Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Congé spécial ou congé de maladie - Circonstances à l'origine de la demande sont-elles attribuables au fonctionnaire s'estimant lésé - Exploitation d'une entreprise - Principe d'irrecevabilité - le fonctionnaire s'estimant lésé, un infirmier accomplissant le quart de nuit, a déposé un grief à l'encontre de la décision de l'employeur de ne pas lui accorder six jours de congé spécial à l'occasion de la crise du verglas de janvier 1998 - résidant dans le sud-ouest du Québec et copropriétaire d'une bergerie, le fonctionnaire s'estimant lésé a réclamé ce congé pour prendre soin de son troupeau de 132 moutons - sa bergerie était privée de courant et il a allégué avoir dû s'occuper de son troupeau deux fois par jour, à raison de trois à quatre heures chaque fois - le fonctionnaire s'estimant lésé a plaidé que le congé lui avait été refusé parce que l'employeur a erronément cru que la raison en était, non pas la crise du verglas, mais plutôt que le fonctionnaire s'estimant lésé exploitait une entreprise l'empêchant de se rendre au travail - le fonctionnaire s'estimant lésé a souligné que, n'eut été de la crise du verglas, le fait qu'il est copropriétaire d'une bergerie n'aurait pas eu de conséquence sur son travail - il a ajouté que l'employeur n'avait pas conduit d'enquête appropriée sur sa demande de congé ni évalué toutes les circonstances au soutien de sa demande - de plus, le superviseur du fonctionnaire s'estimant lésé lui aurait affirmé qu'il aurait droit à cinq jours de congé - l'employeur a répondu que l'octroi d'un congé spécial relève de la discrétion de l'employeur et que les circonstances ayant empêché le fonctionnaire s'estimant lésé de se présenter au travail pour son quart de nuit lui étaient attribuables - l'employeur a souligné que le fonctionnaire s'estimant lésé n'avait présenté aucune preuve à l'effet qu'il avait essayé d'organiser ses affaires afin de lui permettre de se présenter au travail pour son quart de nuit - l'arbitre a conclu que le fonctionnaire s'estimant lésé n'avait pas démontré qu'il n'avait eu d'autre choix que de consacrer quotidiennement de sept à huit heures au soin de son troupeau - l'arbitre a conclu que la véritable raison ayant empêché le fonctionnaire s'estimant lésé de se présenter au travail pour son quart de nuit était qu'il était trop épuisé pour le faire - or, cette situation est couverte par la clause de la convention collective traitant des congés de maladie et, pour cette raison, ne tombe pas sous l'empire des congés spéciaux - l'arbitre a aussi conclu que la preuve ne démontrait pas que le superviseur du fonctionnaire s'estimant lésé lui aurait affirmé qu'il aurait droit à cinq jours de congé. Grief rejeté.

Contenu de la décision

Dossier : 166-2-28640 Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE ALBERT BOUCHARD fonctionnaire s’estimant lésé et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Anciens Combattants Canada)

employeur

Devant : Evelyne Henry, présidente suppléante Pour le fonctionnaire s’estimant lésé : Pierrette Gosselin, avocate Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Pour l’employeur : Stéphane Arcelin, avocat

Affaire entendue à Montréal (Québec) les 8 et 9 mars 1999

Décision DÉCISION Page 1 M. Albert Bouchard a présenté un grief alléguant que l’employeur lui a refusé un congé payé pour les 9, 19, 20, 21, 22 et 23 janvier 1998, en contravention de l’article 17.14 (autres congés payés) de la convention collective cadre entre le Conseil du Trésor et l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada l’Institut ») .

Preuve pour le fonctionnaire s’estimant lésé M. Albert Bouchard est assistant-infirmier chef à l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue, il est employé depuis douze ans et demi. Il y travaille sur le quart de nuit depuis « presque toujours ».

M. Bouchard a présenté une demande de congé à la fin janvier 1998, suite à la tempête de verglas. M. Bouchard explique qu’il habite à Rivière Beaudette, la tempête de verglas a eu des effets très graves : panne de courant, routes glacées et évacuation ordonnée par le maire du village. À la connaissance de M. Bouchard, la municipalité a été évacuée au complet. Le matin du 7 janvier 1998, la sécurité civile a avisé M. Bouchard qu’il devait évacuer sa demeure en raison de la panne de courant, parce qu’il était trop dangereux de rester dans une maison sans chauffage et aussi à cause du risque de refoulement des puisards. Il y avait également le danger que des arbres tombent sur la maison, car il y a beaucoup d’arbres à Rivière Beaudette.

M. Bouchard a ramassé quelques effets et est parti chez sa fille, en compagnie de son épouse. Sa fille habite Les Coteaux, anciennement appelé Coteau-Station, à 25 ou 30 kilomètres de chez lui. Les routes étaient très glacées, encombrées de poteaux, de fils et de camions des compagnies de téléphone et d’électricité. Il a mis une demi- heure pour se rendre chez sa fille. Sa fille habite avec son mari et leur fille de deux ans. Le gendre de M. Bouchard était malade. La veille, M. Bouchard avait passé la journée à l’Hôpital Lakeshore en compagnie de sa fille, car son gendre avait subir des tests qui ont révélé une encéphalite. Ce dernier s’est vu prescrire des médicaments assez forts contre la migraine et des antibiotiques. La fille de M. Bouchard était déprimée, ne sachant donner de la tête, car sa fille était également malade et devait prendre des antibiotiques contre une otite. M. Bouchard a prendre charge de cette maisonnée, car, aussi, il y avait une panne de courant et il fallait assurer le chauffage du poêle à combustion lente dans la cuisine et s’occuper de l’éclairage. Il était important que les malades n’aient pas froid.

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Décision Page 2 M. Bouchard décrit que, à sa maison, il a un foyer au gaz au « premier plancher » mais que « le bas » n’était pas chauffé. Il a chauffer la tuyauterie avec une chaufferette au gaz propane. Il allait chez lui deux fois par jour, matin et soir, pour chauffer, vérifier et s’assurer qu’il n’y avait pas de vandalisme et que les arbres du terrain de golf voisin ne tombaient pas sur sa maison. Il prenait deux heures, y compris le temps du voyage, pour cette corvée, deux fois par jour.

M. Bouchard a été absent du travail du 7 au 26 janvier 1998. Le courant n’a été rétabli chez lui que le matin du 23 janvier 1998. Le courant a été rétabli chez sa fille de façon intermittente le 21 et le 22 janvier, et de façon permanente le 24 ou le 25 janvier.

M. Bouchard a communiqué avec son surveillant, M. Ahmad Kader, pour lui décrire l’état de tout ce qui se passait. Selon M. Bouchard, M. Kader lui aurait dit de prendre son temps, qu’ « il y avait cinq jours », qu’il avait l’autorité d’octroyer cinq jours de congé, et de prendre soin de sa famille.

M. Bouchard a, à quelques reprises, répondu à l’appel du maire aux citoyens, annoncé à la radio, pour aider à décharger des camions de bois de chauffage.

M. Bouchard est copropriétaire, avec son gendre, d’une bergerie comptant 132 brebis. Il n’y avait pas de courant à la bergerie et ils n’avaient pas de génératrice. Il a acheter des barils pour transporter de l’eau de chez un voisin pour abreuver ses brebis. Il allait nourrir les animaux le jour, faute d’éclairage, et cette corvée lui prenait de trois à quatre heures. M. Bouchard avait plusieurs corvées : s’occuper de deux maisons, s’approvisionner en bois de chauffage et en nourriture, chauffer les maisons, nourrir les animaux. Il dormait, au maximum, de quatre à cinq heures par jour.

M. Bouchard a découpé dans «1 ère Édition », un journal local, un article sur la crise du verglas, paru le samedi 17 janvier 1998, qui décrit la situation à cette date et qui indique que la « ligne de transport du courant électrique reliant le barrage Carillon au poste Saint-Polycarpe s’est écroulé sur plusieurs kilomètres […] [t]out le secteur desservi par le poste Saint-Polycarpe, soit le triangle formé par Coteau-du-Lac, Rivière Beaudette et Saint-Polycarpe est complètement privé d’électricité pour plusieurs semaines, apprenait-on ». Le journal indique plus loin que seulement 16 % des abonnés étaient rebranchés en date du 16 janvier, à 14 h 59.

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Décision Page 3 M. Bouchard a témoigné que, en vertu de l’article 55.9.2. de la Loi sur la santé des animaux, L.Q. 1993, ch. 18, art. 6, il avait l’obligation de s’assurer de la sécurité et du bien-être de ses brebis et que cet article prévoit, entre autre, que : 55.9.2 […] La sécurité et le bien-être d’un animal est compromis lorsqu’il :

1º n’a pas accès à de l’eau potable ou à de la nourriture en quantité et en qualité compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce;

[…] M. Bouchard a déposé, en liasse, des copies de sa demande initiale de congé, en date du 28 janvier 1998, à laquelle il avait attaché des notes pour expliquer sa situation, et sa deuxième demande, en date du 23 mars 1998, avec d’autres notes explicatives, ainsi que la réponse de Mme Lynn Landry, Directrice adjointe des soins infirmiers à l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue, et son grief en date du 1 er avril 1998. La première demande de congé de M. Bouchard (pièce S4a), demandait un congé de maladie (code 210) pour le 7 janvier, un congé autre (code 699) pour les 8 et 9 janvier, des vacances (code 110) pour les 12, 13 et 14 janvier, du temps compensatoire (code 810) pour les 15 et 16 janvier et un congé autre (code 699) pour la période du 19 au 26 janvier. Cette copie indique que le congé autre pour la période du 19 au 26 janvier 1998 a été refusé. Sur la copie de la même demande (pièce S4b), le congé spécial pour les 8 et 26 janvier 1998 a été autorisé, mais refusé pour les 9, 19, 20, 21, 22 et 23 janvier 1998. Le code 999, qui indique un congé autre sans solde, est inscrit sur les deux copies pour le 9 janvier et pour la période du 19 au 23 janvier. M. Bouchard explique que les congés pour la semaine du 12 au 16 janvier 1998 avaient été prévus et autorisés d’avance. Les notes d’explication (pièces S4c et S4e) sont reproduites telles que soumises : [Pièce S4c] Le 28 [janvier] 1998 […] […] On m’a bien remis une feuille de demande de congé spécial, mais la situation exigeait une plus grande description

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Décision Page 4 des faits. J’ai donc décidé de vous faire une description détaillée et a l’inclure à ma feuille de demande de congé spécial.

Nous avons perdu l’électricité le 6 janv au matin vers 6 00 -6 15 . Le 6 janv. j’ai passé la journée à l’hopital à l’urgence du 120 Lake Shore avec mon gendre qui a été sur I.V. une partie de la journée, je suis revenu à la maison à 10.30 P.M. Le lendemain le 7 janv. nous avons été évacué de la maison en raison du manque d’électricité, Car n’ayant pas d’eau ni de chauffage, nous allons chez ma fille aux Côteaux qui le soir même perd l’électricité.

Dans ces même dates, étant donné que j’élève des agneaux, j’ai un troupeau de 132 brebis, j’ai m’organiser seul puisque mon gendre ne pouvait travailler suite à la demande du medecin. Donc, le jeudi 8 janv je n’ai pas d’électricité ni à la maison ni à la bergerie et ce depuis le 6 au matin. Déjà. 36 hres que les brebis n’ont pas d’eau. Je dois m’organiser, mon gendre malgré l’interdiction de travailler, vient me donner un coup main. Nous louons une remorque, et achetons quelques poubelles afin de transporter l’eau aux animaux.

Donc nous allons chez un cultivateur qui lui à une génératrice et emplissons les poubelles d’eau afin de les transporter à la bergerie. Ce qui prend beaucoup de temps et par la suite, distribuons l’eau aux brebis qui sont munis de 2 10 gallons dans chaque enclos.

Nous devons faire cela soir et matin car l’eau gèle dans les poubelles et de plus s’il reste de l’eau dans les chaudières il faut briser la glace puisque cela à geler, les vidées et les remplir matin et soir et cela se reproduit à chaque jour que le bon Dieu amène et que nous n’avons pas d’électricité

De plus nous devons défaire la plomberie que nous avons, afin que les tuyaux dégèlent et qu’il n’y ait pas d’eau en prévision du retour de l’électricité.

Le travail prend habituellement. ½ à ¾ hres matin et soir, cela est devenu 3.30 à 4 00 hres matin et soir. De plus étant donné que nous restons chez ma fille et qu’eux ont un poële à bois, on doit courir le bois qui nous est fourni mais 20 bûches à la fois, alors à chaque jour il faut aller chercher du bois et aussi il faut visiter la maison la chauffer au moins 2 fois par jour afin d'éviter que les tuyaux gèlent. aussi surveiller pour pas que l'eau monte au sous-sol.

Donc les journées sont bien remplies de 8 soir. Pendant ce temps nous allons aussi à certaines scéances d’information donner par le maire de la municipalité

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30 AM 7 30 PM le

Décision Page 5 Cela dure jusqu’au 22 janv au soir ou on nous dit qu’on aura du courant le lendemain

Donc le vendredi le 23 janv entrons à la maison, mais là, c’est. la réorganisation qui commence, nettoyage de la maison, du frigidaire, jeter ce qu’il y a à mettre aux poubelles.

Nettoyage à l’extérieur, pelletage enlevage de glace etc. On nous dit de dégeler seulement les goutière et de mettre du sel. Donc, mon samedi et dimanche est consacré à casser la glace des goutières, mettre du sel, et parmi-celà il faut soigner les animaux. Donc, je termine le déglaçage le dimanche après-midi Je décide de prendre le lundi pour un petit repos et je recommence à travailler le lundi soir.

Ici, j’aimerais vous faire en ordre chronologique mes jounées Levé à 7.30 je ne peux aller à la bergerie avant 8 fait noir

8.30 à la bergerie, donner à manger, casse la glace des chaudières remplir l’eau à 2 reprise. Transport d’eau (25 brebis par enclos)

11. 30 12 00 Retour à la maison de ma fille diner 1 00 va à la maison, chauffe quelque peu (Bas surtout) surveille pour bris, vole, ou vandaliste.

2 00 2 30 Vas chercher du bois, fend le bois, fait commissions Pain lait. 3. 30 retour à la bergerie pour l’opération soignage et transport d’eau.

7 00 7 30 retour à la maison pour faire chauffer aussi va à la scéance d’information qui à lieu au centre d’hébergement.

8 00 9 30 retour à la maison pour souper et après coucher. la plus part du temps épuisé.

Aussi il faut penser au lavage, faire commissions (lait pain) organisation aussi pour qu’à la maison ou nous sommes il y ait de l’éclairage, du chauffage. car ma fille et mon gendre ont un enfant de an qui demeure à la maison et que Claudette garde car la gardienne n’a pas de chauffage et l’enfant ne peut aller là. Les risques de maladies sont grand déjà qu’elle est sur antibio pour un otite.

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30 car il

Décision Page 6 Pour ce qui est d’eux : ma fille ou elle travaille la compagnie n’a pas manqué d’électricité et travaille toujours. Elle a pris 2 jrs le temps qu’on s’organise. et elle ne savait même pas si elle serait payée.

Mon gendre lui travaille sur une ferme laitière et à partir du lundi 12 janv. à recommencé à travailler de 6 à 11 hrs le matin et de 5 00 à 8 00 le soir. Donc l’organisation de gestion d’urgence au 2 maisons nous revenait à Claudette et moi.

J’espère que ceci est entièrement à votre satisfaction et vous remercie à l’avance de votre compréhension.

[…] [Pièce S4e] Le 23 mars 1998 […] Suite à ma derniere demande du 28 fév 1998 ou l’on m’accorde 2 jours en 699 et on me coupe 6 jrs. j’aimerais vous réexpliquer la situation que j’ai vécu pendant la crise du verglas.

Comme je vous l’ai déjà dit nous avons été évacué de notre domicile. Je devais quand même faire une certaine surveillance des lieux. Il fallait chauffer le sous-sol. pour empêcher un gèle de la tuyauterie et aussi l’eau pouvait monté au sous-sol. étant donné qu’il n’y avait plus de pompe pour l’évacuation de l’eau.

Donc la maison devait être visité. 2 fois par jour dans la journée et la soirée. N’ayant personne au alentour le vandalisme était aussi possible, heureusement rien de celà ne c’est produit.

Pour ce qui est de la ferme, la réorganisation était ardue. Nous avons fait des pieds et des mains afin de se trouver une génératrice. Comme vous le savez. ils étaient rares. et ceux qui en avaient les vendaient à un prix de fou qui m’était impossible de payé. J’ai même fait appel à mon frère à Calgary pour m’en faire expédier une et c’était impossible. J’ai aussi demandé à mon fils qui est ds l’armée mais c’était le même résultat. Il n’y en avait pas.

Donc nous devions transporter l’eau àvec ma voiture et une remorque et 6 barils de plastique que nous avion achetés.

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Décision Page 7 Nous allions les remplir chez un cultivateur qui lui avait une génératrice et la transporté à la bergerie et ce deux fois par jour.

De plus avec la baisse des T o que nous avons connu durant cette période, celà ne nous a pas aidé car l’eau gelait ds la bergerie, alors à chaque fois il fallait briser la glace ds les chaudière les vidées et remettre de l’eau 2 fois par jour. afin d’abreuver les animaux. Comme je l’ai déjà dit celà nous prenait 6 à 8 hres par jour juste pour abreuver et soigner les brebis.

J’aimerais vous donnez encore chronologique. une journée type qui a durées 2 semaines et +.

Levé à 7.30 : Je ne peux aller à la bergerie avant 8.30 car il fait noir.

8 :30 à la bergerie, donner à manger, casser la glace. des chaudières, remplir l’eau à 2 reprises Transport d’eau (25 brebis par enclos.

11 30 à 12 00 Retour à la maison de ma fille pour diner.

1 00 : va à la maison, chauffage, du sous-sol. surveiller pour bris, vol ou vandalisme. 2 00 à 2 30 vas chercher bois, fend le bois, faire commission pain lait etc.

3 30 Retour à la bergerie pour l’opération soignage. et transport d’eau.

7 00 7 30 Retour à la maison pour faire chauffer. aussi va à la scéance d’information qui à lieu au centre d’hébergement.

8 30 9 30 Retour à la maison pour souper et après coucher. la plus part du temps épuisé.

Je ne pense pas que j’aurais pu donner un bon rendement au travail avec tout cet horaire. chargé que j’avais. J’étais déjà épuisé après ma journée.

Je n’aurais pu dormir que 2 a 3 hres sur 24 hrs. Cela aurait été impossible.

J’ai eu beau cherché quelqu’un pour faire le travail mais c’est drôle tout le mode était occupé personne de disponible.

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une fois en ordre

Décision Page 8 Pas de génératrice, personne pour me remplacér. que devais-je faire? laisser mourrir les bêtes?

L’article 17.14 dit que : «À sa discrétion, l’employeur peut accorder un congé payé…et.

les situations d’urgence touchant la localité ou lieu de travail et lorsque des circonstances qui ne sont pas directement attribuables à l’employé l’empêche de se rendre au travail »

Je pense avoir tout fait pour réorganiser la ferme. Recherche d’une génératrice, recherche de personne pouvant me remplacer pour faire le soignage d’animaux et surveillance de ma maison, mais rien n’était possible.

Je vous demande donc de reconcider votre décision, car avec l’horraire que j’avais et je me permet de vous la redonner, pensez-vous qu’il m’était possible de faire les deux en même temps sans affecter ma santé.

[…]

[M. Bouchard a souligné les passages dans l’original Le 31 mars 1998, l’employeur a répondu ce qui suit à la deuxième demande de congé de M. Bouchard (pièce S4f) :

[…] Nous avons révisé votre demande de congé spécial (699). La décision de vous accorder deux (2) jours , les 8 et 26 janvier, pour vous permettre de vous organiser, puis de réaménager [sic], demeure la même. À la lumière des critères établis pour accorder ces congés spéciaux, et des explications que vous nous avez fournies, il nous semble évident que vous ne pouviez vous rendre au travail en raison de votre seconde occupation à la bergerie, et qu’une journée supplémentaire n’aurait pu vous permettre de vous organiser pour revenir au travail. Comme vous le soulignez, il vous fallait être présent tant et aussi longtemps que la panne durerait.

Tel que vous le mentionnez, l’article 17.14 stipule « À sa discrétion, l’employeur peut accorder un congé payé… et

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Décision Page 9 lorsque des circonstances qui ne sont pas directement attribuables à l’employé, l’empêchent de se rendre au travail. » Dans votre situation, le fait d’être propriétaire d’une bergerie vous est directement attribuable. Vous avez effectivement tout fait pour réorganiser la ferme, mais pas pour permettre votre retour au travail. Si ce n’avait été de cette réalité particulière, votre situation aurait pu être très semblable à celle de d’autres employés.

Ainsi, comme il vous l’a sûrement été mentionné par votre infirmière-chef, pour les journées un congé spécial ne vous a pas été accordé, vous pouvez prendre des crédits de vacances (110) ou d’obligation familiale (420). Et, dans votre situation. décrite de fatigue excessive, des crédits de maladie (210) seraient acceptés.

[…] M. Bouchard exprime son désaccord avec la réponse de l’employeur. En contre-interrogatoire, M. Bouchard précise que sa ferme n’est pas à proximité de sa résidence. Sa ferme est à 25 ou 30 minutes de son travail, alors que sa résidence est à 45 minutes de l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue. M. Bouchard indique que la condition des routes, la semaine du 7 janvier, était mauvaise, mais que, par la suite, l’autoroute 20 était bien; par contre, les routes secondaires ont pris du temps pour s’améliorer. M. Bouchard ne pouvait compter sur son gendre pour s’occuper des brebis, car ce dernier a été malade et il lui fut interdit de travailler du 6 au 12 janvier 1998. Son gendre a été obligé de rentrer au travail après le 12 janvier, car il aurait perdu « sa job » s’il ne l’avait pas fait. L’épouse de M. Bouchard travaille également à l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue. Elle a eu certains congés pour cette période, car elle s’occupait de leur petite fille qui ne pouvait aller chez la gardienne, qui n’avait pas de courant et qui « se chauffait à la chandelle ». M. Bouchard précise qu’ils utilisaient d’abord des chandelles pour s’éclairer, mais que, par la suite, ils ont utilisé un « spot halogène branché sur la batterie de l’auto ». M. Bouchard n’a pas pris de notes de sa conversation avec M. Kader, mais il est certain que l’affirmation a été faite que cinq jours de congé lui seraient accordés. M. Bouchard réaffirme qu’il n’est pas allé travailler les journées de congé contestées parce qu’il était pris par ses corvées de bois, de commissions, de surveillance des maisons et de soins des animaux, car « il se serait fait poursuivre » s’il n’était pas allé à la ferme. M. Bouchard précise que les trois à quatre heures pour aller soigner les animaux incluent ses déplacements. La bergerie est louée sur une ferme dont le puits est à la maison, il n’y avait plus de courant, et il lui aurait donc fallu une génératrice de 4 000 volts pour puiser de l’eau. M. Bouchard Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 10 déclare que les génératrices étaient rares et se vendaient six ou sept milles dollars. M. Bouchard confirme que la pièce S4e donne une bonne explication de son emploi du temps. M. Bouchard indique qu’il était représentant syndical et qu’il sait que des employés ont eu trois jours de congé spécial à l’occasion de la crise de verglas. M. Bouchard a reçu le communiqué du 19 janvier 1998 adressé aux employés, intitulé « Absences vs tempête de verglas » (pièce E1), lorsqu’il est revenu au travail la nuit du 26 au 27 janvier 1998.

M. Bouchard précise que, suite à la journée qu’il avait passée à l’hôpital avec son gendre, le 7 janvier 1998, il ne se sentait pas en état de travailler. Il avait passé de 8 h 00 à 20 h 00 à surveiller la condition inquiétante de son gendre, qu’on avait mis sur «intraveineuse », car on soupçonnait une méningite avant de diagnostiquer une encéphalite. M. Bouchard connaissait, par son expérience de travail, le sérieux de la situation; «une méningite peut conduire à la mort, alors qu’une encéphalite peut se guérir avec des médicaments ».

M. Bouchard admet qu’il n’a pas essayé de se rendre à l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue durant la période visée par sa demande de congé due à la crise du verglas.

M. Ahmad Kader témoigne au nom du fonctionnaire s’estimant lésé. Il est infirmier chef depuis 20 ans. M. Kader est devenu le superviseur de M. Bouchard environ dix mois avant la crise du verglas. M. Kader se souvient d’une conversation avec M. Bouchard pendant la crise du verglas, mais ne peut en préciser la date. M. Bouchard lui a parlé de problème de courant et d’eau dans le sous-sol. M. Kader a reçu de nombreux appels concernant le verglas. Il aurait dit à M. Bouchard que son absence, comme chacun des cas, serait évaluée individuellement. M. Kader ne se souvient plus des mots exacts mais croit avoir dit quelque chose comme : « Au Québec, tout le monde a le même problème, ta situation, c’est comprenable, chaque cas est différent, tu dois prendre soin de ta famille ». M. Kader a cru comprendre qu’il fallait que M. Bouchard évacue sa maison, qu’à Rivière Beaudette il y avait un danger de « overflow » qui devait être évalué par les policiers et les pompiers. Quant au nombre de jours en question, M. Kader ne croit pas avoir parlé de cinq jours, car chaque absence allait être évaluée d’après les raisons et d’après la demande de congé. M. Kader pense avoir dit à M. Bouchard « qu’après la situation rétablie, c’est comprenable qu’il revienne au travail ».

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Décision Page 11 M. Kader déclare qu’il n’avait pas l’autorité voulue pour approuver le congé spécial. Il a recommandé que le congé soit approuvé en plaçant ses initiales sur la formule de demande de congé. Il était autorisé à approuver le congé de maladie, les vacances et le congé compensatoire et il l’a fait. M. Kader indique qu’il n’a jamais eu le droit d’approuver le congé payé spécial (code 699) et que, à ce moment-là, c’était Mme Claire Babin, directrice adjointe à l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue, qui avait l’autorité voulue pour approuver ce genre de congé.

En contre-interrogatoire, M. Kader précise que, durant la crise du verglas, il y a eu beaucoup de demandes et que tous les cas de congé spécial (code 699) ont être étudiés et approuvés par la personne ressource de la gestion.

M. Kader déclare qu’il a l’autorité voulue pour approuver les congés d’obligations familiales, jusqu’à un maximum de cinq jours par année, mais que M. Bouchard ne lui a pas parlé de la maladie de son gendre et de sa petite-fille.

Mme Guylaine Breault est à l’emploi de l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue depuis 19 ans. Mme Breault travaille à titre d’infirmière soignante/chef d’équipe à l’unité 7A. Elle a fait une demande de congé payé spécial (code 699) pour la crise du verglas, que l’employeur a approuvée. Mme Breault a demandé et obtenu trois jours de congé pour les 7, 8 et 9 janvier, car elle n’a pas pu rentrer au travail avant la fin de semaine des 17 et 18 janvier 1998. Mme Breault était en vacances annuelles du 12 au 16 janvier 1998. Mme Breault habite à Sainte-Marthe et a été privée de courant du 6 au 18 janvier 1998, mais n’a pas évacué sa maison.

En contre-interrogatoire, Mme Breault précise qu’elle a trois enfants, dont un enfant en bas âge, qu’elle allaitait. Elle a hébergé son beau-père durant la crise du verglas. Le conjoint de Mme Breault travaille aussi à l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue. Il a eu deux jours de congé spécial (code 699). La demeure de Mme Breault est située à 35 ou 40 kilomètres à l’ouest de l’Hôpital, entre Valleyfield et Rigaud. Il lui faut normalement entre 20 et 25 minutes pour se rendre au travail. Mme Breault déclare que, généralement, la durée d’un congé payé spécial (code 699) est de 5 jours pour un couple quand les deux travaillent à l’Hôpital. Mme Breault ne sait pas quelle était la situation à l’Hôpital; elle a offert sa disponibilité durant sa semaine de vacances, mais « ils étaient corrects », ils ne lui ont pas demandé de travailler.

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Décision Page 12 Mme Sylvie Poupart fut le dernier témoin cité au nom du fonctionnaire s’estimant lésé. Elle est à l’emploi de l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue depuis 20 ans. Elle est infirmière/chef d’équipe à l’unité 14B. Mme Poupart occupe des fonctions syndicales, elle est agente principale des griefs et présidente du conseil des infirmières et infirmiers (CII). Mme Poupart est intervenue dans le dossier de M. Bouchard. Elle considère injuste la décision de l’employeur de lui accorder seulement deux jours de congé spécial. Elle habite à Sainte-Marthe, qui est situé à 20 minutes de Rivière Beaudette, et considère que la situation de M. Bouchard était pire que la sienne, car elle n’a pas été évacuée, elle n’a manqué de courant que pendant douze jours, alors que lui en a manqué pendant 17 jours, et qu’il n’avait pas énormément de bois de chauffage. Elle a obtenu quatre jours de congé payé spécial (code 699).

Mme Poupart connaît le cas de Mme Guylaine Breault, une de ses voisines. Mme Breault n’a pas été évacuée et avait une génératrice qui fonctionnait avec un tracteur. Selon Mme Poupart, des employés ont manqué de courant pendant cinq jours, d’autres pendant dix ou quinze jours. C’est Albert Bouchard qui en aurait été privé le plus longtemps. Mme Poupart considère que la gestion n’a pas tenu compte de l’état de santé et de l’âge (dans la cinquantaine) de M. Bouchard, qui est diabétique, ainsi que du fait qu’il travaille de nuit.

Mme Poupart s’est absentée durant la première semaine de la crise du verglas, mais a travaillé les 12, 13, et 16 janvier 1998. Elle n’est pas certaine quand elle a pris connaissance de la pièce E-2, un document qui était déjà au local syndical quand elle est revenue au travail.

Mme Poupart déclare que, durant la crise du verglas, il y avait la panne de courant, les routes n’étaient pas belles, et il y avait des dégâts aux maisons. M. Bouchard a évacuer sa demeure, surveiller sa maison et chauffer au bois. Mme Poupart sait combien cette situation pouvait être difficile, car elle-même avait trouvé difficile de chauffer le poêle jusqu’à minuit et se lever à 5 h 00 pour le rallumer.

Mme Poupart fait une distinction entre la première et la troisième semaine de la crise du verglas, car les conditions atmosphériques n’étaient pas les mêmes et il y avait le facteur de fatigue qui entrait en ligne de compte. Durant la deuxième semaine de la crise, elle n’est pas allée travailler le mercredi, lorsque la température a chuté à moins 20 0 C. Durant la troisième semaine de la crise, il faisait froid et il fallait plus de Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 13 chauffage et M. Bouchard devait casser la glace dans sa bergerie, car il n’avait pas de génératrice.

Mme Poupart a pris connaissance de la pièce E-3 en même temps que de la pièce E-2, documents qui sont arrivés ensemble au local syndical. Mme Poupart a commenté la directive de l’employeur et comment, selon elle, M. Bouchard aurait eu droit à huit jours de congé selon ces directives.

En contre-interrogatoire, Mme Poupart déclare que le plus loin qu’elle ait voyagé à cette époque était à Saint-Polycarpe, qui est « collé sur Rivière Beaudette », à cinq ou dix minutes de là. Mme Poupart précise qu’elle a fait deux demandes de congé, les trois jours de la première semaine de la crise du verglas et le 14 janvier 1998. Elle a obtenu le 14 janvier à sa deuxième demande. Mme Poupart décrit qu’elle avait une génératrice à essence, qui ne peut fonctionner 24 heures par jour parce que c’est « dangereux pour le feu ». Sa génératrice fonctionnait tôt le matin et le soir pour alimenter les appareils électriques. Elle branchait la pompe à eau pour remplir des chaudières, les toilettes, et des chaudrons d’eau, ensuite elle branchait les congélateurs et le réfrigérateur sur la génératrice. Elle avait acquis une génératrice après une panne de courant qui avait duré cinq jours à Sainte-Marthe.

Mme Poupart n’a pas vu toutes les demandes de congé découlant de la crise du verglas. Elle n’a pas vu de directive écrite à l’effet que les employés seraient traités différemment si leur conjoint travaillait aussi à l’Hôpital. Mme Poupart a deux enfants, un de dix ans et un de douze ans, dont elle s’est occupé. Son conjoint, qui vit avec elle, ne travaille pas à l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue.

Preuve de l’employeur Mme Lynn Landry est directrice adjointe de l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue depuis 1990. Elle y travaille depuis 1980 : d’abord comme infirmière soignante, ensuite comme infirmière chef et comme infirmière à l’éducation. En tant que directrice adjointe, elle est responsable de l’embauche, de la dotation, des relations de travail, de projets spéciaux et du remplacement de la Directrice des soins. Elle est Directrice intérimaire des soins depuis novembre 1998 et elle l’était en janvier et février 1998, pendant quatre semaines. Au début de la crise du verglas, Mme Landry était directrice adjointe responsable de la réorganisation et du réaménagement des

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Décision Page 14 soins, car l’Hôpital a hébergé des gens de la « communauté » et des employés. À la fin janvier, elle a remplacé la Directrice.

Mme Landry décrit que l’Hôpital était parmi les rares privilégiés à avoir du courant et a donc hébergé des personnes âgées qui vivaient en résidences ou à domicile et qui étaient privées de courant. En partenariat avec le Centre local de services communautaires de Lac Saint-Louis, l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue a aussi hébergé des patients de l’Hôpital Lakeshore (175 en tout). L’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue a hébergé des employés et leur famille, ce qui représentait près de 140 personnes en plus. Il a fallu rouvrir des unités fermées, obtenir des fournitures de la Croix Rouge et de la « Régie régionale », n’était-ce que pour obtenir des lits d’hôpitaux. Dans certaines unités, les épouses des anciens combattants ont été hébergées quand des lits étaient libres. Du 6 au 18 janvier 1998, Mme Landry a été très occupée à réaménager les unités, à organiser l’hébergement d’un nombre de personnes, jusqu’à 139, soit employés, conjoints et enfants. Il y a eu plein d’activités de garderie, d’activités pour les enfants, de sessions de massage pour les employés et d’activités reliées à une vie communautaire à l’Hôpital.

Mme Landry est demeurée à l’Hôpital durant la première semaine de la crise du verglas. Sa résidence est située à 57 kilomètres de l’Hôpital, en Montérégie, à Saint- Louis de Gonzague. Elle n’avait pas de courant à la maison. Mme Landry habite sur une ferme laitière, que son mari exploite avec son père. Ses beaux-parents avaient un « générateur » avec le tracteur, qui assurait la traite des animaux, mais il n’y avait pas de courant à la maison.

En tant que gestionnaire, Mme Landry était préoccupée par l’approvisionnement en électricité et la disponibilité d’employés pour voir aux besoins des résidents et des personnes hébergées. Vers la deuxième semaine de la crise du verglas, les employés ont commencé à demander des congés, certains ne connaissaient pas les congés spéciaux. Le communiqué intitulé «absences vs tempête de verglas », pièce E-1, a été envoyé à tout le personnel le 19 janvier 1998. Les pièces E-2 et E-3 sont des documents qui ont été présentés aux chefs de service pour les aider à prendre la décision de recommander ou d’accorder des congés spéciaux. La Direction des soins infirmiers a décidé de centraliser l’octroi des congés, vu le grand nombre et la diversité des demandes. La procédure établie prévoyait que les infirmiers chefs devaient parapher les demandes et recommander, s’ils le voulaient, l’octroi ou le refus de

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Décision Page 15 congés. Les demandes étaient ensuite remises à un sous-comité composé de deux directrices adjointes, Mme Claire Babin et Mme Monique Jetté, et de deux infirmières chefs, Mme Nicole Benoît et Mme Lorraine Lafrance. La raison de cette procédure était pour que les soins infirmiers aient une vision plus globale de la situation et tiennent compte des demandes d’employés conjoints et des demandes familiales. Après que ce comité ait fait ses recommandations, le tout était remis au Comité exécutif de Gestion (CEG), qui révisait les motifs d’approbation ou de rejet des demandes, « ayant en tête » l’équité envers les employés qui se sont présentés au travail et ceux qui se sont absentés. La direction générale comprend tous les directeurs : services professionnels, personnel, services administratifs, soins infirmiers. Les membres de la direction générale se sont rencontrés pour réviser les motifs d’approbation ou de rejet des demandes et comment chaque direction avait pris ces décisions. Après cet exercice, s’il restait des cas très particuliers, chaque directeur rencontrait le directeur du personnel, M. Denis Wilson, et la directrice générale, Mme Rachel Corneille-Gravelle, et chaque cas était réévalué.

Mme Landry a écrit la lettre à M. Bouchard (pièce S4f). La demande de M. Bouchard a été examinée conjointement avec celle de son épouse. Mme Landry déclare que, si les raisons fournies au soutien des demandes d’employés conjoints étaient les mêmes, la gestion s’assurait des faits qui justifiaient un congé spécial et accordait les journées de congé en alternance entre les conjoints. Selon Mme Landry, Mme Bouchard avait indiqué qu’elle avait prendre soin de sa fille et de sa petite-fille et avait reçu trois jours de congé. Mme Landry a vu la demande de congé de M. Bouchard (pièces S4a et S4b) avec une note signée par Mme Landry; cette demande a été remise au chef de service pour être retournée au fonctionnaire s’estimant lésé. La pièce S4a représente la révision qu’avait faite le sous-comité et qui a été remise au comité de gestion. À ce comité, des demandes qui avaient été autorisées ont été refusées et d’autres, qui avaient été refusées, ont été autorisées; des dates ont été modifiées pour respecter les critères fixés par le comité de gestion. Quand une demande était refusée, l’employé était invité, s’il le jugeait bon, à présenter une autre demande de congé, s’il pouvait le faire. La pièce S4f était en réponse à d’autres informations soumises par M. Bouchard. La raison principale du refus de certains congés demandés par M. Bouchard est que son absence était très directement liée à sa bergerie. Les motifs de son absence lui étaient attribuables : sans la bergerie, il aurait été dans la même situation que les autres employés qui ont vécu la crise du verglas.

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Décision Page 16 Pour accorder les congés spéciaux, la gestion regardait si les employés avaient fait des efforts pour se rendre au travail et minimiser la durée de leur absence. Il se peut que, à la deuxième ou troisième journée de la crise du verglas, de tels efforts leur aient permis de se présenter au travail. M. Bouchard a obtenu un congé pour le 8 janvier pour s’organiser et organiser le fonctionnement de la bergerie, en tenant compte de sa responsabilité statutaire envers ses moutons. Le 9 janvier, il n’a pas fait d’autres efforts pour s’organiser. La conjointe de M. Bouchard s’est vue accorder un congé pour les 8 et 9 janvier, mais pas pour les mêmes raisons. Mme Landry déclare qu’il n’y avait pas de politique à l’effet de limiter à cinq jours le nombre de journées de congé spécial que les employés conjoints pouvaient se partager, et à trois jours pour les autres; chaque cas était évalué individuellement. Certains employés ont eu deux jours de congé spécial, d’autres trois. Mme Landry indique qu’il y a eu des cas spéciaux un congé spécial supérieur à cinq jours a été accordé à des employés conjoints, soit trois jours chacun, ou encore deux jours à l’un et quatre jours à l’autre, mais elle pense qu’aucun employé n’a eu plus de cinq jours.

Mme Landry déclare qu’il y avait une consigne selon laquelle, lorsque les employés appelaient pour se déclarer malade, il n’était pas question de modifier cette demande en congé spécial, car l’Hôpital n’entendait pas contester une telle déclaration. Un certificat médical n’était pas requis, mais le type de ce congé ne pouvait pas changé.

Mme Landry déclare que, compte tenu de la fatigue qu’a éprouvée M. Bouchard, et vu son état de santé, elle lui avait indiqué, dans la lettre elle lui faisait part qu’un congé spécial ne lui serait pas octroyé, qu’un congé de maladie lui serait accordé s’il le demandait. M. Bouchard n’a pas présenté de demande de congé de maladie.

Mme Landry a vu la demande de congé de Mme Claudette Giard, l’épouse de M. Bouchard, et les raisons invoquées à son appui. Mme Giard a obtenu un congé de maladie pour la nuit du 6 au 7 janvier et un congé spécial (code 699) pour les 8, 9 et 26 janvier 1998. Le 26 janvier lui a été octroyé pour réintégrer sa demeure après le rétablissement du courant.

Mme Landry elle-même n’a été absente qu’une journée pendant la crise du verglas.

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Décision Page 17 En contre-interrogatoire, Mme Landry précise qu’elle habite une maison sur la ferme familiale de ses beaux-parents, qui habitent une autre maison sur la ferme, et que ses beaux-parents possédaient une génératrice. Mme Landry déclare que ni elle ni ses enfants n’habitaient chez ses beaux-parents. Ses enfants ont passée la première journée de la crise du verglas avec leur père, mais ils sont ensuite allés chez les parents de Mme Landry, à Nitro, près de Saint-Thimotée. La semaine suivante, ses enfants sont venus à l’Hôpital avec elle et ont passé la fin de semaine chez ses parents. La semaine suivante, ils sont allés de nouveau chez ses parents. Mme Landry n’est allée coucher chez ses beaux-parents que deux fois, pour voir son mari. Le courant a été rétabli chez elle le 21 janvier et elle a eu le 22 janvier de congé pour réintégrer sa demeure. Mme Landry ne peut pas dire ce que M. Bouchard aurait faire et n’a pas fait, ni suggérer quels efforts il aurait déployer; elle déclare que les circonstances qui l’ont empêché de se présenter au travail lui étaient attribuables, car elles étaient reliées à son choix de s’occuper de la bergerie lui-même. L’employeur a autorisé l’absence de M. Bouchard, mais ce dernier ne peut obtenir de congé payé spécial pour s’occuper de sa bergerie.

Mme Landry confirme que les pièces E-2 et E-3 ont été préparées à l’intention des chefs de service pour les aider à prendre leur décision quant aux demandes de congé spécial. Elle précise que la direction des soins infirmiers formulait des recommandations, mais que, ailleurs, des chefs de services pouvaient autoriser les congés et que leur autorisation était soumise au CEG. Selon Mme Landry, l’infirmière chef a le droit, en temps normal, d’autoriser les congés spéciaux, mais que, durant la crise du verglas, ce pouvoir a été centralisé. Lorsqu’il y a tempête au cours de laquelle plusieurs employés sont absents, la délégation de pouvoir pour octroyer un congé spécial est retirée; la Directrice des soins infirmiers prend la décision de centraliser à ce niveau et cette décision est entérinée par le CEG. La décision de centraliser le pouvoir d’approuver les congés découlant de la crise du verglas a été prise vers le 16 janvier 1998. La pièce E-2 a été rédigée en raison du nombre de demandes de congé liées à la crise du verglas; elle n’est pas signée, mais elle a été rédigée par le chef des relations de travail et approuvée par le CEG.

Lorsque Mme Claire Babin, directrice adjointe de l’Hôpital, a autorisé M. Bouchard à prendre un congé spécial le 9 janvier, Mme Landry remplaçait Mme Préfontaine comme directrice des soins. Cette autorisation devait être entérinée par la directrice, tel que mentionné dans les pièces E-2 et E-3. Une quinzaine ou une

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Décision Page 18 vingtaine de cas en provenance de la direction des soins infirmiers ont été référés au CEG, dont celui de M. Bouchard. Mme Landry a tenu compte du fait que M. Bouchard travaillait de nuit et qu’il a été privé de courant pendant 17 jours. D’autres employés, dont Mme Landry, ont été privés de courant pendant 17 jours. M. Bouchard a eu un jour de congé pour réorganiser sa ferme, comme un jour de congé a été donné à son épouse pour la réorganisation de la maison. Mme Landry affirme qu’il n’y avait pas de règle fixe sur le nombre maximum de journées de congé accordées aux employés conjoints, ni quant au nombre de congés qui peut être donné à chacun d’eux; Mme Landry visait l’équité, et non l’uniformité. Mme Landry n’a vu aucun rapport statistique sur les congés attribués durant la crise du verglas; elle est certaine qu’il n’y en a pas eu à la direction des soins infirmiers.

Mme Landry a été directrice intérimaire des soins infirmiers du 21 janvier au 19 février 1998. Par la suite, ce fut Mme Jetté, du 20 février au 10 mars 1998. Lorsque Mme Préfontaine est revenue le 23 mars 1998, Mme Landry a continué à assumer la responsabilité du dossier des absences dues à la crise du verglas.

Mme Landry a identifié la pièce E6 comme étant une copie d’extraits de procès- verbaux de rencontres du CEG. Ces extraits traitent des mentions concernant les absences et les congés découlant à la crise du verglas. Mme Landry explique la mention « les cas pathétiques seront présentés à la DG [Directrice Générale] » en disant qu’ils étaient ceux qui étaient les plus complexes ainsi que ceux qui étaient différents des autres, comme celui de M. Bouchard.

M. Jean Lajeunesse fut le deuxième témoin de l’employeur. Il est employé à la Fonction publique depuis 1976 et œuvre en relations de travail depuis 1981. Il travaille à l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue depuis 1990 ou 1991. Il est le chef des relations de travail et de la rémunération à l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue. Son rôle consiste à conseiller la gestion dans les relations de travail et à faire l’étude des griefs au deuxième palier de la procédure des griefs.

M. Lajeunesse a rédigé le communiqué concernant les absences durant la crise du verglas qui a été distribué au personnel (pièce E-1). M. Lajeunesse a aussi rédigé, à la demande du CEG, la pièce E-2, qui se voulait un document de réflexion pour aider à gérer la situation. Ce document et la pièce E3 ont été présentés au CEG vers les 15 ou 16 janvier 1998. Les documents ont été approuvés dans leur forme actuelle par le

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Décision Page 19 CEG, qui a peut-être changé un mot ou deux à la recommandation faite par M. Lajeunesse.

Selon M. Lajeunesse, les chefs de service n’ont pas reçu officiellement le pouvoir d’octroyer des congés spéciaux; par contre, dans l’instrument de délégation ministérielle, une disposition précise qu’on peut leur déléguer ce pouvoir. Lors de la rencontre du CEG du 15 ou 16 janvier 1998, il a été décidé que les chefs de services auraient la responsabilité de faire une étude exhaustive de chacune des demandes qui leur seraient présentées et, comme la gestion était consciente d’un problème de « relativité », leurs décisions devaient être entérinées par les directeurs.

M. Lajeunesse a été mandaté pour rencontrer les chefs de service. Il les a rencontrés en plusieurs groupes et il a aussi rencontré les représentants de l’Alliance de la Fonction publique du Canada l’Alliance ») et de l’Institut pour expliquer la philosophie de la gestion par rapport aux demandes de congé. La pièce E-3 a servi à la rencontre avec les chefs de service, auxquels M. Lajeunesse a remis les pièces E-2 et E-3, en leur disant qu’un communiqué « sortirait promptement » pour tous les employés.

M. Lajeunesse n’habitant pas une zone sinistrée, il ne s’est pas absenté du travail à cause de la crise du verglas.

En contre-interrogatoire, M. Lajeunesse déclare que, à sa connaissance, M. Kader a assisté à une des rencontres avec les chefs de service, entre le 16 et le 19 janvier 1998. M. Lajeunesse croit que les directrices adjointes ont le pouvoir d’octroyer des congés spéciaux.

Plaidoirie du fonctionnaire s’estimant lésé M e Gosselin plaide que c’est à tort que Mme Landry établit un lien direct de cause à effet entre les demandes de congé de M. Bouchard et le fait qu’il possède une bergerie et a consacré beaucoup de temps à ses moutons. M e Gosselin se fonde sur la décision House (dossier de la Commission n o 166-2-10320), où, nous dit-elle, on a traité d’une clause identique à celle dont il est question ici. Dans House (supra), il s’agissait d’une tempête de neige, alors que le plaignant travaillait à un emploi extérieur dans ses temps libres; il était pilote et a été pris dans une tempête de neige et

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Décision n’a pas pu revenir pour se présenter au travail. M paragraphe, en troisième page :

La demande de congé spécial a été refusée par M. Stannix, le directeur de l’aéroport, parce que M. House « avait une autre occupation ou un autre métier qui risquait de l’empêcher d’exercer les fonctions pour lesquelles il était employé ». Il a déclaré que, si la tempête avait empêché ce dernier de rentrer au travail, c’était lui qui s’était placé dans une telle situation. De plus, ce n’était pas la première fois qu’il demandait un congé spécial en pareilles circonstances. De fait, en juin 1978, il avait été réprimandé pour avoir été « retenu par une tempête » deux fois auparavant et on l’avait alors averti que cela ne devait plus se produire.

M e Gosselin souligne que, dans la pièce S4f, « c’est exactement ce qui est reproché à M. Bouchard, le fait d’avoir une occupation parallèle ». M e Gosselin invite ensuite à lire le troisième paragraphe, à la page cinq, dans House (supra) :

Me Dagger a laissé entendre que, d’après les décisions rendues dans de nombreuses affaires, l’employé en cause n’avait pas pris de risque en l’occurrence, et l’employeur doit en pareils cas mener une enquête et user de discernement pour prendre une décision.

Elle réfère aussi au premier paragraphe de la septième page pour entrer dans le vif du sujet :

L’avocate a fait valoir que la « causa causans » en l’espèce n’était pas la tempête, mais plutôt le fait que l’employé en cause avait choisi d’avoir une seconde « occupation » qui l’exposait davantage au risque d’être retenu par une tempête. Que le ciel n’ait pas été couvert quand il est parti de Goose Bay n’a pas d’importance. En exerçant son second métier, il a pris le risque de ne pouvoir revenir. Comme il avait déjà été retenu par des tempêtes par le passé, il aurait prévoir cette éventualité. […]

M e Gosselin me réfère à la conclusion et aux motifs de la décision House (supra), aux deuxième et troisième paragraphes en neuvième page, au premier paragraphe de la onzième et à la douzième pages, qu’elle considère fondamentaux et souligne que ce grief a été accueilli. M e Gosselin indique que le libellé de l’article 17.14 de la convention collective doit se lire conjointement avec le texte apparaissant à la page 2 de la politique de l’employeur, (pièce E-1), à l’effet que « Ce congé est accordé à la discrétion de l’employeur mais ne doit pas être refusé sans motif valable ». « C’est le lien que s’est donné l’employeur en interprétant la clause », déclare M e Gosselin. Commission des relations de travail dans la fonction publique

Page 20 e Gosselin nous réfère au cinquième

Décision Page 21 M e Gosselin souligne que la demande de M. Bouchard était légitime, qu’elle découlait de circonstances exceptionnelles et qu’elle devait être examinée pour déterminer s’il commettait un abus. Rien dans la preuve n’a laissé soupçonner qu’il soit un abuseur, et la gestion a qualifié son cas de situation « pathétique ».

Cette distinction de cause à effet que fait l’arbitre dans House (supra) est fondamentale. On ne peut attribuer l’absence de M. Bouchard à de la négligence, à une faute personnelle ou à aucune autre raison; la raison en est la crise du verglas. N’eut été de la tempête de verglas, le fait que M. Bouchard soit propriétaire de bergerie n’aurait jamais eu de conséquences sur son travail.

M e Gosselin fait valoir que ce premier argument est le plus important, car le dossier repose sur une méprise fondamentale, à laquelle elle m’invite à ne point succomber. M e Gosselin allègue que M. Bouchard n’a rien à voir avec la « tempête », qui a duré trois semaines, qu’il n’y avait pas de distinctions entre la première et la troisième semaine de la crise du verglas et que les motifs de son absence n’ont rien à voir avec la bergerie, mais avec la panne de courant.

M e Gosselin me renvoie ensuite à la décision Critch (dossier de la Commission n o 166-2-13526) et soutient que l’employeur n’a pas tenu compte de toutes les circonstances motivant l’absence et que la demande de congé spécial a été refusée sans motif valable. L’employeur est obligé d’examiner et de tenir compte de toutes les raisons fournies par l’employé et toutes les circonstances qui justifient son absence. M e Gosselin se reporte à la pièce S4f, où, pour justifier le refus, l’employeur invoque une seule raison et ne fait pas référence au fait que M. Bouchard a évacué sa demeure, qu’il a prendre en charge la famille de sa fille, qu’il devait continuer d’entretenir et d’assumer la surveillance de son domicile, situation qui a duré jusqu’au 23 janvier 1998. M e Gosselin considère que l’enquête dans le cas de M. Bouchard a été « expédiée, ficellée de façon hâtive ». Elle ajoute que la raison du refus, en l’absence d’une enquête complète, ne peut être que déraisonnable.

La décision House (supra) traite d’un cas l’employeur s’est mépris sur la cause de l’absence, c’est-à-dire de mauvaises conditions météorologiques. La décision Critch (supra), quant à elle, reconnaît l’obligation de l’employeur de tenir compte de toutes les circonstances entourant une demande de congé. Dans le cas de M. Bouchard, Mme Landry a été absolument incapable de dire ce qu’il aurait pu faire autrement : « elle est demeurée bouche bée à la question : « Que vouliez-vous qu’il Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 22 fasse? » ». Il n’était pas possible pour M. Bouchard de retourner au travail, et à l’impossible, nul n’est tenu.

M e Gosselin réfère aux paragraphes quatre et six de la décision Critch (supra) et me renvoie au témoignage, « tout confus qu’il était », de M. Kader, ce dernier a rassuré M. Bouchard en lui disant de s’occuper de sa famille, que c’est ce qui était important. M. Bouchard prétend que M. Kader lui a dit que jusqu’à « cinq jours seraient accordés », alors que ce dernier ne se rappelle pas avoir dit cela. Entre celui qui affirme et celui qui ne se rappelle pas, M e Gosselin fait valoir que le droit de la preuve privilégie celui qui affirme. De toute façon, la règle du cinq jours se retrouve à la page 2 de la pièce E-3.

M. Bouchard n’a pas inventé le « cinq jours ». La probabilité que M. Kader ait mentionné que « jusqu’à cinq jours seraient accordés » est très forte. Cette question est très importante, car M. Bouchard s’est fié à cette affirmation; il a été induit en erreur. Pourquoi devrait-il en faire les frais? « Jusqu’à cinq jours, pas de problème, c’était un minimum », affirme M e Gosselin en référant, aux pages 7 et 8, aux paragraphes 11 et 12 de la décision Critch (supra). Le paragraphe 12 traite de la question de l’enquête. Les circonstances de la demande de M. Bouchard n’ont fait l’objet d’aucune enquête. Il n’y a pas eu de rapport d’enquête. Le seul document mis en preuve est la lettre du 31 mars 1998, qui réduit injustement les motifs de l’absence à un seul. Si enquête il y a eu, ce fut une enquête biaisée, incomplète, injuste et la décision qui s’en est suivie était injustifiée. M e Gosselin réfère à la phrase suivante, au quatorzième paragraphe de la décision Critch (supra) : « Il est aussi admis que si cette raison est une tempête de neige, il s’agit alors d’un cas de force majeure ». Elle réfère aussi au paragraphe 25 :

[…] Et l’employeur, après avoir tenu compte des principaux facteurs, doit agir de façon raisonnable lorsqu’il détermine si la demande de congé spécial de l’employé est justifiée. […]

M e Gosselin réfère aussi à la dernière page de la pièce E5, qui est un message électronique de Mme Babin. La décision de ne pas accepter une recommandation devait être appuyée par des motifs écrits. L’employeur a bâclé l’enquête, « cela a été fait à l’emporte-pièce », on n’a pu accorder une attention appropriée à chacune des demandes en procédant ainsi. M e Gosselin mentionne le paragraphe 28 de la décision Critch (supra), qui stipule que « la manière dont la décision est prise, de même que les

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Décision Page 23 motifs sur lesquels cette décision se fonde, peut suffire à établir que le congé spécial a été refusé sans raison valable ».

M e Gosselin réfère ensuite à la décision Bailey (dossier de la Commission n o 166- 2-13150), qui est un cas de maladie dans la famille, qui se lit ainsi, au paragraphe 5 :

[…] Elle a discuté de cette demande de congé avec son superviseur, l’inspecteur Jackson. Ce dernier lui a dit qu’elle obtiendrait le congé demandé (5 jours). Mais une seule journée de congé (spécial) a été accordée à Mme Bailey.

et au paragraphe 10 : […] L’octroi d’une journée de congé était un geste de pure forme. M e Dagger a ajouté que la demande de l’employée s’estimant lésée remplissait toutes les conditions établies par l’arbitre David M. Beatty dans l’affaire H.D. Andrew (dossier de la Commission no 166-2-1786). Ces conditions sont les suivantes […]

Selon M e Gosselin, l’octroi de deux jours de congé spécial accordés à M. Bouchard est une question de pure forme. M e Gosselin cite le paragraphe 18 de la décision Bailey (supra) : « Des congés spéciaux doivent être accordés dans les situations imprévues et non pour des événements prévisibles », et souligne que le verglas et ses conséquences ne sont pas prévisibles. M e Gosselin s’appuie sur le paragraphe 28 de la décision Bailey (supra) pour étayer la conclusion que le grief de M. Bouchard devrait être « alloué ».

M e Gosselin se reporte ensuite à la décision Roberge (dossier de la Commission n o 166-2-15444), plus particulièrement à l’avant-dernier paragraphe : Dans les circonstances de cette affaire, l’employeur s’est entêté à refuser d’accepter le certificat médical du Dr. Veillette et tout autre document que M. Roberge a produit à l’appui de sa demande de congé. Je trouve cet entêtement arbitraire et injuste. […]

Selon M e Gosselin, l’employeur s’est entêté à ne voir que le fait que M. Bouchard se soit occupé de ses moutons. Cette décision est donc arbitraire et abusive.

Finalement, M e Gosselin se réfère à l’avant dernière page de la décision Deschamps (dossier de la Commission n o 466-H-170) : Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 24 […] Je conclus que M. Deschamps a été amené à croire par son superviseur, M. Kusters, qu’il obtiendrait toute une journée de congé payé. C’est ce qu’il a affirmé, et son témoignage n’a pas été contesté puisque M. Kusters n’a pas comparu. Étant donné l’affirmation de ce dernier, je conclus que M. Deschamps n’a pas eu tort de se fier à la déclaration de son superviseur selon laquelle il obtiendrait la journée de congé.

[…] ainsi qu’à la dernière page : […] […] L’employeur aurait tenir uniquement compte des circonstances à l’origine de la demande plutôt que du fait que M. Deschamps avait obtenu un congé par le passé dans des cas semblables. De toute évidence, la durée du congé doit être directement liée à la situation dans laquelle se trouve l’employé. Si l’employeur n’évalue pas la demande en fonction des circonstances qui la motivent, il n’exerce pas son pouvoir discrétionnaire comme il le doit.

Je suis d’avis que les facteurs invoqués par l’employeur pour refuser le congé payé ne sont pas raisonnables compte tenu des circonstances.

[…] M e Gosselin souligne que, premièrement, M. Bouchard a eu droit à deux jours de congé spécial de façon automatique et que, deuxièmement, on lui a laissé croire qu’il aurait droit à cinq jours additionnels de façon « quasiment automatique ». Donc, on l’a induit en erreur. Troisièmement, l’employeur reconnaît que, bien que le cas de M. Bouchard soit « pathétique », émouvant, impressionnant il n’a pas justifié l’octroi d’un congé spécial; « si une certaine justice existe encore, il doit être fait droit au grief ».

Plaidoirie de l’employeur M e Arcelin plaide qu’il n’y a aucune preuve au dossier à l’effet que l’employeur ait exercé sa discrétion de façon inappropriée. Il faut s’en tenir au libellé de la clause 17.14 de la convention collective. L’employeur peut accorder un congé payé, à sa discrétion, mais deux éléments-clefs interviennent : dans un premier temps, il faut

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Décision Page 25 que le congé soit demandé pour des « fins autres que celles qui sont indiquées dans la présente convention collective » et, deuxièmement, que « des circonstances qui ne sont pas directement attribuables à l’employé l’empêchent de se rendre au travail ».

M e Arcelin soutient qu’il y a une distinction entre les circonstances du cas de M. Bouchard et celles des causes citées par M e Gosselin. D’abord, il y a la discrétion de l’employeur, qui a été exercée adéquatement, et les circonstances qui ont empêché M. Bouchard de se présenter au travail, qui lui sont attribuables. Il suffit de lire la pièce S4e pour voir que M. Bouchard a circulé énormément entre sa résidence, celle de sa fille et sa bergerie. M e Arcelin soutient que M. Bouchard aurait pu se rendre au travail puisqu’il a été démontré que sa résidence se trouvait à 45 minutes du travail, celle de sa fille à 25 minutes, et sa ferme, entre 20 et 30 minutes. M. Bouchard travaillait sur le quart du soir, les pièces S4c et S4e décrivent clairement les motifs soumis pour obtenir le congé spécial en question. Il a été démontré que M. Bouchard n’a fait aucun effort pour se rendre au travail et son témoignage ne laisse aucun doute à ce sujet.

M. Bouchard pouvait respecter son obligation statutaire de s’occuper des animaux de bien des façons et, s’il avait été plus prévoyant, comme M. et Mme Landry, les Breault et les Poupart, il se serait doté d’une génératrice.

Pour ce qui est du fait que M. Ahmad Kader aurait induit M. Bouchard en erreur, M e Arcelin indique que le témoignage de M. Kader contredit celui de M. Bouchard quant au fait qu’il aurait dit à ce dernier qu’il aurait cinq jours de congé sans problème. Les représentations du fonctionnaire s’estimant lésé ne tiennent pas, car elles contredisent la preuve testimoniale. M. Bouchard a très bien pu croire qu’il aurait droit à cinq jours de congé spécial du fait de la pièce E-1, puisqu’il a été prouvé qu’il a consulté ce document avant de soumettre sa demande de congé à l’employeur. Il est plausible que l’information ait été trouvée dans ces documents. De plus, comme délégué syndical, M. Bouchard était au fait des règles applicables à l’octroi de congés spéciaux.

M e Arcelin soulève, comme point crucial concernant la pièce S4a, le fait qu’il n’a pas été mis en preuve que l’octroi par Mme Babin du congé spécial demandé par M. Bouchard pour le 9 janvier lui ait été communiqué. Il a été clairement établi, lors de l’interrogatoire de M. Bouchard, que le congé a été refusé et que, suite à cela, il a

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Décision Page 26 présenté une seconde demande (pièce S4d) couvrant le 9 janvier 1998; cette preuve est la seule traitant de l’acceptation ou du refus de ce congé. Il ne fait aucun doute que le congé a été refusé.

M e Arcelin s’est ensuite appliqué à commenter, dans l’ordre, les éléments soulevés par le fonctionnaire s’estimant lésé. Premièrement, quant au lien de causalité, la décision House (supra) est très différente de la présente affaire; l’activité du pilote qui s’est vu pris à cause de conditions climatiques diffère de la situation de M. Bouchard. Dans l’affaire House (supra), il est mentionné, à la page 11, qu’un employé doit être « prévoyant » et « prudent ». M. Bouchard n’a été ni prévoyant ni prudent dans les circonstances. À la page 12, on parle d’abus. M e Arcelin plaide que la question à trancher est de savoir s’il s’agit ou non d’abus dans le cas de M. Bouchard.

Au sujet de l’argument selon lequel la convention collective est indissociable de la pièce E-1, il faut tenir compte du fait que la pièce E-1 s’adressait aux employés en général et que le ministère des Anciens combattants fait affaire avec deux agents négociateurs différents et deux conventions collectives différentes. Dans le cas présent, c’est le libellé de la convention collective de l’Institut qu’il faut regarder.

En réponse à l’argument de M e Gosselin à l’effet que l’employeur se soit mépris sur la cause d’absence de M. Bouchard, M e Arcelin souligne qu’il n’y a aucune preuve à cet effet. L’employeur a expliqué, au meilleur de sa connaissance, le processus d’octroi et de refus des congés spéciaux. Il ne faut pas oublier la situation d’urgence que connaissait l’Hôpital Sainte-Anne de Bellevue à cette époque. Dans l’analyse de toutes ces circonstances, l’employeur a été diligent; il a fait preuve de souplesse et d’équité en fonction des circonstances applicables à chaque cas.

M e Arcelin réfère au paragraphe 25 de la page 16 de la décision Critch (supra), il est question des principaux facteurs à considérer lors d’une demande de congé spécial. L’employeur n’a aucune obligation de prendre en compte toutes les circonstances entourant une demande de congé, mais seulement les circonstances principales. En ce qui concerne la pièce S4f, Mme Landry a expliqué les raisons de sa décision, la principale étant l’entreprise d’élevage de M. Bouchard.

De façon générale, la jurisprudence soumise par M conventions collectives de l’Alliance, qui diffèrent de celle de l’Institut. Au sujet de

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e Gosselin fait référence aux

Décision Page 27 l’argument selon lequel l’octroi de deux jours de congé spécial n’était qu’une question de forme, M e Arcelin soutient que la preuve ne démontre pas cela : le témoignage de Mme Landry est très concluant.

M e Arcelin est d’accord avec le principe énoncé à la page 11 de la décision Roberge (supra), selon lequel « chaque cas est un cas d’espèce ».

M e Arcelin souligne que M. Bouchard est copropriétaire d’un « commerce » et demande si l’employeur doit assumer le coût des choix de M. Bouchard et de son « beau-fils » afin d’éviter des mesures disciplinaires à ce dernier? M e Arcelin répond par la négative. M e Arcelin rappelle que la conjointe de M. Bouchard a obtenu trois jours de congé spécial, le tout analysé en parallèle avec la demande de congé présentée par ce dernier, et que leur fille a décidé de se rendre à son travail afin de ne pas être congédiée. L’employeur ou les contribuables doivent-ils assumer les frais de ces décisions?

M e Arcelin dépose cinq causes de jurisprudence. D’abord Tessier (dossier de la Commission n o 166-2-14199), où, dit-il, « la même convention collective est applicable ». Il réfère au bas de la page 15 et à la page 16. Ensuite, il renvoie à la page 11 de la décision Gale (dossier de la Commission n o 166-2-14631). M e Arcelin déclare que la preuve démontre que M. Bouchard n’a pas fait d’effort pour se rendre au travail. M e Arcelin présente la décision Cantin (dossier de la Commission no166-2-10291) et soutient que les principes qui y sont décrits à la page 9 s’appliquent véritablement au cas de M. Bouchard. Selon M e Arcelin, un arbitre n’a pas le droit d’intervenir dans l’exercice de la discrétion de l’employeur s’il n’y a pas de preuve que la décision est totalement déraisonnable. M e Arcelin réfère aussi à la page 9 de la décision Martin et Hamel (dossiers de la Commission n os 166-2-14835 et 166-2-14836). Il réfère enfin à la page 18 de la décision Chutter (dossier de la Commission n o 166-2-15160), la décision de ne pas recourir aux services de sa belle-mère était directement attribuable au fonctionnaire s’estimant lésé. M e Arcelin allègue que les choix familiaux de M. Bouchard lui sont directement attribuables et que, pour cette raison, le grief doit être rejeté.

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Décision Page 28 Motifs de la décision L’article 17.14 de la convention collective, intitulé « Autres congés payés », se lit ainsi : À sa discrétion, l’employeur peut accorder un congé payé pour des fins autres que celles qui sont indiquées dans la présente convention collective, y compris l’instruction militaire, les cours de formation en protection civile et les situations d’urgence touchant la localité ou le lieu de travail et lorsque des circonstances qui ne sont pas directement attribuables à l’employé l’empêchent de se rendre au travail.

La première condition pour que cet article soit applicable est que le congé soit pour « des fins autres que celles qui sont indiquées dans la présente convention collective ». Si l’absence du fonctionnaire s’estimant lésé pouvait faire l’objet d’une demande en vertu d’un autre article, comme par exemple l’article 16 sur les congés de maladie, l’article 17.14 ne pourrait s’appliquer.

La deuxième condition, puisqu’il ne s’agit pas ici d’instruction militaire ou de cause de formation en protection civile, est la présence d’une situation d’urgence touchant la localité ou le lieu de travail. La troisième condition est que « des circonstances qui ne sont pas directement attribuables à l’employé l’empêchent de se rendre au travail. »

La preuve révèle que M. Bouchard a fait face à une situation d’urgence lorsqu’il a évacuer sa maison le 7 janvier 1998 et que la demeure de sa fille, il s’était réfugié, a connu une panne de courant le soir même. Le 8 janvier 1998, M. Bouchard a s’organiser à son domicile, à celui de sa fille et à sa bergerie, car la panne de courant causée par la tempête de verglas a touché les trois endroits. M. Bouchard a décrit son emploi du temps à compter du 9 janvier 1998, de 7 h 30 à 21 h 30, touchant à la surveillance de son domicile, au chauffage de celui de sa fille et au soin de ses brebis. Le soin des brebis prenait de sept à huit heures de son temps à tous les jours. M. Bouchard a admis à l’employeur que, n’eut été le temps requis pour soigner ses brebis, il aurait pu prendre le repos nécessaire pour lui permettre de travailler son quart de nuit.

La question devient alors de savoir si le soin des brebis est une circonstance directement attribuable à M. Bouchard au sens de l’article 17.14 de la convention collective? Le fardeau de la preuve incombait au fonctionnaire s’estimant lésé : il Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 29 devait prouver qu’il n’avait pas eu d’autre choix que de consacrer sept à huit heures par jour au soin des brebis. Il ne s’en est pas acquitté. M. Bouchard a déposé l’article 55.9.2 de la Loi sur la santé des animaux (supra) mais n’a produit aucune preuve sur les impératifs biologiques des moutons. Les brebis pouvaient-elles vivre en ne buvant qu’une fois par jour, ou moins? M. Bouchard n’a fourni aucune preuve à ce sujet, si ce n’est de nous dire que les brebis avaient passé 36 heures sans boire au début de la panne. M. Bouchard n’a nullement indiqué que ces 36 heures sans boire ont eu des effets négatifs sur les brebis, ni que lui-même se soit, de ce fait, exposé à des poursuites en vertu de la Loi sur la santé des animaux. M. Bouchard a plutôt laissé sous-entendre qu’il soignait normalement ses brebis deux fois par jour et que ces opérations prenaient d’une demi-heure à trois quarts d’heure à chaque fois. Il semble donc que M. Bouchard ait voulu poursuivre les opérations habituelles, mais sans nous faire la preuve qu’elles étaient nécessaires pour répondre aux impératifs biologiques des moutons, plutôt que pour satisfaire aux conditions optimales pour obtenir le meilleur rendement de son cheptel. De plus, la preuve a révélé que le gendre de M. Bouchard était copropriétaire des moutons, qu’il travaillait de 6 h 00 à 11 h 00 et de 17 h 00 à 20 h 00 et que l’interdit de travail en raison de son état de santé avait pris fin le 12 janvier 1998. M. Bouchard et sa famille savaient définitivement, le 17 janvier 1998, que la panne de courant durerait encore des semaines, puisqu’ils en avaient été informés par le journal « 1 ère Édition » du samedi, 17 janvier 1998, qui en a fait état et qui a été déposé comme pièce S2. M. Bouchard a témoigné à l’effet que le coût d’une génératrice s’avérait exorbitant, mais il n’a décrit aucune démarche qu’il aurait entreprise pour obtenir d’autres formes d’éclairage pour la ferme, ce qui lui auraient permis de partager avec son gendre les tâches de nourrir et d’abreuver les brebis plus tôt, de manière à ce que M. Bouchard puisse s’en occuper en se rendant ou en revenant de son travail, alors que son gendre aurait pu le faire avant de reprendre son quart de travail l’après-midi, si vraiment il était impératif que les brebis boivent deux fois par jour. M. Bouchard a dit qu’il n’avait trouvé personne pour faire ce travail, mais n’a présenté aucune preuve des efforts faits pour embaucher du personnel pour s’occuper de son entreprise à sa place ou à la place de son gendre. La décision de faire lui-même ce travail est attribuable à M. Bouchard, en l’absence de preuve que ni son gendre ni personne d’autre n’aurait pu le faire.

La situation d’urgence qui touchait les lieux de travail et de résidence de M. Bouchard n’était pas la cause directe de son absence. L’absence de M. Bouchard

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Décision Page 30 était due à son état de fatigue excessive, suite aux tâches qu’il accomplissait le jour en raison de la panne de courant qui affectait son domicile et sa bergerie. L’employeur reconnaît, à la pièce S4f, qu’une demande de congé de maladie serait acceptée si M. Bouchard le demandait. La preuve a révélé que M. Bouchard ne pouvait faire un quart de nuit après une longue journée stressante de dur labeur. J’en conclus donc que ce n’est pas la crise du verglas qui empêchait M. Bouchard de se rendre au travail, mais son incapacité à le faire après les journées qu’il a décrites.

L’article 16 de la convention collective traite des congés de maladie lorsqu’un employé est incapable d’exécuter ses fonctions en raison d’une maladie ou d’une blessure. L’article 17.14 stipule clairement qu’il s’adresse à « des fins autres que celles qui sont indiquées dans la présente convention collective ». Or, le congé de maladie figure à la convention collective. Le congé spécial ou « autre congé payé » ne s’applique donc pas à la situation de M. Bouchard.

J’ai lu attentivement les décisions soumises par les représentants des parties et je ne les trouve pas pertinentes à la présente affaire, car elles concernent toutes des conventions collectives dont le libellé diffère de celle devant moi.

Et en ce qui concerne l’argument à l’effet que M. Bouchard aurait agi en raison de représentations de son surveillant, qui lui aurait dit de prendre soin de sa famille et qu’il aurait droit à cinq jours de congé spécial, je trouve la preuve non concluante. Celle-ci révèle plutôt que l’employeur a fait preuve de compréhension et de générosité envers M. Bouchard et les employés affectés par les conséquences de la tempête de verglas, en leur permettant de s’absenter du travail sans crainte de perdre leur emploi, et en acceptant comme justifiées les actions qu’ils prenaient en dehors de leurs heures de travail et qui affectaient leur capacité physique à se rendre au travail. M. Ahmad Kader a catégoriquement nié avoir eu l’autorité voulue pour approuver un congé spécial et il ne se souvient pas avoir dit à M. Bouchard qu’il aurait droit à cinq jours de congé payé. Je considère que la preuve présentée par M. Bouchard à cet effet n’est pas concluante. Je conclus que M. Bouchard a probablement mal compris les propos de son surveillant. Ces propos visaient probablement à rassurer M. Bouchard que son emploi n’était pas en péril et que l’employeur n’exigeait pas qu’il choisisse entre son devoir envers sa famille et son devoir d’assistant-infirmier chef; ils ne constituaient probablement pas une promesse à l’effet qu’il jouirait d’un congé payé pour toute la période de la panne de courant ou pour un minimum de cinq jours.

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Décision Page 31 En ce qui concerne l’enquête faite pas l’employeur, je n’ai pas à me prononcer à ce sujet, car le fardeau incombait à M. Bouchard de prouver que l’article 17.14 de la convention collective s’appliquait à la situation pour laquelle il demandait un congé et il n’a pas satisfait à ce fardeau. Le grief est donc rejeté.

Evelyne Henry, présidente suppléante.

OTTAWA, le 20 mai 1999.

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