination, en 1988, pour une durée indéterminée, au poste d'agente administrative (et de gestionnaire AS-2) au bureau régional d'Halifax du ministère de la Justice.

Au printemps 1996, des rumeurs ont commencé à circuler au ministère au sujet d'irrégularités dans la gestion de la petite caisse. Certains membres du personnel se sont plaints de ne pas pouvoir obtenir d'argent quand ils demandaient des avances ou un remboursement si M me Batiot n'avait pas son sac à main avec elle. Parfois, la clef était introuvable. M. Tax, directeur du bureau régional, a demandé à M me Batiot de faire un rapprochement des fonds de la petite caisse. Il croyait qu'il s'agissait simplement de rapprocher les débours, puis de renflouer la petite caisse au moyen d'un chèque.

Au cours de l'été 1996, la Division des services financiers du ministère a soulevé des interrogations au sujet de la carte de crédit du bureau. Quand d'autres questions ont surgi en décembre 1996, on a ordonné la tenue d’une vérification à la mi-janvier 1997. Celle-ci a révélé quelques irrégularités, mais rien d'important. On a appris par la suite que M m e Batiot avait emprunté plus de 300 $ d'une voisine en vue de renflouer la petite caisse avant que le ministère procède à la vérification.

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Page 3 m e Batiot a admis avoir détourné des fonds

Décision Page 4 Le 21 mars 1997, un certain nombre d'employés ont signalé s'être fait voler de l'argent dans leur sac à main, leur portefeuille et leur bureau, soit, selon les estimations, environ 500 $. Le 27 mars 1997, le ministère a demandé à la police municipale de Halifax de faire une enquête sur ces vols. Durant l'enquête policière, une des voisines de M me Batiot a indiqué à la police que celle-ci lui avait avoué en confidence s'être approprié la somme de 500 $ en argent du bureau.

Le 3 avril 1997, M me Batiot était en congé. La police l'avait convoquée pour l'interroger au sujet d'un vol de bijoux chez une voisine. Elle a commencé par clamer son innocence, mais elle a fini par avouer qu'elle avait volé les bijoux et les avait mis en gage.

Les coffrets-caisses du bureau ont été examinés. L'un d'eux était vide, l'autre contenait seulement 0,18 $. Le lendemain, soit le vendredi 4 avril, M m e Batiot est rentrée au travail. Au cours de l'avant-midi, elle a téléphoné à son médecin de famille, le D r Conter, et lui a dit qu'elle ne se sentait vraiment pas bien. Il lui a fixé un rendez-vous pour l'après-midi puis a laissé un message dans la boîte vocale de M. Tax disant que M m e Batiot devrait rentrer chez elle. M m e Batiot a quitté le bureau vers 11 heures ce matin-là.

Après le départ de M me Batiot, l'employeur a effectué un nouvel examen des coffrets-caisses. L'un d'eux était toujours vide. L'autre, toutefois, contenait maintenant 399,28 $ en espèces, plus des pièces justificatives et des reçus totalisant 168,39 $. M me Batiot avait réussi à trouver les fonds. L'employeur a décidé d'effectuer une vérification détaillée de la petite caisse et des achats imputés sur la carte de crédit.

M me Batiot ne s'est pas présentée au travail après le 4 avril 1997. Son médecin lui a remis un certificat de maladie et elle a essayé de faire approuver le congé de maladie. Toutefois, le mercredi 9 avril 1997, l'employeur l'a suspendue pour une période indéterminée pendant que l'enquête suivait son cours. De toute façon, M m e Batiot avait épuisé ses crédits de congé de maladie. M. Tax lui avait déjà avancé des congés de l'exercice 1997-1998.

M. Charles Saunders a mené l'enquête interne sur les irrégularités relatives à la petite caisse et à la carte de crédit. En janvier 1997, il avait effectué une première vérification, mais n'avait décelé aucune anomalie importante. À ce moment-là dans le cadre de cette deuxième enquête, effectuée en avril, M. Saunders a comparé les achats

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Décision Page 5 avec les reçus des magasins. Il a aussi mis en parallèle les codes inscrits sur les reçus avec ceux inscrits sur la liste fournie par la pharmacie Lawton et la compagnie de carte de crédit. Il a conclu que M me Batiot s'était servie de la petite caisse et de la carte de crédit à des fins personnelles pour effectuer des achats non autorisés dès 1991, quand Ottawa avait refusé de payer l'achat de cartes de Noël et d'une bouilloire pour le bureau. À l'époque, elle avait utilisé les reçus de caisse d'achats faits par elle et par d'autres pour justifier l'argent dépensé pour le bureau. La vérification a démontré que M me Batiot avait commencé à puiser dans la petite caisse à des fins personnelles en avril 1994. Les pièces justificatives attestaient de l'achat de d’articles de bureau alors que les reçus de caisse qui les accompagnaient indiquaient qu'il s'agissait d'articles personnels. Au fil des années, la perte pour le gouvernement a totalisé 1 261,56$.

Sur la foi des conclusions des enquêtes internes, M. Tax a recommandé que M me Batiot soit licenciée et soit aussi tenue de rembourser les fonds de l’État qu'elle avait détournés. Les fonds ont été recouvrés à même l'argent que lui devait l'employeur.

M me Batiot a témoigné qu'elle et sa famille vivaient au-dessus de leurs moyens depuis des années. En 1988, à peu près à l'époque elle est devenue l'agente administrative du ministère, son mari a fait l'acquisition d'une entreprise d'articles de pêche. Au début des années 1990, quand le secteur des pêches s'est effondré, l'entreprise a éprouvé d'énormes difficultés financières qui sont encore évidentes aujourd'hui. M m e Batiot et son mari ont réhypothéqué leur maison en vue d'injecter du capital dans l'entreprise. Elle empruntait de l'argent à sa sœur qu'elle lui remboursait le jour de la paie.

En 1992, pour calmer sa nervosité, attribuable en partie à ses difficultés financières et aux pressions au travail, son médecin lui a prescrit de l'Ativan, une benzodiazépine. À l'automne de 1994, elle avait commencé à en faire une consommation quelque peu excessive. Vers la fin de 1995, elle dit qu’elle avait développé une dépendance au médicament. M me Batiot a reconnu que, durant l'hiver et au début du printemps de 1996-1997, elle prenait trois fois la dose prescrite d'Ativan. Elle en obtenait d'amis et de connaissances. Au cours des quatre mois qui ont précédé sa suspension, elle a maigri d'environ 30 livres. À cause du stress causé par ses problèmes financiers et sa dépendance à l'Ativan, elle se nourrissait mal.

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Décision Page 6 En août 1995, M me Batiot s'est mise à fréquenter le nouveau casino Sheraton à Halifax. Ses deux premières visites lui ont rapporté un peu d'argent. À chaque occasion, elle a plus que doublé sa mise initiale de 40 $. Elle venait de trouver la solution rêvée aux problèmes financiers qui accablaient la famille. Ses visites subséquentes au casino l'ont toutefois menée à sa perte. Elle a commencé à jouer et à perdre régulièrement.

M me Batiot était accrochée au jeu et à l'Ativan. Elle était aveuglée par la perspective de sortir sa famille du gouffre financier grâce au jeu. L'Ativan lui permettait de tenir le coup pendant la journée.

L'Ativan, a-t-elle déclaré, lui embrumait l'esprit. Elle empruntait de l'argent aux membres de la famille, aux amis ainsi qu'aux collègues sous n'importe quel prétexte. Elle « empruntait » de l'argent dans la petite caisse et sur la carte de crédit à coups de 20 $, 40 $, 60 $ et plus pour satisfaire sa passion du jeu. Il lui arrivait même de passer la nuit entière au casino. Elle parvenait à cacher son problème de dépendance à sa famille, à son médecin et à ses collègues. Sa famille n'a été informée de sa passion pour le jeu qu'en janvier 1997 lorsqu'elle en a fait part à son mari. Elle n'a jamais parlé de sa dépendance à l'Ativan et au jeu à ses collègues ou à ses supérieurs. Quand ses collègues l'interrogeaient au sujet des changements de personnalité et des autres symptômes de stress qu'ils observaient, elle parlait de problèmes familiaux. Elle utilisait comme prétexte qu’elle devait s’occuper de sa mère, laquelle avait emménagé dans un appartement situé dans la résidence de M m e Batiot en 1988. Au fil des années, sa mère, atteinte de la maladie d'Alzheimer, en était venue à dépendre de plus en plus d'elle.

M me Batiot a déclaré que, en décembre 1996, elle avait demandé à M. Tax de rencontrer un conseiller du PAE pour discuter de ses problèmes familiaux. Selon elle, il n'aurait pas été réceptif à sa demande. Elle pouvait s'absenter si ses rendez-vous avec le conseiller étaient en fin d'après-midi. Elle a essayé cette formule à quelques reprises, mais ses obligations envers sa mère et la nécessité de prendre la relève de l'infirmière de cette dernière ont rendu la chose impossible. Elle n'est pas retournée voir M. Tax pour lui faire part de ses difficultés.

Depuis sa suspension en avril 1997, M m e Batiot a pris diverses mesures pour améliorer sa situation. Elle suit une thérapie. L'entreprise a fermé ses portes. On est en train d'en liquider les stocks. M m e Batiot et son mari ont vendre leur maison et leur Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 7 voilier pour payer les dettes de l'entreprise. Depuis la vente de la maison, la famille habite dans une maison plus petite pour laquelle ils ont signé un bail avec option d'achat avec le beau-père de M me Batiot. Bref, la famille a un train de vie plus modeste à la mesure de ses moyens. La famille et la belle-famille de M m e Batiot ont été d'un grand soutien.

M me Batiot n'a pas joué à l'argent depuis avril 1997. Elle s'est même fait volontairement interdire l'accès au casino. En outre, elle a cessé de prendre de l'Ativan depuis la mi-avril 1997. Elle s'est inscrite à des programmes de réadaptation des toxicomanes (Core et Matrix) parrainés par le Metro (Halifax) Drug Dependency Council. Le programme Matrix s'adresse aux femmes qui ont ou ont eu des problèmes de toxicomanie, d'alcoolisme (et) ou de jeu. M m e Batiot a recommencé à faire du bénévolat dans la collectivité en vue de retrouver l'estime d'elle-même.

À l'audience en arbitrage, la fonctionnaire s'estimant lésée a produit un rapport médical établi par son médecin de famille, le D témoignage de son psychiatre, le D r Allan Gosse. Le D famille depuis 1986. Ce n'est que le 4 avril que la fonctionnaire lui a fait part de ses problèmes de dépendance. Auparavant, elle ne prenait pas d'Ativan quand elle devait lui rendre visite. Au cours de la visite du 4 avril, le D était inapte à retourner au travail à compter de cette date. Il a pris des dispositions pour qu'elle se fasse traiter par un psychiatre à l'hôpital Nova Scotia.

Le D r Gosse a rencontré la fonctionnaire pour la première fois en septembre 1997. Il l'a décrite comme une personne stressée et tendue. Il a jugé qu'elle souffrait d'anxiétés multiples et de dépression ainsi que d'un trouble panique. La fonctionnaire n'était pas capable de travailler à l'époque. Le diagnostic du médecin l'a aidée à obtenir des prestations d'invalidité de longue durée qu'elle a touchées jusqu'au 30 mai 1998.

Le D r Gosse a décrit M m e Batiot comme une femme instruite ayant atteint d'importants objectifs de carrière depuis son embauche dans la fonction publique. Il a déclaré qu'elle était sous l'effet d'un stress très intense, ce qui pouvait l'avoir amenée à commettre les vols au bureau.

Le D r Gosse voit régulièrement M me Batiot depuis septembre 1997. Il a dit qu'elle était anéantie, honteuse, remplie de remords et embarrassée par ses actions. Il croit

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r Conter, ainsi que des rapports et le r Conter est son médecin de r Conter a conclu que M m e Batiot

Décision Page 8 qu'elle a fait d'énormes progrès depuis ses premières visites. Il y a maintenant peu de risques qu'elle recommence à abuser des médicaments ou se remette à jouer.

Le D r Gosse a déclaré que l'abus d'Ativan expliquerait pourquoi M me Batiot a un jour perdu connaissance au travail. Il a comparé l'Ativan à l'alcool. Ce médicament supprime les inhibitions d'une personne et brouille son jugement. Une personne qui prend de l'Ativan peut faire des choses qu'elle ne ferait pas normalement.

Le D r Gosse a également affirmé que les problèmes de jeu de M attribuables à sa situation financière et familiale. Bien que le vol puisse être associé à une dépendance au jeu ou aux médicaments, ce n'en est pas un symptôme.

La preuve a démontré que M me Batiot n'a pas parlé de ses problèmes de dépendance au bureau et n'a pas demandé d'aide spécifique pour les régler. L'employeur n'en a été informé qu'au moment du grief en février 1998.

M. Tax savait que M me Batiot souffrait de stress et qu'elle n'était pas tout à fait dans son état normal avant sa suspension pour une période indéterminée en avril 1997. Dans son témoignage, il a déclaré que M me Batiot et le D r Conter attribuaient le stress à des problèmes familiaux et, plus particulièrement, à la santé de sa mère. Cela sapait ses énergies. M. Tax a remarqué qu'elle avait maigri, mais elle lui aurait dit que c'était voulu.

Quand M m e Batiot ne s'est pas présentée au travail le 4 avril 1997, M. Tax l'a informée, ainsi que son avocat à ce moment-là, qu'elle n'avait plus droit à des congés de maladie payés. En date du 3 avril 1997, sa banque de congés de maladie était déficitaire. En 1996-1997, elle avait épuisé ses crédits de congé de maladie et M. Tax lui en avait avancé de l'exercice 1997- 1998.

Durant son témoignage, M e Douglas Richard, un avocat du ministère, a déclaré avoir remarqué, en janvier 1997, que M m e Batiot avait perdu du poids et que son attitude avait changé. Elle lui avait demandé de l'argent à quelques reprises. Elle lui a dit qu'elle avait maigri parce qu'elle n'avait pas assez d'argent pour s'acheter de la nourriture. M e Richard soupçonnait qu'elle empruntait de l'argent à d'autres employés également. Il a confirmé ses soupçons et l'a confrontée à ce sujet. M m e Batiot a reconnu avoir emprunté au-delà de 500 $ à une dizaine de collègues.

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m e Batiot étaient

Décision M e Richard a discuté de la situation de M possibilité de lui faire voir un conseiller du PAE. À l'époque, M. Tax a encouragé M e Richard à faire quelque chose pour aider M mentionné le PAE à cette dernière, mais elle lui a dit que cela ne servirait à rien, qu'elle avait déjà rencontré un conseiller et que cela n'avait rien donné.

M e Richard et M m e Karen Thomson, une autre collègue, ont tous les deux dit que la réintégration de M m e Batiot nuirait au moral de l'effectif. Vu les vols commis, il faudrait beaucoup de temps pour remonter le moral des employés et aussi beaucoup de temps pour qu'elle regagne leur confiance.

Résumé des observation faites au nom des parties Plaidoirie de l'employeur L'avocat de l'employeur fait valoir qu'il s'agit en l'espèce d'une situation malheureuse pour M m e Batiot et pour le ministère. Sur la foi des documents produits à l'audience, certains de ses problèmes suscitent la compassion. Pourtant, elle continue de jeter le blâme sur les autres, c'est-à-dire son mari, la pharmacie Lawton et son directeur, M. Tax. C'est eux qui n'ont rien fait pour l'aider et non pas elle.

M me Batiot ne montre aucun signe de remords. Elle n'a pas cherché à rembourser l'argent qu'elle a emprunté à ses collègues et ne s'est pas excusée de leur en avoir volé.

Elle semble disposée à rembourser l'argent si elle est réintégrée, sinon elle s'en fiche. Son comportement est révélateur dans les circonstances. C'est un point très important.

M me Batiot essaye de jeter le blâme sur son mari. Elle prétend que sa famille avait des difficultés financières à l'époque son mari a lancé sa nouvelle entreprise et que c'est ce qui a déclenché ses problèmes de jeu. Pourtant, les problèmes financiers concernaient tous les membres de l'unité familiale puisqu'ils avaient pris les décisions ensemble.

Les problèmes financiers de M me Batiot peuvent lui avoir causé un certain stress, mais c'est elle-même qui l'a créé. Le véritable problème en l'espèce est qu'elle n'a pas essayé de s'attaquer directement aux problèmes. La famille aurait pu vendre le bateau ou s'acheter une maison moins spacieuse plus tôt, mais M me Batiot a cru avoir trouvé la Commission des relations de travail dans la fonction publique

Page 9 m e Batiot avec M. Tax. Ils ont envisagé la me Batiot, s’il le voulait. M e Richard a

Décision Page 10 solution miracle en prenant de l'Ativan. Elle a abusé du médicament et l'a laissé lui embrouiller les idées. Elle a également cherché une solution miracle dans le jeu.

Il serait tout à fait absurde de payer quelqu'un pour voler. Durant la période ils éprouvaient des difficultés financières, ils dépensaient l'argent de la famille et M m e Batiot volait celui de son employeur et de ses collègues. Il est vrai que M m e Batiot s'est inscrite aux programmes Core et Matrix. Toutefois, l'élément important qu'il ne faut pas oublier en l'espèce est qu'elle n'accepte pas la responsabilité de ses actes. Aucun des éléments de preuve n'indique qu'elle reconnaît ses torts.

M m e Batiot s'y connaissait très bien en matière de comptabilité créative. Au début, elle a fait preuve d'imagination pour dissimuler les retraits faits dans la petite caisse afin d'acheter des cartes de Noël et une bouilloire pour le bureau parce qu'Ottawa n'autorisait pas de telles dépenses.

Il ne s'agit pas d'actes impulsifs. Ils ont été planifiés dès le début. Ils n'ont pas été déclenchés ou motivés par ses problèmes de dépendance. Ce genre de comportement était déjà évident en 1991. L'enquête relative à la petite caisse montre que les détournements de fonds ont commencé dès avril 1994, soit avant que M me Batiot développe la dépendance à l'Ativan. Il est clair que M me Batiot puisait dans la petite caisse pour des raisons personnelles.

La documentation parle d'elle-même. Pourtant, M des billets de loterie de la pharmacie Lawton qui est inexact. Afin de dissimuler ce genre d'erreur, elle tente de faire croire que sa dépendance remonte à 1994.

En janvier 1997, M me Batiot savait qu'il allait y avoir une vérification. Elle a alors emprunté de l'argent à une amie pour renflouer la petite caisse. Elle a « emprunté » environ 500 $ et non pas 300 $, comme elle l'a affirmé, ce qui indique qu'elle refuse toujours de voir la réalité en face.

La falsification des reçus de caisse constitue un autre élément du problème en l'espèce. Ses idées n'étaient pas embrouillées au point de l'empêcher d'inscrire des choses comme « ruban gommé » au verso des reçus de caisse alors qu'en réalité elle avait acheté de la nourriture, des cigarettes et des billets de loterie. Elle cherchait à dissimuler ses actions.

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m e Batiot affirme que c'est le code

Décision Page 11 M me Batiot a réussi à cacher sa dépendance pendant plus de deux ans. Cela n'est pas le propre d'une personne qui a les idées embrouillées. Bref, l'Ativan n'avait rien à voir avec le comportement de M me Batiot entre 1991 et 1997. M me Batiot prétend que M. Tax ne voulait pas appuyer sa démarche pour qu’elle rencontre un conseiller du PAE. Néanmoins, selon M e Richard, elle s'était déjà adressée au PAE et avait trouvé que le programme était une perte de temps. Elle aimerait blâmer M. Tax de ne pas avoir donné suite à sa demande.

Toutefois, M me Batiot n'a pas dit au ministère qu'elle avait déjà rencontré un conseiller du PAE. Elle semblait l'avoir oublié. Elle n'a rien dit non plus à son employeur au sujet de son problème de dépendance. Elle l’a laissé dans l'ignorance.

Il n'y a pas eu déni de justice naturelle en l'espèce. Cet argument ne tient pas parce que l'avocat au criminel de M me Batiot lui a conseillé de ne pas communiquer avec le bureau. Celle-ci n'a jamais présenté d'excuses pour ses actions. Même si l'avocat lui avait dit de ne pas communiquer avec le bureau, l'employeur ne pouvait pas l'empêcher de le faire.

La preuve démontre que M. Tax a fait l'impossible pour aider M m e Batiot. Pourtant, l'affaire se résume à une question de confiance. Trois personnes ont témoigné avant de savoir que M m e Batiot avait volé de l'argent dans leur portefeuille et sac à main. Le vol entraîne la rupture complète du lien de confiance.

Les collègues de M me Batiot ne croient plus pouvoir lui faire confiance. Il leur faudrait beaucoup de temps pour lui accorder de nouveau leur confiance.

M me Batiot ne montre aucun signe de remords. Il n'y a plus de lien de confiance entre elle, l'employeur et ses collègues. Elle ne devrait donc pas être réintégrée.

Il n'y a pas lieu d'examiner le témoignage du D r Gosse concernant le comportement de M m e Batiot après son licenciement. Il affirme qu'elle est guérie de sa pharmacodépendance et qu'il y a peu de risques de rechute. Toutefois, cela ne nous éclaire pas sur sa situation actuelle. Il est possible d'entendre et d'examiner ce témoignage, mais il n'est pas nécessaire de le retenir.

Le D r Gosse dit que M me Batiot avait une dépendance au jeu. Il affirme que c'était un symptôme d'un problème plus grave. Toutefois, il n'avait pas diagnostiqué cette

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Décision dépendance au jeu avant la suspension de M entièrement sur les renseignements que M que cette dépendance était grave à l'automne 1996. Pourtant, la preuve démontre que M me Batiot puisait déjà dans la petite caisse en 1994. L'avocat soutient qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'un cas il y a lieu de modifier la peine. Il n'existe aucune circonstance atténuante. M trouble réel. Au contraire, les vols au travail étaient sa façon habituelle de fonctionner. Elle et sa famille vivaient au-dessus de leurs moyens, et elle continue de nier sa responsabilité.

Si M m e Batiot avait un comportement compulsif indépendant de sa volonté, on envisagerait peut-être de lui donner une autre chance. Les actions qui ont mené à son licenciement étaient extrêmement graves, mais elles ne sont pas le fruit d'un comportement impulsif ou compulsif.

Ce n’est qu’à l'audience que M me Batiot a manifesté des signes de remords pour avoir volé son employeur et ses collègues; par conséquent, il n'y a pas de circonstances atténuantes en l'espèce. Elle a perdu son emploi à cause de ses actions et s'efforce maintenant de le ravoir. Rien n'indique que ses collègues sont bien disposés à son égard ou qu'ils lui ont pardonné de les avoir volés.

M me Batiot veut nous faire croire que les reçus de la pharmacie Lawton et de la compagnie de carte de crédit sont du ouï-dire. Toutefois, en vertu de la Loi sur la preuve au Canada, les pièces commerciales sont admissibles en preuve.

M me Batiot avait préparé des pièces justificatives pour le remboursement de ses achats. Elle n'a pas agi de manière impulsive à cet égard. Pour elle, c'était une réalité de la vie quotidienne.

M me Batiot ne devrait pas avoir de deuxième chance car elle n'éprouve pas de remords. Ses collègues ont été touchés. Les éléments de preuve produits après le licenciement ne devraient pas être retenus, sauf si l'employeur était au courant de ceux-ci avant le licenciement. Ce n'est pas le cas en l'espèce. M m e Batiot n'a informé l'employeur de sa dépendance au jeu et à l'Ativan qu'après son licenciement.

Il est vrai que l'employeur se doit d'offrir de l'aide aux employés aux termes du PAE. Il doit néanmoins être informé du problème et l'employée doit être disposée à

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Page 12 m e Batiot. Son rapport est fondé m e Batiot lui a communiqués. Il a témoigné m e Batiot ne souffrait d'aucun

Décision faire sa part pour s'en sortir. En l'espèce, M l'employeur. Elle a plutôt tenté de brouiller les pistes en renflouant la petite caisse.

Il y a une limite à ce qu'un employeur peut faire pour aider une employée. M me Batiot a repoussé toute tentative faite en vue de trouver ce qui n'allait pas. En outre, elle ne croyait pas que le PAE pouvait l'aider.

L'avocat de l'employeur invoque la jurisprudence et les affaires suivantes : (1) Canada Post Corp. and CUPW (Parada) (1993), 34 L.A.C. (4 th ) 257, (Jolliffe), pages 266, 267, 268, 270,271, 288, 290, 291 et 292.

(2) NewTel Communications and C.E.P.C., local 410 (Stockley) (1998), 71 L.A.C. (4 th ) 73, (Oakley), pages 94, 95 et 96. (3) Compagnie minière Québec Cartier c. Québec, [1995] 2 R.C.S. 1095. (4) Funnell et le Conseil du Trésor (ministère de la Justice) (1995), dossier de la Commission n o 166-2-25762, (Tarte), pages 27 et 29. (5) Clare v. Attorney General of Canada (1993), 93 CLLC 12,143 (C.A.F., juge Robertson ).

(6) Renouf et le Conseil du Trésor (Revenu Canada, Impôt) (1998), dossiers de la Commission n os 166-2-27766 et 166-2-27865, (Simpson). (7) Canada Safeway and UFCW, local 1518 (Kanouse), [1997] B.C.C.A.A.A. N o 754 décision n o A- 409/97, (Devine). (8) Gunderson et le Conseil du Trésor (Revenu Canada, Douanes et Accise) (1995), dossiers de la Commission n os 166-2-26327 et 166-2-26328, (Chodos). (9) Canadian National Railway and C.A.W. - Canada (1994), 43 L.A.C. (4 th ) 129, (Picher).

(10) Canada Post Corp. and CUPW (1995), 50 L.A.C. (4 et 61.

(11) University of Manitoba and A.E.S.E.S. (1994), 44 L.A.C. (4 (Bowman), pages 111 et 112.

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Page 13 m e Batiot n'a pas mentionné ses difficultés à

th ) 52 (Jolliffe), pages 60

th ) 104,

Décision Page 14 (12) Canada Safeway, [1996] M.G.A.D. No. 1, (Kaminski). (13) McMorrow et le Conseil du Trésor (Anciens combattants Canada) (1994), dossier de la Commission n o 166-2-23967, (Chodos). (14) Lutes et le Conseil du Trésor (Citoyenneté et Immigration Canada), (1995) dossier de la Commission n o 166-2-26706, (Turner). M e Ciavaglia demande que le grief soit rejeté. Plaidoirie de M me Batiot L'avocate de la fonctionnaire s'estimant lésée soutient que celle-ci a été une employée dévouée et digne de confiance pendant quelque 17 ans. Ses évaluations de rendement étaient excellentes avant 1996.

Les vols et détournements de fonds au travail n'étaient pas dans sa nature et étaient attribuables à des facteurs externes, dont le stress financier, une dépendance à l'Ativan et la passion du jeu.

En outre, M m e Batiot a pris les moyens nécessaires pour éliminer ces facteurs externes. Elle n'avait pas de plan systématique pour frauder son employeur. M me Batiot a demandé de l'aide à l'employeur, mais celui-ci n'a pas donné suite à cette demande.

La preuve produite par l'employeur au sujet du PAE ne tient pas. L'employeur prétend qu'il ne veut pas harceler un employé pour qu'il voit un conseiller du programme. Toutefois, il n'a pas fait grand-chose pour encourager les employés à se prévaloir du PAE.

À la mi-janvier 1997, M e Richard s'est rendu compte que M bien. Elle était anxieuse, nerveuse et était devenue toxicomane. Il était d’avis qu’elle n'éprouvait pas de remords. Pourtant, ce n'est pas un spécialiste en la matière.

Le D r Gosse est le seul spécialiste en l'espèce. C'est un psychiatre. De plus, il a une certaine connaissance de la toxicomanie. Selon lui, M mentale. Elle avait la passion du jeu et une dépendance à un médicament. Ces problèmes étaient symptomatiques d'un état sous-jacent d'anxiété et de dépression. Selon le D r Gosse, les risques de rechute sont presque nuls, et M avoir de difficulté si elle retournait au travail.

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m e Batiot n'allait pas

m e Batiot souffrait d'une maladie m e Batiot ne devrait pas

Décision Page 15 M me Batiot est anéantie et a honte de son comportement passé pour lequel elle éprouve du remords. Sa toxicomanie l'a poussée à faire des choses qu'elle ne ferait pas normalement. Des témoins de moralité ont affirmé qu'elle regrettait ce qu'elle avait fait. Elle-même a témoigné de manière honnête, humble, gracieuse et intelligente. Elle fait preuve d'un extrême repentir. Elle aurait facilement pu nier avoir volé ses collègues, mais elle a admis le vol malgré l'absence de preuve afin de retrouver une certaine estime d'elle-même.

Durant le procès criminel, M m e Batiot a d'abord plaidé non coupable, ce qui est une pratique courante afin de gagner du temps. Son avocat à l'époque lui avait conseillé de tout nier et de ne rien dire au bureau au sujet de sa situation. On ne peut la blâmer d'avoir suivi les conseils de son avocat.

M me Batiot a vécu un véritable cauchemar. Elle a quand même réussi à trouver le courage de s'en sortir et de demander une deuxième chance. Cela ne signifie pas pour autant qu'elle n'a aucun remords.

L'arbitre devrait tenir compte des éléments de preuve acquis après le licenciement en l'espèce. Il est peu probable que la situation se reproduise. Il ne s'agit pas d'une situation M m e Batiot ne pouvait pas surmonter ses difficultés. La réembaucher ne pose pas un risque énorme dans l’avenir. C'est une femme au foyer, mère de deux enfants. Sa situation personnelle suscite un certain degré de sympathie. Ce n'est pas une arnaqueuse. Elle n'a pas agi par intérêt personnel ou par hédonisme.

En l'espèce, l'employeur ne n'est pas acquitté de son obligation d'enquêter sur les difficultés de M m e Batiot. S'il avait des raisons de croire qu'elle pigeait dans la petite caisse, il aurait plutôt s'empresser de déterminer ce qui n'allait pas et les raisons pour lesquelles elle agissait comme elle le faisait.

M me Batiot admet avoir commis une erreur. Elle accepte la responsabilité du désarroi qu'elle a causé aux autres personnes en l'espèce. Elle ne nie pas catégoriquement sa culpabilité. Quoi qu'il en soit, son comportement était aberrant à cause de sa maladie mentale, laquelle a pris la forme d'une dépendance à l'Ativan et au jeu.

L'employeur se doit de faire enquête quand il remarque un changement d'attitude ou d'humeur chez un employé afin de savoir ce qui se passe. Il n'a pas été proactif en

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Décision Page 16 l'espèce. Quand le problème du détournement des fonds de la petite caisse a été mis au jour, il aurait poser plus de questions.

Lorsqu'une employée se prévaut du PAE, elle ne devrait pas se faire rappeler ses absences et les problèmes d'horaire que cela peut causer pour l’accommoder.

Dire que M m e Batiot ne peut s'en prendre qu'à elle-même ou qu'elle a fait son propre malheur montre une absence de compréhension de la maladie mentale et de la nature des dépendances.

M m e Batiot n'a pas remboursé ses collègues parce qu'elle se démène pour nourrir sa famille. Elle leur remboursera l'argent lorsqu'elle recommencera à travailler.

L'avocate de M me Batiot soutient que, si les principes de la justice naturelle avaient été respectés en l'espèce, il y aurait eu une enquête approfondie avant de suspendre ou de licencier M m e Batiot. L'avocate ajoute que l'utilisation par l'employeur des reçus de la pharmacie Lawton et de la carte de crédit est un cas classique de ouï-dire. Aucun représentant de ces entreprises n'a témoigné au sujet des codes. Nous ne savons pas ce qu'ils signifient.

L'avocate de la fonctionnaire s'estimant lésée invoque la jurisprudence et les affaires suivantes :

(1) Herrit et le Conseil du Trésor (Défense nationale) (1996), dossier de la Commission n o 166-2-27188, (Simpson). (2) Duggan et le Personnel des Fonds non publics, Forces canadiennes (1987), dossier de la Commission n o 166-18-16810, (Nisbet), pages 29 et 30. (3) McNamara et le Conseil du Trésor (Défense nationale) (1989), dossier de la Commission n o 166-2-18291, (Young), pages 9-11. (4) Cluney et le Conseil du Trésor (Revenu Canada - Douanes et Accise) (1994), dossier de la Commission n o 166-2-25534, (Tarte). (5) Sample et le Conseil du Trésor (Revenu Canada) (1997), dossier de la Commission n o 166-2-27610, (Simpson). Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 17 (6) Graham v. Bison Diversified, 11 octobre 1991, (Steel), page 16. (7) Sauchuk v. Royal Bank of Canada (non publié), 25 juin 1987 (Abramovitz), n o de réf. 783 - Québec. M e Maxwell demande que je fasse droit au grief. Conclusion et motifs de la décision M me Batiot a admis qu'elle avait détourné des fonds de l'employeur. Vu cet aveu, la question principale qui se pose en l'espèce est celle de savoir si ses actions justifient l'imposition d'une mesure disciplinaire et, dans l'affirmative, si le licenciement est la mesure la plus appropriée. En d'autres termes, M m e Batiot mérite-t-elle une autre chance compte tenu des facteurs atténuants ? Peut-elle être réintégrée avec ou sans conditions ?

L'employeur affirme que le vol d'argent dans la petite caisse et les achats imputés sur la carte de crédit n'étaient pas des gestes impulsifs ou compulsifs. Ils étaient plutôt planifiés et délibérés, selon l'avocat. En outre, M me Batiot a soigneusement cherché à dissimuler ses vols.

L'avocate de M me Batiot maintient que les actions de cette dernière étaient le fait de ses problèmes de dépendance. Elle me demande de tenir compte de la preuve de réhabilitation reçue après le licenciement. Elle prétend, en outre, que l'employeur aurait se rendre compte des problèmes de M m e Batiot au travail et qu'il aurait dû, par conséquent, faire davantage pour l'aider avant de décider de la licencier.

Les affaires de licenciement ne sont jamais faciles à trancher. La présente affaire ne fait pas exception à la règle. Toutefois, après avoir examiné tous les témoignages, les nombreuses pièces et la plaidoirie des avocats des deux parties, je conclus que le grief devrait être rejeté. Ce ne serait ni correct ni raisonnable de réintégrer M me Batiot au ministère. Voici les raisons qui motivent ma décision.

En exposant ma décision, je vais passer en revue la jurisprudence pertinente en l'espèce, puis indiquer de quelle façon elle influe sur la situation de M conclusion.

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me Batiot et ma

Décision Page 18 Dans l'arrêt de la Cour suprême Québec Cartier (supra) la Cour décrit le rôle que joue un arbitre qui examine la décision d'un employeur de congédier un employé, à la page 1101 : En règle générale, l'arbitre qui examine une décision de congédier un employé devrait confirmer le congédiement lorsqu'il est convaincu qu'il y avait cause juste et suffisante de congédiement au moment la compagnie a pris cette décision. Par contre, l'arbitre devrait annuler le congédiement lorsqu'il conclut que la compagnie n'avait aucune cause juste et suffisante pour congédier l'employé au moment elle l'a fait.

Dans la décision rendue dans l'affaire Funnell (supra), M. Tarte souscrit au principe exposé dans l'arrêt Québec Cartier quand il dit à la page 27 : En général, on doit répondre à cette question en examinant les faits qui étaient connus lors du licenciement. Les preuves postérieures au licenciement ne devraient normalement pas entrer en ligne de compte dans cette évaluation. On détermine le caractère raisonnable de la décision de l’employeur à l’époque du licenciement à partir de ce qu’il savait ou aurait savoir à ce moment-là. L’employeur n’est pas tenu de posséder la sagesse qu’on n’acquiert souvent qu’avec le bénéfice du recul.

M. Tarte ajoute à la page 29 que : Dans certaines circonstances, les preuves acquises après le licenciement peuvent aider l’arbitre à déterminer si l’employeur a bien évalué la situation de l’employé lors du licenciement.

Cette règle générale peut être mise en contraste avec l'incidence des preuves acquises après un congédiement. Voici ce que le conseil a dit à ce sujet dans l'affaire NewTel (supra) à la page 94 : [Traduction] L'incidence des preuves de réhabilitation acquises après le congédiement doit être examinée en fonction de la gravité de l'infraction. Relativement peu de décisions arbitrales portent sur la dépendance au jeu comparativement au nombre de décisions traitant d'alcoolisme. Il est toutefois possible de s'inspirer de ces dernières. Compte tenu des décisions antérieures, il est évident qu'il faut accorder plus de poids à la preuve de réhabilitation acquise après le congédiement lorsque l'infraction est plus étroitement liée à l'alcoolisme ou à la dépendance au jeu qu'à un autre type d'infraction.

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Décision Page 19 En ce qui concerne la passion du jeu, le conseil, dans l'affaire NewTel (supra) a ajouté aux pages 94 et 95 : [Traduction] […] [...] il faut tenir compte de la gravité de l’inconduite. La dépendance au jeu peut entraîner ou causer divers comportement d’inconduite; un joueur compulsif pourrait présenter un problème d’absentéisme, par exemple. En d'autres termes, tous les cas de passion du jeu faisant intervenir des infractions d'ordre disciplinaire ne se rapportent pas nécessairement à des vols ou à la falsification de demandes de remboursement des dépenses. Il existe également divers degrés de vol ou d'activité frauduleuse. Il faut tenir compte de l'importance et de la gravité du vol ou de l'activité frauduleuse quand vient le moment de déterminer le poids à accorder à la preuve de réhabilitation acquise après le congédiement.

[…] Dans l'affaire NewTel (pages 95 et 96), le conseil a examiné une liste de facteurs dont ont tenu compte les arbitres pour évaluer la gravité de l’inconduite par rapport aux facteurs atténuants dont le bon dossier du plaignant, ses états de service, le caractère isolé de l'incident, le caractère spontané ou prémédité des actions, les difficultés financières qu'a causées la mesure disciplinaire, le degré d'uniformité dans l'application des règles de conduite, l'absence d'intention, la gravité de l'infraction par rapport à la politique et aux obligations de l'employeur, l'incapacité du plaignant de comprendre qu'il a mal agi, l'admission par le plaignant de sa mauvaise conduite et les perspectives d'un bon comportement à l'avenir.

Je reconnais que M m e Batiot a fait beaucoup de chemin depuis sa suspension initiale et son licenciement. Elle a honnêtement essayé de vivre davantage selon ses moyens et d'exercer un meilleur contrôle sur ses affaires. Néanmoins, il a fallu qu'elle touche le fond du baril et perde son emploi pour comprendre qu'elle pouvait effectivement améliorer sa situation.

Il a été démontré que M m e Batiot avait acquis une dépendance à un médicament (Ativan) et qu'elle était aux prises avec un grave problème de jeu. On a fait valoir que M me Batiot n'était pas elle-même et que son véritable tempérament s'était temporairement modifié. On a aussi fait valoir qu'elle avait eu un comportement

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Décision Page 20 aberrant et impulsif. En guise d'excuse, elle affirme que c'est à cause de ses problèmes de dépendance.

L'avocate de M m e Batiot invoque à l'appui de sa plaidoirie des affaires telles que Duggan (supra) et Herrit (supra). Dans l'affaire Duggan, la fonctionnaire était superviseure dans une cafétéria de la BFC Halifax et souffrait d'alcoolisme depuis plusieurs années. Elle avait volé de l'argent dans le fonds de caisse dont elle avait la responsabilité à la cafétéria. Elle avait utilisé l'argent pour acheter de la boisson. Comme la fonctionnaire en l'espèce, son rendement avait été jugé satisfaisant jusqu'à ce que l'on constate qu'il manquait de l'argent. Ce qui distingue l'affaire Duggan de la présente affaire, toutefois, c'est que les autres employés voyaient bien que la fonctionnaire semblait gonflée et malade. En outre, M m e Duggan sentait l'alcool lorsqu'elle arrivait au travail. Il était évident pour tous que quelque chose ne tournait pas rond chez elle.

On pourrait soutenir que la perte de poids et le stress de M me Batiot étaient les signes d'une forme quelconque de dépendance surtout si l'on tient compte de ses préoccupations au sujet de la petite caisse et de son utilisation de la carte de crédit. Toutefois, quand M m e Batiot a été interrogée au sujet de ces changements, elle a répondu qu'elle voulait maigrir ou encore qu'elle n'avait pas d'argent pour acheter de la nourriture. En outre, elle a attribué le stress à la maladie de sa mère et a rejeté la suggestion de son collègue, M e Richard, de rencontrer un conseiller du PAE. Dans l'affaire Herritt (supra) le fonctionnaire, magasinier à la BFC Halifax, a été réintégré à certaines conditions. Il avait admis avoir volé des caisses de nourriture en vue de financer sa cocaïnomanie.

Dans cette affaire, le fonctionnaire avait fait part de sa dépendance à l'employeur avant d'être congédié (Herritt (supra) p. 15). En outre, il s'était prévalu du PAE sur la recommandation de l'employeur à cause de ses problèmes financiers et d'alcoolisme. Il n'y avait pas réellement eu de suivi par la suite de la part de l'employeur.

En l'espèce, l'employeur n'était pas au courant des problèmes de dépendance de M m e Batiot. Cette dernière n'a fait aucune démarche en vue de lui expliquer que son stress était attribuable à autre chose que sa situation familiale. Lorsqu'on lui a posé des questions, elle a affirmé que le PAE ne lui serait d'aucune utilité. En outre, elle a essayé de dissimuler les vols afin d'empêcher l'employeur de découvrir qu'elle puisait

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Décision Page 21 dans la petite caisse. Ce ne sont pas des gestes d'une employée qui veut obtenir de l'aide.

Je ne puis retenir l'argument selon lequel les vols commis par M l'employeur étaient le fait d'un comportement impulsif ou compulsif. Comme dans les affaires Herritt et Duggan, certains employés volent pour financer leurs dépendances.

En l'espèce, M m e Batiot avait pris l'habitude d'utiliser les fonds de la petite caisse et la carte de crédit du bureau pour tous ses achats allant des billets de loterie aux cigarettes et à la nourriture.

Bref, ce ne sont pas les achats d'une toxicomane. M me Batiot avait pris l'habitude d'« emprunter » de l'argent dans la petite caisse et de le restituer bien avant d'avoir une dépendance à l'Ativan ou au jeu. Cette dépendance, semble-t-il, n'a fait que lui compliquer la tâche de balancer la petite caisse sur une base régulière avant que l'on s'aperçoive que les fonds n'étaient pas toujours disponibles. Ce n'était qu'une question de temps avant que ses actions la rattrapent.

L'avocate de M me Batiot a remis en question l'utilisation par l'employeur des codes des produits inscrits sur les reçus de la pharmacie Lawton et de la compagnie de carte de crédit. Elle a affirmé qu'aucun représentant de ces deux entreprises n'avait témoigné pour en confirmer le sens.

Toutefois, je conviens avec l'avocat de l'employeur que les reçus de caisse et les codes des produits sont des documents commerciaux admissibles en preuve en vertu de la Loi sur la preuve au Canada. En fait, j'accepte la totalité de la preuve du vérificateur. À mon avis, rien dans celle de M m e Batiot ou dans les plaidoiries de son avocate ne permet réellement de douter de l'exactitude de la vérification effectuée par M. Saunders. La vérification révèle que M me Batiot a commencé à utiliser les fonds de la petite caisse à des fins personnelles en 1994. C'était avant qu'elle commence à faire un usage abusif de l'Ativan. C'était au moins deux ans avant qu'elle commence, a-t-elle dit, à avoir les idées embrouillées par le médicament à l'automne 1996.

J'ai tenu compte de la preuve du D r Gosse acquise après le congédiement. Ce dernier considère que M me Batiot est en bonne voie de guérison. Il affirme qu'il y a peu de risques de rechute. Cette opinion médicale me fait hésiter dans ma décision. Cela

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me Batiot chez

Décision me semble un dur châtiment de refuser d'accorder une autre chance à M tout le chemin qu'elle a parcouru pour se réhabiliter.

Toutefois, je ne suis pas disposé à accorder autant de poids que le voudrait l'avocate de M me Batiot à la preuve acquise après le congédiement. (Voir NewTel (supra), page 94). Les vols de M m e Batiot ont été commis de façon continue et sur une longue période. Par conséquent, j'estime qu'il faut accorder moins de poids à la preuve de réhabilitation acquise après le congédiement. En outre, il n'y a pas suffisamment de facteurs atténuants pour me permettre d'annuler le congédiement de M me Batiot. Bien que M m e Batiot ait de longs états de service dans la fonction publique et un bon dossier d'emploi, ses vols n'étaient pas des incidents isolés commis sous l'impulsion du moment. En effet, elle a pris le temps de falsifier les reçus de la carte de crédit et de la petite caisse pour dissimuler ses actions. En outre, elle a emprunté de l'argent à une voisine pour renflouer la petite caisse lorsqu'elle a appris que M. Saunders allait effectuer une vérification en janvier 1997. Cela ne dénote pas une incapacité à saisir le caractère fautif de ses actions.

Le 4 avril, M m e Batiot a dit que ça n'allait pas ce jour-là. Bien sûr. Le chat était sorti du sac. La police venait de l'accuser de vol de bijoux. Pourtant, en dépit du stress et des problèmes qui l'accablaient, elle a réussi à trouver de l'argent pour renflouer presque complètement la petite caisse. Pour le reste, elle a trouvé ou inventé quelques pièces justificatives. Sauf que cette fois, les choses n'ont pas aussi bien tourné qu'en janvier. En voyant le nouveau contenu de la petite caisse, l'employeur a décidé de faire enquête en vue de confirmer ses soupçons.

M m e Batiot n'a reconnu sa responsabilité concernant les vols que lorsqu'elle a été confrontée à la preuve du détournement des fonds longtemps après sa suspension pour une période indéterminée. Elle n'a avoué que plus tard.

L'unique autre question à trancher est celle de savoir si le lien de confiance pourrait être rétabli entre M m e Batiot et son employeur. La question est complexe du fait que M me Batiot a volé non seulement son employeur, mais également ses collègues. Toutefois, les vols dont les collègues ont été victimes ne faisaient pas partie des motifs du congédiement.

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Page 22 me Batiot après

Décision Page 23 En dernière analyse, j'estime que les vols dont l'employeur a été victime étaient des actes de malhonnêteté plutôt que des actes commis sous l'impulsion du moment pour assouvir une dépendance à un médicament ou au jeu. Je ne crois pas que le lien de confiance puisse être rétabli dans le contexte actuel. Les collègues de M me Batiot ont affirmé que sa réintégration nuirait au moral du bureau. Bien que j'aie tendance à rejeter ce type d'opinion de la part de collègues, je suis néanmoins convaincu que la réintégration de M me Batiot ne ferait qu'envoyer un message erroné à cette dernière et à ses collègues, soit qu'on peut voler l'employeur, puis inventer le prétexte car, même si le voleur est pris, un arbitre le réintégrera. Ce n'est pas le message que je veux transmettre.

Je ne suis pas convaincu que je devrais renverser la décision de l'employeur de licencier M m e Batiot. Je crois que l'employeur l'a congédiée pour un motif valable. Le simple fait que M me Batiot ait décidé de se réhabiliter après le choc de la suspension n'est pas un motif suffisant pour réduire la sanction : (Québec Cartier (supra), page 1102). Accepter ce genre de preuve acquise après le licenciement pour annuler un licenciement motivé enverrait un signal erroné à M me Batiot et ferait croire qu'un congédiement motivé peut être révoqué en prouvant une dépendance et en acceptant de se réhabiliter après coup.

Est-ce que la réaction de l'employeur au fait que M m e Batiot se soit prévalue du PAE annule la décision de la congédier ? Certes, l'employeur est obligé d'offrir de l'aide à ses employés lorsqu'ils en ont besoin (voir la décision rendue dans l'affaire Clare (supra)), mais l'employé est lui aussi obligé d'informer l'employeur de ses besoins (voir aussi l'affaire Funnell, page 28). Les employés doivent comprendre que le PAE existe pour les aider à conserver leur emploi en collaboration avec leur employeur. Ce n'est pas un outil de réintégration après un licenciement motivé.

En l'espèce, M me Batiot connaissait le PAE et elle aurait demander l'aide dont elle prétend avoir eu besoin à l'époque. Elle affirme que M. Tax n'était pas réceptif à sa demande de rencontrer un conseiller du PAE. Ce n'est pas la conclusion que je tirerais en l'espèce. Au pire, M. Tax lui a demandé de rencontrer le conseiller du PAE en fin de journée. Elle affirme avoir eu de la difficulté à le faire. Pourtant, elle n'en a rien dit à M. Tax. La preuve indique que ce dernier a autorisé ses demandes de congé de maladie par le passé. Aucun élément de preuve n'indique qu'il ne l'aurait pas autorisée à modifier son horaire pour qu'elle aille voir le conseiller du PAE.

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Décision Page 24 En dernier lieu, la fonctionnaire invoque un déni de justice naturelle pour réfuter les allégations de l'employeur. La réponse à cette allégation est qu'elle a eu la possibilité de produire sa preuve devant moi. L'audience en arbitrage annule toute injustice procédurale dans un processus disciplinaire (voir la décision Tipple, dossier de la Cour A-66-85, (C.A.F.)). À mon avis, M me Batiot n'a pas présenté de preuve convaincante que la décision de l'employeur était erronée.

En fait, je conclus plutôt que l'employeur avait un motif valable et raisonnable de congédier M me Batiot. Pour tous ces motifs, le grief de M m e Genevieve Batiot est rejeté. Donald MacLean, commissaire

Moncton, le 27 mai 1999. Traduction certifiée conforme

Serge Lareau

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